M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 56.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 4 bis - Amendement n° 56
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social
Article additionnel après l'article 4 bis - Amendement n° 156

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié quater, présenté par MM. Chasseing, Luche, Cigolotti et Delcros, Mme F. Gerbaud, M. Longeot et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 4 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 2312-1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 2312-2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze » ;

3° À l’article L. 2312-3, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze ».

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Cet amendement tend à relever de 50 à 75 salariés le seuil de déclenchement des nouvelles obligations des entreprises, notamment en matière d’attributions du comité social et économique, le CSE.

En effet, le franchissement de seuil entraîne de nombreuses obligations supplémentaires, pesant lourdement sur la vie économique et professionnelle d’une entreprise. Cette situation conduit de nombreux chefs d’entreprise à limiter la croissance de leur entreprise ou à développer d’autres sociétés en parallèle pour rester sous ce seuil. Ainsi, la France compte 2,4 fois plus d’entreprises de 49 salariés que d’entreprises de 51 salariés. Le relèvement de ce seuil à 75 salariés serait une mesure favorable à la création d’emplois.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Je veux d’abord rappeler que la mise en place du CSE dans toutes les entreprises employant au moins 11 salariés atténuera probablement la rigueur du passage du seuil de 50 salariés.

Je rappelle aussi que ce passage déclenche de très nombreuses obligations qui, elles, ne sont pas liées directement au droit du travail ; ce sont des obligations en matière environnementale, fiscale et sociale.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. L’ordonnance qui fusionne les trois instances d’information et de consultation en un comité social et économique aura déjà un effet assez fort sur ce seuil de 50 salariés. D’ailleurs, ce seuil était encore plus sensible dans les entreprises de cinquante à soixante salariés – j’en ai rencontré beaucoup –, dans lesquelles c’étaient les mêmes personnes qui siégeaient dans ces instances ; cela engendrait des coûts et des complexités énormes qui seront supprimés par la fusion.

Par ailleurs, le seuil de 50 salariés, s’il entraîne des devoirs, entraîne aussi des droits ; je pense notamment au droit à bénéficier des activités sociales et culturelles, très populaire en France. Avant de supprimer ce droit pour les salariés d’entreprises de plus de 50 salariés, il faudrait quand même y réfléchir à deux fois ; même s’il s’agit de sommes modestes, dans une petite entreprise, c’est quelque chose qui est très apprécié.

Vous posez donc une question plus vaste que le sujet de la représentation : la question des seuils en général. Or, comme j’ai eu l’occasion de le dire hier…

M. Alain Milon, rapporteur. C’est nous qui le disions ! (Sourires.)

Mme Muriel Pénicaud, ministre. … – c’était peut-être vous, monsieur le rapporteur, en tout cas, quelqu’un en a parlé (Nouveaux sourires.) –, cette question de la multiplicité des seuils sociaux et fiscaux, qui rend le paysage très compliqué, et des effets de seuils fera partie, sans engagement, des éléments qui seront étudiés dans le cadre du projet de loi PACTE de mon collègue Bruno Le Maire. Vous aurez donc l’occasion d’y revenir, probablement au printemps.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 4 bis - Amendement n° 3 rectifié quater
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social
Article 5 (Texte non modifié par la commission)

M. le président. L’amendement n° 156, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 4 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article L. 3346-1 du code du travail ainsi rédigé :

« Le conseil d’orientation, présidé par le Premier ministre ou par son représentant, comprend deux députés et deux sénateurs désignés par leur assemblée respective. Un décret détermine la composition des autres membres du conseil d’orientation et ses modalités de fonctionnement, dans des conditions de nature à assurer son indépendance et sa représentativité et à garantir la qualité de ses travaux. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Il s’agit de prendre acte des dispositions de l’article 13 de la loi organique n° 2017-1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. Ce texte impose en effet, au nom de la séparation des pouvoirs, le recours à la loi pour désigner un député ou un sénateur dans un organisme extraparlementaire.

Aujourd’hui, nous ne disposons pas de cette base légale pour compléter la composition du Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, le COPIESAS. Ce conseil est important, et je vais le saisir très rapidement, dans les tout prochains jours, de la réforme de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale. Le Sénat y sera d’ailleurs éminemment représenté par Mme Pascale Gruny et M. Jean-Louis Tourenne, qui alimenteront ses travaux au nom de la Haute Assemblée.

