Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, mes chers collègues, le groupe UDI-UC aborde ce projet de budget de la mission « Économie » avec des sentiments extrêmement mitigés. Nous apprécions les efforts du Gouvernement pour réduire les dépenses de fonctionnement, mais nous regrettons la baisse assez significative des dépenses d’intervention, qui risque d’être préjudiciable, en particulier, aux petites entreprises bénéficiant du FISAC ou d’autres programmes d’intervention de l’État.

À notre sens, il convient de faire davantage en faveur des entreprises, car les entrepreneurs ont perdu confiance. Le Premier ministre a eu beau souligner, lors de l’université d’été du MEDEF, qu’il aimait l’entreprise, force est de constater que la perception des choses, sur le terrain, est tout autre !

J’étais présent hier à Quimper au côté des chefs d’entreprise qui manifestaient devant la préfecture pour exprimer leur ras-le-bol face aux trop nombreuses contraintes qui leur sont imposées alors que les carnets de commandes sont peu remplis. Ils n’ont pas le sentiment que le Gouvernement agisse suffisamment pour restaurer la confiance et relancer l’économie de notre pays.

Que faudrait-il faire pour relancer l’économie ? Pour nous, membres du groupe UDI-UC, une baisse généralisée des charges sociales est nécessaire. Elle doit bien entendu être compensée par une augmentation de la TVA, car il ne s’agit pas d’aggraver le déficit de la France, qui est déjà préoccupant. Le but est de relancer l’économie en gardant le sens des responsabilités !

Vous me rétorquerez, monsieur le ministre, que vous avez institué le CICE et un certain nombre d’autres dispositifs. Il est clair, pour nous, que vos propositions ne sont pas de nature à restaurer la confiance parmi les chefs d’entreprise de notre pays.

En effet, le CICE profite essentiellement à des entreprises actives avant tout sur le marché national – je pense à La Poste ou aux groupes de la grande distribution –, et insuffisamment aux entreprises exportatrices, qui, elles, auraient besoin d’être beaucoup plus soutenues pour contribuer à une réduction significative du déficit de la balance commerciale française.

Le projet de budget qui nous est présenté prévoit également une réduction des crédits dévolus aux organismes consulaires. Si nous approuvons le principe d’une nécessaire contribution de tous à la résorption du déficit des comptes publics, nous ne pouvons accepter que les chambres consulaires voient leurs moyens d’action significativement réduits, à un point tel qu’elles ne seront parfois même pas certaines de pouvoir faire face à tous les engagements qu’elles ont pris, en particulier en matière d’investissements. Nous attendons donc du Gouvernement un certain nombre d’assurances à cet égard.

La mission « Économie » comprend aussi un programme « Plan "France très haut débit" ». Le groupe UDI-UC partage totalement l’ambition affichée pour le développement du numérique en France, mais nous considérons, monsieur le ministre, que les moyens mobilisés ne permettront pas d’atteindre l’objectif d’équipement du pays à l’horizon de 2022.

En Bretagne, un programme de déploiement de la fibre optique à l’horizon de 2030 a été mis en place, pour un coût de 2 milliards d’euros. Nous ne voyons pas comment, concrètement, avec 1,4 milliard d’euros en autorisations d’engagement et aucuns crédits de paiement pour 2015, il sera possible d’assurer une mise en œuvre extrêmement rapide du plan « France très haut débit ».

Un autre sujet de préoccupation, pour notre groupe, tient au fait que ce projet de budget prévoit une baisse de 8,6 % des dotations versées aux communes pour assurer, en 2015, les opérations de recensement pour le compte de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE. Une fois encore, il s’agit, ni plus ni moins, d’un transfert de charges aux collectivités locales, qui viendra s’ajouter à la diminution de leurs dotations.

Enfin, je voudrais évoquer la suppression proposée de l’IDD. Dans le fond, ce n’est pas une mauvaise mesure : le dispositif ne profite qu’à 1 330 bénéficiaires et d’autres solutions sont sans doute envisageables. Je suis tout à fait pour que l’on transfère cette charge au RSI, à la condition que le versement de l’IDD soit explicitement inscrit parmi ses attributions. Il faut que les choses soient claires !

