M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Madame la secrétaire d’État, l’objectif que s’est fixé l’Union européenne en instaurant le principe de la neutralité carbone en 2050 est très ambitieux, tout comme l’est l’objectif d’une baisse de 55 % des émissions en 2030 par rapport au niveau de 1990, même si, pour l’instant, un accord n’a pas encore été trouvé sur les modalités pour y parvenir.

Ces objectifs sont encore plus ambitieux si l’on considère comment les choses se sont passées depuis 1990. La baisse des émissions de carbone de l’Union européenne que nous avons relevée est, en réalité, une baisse en trompe-l’œil, car nos importations conduisent à une émission, ailleurs, de gaz plus importante que la réduction à laquelle nous procédons en Europe. Si nous voulons être un continent exemplaire, mais aussi participer à la baisse globale des émissions sur la planète, nous devons contrôler cet aspect des choses.

Les mesures que nous mettons en œuvre aujourd’hui pour parvenir à une baisse des émissions doivent être évaluées en permanence. Car c’est un défi scientifique ; en la matière, nous faisons des découvertes tous les jours, et nous constatons que les effets pervers des changements peuvent parfois être pires que ce que l’on souhaite combattre…

Sans aller jusqu’à ces extrêmes, je voudrais citer deux exemples.

Le premier, c’est le poids dans les négociations des puits de carbone, en particulier des forêts. Ces puits ont une efficacité très variable en fonction des circonstances, mais ils permettent à certains pays qui prétendent en disposer d’émettre. Comment les évaluer en fonction de l’état des connaissances ?

Le second, c’est la taxonomie, que nous avons déjà évoquée. Elle permet d’évaluer les investissements qui sont réalisés, ce qui est essentiel quand on alloue autant de moyens que nous allons le faire dans les prochaines années à ces objectifs. Toutefois, les connaissances scientifiques vont évoluer dans ce domaine, et il est absolument indispensable que les principes de la taxonomie soient évalués et révisés en fonction de l’état de ces connaissances et de ce que nous constatons au jour le jour.

Madame la secrétaire d’État, ma question est la suivante : comment intégrer l’évaluation continue des outils que nous mettons en œuvre pour atteindre nos objectifs de réduction des émissions de carbone non seulement dans les négociations, nos accords et notre politique au sein de l’Union européenne, mais aussi dans les accords commerciaux et d’investissement qui nous lient avec le reste du monde ?

M. le président. Mes chers collègues, je demande à chacun de respecter son temps de parole. Monsieur Leconte, vingt-huit secondes de dépassement sur deux minutes, cela fait beaucoup…

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Leconte, votre interrogation va dans le sens des travaux qui sont menés sur l’ETS et sur le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. Il faut évaluer et expertiser ce mécanisme, puis le mettre en conformité avec les règles de l’OMC. Nous devons relever ce défi afin de mettre au point cet outil qui, je le crois, fait aujourd’hui consensus mais qui doit être affiné sur la base d’une expertise absolument nécessaire.

S’agissant de l’empreinte carbone et des puits de carbone, qui sont au cœur de votre question, nous disposons aujourd’hui d’inventaires très sérieux qui agrègent les connaissances et d’une analyse des facteurs d’évolution qui doivent nous permettre à l’avenir de dessiner nos politiques en la matière. Nous y serons encore plus attentifs demain, compte tenu des enjeux auxquels nous devons faire face, tels que l’adaptation des forêts au changement climatique.

Grâce à ces inventaires annuels et cette évaluation scientifique, qui sont essentiels en termes de transparence et d’identification des impacts, les politiques européennes feront l’objet d’études d’impact détaillées par la Commission et par ses agences.

Ces sujets complexes et novateurs sont aujourd’hui examinés par le centre commun de recherche qui assiste la Commission. Les administrations nationales confortent, ou contestent, ces analyses qui nourrissent leurs positions dans le cadre des négociations à venir. Nous sommes dans un moment fondateur, mais très encourageant !

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet.

