compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Philippe Adnot,

M. Jackie Pierre.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

 
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2017
Discussion générale (suite)

Loi de finances pour 2017

Discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances pour 2017, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 139, rapport général n° 140).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2017
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. Christian Eckert, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis un mois, le Parlement examine les textes financiers sur lesquels repose la politique budgétaire du Gouvernement. Ces textes reflètent une même volonté, celle de redresser les comptes publics tout en prenant les mesures qui s’imposent pour rendre notre société plus juste et plus solidaire.

À l’heure où certains voudraient saper les fondements de la République sociale, il n’est pas inutile de rappeler que, depuis cinq ans, le Gouvernement est à pied d’œuvre pour garantir à nos concitoyens le maintien d’un service public de qualité, dont les bienfaits doivent profiter à la Nation tout entière.

En effet, à gauche nous en sommes convaincus, meilleurs seront les effets redistributifs de notre système, plus grande sera l’adhésion au projet commun qui organise notre vie sociale.

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Encore faut-il que les deux chambres du Parlement, le Sénat après l’Assemblée nationale, acceptent de débattre des textes qui leur sont soumis.

M. Jean Bizet. Mais il faut le faire sur des bases saines !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Qu’il me soit permis de rappeler ici la cohérence d’ensemble de la politique budgétaire mise en œuvre par le Gouvernement depuis 2012.

Au début de ce quinquennat, l’état de nos comptes publics était alarmant. Le Premier ministre François Fillon ne se déclarait-il pas à la tête d’un État « en faillite » ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous le confirmons…

MM. Philippe Dallier et Vincent Delahaye. Il l’est toujours !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. N’y avait-il pas, en Europe, des inquiétudes fortes au sujet de l’euro ? Après la Grèce et quelques États du Sud, c’était au tour de la France d’être désignée comme un point de fragilité pour la monnaie unique.

À l’époque, les agences de notation, très présentes – c’est curieux, on n’en entend plus parler… –, nous rappelaient régulièrement, semaine après semaine, la fragilité alarmante de l’État en faillite de MM. Sarkozy et Fillon.

Aujourd’hui, nous mesurons les effets positifs des mesures qui ont été prises.

Mme Catherine Troendlé et M. Francis Delattre. Ah bon ?...

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ces mesures, mesdames, messieurs les sénateurs, ont pris l’exact contre-pied de celles qui avaient trop longtemps prévalu. Baisse du déficit et stabilisation de la dette : voilà deux objectifs de long terme, pourtant capitaux, que nos prédécesseurs semblaient avoir perdus de vue.

Que constatons-nous aujourd’hui ? En 2017, notre déficit public repassera, pour la première fois depuis dix ans, sous la barre des 3 % du PIB, alors qu’il s’élevait à 6,8 % du PIB en 2010, soit plus du double. Le déficit des quatre branches de la sécurité sociale est proche de zéro et les comptes du régime général seront proches de l’équilibre en 2017, alors qu’ils présentaient un déficit record de près de 24 milliards d’euros en 2010...

M. Francis Delattre. Que vous avez transféré à la CADES !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. À cet égard, vous avez, mesdames, messieurs les sénateurs, d’ores et déjà examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale en première lecture ; enfin, vous l’avez « examiné », mais curieusement. En effet, vous n’avez pas voté de trajectoire ni de niveau de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM ; vous auriez pu, en effet, proposer une trajectoire ou modifier celle du Gouvernement, indiquer si vous souhaitiez relever ou diminuer le niveau de l’ONDAM, vous prononcer sur l’augmentation à 25 euros du tarif de consultation des médecins généralistes et sur l’augmentation du point d’indice de nos agents de la fonction publique hospitalière.

M. Didier Guillaume. Tout à fait !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il était devenu urgent de reprendre le contrôle de nos finances pour stabiliser notre dette publique. Nous y sommes aujourd’hui parvenus.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est une force de savoir que notre endettement est sous contrôle.

M. Francis Delattre. Ah, il est « sous contrôle »…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ainsi, pour la première fois depuis bien longtemps, le programme d’émissions à moyen et long terme de l’État baissera en 2017. Oui, le redressement des finances publiques constitue l’un des succès de cette législature (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.). Si des comptes en désordre sont le signe d’une nation qui s’abandonne, alors ce quinquennat aura été celui d’une France qui se reprend en main.

