M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le gouvernement de la république française et le gouvernement de la république italienne signé le 24 février 2015 pour l’engagement des travaux définitifs de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire lyon-turin

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne signé le 24 février 2015 pour l'engagement des travaux définitifs de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne signé le 24 février 2015 pour l’engagement des travaux définitifs de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin (ensemble un protocole additionnel signé à Venise le 8 mars 2016 et un règlement des contrats), et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne signée le 24 février 2015 pour l’engagement des travaux définitifs de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin.

(Le projet de loi est adopté définitivement.) (Applaudissements.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne signé le 24 février 2015 pour l'engagement des travaux définitifs de la section transfrontalière de la nouvelle ligne ferroviaire Lyon-Turin
 

8

Nomination de membres d’une commission mixte paritaire

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz et aux énergies renouvelables.

La liste des candidats établie par la commission des affaires économiques a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Jean-Claude Lenoir, Ladislas Poniatowski, Daniel Laurent, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Roland Courteau, Franck Montaugé et Jean-Pierre Bosino.

Suppléants : M. Gérard Bailly, Mme Delphine Bataille, MM. Marc Daunis, Daniel Dubois, Joël Labbé, Mmes Élisabeth Lamure et Sophie Primas.

9

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord  sur l'accession du Monténégro
Discussion générale (suite)

Accession du Monténégro à l’OTAN

Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession du Monténégro (projet n° 173, texte de la commission n° 314, rapport n° 313).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité de l'Atlantique Nord  sur l'accession du Monténégro
Article unique (début)

M. Harlem Désir, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi autorisant la ratification du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession du Monténégro, signé à Bruxelles le 19 mai 2016, qui est soumis à l’examen du Sénat, est important puisqu’il concourt à nos efforts de stabilisation des Balkans occidentaux.

Après les adhésions à l’OTAN de la Slovénie en 2004, de la Croatie et de l’Albanie en 2009, celle du Monténégro sera un gage de stabilité pour cette région, stabilité qui reste un enjeu de première importance pour la sécurité européenne dans son ensemble.

Notre pays a dans ce domaine une responsabilité particulière, liée à l’histoire et au rôle qui a été le sien dans les Balkans au cours des vingt dernières années, responsabilité qu’il assume aujourd’hui pleinement dans le cadre des processus de coopération régionale et de dialogue, le processus de Brdo-Brioni, d’une part, et de Berlin, d’autre part.

Le succès du sommet des Balkans occidentaux qui s’est tenu à Paris le 4 juillet dernier dans le cadre du processus de Berlin, à l’invitation du Président de la République, en a été une illustration.

Le Monténégro, dès le lendemain de son indépendance, en juin 2006, a signifié sa volonté de se rapprocher de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord et d’en devenir membre. Il a été invité par les alliés, en décembre 2009, à rejoindre le plan d’action pour l’adhésion, qui donne le statut officiel de candidat et engage formellement le processus d’adhésion.

Dans le cadre d’un dialogue étroit avec l’OTAN, le Monténégro a conduit de nombreuses réformes. Il a fait d’importants efforts en matière de modernisation des forces armées et de réforme du secteur de la sécurité et du renseignement, comme l’ont souligné plusieurs rapports de progrès de l’OTAN. L’effort de défense du pays a été porté à 1,7 % du PIB, légèrement en deçà de l’objectif de 2 % que se sont fixé les alliés lors du sommet du Pays de Galles en septembre 2014.

Le Monténégro a également conduit des réformes dans le domaine de la justice, pour renforcer l’indépendance du système judiciaire, intensifier la lutte contre la criminalité organisée et la corruption et assurer l’État de droit.

Ces progrès ont été salués lors des sommets de Lisbonne en 2010 et de Chicago en 2012. Le sommet du Pays de Galles de septembre 2014 a ouvert un dialogue renforcé avec le Monténégro en vue de permettre aux alliés de se prononcer, à la fin de l’année 2015, sur l’opportunité d’une adhésion à l’OTAN.