De plus, il faut, en corollaire, supprimer la taxe sur les activités commerciales instituée en 1982 pour financer l’IDD. Dès lors que vous faites disparaître la dépense du budget de l’État, il n’y a aucune raison que vous conserviez une recette presque entièrement affectée au financement de cette prestation. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mesdames les secrétaires d’État, chers collègues, un Breton succède à un autre, mais je ne peux pas du tout approuver, pour ma part, que l’on propose d’augmenter encore, et sans distinction, les aides fiscales et de relever le taux de la TVA au détriment de tous nos concitoyens !

Je préciserai d’emblée que si je suis plutôt enclin à suivre le Gouvernement et à soutenir ce projet de budget, je reste réservé et attends de connaître l’issue de nos débats pour arrêter définitivement une position.

Mes chers collègues, je ne vais pas vous bombarder de chiffres fournis par Bercy. Il est temps, d’ailleurs, que Bercy retrouve sa juste place dans le débat politique. La politique ne se résume pas à des chiffres !

Les rapporteurs ont souligné à quel point les variations de périmètre rendaient la comparaison annuelle par programme compliquée. Toutefois ils relèvent, à périmètre constant, une baisse des crédits de 4 % entre 2014 et 2015, et de 7,5 % sur les deux dernières années. Ces réductions de crédits se fondent notamment sur l’amélioration des procédures et les économies en découlant, ce qui nous semble constituer une avancée positive.

On peut saluer l’apparition, au sein de cette mission, du programme 343 « Plan "France très haut débit" ». Nous serons, nous aussi, très attentifs à sa déclinaison dans les territoires, notamment les territoires ruraux, qui souffrent d’un défaut d’attractivité, faute de réseaux numériques satisfaisants.

Il était par ailleurs important de préserver les budgets des autorités chargées de la régulation des opérateurs économiques.

On constate que les dépenses fiscales rattachées au programme 134 représentent vingt fois les montants alloués à ce dernier.

En outre, les premières évaluations du CICE montrent que le dispositif profite beaucoup plus aux grandes entreprises qu’aux PME et aux TPE, dont les responsables jugent la démarche bien trop lourde au regard des montants qu’ils peuvent espérer récupérer. À l’inverse, les grandes entreprises ont les moyens de travailler sur ce qu’elles appellent l’optimisation fiscale, tant sous l’angle du CICE que sous celui du crédit d’impôt recherche, le CIR.

Nous aurions pu conditionner l’accès au CICE dans un sens plus favorable aux PME, et nous pouvons encore le faire ! Je souhaite donc que 2015 soit une année de réflexion sur ce sujet. Le dispositif favorise également les secteurs où les emplois sont le moins qualifiés, puisqu’il vise les salaires inférieurs à 2,5 fois le SMIC. Profitons donc de l’année à venir pour adapter et ajuster les mesures !

Comme l’a rappelé notre collègue Martial Bourquin, malgré les efforts constants des pouvoirs publics, la part des PME dans la commande publique stagne. Nous devons, là encore, intensifier notre action.

La sous-traitance, voilà un autre vaste sujet ! Nous devons profiter de l’adoption en début d’année de deux directives sur ce thème pour améliorer la transparence des chaînes de sous-traitance et l’application des critères de qualité environnementale et sociale.

On en arrive aujourd’hui à des chaînes de sous-traitance à quatre niveaux ! Autant dire que la qualité de l’exécution des contrats peut facilement s’en ressentir ! Les organismes publics ou les entreprises d’État ne sont d'ailleurs pas au-dessus de toute critique : on pourrait citer l’Office national des forêts, EDF, Areva, outre bien entendu les entreprises des secteurs du bâtiment ou de l’agroalimentaire.

Le recours à la sous-traitance pour l’entretien de nos centrales nucléaires ou la construction laborieuse des réacteurs EPR semble certes économique, mais, si l’on examine les choses attentivement, est-il réellement rentable dans le temps ?

M. Roland Courteau. Bonne question !

M. Joël Labbé. En conclusion, un certain nombre d’interrogations subsistent quant à l’efficacité du CICE. De manière générale, il serait opportun de recentrer l’ensemble des aides sur les petites et moyennes entreprises, qui en ont le plus besoin et sont traditionnellement plus intensives en emplois.

La transformation de notre économie a déjà commencé selon plusieurs axes : l’économie collaborative, l’économie du partage, l’économie circulaire, l’économie de l’échange. On voit aussi poindre des monnaies locales. Ces évolutions doivent véritablement être prises au sérieux, car elles préfigurent l’avenir.