M. Gérard Longuet. Monsieur le président, nous allons gagner du temps, car ma question a déjà été excellemment posée par Mme Saint-Pé et la réponse me convient.

Je voudrais simplement attirer votre attention sur un point, madame la secrétaire d’État : si nous voulons être en position plus forte dans la deuxième étape que vous avez évoquée, il faut nous rappeler que la France est en mesure de traiter durablement les déchets de haute activité et à vie longue dans des conditions que vous maîtrisez parfaitement, madame la secrétaire d’État, puisque vous êtes une représentante du département au sein duquel, en limite nord, sera installé le centre de stockage.

J’en profite pour développer une courte réflexion : introduisez dans le débat européen sur le Pacte vert la notion de densité ! Les habitants des régions à faible densité ont l’immense mérite d’entretenir des puits de carbone, volontairement ou non – c’est parfois leur métier.

La contrepartie, c’est que, dans ces zones à faible densité de population, les dépenses de transport sont beaucoup plus élevées ; ce coût devrait être pris en compte. D’un côté, ces habitants utilisent certainement – oh, c’est affreux ! (Sourires.) – du diesel, mais, de l’autre, ils entretiennent la nature qui permet d’absorber, par la fonction chlorophyllienne, le CO2 produit par les urbains.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Je vous remercie, monsieur le sénateur, de votre réflexion improvisée. La solidarité territoriale doit être envisagée au niveau communautaire, et plus finement sur nos territoires entre le rural et l’urbain. Nous avons déjà au niveau national des dispositifs destinés à équilibrer ces situations, et des dotations qui sont déployées en fonction.

Je retiens votre remarque sur la prise en compte, dans les négociations communautaires, du critère de densité qui doit absolument apparaître et être intégré dans la répartition européenne des efforts.

M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour la réplique.

M. Gérard Longuet. Votre réponse me convient parfaitement, madame la secrétaire d’État. Je vous rappelle que l’État a la responsabilité de la mise en œuvre de la déclaration d’utilité publique (DUP) concernant le site du centre industriel de stockage géologique (Cigéo) : si celle-ci était lancée avant la fin de l’année, nous aurions au moins un argument pour montrer que si nous acceptons le nucléaire, nous en gérons les inconvénients.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat. Certes, mais nous nous éloignons du sujet !

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la secrétaire d’État, depuis 2019, le Pacte vert nous est, et nous sera encore dans les mois à venir, dévoilé au travers de stratégies et de communications, mais aussi via des propositions juridiquement contraignantes. Autant d’ambitions qui devront se concrétiser pour nos concitoyens dans les territoires.

Notre transition verte, même à l’échelle européenne, ne se fera pas sans investissements massifs et correctement fléchés. Le montant du plan d’investissement pour une Europe durable s’élève à 1 000 milliards d’euros sur dix ans. Tous les acteurs, publics et privés, nationaux et européens, devront concourir à la réalisation de cet objectif de transition verte. L’ensemble des régions européennes s’inscriront donc dans cette transformation sans que cette accélération laisse à la traîne les régions les plus en retard, et ce grâce à un financement spécifique de rattrapage.

La réussite du Pacte vert européen tient, je le pense, à des questions de calendrier et de juste ciblage. Nous devons faire de la crise économique et sanitaire un accélérateur de la transition. Une part importante de notre énergie et de nos investissements doit donc se focaliser sur ce sursaut vital qui appelle vitesse, innovation, mise à l’échelle et massification et que seule une intense et étroite coopération public-privé pourra assurer.

Sur ces 1 000 milliards d’euros, 25 % proviennent du cadre financier pluriannuel actuel et déborderont certainement sur le suivant. Cela se traduira par des aides et fonds européens. Le calendrier de déploiement concret du Pacte vert dans nos territoires sera donc décisif. Avons-nous une vision claire sur ce sujet ?

