M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui vise un objectif louable, la prise en compte du sort et du devenir des activités associatives qui, à la suite de la crise de la covid-19, pâtissent d’un essoufflement notable du nombre de bénévoles et d’adhérents.

Le dynamisme du monde associatif est un indicateur de la volonté d’engagement social et solidaire des citoyens, et ce texte a la vertu de poser la question de la manière dont nous pourrions envisager de lui donner un nouveau souffle, afin d’éviter que la démobilisation ne perdure.

La valeur de l’engagement associatif est précieuse, et la société que nous devrons reconstruire après cette crise ne doit pas laisser sur le bord de la route ce formidable secteur, pilier indispensable du tissu communautaire, vecteur de lien social et de solidarité.

Il faut nous en saisir ! Il est l’expression de l’engagement de chacun pour le bien commun au service de l’intérêt général.

Il symbolise la liberté de se réaliser, celle d’être utile aux autres en donnant de son temps, mais aussi de lutter contre l’isolement. Cette liberté, cette ouverture et cette possibilité de se construire ou de se reconstruire dans le cadre du monde associatif sont des valeurs suffisamment rares pour qu’elles méritent d’être encouragées, car elles restent aujourd’hui l’un des nobles moyens de prouver son engagement citoyen.

Pour toutes ces raisons, les réponses apportées doivent être justes et réellement incitatives.

Cependant, s’il est ici proposé de soutenir les associations en encourageant les dons et adhésions à travers une réduction d’impôt, le dispositif ne répond que très partiellement à leurs nécessités vitales, et risque d’aggraver les inégalités sociales et territoriales.

S’il est vrai que 20 % des associations ont besoin d’une aide financière exceptionnelle, leurs sujets d’inquiétude principaux se situent ailleurs. L’enjeu capital et nécessaire à leur survie reste, pour 68 % d’entre elles, de renouer avec leurs adhérents et, pour 38 % d’entre elles, de mobiliser les bénévoles. S’il est donc important d’envisager un soutien financier rapide à certaines associations, l’enjeu majeur est de ressusciter le lien avec ceux qui les font vivre.

En outre, il convient de rappeler que, en France, seuls 43 % des foyers fiscaux sont redevables de l’impôt sur le revenu. Ainsi, plus de la moitié des foyers ne seraient pas concernés par le dispositif proposé. Les effets positifs escomptés par le présent texte profiteraient surtout aux associations soutenues par des ménages relativement aisés.

Toute réduction d’impôt pour les ménages les plus aisés se traduit, en l’absence d’une compensation fiscale équivalente, par une réduction du service public ou des politiques de redistribution, et se traduit immanquablement par le creusement des inégalités et l’augmentation du taux de pauvreté. En conséquence, les pauvres paieraient le soutien des plus aisés à leurs associations !

Le rôle de l’État est pourtant de réunir les conditions pour que les citoyens et citoyennes puissent s’impliquer dans leurs associations. Voilà le vrai enjeu.

Reprécisons : la remobilisation des bénévoles dépend avant tout de l’amélioration de la conjoncture économique et de la situation sanitaire. Refaire vivre l’engagement au cœur du monde associatif, c’est assurer plus de sécurité financière aux ménages, c’est dissiper leur inquiétude du lendemain.

Or, ne nous leurrons pas, le spectre de la réforme des retraites, conjugué à celui de la réforme de l’assurance chômage, est un coup de poignard dans le dos des associations. Nous croyons sincèrement que des mesures fortes, comme le revenu d’existence ou la réduction du temps de travail, sont plus que jamais nécessaires. C’est ce que nous appelons de nos vœux.

Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons de voter ce texte qui, s’il a le mérite de soulever des questions essentielles, ne contribue pas à résoudre la question de fond, sur laquelle nous attendons un engagement réel de l’État, qui s’enferre et s’obstine dans des politiques publiques contre-productives, et toujours au détriment des plus pauvres.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme je l’ai dit en commission, cette proposition de loi a le mérite de nous inciter à nous interroger sur la situation de la vie associative.

Nous avons pu, avec nos collègues de la commission de la culture, et en nous appuyant sur les représentants du secteur, dresser un état des lieux après ces dix-huit mois de crise sanitaire. Arrêt des activités, annulation des événements et perte de bénévoles mettent aujourd’hui les associations dans une situation extrêmement tendue.

