M. René Vandierendonck. Comprenons-nous bien : pour moi, n’auront d’avenir que ceux qui veulent se regrouper, favoriser la fluidité et mettre en place les conditions pour créer de plus grandes organisations administratives.

Je remercie le corapporteur sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, M. Hyest, de m’avoir autorisé à commencer les auditions, car je ne l’aurais pas fait sans son consentement. J’ai interrogé toutes les intercommunalités du pays et je n’en ai pas trouvé beaucoup m’annoncer spontanément : « Vivement que l’on nous transfère les compétences sociales du département ! » (Rires et applaudissements.)

Par ailleurs, et je ne suis pas schizophrène, il y a belle lurette que les départements s’intéressent à la question des solidarités territoriales : aujourd'hui, des dizaines, pour ne pas dire des centaines de communes ne tiennent que par la contractualisation avec les départements. On pourrait dire, et vous en avez eu la tentation, que cela ne concerne que la France rurale. Or M. le président de la commission spéciale a organisé l’audition de géographes. Plusieurs d’entre eux ont expliqué que cette « France périphérique », pour parler comme Christophe Guilluy – moi aussi, je le lis ! (Sourires. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) –, ne s’arrêtait pas au rural, mais concernait aussi le « périurbain subi », la cartographie des plans sociaux, la problématique de la centaine de villes petites et moyennes qui, depuis le mois de juin dernier, sont entrées, grâce au Gouvernement, dans la géographie prioritaire de la politique de la ville.

M. Bruno Retailleau. Venez avec nous !

M. René Vandierendonck. Il est évident que les départements, même s’il faut recentrer leurs compétences, ont un avenir.

Je partage tout à fait le constat établi dans le rapport de la Cour des comptes publié la semaine dernière : la coexistence de 8 965 syndicats intercommunaux, de 1 233 syndicats mixtes, qui regroupent quelque 65 000 agents, soit plus du tiers des personnels des établissements publics de coopération intercommunale, appelle une rationalisation dans le respect des personnels.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. On va le faire !

M. Jackie Pierre. Cherchez le bon capitaine !

M. René Vandierendonck. Ainsi, dans les départements où 80 % des communes adhèrent à une intercommunalité, celle-ci doit reprendre la compétence des syndicats. Cependant, dans un grand nombre de cas – je me suis livré à l’exercice –, nous aurons besoin des départements pour réorganiser la présence de services publics qui sont souvent essentiels.

M. le Premier ministre a été clair sur le devenir de l’intercommunalité et a manifesté sa volonté de prendre en compte la géographie humaine et physique. Sur cette question, il faut remercier le Gouvernement d’avoir donné des suites extrêmement précises à un certain nombre d’initiatives sénatoriales ; je veux saluer en cet instant Jean-Pierre Sueur, Jacqueline Gourault, Alain Richard et j’en oublie, c'est-à-dire tous les sénateurs qui ont permis que progresse l’intercommunalité sur les questions de contrat de gouvernance et de mutualisation ascendante, monsieur Dallier.

Je souhaite que cette réforme puisse nous permettre de retrouver, dès la première lecture du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, le climat de travail qui caractérise cette enceinte. Faute de quoi, mes chers collègues, d’autres décideront pour vous. (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de vos contributions, même si je ne répondrai pas à chacun d’entre vous. Le débat ne fait que commencer ; il s’agissait cet après-midi d’éclairer le Sénat sur les intentions du Gouvernement, d’apporter des clarifications et du sens.

Pourquoi en sommes-nous là ? Je reprends les termes qui ont été utilisés : illisibilité, millefeuille, crise démocratique. Cette dernière est sans doute due à des raisons plus graves, qui touchent aussi la démocratie locale. Il n’est qu’à voir les taux de participation aux élections, y compris locales, notamment aux dernières élections municipales. J’ai également entendu parler de crise économique, crise sociale, crise de confiance, crise identitaire. Mais nous connaissons déjà ces phénomènes depuis plus d’une dizaine d’années.

Des avancées incontestables en matière de décentralisation – ce terme, que personne ne remet véritablement en cause, a été, comme je l’ai rappelé, inscrit dans la Constitution – sont intervenues mais, progressivement l’empilement des compétences, l’absence de clarté en la matière, le rôle que les collectivités se sont arrogé elles-mêmes, au-delà des compétences qui leur étaient assignées, ont créé une illisibilité. Si nous sommes tous des spécialistes de ces questions, nos concitoyens, eux, s’y perdent, comme d’ailleurs la plupart des acteurs économiques et sociaux.

