PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier

vice-président

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Ouzoulias, je risque fort de vous décevoir ! À l’occasion de la présentation d’un amendement, la commission des finances a considéré que la demande d’information relative au CIR était surabondante, compte tenu des données figurant déjà sur les formulaires CERFA. Pour autant, elle ne peut pas soutenir vos amendements.

L’amendement n° II-457 rectifié tend à restreindre considérablement le CIR ; l’amendement n° II-456 rectifié vise, quant à lui, à le limiter aux PME.

Chaque année, dans le cadre du projet de loi de finances, nous débattons de l’efficacité du crédit d’impôt recherche. Or vous connaissez l’analyse suivie par la commission des finances. À ses yeux, le CIR est efficace. Dans une Europe ouverte, dans un monde ouvert, rien ne se délocalise plus facilement que la recherche et les chercheurs.

Peut-être certains de mes collègues s’en souviennent-ils : il y a trois ou quatre ans, plusieurs membres de la commission des finances et moi-même nous sommes rendus à Toulouse, pour une réunion du Sénat hors les murs. Nous avons alors pu constater, de manière très concrète, l’utilité du CIR pour les PME ou les grandes entreprises, notamment les sous-traitants d’Airbus. Ainsi, nous avons rencontré les représentants d’une entreprise allemande qui avait fait le choix d’installer ses activités de recherche en France, grâce à ce dispositif de soutien à la recherche qu’est le CIR.

En réduisant le taux du CIR, particulièrement au-delà de 100 millions d’euros, ou en refondant entièrement ce dispositif pour le réserver aux seules PME, on émettrait donc un signal extrêmement négatif.

Vous le savez, la France souffre, plus que jamais, d’un problème en matière d’exportations. Le déficit de notre commerce extérieur atteint un niveau considérable. Les chiffres sont, hélas !, très défavorables. Dans un monde qui se révèle de plus en plus concurrentiel, l’un des moyens d’exporter davantage, c’est d’exporter mieux. Un tel effort passe nécessairement par la recherche et le soutien à la recherche.

En conséquence, la commission demande le retrait des amendements nos II-457 rectifié et II-456 rectifié. À défaut, elle émettra un avis très défavorable.

Suivant la logique inverse, plusieurs amendements tendent à rehausser le taux du CIR applicable outre-mer. Il s’agit notamment d’augmenter le taux applicable au-delà de 100 millions d’euros de dépenses.

Je ne sais si ces dispositions sont théoriques ou si, à travers elles, leurs auteurs expriment l’espoir de voir la recherche se développer dans les territoires ultramarins. Toutefois, je n’ai pas en tête d’exemple d’entreprise qui, outre-mer, consacrerait plus de 100 millions d’euros de dépenses à la recherche. Peut-être Mme la secrétaire d’État pourra nous en citer. Toujours est-il qu’il s’agit là d’un chiffre élevé.

Certes, on peut toujours avoir l’espoir d’accroître les activités de recherche outre-mer. Mais, à ce stade, vouloir augmenter le taux du CIR pour la fraction de dépenses de recherche au-delà de 100 millions d’euros, n’est-ce pas, peu ou prou, se cantonner dans la théorie ?

J’ajoute que les entreprises d’outre-mer bénéficient déjà, au titre du CIR, d’un taux majoré, de 40 %, pour les dépenses inférieures à 100 millions d’euros. Il existe donc des dispositions spécifiques.

En l’occurrence, la question du coût me paraît secondaire : j’ai peur que les dispositions proposées ne restent virtuelles. Mais il ne faudrait pas complexifier encore le dispositif.

Aussi, la commission demande le retrait des amendements nos II-570 rectifié bis et II-625 rectifié ter. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Enfin, à travers l’amendement n° II-425 rectifié bis, un certain nombre de membres de la commission des affaires économiques proposent de rendre éligible au CIR l’ensemble des dépenses de normalisation effectuées par les entreprises.

Il est vrai qu’aujourd’hui les dépenses de ce type se multiplient sous l’effet des obligations réglementaires. Il s’agit en particulier de rédiger divers documents de référence. Ces activités entrent-elles, ou non, dans le champ de la pure recherche ?

La commission des finances n’a pas eu beaucoup de temps pour expertiser cette demande. Aussi, elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement avant de se prononcer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. L’amendement n° II-457 rectifié tend à revenir à la situation antérieure à la réforme du CIR qui a été menée en 2008.

