Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.

M. Gérard Roche. Il faut faire avec les choses telles qu’elles sont et non pas telles qu’on voudrait qu’elles soient !

Ce régime complémentaire n’a pas de financement et il faut bien trouver une solution. Celle qui est proposée par M. Daudigny consiste à recourir au FSV, c’est-à-dire qu’on utilise un dispositif général pour financer un régime complémentaire.

Le problème du FSV, c’est qu’il a cessé d’être un fonds de solidarité pour la vieillesse pour devenir une dépanneuse, qu’on va chercher dès qu’il y a un problème ! (Sourires.) Et à force de la charger, on peut se demander, madame la ministre, jusqu’où elle va pouvoir aller ! (Nouveaux sourires.)

En revanche, il me semble intéressant, par solidarité, d’opérer un prélèvement sur les 13 milliards d’euros de réserves du régime de retraite complémentaire du RSI et de les affecter aux entreprises du bâtiment. Alors, pourquoi attendre ? Soulageons tout de suite notre dépanneuse !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Je comprends la position du groupe communiste républicain et citoyen, conforme à sa logique d’opposition à la suppression de la C3S. En revanche, je ne comprends pas l’argumentation selon laquelle cette suppression serait un cadeau pour les grandes entreprises. Non ! Là, il s’agit de la couverture complémentaire des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics.

Mme Laurence Cohen. Non ! Ce n’est pas cela !

Mme Nicole Bricq. Peut-être avez-vous été un peu trop rapide dans votre propos ! On peut penser que cette suppression profite aussi aux artisans qui ont leur petite entreprise. C’est plutôt de cela qu’il s’agit, en l’occurrence.

Mme Laurence Cohen. Non ! Vous n’avez pas compris !

Mme Nicole Bricq. Je comprends la position de M. Vasselle, et je comprends aussi le rapporteur général, qui défend l’orthodoxie. Mme la ministre a argumenté sur la temporalité.

Franchement, il faut en finir avec ces histoires de tuyaux et de tuyauteries concernant toute la protection sociale ! Des tuyaux, il en existe de très gros et depuis très longtemps ! Même si l’on en crée un petit nouveau, qui finira par disparaître, cela ne se verra pas beaucoup !

Mme Laurence Cohen. Ce n’est pas un argument !

Mme Nicole Bricq. Quand on fait le croquis général de la tuyauterie de nos finances sociales, Beaubourg paraît vraiment dérisoire !

M. Alain Vasselle. Rappelez-vous qui a créé le FOREC !

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Je ne sais pas si quelqu’un est autorisé à lire dans mes pensées, mais j’aimerais que l’on cesse de profiter de cet amendement pour en tirer de grandes leçons ou rappeler de grands principes !

Le RCEBTP est un régime, désormais fermé, de retraite complémentaire pour les artisans du bâtiment et des travaux publics. Il ne comprend plus que 13 000 bénéficiaires environ. Il ne perçoit plus aucune cotisation depuis 1998. En effet, depuis cette date, les artisans du bâtiment et des travaux publics cotisent au régime complémentaire des artisans, le RCI. Cela veut dire que, depuis cette date, la solidarité nationale a assuré son financement par un prélèvement sur des contributions comme la C3S.

Si aucune mesure n’est prise, la totalité des droits restant dus, qui sont estimés à 250 millions d’euros sur une trentaine d’années – c’est l’un des éléments de réponse à une question posée –, devront être supportés par les réserves du régime complémentaire des indépendants, qui est devenu, en 1998, gestionnaire du RCEBTP.

Si le problème, qui remonte à 1998, n’a pas été identifié plus tôt, c’est parce que le RCEBTP disposait de réserves qui paraissaient encore suffisantes. Ensuite, on s’est aperçu que ces réserves allaient être épuisées à la fin de l’année. D’où la double solution proposée aujourd’hui. Cessons de donner de grandes leçons et d’invoquer les grands principes au sujet de cet amendement !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Le débat sur la proposition de M. Daudigny justifie – ô combien ! – le dépôt et le vote de l’amendement n° 48 rectifié de la commission, aux termes duquel toute utilisation des ressources du FSV doit passer par la loi. Nous venons d’avoir une belle illustration des possibilités d’utilisation du FSV par voie réglementaire ! Le Sénat a eu tout à fait raison d’adopter cet amendement, et j’espère que l’Assemblée nationale le maintiendra !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 368 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 269, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les mesures prévues aux G, H, I et J du I ainsi que les II à VII ne sont pas rétroactives sur l’année fiscale 2015.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement devrait devenir sans objet en raison de l’adoption de l’amendement n° 1 rectifié bis de M. del Picchia.

