M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les connaisseurs du patrimoine savent bien que l’hyper-fréquentation des sites culturels et naturels peut être un véritable problème. Cette question ne date pas d’aujourd’hui, puisque la grotte de Lascaux a été fermée au public en 1963 pour en préserver les peintures rupestres.

Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est l’ampleur du phénomène. Le cas de Venise est connu et emblématique. Lors d’un déplacement effectué en octobre 2016, notre commission de la culture a pu constater sur place la menace que fait peser le tourisme de masse : exode des habitants, surexploitation inappropriée des ressources, dégradation continue du système écologique et culturel de Venise et de sa lagune. À tel point que, le 2 octobre dernier, le comité du patrimoine mondial de l’Unesco a annoncé envisager d’inscrire Venise sur la liste du patrimoine mondial en péril si des progrès significatifs n’étaient pas faits pour en assurer la conservation. Et Venise n’est pas un cas isolé.

Le phénomène ne peut que s’emballer dans les années qui viennent. Selon l’Organisation internationale du tourisme, qui a publié en 2017 un rapport sur l’Overtourism, le tourisme mondial devrait passer de 1,3 milliard de voyageurs aujourd’hui à 1,8 milliard en 2030.

Au-delà des désagréments pour la population, il faut prendre conscience de l’importance d’assurer la préservation du patrimoine et de prendre des mesures.

Certains sites, un peu partout dans le monde, ont déjà réagi : depuis cette année, à Venise, les paquebots de plus de 100 000 tonnes ne peuvent plus accoster que de l’autre côté de la lagune. De même, Amsterdam a interdit les hôtels flottants, Santorin a limité l’affluence touristique à 8 000 personnes par jour et l’île de Pâques a restreint à trente jours la durée maximale des touristes sur place. Vous avez également cité, monsieur le rapporteur, le troisième site naturel le plus visité au monde, le Mont-Blanc

La présente proposition de loi s’inscrit donc dans la droite ligne de cette prise de conscience. Je remercie vraiment notre collègue Jérôme Bignon d’en avoir eu l’initiative.

Ce texte entend donner aux maires les moyens juridiques de lutter contre l’hyper-fréquentation des sites naturels et culturels. Lier sites naturels et culturels est en parfaite adéquation, je tiens à le dire, avec la réflexion que nous avons menée, ici, au Sénat lors des débats sur la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, en créant les sites patrimoniaux remarquables.

Par ailleurs, je le rappelle, le Comité national des biens français est placé sous la double tutelle du ministère de la culture et du ministère de l’environnement.

Comme ma collègue Évelyne Perrot, je soutiens ce texte, que j’ai cosigné. Il a évolué favorablement, pour permettre la prise de mesures concrètes et efficaces, souhaitées, je tiens à en témoigner, par les maires. Je pense notamment, dans mon département de la Seine-Maritime, au maire de Veules-les-Roses, dont la commune a été classée parmi les plus beaux villages de France l’année dernière, compte tenu du remarquable travail qu’il a fait pour le patrimoine environnemental et culturel, ou à la maire d’Étretat, puisque le site d’Étretat se trouve aujourd’hui confronté, vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, à la lourde problématique de l’hyper-fréquentation.

Pour autant, vous le savez, ces mesures nécessaires ne sauraient être suffisantes si elles n’étaient pas assorties d’un plan de gestion globale réfléchi et anticipé associant tous les acteurs. Je pense au travail remarquable mené par mes collègues élus dans le cadre de l’Opération grand site des falaises d’Étretat-Côte d’Albâtre, qui concerne treize communes du littoral et de l’arrière-pays. Il s’agit d’un projet de développement durable et local recouvrant plusieurs thématiques : les paysages, les déplacements, l’aménagement du territoire, le tourisme et, bien sûr, les risques. C’est une démarche vertueuse, que je tiens à saluer, qui vise à concilier l’accueil d’un grand nombre de touristes, lequel s’inscrit dans le cadre du développement économique, et la préservation d’un site remarquable et fragile. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, LaREM et Les Indépendants.)

M. le président. La parole est à Mme Vivette Lopez.

Mme Vivette Lopez. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens à féliciter notre collègue Jérôme Bignon, avec qui je partage de nombreuses actions, d’avoir pris l’initiative de cette proposition de loi et d’avoir travaillé sur la protection de notre cadre de vie et l’enrichissement des moyens mis à disposition des maires dans l’exercice de leurs fonctions.

