Mme Agnès Buzyn, ministre. L’obligation d’information des adhérents et souscripteurs, ainsi que des potentiels adhérents et souscripteurs, qui est imposée aux organismes assureurs, a pour objectif d’aider les consommateurs à effectuer un choix éclairé.

C’est pourquoi cette information doit être, d’une part, intelligible et compréhensible, et, d’autre part, uniformément présentée par les différents organismes assureurs, de façon à faciliter la comparaison. Les deux ratios « prestations – cotisations ou primes » et « frais de gestion – cotisations ou primes » répondent à ce double objectif.

Le présent amendement a pour objet de préciser que ces deux ratios doivent être présentés hors taxes, comme c’est le cas actuellement, de sorte que les éventuelles modifications de la fiscalité sur les contrats d’assurance ne viennent pas perturber l’information des assurés.

M. le président. L’amendement n° 6 rectifié, présenté par MM. Segouin, Husson, Mouiller et Morisset, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Après le mot : « communique », la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée : « annuellement à chacun de ses assurés, de manière lisible, le rapport, exprimé en pourcentage, entre, d’une part, le montant des prestations versées par l’organisme pour le remboursement et l’indemnisation des frais occasionnés par une maladie, une maternité ou un accident, et le montant des frais de gestion et d’acquisition de l’organisme affectés à ces garanties et, d’autre part, le montant des cotisations ou primes hors taxes afférentes à ces garanties, selon des modalités précisées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Vincent Segouin.

M. Vincent Segouin. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Amiel, rapporteur. La commission est favorable à l’amendement n° 23 et défavorable à l’amendement n° 6 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 6 rectifié ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Naturellement, le Gouvernement y est défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 23.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 3 bis est ainsi rédigé, et l’amendement n° 6 rectifié n’a plus d’objet.

Article 3 bis
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Article 4

Article 3 ter

(Supprimé)

Article 3 ter
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 4

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Dallier, Bascher et Bazin, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bouchet, Brisson et Charon, Mme Chauvin, MM. Cuypers, Daubresse et de Legge, Mmes Deroche, Deromedi, Di Folco, Dumas et Eustache-Brinio, MM. B. Fournier, Houpert, Karoutchi, Kennel, Laménie, Lefèvre, Mandelli, Mayet et Meurant, Mme Micouleau, MM. Panunzi, Perrin, Piednoir, Poniatowski, Raison, Revet et Sido, Mmes Thomas et Troendlé, M. Vogel, Mme Bories, MM. de Nicolaÿ, Gilles et Gremillet, Mme Lanfranchi Dorgal et MM. Longuet et Hugonet, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Les articles 1er à 3 entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er janvier 2020.

Le droit de résiliation ou de dénonciation prévu à l’article L. 113-15-2 du code des assurances, aux articles L. 932-12-1 et L. 932-21-2 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 221-10-2 du code de la mutualité, dans leur rédaction résultant de la présente loi, est applicable aux adhésions, garanties et contrats existants à cette date.

La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Cet amendement vise à faire en sorte que les dispositions que le Sénat vient d’adopter aux articles 1er à 3 puissent entrer en vigueur dès le 1er janvier 2020.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 17 rectifié est présenté par M. Amiel et les membres du groupe La République En Marche.

L’amendement n° 19 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Les articles 1er à 3 entrent en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, et au plus tard le 1er décembre 2020.

Le droit de résiliation ou de dénonciation prévu à l’article L. 113-15-2 du code des assurances, aux articles L. 932-12-1 et L. 932-21-2 du code de la sécurité sociale et à l’article L. 221-10-2 du code de la mutualité, dans leur rédaction résultant de la présente loi, est applicable aux adhésions et contrats existants à cette date.

La parole est à M. Martin Lévrier, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié.

M. Martin Lévrier. Par cohérence avec les amendements déposés en vue de rétablir les articles 1er à 3, cet amendement tend à réintroduire les dispositions sur leur entrée en vigueur, en conservant la date du 1er décembre 2020 au plus tard.

Il a donc pour objet de rétablir la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale, moyennant une correction formelle.

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 19.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Amiel, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 4 rectifié bis et un avis favorable sur les amendements identiques nos 17 rectifié et 19.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Permettez-moi simplement, monsieur Dallier, de vous exposer les raisons pour lesquelles il nous semble important de reculer la date d’entrée en vigueur de ces mesures.

