Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 208.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2 bis, modifié.

(Larticle 2 bis est adopté.)

Article 2 bis
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Article 2 ter

Article additionnel après l’article 2 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 2 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 4° de l’article L. 2242-17 du code du travail, après les mots : « accès à », sont insérés les mots : « la prévention de la désinsertion professionnelle des salariés ainsi qu’à ».

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement a pour objet de reprendre la recommandation n° 7 du rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) de décembre 2017 sur la prévention de la désinsertion professionnelle, en intégrant dans la négociation annuelle d’entreprise sur la qualité de vie au travail les mesures permettant de prévenir la désinsertion professionnelle des travailleuses et des travailleurs.

Les actions de maintien dans l’emploi ou en emploi ont pour objectif de permettre à des personnes dont le handicap ou les problèmes de santé restreignent l’aptitude professionnelle à rester en activité ou à reprendre leur activité dès consolidation, soit par un aménagement de leur emploi soit par un changement d’activité ou d’emploi.

Les estimations font état d’une fourchette située entre un et deux millions de salariés menacés à court ou moyen terme par un risque de désinsertion professionnelle, soit 5 à 10 % des salariés. C’est énorme !

Derrière la question de la désinsertion professionnelle se pose celle de l’aptitude professionnelle : actuellement, les salariés les plus concernés sont globalement moins qualifiés et plus âgés que les autres, les métiers ouvriers et des secteurs sanitaires et sociaux étant surreprésentés.

Si le Gouvernement a repris la recommandation de la mission préconisant de mieux définir les ambitions d’une politique de prévention de la désinsertion professionnelle, nous ne comprenons pas pourquoi celle-ci n’a pas été retenue en totalité. En effet, l’IGAS proposait en même temps d’adopter une vision globale orientée vers la sécurisation des parcours professionnels en renvoyant vers la négociation collective et les services de santé au travail. Tel est l’objet de notre amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Stéphane Artano, rapporteur. Le code du travail prévoit que la négociation d’entreprise, lorsqu’elle s’inscrit dans le cadre des dispositions supplétives dudit code, porte obligatoirement sur l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés. Ce thème inclut donc déjà la prévention de la désinsertion professionnelle.

Cet amendement, de notre point de vue, est satisfait. J’en demande donc retrait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire dÉtat. Le maintien dans l’emploi – je préfère cette terminologie – est au cœur de cette proposition de loi ; nous allons y revenir. Et mon sentiment est que nous allons tous y trouver notre compte.

De ce point de vue, la demande de retrait me paraît plus adaptée qu’un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Je veux bien me laisser convaincre par les arguments qui viennent d’être exposés ; en revanche, monsieur le secrétaire d’État, je doute que nous nous retrouvions toutes et tous dans cette proposition de loi.

En l’occurrence, les arguments de M. le rapporteur et les vôtres nous ont néanmoins convaincues, Cathy Apourceau-Poly et moi-même ; je retire donc notre amendement. (M. Jean-Pierre Corbisez applaudit.)

Mme Cathy Apourceau-Poly. C’est assez rare pour être souligné !

Mme la présidente. L’amendement n° 90 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 2 bis - Amendement n° 90 rectifié
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Article 3

Article 2 ter

La quatrième partie du code du travail est ainsi modifiée :

1° L’article L. 4412-1 est complété par les mots : « , en tenant compte des situations de polyexpositions » ;

2° L’article L. 4624-2-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « médicale, », sont insérés les mots : « dans les meilleurs délais après la cessation de l’exposition ou, le cas échéant, » ;

b) La seconde phrase du deuxième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « S’il constate une exposition du travailleur à certains risques dangereux, notamment chimiques, mentionnés au a du 2° du I du même article L. 4161-1, le médecin du travail met en place une surveillance post-exposition ou post-professionnelle, en lien avec le médecin traitant et le médecin conseil des organismes de sécurité sociale. Cette surveillance tient compte de la nature du risque, de l’état de santé et de l’âge de la personne concernée. »

Mme la présidente. L’amendement n° 199, présenté par MM. Lévrier, Iacovelli, Théophile, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand, Mohamed Soilihi, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Alinéas 3 à 5

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Cet article, inséré en commission par l’Assemblée nationale, vise à prendre en compte les situations de polyexpositions pour les travailleurs exposés à des risques chimiques.