Tout en opérant cette remise en ordre des comptes publics, le Gouvernement s’est attelé à la lutte contre les inégalités. Pour ce faire, il a entrepris, par touches successives, une véritable réforme de l’impôt. Là où certains auraient souhaité une réforme plus brutale, le Gouvernement a dessiné les contours d’un système d’imposition plus progressif et plus juste.

Ainsi, le barème de l’impôt de solidarité sur la fortune a été rétabli ; la progressivité de l’impôt sur le revenu a été accrue par la création d’une tranche supplémentaire à 45 % ; l’imposition des revenus du capital a été alignée sur celle des revenus du travail, au grand dam de certains ; les niches fiscales ont été réduites ; le quotient familial a été plafonné.

Depuis 2014, les classes populaires et moyennes ont bénéficié de baisses d’impôt grâce auxquelles leur niveau de vie a non seulement été préservé, mais s’est même amélioré, pour les plus démunis de nos concitoyens. On oublie trop souvent de souligner de tels résultats, alors même qu’ils sont de nature à restaurer la confiance de nos concitoyens en leur avenir.

J’en entends me répondre que cette amélioration s’est faite aux dépens des plus aisés, dont on a exigé, à raison, qu’ils contribuent davantage à l’effort de redressement de nos comptes publics. Nous ne rougissons pas de ce parti pris, qui est conforme à nos engagements et à nos valeurs.

Les mesures relatives aux entreprises ont obéi à la même logique. Dans un premier temps, le Gouvernement a pris des mesures ciblées sur les grandes entreprises, à la fois pour lutter contre l’optimisation fiscale, comme cela a été le cas avec la non-déductibilité d’une partie des charges financières, et pour soutenir l’investissement au détriment du dividende, comme cela a été fait avec la taxe à 3 % sur les dividendes.

Puis, dans un deuxième temps, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, et le pacte de responsabilité et de solidarité ont allégé le coût du travail afin de procurer à un plus grand nombre de nos concitoyens une place sur le marché de l’emploi. Il nous a fallu répondre à la grande fragilisation de notre tissu productif liée à la crise financière. C’est pour y remédier que nous avons élaboré ce pacte et le CICE. Nous l’avons fait avec pragmatisme car, pour l’économie française du début de la décennie, c’était la solution la plus à même d’amorcer la relance.

Telle a été notre politique fiscale tout au long de cette législature, et ce projet de loi de finances s’inscrit dans le sillage de ce que nous avons fait depuis 2012. Il comporte ainsi, pour les ménages des classes moyennes, une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu.

Il prévoit, dans le même temps, des mesures contre l’optimisation de l’impôt de solidarité sur la fortune, d’ailleurs complétées dans le projet de loi de finances rectificative pour 2016 qui vient d’être déposé.

Il instaure également la transformation en crédit d’impôt de la réduction d’impôt sur les services à la personne et les gardes d’enfants pour tous, y compris les retraités et les personnes atteintes de handicaps.

Il contient aussi, pour les entreprises, la hausse de 6 % à 7 % du CICE…

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … et la baisse progressive de l’impôt sur les sociétés jusqu’en 2020.

Enfin, il institue le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires, le CITS, qui bénéficiera aux secteurs de l’économie sociale et solidaire, aux structures associatives, médico-sociales et à but non lucratif auxquelles ne s’applique pas le CICE.

M. François Marc. Excellent !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Pour le dire plus simplement, c’est une réforme progressive de l’impôt que nous avons menée durant ce quinquennat.

Je voudrais à présent m’arrêter sur la réforme du recouvrement de l’impôt sur le revenu. Celle-ci a souvent été annoncée ; jusqu’ici, elle a toujours été différée,…

M. Francis Delattre. Elle le sera encore !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … alors même que le prélèvement à la source bénéficiera à tous les contribuables.

On m’a dit, ou j’ai lu, que cette réforme était mal préparée.

M. Charles Guené. Absolument !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est méprisant…

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste et républicain. Tout à fait !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. C’est méprisant pour les personnes qui ont travaillé d’arrache-pied, pendant des heures, jour et nuit, pour construire un texte, certes difficile à établir, mais que personne n’avait jusqu’alors réussi à finaliser.

M. Didier Guillaume. Il fallait le faire !

M. Francis Delattre. Pourquoi ne pas l’avoir fait au début de votre mandat ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. On me dit aussi que cette réforme n’a pas fait l’objet d’une concertation. Quel mensonge ! Michel Sapin et moi-même avons personnellement rencontré nos collègues ministres de l’agriculture, de la défense du travail, du droit des femmes et de la santé. J’ai aussi rencontré à plusieurs reprises toutes les organisations syndicales de Bercy, toutes ! J’ai également rencontré toutes les organisations syndicales de salariés, la plupart du temps en la personne de leur premier représentant.

