M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, le Gouvernement est profondément attaché au régime local d’Alsace-Moselle, qui permet un degré élevé de solidarité entre ses assurés, quels que soient leur âge, leur état de santé ou leurs revenus.

À la suite à la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, qui a généralisé la couverture santé à l’ensemble des salariés du secteur privé, le Gouvernement a souhaité que toute évolution du régime local d’Alsace-Moselle s’opère dans un cadre juridique sécurisé. C’est la raison pour laquelle la loi de modernisation de notre système de santé a accordé un délai supplémentaire de six mois pour articuler cette obligation nouvelle avec les spécificités du régime local.

En juillet 2015, Marisol Touraine a demandé à quatre parlementaires, appartenant à la majorité et à l’opposition de l’Assemblée nationale et du Sénat – les députés Philippe Bies et Denis Jacquat et les sénateurs Patricia Schillinger et André Reichardt –, de travailler ensemble sur ce sujet et de lui remettre, après consultation des partenaires sociaux, des propositions d’articulation entre les garanties du régime local et celles qui sont issues de l’accord national interprofessionnel.

Selon le rapport de la mission parlementaire, remis à Marisol Touraine le 16 décembre 2015, l’introduction d’une cotisation patronale et l’extension du panier de soins du régime local présenteraient des risques constitutionnels sérieux, puisqu’ils constitueraient un renforcement des différences existant entre le régime local et le droit applicable sur le reste du territoire.

Dans ses conclusions, la mission a privilégié la voie d’une articulation entre le régime local et la généralisation de la complémentaire santé instaurée par la loi du 14 juin 2013. Cette garantie a vocation à constituer un troisième étage ajouté à la sécurité sociale de base et au régime local.

C’est le sens du décret que le Gouvernement a soumis à consultation et qui sera publié dans les prochains jours.

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Je vous remercie pour votre réponse, madame la secrétaire d’État.

Je prends acte du souci qu’a eu le Gouvernement de ne pas compliquer encore davantage notre système de sécurité sociale au travers de la loi de 2013.

Je crois pouvoir dire que, sur le territoire de l’Alsace et de la Moselle, l’ensemble des élus locaux et des parlementaires, y compris mes collègues des autres groupes politiques de notre Haute Assemblée, sont viscéralement et très sincèrement attachés à ce régime local.

Toutefois, le sujet est très complexe. Comme vous l’avez évoqué, il présente des risques dont on ne peut pas vraiment préjuger. Ces risques font aujourd’hui l’objet d’un certain nombre d’analyses et de recommandations, parfois divergentes, y compris, d’ailleurs, à l’intérieur des différentes familles politiques, ce qui, du reste, montre bien la complexité du sujet comme l’attachement de nos concitoyens au régime, qui peut se manifester de différentes manières.

Quoi qu’il en soit, je suis certain que l’expression d’un véritable engagement à l’égard du régime local au plus haut niveau de l’État rassurerait nos concitoyens des territoires concernés.

Dès lors, je me permets d’insister, madame la secrétaire d’État – vous n’avez pas répondu à ma question, mais peut-être pourrez-vous le faire plus tard : même si j’entends bien que ce n’est pas facile, ne serait-il pas judicieux d’engager une réflexion sur la généralisation de ce système original, précisément pour montrer l’attachement de la nation française à cette exception territoriale, qui fonctionne depuis cent ans, a plus que démontré son efficacité, est excédentaire et, comme vous l’avez dit vous-même – personne ne le conteste –, garantit un niveau de solidarité bien supérieur à la moyenne nationale ? Ce serait vraiment émettre un bon signal, par-delà les divergences d’analyse dont j’ai fait état.

numerus clausus

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 1320, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Daniel Chasseing. Madame la secrétaire d'État, comme j’ai déjà eu l’occasion de l’exprimer, notamment dans cet hémicycle, le numerus clausus régissant l’effectif des médecins en France me paraît aujourd’hui obsolète.

M. Daniel Chasseing. D’ailleurs, nous sommes de plus en plus nombreux à le constater, dans toutes les familles politiques.