Lors de la réunion des ministres des affaires étrangères de l’OTAN des 1er et 2 décembre 2015, les alliés ont donc pris par consensus la décision d’inviter le Monténégro à engager d’ultimes pourparlers en vue de son adhésion.

Cette démarche a abouti, le 19 mai 2016, à la signature par les États membres de l’OTAN du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession du Monténégro. Le Monténégro a alors obtenu le statut de pays invité et a pu ainsi participer au sommet de l’OTAN à Varsovie, en juillet 2016.

La ratification du protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession du Monténégro permettra à ce pays de devenir le vingt-neuvième allié de l’OTAN. Vingt et un des vingt-huit membres de l’Alliance atlantique ont d’ores et déjà ratifié ce protocole.

Pour la France, l’adhésion du Monténégro à l’OTAN sera bénéfique, car ce pays joue un rôle important dans la région des Balkans occidentaux.

Le Monténégro a recouvré son indépendance, perdue après la Première Guerre mondiale, le 3 juin 2006, en se séparant pacifiquement, par référendum, de la communauté de Serbie-et-Monténégro. Son indépendance a été reconnue immédiatement par l’ensemble de la communauté internationale et, je veux y insister, le Monténégro n’est en litige territorial ou diplomatique avec aucun de ses voisins. Il est au contraire un élément moteur de la coopération régionale dans les Balkans.

Malgré sa taille modeste, la contribution du Monténégro à la sécurité de l’Alliance sera réelle. Entre l’Albanie et la Croatie, ce pays assurera un continuum géographique le long de l’Adriatique, qui a son importance stratégique en matière de défense collective. Ce point était particulièrement important pour nos alliés de la zone.

Le Monténégro participe d’ores et déjà comme partenaire, à la mesure de ses moyens, à plusieurs opérations de stabilisation : Resolute Support en Afghanistan pour l’OTAN, mais aussi EUNAVFOR Atalanta et EUTM Mali dans le cadre de l’Europe de la défense, et aux côtés des armées françaises. Son adhésion s’inscrira donc dans la continuité de cet engagement.

Concernant la politique de l’OTAN en matière d’élargissement, je tiens à rappeler que l’ouverture du processus d’adhésion au Monténégro s’est faite dans le cadre d’un accord plus large entre alliés sur le traitement des questions d’élargissement de l’OTAN.

C’est dans le cadre de cet accord que la France s’est assurée, en amont du sommet de Varsovie, que l’invitation faite au Monténégro ne serait pas le signal d’un élargissement non maîtrisé. Pour la France, l’adhésion du Monténégro n’ouvre en aucun cas la voie à une relance générale de la politique dite « de la porte ouverte ».

Pour la France, l’élargissement de l’OTAN n’est aujourd’hui ni une priorité ni une fin en soi. Il ne peut s’envisager que dans la mesure où il renforce effectivement la sécurité de l’espace euro-atlantique et la crédibilité de la défense collective. Il relève par ailleurs, je tiens à le rappeler, d’une décision souveraine des pays souhaitant rechercher l’adhésion, qu’il revient ensuite à l’Alliance d’accepter ou non. Nul État tiers n’a de droit de regard sur cette décision.

Ainsi, nous avons accepté de considérer les mérites propres du Monténégro, mais nous avons veillé à ce que soit parallèlement adoptée une série de conditions destinée à d’autres pays candidats, pour l’adhésion desquels il n’existe pas aujourd’hui de consensus.

L’accord entre alliés sur ce point, dont les principes ont été repris dans le communiqué du sommet de Varsovie, précise bien que l’attribution d’un plan d’action pour l’adhésion reste une étape incontournable pour la Géorgie ; que c’est aux pays candidats de prendre les mesures nécessaires s’ils souhaitent avancer sur la voie de l’adhésion, et non aux alliés de renoncer aux conditions posées ; que les candidatures seront évaluées, en priorité, à l’aune de la capacité des candidats à assumer les responsabilités et les obligations liées au statut de membre et, en particulier, à contribuer à la sécurité de l’espace euro-atlantique.