Lors de l’examen de ce texte par la commission des affaires sociales du Sénat, certaines modifications ont été adoptées afin de prévoir que la visite post-exposition ait lieu dans les meilleurs délais après la cessation de l’exposition, et non plus seulement avant le départ à la retraite.

Or le suivi individuel renforcé permet déjà d’assurer un suivi médical périodique pour les salariés exposés à des risques. Le médecin délivre alors un avis d’aptitude ou d’inaptitude, et propose à l’employeur des mesures individuelles telles qu’une mutation ou une transformation de poste.

Le temps consacré aux visites et aux examens médicaux, y compris les examens complémentaires, est bien évidemment compris dans les heures de travail du salarié sans qu’aucune retenue de salaire ne puisse être opérée, ou est rémunéré comme temps de travail effectif lorsque ces examens ne peuvent pas avoir lieu pendant les heures de travail.

Afin d’éviter que ces nouvelles dispositions ne fassent doublon avec les mesures déjà existantes et afin de garantir la lisibilité de la loi, cet amendement tend à supprimer les alinéas prévoyant ce suivi post-cessation d’exposition.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Stéphane Artano, rapporteur. De notre point de vue – je suis navré de le dire ainsi –, les auteurs de cet amendement confondent deux éléments. Le suivi individuel renforcé, dont bénéficie le travailleur exposé à des risques particuliers, notamment chimiques, couvre toute sa période d’exposition ; le suivi post-exposition vise, quant à lui, à surveiller l’état de santé du travailleur après la cessation de cette exposition.

Le suivi post-exposition s’inscrit dans la continuité du suivi individuel renforcé : il n’intervient donc pas en doublon de celui-ci. Supprimer la possibilité pour le médecin du travail d’engager une surveillance de l’état de santé du travailleur après la cessation de l’exposition priverait le travailleur d’actions de prévention, notamment de dépistage, contre des pathologies différées.

Du reste, ce suivi post-exposition s’inscrit dans la même logique que la surveillance post-professionnelle, introduite par le Sénat en 2018 sur l’initiative de notre collègue Alain Milon, qui intervient avant le départ à la retraite des travailleurs exposés à des risques dangereux pour la santé.

Il est dommage, en revanche, que, trois ans après l’inscription de ce dispositif dans la loi, celui-ci ne soit toujours pas mis en œuvre, faute de publication de textes d’application – mais, visiblement, les choses seraient en préparation…

J’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire dÉtat. Je rebondis sur les propos de M. le rapporteur, qui soulignait un point important en faisant allusion à l’engagement que j’ai pris devant l’Assemblée nationale.

La proposition que porte le sénateur Lévrier consiste à rétablir la rédaction initiale de l’article 2 ter, qui prévoit notamment cette visite avant le départ à la retraite – nous en voyons tous l’intérêt.

Ce qui manque, aujourd’hui, c’est le décret d’application. Je me suis engagé devant l’Assemblée nationale à ce qu’il soit publié à court terme. Les choses avancent et vont aboutir dans les semaines qui viennent ; d’où mon soutien à l’amendement du sénateur Lévrier.

J’émets un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Je suis quelque peu surprise par cet amendement : le suivi post-exposition à des risques dangereux est une avancée tangible et concrète pour les salariés les plus exposés à des risques professionnels.

Ce suivi est également important du point de vue de la lutte contre les inégalités au travail, car on sait bien que l’inégalité se traduit, en l’espèce, par des écarts d’espérance de vie, et surtout d’espérance de vie en bonne santé, extrêmement significatifs entre les différentes catégories socioprofessionnelles.

Nous sommes donc évidemment opposés à l’amendement de M. Lévrier.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 199.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2 ter.

(Larticle 2 ter est adopté.)

