M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 12.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 7 demeure supprimé.

Article 7 (supprimé)
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Articles 9 et 10

Article 8

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 13, présenté par MM. Kanner, Carcenac, Raynal, Éblé, Jacques Bigot et Botrel, Mme Espagnac, MM. Féraud, P. Joly, Lalande et Lurel, Mmes S. Robert et Taillé-Polian, MM. Temal et Antiste, Mme Artigalas, M. Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. M. Bourquin et Boutant, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Devinaz, Durain et Duran, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Grelet-Certenais, M. Jacquin, Mme G. Jourda, MM. Kerrouche et Leconte, Mme Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont, Préville et Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au premier alinéa de l’article 787 B du code général des impôts, les mots : « 75 % de leur valeur » sont remplacés par les mots : « 65 % de leur valeur à compter du 1er janvier 2023, 50 % de leur valeur à compter du 1er janvier 2025, 35 % de leur valeur à compter du 1er janvier 2028 et de 25 % de leur valeur à compter du 1er janvier 2030 ».

La parole est à M. Thierry Carcenac.

M. Thierry Carcenac. Cet amendement a le même objet que l’amendement n° 12 que nous venons de présenter. Je vous renvoie également à son exposé des motifs.

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par MM. Delahaye, Cadic, Delcros, Canevet, Lafon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – L’article 787 B du code général des impôts est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« … Sont également exonérées de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 100 % de leur valeur, les parts ou les actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs si les conditions suivantes sont réunies :

« 1° Les parts ou les actions mentionnées ci-dessus doivent faire l’objet d’un engagement collectif de conservation d’une durée minimale de dix ans en cours au jour de la transmission, qui a été pris par le défunt ou le donateur, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit en ligne direct, entre époux et entre partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

« Lorsque les parts ou actions transmises par décès n’ont pas fait l’objet d’un engagement collectif de conservation, un ou des héritiers ou légataires peuvent entre eux conclure dans les six mois qui suivent la transmission l’engagement prévu au premier alinéa du présent 1° ;

« 2° L’engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s’ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 %, y compris les parts ou actions transmises.

« En cas de non-respect de la durée de détention, les héritiers doivent s’acquitter des droits de mutation à titre gratuit de manière proportionnelle à la durée de détention. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Il s’agit d’élargir le pacte Dutreil, c’est-à-dire, lorsqu’il y a un engagement de conserver les actions pendant un certain nombre d’années – dix ans, me semble-t-il –, d’exonérer totalement de droits la transmission d’une entreprise familiale.

Ces transmissions sont effectivement indispensables à la bonne marche de notre économie dans nombre de régions et de secteurs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean Pierre Vogel, rapporteur. L’aménagement proposé à l’amendement n° 13 conduirait les héritiers à prélever sur l’entreprise des sommes excessives sous forme de dividendes, ou à céder l’entreprise à des fonds de pension.

L’avis de la commission est donc défavorable.

L’amendement n° 2 serait sans doute censuré par le Conseil constitutionnel. En effet, si celui-ci a admis, en 2003, que le dispositif Dutreil n’était pas de nature à entraîner une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques, c’était après avoir vérifié que « la combinaison des avantages ne peut réduire à néant les droits finalement acquittés ». La suppression complète des droits, telle qu’elle est prévue dans l’amendement, serait anticonstitutionnelle.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. S’agissant de l’amendement n° 13, j’ai eu l’occasion de dire lors de la discussion générale pour quelle raison le Gouvernement était défavorable à une telle mesure.

Je le répète, nous considérons que la transmission du capital des entreprises, avec les pactes qui garantissent la propriété des parts pendant une durée assez longue, est une mesure protectrice pour le capital des entreprises, notamment des ETI françaises.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n°2, je partage les arguments de M. le rapporteur relatifs au risque d’inconstitutionnalité du dispositif proposé.

J’ai en tête les discussions que nous avons eues à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, lorsque nous avons renforcé certaines mesures des pactes Dutreil. Nous considérons que nous sommes allés suffisamment loin en la matière pour les rendre plus attractifs, sans prendre le risque d’une censure.

Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.

M. Julien Bargeton. Notre assemblée a aujourd’hui l’occasion de rappeler son attachement au dispositif du pacte Dutreil.

Permettez-moi de citer – je ne le fais pas si souvent – le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, Albéric de Montgolfier, qui s’exprimait, le 29 novembre 2018, sur l’article 16 du projet de loi de finances pour 2019 : « Les membres de cette assemblée en conviendront très majoritairement, le pacte Dutreil est utile et même indispensable. Il a besoin de stabilité. »

Nous devons être constants. Ce dispositif ayant besoin de stabilité et d’équilibre, je voterai contre ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.

M. Jean-Marc Gabouty. Je n’irai pas aussi loin que Vincent Delahaye. Si je comprends la finalité de son amendement n° 2, je reconnais qu’il n’est pas applicable techniquement.

En revanche, je demande aux auteurs de l’amendement n° 13 et de la présente proposition de loi de bien réfléchir aux conséquences économiques des mesures qu’ils proposent.

Un pacte Dutreil doit correspondre à une valeur bien définie. Dans le contexte économique actuel, il est vrai qu’une entreprise, PME ou ETI, peut avoir davantage de valeur quelques années plus tard, mais elle peut aussi en avoir beaucoup moins !

Si l’on n’est pas encouragé à conserver l’entreprise via un pacte Dutreil, alors mieux vaut vendre cette dernière ; on sera plus tranquille ! Investir dans l’immobilier rapporte de manière plus rapide et plus certaine…

Pour les bois et forêts, c’est la même chose. Sur le plan foncier, on observe déjà la prédation d’investisseurs étrangers sur des terres agricoles, et ce mouvement s’accélère dans certaines régions. Que croyez-vous que vont faire les investisseurs chinois ? Acheter les forêts françaises ! Et les troncs de hêtres, de chênes ou d’autres arbres partiront directement en Chine.

Il y a une pression, actuellement, sur le marché du bois, lequel est vendu à des acheteurs étrangers. Les Chinois, notamment, achètent des terres, ainsi que des vignobles.

Si l’on veut conserver la maîtrise d’un certain nombre de richesses de notre pays, il faut favoriser la transmission de ce qui n’est pas spéculatif. Si vous plantez aujourd’hui des chênes, des hêtres et des pins Douglas, c’est non pas pour vos enfants, mais pour vos petits-enfants lorsqu’ils seront à la retraite ! La période d’exploitation dure en effet de quarante à soixante ou soixante-cinq ans.

Taxer ces biens sans encourager leur conservation dans la durée est une erreur économique qui favorise les investisseurs étrangers et institutionnels. Est-ce votre vision de l’économie ? Je m’interroge...

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

M. Vincent Delahaye. Je maintiendrai mon amendement, et je renvoie à la lecture de son exposé des motifs.

Nous ne méconnaissons pas le principe constitutionnel d’égalité devant les charges publiques. Je précise que le bénéfice de l’exonération exceptionnelle que nous prévoyons est subordonné à l’engagement de conserver les parts de l’entreprise durant un délai de dix ans.

Par ailleurs, nous pensons qu’il existe un intérêt général à faciliter les transmissions d’entreprises : cela permet d’éviter que nos entreprises soient rachetées par des groupes étrangers.

Nous considérons donc que l’engagement de conserver les parts de l’entreprise pendant dix ans et le motif d’intérêt général devraient permettre à cette disposition, que nous avions déjà adoptée lors de l’examen du PLF pour 2019, d’être acceptée par le Conseil constitutionnel, si elle lui était transmise. Telle est du moins notre lecture.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Fournier, pour explication de vote.

Mme Catherine Fournier. En complément de ce qu’ont dit mes collègues Jean-Marc Gabouty et Vincent Delahaye, je veux attirer l’attention sur le maillage économique territorial constitué par nos ETI, nos PME, nos TPE et nos PMI.