Rappelons-nous qu’au lendemain de la guerre froide, l’élargissement de l’OTAN a été un facteur de renforcement de la sécurité du continent européen. Une forte demande de stabilité et de sécurité émanait des ex-pays membres du pacte de Varsovie. Tout comme l’Union européenne, l’Alliance y a répondu en définissant des modalités d’accession flexibles. L’objectif était de contribuer à une vaste architecture de sécurité européenne, où les processus d’élargissement de l’OTAN et de l’Union européenne étaient perçus comme complémentaires, tout en étant clairement distincts.

Vingt-cinq ans plus tard, nous continuons de refuser l’idée d’un partage de l’Europe en sphères d’influence, comme celle d’un droit de regard extérieur sur le processus d’adhésion. La dégradation durable de notre environnement stratégique a cependant conduit l’OTAN à reconsidérer les perspectives d’élargissement actuelles. Nos partenaires comprennent bien désormais que les candidats à l’adhésion doivent être considérés, en premier lieu, en fonction de leur capacité à contribuer à notre défense collective et de la capacité de l’OTAN à garantir leur sécurité.

Voilà en résumé, mesdames, messieurs les sénateurs, les enjeux de la ratification de ce protocole.

L’adhésion du Monténégro à l’OTAN ne préjuge en rien des décisions que l’Union européenne pourra prendre s’agissant de l’adhésion du Monténégro à l’Union européenne, dont la procédure suit son cours et pour laquelle les critères d’accession sont différents, même si certains peuvent se recouper.

Je vous invite donc à juger ce projet de loi pour ce qu’il est : un développement circonscrit au cas du Monténégro, dont l’adhésion à l’OTAN sera positive pour la stabilité des Balkans occidentaux.

Telles sont les principales observations qu’appelle le protocole au traité de l’Atlantique Nord sur l’accession de la République du Monténégro, qui fait l’objet du projet de loi proposé à votre autorisation, après celle donnée le 1er décembre dernier par l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Xavier Pintat, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, peu après son indépendance, recouvrée en 2006 après des années d’intégration dans l’ensemble yougoslave puis d’union avec la Serbie, le Monténégro a fait part de son souhait de rejoindre la communauté euro-atlantique, souhait également manifesté par sa candidature à l’Union européenne. Pour ce pays multiethnique et multiconfessionnel, qui se situe dans une zone de turbulences, il s’agit avant tout de garantir sa sécurité et sa stabilité.

De fait, l’accession du Monténégro à l’Alliance atlantique s’inscrit dans la politique dite « de la porte ouverte » appliquée à l’égard des pays de l’est de l’Europe après la fin de la guerre froide, et dont l’objectif était d’abord politique : il s’agissait d’œuvrer à la stabilité de la zone euro-atlantique, en promouvant dans ces pays la paix, la liberté et la démocratie.

Le Monténégro fait partie de la dernière vague d’élargissement de l’OTAN, lancée à l’occasion du sommet de Bucarest de 2008, et dont la mise en œuvre, convenons-en, s’est avérée problématique. Si l’Albanie et la Croatie sont assez rapidement parvenues à l’adhésion, le Monténégro est aujourd’hui le seul pays parmi les autres candidats – l’ancienne République yougoslave de Macédoine, la Bosnie-Herzégovine et la Géorgie – à remplir les conditions pour devenir membre de l’OTAN.

Certes, il ne s’agit pas d’idéaliser ce pays, qui a encore des progrès à accomplir, notamment en tant qu’État de droit et en matière de lutte contre la corruption. Le Monténégro n’en a pas moins franchi avec succès les différentes étapes du processus d’adhésion, depuis le plan d’action pour l’adhésion obtenu en décembre 2009 jusqu’à l’engagement de négociations d’adhésion auxquelles les alliés ont donné le feu vert en décembre 2015.