À l’heure où la génération née après la guerre part en retraite, si nous ne faisons rien, les médecins ne seront bientôt plus assez nombreux, surtout dans les zones très rurales, au risque d’aggraver le phénomène de désertification sanitaire, mais aussi dans certaines villes et certaines banlieues, où les praticiens hésitent à s’installer.

Il est toujours possible, naturellement, d’importer des médecins étrangers – cette pratique existe –, mais ceux-ci ne restent pas toujours. Au demeurant, pourquoi écarter nombre de jeunes Français des facultés de médecine de notre pays, les conduisant ainsi à aller étudier ailleurs, en Roumanie notamment, si c’est pour faire venir, ensuite, des médecins de l’étranger ? Cette situation absurde dure pourtant depuis des décennies.

Le Gouvernement a décidé d’augmenter le numerus clausus dans quelques régions, dont la mienne, le Limousin. Cette mesure va dans le bon sens, mais est insuffisante.

Je ne parle évidemment pas des médecins spécialistes – et pourtant, il en manque ! Mon propos porte uniquement sur les médecins généralistes exerçant dans les zones sous-dotées, dont la formation pourrait être spécifiquement adaptée à ces territoires.

Ces médecins pourraient être recrutés parmi les étudiants ayant échoué de peu au concours, à leur première ou seconde tentative, mais ayant obtenu des notes au-dessus de la moyenne. Ils seraient ainsi repêchés, à la condition de s’engager à exercer la médecine générale dans des zones fléchées par les agences régionales de santé, les ARS, pour une période qui pourrait être d’environ dix ans.

Il est incontestable que les territoires concernés auront besoin de médecins aux compétences multiples : prévention, soins, accompagnement…

J’entends dire ici ou là que la présence d’infirmières pourra suffire, par exemple pour renouveler les ordonnances. Rien n’est plus faux : être médecin ou être infirmière, ce n’est pas la même chose ! Les ordonnances ne doivent pas faire l’objet d’un renouvellement systématique, sans auscultation sérieuse ni réflexion d’un praticien. Il est toujours possible qu’une maladie évolue ou qu’une intolérance médicamenteuse ou une nouvelle pathologie se déclare.

Les médecins généralistes ont également un rôle décisif à jouer, dans les territoires éloignés des hôpitaux, en matière d’urgences.

Pour toutes ces raisons, et parce qu’une telle mesure relève du domaine réglementaire, je souhaite savoir, madame la secrétaire d’État, s’il peut être envisagé de procéder rapidement à une augmentation de 10 % du numerus clausus à l’échelle nationale, en calculant au préalable – c’est tout à fait possible – les besoins des territoires en médecine générale, en concertation avec les facultés de médecine, afin d’adapter au mieux les formations.

Cette évolution a été suggérée par mon confrère et collègue député Gérard Bapt ; j’y adhère totalement.

Elle permettrait de garantir une représentation médicale suffisante sur l’ensemble du territoire de la République.

MM. Michel Canevet et Loïc Hervé. Très bien ! (MM. Michel Canevet et Loïc Hervé applaudissent vivement.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, améliorer l’accès aux soins de tous les Français et réduire les inégalités entre les territoires sont des objectifs prioritaires du Gouvernement. En atteste le pacte territoire-santé, lancé par Marisol Touraine dès la fin de l’année 2012.

Trois ans plus tard, nous constatons que le pacte a impulsé une dynamique nouvelle dans les territoires confrontés à des difficultés démographiques. Il mobilise un ensemble de leviers, de la formation aux conditions d’exercice, pour attirer, en particulier, de jeunes médecins sur des territoires manquant de professionnels.

Afin d’amplifier cette dynamique, Marisol Touraine a annoncé, à la fin de l’année 2015, le lancement d’un « pacte territoire-santé 2 », enrichi de mesures innovantes.

Ainsi, nous avons fait le choix d’augmenter le nombre de médecins qui pourront être formés dans dix universités, situées dans des régions où la densité médicale est la plus faible.

En effet, nous savons que l’augmentation du numerus clausus national ne permet pas de répartir la hausse des étudiants de façon égale sur le territoire. J’en veux pour preuve que, entre 2004 et 2008, la densité médicale a continué de faiblir dans certaines zones, alors que le numerus clausus a doublé.