En déposant cet amendement, je souhaitais simplement prévenir le risque de compensation à titre rétroactif de la perte de recettes résultant de jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, confirmée par le Conseil d’État, par le dispositif prévu dans les alinéas 53 à 104 de l’article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Je souhaitais également m’assurer du respect cette jurisprudence, avec la suppression de l’assujettissement des non-résidents aux prélèvements sociaux.

Cela étant dit, et l’amendement n° 1rectifié bis ayant été voté, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 269 est retiré.

L’amendement n° 389, présenté par M. Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La section 5 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 242-11-… ainsi rédigé :

« Art. L. 242-11-... – Les revenus financiers des sociétés, tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution additionnelle dont le taux est égal à la somme des taux des cotisations patronales assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Avec cette proposition, nous allons remonter légèrement le cours de notre discussion, puisque notre collègue Michel Magras a déjà fait adopter un amendement concernant la retraite des agriculteurs en outre-mer.

Le statut des agriculteurs ultramarins mérite incontestablement des améliorations. Les salariés agricoles des outre-mer relèvent du régime général et non, comme en France métropolitaine, du régime de protection sociale agricole. En outre, les complémentaires santé ne sont pas mises en œuvre sur l’île de la Réunion.

À titre d’exemple, à la Réunion, 15 000 retraités agricoles, qui perçoivent actuellement 320 euros par mois, attendent la revalorisation de leur pension. L’objectif est d’atteindre 75 % du SMIC. Il faudra, pour cela, qu’ils patientent encore jusqu’en 2017.

Il faut ajouter que ces 320 euros ne sont versés qu’à ceux qui ont une carrière complète, ce qui exclut naturellement nombre de Réunionnais et – surtout ! – nombre de Réunionnaises qui ont interrompu leur activité professionnelle pour élever leurs enfants.

Interrogé sur cette question à l’Assemblée nationale, le ministre de l’agriculture a clairement affirmé : « Lorsque la carrière est incomplète, il faut chercher à garantir la solidarité nationale, par des allocations spécifiques aux personnes âgées [...]. C’est la solution pour assurer, partout sur le territoire, le relèvement des retraites et résoudre le problème des carrières incomplètes ».

La raison d’être de cet amendement est donc d’augmenter les recettes de ce régime en taxant le capital, pour que les pensions – notamment celles des agriculteurs outre-mer, avec ou sans carrière complète – puissent atteindre 75 % du SMIC.

Cet amendement est parfaitement complémentaire de celui que nous avons adopté il y a un instant concernant la retraite des professionnels agricoles des outre-mer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 389.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Vous avez compris, depuis le début de la discussion, que nous sommes contre les exonérations et contre les compensations par l’État, parce qu’elles s’effectuent au détriment d’autres budgets. Toutefois, voter contre cet article reviendrait à priver la sécurité sociale de fonds importants. Parce que nous sommes en désaccord avec les principes qui le sous-tendent, nous allons nous abstenir sur le vote de cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Au vu des amendements adoptés, la majorité des membres du groupe socialiste votera contre l’article 15. Je voudrais cependant souligner deux éléments.

Tout d’abord, il me semble qu’un apport très important de cet article 15 est passé assez inaperçu. Je veux parler de la compensation, par l’État, des conséquences de mesures précédemment adoptées au titre pacte de responsabilité et de solidarité ou de la loi du 6 août 2015 sur la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques qui privaient la sécurité sociale d’un certain nombre de ressources. Rappelons qu’environ 5 milliards d’euros de ressources sont en jeu et font l’objet d’une compensation intégrale. Il ne faut pas l’oublier, car c’est un point important de cet article 15 !

Ensuite, cet article 15 a pour effet des modifier les recettes de la CADES, qui se limiteront à la CRDS et la CSG. Il faut s’en féliciter pour la clarté et la lisibilité des recettes de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 15, modifié.

(L’article 15 est adopté.)

Mme la présidente. Nous avons examiné vingt-cinq amendements au cours de la matinée. Il en reste 241.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article 15 (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Discussion générale

3

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3, Public Sénat et le site internet du Sénat.

extension du prêt à taux zéro

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.

Madame la ministre, vous présentiez lundi de nouvelles mesures fortes concernant le prêt immobilier à taux zéro.

