M. le président. L'amendement n° 682, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L. 4421-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4421-1. – La collectivité de Corse constitue, à compter du 1er janvier 2018, une collectivité à statut particulier au sens de l’article 72 de la Constitution, en lieu et place de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse. Elle s’administre librement, dans les conditions fixées par le présent titre et par l’ensemble des autres dispositions législatives relatives aux départements et aux régions non contraires au présent titre.

« Pour l’application à la collectivité de Corse du premier alinéa du présent article :

« 1° Les références au département et à la région sont remplacées par la référence à la collectivité de Corse ;

« 2° Les références au conseil départemental et au conseil régional sont remplacées par la référence à l’Assemblée de Corse ;

« 3° Les références aux présidents du conseil départemental et du conseil régional sont remplacées par la référence au président du conseil exécutif de Corse. » ;

« 2° L’article L. 4421-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4421-2. – La collectivité de Corse est substituée à la collectivité territoriale de Corse instituée par la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse et aux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse dans tous leurs biens, droits et obligations ainsi que dans toutes les délibérations et actes pris par ces derniers, notamment pour l’application des exonérations et des abattements prévus au code général des impôts en fonction de leur durée, de leur quotité et de leur champ d’application territorial initiaux.

« Le transfert de ces biens, droits et obligations est réalisé à titre gratuit et ne donne lieu à aucune indemnité ou perception de droits, impôts ou taxes, de quelque nature que ce soit, à aucun versement d’honoraires au profit des agents de l’État, ni à la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts. » ;

3° L’article L. 4421-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4421-3.- Une conférence de coordination des collectivités territoriales est créée en Corse.

« Elle est composée des membres du conseil exécutif de Corse, du président de l’Assemblée de Corse, des présidents des communautés d’agglomération, des maires des communes de 30 000 habitants ou plus, d’un représentant des collectivités territoriales et groupements de collectivités des territoires de montagne, au sens de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, de huit représentants élus des présidents des communautés de communes et de huit représentants élus des maires des communes de moins de 30 000 habitants.

« Un décret précise les modalités d’élection ou de désignation des membres de cette conférence de coordination des collectivités territoriales.

« Des personnes qualifiées peuvent y être entendues.

« Elle se réunit sur un ordre du jour déterminé par le président du conseil exécutif de Corse pour échanger des informations, débattre de questions d’intérêt commun et coordonner l’exercice des compétences des collectivités territoriales, notamment en matière d’investissement.

« Elle se substitue à la conférence prévue à l’article L. 1111-9-1. Les dispositions de cet article lui restent applicables, à l’exception du II. » ;

4° Après l’article L. 4422-9-1, il est inséré un article L. 4422-9-… ainsi rédigé :

« Art. L. 4422-9-... – Le président du conseil exécutif assiste de droit, sans voix délibérative, aux réunions de la commission permanente.

« Au cours de son mandat, l’Assemblée de Corse peut modifier la liste des compétences qu’elle a déléguées à la commission permanente en application de l’article L. 4133-6-1. » ;

5° Après le deuxième alinéa de l’article L. 4422-10, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le président procède à l’inscription d’une question à l’ordre du jour dès lors qu’un tiers des conseillers à l’assemblée l’a demandé. » ;

6° L’article L. 4422-18 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « pour », la fin de la première phrase du sixième alinéa est ainsi rédigée : « opter entre son mandat de conseiller à l’Assemblée de Corse et sa fonction de conseiller exécutif. » ;

b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « démissionnaire de son mandat ; cette démission » sont remplacés par les mots : « avoir opté pour la fonction de conseiller exécutif ; cette situation » ;

c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « démissionnaire pour cause d’acceptation de » sont remplacés par les mots : « ayant opté pour » ;

d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’est adoptée une motion de défiance dans les conditions fixées à l’article L. 4422-31 ou lorsque le président et les membres du conseil exécutif démissionnent collectivement, ces derniers reprennent l’exercice de leur mandat de conseiller à l’Assemblée de Corse à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de leurs fonctions, au lieu et place des derniers candidats devenus conseillers à l’Assemblée de Corse sur les mêmes listes qu’eux, conformément à l’ordre de ces listes. Ceux-ci sont replacés en tête des candidats non élus de leurs listes respectives. » ;

7° L’article L. 4422-31 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque conseiller à l’Assemblée de Corse ne peut signer, par année civile, plus d’une motion de défiance. » ;

8° Le premier alinéa de l’article L. 4423-1 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les délibérations de l’Assemblée de Corse, les actes du président de l’Assemblée de Corse ainsi que les délibérations du conseil exécutif, les arrêtés du président du conseil exécutif délibérés au sein du conseil exécutif et les actes du président du conseil exécutif sont soumis au contrôle de légalité dans les conditions fixées au chapitre II du titre IV du livre Ier de la présente partie. » ;

« Par dérogation au 1° de l’article L. 4141-2, ne sont pas soumis à l’obligation de transmission au représentant de l’État, prévue à l’article L. 4141-1, les délibérations prises par l’Assemblée de Corse, ou par délégation, les décisions prises par le président du conseil exécutif de Corse, relatives aux tarifs des droits de voirie et de stationnement, au classement, au déclassement, à l’établissement des plans d’alignement et de nivellement, à l’ouverture, au redressement et à l’élargissement des voies situées sur le territoire de la collectivité de Corse.