Ces travaux sont menés, avec les partenaires sociaux, à la fois par mon ministère et par Bercy, compte tenu des impacts sociaux et fiscaux de la réforme. Le but de celle-ci est de réfléchir aux moyens d’étendre progressivement le bénéfice de l’intéressement et de la participation à tous les salariés, contrairement à ce qui existe aujourd’hui. Il s’agit aussi de clarifier et de simplifier la formule de la participation, qui, n’étant pas lisible par les salariés, ne fait pas œuvre pédagogique. En effet, la formule est tellement complexe qu’elle ne permet pas de mesurer l’impact de l’action des salariés sur le montant de la participation. Il s’agit donc d’améliorer la transparence.

Il peut y avoir d’autres sujets à examiner, mais je vais saisir le COPIESAS très rapidement, dès que la loi sera adoptée, parce que nous aurons un travail important à réaliser, dans les mois qui viennent, sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement. Elle ajoute que nos collègues Pascale Gruny et Jean-Louis Tourenne, qui sont désignés pour siéger à ce conseil, y feront un binôme percutant… (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 156.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4 bis.

Article additionnel après l'article 4 bis - Amendement n° 156
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 107

Article 5

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail est ratifiée.

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l’article.

M. Dominique Watrin. L’ordonnance ratifiée par cet article 5 intègre un dispositif qui commence à faire parler de lui, celui de la rupture conventionnelle collective. Le fait que des entreprises aussi diverses que PSA, Pimkie, Monoprix ou d’autres annoncent le recours à cette procédure indique que cet outil particulier de gestion des effectifs risque de devenir un outil de gestion ordinaire des entreprises. Cela n’est pas sans conséquence, tant s’en faut.

En effet, il faut tout de même revenir sur l’aspect essentiel de ce dispositif, à savoir le fait qu’il peut être déclenché sans justification économique avérée. C’est donc une procédure de suppression collective d’emplois sans avoir à prouver de difficultés économiques. Ainsi, une entreprise présentant une situation financière florissante, de même qu’une entreprise qui rencontrerait quelques difficultés, pourra proposer un accord de rupture conventionnelle collective aux organisations syndicales représentatives.

Il nous semble que cette disposition pose une question plus large sur le sens même qui doit motiver une loi. Ici, la loi n’est plus l’expression de l’intérêt général, mais un outil de mise en jeu d’un intérêt particulier, celui de l’entreprise, singulièrement du point de vue de sa rentabilité financière et de la rémunération des actionnaires. Il serait tout de même bon d’y réfléchir, au moment où de grands groupes, et non des moindres, annoncent des réductions massives d’emplois, sans susciter, il faut bien le dire, beaucoup de réactions de la part du Gouvernement. Nous ne faisons pas ici le procès de toutes les entreprises, nous faisons bien la distinction entre les petites entreprises et ces grands groupes, qui manifestent, selon nous, une certaine irresponsabilité sociale dans notre pays, lequel compte déjà 6 millions de demandeurs d’emploi.

Peut-être me rétorquerez-vous que la rupture conventionnelle n’est pas vraiment quelque chose de nouveau par rapport à ce qui a pu exister auparavant – je pense par exemple aux plans dits « Fonds national de l’emploi » ou FNE, des années 1980. Néanmoins, il y a tout de même deux différences fondamentales : premièrement, il n’y a pas à donner de motivations économiques ; deuxièmement, l’allocation et les garanties données aux salariés sont plus faibles.

C’est pourquoi nous nous opposons à ce nouveau dispositif.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 40 est présenté par M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 106 est présenté par MM. Tourenne et Daudigny, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe, Taillé-Polian et G. Jourda, MM. Courteau, Kerrouche, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 40.

Mme Laurence Cohen. La rupture conventionnelle collective viserait à éviter le traumatisme du licenciement mais, mon collègue Dominique Watrin l’a démontré, il s’agit au contraire d’un appel d’air à licencier plus facilement, en limitant, prétendument, les risques de conflit social.

Depuis la publication du décret, le 27 décembre dernier, PSA, Pimkie, Le Figaro, les Inrocks ou encore la Société Générale ont annoncé les premières RCC.

Chez PSA, où 1 300 postes doivent être supprimés, la direction a décidé d’augmenter les primes de départ pour les salariés franciliens, ce qui laisse présager une fermeture de l’usine de Saint-Ouen. Chez Pimkie, pas de signature de la convention, mais 208 postes sont supprimés. Pour les autres entreprises que j’ai citées, l’accord n’est pas encore effectif.

Le Gouvernement met entre les mains du patronat, on le voit bien, un outil permettant de procéder à des ruptures conventionnelles collectives de contrats de travail nettement plus facilement que dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi. On se retrouve donc, en quelque sorte, devant un faux choix, entre un plan de départs volontaires et une fermeture d’entreprise.