Ce texte vient mettre en lumière les nouveaux défis que nous devons relever. Trois d’entre eux me semblent particulièrement prioritaires : répondre intelligemment et concrètement à l’explosion mondiale du tourisme, préserver l’environnement, ce que nos concitoyens appellent de leurs vœux, et prendre en compte les nouvelles formes de tourisme ainsi que les nouveaux comportements qui y sont associés. Le sujet est vaste, aussi riche que la réflexion qui s’impose, mais la rédaction de cette proposition de loi vient contribuer de façon positive aux actions engagées.

Incontestablement, nous devons nous réjouir de l’attractivité dont bénéficie notre pays : nous recevons de plus en plus de touristes. L’Organisation mondiale du tourisme estime que, d’ici à 2030, 4 millions de touristes s’ajouteront au 1,4 milliard de personnes qui voyagent déjà. À l’heure où la concurrence mondiale pour capter la venue de touristes est forte, la hausse de la fréquentation touristique en France est le signe d’une réelle vitalité et la conséquence de politiques touristiques efficaces. Reste que cela ne nous autorise pas à faire n’importe quoi, n’importe comment.

Pour de nombreuses destinations, gérer cet essor représente un défi important. Sur certains sites, la sur-fréquentation sévit depuis longtemps. Elle laisse des traces, à tel point qu’elle menace, selon bon nombre d’observateurs, leur existence même. Pensons à Venise, comme l’a dit notre collègue Catherine Morin-Desailly, ou à l’Islande. À l’évidence, les moyens légaux mis à la disposition des élus pour encadrer cet afflux de touristes ne sont pas adaptés.

Parfois, des actions menées pour la protection de l’environnement peuvent provoquer le contraire de ce que nous voulions. Je prendrai pour exemple le film de Nicolas Vanier sur la protection de la faune et de la flore et la prise de vue, par un drone, de flamants roses en période de couvaison aux Salins du Midi. Celle-ci a effrayé les flamants, qui ont fui et abandonné les œufs. Les dégâts, bien évidemment non voulus, ont ainsi été nombreux.

J’approuve le texte adopté par la commission, lequel, en recentrant plus précisément les dispositifs à faire évoluer, témoigne de pragmatisme. Au lieu d’étendre les pouvoirs de police du maire, comme c’était initialement envisagé, il prévoit finalement, avec beaucoup de bon sens et de finesse, de n’étendre que l’actuel pouvoir de police spéciale du maire en matière de circulation et de stationnement, avec deux nouvelles possibilités : réglementer l’accès et non plus seulement l’interdire ; réglementer ou interdire la circulation des personnes et non pas uniquement les véhicules motorisés.

Il était difficilement envisageable d’exposer les maires à des responsabilités nouvelles. Ils en ont déjà bien assez ! Cela les aurait potentiellement exposés à des poursuites pour inaction fautive, alors même qu’ils ne disposent pas, le plus souvent, des moyens techniques, juridiques et humains appropriés.

En outre, alors que la plupart des polices spéciales de la nature sont exercées par l’État, une mauvaise interprétation de ces dispositions aurait pu laisser penser que les maires sont désormais compétents de manière générale en matière de protection de l’environnement.

L’accent a donc été mis sur la cohérence entre les différents dispositifs. Je crois particulièrement à l’efficacité de cette démarche. Néanmoins, une telle initiative en appelle bien d’autres. Notre gestion globale du tourisme évolue-t-elle assez vite face à un risque climatique qui nous alerte de plus en plus, alors que nos concitoyens aspirent à retrouver des liens plus vrais avec la nature ? Rien n’est moins sûr ! Les qualités naturelles et paysagères restent en effet un facteur essentiel de l’attractivité des territoires de par le monde.

Le tourisme, par son caractère transversal, en appelle à une réponse globale, avec une véritable coordination des outils et un partage des responsabilités. Cette proposition de loi s’inscrit dans cette démarche et apporte une amélioration que je veux saluer.

En guise de conclusion, comparons la situation de deux lieux touristiques : s’il est possible d’accueillir 1 million de visiteurs au pont du Gard, il est compliqué de faire de même pour ce qui concerne l’étang de Scamandre ! (M. le rapporteur et M. Frédéric Marchand applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre collègue Christophe Priou a évoqué mai 68. Je convoquerai pour ma part quelques souvenirs plus récents.

Voilà trente ans, étudiant, j’allais en forêt de Fontainebleau pour profiter de ses charmes et pour le plaisir de gravir quelques-uns des plus beaux blocs de grès de la planète. Il y avait là quelques « bleausards », les habitués de cette forêt, quelques Parisiens, des gens de province qui s’étaient égarés. Aujourd’hui, cette forêt concentre Australiens, Américains, Japonais, ainsi que toute l’Europe grimpante, avec des conséquences sur l’érosion des sites : des chemins abîmés et des blocs altérés, en raison d’un problème d’hyper-fréquentation. Ceux-là ne sont pas amateurs de selfies, ils veulent juste profiter d’un site exceptionnel. Je voulais citer cet exemple dans le cadre de nos débats.

