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Dépôt d’un document

Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le contrat d’objectifs et de moyens de l’Institut national de l’audiovisuel pour la période 2015-2019.

Acte est donné du dépôt de ce document.

Il a été transmis à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, ainsi qu’à la commission des finances.

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Dossier législatif : proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Saint-Barthélemy

Adoption définitive en deuxième lecture d'une proposition de loi organique dans le texte de la commission, après procédure d'examen en commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, en deuxième lecture, sur la proposition de loi organique, modifiée par l’Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy, et dont l’inscription à l’ordre du jour a été demandée par le groupe Les Républicains (proposition n° 518 [2014-2015], texte de la commission n° 73, rapport n° 72).

La conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné selon la procédure d’examen en commission prévue par l’article 47 ter du règlement du Sénat.

Au cours de cette procédure, le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement s’exerce en commission, la séance plénière étant réservée aux explications de vote et au vote sur l’ensemble du texte adopté par la commission.

La commission des lois, saisie au fond, s’est réunie le mercredi 14 octobre 2015 pour l’examen des articles et l’établissement du texte.

Le rapport a été publié le même jour.

Avant de mettre aux voix l’ensemble du texte adopté par la commission, je vais donner la parole, conformément à l’article 47 ter, alinéa 11, de notre règlement, au Gouvernement, puis au rapporteur de la commission, pendant dix minutes, et, enfin, pendant sept minutes au maximum, à un orateur par groupe.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer, qui ne peut être présente aujourd’hui en raison d’un déplacement aux Antilles.

Le Sénat examine en seconde lecture la proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy dans le cadre d’une nouvelle procédure, la procédure d’examen simplifiée en commission.

Huit ans après le vote de la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy en collectivité d’outre-mer dotée de l’autonomie, il était nécessaire d’apporter certaines évolutions.

Le Gouvernement ne peut que se féliciter que cette révision d’une loi organique soit le fruit d’une initiative parlementaire. Je tiens à cet égard à saluer la réflexion approfondie et les échanges qui ont précédé les propositions formulées dans ce texte.

Les ajustements statutaires dont il est porteur ouvrent la voie à une évolution des règles qui régissent la collectivité de Saint-Barthélemy dans le sens d’une meilleure adéquation avec les réalités locales. Cette réforme statutaire permettra de mieux répondre aux attentes des élus et de la population.

La présente proposition de loi organique apporte de nombreuses clarifications concernant le fonctionnement institutionnel de la collectivité, l’information de son conseil territorial, la saisine du conseil économique, social et culturel ou encore la composition de la commission consultative d’évaluation des charges.

Sans entrer dans les détails du texte, on peut retenir que l’article 1er permettra de renforcer les prérogatives du conseil territorial en matière de droit de préemption et que l’article 3 consacrera le pouvoir de la collectivité de fixer des sanctions administratives, ce qui complétera utilement les pouvoirs dont elle dispose actuellement.

L’article 4 bis permettra de délivrer les cartes et titres de navigation pour les navires de plaisance à usage personnel non soumis à francisation. C’était un souhait formulé par la collectivité depuis de nombreuses années ; le voilà désormais satisfait.

Pour ce qui est du fonctionnement des institutions, l’article 7 permettra au président du conseil territorial de Saint-Barthélemy d’être habilité, pour la durée de son mandat et par une délibération du conseil territorial, à intenter des actions et à les défendre devant les juridictions administratives et pénales au nom de la collectivité.

Toutes ces mesures contribuent à l’actualisation nécessaire du statut de la collectivité de Saint-Barthélemy, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Parmi les nouveautés introduites dans le texte lors de son passage à l’Assemblée nationale, deux dispositions particulières paraissent particulièrement importantes.

Tout d’abord, en matière d’habilitation de peines telle que définie à l’article LO 6251-3 du code général des collectivités territoriales, l’État devra désormais s’astreindre à une meilleure réactivité pour approuver totalement ou partiellement ou refuser d’approuver les demandes de la collectivité. À défaut de réponse dans un délai de trois mois, la collectivité pourra saisir le Conseil d’État pour astreindre l’État à répondre. Ces dispositions vont dans le sens d’une meilleure application des adaptations des peines proposées par la collectivité à l’échelon local.

