Sommaire

Présidence de M. Roger Karoutchi

Secrétaires :

Mme Marie Mercier, M. Jean-Claude Tissot.

1. Procès-verbal

2. Mise au point au sujet d’un vote

3. Financement de la sécurité sociale pour 2023. – Discussion d’un projet de loi

Discussion générale :

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention

M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l’assurance maladie

Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles

M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille

M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’autonomie

M. Christian Klinger, rapporteur pour avis de la commission des finances

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales

Question préalable

Motion n° 762 de Mme Laurence Cohen. – Mme Laurence Cohen ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales ; M. François Braun, ministre ; M. Bernard Jomier ; Mme Raymonde Poncet Monge ; M. Daniel Chasseing ; M. Olivier Henno; M. Joël Guerriau. – Rejet par scrutin public n° 30.

Discussion générale (suite)

Mme Chantal Deseyne

M. Daniel Chasseing

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Abdallah Hassani

M. Bernard Jomier

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Mme Esther Benbassa

Mme Véronique Guillotin

Mme Florence Lassarade

M. Xavier Iacovelli

Mme Michelle Meunier

Mme Jocelyne Guidez

M. Alain Milon

Mme Laurence Rossignol

M. François Braun, ministre

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée

Clôture de la discussion générale.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol

4. Mise au point au sujet d’un vote

5. Financement de la sécurité sociale pour 2023. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Article liminaire – Adoption.

Première partie

Article 1er (supprimé)

Amendement n° 19 de la commission. – Adoption de l’amendement rétablissant l’article.

Amendement n° 993 du Gouvernement. – Devenu sans objet.

Article 2 et annexe A (supprimés)

Amendement n° 20 de la commission. – Adoption de l’amendement rétablissant l’ensemble de l’article et de l’annexe.

Vote sur l’ensemble de la première partie

Adoption de l’ensemble de la première partie du projet de loi, modifié.

Deuxième partie

Article 3 (supprimé)

Amendement n° 784 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 702 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendement n° 21 de la commission et sous-amendement n° 1129 du Gouvernement. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié rétablissant l’article.

Article 4 (supprimé)

Amendement n° 703 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendement n° 785 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 22 de la commission et sous-amendement n° 1128 du Gouvernement. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié rétablissant l’article.

Vote sur l’ensemble de la deuxième partie

Adoption de l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi, modifié.

troisième partie

Article 5

Amendement n° 23 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 24 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 25 de la commission et sous-amendement n° 1126 du Gouvernement. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 5

Amendement n° 736 rectifié de M. Xavier Iacovelli. – Retrait.

Amendement n° 1101 rectifié bis de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Amendements identiques nos 704 de Mme Raymonde Poncet Monge et 1029 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 705 de Mme Raymonde Poncet Monge, 776 rectifié de Mme Laurence Cohen et 1035 rectifié de M. Serge Mérillou. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 770 rectifié bis de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Rejet.

Amendement n° 708 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendements identiques nos 937 rectifié bis de Mme Raymonde Poncet Monge et 1097 rectifié ter de Mme Michelle Meunier. – Rejet, par scrutin public n° 31, des deux amendements.

Amendement n° 1030 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Article 6

Mme Cathy Apourceau-Poly

Amendements identiques nos 710 de Mme Raymonde Poncet Monge et 1026 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 26 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 786 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 27 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 546 rectifié bis de Mme Pascale Gruny. – Adoption.

Amendements identiques nos 711 de Mme Raymonde Poncet Monge et 812 de Mme Laurence Cohen. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 542 rectifié ter de Mme Pascale Gruny. – Rejet.

Amendement n° 28 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 29 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 30 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 31 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 32 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 6

Amendement n° 6 rectifié ter de Mme Nathalie Goulet. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 6 bis (nouveau)

Amendements identiques nos 172 rectifié sexies de M. Alain Milon et 205 rectifié de M. Olivier Henno. – Adoption, par scrutin public n° 32, des deux amendements rédigeant l’article.

Amendements identiques nos 787 rectifié de Mme Laurence Cohen et 1031 rectifié de Mme Monique Lubin. – Devenus sans objet.

Amendement n° 713 de Mme Raymonde Poncet Monge. – Devenu sans objet.

Amendement n° 252 rectifié de M. Daniel Chasseing. – Devenu sans objet.