M. Philippe Dallier. Ça commence bien !

M. Claude Bérit-Débat. Comme l’a rappelé le Président de la République à Nancy, l’accès à la propriété du plus grand nombre de nos concitoyens est un impératif à la fois économique et social.

M. Philippe Dallier. Il était temps de s’en apercevoir !

M. Claude Bérit-Débat. Construire, c’est non seulement loger, mais aussi créer de l’activité et des emplois. Les professionnels, qui accueillent ces mesures avec enthousiasme, en sont unanimement convaincus.

Comme eux, je ne peux que me réjouir du renforcement de ce dispositif qui, notamment dans nos départements ruraux, favorisera le développement de l’activité des TPE et PME du secteur du bâtiment.

Ces nouvelles mesures permettront, à compter du 1er janvier 2016, d’étendre l’accès au prêt à taux zéro à un plus grand nombre de ménages. Voici comment on améliorera le financement de leurs projets immobiliers : les seuils des revenus d’éligibilité seront relevés, la part des achats financés dans le neuf sera revalorisée, le remboursement pourra être différé selon les revenus et les durées de prêt seront allongées. Surtout, l’élargissement du prêt à taux zéro bénéficiera désormais aux logements anciens faisant l’objet de travaux de rénovation dans 30 000 nouvelles communes.

Madame la ministre, les chiffres montrent aujourd’hui que votre politique commence à porter ses fruits. (Exclamations moqueuses sur les travées du groupe Les Républicains. M. Roger Karoutchi fait mine d’applaudir.)

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est une vraie question, ça ?

M. Claude Bérit-Débat. À l’heure où cette dynamique positive se précise, pouvez-vous nous détailler les modalités d’application de ce dispositif ainsi que les retombées attendues, tant pour l’activité économique que pour l’emploi ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement décrit le dispositif que nous avons annoncé lundi avec M. le secrétaire d’État au budget. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

Pour mettre en œuvre la volonté du Président de la République d’améliorer l’accès à la propriété des jeunes et des classes modestes, nous avons en effet souhaité prendre des mesures qui soient simples, lisibles et efficaces. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, à la suite de l’annonce par le Premier ministre du plan de relance du logement l’année dernière, beaucoup de segments du logement – le logement social, mais aussi le logement intermédiaire – ont connu une augmentation des ventes. Cette augmentation commence à se traduire dans le nombre de permis de construire et de mises en chantier ; pour autant, nous avons constaté que l’accession à la propriété restait en retrait.

Voilà pourquoi nous avons entrepris de changer l’ensemble des paramètres du prêt à taux zéro, afin de le rendre plus efficace : nous avons porté sa quotité à 40 % ; nous avons relevé le plafond de revenus, afin de permettre à davantage de ménages d’y avoir accès ; enfin, nous avons développé la capacité de différer les remboursements et augmenté les délais.

Vous avez également souligné, monsieur le sénateur, que le Gouvernement a souhaité élargir à l’ensemble du territoire le bénéfice de ce dispositif d’accession à la propriété pour le patrimoine ancien, ce que nous avions expérimenté l’an dernier dans près de 6 000 communes rurales.

L’ensemble de ces dispositifs nous permettra de passer de 65 000 à 120 000 prêts à taux zéro distribués par an et de créer ainsi 50 000 emplois.

Vous pouvez donc voir, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement est déterminé à faire de la relance de la construction une priorité : c’est important pour la croissance et pour l’emploi dans l’ensemble de nos territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

M. Alain Fouché. Avec combien d’années de retard ?

situation budgétaire des collectivités en polynésie

M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour le groupe UDI-UC. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC.)

Mme Lana Tetuanui. Madame la ministre des outre-mer, à l’orée de l’examen par le Sénat du projet de loi de finances pour 2016, je tiens à vous rappeler que l’assemblée de la Polynésie française a émis à l’unanimité, le 1er octobre dernier, un avis défavorable sur l’article de ce projet de loi relatif à la réforme de la dotation globale de fonctionnement, ou DGF, et à la diminution de la part de cette dotation allouée aux communes.

Le Premier ministre a tout récemment déclaré que la réforme envisagée de la DGF serait reportée. Néanmoins, en l’absence de confirmation sur ce point, je me permets d’attirer votre bienveillante attention, madame la ministre, sur le mécontentement général de la classe politique polynésienne envers non seulement cette baisse de crédits, qui affectera le bon fonctionnement des actions communales, mais aussi la nouvelle réduction en 2016 de la dotation globale d’autonomie, qui prolonge deux années de baisses dues au pacte de responsabilité.