Il faut également souligner qu’il a enregistré des avancées dans de nombreux domaines, dans le cadre de sa candidature à l’Union européenne.

D’un point de vue militaire, il faut l’admettre, sa contribution financière au budget de l’Alliance sera modeste. Néanmoins, ce pays compte augmenter son effort de défense dans les années à venir, tant pour renforcer les effectifs de ses forces armées que pour renouveler ses équipements militaires, ses priorités de modernisation étant définies en fonction des objectifs d’intégration à l’OTAN.

En outre, le Monténégro prend activement part aux opérations extérieures, dans le cadre de l’OTAN, avec une contribution à l’opération Resolute Support en Afghanistan, ou dans celui de l’Union européenne, avec notamment une participation à l’opération Atalanta de lutte contre la piraterie.

Il faut souligner à cet égard la sensibilité maritime que le Monténégro est susceptible d’apporter à l’Alliance atlantique, qui pourrait s’avérer utile pour le traitement des problématiques méditerranéennes, comme la question des migrants.

Enfin, d’un point de vue stratégique, l’entrée du Monténégro dans l’OTAN permet d’établir une continuité dans la défense européenne sur la côte Adriatique, en complétant le chaînon manquant entre la Croatie et l’Albanie. Intégrer à l’OTAN ces deux pays et négliger la dent creuse que représentait dans la zone le Monténégro aurait été un non-sens, d’autant qu’il remplit désormais les conditions posées par l’Alliance.

Si elle paraît ainsi pouvoir être justifiée par des raisons objectives, l’adhésion du Monténégro à l’OTAN n’en reste pas moins une question discutée, tant sur le plan interne que sur le plan international.

Pour une partie de l’opinion publique monténégrine, marquée par les bombardements de l’OTAN contre la Serbie, cette adhésion ne va pas de soi. La question a même été l’un des mots d’ordre des manifestations organisées contre le pouvoir à l’automne 2015. Elle a également occupé une large place dans les débats qui ont précédé les élections législatives du 16 octobre 2016, qui se sont accompagnées d’une tentative de déstabilisation du pouvoir. Ces élections n’en ont pas moins été largement remportées par des formations favorables à l’accession à l’OTAN.

Par ailleurs, on ne saurait davantage occulter, dans le contexte stratégique actuel, les difficultés que suscite l’adhésion du Monténégro à l’OTAN dans nos relations avec la Russie. Plus que les intérêts économiques et les liens culturels liés à la présence d’une forte minorité slave qu’entretient la Russie dans ce pays, c’est surtout la perspective d’un nouvel élargissement de l’OTAN, dans un contexte de tensions exacerbées avec cette organisation qui explique la réaction russe.

En effet, la Russie considère que l’expansion de l’OTAN constitue une menace directe pour sa sécurité. Selon la dernière version de la doctrine militaire russe, il s’agit même du premier danger militaire auquel la Russie est susceptible de faire face.

Comme l’ont souligné nos excellents collègues Robert del Picchia, Josette Durrieu et Gaëtan Gorce dans leur rapport de 2015 sur les relations avec la Russie, l’élargissement à l’est de l’OTAN, concomitamment avec celui de l’Union européenne, constitue l’une des causes de la détérioration, ces dernières années, des relations entre la Russie et les pays occidentaux, détérioration que la crise ukrainienne n’a fait qu’aggraver. Toutefois, s’agissant du Monténégro, pays de 620 000 habitants qui, de surcroît, ne borde pas les frontières russes, cette réaction relève davantage d’une position de principe qu’elle ne traduit un réel enjeu stratégique.

Après un débat approfondi, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est donc finalement prononcée pour la ratification du protocole d’adhésion du Monténégro à l’OTAN. Il s’agit en effet de ne pas décevoir les attentes d’un pays méritant, qui s’est résolument engagé dans cette voie et en a franchi avec succès les différentes étapes, de conforter un pôle de stabilité dans les Balkans au bénéfice des pays voisins, et de compléter l’arc de sécurité de l’OTAN sur la côte Adriatique.

