M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

M. Marc Daunis. Personne ne peut nier que, dans certaines parties de notre territoire, dans les zones tendues – Paris, les Alpes-Maritimes, notamment –, le marché de l’immobilier est devenu totalement fou et a perdu sa logique fondamentale. L’encadrement des loyers contribue à modérer quelque peu cette situation. Pour cette raison, notre groupe fera un certain nombre de propositions à l’occasion de l’examen de l’article 49.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre. Les chiffres donnés à la suite des enquêtes faites sur l’augmentation des loyers à Paris résultent de l’analyse de la situation en 2017. Or la mesure d’annulation de l’encadrement des loyers date de novembre 2017. On ne peut donc pas dire que ce soit cette décision, prise par le tribunal administratif, qui ait provoqué l’augmentation des loyers.

Quant aux loyers à la relocation, ils ont augmenté de 2,5 % dans le pays, mais seulement de 2,1 % à Paris. C’est en petite et grande couronnes que les hausses ont été les plus élevées. Est-ce un effet de l’encadrement des loyers à Paris ? Je ne dirai pas cela. En tout cas, telle est la réalité des chiffres.

Ce qui a été expliqué par plusieurs membres de la Haute Assemblée correspond à la réalité : les loyers sont élevés, parce que l’on manque de logements. Par ailleurs, dans un certain nombre de territoires, la situation est malheureusement inverse, avec de nombreux logements vacants.

Si nous avons lancé un plan pour les villes moyennes – je sais que cela correspond à l’un des objectifs du Sénat –, c’est pour essayer de rétablir les équilibres, ce qui prendra du temps.

La position du Gouvernement, qui est en harmonie avec le texte de la commission des affaires économiques, vise à ne pas supprimer les procédures. Si les collectivités concernées souhaitent les poursuivre, elles pourront le faire, et c’est cela le plus important.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 221.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quatorze heures quarante-cinq, sous la présidence de M. David Assouline.)

PRÉSIDENCE DE M. David Assouline

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article 48 (début)
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Discussion générale

6

Attribution à une commission des prérogatives d’une commission d’enquête

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen d’une demande de la commission des lois tendant à obtenir du Sénat, en application de l’article 5 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, qu’il lui confère, pour une durée de six mois, les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête pour mener une mission d’information sur les conditions dans lesquelles des personnes n’appartenant pas aux forces de sécurité intérieure ont pu ou peuvent être associées à l’exercice de leurs missions de maintien de l’ordre et de protection de hautes personnalités et le régime des sanctions applicables en cas de manquements.

Il a été donné connaissance de cette demande au Sénat lors de sa séance de ce matin.

Avant de mettre aux voix la demande de la commission des lois, je donne la parole à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. La commission des lois, qui s’est réunie ce matin, a unanimement décidé de demander à notre assemblée qu’elle lui confère les pouvoirs d’investigation attribués aux commissions d’enquête, comme nous l’avions fait pour la mise en œuvre de l’état d’urgence et pour la mise en place de notre mission d’information sur la justice.

Mes chers collègues, je rappelle que les pouvoirs d’investigation que nous réclamons vont nous permettre, si vous acceptez cette demande, d’auditionner toutes les personnes qui peuvent apporter un éclairage sur l’affaire communément appelée « affaire Benalla » et, bien au-delà, sur les dysfonctionnements que nous avons constatés sur deux points essentiels : premièrement, la confusion des pouvoirs entre les responsabilités constitutionnelles du Président de la République et celles du Gouvernement dans la mise en œuvre de la politique de sécurité ; deuxièmement, les difficultés que cette confusion des pouvoirs fait apparaître en ce qui concerne les conditions de mise en œuvre de la sécurité du Président de la République, qui doit être confiée non pas à des amateurs, mais à des professionnels formés, sélectionnés, entraînés et organisés pour assumer cette fonction de protection, dans l’intérêt supérieur de la République.