À cette date, ce crédit d’impôt a été jugé peu efficace, et il a été modifié en conséquence. Son efficacité s’est, ainsi, sensiblement améliorée. D’ailleurs, la période de crise que la France a connue entre 2008 et 2010 l’a prouvé. Alors que nous traversions de graves difficultés économiques, le CIR a permis la stabilisation et même une légère progression des dépenses de recherche et de développement sur notre territoire.

Le Gouvernement considère que le CIR est un dispositif clef pour l’attractivité des activités de recherche et de développement présentes en France. Les entreprises étrangères le reconnaissent, et saluent régulièrement ce crédit d’impôt : plusieurs centaines d’entre elles ont décidé d’investir dans un centre de recherche et développement en France au cours de la dernière décennie.

En 2015, d’après Business France, les filiales des entreprises étrangères en France ont contribué à hauteur de 28 % aux dépenses de R&D dans notre pays.

Il nous semble donc pertinent de maintenir ce dispositif pour les dépenses de recherche et développement en France et de préserver, ainsi, son attractivité.

Parallèlement, la modification des taux du CIR dans les territoires ultramarins nous inspire les plus grandes réserves. M. le rapporteur général l’a rappelé, l’outre-mer bénéficie déjà d’un taux majoré au titre du crédit d’impôt recherche. La loi de finances pour 2015 l’a porté de 30 % à 50 %. Le taux du crédit d’impôt innovation pour les PME y a, quant à lui, été élevé de 20 % à 40 %. Il ne nous semble pas pertinent d’aller au-delà, ou de traiter la tranche supérieure à 100 millions d’euros. D’ailleurs, on peut bel et bien s’interroger sur la matérialité d’une telle mesure.

Cela étant, il est pertinent de continuer à étudier le CIR, afin d’en évaluer l’efficacité. Pour cette raison, j’ai demandé à mes services d’étudier les modalités d’amélioration envisageables. Nous verrons si telle ou telle mesure ciblée peut assurer une meilleure efficacité. Je pense en particulier aux frais de normalisation et à leur prise en charge.

Monsieur Vaspart, vous avez relevé que le montant de ces dépenses était éligible pour moitié au crédit d’impôt recherche. L’élargissement de cette possibilité sera étudié par mes services dans le cadre d’une évaluation d’ensemble du CIR.

Pour l’heure, le Gouvernement sollicite le retrait de l’ensemble de ces amendements. À défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Ouzoulias, l’amendement n° II-457 rectifié est-il maintenu ?

M. Pierre Ouzoulias. Je vais le retirer, monsieur le président. Toutefois, j’indique à la Haute Assemblée que j’ai demandé un scrutin public sur l’amendement n° II-456 rectifié. (Murmures.)

Monsieur le rapporteur général, je tiens à vous répondre brièvement. Vous avez évoqué l’exemple de Toulouse. Airbus représente 1 000 milliards d’euros de commandes, soit, pour ainsi dire, la moitié du PIB annuel de la France. Or, aujourd’hui, cette entreprise prévoit d’externaliser une grande partie de ses activités de recherche et développement. Une telle décision menace non seulement les PME locales, mais aussi les écoles d’ingénieurs.

Pourquoi Airbus ferait-il ce choix ? Parce que le CIR prend en compte les dépenses externalisées d’un sous-traitant, y compris quand il se trouve dans un autre pays de l’Union européenne.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Supprimez le crédit d’impôt, et vous verrez !

M. Pierre Ouzoulias. Cette utilisation du CIR ne favorise en aucun cas l’emploi en France ou l’embauche de jeunes doctorants dans notre pays. Pour une grosse entreprise comme Airbus, il est bien sûr beaucoup plus intéressant de recourir à des sociétés situées à l’étranger.

De son côté, Sanofi, qui perçoit 130 millions d’euros au titre du CIR, a fermé quatre de ses sites de recherche et développement en France.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Eh bien, sans le CIR, Sanofi fermera ceux qui restent !

M. Pierre Ouzoulias. J’attends que l’on me prouve, avec des arguments comptables solides, quel est l’apport du CIR pour le développement de la recherche française. Pardonnez-moi d’insister, mais, à ce jour, je ne le vois absolument pas !

Cela étant, je retire l’amendement n° II-457 rectifié, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-457 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-456 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 41 :

Nombre de votants 330
Nombre de suffrages exprimés 330
Pour l’adoption 93
Contre 237

Le Sénat n’a pas adopté.