À cet égard, revenir sur le pacte Dutreil me paraît aberrant. Alors que nous nous battons pour un équilibre des territoires et pour la mobilité, il serait lamentable de faire prendre un risque supplémentaire à ce maillage ! Je tenais à le dire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 13.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 8 demeure supprimé.

Article 8 (supprimé)
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Articles 3, 4, 5, 9 et 10 (réservés)

Articles 9 et 10

[Articles examinés dans le cadre de la législation partielle en commission]

(Supprimés)

M. le président. Le vote est réservé.

Articles 9 et 10
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Articles 3, 4, 5, 9 et 10 (réservés)

(Supprimés)

M. le président. Mes chers collègues, les articles 3, 4, 5, 9 et 10, qui font l’objet de la procédure de législation en commission, ayant été supprimés par la commission des finances, il n’y a pas lieu de les mettre aux voix.

En conséquence, ces articles demeurent supprimés.

Vote sur l’ensemble

Articles 3, 4, 5, 9 et 10 (réservés)
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je veux remercier la commission d’avoir pris en compte ma proposition concernant les transmissions rapprochées. Il me semble qu’elle pourra être reprise dans le cadre du PLF. Monsieur le secrétaire d’État, je compte sur vous pour la faire avancer !

Alors que la succession ou la transmission rapprochée constitue un choc psychologique, l’existence d’une double imposition sur des biens acquis par la famille pose un véritable problème.

Je veux également m’associer aux propos de mon collègue sur la forêt.

La forêt, c’est le meilleur puits de carbone qui soit ! Il faut que, demain, nous investissions dans les forêts et que nous fassions en sorte que nos compatriotes les gèrent davantage.

Leur morcellement crée des situations terribles. Quand on consulte le site internet du Géoportail, on tombe des nues en voyant l’ampleur du morcellement des forêts dans certains territoires. Des dizaines et des dizaines de parcelles de toute petite surface et complètement éloignées les unes des autres sont à vendre, à la suite de successions. Cela n’incite pas à la transmission d’un tel patrimoine.

Sur le plan écologique, on n’a rien inventé de mieux que la photosynthèse et que les échanges entre l’oxygène et le gaz carbonique pour réduire les gaz à effet de serre. Toutefois, non seulement ce patrimoine est très long à valoriser, mais il est aussi compliqué à transmettre.

Ce n’est pas avec des mesures de pénalisation et de fiscalisation que nous ferons de nos concitoyens des adeptes de la forêt.

M. le président. La parole est à M. Thierry Carcenac, pour explication de vote.

M. Thierry Carcenac. Je veux insister sur ce que j’ai dit tout à l’heure.

Tout d’abord, je remercie tous nos collègues qui se sont impliqués sur ce texte. Ce dernier n’est pas parfait. Certaines de ses dispositions peuvent déranger. Cependant, il a le mérite d’avoir soumis un vrai sujet au débat.

Certains de nos collègues déplorent que nous proposions de supprimer certains dispositifs existants en matière de transmission d’entreprises. Je répète que, comme le Conseil des prélèvements obligatoires et France Stratégie l’ont fait observer par le passé, la transmission d’entreprises peut se faire selon d’autres dispositifs.

Il en va de même pour la forêt. On se rend compte que les forêts très importantes sont bien gérées : leurs propriétaires n’attendent pas que tous les arbres soient coupés pour en replanter !

Nous souhaitons simplement qu’il y ait un peu plus d’équité et de justice sociale, puisque le Gouvernement a par ailleurs supprimé l’impôt de solidarité sur la fortune et que cette dernière n’est plus taxée qu’au moyen de l’impôt sur la fortune immobilière, l’IFI.

Notre texte visait à une taxation plus forte dans le cadre de la transmission. Cela dit, nous nous abstiendrons, en dépit des avancées en matière de transmission intergénérationnelle, que, bien évidemment, nous approuvons.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi, dans le texte de la commission, modifié.