« Sans préjudice de l’article L. 4141-2, sont également soumises à l’obligation de transmission au représentant de l’État prévue à l’article L. 4141-1 les décisions réglementaires et individuelles prises par le président du conseil exécutif de Corse dans l’exercice de son pouvoir de police en application de l’article L. 3221-4, à l’exclusion de celles relatives à la circulation et au stationnement. »

9° L’article L. 4424-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du sixième alinéa, les mots : « aux départements et » sont supprimés ;

b) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « un département, » sont supprimés ;

10° L’article L. 4424-7 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « les départements et » sont supprimés ;

b) À l’avant-dernier alinéa du II, les mots : « départementales et » sont supprimés ;

11° À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 4424-13, les mots : « les départements, » sont supprimés ;

12° L’article L. 4424-16 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4424-16. – La collectivité de Corse est chargée de l’organisation des liaisons interdépartementales prévues par les dispositions relatives aux services collectifs de transport du plan d’aménagement et de développement durable. » ;

13° Au huitième alinéa de l’article L. 4424-20, les mots : « , de représentants des départements de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse » sont supprimés ;

14° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 4424-21 est supprimée ;

15° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 4424-22 est supprimée ;

16° Au premier alinéa de l’article L. 4424-26, les mots : « après consultation des départements et » sont supprimés ;

17° Au troisième alinéa de l’article L. 4424-34, les mots : « des départements et » sont supprimés ;

18° À la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 4424-35, les mots : « aux départements et » sont supprimés ;

19° L’article L. 4424-36 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase du deuxième alinéa du I, les mots : « les conseils départementaux, » sont supprimés ;

b) Au troisième alinéa du I, les mots : « aux conseils départementaux, » sont supprimés ;

c) Au 1° du II, les mots : « , des départements » sont supprimés ;

d) À la troisième phrase du premier alinéa du III, les mots : « , des départements » sont supprimés ;

20° Au premier alinéa de l’article L. 4424-37, les mots : « des départements, » sont supprimés ;

21° Le chapitre IV du titre II du livre IV de la quatrième partie est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Compétences départementales de la collectivité de Corse

« Art. L. 4424-42 – La collectivité de Corse exerce de plein droit les compétences que les lois, dans leurs dispositions non contraires au présent titre, attribuent aux départements. » ;

22° L’article L. 4425-1 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Les 1° et 2° sont ainsi rédigés :

« 1° Une fraction égale à 73,5 % de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, prévue à l’article 1586 ter du code général des impôts, due au titre de la valeur ajoutée imposée dans chaque commune de son territoire, en application de l’article 1586 octies du même code ;

« 2° Les impositions prévues à l’article 575 E bis, aux 1° à 5° bis du I de l’article 1586 et aux 1° et 2° de l’article 1599 bis du code général des impôts ; »

c) Au 5° , les références : « 238 et 240 » sont remplacées par les références : « 223 et 238 » ;

d) Le dernier alinéa est remplacé par des II et III ainsi rédigés :

« II. – La collectivité de Corse bénéficie des dotations suivantes :

« 1° La dotation globale de fonctionnement des régions, dans les conditions définies aux articles L. 4332-4 à L. 4332-8 ;

« 2° La dotation globale de fonctionnement des départements définie aux articles L. 3334-1 à L. 3334-7-1 ;

« 3° La dotation globale d’équipement définie aux articles L. 3334-10 à L. 3334-12 ;

« 4° Le produit des amendes de police relatives à la circulation routière destiné aux collectivités territoriales mentionné au b du 2° du B du I de l’article 49 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

« III. – Les articles L. 3335-1 à L. 3335-3 et l’article L. 4332-9 s’appliquent à la collectivité de Corse. » ;

23° Après l’article L. 4425-1, il est inséré un article L. 4425-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 4425-1-... – I. – La collectivité de Corse bénéficie des produits de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques et de la taxe intérieure sur les conventions d’assurance dont disposaient la collectivité territoriale de Corse instituée par la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse et les départements de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse, dans les conditions définies aux II et III de l’article 52 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, de l’article 59 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 et de l’article 51 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.