Article 2 ter
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Article 4

Article 3

Le chapitre Ier du titre IV du livre Ier de la quatrième partie du code du travail est complété par un article L. 4141-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 4141-5. – L’employeur renseigne dans un passeport de prévention les attestations, certificats et diplômes obtenus par le travailleur dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail dispensées à son initiative. Les organismes de formation renseignent le passeport selon les mêmes modalités dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail qu’ils dispensent. Le travailleur peut également inscrire ces éléments dans le passeport de prévention lorsqu’ils sont obtenus à l’issue de formations qu’il a suivies de sa propre initiative.

« Lorsque le travailleur dispose d’un passeport d’orientation, de formation et de compétences prévu au second alinéa du II de l’article L. 6323-8, son passeport de prévention y est intégré. Il est mis en œuvre et géré selon les mêmes modalités.

« Le travailleur peut autoriser l’employeur à consulter l’ensemble des données contenues dans le passeport de prévention, y compris celles que l’employeur n’y a pas versées, pour les besoins du suivi des obligations de ce dernier en matière de formation à la santé et à la sécurité, sous réserve du respect des conditions de traitement des données à caractère personnel prévues à l’article 4 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Un demandeur d’emploi peut ouvrir un passeport de prévention et y inscrire les attestations, certificats et diplômes obtenus dans le cadre des formations qu’il a suivies dans les domaines de la santé et de la sécurité au travail.

« Les modalités de mise en œuvre du passeport de prévention et de sa mise à la disposition de l’employeur sont déterminées par le comité national de prévention et de santé au travail et approuvées par voie réglementaire. En l’absence de décision du comité à l’issue d’un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … pour renforcer la prévention en santé au travail, ces modalités sont déterminées par décret en Conseil d’État. »

Mme la présidente. L’amendement n° 52, présenté par Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 3 prévoit la création d’un « passeport de prévention » qui retracera les formations, y compris obligatoires, que les travailleurs et travailleuses ont effectuées dans le domaine de la sécurité et de la prévention des risques professionnels ainsi que les attestations, certificats et diplômes obtenus dans ce cadre.

L’existence d’un tel document suscite des craintes chez les professionnels comme chez certains partenaires sociaux, qui s’interrogent sur ses finalités, au-delà de l’intérêt de la traçabilité des formations continues suivies par le salarié.

En effet, si chaque entreprise a par définition connaissance des formations qu’elle organise, il est de la libre décision de chaque salarié de porter à la connaissance d’un de ses employeurs l’ensemble des formations suivies au cours de son parcours professionnel comme de consentir à la transmission des informations qui font l’objet de ce passeport. Mais le refus d’en permettre l’accès peut engendrer un risque de discrimination, à l’embauche notamment.

Par ailleurs, s’agissant de la volonté de créer un tel passeport – pour aller où ? –, la crainte ne peut être écartée d’un report de la responsabilité de l’employeur sur le salarié en cas d’accident, au motif que le salarié était informé d’un risque ou formé à la sécurité, y compris par le biais de formations suivies antérieurement à sa prise de poste.

Ces risques sont à mettre en regard d’une utilité très limitée par rapport aux dispositifs existants : tout salarié, s’il le souhaite, peut d’ores et déjà mentionner des formations à son employeur et, le cas échéant, fournir ses certificats ou attestations.

Nous proposons donc de supprimer cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Stéphane Artano, rapporteur. La création du passeport de prévention est une mesure clé de l’ANI, qui a été voulue par la quasi-totalité des partenaires sociaux, à notre connaissance en tout cas.

Le passeport de prévention est précisément conçu comme un outil au service d’une meilleure prévention en matière de santé au travail. Renforçant la traçabilité des formations en santé et en sécurité suivies par le travailleur, il doit permettre d’objectiver les moyens consentis par l’employeur pour accompagner son salarié.

J’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire dÉtat. Cette question a déjà été évoquée précédemment.

Je vous le dis d’expérience, expérience dont je n’ai ici nullement le monopole, je le sais : ce n’est pas parce que vous invitez votre salarié à se former sur les sujets de sécurité et de santé au travail que vous vous déresponsabilisez en tant qu’employeur. Il me semble que les salariés, lorsqu’ils ont connaissance des formations auxquelles ils peuvent avoir accès, en sont au contraire demandeurs – nous sommes probablement tous d’accord là-dessus.