(La proposition de loi est adoptée.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à adapter la fiscalité de la succession et de la donation aux enjeux démographiques, sociétaux et économiques du XXIe siècle
 

4

 
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer l'effectivité du droit au changement d'assurance emprunteur
Discussion générale (suite)

Changement d’assurance emprunteur

Adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe socialiste et républicain, la discussion de la proposition de loi tendant à renforcer l’effectivité du droit au changement d’assurance emprunteur, présentée par M. Martial Bourquin et plusieurs de ses collègues (proposition n° 427 [2018-2019], texte de la commission n° 59, rapport n° 58).

Mes chers collègues, cette proposition de loi est examinée dans le cadre d’une niche parlementaire d’une durée de quatre heures. Aussi, la séance sera quoi qu’il arrive suspendue à vingt heures trente précises, pour reprendre à vingt-deux heures sur un autre texte.

Par conséquent, si l’examen de la proposition de loi n’est pas terminé à ce moment, il devra se poursuivre dans le cadre d’une prochaine niche. En revanche, si les orateurs parviennent à se discipliner dans la discussion générale, en n’utilisant pas la totalité du temps qui leur a été alloué, il sera possible d’achever l’examen de ce texte.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la proposition de loi.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi tendant à renforcer l'effectivité du droit au changement d'assurance emprunteur
Article 1er

M. Martial Bourquin, auteur de la proposition de loi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame le rapporteur, mes chers collègues, je vais essayer de faire court.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Chiche !

M. Martial Bourquin. L’idée qui a inspiré ce texte est simple : on s’aperçoit que, malgré les lois Lagarde, malgré la loi Hamon, malgré l’amendement Bourquin, le marché important de l’assurance emprunteur, qui représente 9 milliards d’euros, ne s’est pas libéralisé. Les banques détiennent toujours 87 % du marché, et la concurrence ne joue pas complètement.

Pourquoi ? Parce que, souvent, les assurés ne connaissent pas la date de leur adhésion à leur contrat d’assurance. Toute une série de manœuvres plus ou moins dilatoires existe pour empêcher la concurrence de jouer à plein. Dans ces conditions, il paraît nécessaire et urgent que le législateur intervienne afin de préciser la loi.

À cet égard, nous avons travaillé, avec Mme le rapporteur, à faire en sorte que l’assurance emprunteur devienne moins lourde pour les Français, que ces derniers puissent accéder à la propriété dans les meilleures conditions possible et renégocier l’assurance associée à leur emprunt, de manière à obtenir un taux d’assurance qui soit décent.

Nous estimons que la mise en place d’une véritable concurrence dans le secteur pourrait redonner quelque 3 milliards d’euros aux ménages. Il s’agit donc de prendre position non pas pour les banques ou pour les assurances, mais pour le pouvoir d’achat des Français.

Le gain pour le consommateur pourrait être de 15 000, voire de 20 000 euros. Cela représente plus d’une année de salaire pour un Français qui touche le SMIC, deux ans d’études supérieures pour un étudiant ou encore deux ans de location, quand on sait que le loyer mensuel moyen s’établit à 600 euros en France.

Nous avons mené un travail extrêmement fin avec les services de l’État, pour faire en sorte que la rédaction de la proposition de loi soit la plus fluide et la plus simple possible et qu’elle permette effectivement la libéralisation de ce marché.

Madame la secrétaire d’État, nous comptons sur vous et sur le Gouvernement, qui semble enclin à nous soutenir, pour donner suite à ce travail conjoint, notamment à l’Assemblée nationale.

Mes chers collègues, je vous appelle donc à voter cette proposition de loi, pour les Français, pour leur pouvoir d’achat et pour permettre à nos concitoyens de vivre dignement. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR. – Mme Noëlle Rauscent applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Élisabeth Lamure, rapporteur de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes en quelque sorte invités, aujourd’hui, à mettre la touche finale à une aventure entamée voilà à peu près dix ans. Il s’agit de permettre concrètement au consommateur de résilier son assurance emprunteur s’il le souhaite.