Vous nous dites qu’il y aurait un garde-fou, le contrôle des RCC par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE, censée vérifier la conformité des accords aux textes et donner son avis dans les quinze jours – c’est cet avis qui validera la rupture conventionnelle collective, ne laissant plus de possibilité pour les syndicalistes d’attaquer ensuite cette RCC devant le juge. Quinze jours pour donner un avis, alors que, depuis 2016, les missions de la DIRECCTE ont été sans cesse accrues, leurs effectifs étant, dans le même temps, réduits ! Comment voulez-vous que les agents puissent véritablement contrôler la conformité d’une RCC en quinze jours ? Comment peut-on penser sauver l’emploi en facilitant les licenciements de manière massive ? Si ce n’était pas aussi dramatique, on pourrait parler de fable grotesque.

J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur le fait que les entreprises que j’ai nommées ont annoncé des RCC alors que la Haute Assemblée n’a pas encore adopté cette ordonnance. On imagine ce que cela donnera si nous l’adoptons. C’est pourquoi nous demandons, au travers de cet amendement, la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 106.

M. Jean-Louis Tourenne. L’ordonnance comporte des dispositions telles que la barémisation des indemnités en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, la restriction au territoire national du périmètre d’appréciation des licenciements économiques, la création de la rupture conventionnelle collective permettant d’éviter un plan social et les obligations de reclassement, et la généralisation du contrat de chantier – le CDI, pour « contrat à durée imprévisible » –, pour ne parler que du plus visible.

Cet article constitue donc un élément central de la réforme du droit du travail allant dans le sens d’une précarisation du salariat, au travers de la forme des contrats de travail et des modalités de la rupture de ceux-ci. Le raisonnement est que, plus les contrats seront précaires, plus les employeurs pourront facilement licencier, et plus ils embaucheront. Votre postulat est démenti par le réel depuis plusieurs décennies, à bas bruit d’abord, puis plus clairement ; la précarisation se répand et le chômage ne diminue pas.

En ce qui concerne la rupture du contrat, le patronat veut à tout prix éviter la judiciarisation ; à tout prix, mais pas à n’importe quel coût. Il est certain que la suppression de la prime de précarité afférente aux CDD, grâce à l’instauration du contrat de chantier, pourra représenter une affaire intéressante ; il suffira, à chaque nouveau projet, d’embaucher et de débaucher sans formalité inutile.

Le sommet est atteint avec la barémisation es dommages et intérêts en cas de licenciement abusif ; dommage, préjudice. Vous nous demandez de valider un déni de droit, puisque le préjudice sera pré-évalué au bénéfice de l’employeur, que le pouvoir du juge sera réduit, et surtout que le principe de droit selon lequel le préjudice doit être évalué et indemnisé individuellement est liquidé.

En quoi tout cela va-t-il permettre le développement de l’emploi ? C’est vraiment prendre prétexte de la situation actuelle pour transformer, au profit exclusif des employeurs, la relation et le droit du travail.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. La troisième ordonnance permet principalement de simplifier et de moderniser les règles du droit du travail en matière de licenciement.

Le barème comprend de nombreuses exceptions et permettra aux juges, à l’intérieur des planchers et plafonds fixés par la loi, d’individualiser le montant de l’indemnité allouée à un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse.

La définition d’un périmètre national pour apprécier les causes d’un licenciement économique met fin à une exception française en Europe, qui n’était guère justifiée d’un point de vue économique, et qui nuisait à l’attractivité de notre pays.

Enfin, je rappelle que la rupture conventionnelle collective instaurée par cette ordonnance ne peut être utilisée que s’il y a un double accord : tout d’abord, un accord collectif, puis un accord individuel des salariés concernés, qui doivent se porter candidats auprès de l’employeur pour en bénéficier. J’ajoute que la RCC doit ensuite être validée par la DIRECCTE.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements identiques nos 40 et 106.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement émettra bien sûr un avis défavorable, cela paraît évident.

Je ne reviendrai pas sur tous les points qu’a évoqués M. le rapporteur, mais je veux revenir un moment sur la rupture conventionnelle collective. Comme il s’agit d’un élément nouveau, je souhaite être sûre, là encore, que nous en ayons tous la même compréhension.

La rupture conventionnelle collective, dont le nom et l’esprit s’inspirent de l’expérience de la rupture conventionnelle individuelle, c’est-à-dire d’un accord des parties, n’est pas du tout la solution à toutes les situations. Il existe des situations dans lesquelles elle ne s’applique pas, notamment lorsqu’il n’y a pas eu d’anticipation, de préparation, quand le dialogue social ne le permet pas, ou quand l’entreprise a le dos au mur et qu’elle est malheureusement obligée de recourir à un plan de sauvegarde de l’emploi, un PSE, avec certains départs volontaires ou non – je rappelle que le PSE constitue, après information et consultation des instances représentatives, une décision unilatérale de l’employeur, prise sur le fondement de difficultés économiques.