J’ai souvenir d’avoir discuté, lors de l’examen d’une proposition de loi de M. Retailleau, des meilleurs moyens d’assurer un accès libre à des sites naturels en évitant les chausse-trapes des risques liés aux accidents. La proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l’hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux constitue l’autre bout de l’omelette, si vous me passez cette expression chère au Premier ministre.

Le Sénat, dans sa grande sagesse, souhaite préserver la possibilité de fouler les plus beaux sites naturels, mais il veut aussi préserver leur pérennité et, donc, éviter l’hyper-fréquentation si bien décrite dans le rapport de Jérôme Bignon. Sont notamment concernés la baie de Somme avec ses embouteillages sur plusieurs sorties d’autoroute, Port-Cros et ses nombreux allers-retours de bateaux ou encore le Mont-Blanc et ses faux guides. Les dérives en matière d’accès à certains de nos plus beaux sites naturels sont nombreuses !

Ce texte évite les pièges que beaucoup ont décelés durant l’examen du projet de loi Engagement et proximité, à savoir donner des pouvoirs de police aux maires, ce qui les mettrait en première ligne sans leur donner les moyens d’exercer leur compétence. En prévoyant d’élargir la portée de l’article L. 2213-4 du code général des collectivités territoriales, qui met en place une police spéciale de la circulation dans les espaces naturels au profit des maires, il aboutit à une solution pragmatique.

Avec mes collègues du groupe socialiste, nous présenterons un amendement qui s’inscrit dans le périmètre de cette proposition de loi. Il vise à apporter une réponse ferme aux inconscients égoïstes qui seraient tentés de renouveler l’atterrissage sauvage accompli il y a quelques mois au sommet du mont Blanc, pour une dépose peu compatible avec les usages et le respect de la montagne.

J’avais déposé une proposition de loi sur ce thème et recueilli nombre de réactions positives. J’ai cependant retravaillé le texte en échangeant avec le Gouvernement, afin d’éviter que les pilotes de bonne foi et soucieux de l’environnement ne pâtissent de mes suggestions. Nous aurons l’occasion tout à l’heure d’évoquer ce sujet plus en détail.

Nous sommes tous sensibles à ces questions sur lesquelles nous pouvons nous retrouver en laissant de côté les étiquettes politiques. Le Président de la République s’est exprimé sur le Mont-Blanc ; on imagine qu’il est également sensible à la question de la baie de Somme, qui vous est chère, monsieur Bignon. Nous espérons donc que le Gouvernement sera attentif à nos débats.

D’ici là, j’espère que vous me pardonnerez de contribuer à l’hyper-fréquentation de l’hémicycle ce matin, bien que je sois membre de la commission des lois, pour présenter un amendement qui ne concerne même pas mon département. Mais je crois que votre texte intéresse largement et que le Mont-Blanc mobilise tous les Français, quelle que soit la place qu’ils occupent dans la cordée ! (Applaudissements.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l’hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l'hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 3 rectifié bis

Article 1er

I. – Le premier alinéa de l’article L. 2213-4 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le mot : « motivé, », sont insérés les mots : « réglementer ou » ;

2° Les mots : « aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs », sont remplacés par les mots : « dès lors que cet accès ».

II. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du I dans les espaces protégés au titre des livres III et IV du code de l’environnement.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Gold, Arnell et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mmes N. Delattre et Guillotin, MM. Jeansannetas et Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que les modalités de consultation des parties prenantes locales

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Le présent amendement vise à ce que le pouvoir de police spéciale du maire réglementant l’accès aux espaces protégés s’exerce dans le cadre d’un projet de territoire, en précisant que le décret en Conseil d’État prévoit les modalités de consultation des parties prenantes locales : collectivités territoriales concernées, parcs naturels, propriétaires… Une telle précision est d’autant plus nécessaire que les prescriptions du maire peuvent avoir une incidence territoriale beaucoup plus large.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. Par cet amendement, il s’agit d’associer les modalités de consultation aux modalités d’application. Même si l’objet du décret est d’ores et déjà de prévoir ces modalités, je ne suis pas opposé à une telle précision. La commission a donc émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est également favorable à cet amendement. En effet, le décret en question vise à préciser les modalités de mise en œuvre du pouvoir du maire. Il semble important d’indiquer également les modalités de consultation des parties prenantes, ce qui permettra une meilleure intégration de la mesure de police municipale dans un cadre juridique qui reste complexe.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l'hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 1 rectifié