En effet, le consommateur apparaît souvent comme la partie faible du contrat de prêt ou d’assurance. Le législateur est intervenu à plusieurs reprises, depuis 2010, pour renforcer ses droits et rééquilibrer la relation qui le lie à son assureur. Plusieurs manquements sont pourtant constatés sur le terrain, qui viennent obérer les chances, pour un assuré, de changer d’assureur, donc de réaliser des économies substantielles.

Mes chers collègues, avant d’examiner les solutions proposées dans le texte de notre collègue Martial Bourquin et par la commission des affaires économiques pour renforcer l’effectivité du droit de résiliation, je veux préciser de quoi l’on parle et vous donner quelques chiffres.

L’assurance emprunteur est une question importante dans la vie quotidienne de nos concitoyens, puisqu’elle conditionne, dans la majorité des cas, l’obtention d’un prêt immobilier. Elle facilite donc l’accès au crédit de tous les segments de la population.

Les chiffres relatifs à ce marché parlent d’eux-mêmes : 1 million de crédits immobiliers ont été contractés en 2018. À peu près autant de nouveaux contrats d’assurance emprunteur ont donc été conclus. Les cotisations de cette assurance représentent environ 9 milliards d’euros par an. En moyenne, l’assurance emprunteur représente entre 6 % et 15 % du montant du prêt pour un ménage, selon son profil de risques. Les montants en jeu sont donc considérables.

Depuis 2010, le législateur est intervenu à quatre reprises afin d’ouvrir, puis d’élargir progressivement le droit à la résiliation de cette assurance, augmentant ainsi la concurrence sur ce marché.

De fait, l’objectif d’une baisse des tarifs au profit du consommateur a été atteint : d’après la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, les assureurs alternatifs ont proposé des tarifs plus bas et permis de diminuer les prix moyens, forçant les bancassureurs à s’aligner et à diminuer à leur tour les prix, afin de conserver leur clientèle.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les parts de marché ont peu évolué dans les faits : si les bancassureurs détiennent toujours environ 87 % du marché, c’est avant tout parce qu’ils se sont adaptés à la concurrence, ce qui s’est traduit par plusieurs milliers d’euros d’économie pour les assurés ayant changé d’assureur.

Pour autant, les intentions du législateur ne sont parfois pas respectées sur le terrain. Or il nous revient d’évaluer concrètement l’application des lois que nous adoptons et de proposer des améliorations ou des modifications lorsqu’elles sont nécessaires.

En l’espèce, des incertitudes juridiques et les manœuvres dilatoires de certains prêteurs entretiennent la confusion du consommateur, appelant des précisions et des correctifs.

Une partie de ces manquements tirerait son origine du flou juridique entourant la notion de « date d’échéance » du contrat d’assurance emprunteur. Certains contrats n’en disposent pas, parce qu’ils ont été signés avant la consécration du droit à résiliation, en 2014, puis en 2017. D’autres présentent, au contraire, plusieurs dates, qui peuvent toutes en même temps prétendre à ce qualificatif. C’est ce flou qu’exploitent parfois certains prêteurs pour indiquer au consommateur qu’il n’a pas respecté la bonne date et qu’il ne peut donc pas rejoindre la concurrence.

Pour répondre à ce problème, notre collègue Martial Bourquin proposait deux solutions : inscrire dans la loi de ce que recouvre la notion de date d’échéance et créer, pour les assureurs, d’une obligation annuelle d’informer l’assuré de son droit à résiliation, trois mois avant la date anniversaire de la signature du prêt.

À l’unanimité de la commission des affaires économiques, des compléments et des précisions ont été apportés au texte. Je veux vous en exposer les grandes lignes.

Concernant la première solution, qui consiste à inscrire dans la loi que la date d’échéance est la date anniversaire de la signature de l’offre de prêt par l’emprunteur, la commission a souhaité retranscrire fidèlement la recommandation du Comité consultatif du secteur financier, le CCSF, de novembre 2018, dont l’avis a été rendu à l’unanimité de ses membres, lesquels regroupent des représentants des banques, des assurances et des consommateurs – c’est suffisamment rare pour être souligné.