C’est pourquoi Marisol Touraine a voulu réserver à certaines régions le bénéfice de la nouvelle hausse du numerus clausus.

M. Yannick Vaugrenard. Très juste !

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État. Par ailleurs, cette augmentation est liée à un programme de fidélisation des étudiants dans ces territoires en tension.

Dans le cadre de la grande conférence de la santé, le Premier ministre a annoncé que cette adaptation régionale du numerus clausus serait étendue à la prochaine rentrée universitaire, en tenant compte des besoins en professionnels et des capacités de formation.

Le nouveau volet du pacte territoire-santé a également permis de développer les stages des futurs médecins en cabinet de médecine générale, car, pour attirer les jeunes vers la médecine libérale, il est essentiel de les former dans des conditions réelles d’exercice.

Monsieur le sénateur, c’est un ensemble de mesures pragmatiques, incitatives, s’appuyant sur la mobilisation de tous les acteurs, qui nous permettront d’assurer l’égalité de tous les Français dans l’accès aux soins et de lutter contre la désertification médicale.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.

Le maintien de la vie dans les territoires ruraux ne se fera pas sans médecins. Beaucoup de retraités choisissent de s’installer dans ces territoires, ce qui compense la dépopulation agricole, notamment dans les zones d’élevage. Mais, s’il n’y a plus de médecins, ils ne viendront pas !

Madame la secrétaire d’État, je n’ai pas dit que rien n’était fait. Cependant, il faut cibler les territoires, ainsi que vous l’avez vous-même indiqué.

Des aides sont effectivement mises en place, mais le numerus clausus me semble encore trop restrictif.

Alors que 70 % des étudiants en médecine sont des étudiantes, on constate que tous les jeunes médecins, y compris les hommes – je ne voudrais pas paraître sexiste… (Sourires.) –, aspirent désormais à des horaires plus réguliers. Ils ne veulent plus travailler soixante heures par semaine !

Dans ces conditions, à défaut d’une augmentation du numerus clausus, le territoire de la République ne pourra être entièrement couvert. Je renouvelle donc ma demande en ce sens.

faisabilité d'un dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1327, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la secrétaire d'État, la mise en place du dispositif de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante a été une avancée, qui a permis à de nombreuses victimes de cesser leur travail.

Cependant, certains salariés dont l’exposition à l’amiante a réduit l’espérance de vie en sont encore aujourd’hui exclus.

Pour réparer cette injustice, les associations de soutien aux victimes demandent que le dispositif collectif existant soit complété par une voie d’accès individuelle à la « préretraite amiante ». Elles proposent d’utiliser un faisceau d’indices, tels que le secteur d’activité, le métier, la durée et la période d’exposition, les situations de travail et gestes professionnels, l’exercice d’une activité sur le site d’un établissement inscrit sur les listes ou encore le nombre de malades sur le site.

À la demande du Gouvernement, un rapport a été remis au Parlement sur ce sujet en septembre dernier. Son auteur, M. Pierre Ricordeau, juge la voie d’accès individuelle trop coûteuse et trop lourde de contentieux. Il reconnaît néanmoins que le dispositif actuel exclut des personnes ayant été « exposées professionnellement à l’amiante », en particulier les salariés du bâtiment et des travaux publics ou encore des sous-traitants ayant travaillé dans des établissements jugés dangereux.

La Cour des comptes, dans son rapport public annuel 2014, propose trois mesures, qui pourraient améliorer immédiatement la situation des victimes de l’amiante : premièrement, l’extension du dispositif de cessation anticipée d’activité aux fonctionnaires et aux artisans atteints d’une maladie professionnelle liée à l’amiante ; deuxièmement, l’octroi automatique par le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, aux malades atteints de cancers du bénéfice des conséquences qui s’attachent à la faute inexcusable de l’employeur ; troisièmement, l’obligation faite au FIVA d’indemniser les victimes et leurs ayants droit, dès lors que la maladie ou le décès a été pris en charge par un organisme de sécurité sociale.