Cette dernière dotation, sanctuarisée au titre de la participation de la Polynésie française à la mise en place de la force de frappe nucléaire de la France, constitue dans notre collectivité un sujet extrêmement sensible. Sa réduction apparaît comme une remise en cause de la parole de l’État. En effet, à la différence des autres collectivités territoriales, la Polynésie française ne bénéficie pas des autres leviers budgétaires propres aux communes métropolitaines, qui peuvent bénéficier de compensations financières sur d’autres supports.

En conséquence, je plaide aujourd’hui pour un rétablissement des crédits alloués à nos communes au titre de la DGF. Nous avons malgré tout participé depuis plusieurs années aux nécessaires efforts de maîtrise budgétaire engagés par l’État, alors même que notre collectivité d’outre-mer, dotée de l’autonomie, ne peut prétendre au bénéfice de nombreuses dispositions de soutien dévolues aux collectivités ultramarines.

M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue !

Mme Lana Tetuanui. Madame la ministre, je vous serai reconnaissante de bien vouloir nous préciser si la DGF des communes de Polynésie française est bien maintenue et non diminuée. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, je suis consciente de l’émotion qu’a pu provoquer la baisse des crédits alloués à la dotation globale d’autonomie en Polynésie française. Je connais le caractère symbolique de cette dotation pour les Polynésiens ; c’est d’ailleurs un sujet dont nous avons beaucoup parlé avec les députés lors de l’examen de ces crédits à l’Assemblée nationale.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire, je tiens à vous préciser que nous n’avons pas accédé à la demande de porter cette dotation de 80 millions d’euros à 84 millions d’euros. En effet, si nous l’avions fait sur cette ligne-là, cela aurait entraîné la suppression de 16 millions d’euros d’autorisations d’engagement. Or la Polynésie française a besoin d’un certain nombre de mesures pour pouvoir mettre en place des projets et des activités : ce n’était donc pas opportun.

Je me suis en revanche engagée – engagement que je réitère aujourd’hui – à faire en sorte que ces 84 millions d’euros soient bien alloués à la Polynésie française. Il est pour autant hors de question, dans l’intérêt même de votre collectivité, madame la sénatrice, de faire figurer cette hausse de crédits dans les dotations où elle figure aujourd’hui ; en effet, la répercussion sur les autorisations d’engagement serait immédiate.

Mme Catherine Morin-Desailly. Ce n’est pas clair !

Mme George Pau-Langevin, ministre. S’agissant des dotations aux collectivités territoriales ultramarines, le fait que les collectivités d’outre-mer et Mayotte soient exemptées de la contribution au redressement des finances publiques est bien la reconnaissance d’une fragilité particulière de ces communes.

Par ailleurs, vous savez que nous avons désindexé l’an dernier la dotation générale d’autonomie de Polynésie française de la DGF, afin d’éviter qu’elle ne diminue de la même manière que dans les autres communes. Cette année, nous appliquons la réforme globale des dotations de l’État au bloc communal ; l’évolution générale sera par conséquent favorable aux communes d’outre-mer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)

réformes annoncées par le gouvernement

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Vasselle. Monsieur le Premier ministre, je vous interpelle en votre qualité de chef du Gouvernement.

Il ne se passe pas de jour sans que le Gouvernement annonce une réforme : ainsi, la réforme du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu,…

M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !

M. Alain Vasselle. … une réforme du code du travail,…

M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !

M. Alain Vasselle. … le tiers payant généralisé,…

M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !

M. Alain Vasselle. … ou encore la mise en œuvre de la révision des bases des valeurs locatives.

M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !

M. Alain Vasselle. Le Gouvernement veut par ailleurs faire adopter une réforme de la dotation globale de fonctionnement des collectivités locales.

M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !

M. Alain Vasselle. Toutes ces réformes ont un point commun, monsieur le Premier ministre,…

M. Roger Karoutchi. Le désordre !

M. Alain Vasselle. … le Gouvernement a décidé qu’elles n’entreraient en vigueur qu’après 2017 !

M. Alain Vasselle. Monsieur le Premier ministre, en vertu de quelle logique, reportez-vous systématiquement la mise en œuvre de votre politique tout en affirmant quotidiennement l’urgence absolue de réformer le pays ? Nous attendons votre réponse ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

M. Didier Guillaume. Pourquoi n’avez-vous pas vous-mêmes réformé la DGF ?

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, il règne désormais au Sénat une ambiance que j’aime retrouver régulièrement et j’y sens une attente que je ne trouve nulle part ailleurs ! (Rires et applaudissements.)