Ce passeport permet précisément une lisibilité des formations, lesquelles peuvent être d’ailleurs, dans certaines entreprises et au regard de certaines conventions collectives, des formations qualifiantes, auxquelles sont indexés des niveaux de rémunérations spécifiques.

Ces éléments sont donc très positifs. La sécurité et la santé au travail, c’est la responsabilité de l’employeur, mais c’est aussi l’affaire de tous ! Quand on est salarié – vous le savez, madame la sénatrice, et vous l’avez dit –, on est acteur de sa sécurité et de celle de ses collègues.

J’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 52.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 141, présenté par Mme Poumirol, MM. Jomier et Kanner, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin et Rossignol, MM. Tissot, Bourgi et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

1° Première et dernière phrases

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé sécurité

2° Deuxième phrase

Remplacer le mot :

passeport

par le mot :

livret

II. – Alinéa 3, première phrase

1° Remplacer les mots :

Lorsque le travailleur dispose d’un

par les mots :

Le livret de formation santé sécurité intègre le

2° Supprimer les mots :

, son passeport de prévention y est intégré

III. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L’existence du livret de formation santé sécurité ne peut se substituer à l’obligation de prévention définie à l’article L. 4121-1, de donner des instructions appropriées au travailleur définie à l’article L. 4121-2 et d’évaluation des risques définie à l’article L. 4121-3.

IV. – Alinéa 4

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé sécurité

V. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

VI. – Alinéa 6

1° Première phrase

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé et sécurité

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

de six mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … pour renforcer la prévention en santé au travail

par les mots :

déterminé par décret

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Nous souhaitons remplacer, en chacune de leurs occurrences, les termes « passeport de prévention » par les termes « livret de formation santé et sécurité ».

Il ne s’agit pas là d’un simple accès de fantaisie sémantique. En effet, l’inspiration qui préside à la création du passeport de prévention pourrait conduire, en matière d’organisation du travail et d’amélioration des conditions de travail, dont l’employeur doit rester le garant, à un glissement de la sécurité collective vers une responsabilité individuelle du travailleur, celui-ci étant censé se former pour s’adapter à des conditions de travail éventuellement néfastes pour sa santé.

On assiste ainsi à une inversion de la logique et de la démarche de prévention, celle-ci consistant à agir prioritairement sur les conditions de travail et l’organisation du travail.

Telle est notre crainte : celle d’un glissement de responsabilité. L’instauration d’un livret de formation ne peut suffire à lever les responsabilités de l’employeur en matière de santé au travail. La satisfaction de ces obligations de formation et la consignation dans le livret des documents l’attestant ne sauraient dédouaner l’employeur.

Mme la présidente. L’amendement n° 53, présenté par Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian, M. Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2, première et dernière phrases, alinéa 3, première phrase, alinéas 4, 5 et alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé sécurité

II. – Alinéa 2, deuxième phrase

Remplacer le mot :

passeport

par le mot :

livret

III. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« L’existence du livret de formation santé sécurité ne peut se substituer à l’obligation de prévention définie à l’article L. 4121-1, de donner des instructions appropriées au travailleur définie à l’article L. 4121-2 et d’évaluation des risques définie à l’article L. 4121-3.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement est similaire au précédent ; il nous a été inspiré par le collectif Prévention AT-MP, qui a été auditionné. Il s’agit de renommer le passeport de prévention « livret de formation santé sécurité » afin de lever toute ambiguïté quant à la responsabilité personnelle de l’employeur.

En effet, l’intitulé « passeport de prévention » présente deux limites aux yeux des membres de ce collectif.

Tout d’abord, il ne rend pas compte du contenu du document créé à l’article 3 de la proposition de loi : ce document comprend uniquement des attestations, certificats et diplômes obtenus par le salarié dans le cadre de formations relatives à la santé et à la sécurité au travail, que celles-ci aient été dispensées par l’employeur ou par un organisme de formation, que le salarié les ait ou non suivies de sa propre initiative. De ce fait, le terme « livret de formation santé sécurité » paraît plus approprié et largement suffisant.

Ensuite – cela a été rappelé –, nous craignons que l’intitulé « passeport de prévention » ne participe d’une logique de transfert d’une partie de la responsabilité de l’employeur vers le salarié. Si chacun est acteur en matière de santé, tous n’ont pas le même pouvoir d’organisation, et certains n’en ont pas du tout !