L’idée développée depuis un certain temps est moins de décentraliser – j’y reviendrai, c’est un mouvement qu’il faut le poursuivre – que de clarifier, ce qui n’a pas été fait depuis plusieurs années.

Par ailleurs, il y a une crise des finances publiques. Je veux bien que soient mises en cause les intentions budgétaires pour les collectivités du Gouvernement auquel sont demandées des explications, mais à la lecture des projets et des programmes des uns et des autres pour réduire la dépense publique, la clarification me paraît également nécessaire. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) Réaliser 100 milliards ou 150 milliards d’euros d’économies budgétaires ? Certes, mais cela concerne l’État, qu’il faut préserver, l’assurance maladie, indispensable à notre pacte républicain, et les collectivités, qui sont le cœur de notre démocratie. Il faut faire des choix ; nous les faisons, et ce n’est pas facile.

Parce qu’il y a crise des finances publiques, chacun s’interroge depuis quelques années sur la manière dont les collectivités territoriales, par leur organisation, peuvent contribuer à apporter une réponse à ce problème.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner à maintes reprises, et je souhaite le répéter clairement devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, quand François Hollande a été élu Président de la République en 2012, la situation était celle que vous connaissez : nous gouvernions, et gouvernons toujours, la plupart des régions, deux tiers des départements, de grandes métropoles. La gauche, qui avait tous ces pouvoirs, n’a pas su, au cours des campagnes présidentielle et législative, présenter un nouveau projet de décentralisation.

Nous avons tâtonné, nous avons commencé, comme je l’ai dit tout à l'heure, par les métropoles. Personne aujourd’hui ne conteste ce choix, le vrai sujet étant la manière dont on fait vivre les solidarités avec les autres territoires. Mais l’absence de lisibilité relevée au début, malgré le travail qui a été accompli au Sénat, les contradictions qui existent entre les associations d’élus – soyons les uns et les autres modestes –, entre les régions, les départements, les villes sont réelles.

Je me rends actuellement à tous les congrès. J’y consacre beaucoup de temps. J’écoute les élus, comme c’est mon rôle. Or, permettez-moi de vous le dire, quand j’écoute les élus, de quelque tendance politique qu’ils soient, la majorité sénatoriale, l’opposition nationale sur ces questions, je constate que les contradictions sont nombreuses. Et je pourrais vous citer un florilège de contradictions quant à la suppression des départements, par exemple. Notre rôle – il me paraît extrêmement important si nous voulons être utiles à notre pays – est d’essayer de dépasser ces contradictions.

Cela étant, il y a aussi des débats que je qualifierai pour ma part de « faux débats ».

Le premier d’entre eux porte sur la centralisation et la décentralisation. Mais la recentralisation n’est pas possible non seulement pour des questions budgétaires et d’efficacité, mais tout simplement parce que ce n’est pas le sens du mouvement actuel. La gauche a porté la décentralisation depuis des années. Reprocher aujourd'hui au Gouvernement de vouloir centraliser, c’est lui faire un faux procès !

Un autre débat concerne le rôle des régions, mais il ne s’agit pas de recentralisation ; le sujet est autre. Ce à quoi le Gouvernement s’est engagé – je l’ai fait comme ministre de l’intérieur et Bernard Cazeneuve poursuit et amplifie ce mouvement –, c’est précisément donner à l’État et au préfet départemental un rôle accru, notamment en matière d’interministérialité. Qui a donné plus de pouvoirs au préfet de région, l’éloignant parfois du terrain, sinon la droite ? (Eh oui ! sur plusieurs travées du groupe socialiste. – M. Philippe Bas proteste.) Monsieur Bas, je sais que vous avez été élu et êtes devenu sénateur mais, ne l’oublions pas, cette mesure a été prise au cours du quinquennat précédent, pour des raisons que je peux comprendre, avec la mise en œuvre de la REATE.