Monsieur le sénateur Vasselle, je pourrais rappeler les différentes réformes que nous avons menées dans bien des domaines. Il faut néanmoins se mettre d’accord sur ce mot de « réforme » qui inquiète parfois nos concitoyens…

Mme Annie David. C’est sûr !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Nous devons donner un sens clair à ce terme : la modernisation du pays, avec le souci de la justice sociale qui s’impose.

Les réformes menées depuis 2012 sont pourtant nombreuses : je pense ainsi, bien sûr, au mariage pour tous ; je pense à la diminution du nombre de régions ; je pense à la réforme du collège ; je pense à la parité ;… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Isabelle Debré. La parité, c’est Chirac !

M. Manuel Valls, Premier ministre. … je pense au non-cumul des mandats, qui a trouvé un succès certain dans cette assemblée ; je pense encore à la mise en place de la Banque publique d’investissement. Je ne poursuivrai pas l’énumération de ces réformes.

De mon point de vue, l’engagement gouvernemental le plus important est la réforme profonde de notre économie par la baisse tant du coût du travail que de la fiscalité sur les entreprises. Cette baisse, de l’ordre de 40 milliards d’euros, s’accompagne de notre lutte indispensable contre les déficits publics, soit un effort de 50 milliards d’euros sur trois ans, mené afin de redonner de la force et de la compétitivité à notre pays.

Cependant, vous m’interrogez plutôt sur les réformes à venir, monsieur le sénateur. Je ne ferai qu’évoquer les plus importantes.

M. Alain Fouché. Celle de la DGF ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. La première de ces réformes concerne le droit du travail.

Personne n’a mis sur le métier avant nous cette réforme essentielle, qui doit faire en sorte que la négociation entre les salariés et les responsables des entreprises se fasse au plus près du terrain, dans les entreprises ou dans les branches professionnelles, dont il faut par ailleurs diminuer le nombre. Nous avons confié à Robert Badinter une mission : réécrire en moins de deux mois l’ensemble des principes prescripteurs en matière de droit du travail.

Par ailleurs, dès 2016, nous consacrerons un texte législatif à l’organisation du temps de travail. Chacun sait en effet que cette organisation est aujourd’hui trop rigide ; à l’époque du numérique, il faut pouvoir faire montre de souplesse. Par conséquent, quelque 120 pages du code du travail qui concernent l’organisation du travail seront d’ores et déjà modifiées l’année prochaine.

Enfin, sur tel ou tel aspect du code du travail, qui est une matière importante, peut-être faudra-t-il aller plus vite, mais nous devons nous donner du temps – je réponds ainsi à votre remarque, monsieur le sénateur –, car c’est nécessaire. Si la réforme prend deux ans et empiète sur le quinquennat suivant, cela témoigne que nous sommes une République moderne qui a la capacité de se réformer et de faire converger tous les acteurs, en associant le patronat, les organisations syndicales et la représentation nationale, puisque cette dernière sera consultée. Cette réforme se fera, elle est engagée.

Deux textes sont particulièrement importants : le projet de loi pour une République numérique et le projet de loi sur les nouvelles opportunités économiques. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est un message d’optimisme qu’il faut adresser à la société. Il faut insister sur les opportunités offertes par le numérique et les changements que cela implique sur le marché du travail, dans l’entreprise, mais aussi dans la vie quotidienne et dans l’organisation du travail. Pour les services, pour les entreprises, pour l’État, des réformes importantes seront adoptées en 2016.

Le Gouvernement a aussi entrepris une réforme en matière d’égalité et de citoyenneté. Elle passe par des réponses en matière de logement, d’école, de mixité sociale dans les collèges – la ministre de l’éducation nationale répondra bientôt à une question en ce sens. Modernité, autorité, sécurité, égalité sont des axes importants de la politique que nous menons.

J’en viens à la fiscalité, monsieur le sénateur. Tout le monde demande depuis des années la retenue à la source, mais tout le monde pense que cette réforme est compliquée. Nous engageons cette réforme. Elle aussi sera irréversible et personne n’y reviendra.

C’est pourquoi, dans ce domaine également, il est plutôt de bonne méthode de prendre deux ou trois ans avant la mise en œuvre de ce nouveau système et de prévoir son application à partir du 1er janvier 2018. Cependant, chacun sait désormais que cette réforme est inscrite dans la réalité fiscale : nos concitoyens l’attendent. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Sur la dotation globale de fonctionnement, curieuse critique !