Il est clair que la collectivité souhaite – et on peut le comprendre – une meilleure effectivité dans les mesures qu’elle adopte. Même si la saisine du Conseil d’État au-delà du délai de trois mois peut apparaître comme une mesure forte, il n’en reste pas moins que cela oblige l’État à être plus vertueux dans le traitement des habilitations de peines.

Ensuite, l’article 4 quater, introduit à l’Assemblée nationale sur l’initiative du député Daniel Gibbes, crée la possibilité d’habiliter le conseil territorial, à titre expérimental et pour une durée maximale de trois ans, à adopter des actes dans le domaine de la sécurité sociale, afin de prévoir les conditions de gestion du régime général par un établissement situé dans son ressort géographique. Sur le fond, le Gouvernement n’était pas et n’est toujours pas favorable à une telle mesure. Néanmoins, compte tenu de l’encadrement juridique de cette demande d’habilitation, il n’a pas souhaité déposer d’amendement devant la commission des lois pour la supprimer.

D’ailleurs, les difficultés en matière de continuité du service public de la sécurité sociale sont désormais réglées, puisque, depuis l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale et l’adoption de cet article, les choses ont quelque peu changé. En effet, dans le cadre du projet de loi d’actualisation du droit des outre-mer, le Gouvernement a introduit une disposition instaurant une antenne locale de sécurité sociale à Saint-Barthélemy. La création de cette antenne traduit fidèlement l’engagement pris par le Président de la République lors de son voyage officiel aux Antilles et répond aux attentes des usagers, qui souhaitent une proximité accrue de ce service public essentiel au quotidien.

Le cheminement de ce texte arrive à son terme. Le Gouvernement ne peut que se féliciter des nombreux échanges et du travail approfondi qui ont été menés. En tout état de cause, il est évident que nous allons, grâce à ce texte, améliorer le fonctionnement de la collectivité de Saint-Barthélemy. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, qu’il me soit permis, en préambule, de saluer notre collègue Michel Magras, qui a non seulement lancé ce débat sur l’ajustement du statut de Saint-Barthélemy, mais aussi permis d’ouvrir la discussion à d’autres services, notamment le service rendu localement aux usagers de la sécurité sociale.

Preuve de l’excellence des mesures proposées, notre collègue député Daniel Gibbes, rapporteur de ce texte à l’Assemblée nationale, a respecté l’esprit du travail sénatorial. Cela s’est traduit par une convergence dès la première lecture. C’est ainsi que neuf articles ont été adoptés dans les mêmes termes, trois articles ont fait l’objet d’une suppression conforme et trois articles n’ont subi que des modifications rédactionnelles ou de coordination.

Deux articles diffèrent sensiblement du texte adopté par le Sénat le 29 janvier dernier, mais ces différences ont paru suffisamment acceptables à votre commission des lois pour qu’elle adopte conforme le texte modifié par les députés. Les deux rectifications, introduites aux articles 4 ter et 4 quater, portent sur la faculté donnée au législateur organique par l’article 74 de la Constitution de prévoir qu’une collectivité d’outre-mer « peut participer, sous le contrôle de l’État, à l’exercice des compétences qu’il conserve, dans le respect des garanties accordées sur l’ensemble du territoire national pour l’exercice des libertés publiques ».

Plus précisément, l’article 4 ter tend à modifier l’article LO 6251-3 du code général des collectivités territoriales, qui définit la procédure permettant à l’État – au Gouvernement puis, éventuellement, au Parlement – d’approuver ou non les propositions ou projets d’acte de la collectivité dans un domaine qui relève de la compétence de l’État.

Or la pratique démontre que le Gouvernement n’approuve pas ou ne refuse pas l’approbation dans le délai de deux mois prévu par la loi organique, empêchant le Parlement de pouvoir même se prononcer ; nous ne pouvons que le déplorer.