Après l’article 6 bis

Amendement n° 545 rectifié bis de Mme Pascale Gruny. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 7

Amendement n° 1038 rectifié de M. Jean-Jacques Michau. – Retrait.

Amendements identiques nos 455 rectifié ter de M. Franck Menonville, 565 rectifié de M. Henri Cabanel, 968 de M. Laurent Duplomb, 988 de M. Olivier Henno et 1112 rectifié de M. Jean-Marc Boyer. – Adoption des amendements nos 455 rectifié ter, 565 rectifié, 988 et 1112 rectifié rédigeant l’article, l’amendement n° 968 n’étant pas soutenu.

Après l’article 7

Amendements identiques nos 534 rectifié de Mme Anne-Catherine Loisier et 971 de M. Laurent Duplomb. – Rejet de l’amendement n° 534 rectifié, l’amendement n° 971 n’étant pas soutenu.

Amendements identiques nos 159 rectifié bis de Mme Annick Billon, 197 rectifié quater de M. Pierre-Jean Verzelen, 223 rectifié ter de M. Jacques Le Nay et 1121 rectifié bis de M. Daniel Gremillet. – Rejet des amendements nos 197 rectifié quater, 223 rectifié ter et 1121 rectifié bis, l’amendement n° 159 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendements identiques nos 349 rectifié de M. Stéphane Demilly, 456 rectifié quater de M. Franck Menonville, 649 rectifié de Mme Patricia Schillinger et 969 de M. Laurent Duplomb. – Rejet des amendements nos 349 rectifié, 456 rectifié quater et 649 rectifié, l’amendement n° 969 n’étant pas soutenu.

Amendements identiques nos 970 rectifié de M. Laurent Duplomb, 989 de M. Olivier Henno et 1041 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Adoption des amendements nos 970 rectifié, 989 et 1041 rectifié insérant un article additionnel, l’amendement n° 970 rectifié n’étant pas soutenu.

Amendement n° 567 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.

Amendement n° 593 rectifié bis de M. Éric Gold. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 376 rectifié de M. Paul Toussaint Parigi. – Non soutenu.

Amendements identiques nos 203 rectifié bis de M. Gilbert Favreau, 290 rectifié de Mme Colette Mélot et 366 rectifié bis de Mme Corinne Féret. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 1034 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Articles 7 bis et 7 ter (nouveaux) – Adoption.

Article 7 quater (nouveau)

Mme Cathy Apourceau-Poly

Adoption de l’article.

Après l’article 7 quater

Amendements identiques nos 707 rectifié de Mme Raymonde Poncet Monge et 772 rectifié de Mme Cathy Apourceau-Poly. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 813 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Article 7 quinquies (nouveau) – Adoption.

Après l’article 7 quinquies

Amendement n° 509 rectifié ter de Mme Michelle Meunier. – Rejet.

Amendement n° 709 rectifié bis de Mme Raymonde Poncet Monge. – Rejet.

Amendement n° 451 rectifié ter de Mme Nathalie Goulet. – Rejet.

Amendements identiques nos 585 rectifié bis de M. Stéphane Artano et 1027 rectifié bis de M. Victorin Lurel. – Rejet des deux amendements.

Amendements identiques nos 383 rectifié bis de Mme Viviane Malet et 1028 rectifié bis de M. Victorin Lurel. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos 587 rectifié bis de M. Stéphane Artano, 874 rectifié de Mme Victoire Jasmin et 922 rectifié bis de M. Dominique Théophile. – Rejet des amendements nos 587 rectifié bis et 874 rectifié, l’amendement n° 922 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Renvoi de la suite de la discussion.

6. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Roger Karoutchi

vice-président

Secrétaires :

Mme Marie Mercier,

M. Jean-Claude Tissot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Mise au point au sujet d’un vote

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour une mise au point au sujet d’un vote.

Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le président, lors du scrutin n° 29 sur l’ensemble du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, intervenu au cours de la séance du 4 novembre 2022, ma collègue Christine Herzog souhaitait ne pas prendre part au vote et non voter pour.

M. le président. Acte est donné de votre mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

3

 
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Discussion générale (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2023

Discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2023 (projet n° 96, rapport n° 99, avis n° 98).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Question préalable

M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, monsieur les ministres, mesdames, messieurs les sénatrices et les sénateurs, c’est avec engagement, confiance et détermination que je viens débattre dans cet hémicycle du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.

Dans l’intitulé même de ce projet de loi figure le mot « sécurité ».

