M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Alain Milon, président de la commission spéciale. Pour répondre à M. Jean-Pierre Corbisez, il est vrai qu’après une AMP, parfois, les grossesses naturelles reviennent.

M. Jean-Pierre Corbisez. C’est un miracle ! (Sourires.)

M. Alain Milon, président de la commission spéciale. Ce n’est pas un miracle, ce phénomène a certainement des causes que l’on n’a pas toujours découvertes. L’AMP peut ainsi débloquer certaines choses, mais on ne sait pas toujours quoi.

Madame Rossignol, je vous répondrais sous forme de boutade : on ne soigne pas non plus une arthrose de la hanche bien évoluée, on met une prothèse, donc on ne fait que remplacer l’articulation, on ne la soigne pas.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Nous devons avoir conscience que le champ des prises en charge de la sécurité sociale a considérablement évolué depuis sa création. Elle dépensait alors l’essentiel de ses budgets dans des indemnités journalières et non dans des soins, lesquels sont arrivés ensuite, suivis par les actes de prévention, qui occupent progressivement une part de plus en plus importante. C’est le soin qui est pris en charge, plus que l’indication.

Je vous rappelle que René Frydman raconte dans Le Droit de choisir, un livre publié en 2017, que, comme ses collègues spécialistes de la reproduction, il a reçu des couples qui lui ont dit qu’ils n’avaient aucune vie sexuelle, tout en lui demandant une aide médicale à la procréation. Ce n’est pas une situation anecdotique. Il explique que, comme ses collègues, il ne voit pas pourquoi il leur aurait refusé une prise en charge au motif qu’ils ne sont pas venus pour un diagnostic d’infertilité.

Cela peut vous choquer, car ces gens ne souffraient pas de pathologies, mais recherchaient un soin et il a eu raison d’accéder à leur demande, non seulement par empathie individuelle, mais, de façon plus générale, parce que la mission de la sécurité sociale est, à mon sens, d’apporter ces soins et de les prendre en charge.

J’entends la cohérence du raisonnement de ceux qui s’opposent à cette extension de la PMA et donc à son remboursement, mais vous ne pouvez pas nier que la conséquence très directe de ce choix, c’est que les personnes concernées vont se répartir en deux catégories : celles qui auront les moyens et qui franchiront le pas et celles qui ne les auront pas et qui ne le feront pas.

Vous prenez donc, encore une fois, une décision de nature restrictive qui vise à limiter la portée du droit nouveau que nous avons ouvert.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Au regard de nos débats depuis le début, il me semble que la question du financement de cette procédure nous permet de prendre du recul sur nos votes et d’évaluer les décisions que nous avons prises.

Sans chercher à renforcer les polémiques, je considère que, lorsque l’on ouvre un droit, à l’issue d’une discussion d’une telle qualité, il faut sortir de cette question du financement : il y aura une expérimentation et une évaluation.

Par ailleurs, monsieur le président Alain Milon, je vous prie de me pardonner de vous le faire remarquer, après tout, cela m’arrive à moi aussi, mais votre réponse à Mme Laurence Rossignol, cette comparaison avec la prothèse de hanche, n’était pas très brillante ! Je fais partie de ceux qui ne cherchent pas la polémique pour la polémique, je referme donc immédiatement cette parenthèse pour éviter de commenter plus avant cette réaction.

En revanche, j’ai repéré une réponse politique, qui explique qu’il reste des divergences entre nous, même si nous votons parfois de manière identique. Je vous ai ainsi entendu glisser l’idée selon laquelle les mutuelles pourraient agir non pas en complément de la sécurité sociale, mais en s’y substituant.

M. Alain Milon, président de la commission spéciale. C’est déjà le cas !

M. Pascal Savoldelli. Ces mots ont un sens politique.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Ce débat est important et je veux dire mon total soutien aux argumentations qui ont été présentées par mes collègues, en particulier Laurence Rossignol et Bernard Jomier.

Citons quelques chiffres dans le détail : le coût d’une fécondation in vitro, une des formes de PMA les plus onéreuses, est estimé autour de 3 000 euros. Il faut en outre lui ajouter le prix de la conservation des gamètes, les médicaments de stimulation ovarienne et d’autres frais. Dans un avis de 2017, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) évalue le coût global moyen de trois cycles de traitement de fécondation in vitro à 20 000 euros par femme.

Pour l’assurance maladie, selon le conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine, le coût de l’AMP peut être évalué entre 200 millions d’euros et 300 millions d’euros, c’est-à-dire 0,1 % de l’ensemble des dépenses de l’assurance maladie avec un Ondam atteignant quelque 200 milliards d’euros.