En première lecture au Sénat, une solution consensuelle avait été élaborée en séance publique. Nous avions proposé que le Parlement, uniquement lorsqu’étaient en cause des matières législatives, puisse approuver lui-même ces actes plutôt que d’attendre le décret d’approbation.

Pour répondre aux observations formulées par le rapporteur de l’Assemblée nationale, permettez-moi de rappeler que ce mécanisme, qui avait reçu l’accord de la commission des lois et du Gouvernement, ne contrevenait évidemment pas à la Constitution. L’Assemblée nationale a préféré un autre dispositif : il s’agit de permettre à la collectivité de saisir le Conseil d’État en référé pour qu’il se prononce dans un délai de quarante-huit heures et enjoigne au Gouvernement, éventuellement sous astreinte, de prendre le décret requis.

L’objectif étant partagé par nos deux assemblées, la commission des lois vous propose de vous rallier à ce dispositif suffisamment efficace pour garantir à l’avenir le respect de la volonté du législateur organique.

Madame la secrétaire d’État, je forme le vœu que le président du conseil territorial n’ait pas à exercer cette voie de recours, car cela signifierait que le Gouvernement n’a pas statué en temps voulu.

L’article 4 quater a trait à la création d’une « caisse de prévoyance sociale de Saint-Barthélemy ». Il s’agit d’une revendication ancienne, à laquelle est très attaché notre collègue Michel Magras, et que le Président de la République s’est engagé à soutenir le 8 mai dernier, lors de sa visite sur l’île.

L’Assemblée nationale a traduit cet engagement en autorisant une expérimentation de la participation de la collectivité à l’exercice des compétences de l’État dans le domaine de la sécurité sociale.

La formule est audacieuse et présente une double originalité. C’est en effet la première fois que le législateur organique prévoit une telle participation « â titre expérimental » et qu’il conditionne sa mise en œuvre à une habilitation par décret en Conseil d’État, renvoyant ainsi l’application d’une disposition organique à une mesure gouvernementale. La décision que le Conseil constitutionnel sera appelé à rendre sur ce texte pourra nous éclairer utilement sur les limites de cette possibilité.

En tout état de cause, et en attendant, l’article 7 de la loi du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer a permis la création de cette caisse à Saint-Barthélemy. Dès lors, l'objectif visé à travers l’article 4 quater est déjà satisfait. Néanmoins, la commission des lois a préféré conserver cet article en l’état, afin de permettre l’entrée en vigueur de ce dispositif dans les plus brefs délais.

Je voudrais, pour conclure, souligner la qualité du travail parlementaire sur ce texte – travail qui, si vous le décidez, sera parachevé ce matin, avant l’examen du texte par le Conseil constitutionnel. Sans procédure accélérée et dans le cadre de la navette, cette proposition de loi organique d’origine sénatoriale a pu être examinée en moins d’un an, grâce aux inscriptions à l’ordre du jour sollicitées par les groupes parlementaires des deux assemblées et à l’attention bienveillante du Gouvernement.

Ce texte sera ainsi la première réforme statutaire d’ensemble d’une collectivité d’outre-mer issue d’une initiative parlementaire. J’y vois un sérieux démenti opposé à ceux qui estiment que le Parlement et, plus encore, le bicamérisme seraient un frein à la réforme.

Je voudrais également souligner le consensus auquel a donné lieu l’élaboration de ce texte au sein des deux chambres, consensus que le vote de la commission des lois, le 14 octobre dernier, a confirmé. Huit ans après la création de la collectivité de Saint-Barthélemy, c’est le signe de l’intérêt attentif et vigilant que le Sénat porte à la situation – toujours singulière – de nos compatriotes ultramarins.

Aussi la commission des lois vous demande-t-elle d’apporter vos suffrages à ce texte, afin de permettre son adoption définitive. (Applaudissements.)

Explications de vote

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi organique portant diverses dispositions relatives à la collectivité de Saint-Barthélemy
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du RDSE.