Cette sécurité, nous la devons d’abord à nos concitoyens, pour qu’ils puissent accéder facilement à la santé, d’où qu’ils viennent et quelle que soit leur situation. L’universalité de l’accès à la santé, voilà le moteur de mon engagement et de mon action en tant que ministre.

Cette sécurité, nous la devons aussi à ce même système de santé qui se met chaque jour au chevet des Françaises et des Français, en ville comme à l’hôpital, avec abnégation et dans des conditions que je sais difficiles.

Prendre soin de ceux qui prennent soin de nous, c’est une de mes priorités en tant que ministre de la santé et de la prévention, c’est tout l’engagement de ce gouvernement et de cette majorité.

Avec ce PLFSS, nous faisons le choix d’un système de santé renforcé et plus juste, pour mieux répondre aux besoins de nos concitoyens et de nos professionnels de santé.

Comment, concrètement, se traduit cette ambition ?

Elle passe d’abord par un investissement en rapport avec les enjeux de la santé.

Pour 2023, nous vous proposons de porter l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) à un niveau historique de +3,7 % hors dépenses de crise sanitaire – c’est important de le redire.

Cette augmentation s’inscrit dans la droite ligne de l’effort d’investissement que nous avons réalisé ces dernières années, notamment avec le Ségur de la santé.

Au-delà de cet investissement soutenu, ce PLFSS porte aussi des mesures fortes.

Notre ambition est avant tout d’offrir à nos concitoyens un pays où chacun peut accéder facilement aux soins, peu importe l’endroit où il vit ou ses revenus.

C’est pour cette raison que nous menons, avec ce PLFSS, une lutte déterminée contre toutes les inégalités d’accès à la santé, qu’elles soient territoriales, financières ou sociétales.

C’est tout simplement un enjeu de justice sociale, à l’heure où près de 4 millions de Français vivent dans un territoire sous-doté et où 6 millions de nos concitoyens n’ont pas de médecin traitant.

Cette situation est l’effet des décisions passées, qui nous conduisent à enregistrer aujourd’hui un système de santé à bout de souffle avec, en particulier, une baisse sans précédent de nos ressources, notamment médicales.

Pour faire face, nous devons agir sur tous les fronts.

Pour mieux inciter les professionnels de santé à s’installer dans les zones sous-dotées, ce PLFSS vise à renforcer les effets des aides à l’installation. Ces dernières sont complexes et multiples ; elles sont aussi mal connues et mal comprises des professionnels, qui ne s’y retrouvent plus. Nous proposons donc de les simplifier.

Autre enjeu important, nous voulons mieux accompagner les médecins proches de la retraite, afin qu’ils poursuivent leur activité, et faire revenir des médecins retraités actifs qui en auraient l’envie. Le Président de la République a annoncé une mesure forte face aux territoires sous-dotés : nous exonérerons de cotisations de retraite les médecins retraités qui souhaiteraient prolonger ou reprendre leur engagement au service de nos concitoyens.

À l’heure où s’ouvrent les négociations conventionnelles, nous proposons aussi de créer un cadre plus adapté, pour que ces dernières soient pleinement fondées sur une logique d’engagements réciproques, particulièrement vis-à-vis des territoires et de la permanence des soins.

Enfin – et je sais le soutien de votre assemblée à cette réforme –, nous formerons mieux les futurs médecins généralistes, notamment pour mieux les préparer à une installation plus rapide en sortie d’études, grâce à la quatrième année d’internat.

Si celle-ci a pleinement vocation à se faire en médecine ambulatoire, j’ai entendu que, dans quelques situations très ciblées et exceptionnelles, il était important pour les étudiants de pouvoir déroger à ce principe. Le Gouvernement a déposé un amendement en ce sens, de manière à tenir compte des échanges qui se tiennent actuellement dans le cadre de la mission en cours sur les conditions de mise en œuvre de cette quatrième année d’internat. Même si nous favoriserons cet exercice en zone sous-dense, je tiens à redire qu’il ne s’agira pas d’une obligation.

Ce PLFSS a aussi pour ambition de renforcer notre hôpital, avec des moyens et une reconnaissance à la hauteur du service qu’il rend aux Français.

Trop longtemps, nos soignants ont dû mettre les bouchées doubles pour compenser des décennies d’économies réalisées sur l’hôpital, au prix d’un désespoir grandissant chez certains de nos professionnels. Ces choix passés et répétés nous obligent aujourd’hui à gérer des urgences successives.