Il s’agit, dans le cas de la rupture conventionnelle collective, d’un contexte différent, à plusieurs égards, d’un contexte où il y a anticipation, accompagnement des évolutions et des réorganisations. Cela ne signifie pas forcément une restructuration dramatique ; au contraire, le but est plutôt d’éviter la brutalité du licenciement économique, en trouvant un accord entre les parties afin de pouvoir anticiper ou accompagner les évolutions et réorganisations nécessaires, en fonction des marchés et des métiers de l’entreprise.

Concrètement, il y a trois conditions cumulatives à la signature d’une RCC. La première condition est l’existence d’un accord majoritaire entre les syndicats de salariés et l’employeur – je rappelle que ce n’est pas nécessaire pour le PSE.

La deuxième condition est que les départs soient strictement volontaires, alors que, dans le cas d’un PSE, il peut y avoir une partie de volontariat et une partie de licenciements ; en l’occurrence, une rupture conventionnelle collective ne peut concerner que des départs volontaires, même si des mesures d’accompagnement, de reclassement, de formation, de mobilité doivent être prévues, contrairement à ce que la presse a indiqué – la chose est nouvelle et probablement encore mal connue.

La troisième condition est l’homologation de l’accord par la DIRECCTE, qui vérifie que les deux premières conditions ont bien été remplies – il y a un accord majoritaire, d’une part, et un strict volontariat, d’autre part –, et que l’information fournie aux salariés est bien complète, précise, donc que le volontariat des salariés et l’accord des syndicats sont sûrs.

L’actualité des dernières semaines, vous l’avez évoqué, a déjà montré – je pense que cela se confirmera – que ce qui est prévu dans les ordonnances est robuste, c’est-à-dire que le droit correspond à l’intention.

En effet, dans le cas de PSA, les syndicats ont, dans leur très grande majorité, signé cet accord et il y aura des volontaires – de toute façon, s’il n’y a pas de volontaire, il ne se passe rien, on ne peut pas transformer cet accord en licenciement. Les contreparties étant réelles – il y a eu un équilibre dans cette négociation –, les syndicats et les salariés sont positifs sur le sujet.

En revanche, dans le cas de Pimkie, les syndicats ont refusé l’accord, et c’est assez logique s’agissant d’une fermeture de sites ; logiquement, les ruptures conventionnelles collectives ne sont pas adaptées aux fermetures de sites (M. Julien Bargeton opine.), puisque j’imagine mal que, dans un site que l’on ferme, 100 % des salariés sont volontaires – cela arrivera peut-être mais, pour ma part, je ne connais pas de cas… Assez logiquement, les syndicats ont refusé, donc l’entreprise ne peut pas faire de rupture conventionnelle collective.

Il faut donc bien comprendre qu’il ne s’agit pas d’un acte unilatéral, mais d’un acte de négociation, qui s’inscrit dans la logique du dialogue social et économique dont on parle en permanence dans les ordonnances. Cela ne couvrira pas tous les cas, cela s’adaptera plutôt aux entreprises ayant fait preuve d’anticipation et d’accompagnement. Cela permettra d’éviter que, ultérieurement, certaines décisions n’ayant pas été prises, les choses se passent de manière beaucoup plus brutale et pénalisante. En effet, quand l’entreprise est dos au mur, un plan social reste toujours un traumatisme et reste toujours brutal. Même quand il est bien accompagné, il reste difficile à vivre dans l’entreprise.

La rupture conventionnelle collective n’est donc pas plus que cela, et elle n’est pas moins que cela. Ce n’est pas la solution à toutes les situations, mais c’est un complément à notre dispositif, qui repose intégralement sur un dialogue social de haute qualité. Cela prendra en compte les réalités de l’entreprise et les aspirations des salariés. Évidemment, dans l’évaluation des ordonnances, on suivra de très près cet « objet nouveau », si j’ose dire, et nous en rendrons compte au Parlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. Votre discours est séduisant, madame la ministre, et il correspond d’ailleurs au contenu des ordonnances ; c’est parfaitement conforme et je ne contesterai pas ce que vous avez dit.

Je veux juste préciser que j’ai rencontré, la semaine dernière, la directrice du site de PSA à Rennes, où est en train de se mettre en œuvre la rupture conventionnelle collective. Le raisonnement de mon interlocutrice est le même que le vôtre, elle nous laisse entendre qu’il s’agit de volontariat, que les syndicats doivent être d’accord, bref qu’il y a une préparation.