Le sujet de l’article 1er est l’ouverture de ce droit, mais vous le fermez aujourd’hui en refusant sa prise en charge par la sécurité sociale, ce n’est pas acceptable et je partage entièrement les arguments qui ont été présentés.

M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

M. Olivier Cadic. Ces débats sur la PMA me rappellent un épisode de l’histoire de France : comme Catherine de Médicis et Henri II n’arrivaient pas à avoir d’enfant, un médecin expliqua à la première que, pour des raisons physiologiques, il fallait qu’ils s’y prennent d’une certaine manière pour obtenir le succès. Ils ont eu cinq enfants… (Exclamations amusées.) Un premier exemple de procréation médicalement assistée ! (Mme Cécile Cukierman proteste.)

Je relate cette histoire parce que je la comprends et qu’elle est parlante. Il y a quelques instants, Philippe Bas a déployé une démonstration qui m’a paru excessivement intelligente, mais à laquelle je n’ai rien compris. (Rires.) Ce que j’ai compris, mon cher collègue, c’est que vous êtes contre le remboursement, mais ce qui précédait était un peu compliqué pour moi…

J’ai voté l’amendement sur la PMA post mortem pour une raison de liberté. Je voterai l’amendement du Gouvernement au nom d’un autre principe républicain : l’égalité. (Applaudissements sur des travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Nous avons eu un débat long et argumenté sur l’ouverture de la PMA. Pour ma part, je ne mêlerai pas à ce débat la discussion que nous sommes en train d’avoir. À cet égard, j’étais d’accord avec un précédent orateur, qui a dit : j’ai voté contre, mais ce n’est plus la question.

Dès lors que nous avons collectivement décidé d’ouvrir un droit – au sein de notre groupe, nous y étions favorables, à une exception près –, la question qui nous est posée est celle-ci : comment assurer l’égal accès à ce droit ? Car il ne faudrait pas que certaines puissent se le payer, d’autres non.

Nous avons ouvert un droit – je pense, moi, qu’il est juste. Maintenant, nous devons garantir l’accès à ce droit en instaurant le remboursement par la sécurité sociale. Sinon, nous créerons une inégalité de fait !

Même celles et ceux qui ont voté contre l’ouverture, ce que je respecte, devraient accepter de dissocier les deux questions et admettre que ce droit, dès lors qu’il est ouvert, doit être également garanti à tous, comme l’ensemble des droits acquis et régulièrement créés.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 115 rectifié, 228, 262 rectifié et 295.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission spéciale est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 68 :

Nombre de votants 331
Nombre de suffrages exprimés 318
Pour l’adoption 142
Contre 176

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 46 rectifié bis, présenté par Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Cuypers et de Legge, Mme Ramond, M. Vaspart, Mmes Gruny et Sittler, MM. Paccaud, de Nicolaÿ, Chaize et B. Fournier, Mme Bories, M. Bascher, Mme Deroche, MM. Mandelli et Piednoir et Mme Noël, est ainsi libellé :

Alinéa 55

Remplacer les mots :

de l’infertilité

par les mots :

de la stérilité

La parole est à M. Dominique de Legge.

M. Dominique de Legge. Cet amendement de précision vise à substituer à la notion d’infertilité celle, figurant déjà à l’article L. 160-14 du code de la sécurité sociale, de stérilité, par cohérence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est exact que l’article cité vise la prise en charge de la stérilité, alors que, en matière d’assistance médicale à la procréation, les textes mentionnent, depuis 1994, l’infertilité.

À la vérité, mon cher collègue, il serait sans doute plus judicieux d’opérer la substitution inverse de celle que vous proposez, l’infertilité étant une notion plus large que la stérilité. Je demande donc le retrait de l’amendement ; avis défavorable s’il est maintenu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 46 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 69 :

Nombre de votants 321
Nombre de suffrages exprimés 276
Pour l’adoption 160
Contre 116

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur des travées des groupes LaREM, SOCR et CRCE. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

Mes chers collègues, nous avons examiné 56 amendements au cours de la journée ; il en reste 207 à examiner sur ce texte.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 1er (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Discussion générale

7

Adoption des conclusions de la conférence des présidents

M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune observation sur les conclusions de la conférence des présidents. Ces conclusions sont donc adoptées.

8

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 23 janvier 2020 :

À dix heures trente, à quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la bioéthique (texte de la commission n° 238, 2019-2020).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à minuit.)

Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,

ÉTIENNE BOULENGER

Chef de publication