Ces pouvoirs, si vous nous les accordez, nous permettront, d’une part, d’auditionner les personnes que nous souhaiterons entendre et, d’autre part, de recevoir toute information qui nous sera indispensable concernant, par exemple, des notes internes de service, utiles pour bien comprendre le fonctionnement de l’État. Je signale que toute personne qui refuserait d’apporter son concours ou qui ferait obstruction à la commission des lois dans l’exercice de ses pouvoirs d’investigation serait passible d’une peine allant jusqu’à deux ans de prison et 7 500 euros d’amende.

Tels sont, monsieur le président, les résultats de nos délibérations. Nous entendrons le ministre de l’intérieur, le directeur de cabinet du Président de la République, le secrétaire général de la présidence de la République, le préfet de police, un certain nombre de hauts fonctionnaires civils et militaires, les syndicats de la police nationale et toute personne susceptible de nous éclairer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le président du groupe Les Républicains.

M. Bruno Retailleau. Je me félicite que la commission des lois ait décidé de demander au Sénat de lui conférer les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête. Je ne doute pas que cette demande sera acceptée à la quasi-unanimité.

L’affaire Benalla ne met pas simplement en cause un individu, un lampiste, un « bagagiste », comme l’a dit avec un sens de l’humour consommé M. Castaner ce matin. Elle met en cause nos institutions et, d’abord, l’autorité de l’État. Comment se fait-il qu’un individu déguisé en policier se retrouve au cœur d’une opération de maintien de l’ordre et tabasse des manifestants, au risque d’ailleurs de salir l’honneur de la police nationale ?

Elle blesse aussi le principe d’égalité devant la loi. On a en effet un sentiment de très grande impunité. Alors même que l’Élysée n’a pas saisi la justice, on apprend que la petite sanction de quinze jours qui a été infligée s’est ensuite doublée d’un certain nombre de cadeaux, au premier rang desquels l’occupation d’un logement de fonction quai Branly.

Se pose enfin le problème de la crédibilité de la parole publique. Le porte-parole de l’Élysée nous avait assuré que M. Benalla avait été recadré et que toutes ses fonctions à l’extérieur du Palais avaient cessé. C’est faux, puisqu’il a été reconnu au moment de la panthéonisation de Simone Veil, tout près d’ici, et au commandement, ou presque, du bus qui ramenait les Bleus jusqu’au Palais de l’Élysée. Il y a donc un problème de fonctionnement de nos institutions.

Cette affaire révèle une pratique institutionnelle qui n’est pas acceptable. Le pouvoir d’un seul peut très vite se transformer en pouvoir arbitraire.

Nous sommes dans une République, avec toutes les exigences que cela induit. Cette affaire, bien sûr, entre en résonance avec la révision constitutionnelle, au moment où elle allait nous être soumise, parce qu’elle nous interroge tous sur ce que nous voulons pour la démocratie et pour la République. Voulons-nous concentrer un peu plus les pouvoirs entre les mains d’un seul homme ou avoir des contre-pouvoirs, au premier rang desquels un Parlement debout, sur ses deux pieds, avec un bicamérisme dont on voit bien qu’il assure ici la continuité, notamment, de la République et des pouvoirs, un véritable bicamérisme avec un Sénat en mesure de faire valoir sa responsabilité et ses droits ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le président du groupe socialiste et républicain.

M. Patrick Kanner. Un exécutif fort ne peut se concevoir qu’avec un Parlement fort, comme vient de le dire notre collègue Bruno Retailleau.

Nous soutiendrons bien évidemment la création de cette commission d’enquête, afin de pouvoir dire quelle est notre conception de l’État de droit.

L’État de droit, c’est un équilibre des pouvoirs : un Président de la République respectueux des règles – nous verrons ce que donnera le travail d’enquête mené à l’Assemblée nationale et au Sénat – et un bicamérisme, que nous savons aujourd’hui, sinon menacé, du moins affaibli, par le projet de réforme constitutionnelle.