Il y a une différence entre les formations relatives au travail prescrit et le travail réel. Dans ce dernier domaine, c’est l’employeur qui doit rester seul responsable puisque seul il dispose du pouvoir d’organisation.

Le collectif Prévention AT-MP alerte sur un risque d’instrumentalisation du passeport de prévention visant à faire porter une partie de la responsabilité sur le salarié alors même que, subordonné, il n’a aucun pouvoir d’organisation. Quand on dit qu’il est « acteur de sa prévention » au même titre que l’employeur, c’est bien cette situation de subordination qui est niée : il n’a aucun pouvoir d’organisation sur le travail réel.

De nouveaux dispositifs étant créés, il convient de réaffirmer explicitement la responsabilité personnelle de l’employeur quant à la protection de la santé et de la sécurité des salariés. C’est lui, l’employeur, qui doit veiller à l’effectivité de l’application des règles de sécurité, les obligations de formation et d’information ne correspondant qu’à une partie de l’obligation qui lui incombe en matière de mesures de prévention, selon l’article L. 4121-1 du code du travail.

S’il arrive, d’ailleurs, que la responsabilité disciplinaire du salarié soit engagée, cette responsabilité est toujours recherchée après la responsabilité personnelle, civile et pénale de l’employeur, qui doit veiller à l’effectivité de l’application des règles de sécurité.

Mme la présidente. L’amendement n° 99, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

1° Première et dernière phrases

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé sécurité

2° Deuxième phrase

Remplacer le mot :

passeport

par le mot :

livret

II. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le livret de formation santé sécurité ne peut se substituer à l’obligation de prévention définie à l’article L. 4121-1, de donner des instructions appropriées au travailleur définie à l’article L. 4121-2 et d’évaluation des risques définie à l’article L. 4121-3.

III. – Alinéa 4

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé sécurité

IV. – Alinéa 6, première phrase

Remplacer les mots :

passeport de prévention

par les mots :

livret de formation santé sécurité

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement nous a également été suggéré par le collectif Prévention AT-MP, qui regroupe des salariés syndiqués et non syndiqués des services de prévention des Carsat, de la caisse nationale de la sécurité sociale, de la caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France (Cramif), ainsi que de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Ce collectif dénonce une déresponsabilisation des employeurs et une régression historique dans le champ de la prévention des risques professionnels, dont le fondement juridique serait profondément remis en cause.

En effet, sous réserve qu’il réponde à un protocole, l’employeur sera quasiment déchargé de ses obligations à l’égard de la santé de ses salariés, sa responsabilité en la matière étant réduite et transférée au travailleur lui-même ou aux services de santé au travail.

Depuis 2002, la jurisprudence constante donnait à l’employeur une obligation de sécurité de résultat, cette obligation découlant elle-même de la combinaison de deux obligations : prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé des salariés, et évaluer les risques professionnels. Deux jugements, en 2015 et en 2016, ont relativisé cette jurisprudence en transformant l’obligation de sécurité de résultat de l’employeur en obligation de moyens.

La création du passeport de prévention laisse penser que les actions de formation et d’information menées par l’employeur lui suffisent à accomplir sa mission de prévention des risques. Pourtant, les obligations de formation et d’information ne correspondent qu’à une partie seulement de l’obligation qui incombe à l’employeur en matière de mesures de prévention.

Ce livret de formation ne saurait suffire à lever les responsabilités de l’employeur en matière de santé au travail.

Mme la présidente. L’amendement n° 11 rectifié quater, présenté par MM. Mouiller et Favreau, Mme Deromedi, MM. D. Laurent, Bonhomme, Chatillon, Daubresse, Cambon et B. Fournier, Mme Demas, MM. Savin et Savary, Mme Canayer, M. Lefèvre, Mme Belrhiti, MM. Bouloux, Milon et Brisson, Mme Malet, M. Rapin, Mmes Di Folco, Imbert, L. Darcos, Garriaud-Maylam et Dumont, MM. Pointereau et Genet, Mme M. Mercier et MM. Husson et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Philippe Mouiller.