S’il faut mettre à l’honneur l’engagement des collectivités territoriales et le maintien des dons, et reconnaître l’intervention de l’État, les trous dans la raquette sont trop nombreux pour s’en satisfaire.

D’après les deux dernières enquêtes du mouvement associatif, 30 000 associations sont considérées comme en péril et 55 000 associations employeuses envisagent de réduire leurs effectifs, ou ont déjà procédé à des suppressions d’emplois. La reprise des activités, permise ces derniers mois, a par ailleurs montré la difficulté pour les associations d’attirer de nouveaux adhérents et bénévoles.

Au regard de ces éléments, nous ne pouvons donc nous satisfaire de la situation. Nous devons surtout nous interroger sur le modèle de soutien tel qu’il est mis en place. Pouvons-nous continuer, par exemple, à voir plus de 80 % des crédits consacrés au programme « Jeunesse et vie associative » vampirisés, si j’ose dire, par le service civique et le service national universel ? La plus-value sociale de ces deux dispositifs est somme toute restreinte, et le premier a montré de très nombreuses limites. J’ai d’ailleurs pu voir hier que le dispositif du revenu d’engagement semblait être enterré…

Plus largement, pouvons-nous nous satisfaire d’un soutien étatique aux associations qui passe plus largement par un abandon de recettes via la défiscalisation des dons ? On connaît tous les biais que cela crée… La proposition de loi qui nous est soumise créerait, excusez du terme, une concurrence entre les associations bénéficiant de la déduction à 66 % et celles bénéficiant de la déduction à 75 %. Nous avons tendance à être d’accord avec l’appréciation de notre commission des finances, exposée par le rapporteur, mais sans fermer les yeux sur le fait que la concurrence existe déjà et passe largement par la course aux dons. Tout l’enjeu d’un soutien étatique, c’est qu’il peut être universel.

Pouvons-nous enfin continuer à faire comme si le remplacement nécessaire de la réserve parlementaire par le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) n’avait pas été un moins-disant pour les associations ? Non seulement la moitié des crédits ont disparu, mais nous constatons tous, depuis plusieurs années, une territorialisation du soutien aux associations, qui atteint aujourd’hui ses limites : 44 % des demandes de soutien sont déboutées, et les montants attribués sont largement inférieurs à ceux demandés.

Nos collègues du groupe du RDSE proposent de jouer sur les taux de défiscalisation pour encourager le don. Quand on voit la baisse des dons consécutive à la hausse de la CSG et au remplacement de l’ISF, le levier fiscal semble incitatif. Toutefois, la proposition de loi ne répond aucunement aux enjeux et pose même plusieurs problèmes à mes yeux.

Premièrement, il me semble qu’il faut remettre les choses en perspective. Le taux de 75 % existe déjà et concerne quasi exclusivement les associations d’aide aux personnes en difficulté ou victimes de violences. Sans nier l’intérêt social des associations sportives, culturelles et de loisirs, nous ne sommes pas dans le même cas. Pis, à lire la proposition de loi, les associations humanitaires et caritatives resteraient, elles, dans le champ des associations ouvrant droit à une réduction d’impôt de 66 %.

Deuxièmement, cela s’apparente à une fuite en avant, avec une dépendance aux dons encore renforcée. Nous aurons cette discussion lors de l’examen du projet de loi de finances, malgré les problèmes d’irrecevabilité. Il est urgent de réorienter la politique de soutien aux associations, en utilisant des leviers sous-utilisés aujourd’hui, comme le FDVA, mais aussi le Pass’Sport, qui pourrait être décliné, ou le pass Culture, sur lequel nous sommes plus circonspects, mais qui pourrait lui aussi être réorienté.

Malgré ces problématiques, nous nous abstiendrons sur cette proposition de loi. En effet, si nous sommes opposés au passage à 75 % de la réduction d’impôt, il est vrai que la question des leviers incitatifs à l’adhésion à une association se pose. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les membres du groupe Union Centriste remercient le groupe du RDSE d’avoir ouvert le débat sur l’accompagnement financier des associations, en particulier celles du monde sportif et du monde de la culture. Nous sommes néanmoins sensibles aux arguments avancés par le rapporteur Arnaud Bazin, mais aussi par Nadine Bellurot, à laquelle je veux rendre hommage pour son travail sur le sujet.