Cette commission d’enquête sera aussi l’occasion de réaffirmer nos grands principes. Nous sommes face, au moins, à une affaire d’État. Je n’évoquerai pas la notion de scandale d’État ; ce sera à l’enquête et aux autorités judiciaires de faire leur travail en l’espèce.

Le Sénat ne s’appliquera pas de règles qui tendraient à diminuer ses fonctions, comme j’ai pu le comprendre en écoutant la présidente de la commission des lois de l’Assemblée nationale : nous auditionnerons toutes celles et tous ceux qui sont susceptibles de nous éclairer sur cette affaire.

Ce travail permettra d’éclairer le chemin de la vérité. Nous sommes là non pas pour infliger des sanctions ou pour marquer au fer rouge tel ou tel, mais pour établir quels sont celles et ceux qui ont des responsabilités dans cette affaire. C’est dans cet esprit de construction et de préservation de l’État de droit que le groupe socialiste et républicain s’engagera dans cette commission d’enquête. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Éliane Assassi. Lors de ma question d’actualité au Gouvernement, jeudi dernier, j’avais notamment émis le souhait que soit créée une commission d’enquête au sein du Parlement, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Je me félicite donc que notre commission des lois ait décidé de demander que lui soient conférées les prérogatives d’une commission d’enquête et de prendre le temps d’assumer ses responsabilités. C’est important pour éclairer, à la fois, notre assemblée et nos concitoyennes et nos concitoyens.

Je ne reviendrai pas, une nouvelle fois, sur la gravité de la crise politique que nous traversons. J’ai eu l’occasion de le faire encore ce matin, par la voie d’un rappel au règlement. Mais il est vrai que des choses se sont passées ce week-end et que l’on ne peut pas faire comme si rien ne s’était déroulé. De nouveaux éléments sont apparus.

Pour moi, comme pour mon groupe, il ne s’agit pas d’une « affaire Benalla », mais d’une affaire d’État, qui met à mal nos institutions. J’oserai même dire qu’elle les fait vaciller. J’y vois aussi un lien avec le projet de loi constitutionnelle, dont le débat a été suspendu à l’Assemblée nationale. Si j’ai bien compris, nous n’aborderons l’examen de ce texte qu’à la rentrée prochaine.

Cela étant dit, je souhaite obtenir quelques précisions sur le fonctionnement de cette commission d’enquête.

Qui pourra intervenir lors de ses travaux ? J’ai écouté ce matin l’audition du ministre de l’intérieur à l’Assemblée nationale et, en début d’après-midi, celle du préfet de police. Bien évidemment, les commissaires aux lois ont eu une priorité lors de ces auditions, mais d’autres parlementaires ont pu intervenir. En sera-t-il de même ici, au Sénat ?

Par ailleurs, à l’Assemblée nationale, les présidents de groupe ont été sollicités pour faire parvenir à la présidente de la commission ou aux rapporteurs une liste de personnes, d’organisations et d’associations qu’ils souhaitaient voir auditionnées. Cette possibilité s’ouvre-t-elle à nous ?

M. le président. La parole est à M. le président du groupe La République En Marche.

M. François Patriat. Bien entendu, notre groupe soutiendra la création de cette commission d’enquête, parce que nous avons le souci de la transparence et de la vérité. S’il y a eu des manquements, ils devront être dénoncés et sanctionnés.

Dans le même temps, nous ne sommes pas dupes d’un certain nombre d’arrière-pensées. On parle d’affaire d’État… J’en ai connu d’autres par le passé, et chacun devrait ici faire preuve d’un peu d’humilité, pour avoir fait de même à l’époque. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. Là, c’est le nouveau monde !

M. François Patriat. Je le répète, nous soutiendrons la création de cette commission d’enquête. Mais je demande à ceux qui se conduisent déjà comme des procureurs – ils demandent une commission d’enquête, alors qu’apparemment ils ont déjà toutes les réponses – d’attendre les auditions pour savoir exactement ce qu’il en sera à la fin. Nous verrons bien alors ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le président du groupe Union Centriste.