Il faut que les assurés puissent regarder et interroger les droits complémentaires en ligne. Il faut donc que le dispositif soit opérationnel au moment de l’entrée en vigueur de la loi.

Pour de multiples raisons, nous savons que nous ne serons pas en mesure de le garantir aux assurés au 1er janvier 2020. Voilà pourquoi le Gouvernement présente un amendement qui tend à reculer la date de l’entrée en vigueur du dispositif.

J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 4 rectifié bis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Madame la ministre, j’aurais préféré une entrée en vigueur au 1er janvier 2020, mais je vais m’en remettre à vos arguments. (Mme la ministre et M. le rapporteur manifestent leur satisfaction.)

Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 rectifié et 19.

(Les amendements sont adoptés.)

Article 4
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. En conséquence, l’article 4 est rétabli dans cette rédaction.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 87 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 327
Pour l’adoption 225
Contre 102

Le Sénat a adopté.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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6

Clarification de diverses dispositions du droit électoral

Discussion d’une proposition de loi et d’une proposition de loi organique

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe La République En Marche, de la proposition de loi (proposition n° 385, texte de la commission n° 444, rapport n° 443) et de la proposition de loi organique (proposition n° 386, texte de la commission n° 445, rapport n° 443) visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral, présentées par M. Alain Richard et les membres du groupe La République En Marche.

Il a été décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. Alain Richard, auteur des propositions de loi.

 
 
 

M. Alain Richard, auteur de la proposition de loi et de la proposition de loi organique. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je crois que nous pouvons engager cette discussion générale dans un esprit constructif partagé.

Nous le constatons tous, le code électoral présente un certain nombre de défauts de cohérence.

J’en rappelle sommairement l’histoire. Établi en 1956, avec, à l’époque, une conception de la codification beaucoup moins « carrée » et architecturée qu’aujourd’hui, ce code a fait l’objet d’un très grand nombre de réformes, d’où un phénomène d’empilement juridique, accompagné d’une harmonisation parfois incomplète, qui a provoqué des difficultés, soit de pertinence, soit de cohérence interne du texte.

Or nous bénéficions – depuis les élections de 2002, si je ne me trompe – d’une bonne pratique adoptée par le Conseil constitutionnel : dans sa fonction de juge des élections, celui-ci rend publique, à l’issue des différents contentieux engagés, une série d’observations, pour porter à la connaissance du public et, naturellement, des autres pouvoirs publics les améliorations qu’il conviendrait d’apporter au droit électoral, ou, d’ailleurs, à d’autres sujets connexes de droit public.

C’est ce qu’il a fait le 21 février dernier, puisque la durée des contentieux dépasse maintenant un an et demi, en rendant publiques un certain nombre d’observations et de recommandations pour l’évolution de notre droit électoral.

Grâce aux services de la commission et à son président, que je remercie, nous avons pu établir une proposition de loi et une proposition de loi organique traitant des sujets sur lesquels il nous a paru efficace de faire évoluer le code électoral.

Les domaines couverts par ce code étant extrêmement vastes, nous nous sommes limités à trois sujets : l’application du contrôle des comptes de campagne et les sanctions d’inéligibilité qui en découlent – c’est le principal sujet – ; la mise en cohérence des dates et événements de fin de campagne ; la clarification du contenu légal des bulletins de vote.

Je tiens à insister sur le premier thème, qui a donné lieu aux recommandations les plus détaillées du Conseil constitutionnel.

Compte tenu du très grand nombre de candidats aux élections législatives – son accroissement est dû, nous le savons, à l’intérêt pour chaque organisation de présenter beaucoup de candidats, afin de collecter un maximum de voix, lesquelles sont prises en compte pour le financement pérenne des partis politiques –, le travail d’examen des comptes, puis, sur les comptes dont l’irrégularité a été reconnue, celui d’instruction en vue d’éventuelles sanctions d’inéligibilité par le Conseil constitutionnel sont devenus massifs et exigent que l’on se concentre sur l’essentiel.

Le Conseil constitutionnel a donc recommandé de dispenser de compte de campagne et, donc, de ne soumettre ni au contrôle, ni aux sanctions un certain nombre de candidats qui comptaient très peu dans la collecte des suffrages, ayant obtenu un faible pourcentage de voix, et dont les montants de dépenses paraissaient négligeables.