Madame la secrétaire d’État, les territoires connaissent très bien leurs besoins. C’est pourquoi nous militons pour une approche ascendante, en mode plateforme public-privé et en circuit court, dans le déploiement des financements et l’accès aux fonds européens. Comment les pouvoirs publics comptent-ils assurer la bonne exécution de ce volet qui est un élément clé de la mise en œuvre du Pacte vert européen ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice, vous l’avez dit, le Pacte vert nous a donné une nouvelle vision de la stratégie de croissance de l’Union et de ses domaines prioritaires d’investissement. Ainsi, 30 % du nouveau budget européen et du plan de relance sont consacrés à la lutte contre le changement climatique. Cette orientation a pu déstabiliser et appeler à une relecture de certains dispositifs d’aide ; elle a surtout nécessité de faire preuve d’une grande réactivité en termes de délais.

Je profite de cette occasion pour saluer les préfectures, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), les opérateurs de l’État et l’ensemble des acteurs qui ont su accompagner des projets dans des délais très contraints, afin que nous puissions mobiliser pleinement tous les moyens que nous offrent cette stratégie et ce plan de relance.

Dans ce cadre, 40 % des fonds de France Relance seront financés par le plan de relance européen, ce qui explique qu’il faille trouver une cohérence dans les objectifs. Le Gouvernement, que je représente ici, est vigilant à ce que le dispositif soit, à la fois, compréhensible, transparent et accessible aux différents bénéficiaires, parmi lesquels – vous les avez citées – les petites et moyennes entreprises, mais surtout les collectivités, qui ont également été sollicitées dans des délais très contraints.

S’agissant de la mise en œuvre des fonds européens et du plan de relance dans les territoires, la méthode portée par Jacqueline Gourault a fait l’objet d’un accord conclu entre l’État et les régions en juillet 2020.

Les régions doivent coordonner cette action pour l’amplifier. Elles jouent un rôle majeur dans la bonne utilisation du plan de relance et des fonds européens dans les territoires. Il est prévu de resserrer le dialogue au niveau local, en systématisant notamment les comités de financeurs.

Par ailleurs, de nouveaux guides, notamment sur l’articulation des fonds européens avec le plan de relance, ont été édités ou sont en cours de diffusion pour aider les territoires à mobiliser pleinement et de manière optimale ces financements européens.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique.

M. Jacques Fernique. Madame la secrétaire d’État, dans le Pacte vert pour l’Europe, les transports ont un potentiel important. Les mobilités représentent le quart des émissions de l’Union, et cette part ne cesse d’augmenter.

Pour une transition des mobilités, la démarche du Pacte vert nécessite d’articuler le cadrage européen, les déclinaisons territoriales et une volonté politique nationale, bien sûr déterminante. C’est là ma question : notre pays est-il plutôt un frein ou joue-t-il vraiment un rôle moteur pour accélérer et généraliser cette transition vers une mobilité durable, autant par ses politiques nationales que par son action au Conseil européen ?

Où en sommes-nous du transfert modal vers le rail ? Notre pays ne compte pas parmi les bons élèves de l’Union. Les discours sur ce sujet sont bons, mais les investissements et les programmations opérationnelles ne le sont pas. Ainsi, 2021 est l’année européenne du rail : la TVA à 5,5 % pour les billets de train serait une façon de nous inscrire dans ce mouvement.

Des politiques seront nécessaires pour faire évoluer les tarifications des transports. Où en sommes-nous ? Les exonérations relatives aux carburants d’aviation ont fait de l’Union européenne un paradis fiscal pour le kérosène. On sait que la Commission a sous le coude une étude estimant qu’une taxation du kérosène réduirait les émissions de 11 % sans entraîner d’effets négatifs sur l’économie.

S’agissant du ciel unique européen, les avancées majeures attendues depuis tant d’années et les diminutions substantielles des émissions qui devaient en résulter arriveront-elles enfin ?

Enfin, où en sommes-nous sur la contribution du transport routier de marchandises ? Non seulement notre pays traîne indéfiniment à mettre en place un dispositif pollueur-payeur qui fasse vraiment levier, mais il freine aussi, semble-t-il, une harmonisation européenne ambitieuse.