J’ai rencontré, pour certains plusieurs fois, la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises, la CGPME, l’Union professionnelle artisanale, l’UPA, l’Union nationale des professions indépendantes, les représentants de l’économie sociale et solidaire, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, la FNSEA.

Enfin, mes services ont rencontré à six reprises, mon cabinet à deux reprises et moi-même à deux reprises les représentants du Mouvement des entreprises de France, le MEDEF. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

M. Philippe Dallier. Quelle audace ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Francis Delattre. Quelle transgression ! (Nouveaux sourires.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ils ne vous ont pas convaincu ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Face à vos cris de surprise, j’ouvre une parenthèse. Le vice-président du MEDEF, M. Roux de Bézieux, a déclaré devant une commission de vos collègues de l’Assemblée nationale que le MEDEF n’avait pas été consulté sur cette réforme. Je tiens à votre disposition les dates et les lieux de ces rencontres, j’en ai compté dix !

M. Éric Doligé. Il n’a pas dit qu’il n’y avait pas eu de rendez-vous…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Si, monsieur le sénateur, lisez le compte rendu de la commission des finances de l’Assemblée nationale.

À deux reprises, j’ai rencontré les représentants de la Fédération des particuliers employeurs de France, la FEPEM, ainsi que, pour ce qui concerne les crédits et les réductions d’impôt, France générosités, qui regroupe la plupart des organisations caritatives, les Restos du cœur et la Fondation Abbé Pierre.

J’ai aussi reçu les représentants des associations d’assistantes maternelles, qui s’inquiétaient de leur statut et de leur crédit d’impôt. Je me suis déplacé trois fois en province – à Tours, à Metz, à Montpellier – et, chaque fois, j’y ai rencontré des experts-comptables, des directeurs des ressources humaines, des avocats fiscalistes, des notaires, des agriculteurs, qui m’ont fait part de leurs inquiétudes relatives au prélèvement à la source.

Donc, ceux qui disent que cette réforme n’a pas fait l’objet d’une concertation sont des menteurs !

On me dit aussi que cette réforme aurait été précipitée. Elle a été annoncée il y a plus d’un an, elle a été préparée depuis le mois de janvier, dès que l’examen de la loi de finances pour 2016 s’est achevé. Nous avons donc travaillé avec tous ceux que je viens de citer pendant un an, avec nos équipes, et nous avons encore devant nous un an pour que chacun puisse s’adapter au XXIe siècle, à l’aide des technologies existantes, aux dispositions qui rendront cette réforme opérationnelle.

Cela étant dit, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’est-ce qui importe le plus ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est de ne pas casser les pieds des Français !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ce qui importe, ce sont les contribuables.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Oui, justement !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Or cette réforme permettra aux contribuables de mieux appréhender, au moins du point de vue fiscal, certains des moments clés de leur vie. Avec le prélèvement à la source, les changements de situation, les moments, parfois douloureux, de transition seront très rapidement pris en compte par l’administration fiscale.

J’entends certains prétendre que cette réforme ne changera rien, qu’une mensualisation obligatoire aurait suffi. Ceux-là n’ont visiblement rien compris. Ils n’ont sans doute pas encore pris leur retraite – chaque année, 700 000 de nos concitoyens le font. Ils n’ont certainement pas fait l’expérience du chômage – 30 % des foyers fiscaux français connaissent des baisses significatives de leurs ressources d’une année à l’autre. Ils ont peut-être eu des enfants, mais ils n’avaient manifestement aucun problème de trésorerie pour avancer les dépenses que suppose cet heureux événement – chaque année, 800 000 de nos concitoyens connaissent une naissance dans leur foyer.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Les enfants n’étaient pas pris en compte dans le projet initial !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Ils n’ont certainement jamais pris de congé parental ni d’année sabbatique et n’ont sûrement jamais opté pour le temps partiel.

M. Francis Delattre. Ils n’ont jamais été ministres non plus ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Avec le prélèvement à la source, tous les changements de situation entraîneront un alignement immédiat de l’impôt payé.