Chacune des réserves émises par nos rapporteurs nous paraît fondée. Le levier budgétaire, par le versement d’aides directes ciblées, est manifestement plus efficace pour soutenir le monde associatif que des mécanismes de dépense fiscale souvent mal calibrés et qui ne parviennent donc pas à atteindre le ou les objectifs fixés par le législateur.

Le soutien de l’État est loin d’avoir été négligeable puisque, comme cela a été rappelé, 600 millions d’euros d’aides spécifiques ont été versés dans le cadre de la crise sanitaire aux associations à vocation sportive, culturelle et récréative. Les aides budgétaires ont le mérite d’être tangibles pour l’ensemble des acteurs concernés.

À l’inverse, la portée incitative des réductions ou crédits d’impôt tels que ceux que proposent les auteurs de la présente proposition de loi apparaît souvent très aléatoire. Elle pourrait, en l’espèce, s’effacer devant un effet de pure aubaine, les bénéficiaires étant essentiellement ceux des contribuables qui, de toute manière, auraient pris d’eux-mêmes la décision de donner ou d’adhérer aux associations concernées.

Surtout, et notre collègue Bernard Delcros a insisté sur ce point en commission des finances, nous risquerions de créer des disparités entre associations, favorisant celles-ci, mais pénalisant celles-là, selon qu’elles sont ou non éligibles au taux majoré de réduction d’impôt sur le revenu.

C’est là précisément l’une des raisons pour lesquelles je suis, à titre personnel, défavorable à la multiplication des niches fiscales. J’estime que la loi fiscale doit être la même pour tous, sans qu’il faille réserver les mesures fiscales aux seules situations marginales que l’on désirerait modifier. Nous avons trop souvent tendance à intervenir pour tenter d’infléchir l’activité économique ou sociale dans un sens que nous espérons bénéfique.

Les faveurs interventionnistes font certes des heureux, ceux qui bénéficient des réductions ou des crédits d’impôt. De notre côté, nous sommes satisfaits au spectacle des contribuables qui viennent réclamer les avantages annoncés. Mais les constatations effectuées plus tard sont que les niches fiscales échouent souvent à redresser les situations auxquelles elles étaient censées remédier.

Plutôt que de créer de nouvelles dépenses fiscales, il me semble plus approprié d’en limiter le nombre et la portée. C’est une question d’équité autant que d’efficacité. À cet égard, l’abrogation, sur l’initiative du Gouvernement, loi de finances après loi de finances, de niches inefficientes, me paraît tout à fait justifiée. Sans doute faudra-t-il non pas entraver, mais accélérer ce mouvement de simplification et de clarification.

De manière plus générale, je suis farouchement opposé à toute mesure non financée, qu’elle soit ou non d’ordre fiscal.

Les interventions au moyen de niches fiscales présentent le double inconvénient d’avoir peu d’efficacité réelle et d’être très coûteuses. Leur accumulation conduit à un système fiscal d’une abyssale complexité, illisible pour le commun des contribuables. La fiscalité française, avec ses quelque 471 niches fiscales, si l’on en croit le rapport annexé au projet de loi de finances pour 2022, est devenue un maquis.

La pratique des niches, dont le nombre a augmenté depuis 2018, malgré l’effort de toilettage que j’ai évoqué, dégrade en profondeur le système fiscal en obligeant à compenser leur coût par la hausse des taux, qui deviennent alors excessifs, ou en creusant encore un peu plus le déficit faute d’économies budgétaires.

Les niches laissent non seulement des traces durables dans la législation fiscale, sous forme d’exceptions ou de régimes spéciaux, mais accentuent aussi les déséquilibres en diminuant les recettes. Pour ma part, vous le savez, mes chers collègues, je crois aux vertus de l’équilibre.

Pour l’ensemble des raisons évoquées par le rapporteur, et auxquelles je souscris, je voterai donc, avec l’ensemble du groupe Union Centriste, contre la proposition de loi, en dépit des intentions louables de ses auteurs. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens, au nom du groupe du RDSE, à remercier mon collègue Éric Gold d’avoir pris l’initiative de déposer cette proposition de loi, qui aborde un sujet de fond dont nous nous accordons tous ici à reconnaître l’importance.