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

Je saisis cette occasion pour vous présenter toutes mes excuses, mon cher collègue, car je vous ai empêché de présenter l’amendement n° II-561 rectifié !

M. Thani Mohamed Soilihi. Merci, monsieur le président. Heureusement, mon collègue Maurice Antiste a défendu, à quelques différences près, les dispositions que je proposais.

L’amendement n° II-570 rectifié bis tend à favoriser l’implication outre-mer des grandes entreprises nationales de recherche et développement. Ces dernières trouveraient un intérêt nouveau à délocaliser une partie de leurs moyens dans les territoires ultramarins.

J’ai entendu les arguments avancés contre une telle mesure. La commission et le Gouvernement ont notamment fait valoir qu’une entreprise consacrant plus de 100 millions d’euros par an à la recherche et au développement n’existerait pas dans les outre-mer.

Tout d’abord, j’estime qu’il n’est pas interdit de rêver ! Une telle situation pourrait se produire.

Ensuite, je le répète, cette faculté s’appliquerait aux entreprises nationales susceptibles de se délocaliser, en partie, dans les territoires ultramarins.

Aussi, à mes yeux, un tel argument ne tient pas ; pour que le Sénat puisse se prononcer sur ces dispositions, j’encourage fortement Maurice Antiste à maintenir son amendement.

M. Maurice Antiste. C’est bien le cas !

M. le président. Monsieur Magras, l’amendement n° II-625 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Michel Magras. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-625 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° II-570 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Monsieur Vaspart, l’amendement n° II-425 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Michel Vaspart. Compte tenu des explications apportées par Mme la secrétaire d’État, qui a saisi ses services de cette question, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-425 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° II-614 est présenté par MM. Bérit-Débat et Guillaume, Mme Monier, MM. Lalande et Madrelle, Mme Préville, MM. Raynal, Cabanel, Todeschini, Courteau, Duran et Carcenac, Mmes G Jourda, Espagnac, Harribey et Conway-Mouret et M. Mazuir.

L’amendement n° II-681 est présenté par MM. Haut et Patriat.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 44 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le I de l’article L. 341-2 du code forestier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Un déboisement ayant pour but de planter des arbres mycorhizés par les truffes. La plantation doit être effectuée dans un délai maximal de quatre ans. »

II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2019.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° II-614 n’est pas soutenu.

La parole est à M. Claude Haut, pour présenter l’amendement n° II-681.

M. Claude Haut. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est défendu, et il est même satisfait !

Peut-être les signataires de cet amendement auraient-ils gagné à mieux suivre les débats que nous avons consacrés à la première partie… Au titre des articles fiscaux, le Sénat a adopté des dispositions encore plus favorables que celles-ci. Le présent amendement est donc pleinement satisfait, d’autant que nous sommes en pleine saison des truffes ! (Sourires.)

M. Claude Haut. Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° II-681 est retiré.

Articles additionnels après l’article 44 sexies
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Articles additionnels après l’article 44 septies

Article 44 septies (nouveau)

I. – L’article 244 quater L du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au I, l’année : « 2017 » est remplacée par l’année : « 2020 » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) À la fin du 1, le montant : « 2 500 € » est remplacé par le montant : « 3 500 € » ;

b) Après le mot : « échéant, », la fin de la seconde phrase du 2 est ainsi rédigée : « pour que le montant résultant de la somme des aides et du crédit d’impôt ne dépasse pas 4 000 €. » ;

3° Le IV est complété par les mots : « ou du règlement (UE) n° 717/2014 de la Commission du 27 juin 2014 concernant l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture ».

II. – Le I s’applique aux crédits d’impôts calculés à compter du 1er janvier 2018.

M. le président. L’amendement n° II-536, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer l’année :

2020

par l’année :

2018

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le présent amendement vise à prolonger le crédit d’impôt pour l’agriculture biologique, non pas jusqu’en 2020, mais jusqu’en 2018 seulement.

Ce crédit d’impôt connaît une augmentation importante, et l’on peut craindre une hausse très forte, pour ne pas dire exponentielle, de la dépense.