Aujourd'hui, nous pensons encore avec les outils d’hier : PIB, croissance, compétitivité, productivité, mais sans parvenir à faire diminuer le chômage. Une révolution économique est déjà en marche. Relocalisations, régulation éclairée, adaptée : voilà ce que l’on attend de vous, mesdames, monsieur les ministres de la jeune génération ! On compte beaucoup sur vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi qu’au banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir. Madame la présidente, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le ministre, mes chers collègues, je monte à la tribune un peu par effraction, Sophie Primas étant empêchée ce soir, mais je le fais avec beaucoup de plaisir, pour défendre les territoires ruraux.

Madame la secrétaire d’État chargée du commerce et de l’artisanat, savez-vous que les moyens que vous donnez au monde rural produisent des résultats exponentiels, comparativement à ceux que vous accordez à des territoires plus riches ? Dans le monde rural, un petit peu donne beaucoup. Malheureusement, ces moyens sont en train de diminuer dans des proportions que nous n’aurions pu imaginer.

Je suis un sénateur de fraîche date, élu voilà trois ans. À l’époque, le Gouvernement était dirigé par François Fillon ; les crédits de paiement pour le commerce, l’artisanat et les services s’élevaient à 132 millions d’euros, et la nouvelle majorité sénatoriale s’offusquait d’une baisse, sensible sans doute, mais qui n’avait rien à voir avec celles que nous devions constater les années suivantes.

Aujourd’hui, madame la secrétaire d’État, les crédits de paiement pour le commerce, l’artisanat et les services sont exactement la moitié de ce qu’ils étaient lorsque vous avez pris le pouvoir, passant de 132 millions d’euros à 67 millions d’euros. Je n’aurai cependant pas la cruauté, compte tenu du caractère quelque peu convivial et intime de cette soirée, de rappeler les déclarations indignées de certains des vôtres devant la bien plus modeste diminution des crédits décidée par le gouvernement de M. Fillon.

Parlons du FISAC, dont les crédits, c’est vrai, étaient passés de 43 millions d’euros en 2011 à 40 millions d’euros en 2012. Cette baisse aussi avait été dénoncée avec éloquence ! Ces crédits ont ensuite été ramenés à 25 millions d’euros en 2013, puis à 20 millions d’euros en 2014. Cette année, 9 millions d’euros seulement étaient inscrits dans le projet de loi de finances initial…

Devant les protestations héroïques des députés, une rallonge de 8 millions d’euros a été décidée, portant le total à 17 millions d’euros. L’effort est louable ! Cependant, il faut savoir que 3 millions d’euros sont réservés aux distributeurs de carburants à travers le CPDC. Les crédits du FISAC se montent donc en réalité à 14 millions d’euros.

Certains font mine d’oublier que Mme Pinel, qui occupait voilà encore quelques mois les fonctions qui sont aujourd’hui les vôtres, avait annoncé à la fin de l’année dernière – ces propos sont consignés au Journal officiel – une rallonge de 70 millions d’euros pour éponger le retard pris dans le versement des subventions dues au titre du FISAC. J’aimerais savoir où se trouvent aujourd’hui ces 70 millions d’euros…

Les crédits du FISAC, tels qu’ils se présentent désormais, s’élèvent donc à 17 millions d’euros, dont 3 millions d’euros pour le CPDC.

J’aimerais vous convaincre, madame la secrétaire d’État – je suis persuadé que, à titre personnel, vous entendez ce discours –, que nous avons besoin, dans nos territoires ruraux, de l’aide apportée à travers le FISAC.

C’est d’abord une aide destinée aux commerçants et aux artisans pour leur permettre de rénover et de mettre aux normes sanitaires, de sécurité et d’accessibilité leurs commerces et leurs ateliers. C’est également une aide destinée aux collectivités locales qui aménagent les centres-bourgs afin de les rendre plus attractifs ou qui lancent des opérations d’animation commerciale pour permettre aux petits commerces de mieux affronter la concurrence des grandes surfaces, tout en entretenant la qualité du lien social.

Nous avons besoin du FISAC, madame la secrétaire d’État. Pendant longtemps, lorsque nous parlementaires de l’opposition écrivions au ministère afin de souligner l’importance que nous accordions à tel ou tel dossier, nous recevions en guise de réponse une lettre type, indiquant en substance que, compte tenu du stock lié aux promesses excessives de vos prédécesseurs, il n’était pas possible de nous accorder des aides…

Il est admissible de recourir à ce procédé facile quand l’alternance joue – nous l’avons peut-être utilisé en d’autres temps –, à condition toutefois que cela ne dure pas trop longtemps ! Or je pense que le moment est venu d’assumer vos responsabilités.