Nous avons essayé, dans la proposition de loi, d’établir un tel critère, afin de pouvoir identifier les candidats « minimaux », dirais-je, auxquels serait accordée une dispense de compte de campagne, ce qui réduirait la charge de travail des institutions en aval.

Le Conseil constitutionnel faisait également remarquer, à l’observation de ses propres décisions individuelles, que, du fait de la durée des contentieux, une même sanction d’inéligibilité – deux ans par exemple – portant sur des infractions ou des manquements de même importance n’avait pas les mêmes conséquences pour deux candidats différents, suivant que la date d’expiration de la période d’inéligibilité englobait l’élection suivante ou non.

Il nous a demandé de chercher une solution législative, de sorte que toutes les sanctions de même importance qu’il serait amené à prononcer emportent les mêmes conséquences en termes d’invalidation électorale. Nous avons essayé d’élaborer une solution, mais ce n’est pas simple.

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a fait l’observation suivante – et, effectivement, on peut trouver là la source de contentieux qui sont difficiles à régler, car ils portent sur des questions de fait très délicates – : alors que tous les autres actes de campagne, notamment ceux qui ont trait aux moyens audiovisuels et à la distribution de documents écrits, doivent prendre fin le vendredi soir, minuit, précédant le dimanche électoral, la seule règle fixée pour les réunions électorales est de respecter le jour des élections lui-même. On peut donc organiser des réunions électorales jusqu’à minuit moins cinq, la veille du scrutin.

Le Conseil constitutionnel a souligné que, si ces réunions rassemblaient un public d’une certaine importance et qu’elles aboutissaient à la diffusion de messages négatifs pour un candidat donné, celui-ci n’aurait aucun moyen de répondre. Dès lors, il a suggéré que, en touchant d’ailleurs à de très vieilles lois découlant de la loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion, on limite le terme final des réunions électorales au vendredi soir, comme pour les autres actes de campagne.

Enfin, constatant que la jurisprudence, aussi bien du Conseil d’État, pour les élections locales, que du Conseil constitutionnel, pour les élections parlementaires, comportait des variations s’agissant du contenu du bulletin de vote – j’ai redécouvert, à cette occasion, que les règles concernant ce contenu figuraient au chapitre du code électoral intitulé « Propagande », ce qui est tout de même un peu décalé par rapport à l’objet même du bulletin de vote, lequel est, non plus un outil de communication, mais un support du vote le plus objectif possible –, il nous a paru souhaitable d’éliminer, par la loi, la référence à des personnes tierces, non candidates dans la circonscription, sur ledit bulletin.

Puisque subsiste, dans un texte distinct du code, une loi que nous avons votée en 1990, lors d’une réforme électorale, visant à fixer le principe d’une absence totale de réforme à impact électoral dans l’année précédant l’élection concernée, il m’a en outre semblé plus judicieux que ces dispositions de « précaution » figurent dans le code électoral lui-même.

Tel est donc le champ limité que nous avons retenu, avec l’approbation de la commission, pour cette actualisation et amélioration du code électoral.

Je veux souligner le très bon travail collégial qui a été réalisé en commission, autour des interventions du président et du rapporteur, et remercier le Gouvernement pour ses propositions, également judicieuses.

Au fond, en discutant de cette proposition de loi et de cette proposition de loi organique, il me semble que nous jouons pleinement le rôle, propre au Sénat, d’amélioration législative. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Union Centriste. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Arnaud de Belenet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, notre éminent collègue Alain Richard, qui vient de s’exprimer, nous invite à clarifier diverses dispositions du code électoral, qui, depuis 1956, a effectivement perdu en lisibilité et en cohérence, malgré les tentatives d’harmonisation de la Commission supérieure de codification. Nul doute que la présence de dispositions de valeur organique a constitué un obstacle.

La proposition de loi et la proposition de loi organique s’inspirent assez directement des observations rendues par le Conseil constitutionnel le 21 février dernier au sujet des élections législatives de 2017. Elles couvrent néanmoins l’ensemble des élections, y compris les élections locales.

Sur le fond, ces textes visent deux objectifs : d’une part, clarifier le contrôle des comptes de campagne et les règles d’inéligibilité ; d’autre part, mieux encadrer la propagande électorale et les opérations de vote.