« II. – La collectivité de Corse bénéficie de la dotation générale de décentralisation dont disposaient la collectivité territoriale de Corse instituée par la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 précitée et les départements de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse, dans les conditions définies aux articles L. 1614-1 à L. 1614-4 du présent code, et est éligible au Fonds de compensation de la fiscalité transférée, dans les conditions définies à l’article L. 1614-4.

« III. – La collectivité de Corse est éligible, à compter du 1er janvier 2018, au concours particulier relatif aux bibliothèques municipales et aux bibliothèques départementales, dans les conditions définies à l’article L. 1614-10.

« IV. – La collectivité de Corse est éligible, à compter du 1er janvier 2018, aux concours de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie, de la prestation de compensation du handicap et pour l’installation ou le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, dans les conditions définies, respectivement, aux articles L. 14-10-6, L. 14-10-7 et L. 14-10-7-1 du code de l’action sociale et des familles.

« V. – La collectivité de Corse est éligible, à compter du 1er janvier 2018, à la dotation issue de la répartition prévue au 2° du II de l’article 42 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014.

« VI. – La collectivité de Corse bénéficie de la dotation de continuité territoriale dont disposait la collectivité territoriale de Corse instituée par la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 précitée, dans les conditions définies à l’article L. 4425-4 du présent code. » ;

24° Au I de l’article L. 4425-9, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « dix-sept ».

II. – Le code électoral est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 364, les mots : « cinquante et un » sont remplacés par le mot : « soixante-trois » ;

2° À la première phrase du premier alinéa et aux deuxième et troisième phrases du deuxième alinéa de l’article L. 366, le mot : « neuf » est remplacé par le mot : « onze ».

3° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 380 est complété par les mots : « , sauf dans le cas prévu au dernier alinéa de l’article L. 4422-18 du code général des collectivités territoriales ».

III. – Les personnels de la collectivité territoriale de Corse instituée par la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse et ceux des départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse relèvent de plein droit, au 1er janvier 2018, de la collectivité de Corse, dans les conditions de statut et d’emploi qui sont les leurs. Les articles L. 5111-7 et L. 5111-8 du code général des collectivités territoriales leur sont applicables.

IV. – La collectivité de Corse instituée par le présent article est substituée à la collectivité territoriale de Corse instituée par la loi n° 91-428 du 13 mai 1991 portant statut de la collectivité territoriale de Corse et aux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse dans toutes les procédures administratives et juridictionnelles en cours à la date de sa création, ainsi que dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes.

Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance, sauf accord contraire des parties. Les cocontractants sont informés de la substitution de personne morale par le président du conseil exécutif. La substitution de personne morale aux contrats antérieurement conclus n’entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant.

V. – Par dérogation à l’article L. 192 du code électoral, le mandat des conseillers départementaux élus en mars 2015 expire le 31 décembre 2017.

VI. – Par dérogation à l’article L. 364 du code électoral, le mandat des membres de l’Assemblée de Corse élus en décembre 2015 expire le 31 décembre 2017.

VII. – En vue de la création de la collectivité de Corse au 1er janvier 2018, le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution et dans les dix-huit mois suivant la promulgation de la présente loi, à prendre par ordonnances les mesures relevant du domaine de la loi :

1° Précisant les modalités de fin de mandat des conseillers départementaux de Corse-du-Sud et de Haute-Corse élus en mars 2015, notamment la date à partir de laquelle il n’est plus procédé au remplacement des sièges vacants ;

2° Modifiant les références en droit électoral aux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse ou aux membres de leurs assemblées délibérantes qui ne peuvent être maintenues ;

3° Adaptant les règles relatives à l’élection des sénateurs dans la collectivité de Corse, notamment la composition du collège électoral concourant à leur élection ;

4° Tendant à créer ou à adapter le territoire d’intervention et les modalités d’organisation, de fonctionnement et de financement par la collectivité de Corse de tout établissement ou organisme institué par la loi, en conséquence de la fusion de la collectivité territoriale de Corse et des deux conseils départementaux ;

5° Adaptant les références au département, à la région et à la collectivité territoriale de Corse dans toutes les dispositions législatives en vigueur susceptibles d’être applicables à la collectivité de Corse ;

6° Précisant le territoire d’intervention de l’État, l’organisation de ses services déconcentrés ainsi que les règles de compétences et d’organisation des juridictions ;

7° Précisant et complétant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse ;

8° Précisant et complétant les règles relatives aux concours financiers de l’État et aux fonds nationaux de péréquation des recettes fiscales applicables à la collectivité de Corse ;

9° Précisant les modalités de transfert des fonctionnaires et agents non titulaires, y compris les personnels détachés sur emplois fonctionnels.