Il est de notre responsabilité, mes chers collègues, d’accorder aux victimes une véritable prise en charge. Notons par ailleurs que le nombre de travailleurs de l’amiante en cessation anticipée d’activité a diminué de près d’un tiers en cinq ans.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous rassurer, nous, ainsi que toutes les victimes de l’amiante et leurs familles, en clarifiant la position du Gouvernement sur les propositions de la Cour des comptes ainsi que sur celles du « rapport Ricordeau » ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur sénateur, le Gouvernement a récemment pris des mesures en faveur des victimes de l’amiante, à la suite des propositions formulées par la Cour des comptes dans son rapport public annuel 2014.

L’une des dispositions de la loi de modernisation de notre système de santé permet de mettre un terme à ce qui constituait une inégalité de traitement entre les victimes de l’amiante : désormais, pour le FIVA, la décision de prise en charge du décès au titre d’une maladie professionnelle occasionnée par l’amiante vaut justification du lien entre l’exposition à l’amiante et ledit décès, à l'instar de ce qui existe pour les personnes vivantes atteintes d’une maladie professionnelle.

Jusqu’alors, quand bien même une caisse de sécurité sociale reconnaissait que le décès d’une victime était la conséquence d’une pathologie consécutive à une exposition à l’amiante, les ayants droit de la personne décédée ne pouvaient présenter cette reconnaissance à l’appui de leur demande d’indemnisation au FIVA pour établir le lien de causalité entre le décès et la pathologie : ils devaient communiquer des éléments démontrant l’existence de ce lien, ce qui pouvait être douloureux et de nature à faire naître des incompréhensions.

Il s’agit donc d’une mesure d’équité entre les demandeurs et de simplification pour les bénéficiaires du dispositif.

Par ailleurs, le Gouvernement s’est engagé à mettre en place des mesures de prévention et de prise en charge des victimes de l’amiante dans la fonction publique. Ainsi, le décret du 20 mai 2015 fixe les principes du droit à un suivi médical postprofessionnel pour les agents de la fonction publique d’État exposés à l’amiante dans le cadre de leur activité professionnelle.

Enfin, l’article 146 de la loi de finances pour 2016 prévoit la possibilité, pour les fonctionnaires atteints d’une maladie professionnelle provoquée par l’amiante, de bénéficier d’une cessation anticipée d’activité et de percevoir l’allocation spécifique de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. Les textes d’application de cette disposition font actuellement l’objet d’une concertation et devraient être publiés prochainement.

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, dont je ferai part à l’ensemble des associations concernées.

J’espère qu’elle répondra pleinement à leurs préoccupations, que les textes d’application que vous avez évoqués seront mis en œuvre le plus rapidement possible et que la différence entre reconnaissance collective et reconnaissance individuelle des travailleurs ayant souffert de l’amiante tendra à diminuer, voire à disparaître. Disant cela, je pense notamment aux travailleurs du bâtiment et des travaux publics et aux artisans ayant travaillé dans des entreprises jugées dangereuses.

difficultés financières des associations d'aide à la famille

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 1422, transmise à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur les difficultés financières rencontrées par les associations d’aide à la personne sur l’ensemble du territoire national, malgré l’aide apportée par le fonds de restructuration des services d’aide et d’accompagnement à domicile.

En ce qui concerne le département du Doubs, les structures Eliad et Soli-cités, qui emploient plus de 1 600 salariés et aident 13 000 personnes, sont confrontées à ces difficultés.

Ces deux sociétés connaissent actuellement de graves problèmes, en dépit d’une politique d’économies interne et du soutien du fonds de restructuration.

Je suis fortement inquiet tant pour la préservation des emplois concernés que pour le maintien de ces services d’aide aux personnes âgées.

Les présidents des deux structures estiment qu’un retour à l’équilibre est possible. Le plan en est d’ailleurs validé par le commissaire aux comptes. Cependant, la mise en œuvre de ce plan nécessite qu’un moratoire fiscal, assorti d’une année rétroactive, soit décrété. Il s’agirait là d’une première mesure, permettant d’éviter un dépôt de bilan.