Au cours de ses travaux, la commission des lois a salué ces efforts de clarification. Ces textes auront des conséquences concrètes, notamment pour simplifier les démarches administratives des candidats et mettre fin à certains détournements de procédure en matière de propagande électorale.

Les nombreux amendements déposés ont démontré tout l’intérêt de ces véhicules législatifs, à la fois techniques et transversaux.

Notre collègue Alain Richard propose, tout d’abord, de simplifier les démarches administratives des candidats et d’améliorer les contrôles de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques – ou CNCCFP.

Nous constatons effectivement une massification du contentieux, qui complique les contrôles, de l’aveu même du Conseil constitutionnel et de la CNCCFP.

Lors des élections législatives de 2017, le nombre de candidats ayant déposé un compte de campagne a augmenté de 27 % par rapport au scrutin précédent. En conséquence, la commission nationale a saisi le juge de l’élection à 351 reprises, soit une hausse de près de 50 % par rapport à 2012.

Pour les élections départementales de 2015, elle a contrôlé plus de 9 000 comptes de campagne, avec des moyens qui sont reconnus comme limités. Je rappelle qu’elle dispose de 39 agents permanents et recourt à quelques rapporteurs vacataires, qu’elle s’adjoint au gré des élections.

Contrairement à la préconisation initiale du Conseil constitutionnel, la commission des lois n’a pas souhaité modifier le périmètre des comptes de campagne, craignant de fragiliser les contrôles de la CNCCFP. Elle a privilégié d’autres mesures pour alléger les démarches administratives des candidats, notamment en élargissant la dispense d’expertise comptable.

Aujourd’hui, seuls les candidats dont le compte ne comprend aucune recette ni dépense sont dispensés de recourir à un expert-comptable. À titre d’information, mes chers collègues, sachez que, lors des élections législatives de 2017, plus de 3,5 millions d’euros ont servi à rémunérer des experts-comptables, ce qui représente près de 5 % des dépenses électorales !

Le texte de la commission élargit la dispense d’expertise-comptable aux candidats qui remplissent deux conditions cumulatives : d’une part, s’ils ont obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés ; d’autre part, si leurs recettes et leurs dépenses n’excèdent pas un montant fixé par décret.

Entendu en audition, l’ordre des experts-comptables ne s’oppose pas – bien au contraire – à cette simplification, considérant que le chiffre d’affaires de ses membres ne dépend pas de cette intervention, qu’il qualifie de « devoir citoyen ».

Des amendements de nos collègues Roger Karoutchi et Josiane Costes nous inciteront à aller plus loin dans nos démarches de simplification, notamment en ce qui concerne les « menues dépenses » des candidats.

Notre collègue Jean-Pierre Grand nous propose, avec l’appui du Gouvernement, d’autoriser les candidats à recourir aux plateformes en ligne pour recueillir des dons. Demande forte des candidats, cette mesure nécessitait de nombreuses garanties, notamment pour assurer la traçabilité des dons ; le Gouvernement nous les apporte.

En complément, la commission des lois a adopté plusieurs mesures techniques, notamment pour mieux organiser les contrôles de la CNCCFP et confirmer l’interdiction, pour les personnes morales, d’apporter leur garantie aux prêts contractés par les candidats.

La proposition de loi et la proposition de loi organique visent également à clarifier les règles d’inéligibilité. Aujourd’hui, en effet, le code électoral distingue plusieurs hypothèses d’inéligibilité, ce qui affecte sa lisibilité.

En cas de dépassement du plafond des dépenses électorales par le candidat ou si celui-ci n’a pas déposé son compte de campagne, le juge « peut » prononcer l’inéligibilité. En revanche, il a l’obligation de déclarer inéligible un candidat « dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales ».

En pratique, et nous aurons certainement ce débat ultérieurement, à l’occasion de l’examen d’un des amendements, le juge prononce l’inéligibilité seulement lorsqu’il estime que l’irrégularité constatée présente un degré de gravité suffisant. La réalité est donc qu’il n’est pas tenu de prononcer l’inéligibilité : dans ce cas également, il « peut » le faire.

Malgré les différences de rédaction, il exerce toujours le même office. Pour plus de lisibilité, les présents textes tendent donc à clarifier le rôle du juge en mettant en accord le code électoral et la jurisprudence, comme l’a d’ailleurs préconisé le Conseil constitutionnel.