Pour que toutes les intentions du Pacte vert pour l’Europe ne restent pas lettre morte, j’espère que le Conseil des ministres européens des transports de demain saura surmonter les obstacles, et que les positions de la France n’en constitueront pas de nouveaux.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Fernique, les préoccupations que vous évoquez sont au cœur des travaux du Conseil, mais également de nos politiques nationales.

Le report modal est au centre de la politique défendue par le ministre Djebbari. En tant qu’ancienne rapporteure de la loi d’orientation des mobilités (LOM), nous avons ardemment travaillé – vous le savez – sur cette question. On constate aujourd’hui les premiers résultats de cette nouvelle politique de report modal, notamment vers le rail.

La Commission européenne travaille également sur les énergies renouvelables, sur tous les domaines qui pourront avoir un impact sur la performance en matière d’émissions de CO2 des véhicules légers, et elle a révisé l’ambition du texte sur l’évolution du système européen d’échange de quotas.

Toutes ces politiques doivent absolument participer à l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % par rapport à 1990. Trouver un accord sur certaines de ces propositions sera l’une des priorités de la présidence française, au début de 2022.

Dans le cadre du Green Deal, la Commission a également lancé la vague de rénovations des bâtiments. Au-delà des transports, la rénovation énergétique est aussi un levier important d’action auquel nous sommes très attachés. Ce sujet figure dans le plan de relance européen comme dans le plan de relance national.

L’initiative comporte en outre un volet législatif relatif à la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Le Gouvernement a déjà largement étudié les enjeux de ces textes et il a établi un document recensant les positions françaises sur les principaux leviers.

Nous intensifierons notre action par la publication d’un paquet législatif, auquel nous serons très attentifs, qui permettra de réformer le marché intérieur du gaz pour mieux l’adapter au gaz renouvelable et décarboné.

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour la réplique.

M. Jacques Fernique. Madame la secrétaire d’État, une façon claire de marquer la volonté de notre pays d’être moteur de la transition pour des mobilités décarbonées et durables est à votre portée : c’est le projet de loi Climat et résilience.

Il est encore temps de revoir votre copie avec l’aide du Sénat et d’inscrire dans le texte un engagement fort pour le rail, la TVA à 5,5 % et le financement de la décarbonation par le principe pollueur-payeur, tant pour l’aérien que pour la route.

M. le président. La parole est à M. André Gattolin.

M. André Gattolin. Madame la secrétaire d’État, ma question part d’un double constat.

Le premier a notamment été évoqué par Mme Lavarde lors de son intervention préalable : les investissements consacrés au niveau européen, tant dans le cadre financier pluriannuel que dans le plan de relance, à l’environnement et à la transformation écologique sont certes élevés, mais ils peuvent sembler relativement faibles au regard des ambitions actuellement affichées.

Le second constat est que, malheureusement, les politiques sectorielles et structurelles européennes ont souvent tendance à fonctionner en silos. On relève des difficultés d’articulation, voire des contradictions, entre ce qui est investi dans un secteur et ce qui l’est dans un autre.

On parle depuis plusieurs cadres financiers pluriannuels du verdissement de la PAC, un objectif qui a été très long à mettre en œuvre. Je souhaite souligner que nous aurons des opportunités, au travers des investissements importants qui seront réalisés dans les années à venir en matière de transformation numérique de la société, d’évoluer vers une agriculture plus efficiente, appelée, en très mauvais français, Smart Farming.

Cette expression a été stupidement traduite par les termes d’« agriculture intelligente », comme si l’agriculture traditionnelle était bête, alors qu’il serait préférable de parler « d’agriculture de précision ». Il reste que par l’usage des moyens numériques et de la cartographie par drone, on parvient assez facilement à réduire de 30 % l’usage des intrants sur certains sols, notamment dans la viticulture, et qu’on peut également limiter le recours à l’irrigation.