Je le dis avec force ici, en tant que sénateur de l’Orne : un membre du Gouvernement ayant annoncé une rallonge de 70 millions d’euros pour éponger le passif, je vous demande, madame la secrétaire d’État, monsieur le ministre, d’assumer cette décision, afin que tous les dossiers en souffrance puissent trouver une issue favorable.

Je voudrais dire quelques mots sur le CPDC, qui apporte des aides aux stations-service privées ayant besoin d’être mises aux normes, ainsi qu’aux pompistes obligés de vendre leur station mais ne trouvant pas de repreneur.

Les crédits gérés par le CPDC ont diminué, et un peu plus de 2 000 dossiers sont aujourd’hui en souffrance : la moitié concerne des mises aux normes, un bon quart des départs à la retraite, un autre quart des aménagements permettant aux pompistes de se diversifier en offrant des services, en vendant des confiseries, etc.

Le retard dans le versement des subventions attendues est de près de quatre ans. Les dossiers en attente, madame la secrétaire d’État, sont renforcés par les initiatives des collectivités locales, qui estiment essentiel qu’un bourg puisse disposer d’une station-service. En effet, faute de station-service sur place, les automobilistes sont obligés de se rendre dans une grande surface pour prendre de l’essence, et ils en profitent naturellement pour y faire aussi leurs courses.

M. Jean-Claude Requier. Ils y vont de toute façon !

M. Jean-Claude Lenoir. C’est la mort annoncée du commerce local ! C’est pourquoi je disais en préambule, madame la secrétaire d’État, que, dans le monde rural, un petit peu fait beaucoup.

Si l’on débloquait ces dossiers, si l’on permettait à ces stations-service d’être mises aux normes, à des collectivités locales d’installer des stations dotées de systèmes de paiement par carte bancaire, je vous assure que l’on vivifierait le monde rural face à la concurrence exacerbée des grandes surfaces.

J’ai déposé un amendement en ce sens. Je considère l’avoir déjà défendu, pour l’essentiel, sauf à devoir répondre à d’éventuelles remarques qui viendraient contredire les quelques observations que je me suis permis d’exprimer.

Je vous le dis de nouveau avec force, madame la secrétaire d’État, monsieur le ministre : pensez au monde rural, où un petit peu fait beaucoup ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Madame la présidente, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, les chiffres du commerce extérieur, depuis plusieurs années, parlent d’eux-mêmes : dans une zone euro en excédent, la France est l’un des rares pays qui enregistrent systématiquement un déficit commercial, le plus lourd de la zone de surcroît.

Ce n’est pas le niveau de l’euro qui constitue une faiblesse pour notre économie, puisque nous sommes le seul pays à constater un tel déficit, mais bien la structure de notre économie. C’est la raison pour laquelle la politique mise en œuvre par le Gouvernement a vocation à permettre à celle-ci de mieux profiter de la croissance mondiale, en mettant notre offre en adéquation avec les marchés mondiaux. De ce point de vue, une réelle révolution culturelle s’est engagée depuis deux ans.

Il est vrai que certains crédits sont en baisse. Toutefois, ce qui marque ce projet de loi de finances, ce sont bien les quelque 3,6 milliards d’euros de prélèvements en moins sur les entreprises par rapport à 2014, du fait principalement du CICE.

Finalement, les entreprises, au lieu de devoir tenir compte de priorités politiques décidées par le Parlement et par le Gouvernement, seront plus libres de choisir elles-mêmes leurs orientations. Elles disposeront de marges de manœuvre supérieures grâce à la diminution des prélèvements.

Je le répète, c’est une révolution culturelle pour notre économie. Entre 2002 et 2012, le décalage entre notre offre et les besoins du monde n’a fait que s’aggraver, alors que le gouvernement de l’époque était pourtant à l’écoute du MEDEF.

C’est la raison pour laquelle les manifestations de ces derniers jours semblent complètement hors de propos. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas faute d’avoir cherché à plaire au MEDEF !