Je le rappelle avec force à cette tribune, il ne s’agit en aucun cas d’affaiblir le régime des inéligibilités, qui doit s’appliquer avec la plus grande fermeté à l’encontre des candidats fautifs. Il y va de la crédibilité de notre système institutionnel.

En commission, nous avons eu un débat concernant le « point de départ » de l’inéligibilité. Aujourd’hui, cette sanction s’applique à compter de la décision définitive du juge de l’élection. Tout le monde s’accorde sur les inconvénients de cette disposition : pour une irrégularité équivalente, son effet varie d’un candidat à l’autre, en fonction du délai d’instruction de l’affaire.

Initialement, la proposition de loi et la proposition de loi organique tendaient à faire démarrer l’inéligibilité à la date du premier tour de scrutin. Cette solution présentait toutefois plusieurs inconvénients. De par son effet rétroactif, elle aurait notamment permis à un candidat déclaré inéligible de se présenter plus rapidement devant les électeurs, à défaut de modifier la durée maximale de trois ans.

Dans une volonté de compromis, la commission des lois a proposé un dispositif alternatif, qui lui a semblé plus équitable. Le juge électoral sera invité à moduler la durée des inéligibilités prononcées, afin que les candidats ayant commis des irrégularités comparables lors d’un même scrutin soient déclarés inéligibles pour les mêmes échéances électorales. C’est donc le « point d’arrivée », et non plus le « point de départ », qui serait pris en compte.

La commission a également clarifié l’inéligibilité prononcée contre les parlementaires pour manquement à leurs obligations fiscales, notamment pour confirmer que les fautifs ont l’interdiction, pendant la durée de leur inéligibilité, de se présenter à d’autres scrutins.

Enfin, les textes proposés par Alain Richard visent à sécuriser la propagande électorale et les opérations de vote. Le droit en vigueur comporte, en effet, plusieurs ambiguïtés en cette matière, que notre collègue vient de développer.

La commission des lois a profité des dispositions prises en matière de tenue des réunions électorales pour élargir les conditions dans lesquelles les Français de l’étranger peuvent tenir des réunions électorales, même en amont des campagnes, et pour clarifier les règles de propagande des élections sénatoriales, qui présentaient de nombreuses lacunes.

S’agissant des bulletins de vote, il est proposé d’y interdire l’apposition de la photographie ou de la représentation des tierces personnes, mais également du candidat ou de son suppléant. Étonnamment, le Conseil constitutionnel avait admis, dans une décision rendue en décembre 2017, la représentation sur un bulletin de vote aux élections législatives d’une tierce personne, maire d’une commune et ancien député de la circonscription, alors que cela pouvait induire en erreur les électeurs.

Nous aurons un débat pour étendre cette disposition aux affiches des candidats. J’y suis personnellement opposé – c’est aussi le cas, je crois, de la majorité des membres de la commission –, car, en la matière, il me semble que la liberté d’expression et la vivacité du débat démocratique doivent prévaloir.

En outre, la proposition de loi tend à inscrire dans le code électoral la tradition républicaine selon laquelle les règles électorales ne sont pas modifiées dans l’année précédant le scrutin. Ce principe de bon sens, que nous avons tous apprécié à différentes occasions, permettra d’éviter les accusations de « tambouille électorale ». Le pouvoir réglementaire sera tenu de respecter cette règle, mais le pouvoir législatif, à l’inverse, aura toujours toute latitude pour y déroger au cas par cas, lorsque cela sera nécessaire.

En conclusion, mes chers collègues, la commission des lois vous invite à adopter la proposition de loi et la proposition de loi organique telles qu’elle les a amendées.

Permettez-moi de remercier l’auteur de ces textes de sa confiance, ainsi que les membres de la commission des lois, au travers de son président, de m’avoir accompagné, avec une redoutable efficacité et une grande bienveillance, dans cette première fonction de rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – MM. Philippe Bonnecarrère et Roger Karoutchi applaudissent également.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Christophe Castaner, ministre de lintérieur. Monsieur le président, monsieur le président et monsieur le rapporteur de la commission des lois, mesdames, messieurs les sénateurs, le 21 février, le Conseil constitutionnel a rendu une décision dans laquelle il fait part de ses observations relatives aux dernières élections législatives.