C’est bien là que réside tout l’avantage de cette réforme : quand le revenu varie, l’impôt s’adapte. La simple mensualisation du recouvrement ne tient pas compte de la volatilité des situations professionnelles et familiales, qui est le propre de notre société et qui s’accentue de jour en jour dans notre monde et dans notre économie en mutation. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)

Nous ne cessons de le répéter, cette réforme protégera les contribuables dans les situations de fragilité qu’ils peuvent connaître, même de façon passagère. C’est le rôle de la puissance publique de veiller à ce que tous nos concitoyens, sans exception, bénéficient des mesures qui leur sont favorables.

Je sais que, comme toute réforme, celle-ci peut susciter des craintes face aux changements qu’elle entraînera. Malheureusement, l’absence de débat ne nous permettra pas d’en aborder chacun des aspects,…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … tels que la confidentialité des informations fiscales des salariés, qui est garantie, ou la réduction au minimum des diligences demandées aux employeurs.

Arrêtons-nous sur ces deux points. Les apports de la déclaration sociale nominative sont essentiels, et ils permettront d’ajouter une ligne sur la fiche de paie, de façon dématérialisée, automatique et sécurisée. Ah, ajouter une ligne, au XXIe siècle, ce serait terrifiant ! Cela représenterait une charge insurmontable ! Mais en 1993, en 2003, en 2015, en 2016, tous les employeurs ont ajouté une ligne sur leurs bulletins de paie…

M. Alain Gournac. Après vingt-six autres !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … et cette ligne a changé au fil du temps,…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mais elle n’est pas individualisée !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … à cause de Mme Aubry, de M. Fillon, de M. Bertrand ou de ce gouvernement… Aujourd’hui, il serait insurmontable d’ajouter une ligne sur la fiche de paie à propos du prélèvement à la source ? Mais je n’ai jamais entendu un seul employeur protester contre l’ajout de la ligne intitulée « allégement de cotisations sociales » ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Francis Delattre. Il s’agit de données personnelles !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. J’en viens à la politique budgétaire que nous avons suivie pendant cette législature et que nous poursuivons en 2017. Cette politique a permis une baisse continue du déficit public, je l’ai souligné, mais aussi de dégager les moyens nécessaires pour rendre la vie meilleure dans notre pays.

Il y a eu en effet une constante durant cette législature : jamais nous n’avons hésité à dégager les moyens nécessaires pour que ceux qui en ont besoin puissent bénéficier de l’aide de l’État. Je pense au plan pauvreté, qui a revalorisé le RSA de 10 % au-delà de l’inflation,…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Sur le dos des départements !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … à la prime d’activité pour ceux qui travaillent, aux revalorisations des bourses pour nos jeunes, ainsi qu’aux créations de postes d’enseignants et à la Garantie jeune.

L’aide aux plus démunis a été la ligne directrice de notre politique budgétaire. Les politiques de solidarité et d’insertion ont bénéficié de 1,9 milliard d’euros de moyens supplémentaires entre 2013 et 2017. Pour l’accès et le retour à l’emploi et pour la formation professionnelle, quelque 2,3 milliards d’euros de dépenses nouvelles ont été autorisés.

En outre, à côté de ce fil rouge, la sécurité des Français a exigé que nous relevions des défis que personne n’aurait pu prévoir en 2012. Nous avons pourtant fait face à ces défis tout en respectant notre contrainte budgétaire et nos schémas d’emplois – on en parle beaucoup, j’y reviendrai. Nous avons accordé tous les moyens nécessaires à la défense, à la police, à la gendarmerie, à la justice. Depuis la loi de finances initiale pour 2015, les moyens budgétaires alloués à ces différents secteurs ont progressé de 2,7 milliards d’euros.

En même temps que nous dégagions ces nouveaux moyens pour les Français, nous avons réduit les dépenses moins utiles ; c’est ce qui explique que nous ayons diminué de 6,5 milliards d’euros la dépense de l’État sur la législature, à périmètre constant.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Il s’agit d’une baisse en euros sonnants et trébuchants, de loi de finances à loi de finances, de loi de règlement à loi de règlement et non par rapport à un tendanciel.

Le plan d’économies sur trois ans lancé en 2014 se poursuivra en 2017 et associera tous les secteurs des administrations publiques. D’ores et déjà, vous avez débattu des économies sur la sécurité sociale, notamment l’assurance-chômage. Ce projet de loi de finances prévoit à nouveau que les collectivités territoriales prennent part à l’effort de redressement de nos comptes publics, ce qui se traduira par une baisse des dotations de l’État. Cette baisse, conformément aux déclarations du Président de la République lors du congrès des maires, sera allégée d’un milliard d’euros par rapport aux deux années précédentes.