M. Hervé Marseille. À mon tour, je voudrais saluer la réactivité du Sénat, en particulier de la commission des lois, qui a pu travailler de façon consensuelle et sereine – contrairement à l’Assemblée nationale, comme le montre le spectacle qui se déroule depuis quelques jours – pour aboutir au résultat qui nous réunit aujourd’hui.

Il relève de la mission du Sénat de contrôler le Gouvernement. Ce n’est le rôle ni des réseaux sociaux ni des chaînes d’information.

M. Didier Guillaume. Exactement !

M. Hervé Marseille. Il relève aussi de notre mission de légiférer. C’est la raison pour laquelle nous continuons à travailler. Nous avons examiné ce matin, collectivement, le projet de loi ÉLAN. D’autres textes nous attendent, même si nous sommes dans l’incertitude concernant le calendrier des semaines et des mois à venir ; j’espère que nous serons fixés rapidement. Mais je veux saluer le rôle du Sénat à l’occasion de cette triste affaire.

Le préfet de police de Paris parlait, à l’instant, de « copinage malsain ». Entre les commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat, la procédure judiciaire et l’Inspection générale de la police nationale, je veux croire que nous aurons des éclaircissements à ce sujet.

Au-delà, nous sommes aussi concernés par une réforme constitutionnelle. Dans cette triste affaire, comme j’ai eu l’occasion de le dire ce matin après ma collègue Assassi lors d’un rappel au règlement, c’est le bicaméralisme qui est réaffirmé. Il nous appartient d’y réfléchir, car, s’il faut un exécutif fort, il faut aussi un Parlement fort. Nous voyons donc bien que la réforme ne peut pas être celle qui était envisagée il y a encore quelques semaines.

M. Hervé Marseille. On a vu que l’Assemblée nationale avait eu du mal à obtenir qu’un ministre vienne s’expliquer : il a fallu vociférer et se livrer à une procédure d’obstruction pour mettre en place une mission d’information afin d’entendre tel ou tel responsable. Ce n’est pas normal ! Notre responsabilité dans les jours et les semaines à venir sera de réfléchir à une réforme constitutionnelle permettant au parlement français, singulièrement au Sénat, d’affirmer sa place dans nos institutions. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Stéphane Artano. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Mme Maryse Carrère. Au nom du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, je veux saluer l’initiative prise par le Sénat et sa commission des lois visant à faire toute la lumière non pas sur les agissements d’un individu dont le comportement est hautement répréhensible – la justice a été saisie sur ce point –, mais sur des faits de nature politique qui mettent en jeu des questions d’ordre institutionnel. Les faits dont il est question ne peuvent, hélas, que nourrir les populismes et la défiance envers les responsables politiques.

Je veux également saluer le choix responsable du Sénat de ne s’aligner ni sur le périmètre d’investigation ni sur la méthode retenus par nos collègues députés, mais de s’interroger de façon plus large sur l’exercice de missions de maintien de l’ordre par des personnes extérieures aux forces de sécurité intérieures.

S’il le fallait encore, cette décision démontre que notre démocratie a besoin d’un bicamérisme équilibré et fort, assorti de contre-pouvoirs responsables, à même de maintenir le lien de confiance entre nos concitoyens et leurs élus. Dans le contexte de réforme de nos institutions, ce point est d’autant plus fondamental.

Cette commission d’enquête permettra au Sénat d’exercer pleinement sa mission de contrôle. Nous souhaitons que ses travaux soient menés dans la plus grande sérénité possible, afin que nos décisions ne soient pas dictées par l’émotion.

Pour ces raisons, notre groupe votera évidemment en faveur de la demande de la commission des lois. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Mme Colette Mélot. Au nom du président Malhuret, j’exprime le soutien du groupe Les Indépendants à la création de cette commission d’enquête.