Cet avis a recommandé de retenir comme date d’échéance la date anniversaire de la signature de l’offre ; c’est ce que fait la proposition de loi. Cependant, il recommandait également de préciser qu’une autre date d’échéance pouvait être retenue à la demande du client, si cette date figure sur le contrat.

Par exemple, si un assuré a déjà changé d’assureur, il possède un nouveau contrat qui indique, lui, une date précise d’échéance. Il convient que l’assuré puisse opter pour cette date. La commission a donc choisi d’inscrire également dans la proposition de loi cette partie de l’avis du CCSF. Ainsi, l’assuré garde véritablement la main sur la période de résiliation qui lui convient le mieux, ce qui est un facteur de clarté et de bonne appropriation du droit qui lui a été reconnu.

La commission a aussi prévu que cette nouvelle définition de la date d’échéance figure sur la notice énumérant les risques garantis que le prêteur remet à l’emprunteur lorsqu’il lui propose une assurance.

La seconde solution proposée dans le texte consistait à créer, pour les assureurs, une obligation d’informer l’assuré trois mois avant la date d’échéance de son droit à résiliation. Bien informer le consommateur est fondamental, car c’est seulement ainsi que celui-ci connaîtra ses droits et pourra faire jouer la concurrence.

Toutefois, nous nous sommes rendu compte que, présentée ainsi, cette obligation ne pouvait être respectée, tous les assureurs ne connaissant pas cette date de signature de l’offre de prêt, qui relève des relations contractuelles entre un prêteur et un emprunteur.

Ainsi, pour les contrats en cours, qui sont parfois anciens, les assureurs seraient contraints de calculer une période d’envoi de l’information à partir d’une date qui leur est inconnue. Ils seraient donc placés involontairement dans l’illégalité. Par conséquent, cette obligation serait source d’un contentieux de masse.

Une solution aurait été que les assureurs demandent aux différents prêteurs la date de signature de chacun de leurs millions de contrats, ce qui aurait constitué une obligation disproportionnée, alors que d’autres solutions existent pour la bonne information du consommateur.

C’est pourquoi la commission a choisi de créer une obligation pour l’assureur d’informer chaque année l’assuré de son droit général à résiliation et des délais et procédures qu’il doit respecter s’il souhaite en faire usage.

Ainsi, chaque assuré saura qu’il peut résilier son contrat et sera informé de la démarche à accomplir, à charge pour lui, bien évidemment, de connaître sa date de signature. C’est un vrai pas en avant dans le rééquilibrage des relations entre le consommateur et l’assureur.

Il a également été décidé de renforcer fortement les sanctions administratives dans les cas où les prêteurs et assureurs tentent d’induire leurs clients en erreur, de ne pas leur répondre ou de le faire hors délai, bref, de les tromper de mauvaise foi. En effet, une obligation sans sanction risque de rester un vœu pieux, à l’opposé de ce que nous recherchons.

Aujourd’hui, les sanctions pénales s’élèvent à 3 000 euros environ. Non seulement leur montant est trop faible, mais elles sont peu appliquées dans la pratique.

La commission les a dépénalisées, afin que la DGCCRF et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR, soient en charge de les appliquer. Cela présentera un avantage décisif : leur montant s’élèvera jusqu’à 15 000 euros par infraction pour une personne morale, soit cinq fois plus qu’aujourd’hui. En outre, le droit actuel offre à la DGCCRF et à l’ACPR la possibilité de publier leurs décisions de sanction, pour plus de dissuasion.

Voilà, mes chers collègues, le travail conduit par la commission des affaires économiques. Je me félicite que ses propositions aient été adoptées à l’unanimité. Cela témoigne à la fois de l’urgence d’agir et du consensus qui entoure ces mesures.

Je forme le vœu que, dans le même élan, notre assemblée parvienne à la même unanimité aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées du groupe SOCR.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.