M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi organique relative à la collectivité de Saint-Barthélemy, déposée par notre collègue Michel Magras, nous revient en deuxième lecture : nous voilà donc partis pour un second voyage virtuel aux Antilles ! (Sourires.)

Un bref rappel de l’histoire de cette petite île paradisiaque des Caraïbes nous montre le long chemin parcouru depuis sa découverte, en 1493, par Christophe Colomb, lors de son deuxième voyage vers le Nouveau Monde – il l’avait baptisée ainsi en l’honneur de son frère Bartolomé. Plusieurs siècles se sont en effet écoulés depuis que Saint-Barthélemy est entrée, comme plusieurs autres îles des Caraïbes, dans l’histoire de France au milieu du XVIIe siècle.

En 1946, la loi de départementalisation rattache Saint-Barthélemy au département de la Guadeloupe et devient l’une de ses communes.

En 1957, David Rockefeller, un riche Américain, achète une propriété de vingt-sept hectares pour une somme modique, quelques milliers de dollars (Nouveaux sourires.), engageant la transformation de l’île en une destination touristique « haut de gamme » : Saint-Barthélemy devient alors « Saint-Barth ».

En 1963, Saint-Barthélemy et Saint-Martin deviennent le troisième arrondissement de la Guadeloupe.

La loi organique du 21 février 2007 donne enfin à Saint-Barthélemy le statut de collectivité d’outre-mer au sens de l’article 74 de la Constitution.

Les évolutions de cette toute nouvelle collectivité, au présent et à l’avenir radieux, font l’objet d’un consensus remarquable entre les deux assemblées : beau symbole de la réussite de l’évolution statutaire progressive qu’a connue l’île depuis plusieurs années !

Le texte adopté en première lecture par le Sénat et modifié par l’Assemblée nationale apporte ainsi des solutions aux difficultés diverses de gestion quotidienne rencontrées par Saint-Barthélemy. Nous y voyons une nouvelle preuve de la nécessité, dans le travail législatif, de l’expérience du terrain dont disposent les élus locaux que nous sommes.

Nous avions émis des réserves, en première lecture, concernant l’exercice par la collectivité de compétences régaliennes de police et de sécurité.

Dans sa rédaction originelle, l’article 2 répondait à poursuivre deux objectifs : modifier les conditions de la participation de la collectivité de Saint-Barthélemy à l’exercice des compétences conservées par l’État ; étendre le champ de cette participation aux domaines de l’entrée et du séjour des étrangers et à celui de la procédure pénale. Cette disposition s’inspirait du dispositif analogue prévu par le statut de la Polynésie française, jugé conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel.

Les doutes du Sénat, qui s’étaient traduits par la suppression de cet article, ont été confortés par l’Assemblée nationale, ce dont nous nous félicitons. Le texte permet à présent que soit garantie la délicate conciliation entre les principes constitutionnels d’unité et d’indivisibilité, d’une part, d’organisation décentralisée de la République et de libre administration, d’autre part.

Le « régime de l’Atlantique », c'est-à-dire le régime du « tout est applicable sauf... », en vigueur à Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, est préservé, et nous en sommes d’autant plus satisfaits que la République elle-même reste intacte !

De la préservation de l’environnement à la régulation du parc automobile, en passant par la facilitation de l’exercice du droit de préemption par la collectivité, le texte offre des solutions afin de préserver la voie déjà tracée d’un développement touristique maîtrisé et vertueux. L’élargissement des prérogatives du conseil territorial, pour l’ensemble des compétences qu’il exerce, en matière de sanctions administratives, s’inscrit également dans cette perspective.

De la même façon, le texte tend à répondre aux difficultés de gouvernance particulières que rencontrent ces territoires particulièrement éloignés de la métropole, qui peuvent parfois se sentir délaissés.