Le projet de loi portant ratification de chaque ordonnance est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de cette ordonnance.

VIII. – Le 5° du b de l’article L. 3332-1 et les articles L. 3431-1 et L. 3431-2 du code général des collectivités territoriales sont abrogés.

IX. – A. – Le I, à l’exception du b du 22°, et les II, III et IV du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2018.

B. – Le b du 22° du I et le VIII s’appliquent aux impositions dues à compter de 2018.

C. – Pour l’exercice 2018, les articles L. 1612-1 et L. 4312-6 du code général des collectivités territoriales sont applicables à la collectivité de Corse, sur la base du cumul des montants inscrits aux budgets de l’année précédente de la région et des départements auxquels elle succède et des autorisations de programme et d’engagement votées au cours des exercices antérieurs des collectivités auxquelles elle succède.

Pour ce même exercice, la collectivité de Corse est compétente pour arrêter les comptes administratifs de la région et des départements fusionnés, dans les conditions prévues à l’article L. 1612-12 du même code.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Après le dépôt de cet amendement, certains se sont posé des questions. Je me suis permise de remettre aux rapporteurs et à ceux qui le souhaitaient quelques éléments d’explication, que je vais reprendre ce soir.

Le principe d’une collectivité unique de Corse a été acté de manière républicaine, totalement transparente, par une large majorité des élus corses le 12 décembre 2014. Droite et gauche confondues en ont approuvé à 80 % la création. Sur les 51 conseillers à la collectivité territoriale de Corse, 42 en ont approuvé l’architecture, soit la majorité des partis traditionnels de droite, désormais les Républicains, 9 sur 12, et de gauche, 18, ainsi que les nationalistes. Parmi les partisans de cette collectivité unique, figuraient le député UMP Camille de Rocca Serra et l’ancien président du conseil exécutif Ange Santini.

Alors que la résolution demandait une consultation des électeurs, les élus ont, par la suite, souhaité une entrée en vigueur rapide de ce qu’ils avaient proposé et voté. Les travaux de concertation ont donc commencé en vue de l’élaboration d’un projet de loi. Mais, compte tenu de la complexité de l’agenda parlementaire, le Gouvernement a préféré donner une chance supplémentaire au processus et gagner du temps en présentant un amendement à la loi NOTRe, qui ne mentionnait pas la consultation des électeurs.

Lors de la discussion du texte en séance publique à l’Assemblée nationale en mars dernier, la question de l’organisation d’une consultation de la population a donc été naturellement soulevée. Le Gouvernement a expliqué sa position et annoncé la poursuite des discussions. Une réunion a été organisée à cette fin le 13 avril 2015 au ministère de la décentralisation et de la fonction publique, en présence du ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve. Il a été acté par les élus corses, toutes tendances confondues, qu’il n’y aurait pas de consultation et que la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2018 était possible grâce à l’introduction de l’article que je vous présente.

Aujourd’hui, le Gouvernement propose quelques ajustements par rapport au texte voté par l’Assemblée nationale, notamment sur le mode de scrutin. Comme vous pouvez l’imaginer, les discussions ont été longues sur cette question. La prime majoritaire a été augmentée pour tenir compte du nombre de conseillers et le seuil d’accès au second tour a été maintenu, à la demande de tous les élus.

Il s’agit donc d’une réforme dont tous les partisans pourront reconnaître qu’elle est le fruit d’une concertation et d’une collaboration transpartisane au caractère éminemment républicain. C’est pourquoi je vous propose ces dispositions ce soir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. La Corse a une longue histoire institutionnelle. Au départ, il y avait un département. Mais, sous la pression du mouvement régional qui voulait créer des régions partout, il a fallu faire une région de Corse. À l’époque, comme la Constitution ne prévoyait pas la possibilité de créer une collectivité unique, qui aurait pu être régionale ou départementale, comme c'est le cas à Mayotte – même s’il est vrai que des dispositions particulières s’appliquent à l’outre-mer. Deux départements ont donc été créés, ce qui est tout de même un privilège pour un département de 250 000 habitants !

Après la révision constitutionnelle qui a permis de créer des collectivités spécifiques, certains ont conçu l’idée de faire une collectivité unique. Ce fut tenté par référendum, mais il faut se rappeler que celui-ci a échoué, ce qui a forcément incité tous les premiers ministres successifs et les ministres chargés de la question à une certaine prudence.