Articles additionnels après l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Durain, Gillé, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville, Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre VI du livre III du code de l’environnement est ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Accès par aéronefs

« Section 1

« Interdiction des atterrissages à des fins de loisirs

« Art. L. 363-1. – Dans les zones de montagne, l’atterrissage d’aéronefs motorisés à des fins de loisirs, à l’exception des aéronefs sans personne à bord, et la dépose de passagers par aéronefs motorisés à des fins de loisirs, sont interdites, sauf sur un aérodrome au sens de l’article L. 6300-1 du code des transports, ainsi que sur les emplacements autorisés par l’autorité administrative.

« Art. L. 363-2. – La publicité, directe ou indirecte, de services faisant usage des pratiques mentionnées à l’article L. 363-1 est interdite.

« Art. L. 363-3. - Dans les zones de montagne, les déposes de passagers à des fins de loisirs par aéronefs non motorisés sont interdites, sauf sur les aérodromes au sens de l’article L. 6300-1 du code des transports, ainsi que sur les emplacements autorisés par l’autorité administrative.

« Section 2

« Dispositions pénales

« Art. L. 363-4. – Est puni d’un an d’emprisonnement et 150 000 € d’amende le fait de ne pas respecter l’interdiction mentionnée à l’article L. 363-1.

« Art. L. 363-5. – Est puni de six mois d’emprisonnement et 75 000 € d’amende le fait de ne pas respecter l’interdiction mentionnée à l’article L. 363-2. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

M. Jérôme Durain. L’atterrissage d’un avion de tourisme au sommet du mont Blanc le 18 juin dernier a mis en lumière le caractère lacunaire de notre arsenal législatif pour lutter contre ce type de comportement, qui contrevient aux usages en vigueur en montagne et transgresse les lois en matière de protection de l’environnement.

En Haute-Savoie et au-delà, ce comportement déplorable a légitimement choqué celles et ceux qui aiment la montagne et souhaitent que son environnement soit préservé. Certes, l’article L. 363-1 du code de l’environnement prévoit déjà que, dans les zones de montagne, les déposes de passagers à des fins de loisirs par aéronefs sont interdites, sauf sur les aérodromes dont la liste est fixée par l’autorité administrative. Toutefois, à défaut de sanctions dans les textes, cette interdiction ne peut aujourd’hui être mise en œuvre. Le pilote incriminé le 18 juin dernier n’a écopé que d’une amende de 38 euros.

Cet amendement vise à dissuader toute récidive en durcissant les peines encourues. Les réactions positives ont été nombreuses lorsque j’ai rédigé la proposition de loi dont s’inspire cet amendement. Toutefois, des pilotes de montagne de bonne foi se sont inquiétés des conséquences possibles sur les aérodromes de Saint-Rémy-de-Maurienne et Sollières et sur les pratiques responsables d’aviation de montagne.

J’ai été heureux d’échanger avec le cabinet de Mme la secrétaire d’État pour parfaire cet amendement. Selon moi, sa rédaction permet désormais d’éviter toute conséquence néfaste pour les pilotes qui respectent les règles et de rester dissuasif pour ceux qui seraient tentés de renouveler le triste exploit du mois de juin.

Le Président de la République a eu l’occasion d’en faire part, il est conscient des enjeux de préservation du Mont-Blanc, qui dépassent la seule question des atterrissages sauvages. J’espère que le présent amendement aidera les élus de ce département, qui n’est pas le mien, à préserver notre patrimoine naturel national.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. À la suite de divers incidents, notamment l’atterrissage d’un avion de tourisme au sommet du mont Blanc en juin, cet amendement vise à renforcer les dispositions prévues par notre droit sur le sujet. Il tend à interdire l’atterrissage et la dépose de personnes par aéronef motorisé à des fins de loisirs, en assortissant cette interdiction d’un régime de sanctions pénales lourdes, puisqu’il s’agit d’un an d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende et de six mois d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende concernant la publicité relative à de tels services.

Il vise également à interdire la dépose de personnes par aéronef non motorisé, mais sans la soumettre au régime de sanctions pénales prévues pour le premier cas. En effet, il paraîtrait disproportionné de sanctionner pénalement quelqu’un qui atterrirait en deltaplane, par exemple.

Ce sujet rejoint tout à fait les préoccupations de la proposition de loi que nous examinons, laquelle tend à compléter la boîte à outils permettant de faire face aux nouvelles habitudes touristiques auxquelles sont confrontés de nombreux sites naturels aujourd’hui hyper-fréquentés. Il s’agit d’un tourisme plus tourné vers la consommation – tourisme de l’unique venue – ne respectant pas le patrimoine naturel.