Soyons clairs : la commission n’est absolument pas défavorable à ce crédit d’impôt. Mais, compte tenu des incertitudes qui se font jour, elle propose de l’évaluer avant de le prolonger davantage. Donnons-nous un peu de temps : si on le juge efficace, et si son coût se révèle mesuré, il sera toujours possible d’en étendre la durée d’application. En faisant ce choix dès aujourd’hui, nous nous exposerions à un risque que la commission ne veut pas prendre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est attaché à cette prorogation pour trois ans, jusqu’à la fin de l’année 2020. Cette durée est d’ailleurs, dans l’essentiel des cas, celle que nous avons choisie pour les prorogations proposées au titre de ce projet de loi de finances. Nous souhaitons garantir de la visibilité aux entreprises qui vont devoir s’engager en déployant des dépenses d’investissement, de marketing, etc.

En conséquence, j’émets un avis défavorable sur le présent amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Madame la secrétaire d’État, au titre du présent article, la commission a également déposé l’amendement n° II-537, qui tend à garantir une évaluation du crédit d’impôt pour l’agriculture biologique.

Si vous nous disiez dès à présent que le Gouvernement accepte une telle évaluation, nous pourrions retirer l’amendement n° II-536. Ce serait une solution raisonnable et satisfaisante !

M. Richard Yung. Tout à fait !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Notre seule préoccupation, c’est d’assurer une bonne évaluation de ce dispositif.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. Monsieur le rapporteur général, ce sujet sera bien traité dans le cadre du chantier relatif à la fiscalité agricole, que Bruno Le Maire a annoncé pour le premier semestre de 2018.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, qu’en est-il, en définitive, de l’amendement n° II-536 ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’espère que le Gouvernement examinera l’amendement n° II-537 avec bienveillance ! Pour l’heure, je retire le présent amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-536 est retiré.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° II-2 rectifié ter est présenté par Mmes Lassarade et Deseyne, MM. Dufaut, Paul, Morisset, de Legge, Chaize, de Nicolaÿ, D. Laurent, Mouiller et Bonhomme, Mme Di Folco, MM. Pillet, Huré et Grand, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, M. Paccaud, Mme Deromedi, MM. Duplomb, Savary, Pierre, Lefèvre, Revet, Genest, Darnaud, Priou, Cuypers et Milon et Mmes Lamure et Bruguière.

L’amendement n° II-319 est présenté par M. Lalande, Mmes Bonnefoy, Perol-Dumont et Ghali, MM. Marie et P. Joly, Mme Conway-Mouret, MM. Duran, Magner, Roux et Daunis, Mmes Harribey et Artigalas, MM. Dagbert et Madrelle, Mme Monier, MM. Boutant, Montaugé et Cabanel, Mme Cartron, MM. Tourenne et Courteau, Mme Tocqueville et MM. Sutour, Temal, Bérit-Débat, Jacquin et Lozach.

L’amendement n° II-343 rectifié ter est présenté par Mme N. Delattre, MM. Gabouty et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Gold et Guérini, Mme Laborde, MM. Vall et Luche, Mme Joissains, M. Chatillon, Mme Jouve et M. Menonville.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l’alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

4° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les mêmes dispositions s’appliquent aux entreprises agricoles qui obtiennent une certification ouvrant droit à la mention “haute valeur environnementale” en application de l’article L. 611-6 du code rural et de la pêche maritime, avant le 31 décembre 2020. Dans ce cas, le crédit d’impôt est accordé au titre de l’année d’obtention de la certification et des deux années suivantes. »

II. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

… – Le 4° du I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° II-2 rectifié ter.

Mme Jacky Deromedi. L’engagement des viticulteurs dans la viticulture durable est aujourd’hui freiné par le fait que celle-ci implique de nouveaux investissements, une hausse des coûts de production, une baisse de la production et des contraintes administratives supplémentaires.

Ainsi, le coût de la certification par un organisme agréé, indépendant de la taille de l’entreprise, est particulièrement lourd pour les petites exploitations.

Afin de compenser ces handicaps et d’accompagner les exploitants dans leur démarche en faveur de l’environnement et de la biodiversité, cet amendement tend à accorder le bénéfice du crédit d’impôt prévu à l’article 244 quater L du code général des impôts aux exploitants qui obtiennent une certification ouvrant droit à la qualification haute valeur environnementale, ou qualification HVE, en application des dispositions de l’article L. 611-6 du code rural et de la pêche maritime.

A minima, le bénéfice de ce crédit d’impôt pourrait être accordé au titre de l’année de la certification et des deux années suivantes.

En outre, cet allégement fiscal pourrait être limité dans sa durée, jusqu’au 31 décembre 2020. Dès lors, son caractère incitatif serait garanti et, dans le même temps, le risque budgétaire serait limité : à terme, le coût annuel d’une telle mesure pourrait se révéler important, en cas de fort développement de la certification HVE.