M. Bruno Retailleau. Pourquoi alors vouloir revenir en arrière ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Retailleau, nous pensons que, notamment dans la coordination de l’interministérialité, il faut donner davantage de compétences aux préfets départementaux. Cette question de la proximité et du rôle de l’État est, pour moi, primordiale. Ce sont des choix qui ont été arbitrés non par moi mais par mon prédécesseur, Jean-Marc Ayrault. Nous avons considéré qu’il était important de réorganiser l’État, compte tenu de la situation dans laquelle il se trouve. Les administrations centrales sont aujourd’hui en très mauvais état sur le plan local, et ce, non pas depuis deux ans et demi, mais depuis un certain nombre d’années.

Comme je l’ai dit à plusieurs reprises, la réforme territoriale est une formidable occasion pour l’État de se réorganiser, non pas uniquement au travers de la simplification, même si c’est important, ou par le biais du numérique, qui représente évidemment un défi considérable, mais également en supprimant les doublons, et je reviendrai sur ce point.

En réalité, il s’agit non seulement de décentraliser, mais aussi de mieux organiser notre territoire. On l’a bien constaté – M. René Vandierendonck l’a d'ailleurs souligné voilà un instant – quand on a redéfini la politique de la ville. Si ce travail a été salué et accepté, me semble-t-il, à la quasi-unanimité dans cette enceinte comme à l’Assemblée nationale (MM. Claude Dilain et René Vandierendonck acquiescent.), c’était précisément parce qu’il a été tenu compte des évolutions géographiques, territoriales qui nous passionnent tous et auxquelles les uns et les autres vous avez fait allusion.

Donc, pas de faux débats !

D’autres défis s’imposent à nous : la capacité d’aménagement de nos collectivités territoriales, la solidarité, la proximité, et, sur ces points, nous pouvons tous nous retrouver.

Non, la France n’est pas un État fédéral et la République est une et indivisible dans la diversité. Il faut continuer à mener un travail d’écoute. C’est le rôle des Assises des ruralités. À cet égard, je n’ai pas compris, monsieur Mézard, le sort injuste que vous leur avez fait, égratignant au passage Mme Pinel (Rires sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.), car il faut essayer de trouver la bonne réponse à un problème majeur auquel est confronté notre pays et qui concerne tous les républicains que nous sommes.

Dans un monde aussi ouvert que celui d’aujourd'hui – ce que vous ne niez pas et que presque personne ne conteste –, dans une économie de marché, avec des concurrences exacerbées, comment maintenir des solidarités fortes, un rôle de la puissance publique, qu’elle soit exercée par l’État ou par les collectivités territoriales, et la proximité ? (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Madame Assassi, personne ne nous le demande ! Ni un comité caché – éloignez-vous des thèses complotistes ! – ni la Commission européenne. La fracture entre le monde ouvert, que je viens d’évoquer, et le sentiment d’abandon et d’absence de protection que ressentent nos concitoyens dans tous les territoires, y compris dans des régions puissantes comme l’Île-de-France, est une réalité.

La manière dont nous devons résorber cette fracture doit constituer l’obsession préexistante à ces grandes régions que nous voulons créer, à ces métropoles qui vont se mettre en place – notamment Rennes, que j’ai oublié de citer tout à l’heure – au 1er janvier prochain. Cette réalité, beaucoup d’entre vous la vivent au sein des territoires que vous représentez. Pour y mettre fin, il faut non pas un État fédéral, mais une République décentralisée qui s’efforce de répondre à toutes les questions qui ont été évoquées précédemment.

Par ailleurs, je suis pour la recherche du consensus avec le Parlement, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, non par principe, mais parce que je pense que, après cette phase de débats, d’échanges d’idées, cette période peut-être plus chaotique pour certains, nous devons remettre de l’ordre. C’est ce que j’ai essayé de faire.

Il ne s’agissait pas de tout dire. Ce soir commencera l’examen, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la délimitation des régions, puis viendra ultérieurement celui du projet de loi portant sur les compétences.

Quoi qu’il en soit, je pense qu’il y a un consensus sur le développement de l’intercommunalité. À ce sujet, j’ai dit de manière très explicite, notamment devant les élus de la montagne, que le seuil des 20 000 habitants pourrait évoluer. Toutefois, je vous mets en garde, car deux critiques sont justifiées : il faut être attentif, dans un cas, à ne pas fixer un seuil trop élevé, notamment là où on sait qu’on ne peut pas l’atteindre, et, dans l’autre, à éviter le morcellement de l’intercommunalité, qui est aussi une réalité dans certains départements. Donc, il faut trouver la bonne solution. Je ne doute pas que nous y parviendrons.