Au niveau européen, 3,7 milliards d’euros d’investissements privés et publics se sont portés l’an passé sur les start-up de l’alimentaire ou de l’agriculture. Ce montant peut paraître élevé, mais il n’est pas suffisant. Quels sont les moyens qui, dans le cadre du Pacte vert et du budget européen, pourraient être alloués au développement d’une meilleure efficience écologique, mais aussi productive de notre agriculture ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur Gattolin, je vous rejoins sur la nécessité de décloisonner et d’arrêter de fonctionner en silos – sans mauvais jeu de mots par rapport au sujet agricole.

Nous devons faire en sorte que les outils soient mis à la portée de tous afin que chacun puisse s’en saisir, avec quelques précautions évidentes que nous allons évoquer. Ce décloisonnement et cette massification sont au cœur du Green Deal. Aujourd’hui, la disruption ne réside plus dans la rupture technologique : on connaît les outils, il faut maintenant les développer et les rendre accessibles à tous.

Dans l’agriculture, le numérique a ouvert des possibilités pour mieux connaître, analyser, et optimiser – vous l’avez dit – les apports en intrants. L’agriculture doit être compétitive tout en réduisant son impact sur l’environnement ; c’est bien notre défi commun. Il s’agit, non pas de rompre avec certaines pratiques, mais simplement d’accompagner l’agriculture dans ces nouveaux enjeux, avec en plus, à la clé, une réduction – appréciable – de la pénibilité.

Tout cela doit conduire à un apport dans la chaîne de valeur, à une optimisation logistique, à une traçabilité sanitaire, à une différenciation en termes de qualité et à davantage d’échanges d’informations entre producteurs et consommateurs – autant d’éléments qui sont également très positifs.

Le volet agriculture collaborative et circulaire doit permettre de retisser la connexion, le lien, entre les agriculteurs, en encourageant les partages, extrêmement appréciés, de bonnes pratiques, d’informations et de savoirs.

Vous l’avez dit, les logiques agroécologiques sont au service même de la gestion de la ressource : elles nous permettent d’irriguer en préservant les ressources en eau ou de traiter les parasites par des méthodes plus saines pour l’environnement. Ces objectifs très ambitieux sont nécessaires.

Le numérique doit être mis au service de cette recherche de progrès, mais cela doit se faire dans le respect de la diversité des modes de production et surtout, de la souveraineté des données. Nous devons faire face à ce double défi : d’une part, la mise à disposition et le partage des données agricoles, des connaissances scientifiques et des technologies numériques et, d’autre part, la préservation de la confidentialité des données, qui doit être garantie – je pense notamment aux données relatives aux relations commerciales des agriculteurs.

Des projets plus spécifiques, qui sont également très intéressants, sont développés en parallèle en France, tels que le projet Numagri, ou l’Agdatahub, une plateforme sécurisée d’échange de données agricoles qui se développe en permettant aux agriculteurs de sécuriser et de maîtriser leurs données.

M. le président. Il faut conclure, madame la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat. Dans le cadre de la future PAC, des outils numériques occuperont une place importante. Je pense également aux services de conseil dans les systèmes de connaissances et d’information agricole Akis.

M. le président. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’invite chacun d’entre vous à respecter son temps de parole.

La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.

M. Jean-Michel Arnaud. Je vais m’attacher à respecter mon temps de parole, monsieur le président.

Madame la secrétaire d’État, je souhaite insister principalement sur l’impact que peut avoir ce Pacte vert pour les PME et les TPE dans nos territoires. Nous constatons régulièrement que nos collectivités, mais aussi nos entreprises, ont de grandes difficultés de compréhension des modes d’éligibilité et d’accès aux aides européennes.

J’ai en tête deux entreprises de mon département : Acanthis, spécialisée dans la cosmétique, la gestion végétale et la transformation végétale en produits industriels, et Beringer, qui fabrique des trains d’atterrissage pour les petits aéronefs.