Aujourd’hui, madame la ministre, et on a pu le vérifier à l'Assemblée nationale, les leaders des différentes formations politiques ont exprimé leur accord, notamment, bien sûr, ceux qui sont les promoteurs du projet le président Paul Giacobbi, mais aussi Camille de Rocca Serra. À partir de ce moment-là, la création d’une collectivité de Corse a paru tout à fait souhaitable, y compris en termes d’organisation du territoire. Car on parle de la sous-administration des territoires, mais la sur-administration n’est pas forcément une bonne solution, en particulier au regard des caractéristiques de la Corse.

Madame la ministre, le Sénat ne peut qu’être favorable à la fusion de deux départements avec une région pour en faire une collectivité unique. Je rappelle que nous avions milité pour la collectivité d’Alsace, sans référendum. En France, tout le monde veut faire des référendums, mais, chaque fois, les électeurs ne répondent pas à la question posée, pour des raisons diverses, que ce soit au niveau national ou au niveau local. Le référendum sur l’Alsace n’a pas donné de bons résultats non pas à cause du « non », mais en raison d’une insuffisance de participation, car c’est ce qui s’est passé en réalité.

Bien entendu, nous aurions souhaité, en tant qu’assemblée représentant les collectivités territoriales de la République, que ce projet nous soit soumis en première lecture au Sénat, car ce n’est tout de même pas une petite réforme ! Je le dis pour inciter le Gouvernement à ne pas recommencer ce genre de manœuvre… Mais nous avons bien compris qu’il y avait un problème de délais, le projet était déjà lancé et les accords sont intervenus plus tard. En l’occurrence, on ne va donc pas en faire une affaire de principe.

L'Assemblée nationale a voté cet article à une large majorité, me semble-t-il, mais peut-être était-ce un soir, comme ici…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Non, il y avait beaucoup de députés !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Pour toutes ces raisons, la commission des lois ne propose pas de s’opposer à cette initiative des élus de Corse.

Hormis la structure, concernant le mode de scrutin, vous l’avez dit, madame la ministre, la prime majoritaire a été augmentée et le seuil d’accès au second tour maintenu, à la demande des élus, et ces points ne rencontrent aucune opposition particulière de notre part.

Bien entendu, de nombreux textes d’adaptation seront nécessaires et c’est pourquoi vous demandez au Parlement une habilitation à légiférer par ordonnance. Nous vérifierons que le champ de l’habilitation soit respecté.

Madame la ministre, mes chers collègues, la commission des lois du Sénat reste quelque peu prudente, car les accords peuvent changer assez rapidement, comme le vent ou la marée. Toutefois, dans la mesure où à ses yeux le projet est cohérent sur le plan de l’organisation, elle ne s’opposera pas au vote, par notre assemblée, du nouveau statut de la Corse.

M. le président. La parole est à M. Joseph Castelli, pour explication de vote.

M. Joseph Castelli. C’est avec une grande émotion que j’ai écouté Mme la ministre et M. le rapporteur.

Ce bouleversement institutionnel est une nécessité pour la Corse. En 2003, j’avais soutenu le référendum organisé par celui qui deviendra Président de la République française.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Il était alors ministre de l’intérieur !

M. Joseph Castelli. Le résultat a malheureusement été négatif, comme en Alsace quelques années plus tard.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Pas pour les mêmes raisons !

M. Joseph Castelli. J’espère cette fois-ci que la réforme proposée au travers de cet amendement aboutira. Ce serait un grand moment pour la Corse.

Je profite de l’occasion qui m’est donnée ce soir pour dire toute ma gratitude à Mme la ministre, car elle a largement contribué à la réussite de cette réforme, qui, je l’espère, sera entérinée prochainement par l’Assemblée nationale. La Corse en sortira gagnante. Il était en effet nécessaire de simplifier de façon cohérente et pragmatique une situation qui date de 1975. À l’époque, le département de Corse, créé par Napoléon, a été divisé en deux départements. Nous étions alors près de 200 000 habitants, contre moins de 350 000 aujourd’hui.

Madame la ministre, monsieur le rapporteur, je vous remercie encore une fois de vos exposés sur la Corse.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Nous soutenons cet amendement, avec peut-être un plus de distance que l’intervenant précédent, car il s’inscrit dans la vision du groupe écologiste de la réduction du millefeuille territorial. Au demeurant, il est très important que nous permettions l’évolution de la capacité d’action publique en Corse.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors du débat sur la taille des régions, la fusion des régions et celle des départements sont une voie que nous n’avons certainement pas suffisamment explorée : moins de départements et moins de régions, cela va probablement ensemble. En outre, nous avons toujours défendu une décentralisation différenciée. C’est ici le cas. Cet amendement va donc dans le bon sens.