Toutefois, je voudrais que vous m’ôtiez une angoisse ou que vous essayiez de voir quelles sont les perspectives possibles. Que se passe-t-il en réalité ? PSA, en tout cas à Rennes, met en place une nouvelle chaîne, qui fonctionnera complètement différemment de la chaîne actuelle et qui suppose des compétences, des connaissances et une formation particulières.

Or cette entreprise considère que, pour un certain nombre de salariés, cette formation sera trop difficile, compte tenu de leur niveau ou de leur âge, et, plutôt que d’engager un processus de formation, l’entreprise préfère proposer à ces salariés de s’en aller avec une prime et un certain nombre d’accompagnements, que vous avez évoqués il y a quelques instants. Dans le même temps, PSA recrutera un certain nombre de salariés qui, eux, auront des capacités à appréhender le métier beaucoup plus vite que les autres.

On assiste donc à une espèce de remplacement progressif des salariés âgés par des salariés plus jeunes, et cela risque de s’étendre parce qu’il est vrai que ce modèle peut intéresser des chefs d’entreprise.

Pourtant, c’est tout de même le chômage qui attend ceux qui vont partir (Mme la ministre fait un signe de dénégation.), même s’ils sont d’accord. Il y aura tout de même, chez les gens à qui l’on propose de s’en aller, une perte d’estime de soi, un sentiment de ne pas avoir été à la hauteur.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Jean-Louis Tourenne. Je crois qu’il y a donc un aspect très pervers dans cette affaire.

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Pour venir d’un bassin d’emploi où se trouve PSA, je peux vous dire que les bénéfices de cette entreprise sont au beau fixe. Après quelques années où elle risquait d’être dissoute, l’intervention du gouvernement précédent nous a permis de sauver cette entreprise. Aujourd’hui, avec la 3008 et la 308, celle-ci connaît une situation tout à fait florissante.

C’est à ce moment que l’on met en place la rupture conventionnelle collective, qui est un PSE allégé. (Mme la ministre hoche la tête en signe de dénégation.) Il faut le dire ! Appelons les choses par leur nom, madame la ministre.

Avant, les entreprises supprimaient des emplois quand il n’y avait pas de travail, quand elles connaissaient des difficultés. Maintenant, même quand ça va bien, on se sépare de personnels !

Le nouveau dispositif va clairement intervenir dans la gestion systématique des emplois et des formations des grandes entreprises. Certes, il faudra un accord majoritaire, comme vient de le dire Mme la ministre, mais il sera ensuite impossible tant pour les salariés que pour les syndicats qui l’ont signé de le remettre en question.

Aucune obligation de reclassement, aucune action de formation ou de maintien de l’emploi !

Mme Muriel Pénicaud, ministre. C’est faux !

M. Martial Bourquin. Un chèque suffira, même si celui-ci peut être intéressant.

Cette mesure existait déjà auparavant sous une forme non collective. Combien de personnes ayant signé une rupture conventionnelle se sont retrouvées à la charge des centres communaux d’action sociale parce qu’elles ne retrouvaient pas de travail !

Mais le plus grave, dans cette affaire, madame la ministre, c’est la discrimination par l’âge. Il est à craindre que ce dispositif ne cible les seniors et les salariés ayant le plus d’ancienneté, parce qu’ils coûtent plus cher à l’entreprise,…

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Martial Bourquin. … pour les remplacer par des personnes en début de carrière.

M. Martial Bourquin. C’est un nouveau recul social.

Voilà des questions qui méritent d’être discutées.

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.

M. Martin Lévrier. Je serai très bref.

Je crois au dialogue social. Je crois aux chefs d’entreprise et aux syndicats.

Mes chers collègues, je m’étonne, après les discours que vous avez tenus voilà quelques instants, empreints de méfiance à l’égard des chefs d’entreprise, que vous manifestiez maintenant de la méfiance à l’égard des syndicats. Faites confiance aux parties qui signent des accords !

Bien évidemment, je voterai contre ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 40 et 106.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 54 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 93
Contre 251

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’article 5.

(Larticle 5 est adopté.)

Article 5 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 108

Articles additionnels après l’article 5

M. le président. L’amendement n° 107, présenté par M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement engage une réflexion visant à étudier les possibilités de modulation de la durée du préavis du salarié concerné par le licenciement économique en fonction de la durée des actions de formation entreprises en vue de l’acquisition d’une nouvelle qualification ou d’une reconversion professionnelle.

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.