Ces entreprises attendent le Pacte vert car elles ont besoin de moyens financiers pour pouvoir agir et faciliter leur contribution à la transition écologique et climatique, et surtout, pour satisfaire leurs clients et leurs donneurs d’ordre. Comment envisagez-vous concrètement que des TPE dans des territoires de province puissent accéder, dans de bonnes conditions, aux financements du Pacte vert, en lien avec le plan de relance porté par le Gouvernement ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire dÉtat auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, je fais plus qu’envisager cet objectif, je le vis au quotidien comme vous – j’en suis certaine –, vous le vivez en tant que parlementaire.

Nous avons au quotidien, pour la mise en œuvre et le déploiement des moyens du plan de relance, des contacts avec les chambres de commerce et d’industrie (CCI), les préfets et tous les acteurs de la vie locale. Au sein de ces lieux d’échanges, dans l’urgence de la crise sanitaire et pour répondre à l’impératif d’une nécessaire réaction économique, nous avons vu naître de belles rencontres et des partenariats. Certaines entreprises qui n’étaient pas forcément dans le radar – si j’ose dire – bénéficient aujourd’hui d’un accompagnement et de moyens, à la fois d’urgence et de transition de leur outil industriel.

Cette dynamique est, je le crois, pleinement mise en œuvre. De nouveau, je remercie tous les acteurs qui se sont engagés au quotidien, depuis maintenant plus d’un an, dans l’accompagnement des entreprises et des commerçants qui risquaient, et risquent encore, de subir de plein fouet économiquement la crise sanitaire que nous connaissons mais qui, heureusement, et c’est tout l’enjeu de cette résilience, peuvent bénéficier de ces moyens pour rediriger leur activité.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.

M. Jean-Michel Arnaud. Je vous remercie d’avoir rappelé ces considérations générales, madame la secrétaire d’État.

La réalité est que, dans nos territoires, le plan de relance, tel qu’il a été mis en œuvre, ne se traduit pas concrètement par des engagements auprès de certaines entreprises. Nous rencontrons ainsi des blocages avec les Dreal, et les chefs d’entreprise qui souhaitent investir pour se positionner sur leur marché, en lien avec les financements du plan de relance, peinent à obtenir des réponses concrètes à leurs demandes.

Je ne manquerai pas de me rapprocher de votre cabinet, madame la secrétaire d’État, pour signaler certaines situations précises, dans ma région.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 12 mai dernier, la Commission européenne a adopté un plan d’action intitulé « Vers une pollution zéro dans l’air, l’eau et les sols ».

Au travers de ce plan, on ambitionne de parvenir, d’ici à 2050, à un monde dans lequel la pollution serait réduite à des niveaux inoffensifs pour la santé humaine et pour les écosystèmes naturels, en réduisant la pollution des sols et en améliorant la restauration de ceux-ci. Mon intervention portera sur ce point.

À la suite du Parlement européen, qui a adopté, le 28 avril dernier, une résolution sur la protection des sols, nous sommes plusieurs sénateurs à avoir déposé, voilà quelques jours, une proposition de résolution européenne tendant à demander la relance du processus d’élaboration d’une directive européenne sur la protection des sols et la prévention de la dégradation de ces derniers par les activités industrielles et minières.

Au travers de cette proposition de résolution européenne, nous mettons en évidence le fait que l’Europe est l’une des régions de la planète où les terres sont le plus mal en point, que, même si la protection de l’eau et de l’air a fait l’objet de directives spécifiques et précoces, le cadre réglementaire européen sur la pollution des sols fait cruellement défaut, après l’abandon, en 2014, de la directive de 2006, et que, aujourd’hui, un cadre politique global et cohérent à l’échelle de notre continent s’impose.

La commission sénatoriale d’enquête sur la pollution des sols post-activités industrielles et minières a pu le souligner, la pollution des sols ne peut être réduite à des problèmes territoriaux circonscrits ; elle exige une mobilisation nationale et supranationale, afin de poser les jalons d’un véritable droit national et européen de la protection des sols.

Madame la secrétaire d’État, comptez-vous faire valoir cette position – que dis-je, porter cette impérieuse nécessité dans les négociations en cours ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.