Cette réforme fait écho au débat que nous avons eu, y compris cet après-midi lorsque nous avons évoqué les intercommunalités, au sujet de la séparation du délibératif et de l’exécutif. Demain, nous débattrons peut-être de la question de l’opportunité d’instaurer deux chambres dans les grandes régions comme dans les intercommunalités. À cet égard, j’ai souvent eu l’occasion ces derniers mois de déposer au nom du groupe écologiste des amendements, sur lesquels il m’a été parfois répondu qu’il était trop tôt pour les adopter. Quoi qu’il en soit, c’est dans cette direction que nous allons.

Le fait que la Corse soit un laboratoire positif pour la République annonçant des évolutions futures au sein d’autres territoires mérite notre entier soutien. On peut juste regretter que nous ayons raté l’étape alsacienne voilà quelques mois,…

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Nous sommes d’accord !

M. Ronan Dantec. … sinon nous aurions peut-être deux collectivités selon le même modèle de fonctionnement.

En tout cas, si ce soir le Sénat parvient à se rassembler derrière l’amendement du Gouvernement, il s’agira d’un message extrêmement fort et très positif.

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.

M. Christian Favier. Même si chacun connaît notre attachement au département, notre groupe votera cet amendement. Nous considérons qu’il existe effectivement une spécificité de la Corse et qu’il est nécessaire de faire évoluer son statut.

Je n’aurai qu’un regret : le fait que cette nouvelle organisation ne soit pas soumise à un référendum. On nous dit qu’une large majorité d’élus est favorable à cette évolution, mais la population pourrait, elle aussi, donner son avis. Je ne comprends pas pourquoi on ne lui fait pas confiance. L’opinion publique étant mieux préparée, nous obtiendrions sans doute un autre résultat que lors du référendum de 2003.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Requier. Notre ami Joseph Castelli a parlé avec son cœur de Corse pour dire qu’il soutenait ce texte. Le groupe du RDSE le suivra.

Par ailleurs, j’indique que j’ai reçu procuration pour ce soir de MM. Jean-Noël Guérini, d’origine corse, Michel Amiel, Mme Mireille Jouve et M. Robert Navarro.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 682.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 13 est ainsi rédigé.

Article 13 (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 13 bis (précédemment réservé)

Article 13 bis A (précédemment réservé)

I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L. 4132-6 est ainsi modifié :

a) Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :

« Le règlement intérieur détermine les droits des groupes d’élus régulièrement constitués et les droits spécifiques des groupes minoritaires ou s’étant déclaré d’opposition. » ;

b) (nouveau) Au début de la dernière phrase, les mots : « Le règlement intérieur » sont remplacés par le mot : « Il » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article L. 4132-23 est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Ils peuvent se déclarer d’opposition. Sont considérés comme groupes minoritaires ceux qui ne se sont pas déclarés d’opposition, à l’exception de celui dont l’effectif est le plus élevé. »

3° (nouveau) Après la première phrase de l’article L. 3121-8, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Ce règlement intérieur détermine notamment les droits des groupes d’élus régulièrement constitués et les droits spécifiques des groupes minoritaires ou s’étant déclaré d’opposition. » ;

4° (nouveau) Le deuxième alinéa de l’article L. 3121-24 est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Ils peuvent se déclarer d’opposition. Sont considérés comme groupes minoritaires ceux qui ne se sont pas déclarés d’opposition, à l’exception de celui dont l’effectif est le plus élevé. »

II. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2016.

M. le président. L'amendement n° 765, présenté par MM. Hyest et Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 9

1° Remplacer le mot :

Ce

par le mot :

Le

2° Supprimer le mot :

notamment

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Il s’agit d’une harmonisation rédactionnelle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 765.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 251 rectifié bis, présenté par M. Collomb, Mmes Schillinger et Guillemot et MM. J.C. Leroy, Patriat, Percheron et Chiron, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. - Les 1° et 2° du I du présent article entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2016. Les 3° et 4° du même I entrent en vigueur à compter du prochain renouvellement général des conseils départementaux.

La parole est à M. Jacques Chiron.

M. Jacques Chiron. La commission des lois a souhaité étendre aux conseils départementaux les éléments relatifs aux notions de groupes politiques dits « d’opposition », « majoritaires » ou « minoritaires » introduits initialement pour les conseils régionaux. En parfaite cohérence avec le renouvellement général des conseils régionaux, le II de l’article 13 bis A vise à rendre applicable ces dispositions aux régions à compter du 1er janvier 2016.

S’agissant des conseils départementaux, dans la mesure où leur renouvellement général est intervenu en mars 2015, chacun d’entre eux dispose, aujourd’hui, d’un règlement intérieur exécutoire. En conséquence, afin d’éviter une révision de ces derniers au 1er janvier 2016, le présent amendement tend à différer l’entrée en vigueur des dispositions applicables aux conseils départementaux à compter de leur prochain renouvellement général.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Est-il bien raisonnable d’attendre 2021 pour accorder à l’opposition les droits dont elle bénéficie dans d’autres assemblées ?