Nous savons d’ailleurs que le sentiment d’insularité n’est pas propre aux îles. Comme a l’habitude de le répéter le président Jacques Mézard, les îles sont parfois intérieures, telles certaines zones rurales et même « hyper-rurales », pour reprendre une expression chère à un autre de mes collègues du groupe du RDSE, Alain Bertrand.

Le fonctionnement institutionnel de l’assemblée territoriale sera facilité par la possibilité accordée au président du conseil territorial d’ester en justice, par la précision des règles de convocation du conseil territorial en cas d’urgence, ainsi que par la consolidation de la pratique de transmission aux conseillers territoriaux des projets de délibération arrêtés par le conseil exécutif.

Une divergence est apparue entre les deux assemblées concernant la sanction de l’inaction du Gouvernement : alors que le Sénat avait proposé, en cas d’inertie gouvernementale, que le Parlement puisse approuver totalement ou partiellement la proposition ou le projet d’acte local intervenant dans le domaine de la loi, l’Assemblée nationale a opté pour une réponse juridictionnelle, inscrite elle-même dans des délais brefs. Cette solution est sage ; le temps nous dira si elle est efficace et permet de remédier aux lenteurs gouvernementales.

Rapide, elle, la navette parlementaire a permis d’adopter cette proposition de loi organique en des temps records, s’agissant de sujets qui ne faisaient quasiment plus débat.

C’est un modèle d’initiative parlementaire éclairée. Il faut en effet savoir ériger des ponts entre des îles éloignées… N’en déplaise à certains, la force du bicamérisme est aussi là, comme l’a fort bien dit M. le rapporteur tout à l’heure.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues : le groupe du RDSE apporte unanimement son soutien au texte qui nous est soumis. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau, pour le groupe UDI-UC.

M. Joël Guerriau. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous parvenons aujourd’hui au terme d’un processus législatif amorcé il y a plus de deux ans, lorsque la collectivité de Saint-Barthélemy a souhaité faire évoluer son statut, dans le cadre ouvert tant par l’article 74 de la Constitution que par la loi organique de 2007, qui a fait de Saint-Barthélemy une collectivité à part entière.

Je tiens d’abord à féliciter chaleureusement, pour sa constance, notre collègue président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, Michel Magras, auteur de la présente proposition de loi organique. Ses efforts, avec l’appui éclairé de la commission des lois et de son rapporteur, Mathieu Darnaud, ont conduit à la rédaction d’un texte solide et équilibré.

Cette réussite a été confirmée par nos collègues députés, qui n’ont pas dénaturé l’esprit du texte et ont au contraire travaillé dans un esprit à la fois constructif et respectueux du souhait exprimé par la collectivité de Saint-Barthélemy ; nous pouvons nous en réjouir.

Cette proposition de loi organique parvient fondamentalement à joindre la volonté d’une collectivité ultramarine à un mouvement plus large de refonte de notre architecture institutionnelle locale.

Le texte adopté par la commission des lois ouvre à Saint Barthélemy la perspective d’une autonomie maîtrisée, respectueuse des compétences de l’État.

Le regard de la métropole sous-estime trop souvent le poids de l’histoire et de l’éloignement. Or les besoins locaux en matière de service public sont toujours dictés par les nécessités du terrain. Le régime de l’article 74 de la Constitution fait droit à ces nécessités, en permettant une souplesse juridique d’autant plus profitable que les territoires concernés sont les plus éloignés géographiquement de la métropole. Saint-Barthélemy a ainsi pu définir ses propres outils pour répondre aux besoins de ses résidents.

La collectivité territoriale sera donc plus en phase avec les enjeux et les réalités locales. La présente proposition de loi organique clarifie ses compétences institutionnelles ; elle permettra une meilleure information des conseillers territoriaux s’agissant des affaires qui leur sont soumises ; elle explicite clairement les modalités de saisine du conseil économique, social, culturel et environnemental, ainsi que la composition de la commission consultative d’évaluation des charges.

L’Assemblée nationale a introduit deux nouveautés, sans renier toutefois l’esprit du texte ni « l’équilibre général du dispositif », pour reprendre les termes de Michel Magras en commission.