Les actes que l’on en voit sur les vidéos sont choquants. Nous voulons que toute la lumière soit faite. Je m’associe donc aux arguments qui viennent d’être développés pour que cette commission d’enquête puisse être constituée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix la demande de la commission des lois.

(La demande de la commission des lois est adoptée.)

M. le président. Je constate que cette demande a été adoptée à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)

En conséquence, la commission des lois se voit conférer, pour une durée de six mois, les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête pour mener cette mission d’information.

Le Gouvernement sera informé de la décision qui vient d’être prise par le Sénat.

Je veux dire toute ma fierté de constater cette unanimité et de voir que le Sénat est au rendez-vous. Notre institution a su être réactive et prendre ses responsabilités, ce qui est important.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Je tiens à remercier le Sénat.

J’indique que la commission a désigné ce matin comme corapporteurs Mme Muriel Jourda et M. Jean-Pierre Sueur. Nous aurons à cœur de tout faire pour honorer la confiance unanime de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Monsieur le président de la commission, nous n’en doutons pas.

7

Article 48 (interruption de la discussion)
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Demande de réserve

Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique.

Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.

La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Nous allons aborder dans quelques instants des articles dont l’examen est attendu et qui modifient la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU.

Nous avions demandé, avec l’accord du Gouvernement, la réserve de l’examen de l’article 46 jusqu’à cet après-midi, afin de pouvoir débattre avec M. le ministre, M. le secrétaire d’État et un grand nombre de collègues d’un sujet considéré comme important pour la réforme du logement et sur lequel les maires nous ont interpellés. Je remercie donc le Gouvernement d’avoir accepté cette réserve. Je suis sûre que notre débat sera très intéressant.

Je voudrais vous demander, mes chers collègues, de veiller à ce que, dans ce débat passionné, nos échanges restent courtois – c’est la marque du Sénat –, mais surtout d’avoir en tête – c’est notre volonté certainement commune – de terminer cette discussion avant la suspension de la fin de l’après-midi. Je vous demande donc de faire preuve de mesure dans vos réactions. Vous pourrez bien sûr défendre vos amendements – nous sommes là pour en débattre –, mais j’appelle chacun à la responsabilité afin que nous puissions faire tenir nos débats dans une durée raisonnable.

Demande de réserve

Discussion générale
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Article 46 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, je demande, au nom de la commission, la réserve jusqu’à la fin de l’examen de ce texte de l’amendement n° 1069 rectifié du Gouvernement tendant à insérer un article additionnel après l’article 54 quinquies. Cet amendement vise à créer une agence nationale de la cohésion des territoires.

M. le président. Je suis donc saisi d’une demande de la commission tendant à réserver jusqu’à la fin de l’examen du texte l’examen de l’amendement n° 1069 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l’article 54 quinquies.

Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la réserve est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de réserve formulée par la commission ?

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Le Gouvernement est d’accord avec cette demande.

M. le président. La réserve est ordonnée.

Nous en revenons maintenant à l’article 46, précédemment réservé.

Demande de réserve
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Article additionnel après l'article 46 (précédemment réservé) - Amendement n° 659 rectifié

Article 46 (précédemment réservé)

Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° A (nouveau) À la première phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 302-5, après le mot : « proposition », sont insérés les mots : « des communes ou » ;

1° Le IV de l’article L. 302-5 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Après les mots : « réinsertion sociale », la fin de la première phrase du 4° est ainsi rédigée : « , des centres d’accueil pour demandeurs d’asile, des centres provisoires d’hébergement mentionnés aux articles L. 345-1, L. 348-1 et L. 349-1 du code de l’action sociale et des familles et des centres d’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile. » ;

b) Après le huitième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont décomptés, pendant une période de dix ans à compter de leur vente, les logements qui sont vendus à leurs locataires en application de l’article L. 443-7. » ;

c) (nouveau) Après l’avant-dernier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« À compter du 1er janvier 2019, sont assimilés aux logements sociaux visés au présent article, à compter de la signature du contrat de location-accession et pendant les dix années suivant la levée d’option, les logements occupés par des titulaires de contrats de location-accession conclus dans les conditions prévues par la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière, qui font l’objet, dans des conditions fixées par décret, d’une convention et d’une décision d’agrément prise par le représentant de l’État dans le département.