M. Philippe Kaltenbach. Pour les petites communes, vous n’avez pas hésité !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Ce n’est pas pareil ! J’ai simplement dit qu’une telle mesure ne se justifiait pas dans une petite commune, ce qui n’est pas le cas dans un conseil général.

Personnellement, j’ai été victime pendant dix ans d’un total ostracisme de la part de la majorité départementale. Même si des changements de majorité sont intervenus dans nombre de départements, je souhaite donner des droits à l’opposition le plus rapidement possible. C’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. L’amendement vise à fixer au prochain renouvellement général des conseils départementaux la date à laquelle devront figurer dans le règlement intérieur les droits spécifiques accordés aux groupes minoritaires ou déclarés d’opposition.

Les assemblées départementales venant juste d’être renouvelées, cette proposition me semblait être de bonne administration pour ne pas remettre en cause, en cours de mandat, leur règlement intérieur dans les cas où il aurait déjà été adopté.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. De là à attendre 2021 !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Nous avons déjà pris des mesures de ce genre pour les communes nouvelles ou pour les métropoles, monsieur le rapporteur. Au départ, rappelez-vous, j’étais un peu réticente.

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Ce n’était pas de même nature !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Vous avez raison, mais la logique est la même. C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Je ne voudrais pas allonger le débat, sachant que le Sénat planche depuis de longues heures sur ce texte.

M. le président. Et il reste encore de longues heures de débat !

M. Jean-Baptiste Lemoyne. J’en suis conscient, monsieur le président.

Cela étant, cet amendement me paraît un peu bizarre. Les droits des groupes minoritaires ou d’opposition peuvent être assez facilement mis en place. La modification du règlement intérieur d’un conseil départemental peut être obtenue lors d’une séance se tenant dans le courant de l’automne, par exemple. D’ailleurs, un certain nombre d’assemblées ont créé des groupes de travail pour réexaminer leur règlement au regard de certaines évolutions, notamment la transformation du conseil général en conseil départemental. Il serait donc dommage d’attendre six ans. À mon sens, il vaudrait mieux que notre collègue retire son amendement.

M. le président. La parole est à M. Jacques Chiron, pour explication de vote.

M. Jacques Chiron. Je me rends à la sagesse : je retire l’amendement.

M. le président. L'amendement n° 251 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l'article 13 bis A, modifié.

(L'article 13 bis A est adopté.)

Article 13 bis A (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 29

Article 13 bis (précédemment réservé)

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 353 rectifié est présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.

L'amendement n° 588 rectifié bis est présenté par MM. Gabouty, Canevet, Cigolotti, Frassa et Guerriau, Mme Hummel et MM. Luche et Morisset.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La quatrième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifiée :

1° Le chapitre IV du titre III du livre Ier est abrogé.

2° Le chapitre unique du titre IV du livre II est abrogé.

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 353 rectifié.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement de M. Mézard est iconoclaste, car il vise à supprimer le CESER, le Conseil économique, social et environnemental régional. Plusieurs arguments viennent à l’appui de cette suppression.

Le premier est que l’impact des CESER est très limité sur les décisions de la région. Cela peut notamment s’expliquer par le mode de désignation des conseillers de ces assemblées, qui sont nommés par les préfets. Nous pensons par ailleurs que la nécessité de consulter la société civile est une exigence qui doit être portée par la représentation démocratique, à savoir les conseils régionaux. C’est ne pas faire confiance à cette dernière que de penser qu’elle peut prendre des décisions sans écouter la société civile.

Le deuxième argument a trait au mécanisme de fonctionnement des CESER, qui se voient confier la mission de se prononcer sur tout et n’importe quoi sans avoir réellement les moyens de le faire. Il est ainsi très compliqué d’analyser l’influence réelle de ces conseillers, qui traitent de sujets de spécialistes sans forcément en avoir la maîtrise complète. De surcroît, l’avis des CESER est simplement consultatif – ce fait s’explique aussi par leur composition.

Enfin, le troisième argument vient en complément des deux premiers : les CESER ont un coût exorbitant. Ils coûtent très cher aux régions alors même que, pour la période 2015-2017, les dotations de l’État aux collectivités territoriales sont appelées à diminuer de 11 milliards d’euros, soit 3,67 milliards d’euros par an. En effet, les collectivités sont tenues de concourir aux 50 milliards d’euros d’économies de dépenses publiques prévus par le programme de stabilité.