À plus long terme, il semble absolument nécessaire de réfléchir à l’établissement d’une tarification nationale prenant en compte le coût réel de l’aide à domicile.

Aussi, madame la secrétaire d’État, je vous demande de bien vouloir nous indiquer quelles sont les orientations envisagées par le ministère des affaires sociales et de la santé pour soutenir ces structures, indispensables à nos territoires.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, le secteur de l’aide à domicile fait l’objet d’un important soutien de l’État depuis plusieurs années.

Pour faire face aux difficultés financières rencontrées par les services d’aide et d’accompagnement à domicile, les SAAD, un fonds de restructuration de l’aide à domicile a été mis en place dès 2012.

Un montant de 130 millions d’euros a été débloqué entre 2012 et 2014 en direction des SAAD ; 1 589 structures en ont été bénéficiaires. En 2016, un nouveau concours, de 25 millions d’euros, est mobilisé. Pour la région Bourgogne-Franche-Comté, une enveloppe de 1,3 million d’euros est prévue au titre de la répartition régionale indicative pour 2016.

Par ailleurs, dans le cadre de la décision du Gouvernement de revaloriser les salaires à hauteur de 1 %, un montant de 25,65 millions d’euros a été notifié aux départements le 5 avril 2016, afin de prendre en compte l’avenant à la convention collective nationale de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile. Pour le département du Doubs, cette prise en compte représente, pour l’année 2016, une enveloppe de 250 921 euros.

Parallèlement, la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement prévoit plusieurs dispositions visant à protéger et à moderniser ce secteur d’activité, indispensable à l’accompagnement à domicile des personnes âgées.

D’une part, le régime juridique des SAAD est unifié et simplifié, le conseil départemental étant identifié comme unique chef de file en la matière.

D’autre part, le développement des services polyvalents d’aide et de soins à domicile est soutenu, afin d’améliorer l’accompagnement à domicile et d’engendrer des effets bénéfiques pour l’ensemble des acteurs, gestionnaires, financeurs ou encore aidants et équipes de terrain.

Enfin, la revalorisation de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, devrait contribuer à donner davantage d’activité à ces services.

Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, de nombreuses actions ont été engagées. Le Gouvernement reste néanmoins pleinement conscient des difficultés rencontrées par le secteur de l’aide à domicile. Je vous informerai rapidement des nouvelles actions que nous engagerons en sa faveur ; en effet, d’autres mesures sont en cours d’élaboration.

Cela dit, je répète que ce sont aujourd’hui les départements qui sont chefs de file de ces politiques. Nous sommes là pour les accompagner ; j’y veillerai personnellement.

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.

M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.

Cependant, je tiens à mettre de nouveau l’accent sur les propositions que je viens de formuler.

L’instauration d’un moratoire fiscal, assorti d’une année rétroactive, est absolument indispensable. Le pire serait que certaines personnes âgées ne puissent plus bénéficier de soins à domicile. Or, si les structures que j’ai évoquées déposent le bilan, ces soins s’arrêteront brutalement.

La mise en place de la tarification nationale est elle aussi absolument incontournable. Vous disiez tout à l’heure que la réforme de l’APA allait donner davantage de travail aux associations. Mais les associations ont peur d’avoir davantage de travail, car, souvent, elles perdent de l’argent à chaque acte accompli !

Je terminerai sur un point qui a bien un rapport avec notre sujet : Eliad et Soli-cités, entreprises solidaires qui emploient 1 600 salariés, n’ont pas bénéficié du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, au contraire de Carrefour ou de Leclerc, sociétés par actions dont les employés ne peuvent que rarement se prévaloir d’une carrière longue et travaillent souvent à mi-temps, avec des horaires hachés. Cela laisse songeur !

Réfléchissons à la possibilité d’étendre le dispositif du CICE à toutes les entreprises de l’économie sociale et solidaire, comme nous aurions pu le faire lors de l’examen du projet de loi relatif à la consommation. Nous leur retirerions ainsi une belle épine du pied !

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très juste !

traitements innovants des déchets des établissements de santé

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, auteur de la question n° 1278, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Pascale Gruny. Madame la secrétaire d’État, en France, les établissements hospitaliers sont soumis, par la loi du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux, à une réglementation stricte concernant la gestion de leurs déchets.