M. Jean-Yves Leconte. Je veux dire au MEDEF qu’il faut aborder la situation actuelle non pas dans un esprit de revendication, mais dans un esprit d’entreprise, avec la volonté de tirer parti de nos forces, de notre formation, de nos capacités d’innovation, de notre politique énergétique – bien plus intelligente que celle de l’Allemagne –,…

M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas très gentil pour Mme Merkel !

M. Jean-Yves Leconte. … de la diversité de notre population, qui nous permet d’avoir une bonne connaissance du monde, de nos liens avec un certain nombre de zones en croissance.

À cet égard, les colocalisations entre la France et les pays du Maghreb, notamment l’Algérie et le Maroc, représentent une force pour le développement de notre économie et permettront à notre pays de profiter enfin de la croissance du monde.

Je voudrais saluer les dernières annonces du Président de la République concernant l’évolution du CICE vers une baisse pérenne des cotisations sociales d’ici à la fin du quinquennat. Cela permettra au dispositif d’être à la fois plus lisible et plus clair en termes de comptabilité au niveau international. Nous devrions peut-être nous interroger sur les effets de seuil, en particulier sur le plafond de 2,5 fois le SMIC, qui pose problème pour certains secteurs.

Je salue également les propos de notre collègue Jacques Chiron sur la nécessité de favoriser l’investissement en élargissant les possibilités d’amortissement sur vingt-quatre mois. Favoriser l’investissement est essentiel si l’on veut pouvoir rapidement disposer d’une offre nouvelle.

Si l’État fait des efforts, le réseau consulaire doit en faire aussi. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Élisabeth Lamure et M. Claude Kern. Il en fait !

M. Jean-Yves Leconte. J’espère que les chambres consulaires sauront se mettre en ordre de bataille pour mieux accueillir les investissements étrangers et ne pas jouer la concurrence entre les territoires, comme elles le font parfois : c’est ensemble que les territoires attireront les investissements étrangers.

Avant d’évoquer le développement international de nos entreprises, j’aimerais m’arrêter quelques instants sur la situation de l’Office européen des brevets, l’OEB.

On le sait, le rôle de cet office est essentiel pour garantir la protection de l’innovation en Europe. Il s’agit d’un enjeu majeur pour l’ensemble de l’économie européenne. Le directeur général de l’OEB étant français, il nous incombe plus particulièrement de veiller au bon fonctionnement de cet office.

Or, depuis quelque temps, le fonctionnement et la gouvernance de l’Office européen des brevets font beaucoup parler d’eux dans la presse internationale, pour de vraies raisons. Le directeur général de l’OEB remettrait en cause le droit d’expression du personnel dans la limite du respect du secret professionnel, le climat social est dramatique à l’intérieur de cet organisme dont le rôle est essentiel pour l’Union européenne. Des grèves ont eu lieu, les audits externes sont remis en cause, le contrôle qualité évolue du qualitatif vers le quantitatif…

Cette situation risque d’avoir de lourdes conséquences pour la place de la France en matière d’innovation. Monsieur le ministre, je vous invite à prendre directement les choses en main ; ce n’est pas à l’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI, dont est issu le directeur général de l’OEB, de le faire. Il est temps de remettre un peu de contrôle politique dans tout cela.

Trois entités dont les budgets figurent dans les programmes dont nous discutons ce soir sont chargées du développement international des entreprises : l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, chargée de la promotion et de l’accueil des investissements étrangers en France ; UbiFrance, chargé du développement international des entreprises françaises et interlocuteur des PME ; enfin, la direction générale du Trésor, qui s’occupe des grands contrats et de tout ce qui a trait au domaine régalien.

Compte tenu de l’évolution des besoins en matière d’accompagnement des entreprises, ces trois entités ont vocation à converger. Vous avez déjà choisi de fusionner prochainement UbiFrance et l’AFII par voie d’ordonnance. Or, dès lors qu’il a été décidé de placer l’organisme qui résultera de cette fusion sous la tutelle du ministère des affaires étrangères et du développement international, il me semble qu’il faudrait aller jusqu’au bout de cette logique en regroupant l’ensemble des dispositifs appuyant l’action extérieure de la France en matière économique.

Je suis convaincu que, aujourd’hui, c’est la connaissance des marchés et des barrières non tarifaires qui est nécessaire à toutes les entreprises, grandes et petites. Quelle que soit leur taille, leurs besoins sont identiques ; seuls diffèrent les modes et les capacités d’action.

Je suis également convaincu qu’il ne faut plus séparer le micro et le macro-économique, non plus que le régalien et le soutien aux entreprises.