Cette décision était riche d’enseignements et de propositions pour améliorer notre droit électoral.

Nous savons effectivement, et vous le savez bien en qualité d’élus, que le droit électoral recèle parfois de petites zones d’ombre involontaires, qui peuvent semer le trouble chez les électeurs, mais aussi chez les candidats, et poser des difficultés au juge électoral. Je ne doute pas que vous êtes nombreux ici à vous être demandé, à chaque élection, si l’échéance était bien fixée au vendredi ou au samedi minuit. Je ne voudrais pas faire état de mon expérience personnelle, mais un doute m’a souvent assailli au moment de répondre à cette question !

Les remarques du Conseil constitutionnel pour améliorer notre droit devaient attirer notre attention et méritaient d’être inscrites dans le droit. Je souhaite donc remercier Alain Richard de cette initiative, comme du travail remarquable qu’il a mené autour de ces textes. Je connais, monsieur Richard, votre engagement constant pour la clarification du droit.

Je reviens maintenant plus précisément sur le contenu des propositions de loi et sur ce qui me semble constituer leurs avancées les plus significatives. J’en vois deux principales.

Tout d’abord, la proposition de loi prévoit un effort sensible et nécessaire d’harmonisation des règles relatives à la campagne électorale.

Ainsi, en l’état du droit, et du fait d’une divergence entre la partie législative et la partie réglementaire du code électoral, la tenue de réunions publiques est possible la veille du scrutin, tandis que la distribution de matériel électoral, le collage d’affiches ou l’émission de messages électoraux dans les médias ou sur les réseaux sociaux sont interdits depuis le vendredi soir, à minuit, ou le samedi matin, à zéro heure.

Il y avait là un véritable paradoxe, qu’il fallait lever. La proposition de loi le permet, en fixant la fin de toutes les opérations de campagne électorale – sans exception – à la veille du scrutin à zéro heure, c’est-à-dire au douzième coup de minuit dans la nuit du vendredi au samedi. Ainsi, les règles sont clarifiées et les candidats pourront souffler vingt-quatre heures avant d’entrer dans le « chaudron » du jour du vote.

Cette disposition garantit, à la fois, l’égalité entre tous les candidats et la clarté, puisque la même obligation de fin de campagne s’appliquera à tous les actes.

L’autre grande avancée permise par ce texte consiste à rendre toute leur sincérité aux bulletins de vote. La loi interdit déjà de faire figurer sur un bulletin de vote le nom d’une personne qui ne s’est pas portée candidate. Cependant, cette interdiction fait l’objet d’une jurisprudence assez permissive. Grâce à ce texte, nous avons l’occasion de remettre les choses en place.

Ainsi, l’interdiction de faire mention du nom d’un tiers sur un bulletin de vote est explicitement renforcée au travers de cette proposition de loi. Cela évitera des détournements ou des pièges pour les électeurs.

Par ailleurs, certains candidats avaient également poussé leur avantage jusqu’à faire figurer, sur leurs bulletins de vote, des photos de tiers… Cela me semble très néfaste, et surtout malhonnête vis-à-vis des électeurs du fait des dérives auxquelles on peut aboutir. Le texte permet de mettre un terme à de telles démarches, en interdisant formellement la présence de photos ou de représentations autres que celles des candidats sur leurs bulletins de vote.

Je tiens à souligner que la proposition de loi d’Alain Richard permet bien d’autres progrès pour notre loi électorale, y compris en dehors des recommandations émises par le Conseil constitutionnel.

Je pense, en particulier, aux précisions sur les délais et la qualité de la déclaration de situation de patrimoine à produire pour prétendre au remboursement des frais de campagne. Le code électoral était jusqu’ici trop flou et cette proposition de loi règle la question, en se fondant sur les propositions de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, la HATVP.

Ces propositions de loi organique et ordinaire permettent donc de faire progresser notre droit électoral et c’est pourquoi, au nom du Gouvernement, j’émets sur ces dernières un avis tout à fait favorable.

Je sais que nous risquons d’être pris par le temps lors de leur examen. Compte tenu de leur importance, le Gouvernement veillera à ce qu’elles soient, si c’est nécessaire, réinscrites dans les meilleurs délais à l’ordre du jour. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.)