Les déchets, qu’il s’agisse de déchets assimilables aux ordures ménagères, les DAOM, ou de déchets d’activités de soins à risques infectieux, les DASRI, doivent être collectés dans des conteneurs différents, puis transportés et éliminés. Cette réglementation permet de favoriser le tri, mais ne limite pas la production de déchets, qui s’élève à 700 000 tonnes par an environ.

Les déchets d’activités de soins à risques infectieux représentent un risque potentiel pour tous les utilisateurs. C’est pourquoi des procédures ont été mises en place, aux articles R. 1335-5 et R. 1335-6 du code de la santé publique, pour limiter les possibilités de contact avec ces déchets : séparation dès leur production et collecte dans des emballages spécifiques.

Actuellement, le prétraitement des DASRI sur site est quasi inexistant.

Certains pays européens, comme les Pays-Bas, ont mis en place des systèmes permettant de réduire considérablement le transport des déchets hospitaliers, par leur broyage et leur désinfection au sein même des unités de soins. Ces systèmes répondent à des normes strictes de qualité et de sécurité. Les déchets sont ensuite transportés par les canalisations des eaux usées jusqu’à une station d’épuration de l’eau et de traitement des déchets. Ainsi, le contact des personnels et des patients avec ces déchets contaminés devient minime et les risques de contamination des ressources en eau par les effluents hospitaliers sont limités.

La purification des eaux à la source pourrait être envisagée en France. Elle serait l’occasion d’économies pour les établissements de santé et serait bénéfique pour la qualité des eaux usées.

L’article R. 1331-2 du code de la santé publique permet l’introduction de matière solide, liquide ou gazeuse dans le système de collecte des eaux usées, sauf si elle est la cause soit d’un danger pour le personnel d’exploitation ou pour les habitants des immeubles raccordés au système de collecte, soit d’une dégradation des ouvrages d’assainissement et de traitement, soit d’une gêne dans leur fonctionnement. Le traitement in situ avec transport par canalisations d’eaux usées ne contreviendrait donc pas à la législation.

Aussi, je vous demande, madame la secrétaire d’État, si la France envisage de mettre en place de nouveaux systèmes de traitement des déchets hospitaliers et si le lancement d’une expérience pilote pourrait être envisagé.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur la possibilité d’autoriser, en France, des systèmes de traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux et des eaux usées produits par les établissements de santé, systèmes permettant le renvoi de ces déchets dans les canalisations des eaux usées.

En France, la gestion des eaux usées et la gestion des déchets répondent à des principes et à des règles techniques différents, définis par le code de l’environnement et le code de la santé publique.

L’article R. 1331-2 du code de la santé publique interdit l’introduction des déchets dans les systèmes de collecte des eaux usées, y compris après broyage.

L’arrêté du 21 juillet 2015 reprend cette interdiction et prohibe également l’introduction, dans le système de collecte, de matières solides, liquides ou gazeuses susceptibles d’être la cause d’une gêne dans le fonctionnement des ouvrages d’assainissement et de traitement.

Ces textes affirment le principe d’une gestion différenciée des déchets, d’une part, et des eaux usées, d’autre part, dans un souci de préservation des réseaux de collecte de celles-ci.

Par ailleurs, le code de la santé publique précise que les déchets d’activités de soins à risques infectieux font l’objet soit d’une incinération, soit d’un prétraitement par désinfection par des appareils homologués par les ministères chargés de la santé et de l’environnement.

À ce jour, vingt-deux modèles d’appareil ont été homologués et sont commercialisés, permettant un traitement sur site des déchets, dans des conditions conformes à la réglementation.

Dans le cadre du renforcement du dispositif d’homologation, le ministère chargé de la santé envisage de confier la mission d’homologuer les appareils de prétraitement par désinfection des déchets d’activités de soins à risques infectieux au Laboratoire national de métrologie et d’essais, auprès duquel tout fabricant ou importateur d’un dispositif innovant pourra déposer un dossier.

Ces dispositions entreront en vigueur d’ici à la fin de l’année 2016.