Par ailleurs, il serait particulièrement malvenu, à l’heure où l’OTAN et l’Europe sont fragilisées par les déclarations du nouveau président américain, de mettre à mal l’unité de l’OTAN en rejetant ce texte alors qu’une grande majorité d’États alliés l’ont déjà ratifié. Cela constituerait un signe de faiblesse et la France en porterait la lourde responsabilité.

En revanche, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées considère que, après cette adhésion, qui, soulignons-le, n’est en aucune manière dirigée contre la Russie, un terme doit être mis à la dynamique d’élargissement de l’OTAN ; l’adhésion à l’Alliance atlantique de pays comme la Géorgie, l’Ukraine, la Serbie représente pour la Russie une ligne rouge.

Il est à cet égard nécessaire de poursuivre les efforts de dialogue et de coopération avec la Russie dans le cadre du conseil OTAN-Russie, qui, après avoir suspendu ses activités du fait de la crise ukrainienne, a tenu trois réunions durant l’année 2016, ce qui est un signe encourageant. Seul le dialogue peut permettre de diminuer les tensions qui se manifestent actuellement à l’est de l’Europe.

Enfin, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a souhaité rappeler que l’adhésion du Monténégro à l’OTAN ne préjuge en rien de son adhésion à l’Union européenne. Sous ces réserves, elle a adopté ce projet de loi.

M. Christian Cambon, vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, pour le groupe CRC.

M. Bernard Vera. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi dont nous débattons prévoit l’intégration dans l’OTAN d’un vingt-neuvième pays, le Monténégro.

Cette intégration s’inscrit dans la stratégie développée depuis 1999 par l’OTAN et consistant à s’étendre à l’est de l’Europe. L’adhésion du Monténégro n’est qu’une étape supplémentaire de cette politique expansionniste, dans la continuité de l’intégration de douze autres pays de l’Europe orientale, multipliant ainsi les initiatives conduisant à l’isolement de la Russie et les tentatives d’implantation de matériel militaire dans les pays frontaliers.

Cette dynamique, entamée malgré les accords signés avec Mikhaïl Gorbatchev en 1990 puis avec Boris Eltsine en 1997, prend encore plus d’importance pour l’organisation atlantique maintenant que le pouvoir de Vladimir Poutine se renforce.

Cette volonté d’isoler la Russie en renforçant les positions de l’OTAN sur le flanc oriental vise en réalité à revenir à une logique de guerre froide. Soutenir ce projet revient à prendre le risque de nous entraîner dans une spirale de tensions, de provocations et de course à l’armement.

Cette stratégie est si dangereuse que le ministre allemand des affaires étrangères, Frank-Walter Stenmeier, s’inquiète d’un tel projet et a affirmé : « Celui qui croit augmenter le niveau de la sécurité avec des parades de chars sur le front est de l’Alliance se trompe. » Force est de constater que l’OTAN est restée crispée sur une logique désuète d’affrontement Est-Ouest, alors que le monde est incontestablement devenu multipolaire.

Après le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN et l’adoption du projet de loi autorisant la ratification du protocole de Paris sur l’OTAN, la France a renoncé à son indépendance sur la scène internationale et notre diplomatie s’est inscrite dans une vision atlantiste.

Or la promotion d’idéaux de paix et de coopération internationale est inconciliable avec le soutien à une organisation qui impose à ses membres une course aux armements tout en se dédouanant des résolutions de paix de l’ONU.

À l’heure où les États-Unis, qui dirigent l’OTAN et sont toujours dépositaires du traité de Washington, viennent d’élire un président souhaitant revenir sur l’article 5 du traité et sur le principe d’assistance mutuelle face aux menaces, il est temps pour la France de retrouver une voix indépendante dans le concert des nations. Notre pays a vocation à défendre un monde multipolaire en s’appuyant sur ses valeurs de défense des droits de l’homme partout dans le monde et en agissant en faveur d’une coexistence pacifique entre les peuples.