Si le budget de fonctionnement du CESER d’Auvergne atteint environ 125 000 euros, les soixante-quinze conseillers qui y travaillent sont, eux, rémunérés directement par la région, entre 700 et 1 500 euros par mois. Ainsi, chaque année, ce CESER coûte près de 1 million d’euros.

Lorsqu’on met dans la balance les coûts et les avantages des CESER et que l’on établit le bilan, il apparaît clairement que les seconds l’emportent largement sur les premiers.

Plus que jamais, on demande aux collectivités de faire des économies. À cet égard, le rapport relatif à l’évolution des finances locales à l’horizon de 2017, dont M. Mézard est le corapporteur, souligne que la moitié des collectivités territoriales pourraient se trouver en difficulté en 2018, en dépit des efforts considérables qu’elles accomplissent au titre de leurs dépenses. À nos yeux, il est donc grand temps de songer à supprimer ce que M. Mézard qualifie de « pièces rapportées de la démocratie locale ».

M. le président. L’amendement n° 588 rectifié bis n’est pas soutenu.

L'amendement n° 563, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article L. 4134-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il a pour mission d'informer le conseil régional sur les enjeux et conséquences économiques, sociaux et environnementaux des politiques régionales, de participer aux consultations organisées à l'échelle régionale, ainsi que de contribuer aux évaluations et au suivi des politiques publiques régionales. »

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Tout en présentant cet amendement, je m’exprimerai au sujet du précédent – nous gagnerons ainsi un peu de temps.

Il s’agit ici de renforcer les pouvoirs et missions des CESER, ce à rebours du précédent amendement, dont je mesure bien la dimension provocatrice.

Au cours de ses nombreuses interventions cette semaine, M. Mézard a lui-même beaucoup insisté sur ce danger : que la région devienne un grand « machin », dont les élus seraient coupés de la réalité des territoires – sauf erreur de ma part, je ne caricature pas ses propos. Or, dans la même logique, M. Mézard suggère de supprimer une instance consultative, permettant précisément aux élus de rester en contact avec les territoires : ces deux propos me semblent quelque peu contradictoires.

En revanche, je fais mien pour partie l’argumentaire développé à l’instant par M. Requier. En effet, à mon sens, on ne saurait laisser les CESER au milieu du gué.

Dès lors que l’on dresse ce constat, on est placé face à cette alternative : rejoindre l’une ou l’autre des deux rives, c’est-à-dire, soit supprimer les CESER, soit renforcer leurs pouvoirs.

À l’heure actuelle, on ne dispose pas d’un bicamérisme régional. Or on peut supposer que ce système ne se mettra pas en place très rapidement. Dès lors, il est indispensable de disposer d’une instance émettant des avis et éclairant les décisions du conseil régional. Seul le CESER peut jouer ce rôle. Néanmoins, la nomination de ses membres par le préfet pose problème. Je songe au CESER que je connais le mieux, à savoir celui des Pays de la Loire : dans un contexte où certains projets font débat, le préfet se montre peu enclin à nommer des acteurs environnementaux au sein de cette instance… À l’évidence, ce mode de désignation est une difficulté.

En outre, il est certain que les CESER doivent se porter sur le terrain de l’évaluation de l’action publique. Il s’agit là d’un enjeu majeur. À l’heure actuelle, cette mission est mal remplie à l’échelle régionale. Voilà pourquoi ces conseils doivent être investis de nouvelles attributions et pourvus d’un pouvoir d’autosaisine.

Il ne faut pas laisser les conseillers régionaux seuls, surtout dans les très grandes régions qui viennent d’être créées et qui seront appelées à prendre des décisions de plus en plus importantes. Un véritable bicamérisme pourrait être un nouveau mode de fonctionnement au niveau régional, mais, je le répète, il ne se fera pas jour avant plusieurs années. Aussi, le renforcement du CESER répond pour partie aux enjeux qui se font jour, dans une logique de réforme.

Cela étant, je rejoins M. Mézard sur ce point : nous ne pouvons pas nous en tenir à la situation actuelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. On ne peut pas affirmer que les CESER ne servent à rien. Certains coûtent peut-être 1 million d’euros par an, mais, parallèlement, nombre de collectivités consacrent à la réalisation d’études des budgets beaucoup plus élevés, alors même qu’elles pourraient confier ces travaux aux CESER.

M. René Vandierendonck, corapporteur. Très juste !

M. Jean-Jacques Hyest, corapporteur. Mes chers collègues, vous le savez, l’une des devises de la commission des lois est in medio stat virtus. Au nom de ce principe, nous refusons à la fois de supprimer et de renforcer les CESER. En conséquence, j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. Ronan Dantec. Alors, nous resterons au milieu du gué !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote sur l’amendement n° 353 rectifié.