À l’occasion de la crise sanitaire, l’État a versé 600 millions d’euros aux associations. Je m’inquiète et voudrais m’assurer que ces fonds aient aussi bénéficié au monde associatif qui en a le plus besoin, celui qui s’appuie en totalité sur l’engagement des bénévoles et qui n’a pas les moyens d’embaucher des salariés, je pense tout particulièrement aux acteurs associatifs du monde rural.

En premier lieu, il faut être particulièrement attentif à la répartition géographique de ces aides. Il semblerait qu’elle ait été assez déséquilibrée, notamment en faveur de l’Île-de-France et des grandes métropoles régionales.

Il faut considérer aussi la situation des plus petites associations, qui s’appuient sur les bénévoles et qui n’emploient pas de personnel. Elles n’ont pas eu accès aux crédits du chômage partiel ni bénéficié des aides à l’emploi durant la crise sanitaire ; plus généralement, elles n’ont reçu aucune aide, alors qu’elles ont été très durement frappées.

Les grosses associations ont eu accès à ces dispositifs, d’autant plus facilement qu’elles disposent des compétences et des moyens pour constituer leurs dossiers de demande de subvention, ce qui n’est pas le cas des petites associations qui ont donc subi, en quelque sorte, une double peine.

Pourtant le rôle de ces associations de proximité est essentiel : qu’elles soient sportives, culturelles ou récréatives, elles font vivre le tissu social, comme je le vois dans ma commune. Elles s’appuient sur des bénévoles qui s’engagent toute l’année pour les animer, sacrifiant souvent beaucoup de leur temps, de leur vie privée et parfois même de leurs moyens financiers personnels, pour assurer le fonctionnement matériel de ces structures associatives.

Les mesures de défiscalisation prévues par cette proposition de loi sont donc bienvenues en cette période de sortie de crise sanitaire, pleine d’incertitudes sur l’avenir de la pandémie.

Comme je l’ai rappelé en commission, j’ai interrogé oralement le Gouvernement dès le mois de février pour souligner le rôle essentiel des associations dans le monde rural.

Mme la secrétaire d’État Olivia Gregoire m’a répondu en évoquant cette aide de 600 millions d’euros aux associations. Depuis, j’ai mené mon enquête et, dans ma commune qui compte six associations sportives, culturelles ou récréatives, il s’avère qu’aucune d’entre elles n’a touché le moindre euro. Une fois de plus, les communes rurales et les associations rurales ont été les oubliées.

Il faut donc faire quelque chose ! Ce tissu associatif, je le répète, est essentiel. Les caisses sont vides, les adhérents sont partis et les bénévoles sont quelque peu désemparés. C’est pourquoi les dons de proximité au bénéfice de ces bénévoles qui encadrent ces associations pourraient soulager la situation financière de ce tissu associatif.

Lorsque la puissance publique ne parvient pas à atteindre toute sa cible, lorsqu’elle laisse certaines associations sur le bord du chemin, il n’est pas illégitime d’encourager les initiatives citoyennes.

Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE soutiendra cette proposition de loi, ainsi que les amendements qui ont été déposés pour améliorer la rédaction du texte initial. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Grosperrin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Grosperrin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi du groupe du RDSE visant à encourager les dons et adhésions aux associations à vocation culturelle, sportive et récréative dans le contexte sanitaire actuel a été rejetée par la commission des finances. Je ne reviendrai pas sur les motifs de ce rejet. Je les comprends, du principe de non-rétroactivité à celui d’égalité, du doute sur le concept de « récréatif » au rappel des aides versées pendant la crise. C’est donc bien ici du texte initial de la proposition de loi que nous débattons.

J’ai beaucoup travaillé sur ce sujet et je partage les préoccupations de mes collègues du groupe du RDSE. Je m’attacherai ici essentiellement au secteur sportif, même si l’ensemble du domaine associatif nécessite attention et soutien.