L’ONU a plus que jamais, en tant qu’organisation de paix et de sécurité mondiale, un rôle fondamental à jouer dans ce nouvel ordre international. Elle doit s’affirmer comme l’instance par excellence de médiation et de règlement des conflits internationaux, et la France doit agir en ce sens.

Persuadés que la résolution des conflits doit s’appuyer sur la politique et les résolutions de l’ONU, convaincus que la politique de course à l’armement de l’OTAN ne peut que conduire à la multiplication des conflits, les membres du groupe CRC voteront contre l’intégration du Monténégro dans l’OTAN. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Guérini, pour le groupe du RDSE.

M. Jean-Noël Guérini. L’entrée du Monténégro au sein de l’OTAN s’inscrit dans la poursuite de la politique dite « de la porte ouverte » pratiquée à l’égard des pays de l’est de l’Europe. Une dynamique d’intégration politique, et non militaire, rappelons-le, avait été engagée en faveur des pays issus du pacte de Varsovie. L’entrée en vigueur du protocole signé à Bruxelles avec le Monténégro le 19 mai dernier s’inscrit dans cette logique en ouvrant l’OTAN à un État des Balkans occidentaux.

Bien que ce pays soit de taille modeste et très peu peuplé, son adhésion à l’OTAN peut faire débat. Toutefois, on ne peut pas nier que le Monténégro a franchi avec succès les étapes du processus. Tout d’abord, le sommet du Pays de Galles de 2014 a souligné que, depuis 2009, le Monténégro avait progressé dans l’application du MAP, le plan d’action pour l’adhésion.

Ensuite, le Monténégro participe déjà à une mission de l’OTAN en Afghanistan.

En outre, si l’intérêt d’une adhésion à l’OTAN est seulement jugé selon la capacité du pays candidat à contribuer à la sécurité de la région de l’Atlantique Nord, on ne peut pas occulter les aspects relatifs à l’État de droit ; or, sur ce point, quelques indicateurs, issus des négociations d’adhésion à l’Union européenne en cours depuis 2012, témoignent d’une progression des acquis démocratiques. Tout n’est pas parfait, loin de là, mais la volonté du Monténégro de rejoindre l’Europe l’oblige à avancer sur les vingt-quatre chapitres ouverts dans le cadre de la « nouvelle approche », celle-ci reposant, je le rappelle, sur des exigences fortes en matière d’État de droit et de lutte contre la criminalité organisée.

Enfin, toujours du point de vue du processus d’adhésion, j’ajoute qu’une majorité de la population monténégrine l’approuve. Depuis les dernières élections de 2016, la majorité du Parlement est constituée de partis favorables à l’adhésion du Monténégro à l’OTAN.

Pour autant, si l’adhésion paraît fondée, on ne peut pas écarter la question de l’impact de cette nouvelle adhésion sur nos relations avec Moscou, qui voit dans la politique d’élargissement de l’OTAN vers l’est une stratégie de confinement de son pays. Si le cas du Monténégro peut encore passer, nous savons qu’il en sera autrement pour d’autres candidats, en particulier la Géorgie, l’Ukraine et la Serbie.

Ainsi, puisque dix-neuf des vingt-huit États membres de l’Alliance ont procédé à la ratification du protocole, la France ne peut pas envoyer un mauvais signal ; de plus, compte tenu des avancées que j’ai indiquées, j’approuverai le projet de loi.

Cela étant dit, il n’est pas interdit, monsieur le secrétaire d’État, de poser quelques conditions à cette adhésion et de les relayer sur le plan diplomatique. Je pense en particulier au fait de fixer une limite à l’élargissement et d’éviter la surenchère d’entraînements militaires aux frontières avec la Russie.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’exception de quelques abstentions, le RDSE approuvera dans sa majorité le présent projet de loi. (M. Christian Cambon, vice-président de la commission, M. Xavier Pintat, rapporteur, et M. Jean-Marie Bockel applaudissent.)