En premier lieu, l’État devra être plus réactif pour approuver ou refuser l’habilitation des peines demandées par la collectivité : à défaut de réponse dans les trois mois, la collectivité pourra saisir le Conseil d’État pour astreindre l’État à se prononcer dans les quarante-huit heures.

Certes, cette mesure est assez « énergique », comme l’a qualifiée Mme la ministre des outre-mer en commission, mais son existence aura au moins le mérite d’inciter l’administration à davantage d’efficacité.

En second lieu, l’Assemblée nationale est revenue sur la suppression par le Sénat de la disposition prévoyant la création d’une caisse de prévoyance sociale propre à Saint-Barthélemy. Elle a en effet prévu, en introduisant un article 4 quater, d’autoriser l’État à habiliter la collectivité de Saint-Barthélemy à adopter des actes dans le domaine de la sécurité sociale, à titre expérimental et pour trois ans.

La caisse de prévoyance sociale de Saint-Barthélemy a été récemment créée. Cette caisse « locale », longtemps souhaitée par la collectivité, et dont la création avait été promise par le Président de la République, François Hollande, lors de sa visite du 8 mai 2015, réussit la synthèse entre le refus de la collectivité d’un transfert intégral de la compétence de sécurité sociale, d’une part, et le souci de répondre aux besoins de nos concitoyens, d’autre part.

Cette disposition permettra sans doute à la collectivité territoriale d’envisager des échanges avec les services de l’État sur l’adaptation des taux. Un tel dispositif doit en tout cas permettre aux habitants de Saint-Barthélemy – comme à tous nos concitoyens, quel que soit le territoire français où ils sont domiciliés – d’avoir accès aux mêmes services que ceux dont jouissent nos compatriotes résidant en métropole. Il s’agit d’un droit fondamental, auquel notre groupe est profondément attaché.

À l’instar du projet de loi relatif à la dématérialisation du journal officiel, le présent texte a été examiné selon la nouvelle procédure d’examen en commission. Cette innovation issue de la dernière révision de notre règlement prouve une fois encore son efficacité et sa pertinence. Je tiens à remercier et à féliciter l’ensemble des services du Sénat qui ont contribué à sa réussite.

Pour toutes ces raisons, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe UDI-UC votera en faveur de l’adoption de ce texte.

Il ne me reste plus qu’à souhaiter que son examen – de droit – par le Conseil constitutionnel confirme cette réussite et rende ainsi justice à la grande qualité de cet excellent travail législatif. (Applaudissements.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe CRC.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, arrivés au terme du parcours législatif de cette proposition de loi organique relative à la collectivité de Saint-Barthélemy, nous pouvons, je le crois, nous féliciter du travail accompli, en particulier au Sénat. Comme nous avons peu d’occasions de le faire ces temps-ci, je tenais à le souligner.

La proposition de loi organique de notre collègue Michel Magras résulte d’un vrai travail de réflexion parlementaire, mené dans la transparence avec les pouvoirs locaux, en lien avec l’État. Notre collègue avait, pour l’essentiel, repris les différentes propositions faites par le conseil territorial de l’île.

Ce texte est en outre l’aboutissement d’une démarche constructive, qui s’inscrit dans le processus d’autonomisation entamée dès 2003 par la consultation des habitants, tout en répondant à l’esprit de la révision constitutionnelle de 2003 et de la loi organique de 2007.

En première lecture, cette démarche avait semblé logique à notre groupe : il est tout à fait compréhensible que le statut de cette collectivité nécessite quelques adaptations après huit ans d’usage.

Sur le fond, la proposition de loi organique ne remettait en cause ni l’équilibre des institutions de Saint-Barthélemy ni son statut de collectivité d’outre-mer. Elle permettait donc d’adapter le cadre législatif aux spécificités de l’outre-mer, dans le respect des équilibres institutionnels et de l’unité de la République française.

Cela étant, si nous approuvions le souhait de procéder à des ajustements du statut, nous nous opposions fermement à deux articles. Ils ont heureusement été supprimés, puis rétablis, mais modifiés.