En février dernier, j’ai posé à Mme la ministre déléguée chargée des sports une question orale sur la situation financière très délicate des clubs sportifs, dont les activités étaient à l’arrêt depuis plusieurs mois. La reprise des activités pour les sports collectifs comme pour les sports individuels nous réjouit tous. Elle ne saurait toutefois dissimuler la réalité du secteur sportif en France à l’heure actuelle ni les problèmes auxquels il continue de faire face.

J’avais proposé des mesures exceptionnelles et je considère que mes propositions restent d’actualité. J’avais en particulier avancé l’idée qu’il soit possible de convertir les cotisations et adhésions d’ores et déjà versées en dons, sous réserve que les associations sportives remplissent les conditions pour en recevoir. Mon argumentaire touchait à la sécurisation des activités aussi bien qu’au maintien des emplois, préconisant ces mesures financières et fiscales exceptionnelles pour répondre à une situation elle-même exceptionnelle.

Je le répète, l’amélioration du contexte sanitaire n’a pas bouleversé l’équation : le sport français souffre, les menaces sont réelles. Il serait illusoire de se réjouir prématurément d’une amélioration qui viendrait automatiquement avec la reprise, qui date d’il y a à peine quelques semaines.

Mme la ministre m’avait répondu de façon prudente. Consciente des conséquences graves d’une saison blanche, elle ne rejetait pas a priori mes propositions. Nul n’ignore les aides versées pendant la crise. Beaucoup de mesures ont été prises pour soutenir les associations : mesures transversales, sectorielles, ensemble des mesures en faveur des associations sportives et culturelles. Je pense au fonds d’urgence du ministère de la culture, mais surtout au fonds d’urgence de l’Agence nationale du sport abondé à hauteur de 15 millions d’euros, et à l’allocation de rentrée scolaire sportive, qui représente 50 euros par enfant.

Nous n’en sommes pas quittes pour autant, au vu de la situation du sport aujourd’hui en France et de la place qui lui est laissée. Le rôle des structures et des éducateurs va au-delà du sport lui-même. C’est un outil d’accompagnement éducatif essentiel qui permet de travailler sur beaucoup d’autres thématiques : aide scolaire, citoyenneté, insertion des jeunes.

Le sport est vecteur de lien social et porteur de valeurs. La volonté de portage global de l’ensemble du secteur confié à monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, ne doit pas être vaine. Le sport doit disposer des moyens d’une vision républicaine ambitieuse. Cette vision ne peut se réduire à des considérations strictement juridiques ou administratives, au sortir de la période que nous venons de vivre et compte tenu des préoccupations d’une partie de notre jeunesse.

Je veux donc souligner à la fois les efforts de l’État et leur insuffisance, qui perdure. Je m’appuie sur de bonnes sources : celles des propos du Président de la République, tenus lorsqu’il a accueilli en septembre dernier les médaillés français olympiques et paralympiques de retour des jeux de Tokyo. Le président a affirmé que le bilan de Tokyo, décevant, n’était pas celui attendu, et annoncé sa volonté de « faire beaucoup plus » aux jeux de Paris en 2024. Il a promis que l’État ne ferait pas défaut pour soutenir le sport français et ses sportifs de haut niveau.

L’objectif affiché par le Président de la République de faire enfin de la France une « nation sportive » dans la perspective de 2024 est-il atteignable ? Les choses ne sont pas aussi simples. Les retards se sont accumulés et la crise du covid-19 n’a fait qu’y ajouter. Il est difficile de tout bousculer en trois ans. Il est impossible également, sauf à méconnaître complètement ce qu’est le sport ou à ne l’avoir jamais pratiqué, de prétendre que des médailles olympiques pourraient être le retour sur investissement automatique d’un argent public alloué dans l’urgence. Les sportifs, à tous les niveaux, méritent davantage de considération.

Je retiens le message sur les moyens : dans l’attente des mesures concrètes annoncées, notamment d’un plan massif pour les équipements sportifs de proximité, nous devons adopter les mesures qui aideront efficacement le sport dans le quotidien de ses pratiquants. Évitons la disparition d’une partie de nos clubs. Ils forment les championnes et champions du sport français de demain. Ne négligeons aucun moyen, car il y a un lien direct entre la base et la haute performance. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Didier Rambaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’intention des auteurs de cette proposition de loi est louable. Ce texte a le mérite, en effet, de faire un état des lieux sur notre tissu associatif. Cependant, le groupe RDPI ne votera pas son adoption. Il y a deux raisons à cela : tout d’abord, le dispositif lui-même appelle quelques réserves de ma part ; ensuite, l’État s’est déjà pleinement mobilisé pour soutenir les associations à vocation sportive, culturelle et récréative.