M. le président. L’amendement n° II-319 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° II-343 rectifié ter.

Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est une viticultrice qui vous parle.

Cet amendement a pour objet d’accompagner la filière viticole afin qu’elle tienne son engagement en matière de responsabilisation de ses pratiques. Car c’est un engagement fort qu’a pris la profession viticole depuis ce jour d’avril 2016 où mon collègue Bernard Farges, alors président du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux, a annoncé la volonté de la filière de sortir progressivement des pesticides. Cette annonce émanant d’un département que je connais bien, la Gironde, a eu l’effet d’une petite bombe.

Il est donc indispensable de soutenir la profession dans une démarche qui a vocation à montrer la voie à suivre dans notre pays. Le « tout bio » n’est pas la solution ultime ; d’autres certifications existent. Cet amendement vise à inciter les viticulteurs à s’engager dans une démarche de certification haute valeur environnementale. Le chemin vers une viticulture durable peut être emprunté rapidement, mais la profession a besoin de se sentir soutenue et encouragée par les pouvoirs publics.

C’est pourquoi un certain nombre de collègues de différents groupes et moi-même proposons d’accorder le bénéfice du crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique aux exploitants qui auraient obtenu une certification ouvrant droit à la qualification haute valeur environnementale. Évidemment, je parle ici d’une certification environnementale de niveau 3, fondée sur des indicateurs de résultats relatifs à la biodiversité, à la stratégie phytosanitaire, ainsi qu’à la gestion de la fertilisation et de l’irrigation.

La viticulture consomme peu de pesticides, mais elle en consomme encore 20 %. Il est par conséquent de santé publique d’aider la profession à poursuivre la profonde mutation qu’elle a elle-même engagée.

M. Alain Joyandet. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ce début de semaine est tout à fait sympathique : on passe de la truffe au vin ! (Sourires.)

Je viens de le dire, j’inviterai le Sénat à adopter l’amendement n° II-537 concernant l’évaluation des dispositifs de crédit d’impôt. Il me paraît préférable de disposer d’une évaluation avant de commencer à étendre le champ du crédit d’impôt.

Au-delà de cette observation, la rédaction de ces deux amendements identiques pose une difficulté quant à la temporalité.

Très concrètement, la détention d’un certificat haute valeur environnementale, certificat HVE, avant le 31 décembre 2020 ouvrirait droit à un crédit d’impôt pour l’année de l’obtention et les deux années suivantes : une entreprise ayant obtenu le certificat HVE en 2012 pourrait y prétendre rétroactivement pour cette année et les années 2013 et 2014, mais pas pour les années suivantes.

Par ailleurs, l’obtention d’une certification HVE après 2018 ne saurait faire bénéficier ses titulaires des dispositions prévues, puisque celles-ci s’appliquent avant le 31 décembre 2020, et non 2022.

Se pose un problème de portée temporelle entre l’obtention du certificat et la période d’application du dispositif, avec un effet rétroactif, mais une limite de validité pour les années suivantes. Aussi, la rédaction de ces amendements mériterait d’être revue.

Pour autant, je vous propose de les retirer, mes chers collègues, au profit de l’amendement n° II-537 : l’évaluation proposée montrera la nécessité ou non de proroger le crédit d’impôt en le conditionnant à l’obtention de la certification haute valeur environnementale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est réservé sur l’extension du bénéfice du crédit d’impôt considéré. En effet, il considère que ce crédit d’impôt doit être limité à l’agriculture biologique. Le sujet des certifications haute valeur environnementale est différent, et doit être traité, à ce titre, de façon distincte.

Pour cette raison, l’avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. Madame Delattre, l’amendement n° II-343 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Nathalie Delattre. Compte tenu des propos du rapporteur général, je vais retirer cet amendement, monsieur le président, pour travailler de nouveau la rédaction.

Toutefois, j’aimerais avoir l’assurance que le Gouvernement prend conscience que nous avons déjà fait une révolution industrielle. Le « tout bio » n’est pas concevable pour tout le monde. Il faut que nous puissions avoir une discussion avec le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Stéphane Travert, et le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, sur la manière d’encourager les exploitants à obtenir une certification. Il faut prendre en compte cette question dans le débat que nous aurons avec Bruno Le Maire, notamment, dans le cadre de la refonte fiscale en 2018. Je voudrais vraiment avoir l’assurance que nous pourrons alors revenir sur cette question.

Je retire l’amendement.