Le premier concernait la possibilité d’une participation plus importante de la collectivité aux compétences de l’État dans différents domaines. À nos yeux, une telle disposition ouvrait la voie à une dépossession de l’État de certaines de ses prérogatives régaliennes.

Le second visait à instituer des règles en faveur d’un régime de sécurité sociale qui serait, là aussi, spécifique à Saint-Barthélemy.

Dans les deux cas, nous refusions qu’une portion du territoire français puisse s’affranchir de la législation nationale métropolitaine. Il nous semblait nécessaire de mettre un frein aux velléités de quelques nouvelles collectivités d’outre-mer d’empiéter sur les compétences régaliennes.

C’est pourquoi nous sommes satisfaits que nos collègues députés aient trouvé une solution, dans le cadre de l’article 74 de la Constitution, afin que Saint-Barthélemy puisse participer aux compétences de l’État. Le Conseil d’État pourrait être saisi en référé si le Gouvernement tardait au-delà du délai imparti à statuer sur une proposition ou un projet d’acte local pour lequel son approbation est requise.

Une telle disposition ne sera certainement pas inutile. C’est même, me semble-t-il, une bonne manière de remédier à une forme de mauvaise volonté gouvernementale dont nous avons trop souvent pu faire le constat, notamment par le passé.

Quid de la pertinence d’instaurer un régime et d’une caisse spécifique de sécurité sociale propre à la collectivité de Saint-Barthélemy ? Notre groupe avait été d’accord pour écarter cette possibilité. De surcroît, comme l’ensemble de nos collègues, nous avions également estimé que la création d’une caisse autonome de sécurité sociale ne relevait pas d’une loi organique.

Néanmoins, la situation est particulière à Saint-Barthélemy. L’absence de caisse de sécurité sociale locale a pu, en effet, provoquer des dysfonctionnements dans le versement des prestations aux assurés.

On peut aussi comprendre le point de vue de nos concitoyens qui habitent sur place. Étant sur une île de 9 000 habitants qui connaît une situation proche du plein-emploi, ils estiment cotiser plus qu’ils ne perçoivent en prestations. Je ne partage pas cette curieuse conception des principes et de la solidarité qui fondent notre système de sécurité sociale. Mais le Gouvernement est dans son rôle quand il souhaite trouver une solution pour répondre à cette insatisfaction, d’autant que la solution proposée est d’origine parlementaire.

En permettant à la collectivité de mettre en place une « caisse de prévoyance sociale », nos collègues députés proposent une formule et des dispositions qui méritent d’être éprouvées.

Il peut y avoir des risques de dérive, avec la possibilité offerte au conseil territorial d’adopter des actes dans le domaine de la sécurité sociale pour prévoir les conditions de gestion du régime général par un établissement situé dans son ressort géographique. Toutefois, je crois que l’encadrement de cette expérimentation limitée à trois ans sera une garantie pour vérifier le bien-fondé, ou non de ce dispositif.

Et je vois une garantie supplémentaire de prévention de certaines dérives avec l’adoption définitive de la loi du 14 octobre 2015 d’actualisation du droit des outre-mer, qui a créé, non pas une caisse de sécurité sociale autonome, mais une caisse locale ne disposant pas de l’autonomie de gestion.

Je me suis limitée aux deux aspects qui me semblaient les plus importants et les plus sensibles de cette proposition de loi organique. Encore une fois, les solutions trouvées sont judicieuses.

Au total, sept ans après le vote de la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer, qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy – d’ailleurs, je n’ai toujours pas eu l’occasion de la visiter, monsieur Magras ! (Sourires.) – en collectivité d’outre-mer dotée de l’autonomie, j’estime que le travail parlementaire effectué en concertation avec Mme la ministre des outre-mer a fait évoluer le statut avec souplesse, grâce à une réelle prise en compte des réalités de la vie locale.

C’est la principale raison qui conduira le groupe CRC à voter ce texte. (Applaudissements.)