« À compter du 1er janvier 2019, sont assimilés aux logements sociaux mentionnés au présent article les logements objets d’un bail réel solidaire défini à l’article L. 255-1. » ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 443-15-7 est supprimé.

M. le président. Mes chers collègues, je m’associe aux propos de Mme la présidente de la commission sur la tenue de nos travaux. J’y apporterai ma contribution par ma manière de conduire les débats. Il nous faut examiner et voter ce projet de loi dans des délais de plus en plus contraints. L’étau se resserre, puisque la date annoncée de fin de session est proche.

La parole est à Mme Michelle Gréaume, sur l’article.

Mme Michelle Gréaume. Nous abordons un élément important de ce texte.

Très logiquement, et comme cela avait été le cas avec la loi Égalité et citoyenneté, la commission a été au bout d’une certaine logique et d’une volonté farouche depuis maintenant plus de dix ans : enterrer la loi SRU. Cette loi – et il n’est vraiment pas inutile de le rappeler – est un vrai marqueur de notre République sociale et fait consensus depuis dix-huit ans. Personne jusqu’à présent n’avait osé s’y attaquer tant le symbole est lourd de sens.

Aujourd’hui, tout est bon pour y parvenir : il faut laisser plus de temps, alors même que la loi Duflot a déjà accordé cinq années supplémentaires ;…

M. Philippe Dallier. En passant le taux à 25 % !

Mme Michelle Gréaume. … il faut décompter dans le nombre de logements sociaux plus de logements, ceux qui relèvent de l’accession sociale à la propriété et les places réservées pour l’hébergement ; il faut renvoyer à la négociation la définition concrète du niveau des obligations de construction, ce qui donne un pouvoir très important au préfet.

La majorité sénatoriale nous montre, une fois de plus, sa conception toute particulière du droit au logement et, plus spécialement, du logement social. Le Gouvernement, comme d’autres avant, lui donne de sérieux points d’appui : les dotations aux collectivités sont en berne, les aides à la pierre sont dramatiquement basses.

Alors que l’État se désengage, le discours de responsabilité adressé aux communes qui doivent respecter les obligations de la loi SRU semble pour certains de plus en plus inacceptable. Nous l’entendons. Mais, ce qui nous différencie, mes chers collègues, c’est que, sur des constats identiques, nos réponses divergent et nos engagements sont à l’opposé.

Nous œuvrons, pour notre part, en faveur de l’augmentation des aides à la pierre et pour le respect des collectivités par un niveau de dotations qui leur rende une réelle marge de manœuvre. Nous agissons aussi pour le respect du droit au logement et pour la dignité des personnes. Comment ne pas voir l’urgence de construire davantage de logements sociaux partout, même là où il y en a déjà, quand il en manque près de 2 millions ?

Nous ne serons pas complices de ce détricotage de la loi SRU, de cette attaque en règle contre le droit au logement. Nous sommes non pas pour le chacun pour soi, mais pour les solidarités entre les collectivités et entre les citoyens.

Construire des logements sociaux, c’est à la fois porter un modèle social de progrès et afficher la volonté politique que soient respectés les droits fondamentaux de chacun, dont celui d’avoir un toit pour se loger.

Je vous rappelle enfin que l’obligation de la commune en matière de niveau de logement social n’est pas une obligation de construction ; c’est une proportion à respecter, un équilibre entre logement public et logement privé. (Marques dimpatience sur les travées du groupe Les Républicains.)