Ainsi la commission avait-elle émis un avis favorable sur cet amendement avant son ultime rectification. Cette dernière n’ayant pas modifié l’amendement sur le fond, elle y est toujours favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Vous l’avez dit, monsieur le sénateur, le fait générateur, l’atterrissage d’un aéronef de tourisme très haut sur le mont Blanc, est emblématique. J’ai eu l’occasion de m’en entretenir avec le maire de Saint-Gervais-les-Bains pas plus tard qu’hier. Vous savez toute l’attention que porte le Président de la République à ce sujet.

L’adoption de cet amendement permettra d’instaurer un régime de sanctions et de mieux encadrer l’atterrissage d’aéronefs dans des zones sensibles, sans pénaliser les acteurs de bonne foi et avec le bon régime juridique.

Je veux saluer le travail très constructif mené à la fois par vous-même, la commission et les services du ministère de la transition écologique et solidaire. Selon moi, nous avons trouvé un point d’équilibre. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis très favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.

M. Loïc Hervé. En tant que sénateur de la Haute-Savoie (Lorateur, essoufflé, a du mal à sexprimer.), je suis particulièrement attentif à cette question et au fait que des réponses concrètes soient apportées aux élus locaux chargés de cette merveille naturelle qu’est le massif du Mont-Blanc. Bien évidemment, je voterai cet amendement, très important à mes yeux.

M. le président. Il vous faut reprendre de l’oxygène, mon cher collègue, un peu d’altitude ! (Sourires.)

Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 3 rectifié bis
Dossier législatif : proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l'hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux
Articles 2 à 4

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.

L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Gold, Arnell et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, M. Gabouty, Mme Guillotin, MM. Jeansannetas et Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 415-1 du code de l’environnement est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Le présent article entre en vigueur au plus tard le 1er janvier 2020. Ses conditions d’application sont fixées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Cet amendement vise à appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité d’un décret, promis depuis plusieurs années, visant à l’assermentation des gardes nature au sein des parcs régionaux.

En juin 2018, en réponse à une question posée, le ministre de la transition écologique et solidaire avait promis ce décret d’application d’ici à la fin de l’année 2018.

Lors de l’examen du projet de loi portant création de l’Office français de la biodiversité, le Gouvernement avait annoncé sa publication pour l’automne 2019. Or ce décret n’est toujours pas paru, laissant les gardes nature démunis de leurs possibilités de constater des infractions, au détriment de la protection de notre patrimoine naturel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jérôme Bignon, rapporteur. Comme vient de l’expliquer notre collègue Gold, cet amendement vise à solliciter la publication du décret, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2020.

L’insertion de cette précision dans le texte n’accélérera pas la publication du décret. Le Gouvernement le prendra quand il sera prêt. J’estime qu’il s’agit plutôt d’insister amicalement auprès du Gouvernement pour que ce décret, attendu depuis longtemps, sorte enfin.

Dans la mesure où je suis certain que vous serez entendu, mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement au profit d’un engagement de Mme la secrétaire d’État.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat. Le décret qui conditionne l’entrée en vigueur effective de la mesure habilitant les agents des collectivités et leurs groupements, notamment ceux des parcs naturels régionaux, à constater les infractions relatives au patrimoine naturel a été examiné par le Conseil d’État dans sa section des travaux publics le 19 novembre dernier. Nous venons de recevoir son avis favorable. (Marques de satisfaction sur plusieurs travées.)

Il me semble donc que je pourrai tenir l’engagement que j’avais pris lors de l’examen de la loi portant création de l’Office français de la biodiversité de sortir ce décret d’ici à la fin de l’année, peut-être même techniquement à l’automne 2019, puisque, l’hiver arrivant le 20 décembre, il n’est pas impossible que nous puissions tenir parole.

Par conséquent, je vous demande, monsieur Gold, de bien vouloir retirer votre amendement, qui est satisfait.

M. le président. Monsieur Gold, l’amendement n° 1 rectifié est-il maintenu ?

M. Éric Gold. Totalement satisfait par la réponse de Mme la secrétaire d’État, je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 1 rectifié
Dossier législatif : proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l'hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Articles 2 à 4

(Supprimés)

Vote sur l’ensemble

Articles 2 à 4
Dossier législatif : proposition de loi portant diverses mesures tendant à réguler « l'hyper-fréquentation » dans les sites naturels et culturels patrimoniaux
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.) – (Applaudissements.)

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)