Par conséquent, je vous invite à aller plus loin que la seule fusion entre UbiFrance et l’AFII, en incluant dans cette opération la direction générale du Trésor, de manière que l’entité ainsi créée puisse prendre en compte les préoccupations et les intérêts de nos entreprises dans les grandes négociations internationales sur les barrières non tarifaires. La fixation des normes et la connaissance des règles des marchés publics sont profondément du ressort de l’État.

Il faut aussi accompagner les entreprises, grandes et petites, face aux sanctions internationales – à l’image de celles qui frappent l’Iran, par exemple – et à l’Office of foreign asset control, l’OFAC. Encore une fois, la convergence des acteurs me semble absolument indispensable.

Nous devons nous appuyer davantage sur notre réseau à l’étranger – chambres de commerce et conseillers du commerce extérieur – et faire en sorte qu’UbiFrance ne soit plus en concurrence avec lui. Appuyons-nous sur nos forces, redéfinissons le périmètre de l’action publique, afin de mieux nous concentrer sur le régalien et sur ce que les entreprises privées ne peuvent faire.

Toutes les actions engagées au cours de ces dernières années en matière de soutien aux entreprises doivent être recentrées autour d’un opérateur unique, à même de prendre en compte l’ensemble des problématiques. Même les petites entreprises ont parfois besoin, à l’instar des grandes, du soutien de l’État.

En conclusion, le groupe socialiste votera ces crédits, qui constituent en réalité la traduction d’une étape dans la réforme de l’ensemble de l’intervention de l’État en faveur de notre économie afin de libérer l’esprit d’entreprendre tout en respectant notre modèle social. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Madame la présidente, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, Carole Delga, Axelle Lemaire et moi-même allons nous partager le temps de parole imparti au Gouvernement, afin d’apporter une réponse polyphonique à l’ensemble des questions soulevées.

Je souhaiterais tout d’abord revenir sur quelques caractéristiques et priorités de la mission « Économie ».

Deux caractéristiques de cette mission traduisent les orientations générales du Gouvernement : d’une part, la mission contribue aux efforts d’économies, avec une baisse de ses crédits de 5 % par rapport à la loi de finances pour 2014, hors mesures de transfert et de périmètre ; d’autre part, elle évolue pour refléter les grandes priorités économiques du Gouvernement, au service de l’investissement et de la croissance.

Je dois confesser, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous n’avons pas su résoudre cette question difficile, à chaque fois posée : comment faire des économies sans baisser les dépenses publiques ? Qu’il s’agisse des chambres consulaires ou d’autres champs d’intervention de l’État, nous sommes systématiquement confrontés à la nécessité cruelle de réduire les dépenses. Il s’agit donc de bien choisir où opérer les coupes…

Les trois programmes créés l’an dernier pour mettre en œuvre, dans les domaines du numérique, de l’innovation et des filières industrielles, un nouveau programme d’investissements d’avenir représentent 1,7 milliard d’euros pour la seule mission « Économie » et 2,3 milliards d’euros pour tout le champ du ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique. Cette année, c’est la poursuite du plan « France très haut débit » qui donne lieu à la création d’un programme au sein de la mission.

S’agissant du programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme », la baisse des crédits entre 2014 et 2015 apparaît importante, mais, à périmètre constant, elle est contenue à 5 %, ce qui est cohérent avec l’effort de l’ensemble des ministères.

Les économies portent notamment sur certains dispositifs d’intervention : l’article 51 prévoit la suppression de l’indemnité de départ des artisans et commerçants – des mesures de compensation ont toutefois été arrêtées –, ainsi que celle des aides aux stations-service.

Le FISAC verra sa capacité d’engagement maintenue l’an prochain, conformément à la décision des députés. Nous avons pris nos responsabilités, compte tenu de l’importance de ce dispositif pour certains territoires. Le traitement du flux de dossiers à venir sera modernisé. Carole Delga y reviendra.

La compensation à La Poste de sa mission de transport de presse est aussi en baisse, mais dans le respect du protocole signé en 2008 entre l’État, La Poste et les professionnels de la presse.

À cet égard, je veux lever un malentendu : La Poste touche environ 300 millions d’euros au titre du CICE, ce qui, au regard de l’absence de compensation de missions de service public qu’elle exerce et de la masse financière totale du dispositif – une dizaine de milliards d’euros –, n’est pas un cadeau considérable.