Cela étant, je suis convaincu que, sur la base du rapport Raffarin-Krattinger, dont je perçois bien la cohérence et dont je n’oublie pas les éléments, nous pouvons avancer dans le domaine de la construction de grandes régions – je n’ai pas très bien compris la diatribe de M. Bas contre les régions – compétentes en matière de développement économique notamment, dotées d’une fiscalité économique.

Selon certains, nous aurions dessiné cette carte des régions sur un coin de table à l’Élysée !

Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Mais c’est vrai !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Et alors ! (Ah ! sur les travées de l’UMP.) Vous auriez voulu que j’accomplisse le chemin inverse et que je consulte les régions, une par une, pour faire ce travail ? Il fallait bien mettre une proposition sur la table ! Elle a été examinée d’abord par l’Assemblée nationale et le Sénat va maintenant en débattre.

Mme Sylvie Goy-Chavent. Il fallait écouter les élus territoriaux !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Pour répondre à une remarque formulée par M. Mézard et, me semble-t-il, par M. Zocchetto, je souligne que le Gouvernement a trouvé à l’Assemblée nationale sur ce sujet une majorité assez large, dépassant même les clivages politiques.

En déposant au Sénat un amendement visant à revenir à la carte votée par les députés – le ministre de l’intérieur sera évidemment à votre écoute lorsqu’il défendra cet amendement –, le Gouvernement est cohérent.

M. Bruno Retailleau. Mais ce n’est pas adroit !

M. Manuel Valls, Premier ministre. On ne peut pas à la fois nous dire que nous devons avoir une ligne, un projet, du sens et nous reprocher ensuite notre cohérence ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-François Husson. Vous fermez le débat !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Personne – pas plus vous, mesdames, messieurs les sénateurs, que qui que soit sur les bancs de l'Assemblée nationale – n’imaginait que nous aboutirions à une telle carte régionale. Or en quelques semaines, elle a été mise au point. Elle peut connaître des évolutions, mais je me permets de vous rappeler que les contradictions à son égard existent dans toutes les familles politiques.

M. Jean-François Husson. Ce n’est pas une raison !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Pour ce qui concerne la clarification des compétences que les citoyens nous demandent, je pense que, sur ce point aussi, nous pouvons avancer. Le Gouvernement y est prêt tant lors du débat sur les compétences et que sans doute après, au moment de la révision des politiques publiques. Nous pourrons supprimer un maximum de doublons.

Je le répète, la présente réforme territoriale doit être aussi l’occasion d’une réforme de l’État. Donc, il faut avancer. (M. Jean-François Husson s’exclame.) Monsieur le sénateur, certains d’entre vous ont été surpris par mon propos, comme l’ont montré vos interruptions, voire vos interventions qui avaient été préparées avant mon discours liminaire.

M. Jean-Claude Lenoir. Non, elles n’étaient pas lues !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je ne parle pas des brillantes interventions qui ont été faites sans notes !

Je le dis clairement, le Gouvernement est ouvert sur la clarification des compétences des collectivités comme sur la suppression des doublons. L’État doit évoluer, j’en suis convaincu.

Enfin, ce qui nous rassemble, c’est évidemment le rôle des communes, mais des évolutions peuvent intervenir. Je l’ai dit notamment à propos du rôle du maire, en évoquant deux propositions de loi qui défendent l’idée de création de communes nouvelles, l’une déposée par le président de l’Association des maires de France, et l’autre par une députée socialiste.

Eu égard à la diversité des territoires, doivent pouvoir être mises en œuvre des collectivités territoriales dotées de compétences qui tiennent justement compte de cette diversité. Que les idées soient claires sur le rôle des régions !

M. Bruno Retailleau. Et les départements ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. J’y viens. L’idée de supprimer les départements, ou plutôt les conseils généraux, n’est pas nouvelle.

M. Bruno Retailleau. L’erreur est partagée, à droite comme à gauche !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Pour la concrétiser, il faudrait une réforme de la Constitution.

Par ailleurs, à partir du moment où sont créées de grandes régions, où existent les métropoles, le débat sur l’échelon de proximité le plus adéquat pour mener les politiques permettant d’assurer la cohésion et la solidarité est parfaitement légitime. Certains considèrent que cet échelon est celui de l’intercommunalité, d’autres le département ; je ne veux pas trancher cette question.

Des semaines de débats que nous avons connues, il faut tirer la conclusion que le département a toujours cet avenir qui a été évoqué à l’instant.