L’ensemble des mesures prises dans ce projet de loi, comme dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, doit nous permettre de faire passer le déficit public sous le seuil de 3 % du PIB l’an prochain.

M. Francis Delattre. On peut prendre les paris ?

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Certains crient au loup, à la tricherie. J’y insiste, plusieurs juges de paix se manifestent – le Haut Conseil des finances publiques, la Cour des comptes, la Commission européenne, les candidats à la primaire de la droite et du centre –, et la Commission européenne vient de confirmer la crédibilité de cet objectif dans son avis sur la trajectoire budgétaire de la France. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. À 3,1 % du PIB !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Non, 2,9 %, monsieur le rapporteur général.

M. Francis Delattre. Au prix d’un matraquage fiscal !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Calmez-vous, monsieur le sénateur, tout va bien se passer. (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain.)

Quant au déficit de l’État, il atteindrait 69,3 milliards d’euros, soit son plus bas niveau depuis 2008.

M. Didier Guillaume. Belle réussite !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Bien entendu, ces objectifs pour 2017 s’appuieront fortement sur les résultats que nous attendons pour 2016, un solde de 3,3 % du PIB, confirmé dans le collectif budgétaire récemment déposé – mais l’examinerez-vous ?

À ce propos, permettez-moi de souligner que le léger ajustement de la prévision du taux de croissance pour 2016, ramenée de 1,5 % à 1,4 %, n’entraîne pas de modification de la prévision de solde. Il se résume à une légère évolution de la répartition des recettes fiscales, compte tenu des informations comptables déjà disponibles. La Commission européenne confirme d’ailleurs le réalisme de la prévision du Gouvernement sur ce point, tout comme le Haut Conseil des finances publiques, généralement peu complaisant.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est sûr, là-dessus, nous sommes d’accord…

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Peut-être n’avez-vous pas eu le temps d’en prendre connaissance, monsieur le sénateur, mais le Haut Conseil a publié vendredi dernier au matin son avis sur le projet de loi de finances rectificative et sur la trajectoire de 2017 ; vous aviez peut-être la tête ailleurs à ce moment-là… (Sourires.)

Dans l’avis relatif à l’exercice 2016, j’ai relevé une fois le mot « atteignable » – ce vocable peut certes exprimer un doute –, mais il y avait deux fois le mot « réaliste », monsieur le rapporteur général. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Francis Delattre. En fait, il dit : « peu réaliste » ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Sous la plume du Haut Conseil des finances, c’est plutôt rassurant. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Cette prudence et cette prévoyance ne me semblent malheureusement pas partagées par tous ceux qui siègent dans cet hémicycle ; ils se reconnaîtront !

À entendre les propositions du principal parti d’opposition, j’éprouve un mélange d’inquiétude pour notre pays…

M. Francis Delattre. … et d’admiration ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. … et de colère face à la dilapidation annoncée des efforts des Français. Une dette à plus de 100 % du PIB, plus importante que toute notre richesse nationale d’une seule année !

MM. Philippe Dallier et Francis Delattre. C’est déjà fait !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Un déficit à plus de 4,7 % du PIB (Mme la présidente de la commission des finances approuve.), dont on ne sait plus, d’ailleurs, s’il vaut pour 2017 ou pour 2018.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Regardez le débat de ce soir !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. M. Carrez a dit publiquement qu’il n’avait jamais validé ce chiffre, que l’on tente de justifier par quelques notes qui circulent ici ou là…

M. Francis Delattre. C’était M. Mariton !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, vous avez probablement lu qu’un grand journal du soir s’interroge sur ces comptes – ou plutôt sur ces mécomptes…

Il est toujours commode de justifier ce déficit en se réfugiant derrière l’insincérité supposée de notre budget, alors même que toutes les prévisions confirment le sérieux de notre politique budgétaire. (Rires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)

MM. Roger Karoutchi et Francis Delattre. Et sa réussite !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Cessez d’attiser les peurs sur l’état de nos finances et acceptez d’avoir une discussion un peu argumentée sur ces chiffres. Mais vous préférez vous défausser et couper court aux débats !

Tout cela n’est que prétexte. Notre budget conduit à un déficit inférieur à 3 % du PIB l’an prochain. Dès lors, quand vous évoquez un déficit à 4,7 %,…