Cette proposition de loi présente deux dispositifs distincts. D’une part, il est prévu de majorer à 75 % le taux de la réduction d’impôt sur les dons, contre 66 % actuellement. D’autre part, il est proposé de créer un crédit d’impôt temporaire, assis sur les adhésions souscrites au cours de l’année 2021. Le taux de ce crédit d’impôt serait égal à 50 % des dépenses engagées, dans la limite de 100 euros par souscription. Comme cela a été souligné en commission, le dispositif ne nous est pas totalement inconnu, puisqu’il a été présenté par voie d’amendement en juillet dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2021.

Faire évoluer la législation pour faciliter le quotidien des associations me semble essentiel. Élu local pendant de nombreuses années, j’y suis, comme vous tous, très attaché. Néanmoins, la majoration de réduction d’impôt est permanente et ne cible pas spécifiquement la période de reprise du secteur. Par ailleurs, de très nombreux organismes seraient éligibles à la réduction d’impôt. De ce fait, on peut craindre que la majoration de taux ne bénéficie en réalité qu’aux grosses structures, capables de mener des collectes de dons. En effet, les petites associations qui n’emploient pas de salariés n’ont pas les moyens humains pour émettre des reçus fiscaux. Si l’intention est louable, le dispositif semble donc inadapté.

J’ajoute que la seconde disposition ne concerne que les sommes versées jusqu’au 31 décembre 2021. Force est de constater le caractère tardif de la proposition de loi. Cette inscription tardive à l’ordre du jour retire, il me semble, son effet incitatif à la mesure. Elle serait rétroactive certes, mais ne permettrait pas de participer à la relance.

Or je suis convaincu que l’enjeu actuel est bien la relance du pays, la relance du sport, la relance de la culture, la relance de nos associations !

Nous l’avons constaté : l’impact de la crise a été majeur pour le monde associatif, qui a subi une chute exceptionnelle de ses activités et une baisse des adhésions.

La situation s’avère toutefois plus nuancée. Comme le rappelle notre collègue Nadine Bellurot dans son rapport, les subventions publiques ont été maintenues et près de 79 000 associations employeuses ont pu bénéficier de l’activité partielle. Avec du recul, le plan de relance a globalement consacré 122 millions d’euros au seul secteur sportif et 2 milliards d’euros en direction des acteurs de la culture.

Dans le détail, le plan de relance a prévu l’augmentation du nombre de parcours emploi compétences dans le cadre du dispositif « 1 jeune, 1 solution », passant ainsi à 80 000 contrats en 2021, contre 20 000 initialement prévus.

Je souhaite également revenir sur le renforcement du dispositif des postes du Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire : 2 000 postes supplémentaires ont été créés pour 2021 et 2022, afin de permettre aux associations de pérenniser leurs actions.

Le sport a été également soutenu grâce au dispositif d’aide à l’emploi associatif dans le secteur sportif à destination des jeunes. Je pense au doublement du dispositif Sésame, destiné à accompagner des jeunes de 16 ans à 25 ans vers une formation d’éducateur sportif ou d’animateur. Je pense également au Pass’Sport, qui représente à lui seul le dispositif sectoriel le plus ambitieux, avec un montant estimé à 200 millions d’euros pour les associations sportives, culturelles et récréatives.

À ce propos d’ailleurs, le crédit d’impôt cumulé au Pass’Sport signifierait non seulement que l’État prendrait en charge les adhésions par la subvention, mais ajouterait à la subvention directe un crédit d’impôt, faisant ainsi passer la prise en charge au-delà de 100 % ! Au total, hors mesures transversales, environ 600 millions d’euros d’aides spécifiques ont été déployés afin de préserver la diversité du tissu associatif français.

Dans la mesure où l’articulation des dispositifs me paraît inadaptée, dans la mesure où la proposition de loi est examinée à contretemps et dans la mesure où le Gouvernement a soutenu, et continue de soutenir massivement le monde associatif, le groupe RDPI votera contre la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)