Dans le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, il faudra avancer sur la question des compétences des départements. Sur ce point, j’ai dit l’essentiel dans mon intervention liminaire. J’ai évoqué une idée qui, même si elle doit être maniée avec délicatesse, me semble intéressante : celle de la fusion de deux départements. La question du regroupement se pose à l’échelon aussi bien des collectivités territoriales – les conseils généraux – que de l’État. Sans multiplier les exemples, je citerai la Drôme et l’Ardèche, ainsi que les deux Savoie. Sans envisager leur fusion, des départements étudient le sujet. Quant à l’État, il travaille au regroupement de services. Les chambres consulaires en sont un exemple déjà bien avancé.

En fixant une méthode et un calendrier sur cinq ans, il s’agit non pas de dire que, à l’issue de ce délai, les départements disparaîtront, mais de mener pendant cette période une série d’expérimentations, en fonction des situations différentes selon les départements. L’idée de garder un échelon qui permette la cohésion territoriale et sociale s’impose à tous. Vous l’avez compris, le Gouvernement n’entre pas dans ce débat en proposant la suppression des conseils généraux. Il ne pourrait pas le faire et, de toute façon, je ne suis pas certain que ce serait une bonne chose pour le pays. Je le répète, les situations seront différentes selon les régions et les départements. Je ne me présente pas devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, avec une idée précise, arrêtée ; je compte sur le travail du Parlement, notamment du Sénat.

Pour ma part, afin d’ouvrir le débat, j’ai pensé à trois cas de figure : « fondre » les départements dans des métropoles, faire gérer les conseils généraux par une fédération d’intercommunalités, conserver les départements à dominante rurale. Mais je ne suis pas sûr que ce soit la bonne formule. Si vous trouvez une solution plus efficace, je n’y vois pas d’inconvénient ! Je suis extrêmement ouvert au débat, comme le seront tous les membres du Gouvernement.

J’achèverai mon propos en abordant des points qui nous rassemblent, à savoir les vertus de la décentralisation, le rôle des élus et du Sénat, qui est au cœur de la réforme. M. Retailleau veut que l’on bouscule les clivages ; M. Zocchetto souhaite avancer, tout comme M. Guillaume, qui l’a dit avec force. Il y aura évidemment des oppositions, de fond comme de posture, mais je crois que nous pouvons aller de l’avant.

Monsieur le président, voilà quelques semaines, vous m’avez dit, tout comme au Président de la République, que vous souhaitiez que le Sénat, dans le cadre du bicamérisme et de nos institutions, joue pleinement son rôle. Moi aussi ! Je suis respectueux de nos institutions. Depuis deux ans et demi, comme ministre de l’intérieur puis comme Premier ministre, j’ai toujours respecté le rôle de votre assemblée.

Je suis convaincu – et je termine par là où j’ai commencé – que, dans l’intérêt des Français, nous pouvons bâtir un accord durable, non pas pour le défaire à l’occasion d’une alternance – il faut être prudent dans les pronostics –, mais simplement parce qu’il y va de l’intérêt général. Il nous reste beaucoup de travail à accomplir, mais tel est en tout cas mon état d’esprit. Je note que je partage cette volonté d’avancer avec tous les orateurs qui sont intervenus dans ce débat ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. Monsieur le premier ministre, mes chers collègues, je vous remercie d’avoir participé à ce débat utile, qui a permis de remettre les choses en perspective, avant d’entrer dans le vif de la discussion avec l’examen du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

Nous en avons terminé avec le débat sur la réforme territoriale.

La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. J’informe les membres de la commission spéciale que celle-ci se réunira à vingt heures quinze.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.)

PRÉSIDENCE DE Mme Jacqueline Gourault

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

7

 
Dossier législatif : projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral
Discussion générale (suite)

Délimitation des régions et élections régionales et départementales

Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral
Discussion générale (interruption de la discussion)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (projet n° 6, texte de la commission n° 43, rapport n° 42).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord d’excuser mon retard, consécutif aux événements de la journée. N’y voyez pas un geste de désinvolture de ma part à l’égard du Sénat : vous savez la passion que j’ai pour les débats de la Haute Assemblée, et vous connaissez mon désir d’y être toujours présent et, bien entendu, ponctuel.

M. Alain Joyandet. Vous êtes pardonné, monsieur le ministre !