Ainsi, j’étais la semaine dernière avec les représentants du secteur de la pédiatrie, pour mettre en place des mesures rapides face à une épidémie de bronchiolite précoce qui fait peser une pression accrue sur des services déjà fragilisés.

Si j’assume totalement de devoir gérer des situations de tension, j’assume aussi d’accélérer les transformations plus profondes, structurelles, qui seules nous permettront de retrouver de la sérénité, de la confiance en l’avenir et de l’excellence pour notre hôpital.

J’ai notamment la conviction qu’il est temps de régler la question de l’intérim, qui est un poison pour nos équipes et pour la stabilité de nos établissements lorsqu’il devient mercenaire. Ce PLFSS prévoit ainsi de ne pas autoriser cette pratique en début de carrière. C’est bon pour les hôpitaux ; c’est sécurisant pour les jeunes professionnels.

Au total, le soutien à l’hôpital se traduit par un Ondam hospitalier en progression de 4,1 %. C’est un effort de plus de 100 milliards d’euros, en augmentation de 3,6 milliards d’euros par rapport à 2022. Des travaux sont par ailleurs en cours afin de rectifier l’Ondam 2022 à la suite des annonces récentes de soutien à l’hôpital pour l’hiver, dont la prolongation de la majoration de nuit jusqu’à la mise en œuvre de travaux plus structurels. Nous le faisons tout en maintenant notre effort en faveur des soins de ville, à l’aube de l’ouverture des négociations conventionnelles avec les médecins libéraux.

Le choix de ce PLFSS, c’est enfin d’offrir à nos concitoyens un pays où les maladies sont prévenues avant d’être soignées. C’est une clé essentielle de l’avenir de notre santé, j’en ai la conviction profonde.

Oui, avec ce texte, nous faisons un grand pas en avant pour rendre la prévention bien réelle et présente dans notre société. Ma philosophie est de donner toutes les clés à nos concitoyens pour prendre soin de leur santé, en sortant des messages de culpabilisation et en rendant la prévention attractive.

Nous proposons ainsi de mettre en place des rendez-vous de prévention, qui prendront la forme de bilans de santé aux âges clés de la vie, pris en charge à 100 % par l’assurance maladie.

Cette mesure a deux vocations : d’une part, aller chercher les patients les plus éloignés du système de santé, qui ne voient pas souvent leur médecin ; d’autre part, agir sur la durée en proposant des parcours de santé autour de ces rendez-vous, ce qui permettra d’éviter des maladies et de mieux prendre en compte certains enjeux essentiels, comme la santé mentale, la santé des femmes, ou la prévention des cancers.

Le Gouvernement s’engage également dans ce PLFSS pour la santé sexuelle et pour la santé des femmes, à travers des mesures concrètes.

Nous proposons ainsi d’élargir à d’autres infections sexuellement transmissibles que le VIH le dépistage sans ordonnance et gratuit, pris en charge à 100 %, pour les moins de 26 ans.

Par ailleurs, alors que seulement 10 % des contraceptions d’urgence sont actuellement remboursées, nous voulons élargir la délivrance gratuite de la contraception d’urgence à toutes les femmes, peu importe leur âge.

Enfin, la crise sanitaire récente a montré à quel point se faire vacciner est essentiel pour se protéger et protéger les autres.

Nous proposons donc d’élargir la prescription et la réalisation de vaccins aux pharmaciens, aux sages-femmes et aux infirmiers, ce qui est d’autant plus essentiel que nous lançons actuellement une campagne de vaccination à la fois contre la grippe et contre le covid-19. À cet égard, nous avons souhaité conserver, à l’issue des débats à l’Assemblée nationale, les amendements visant à autoriser les étudiants en troisième cycle en médecine et en pharmacie à vacciner.

En un mot, ce PLFSS concrétise notre ambition de faire rapidement de la prévention un pilier à part entière de notre système de santé.

Ce PLFSS est enfin un texte de responsabilité, qui tient compte de l’enjeu majeur de soutenabilité de notre système de santé.

J’assume le fait que ce redressement se fera par le renforcement de la pertinence et de la qualité de la réponse aux besoins de santé. Nous travaillerons d’ailleurs aussi dans le cadre du volet santé du Conseil national de la refondation (CNR) sur ce pacte de soutenabilité à conclure avec les Français et tous les professionnels.

D’ores et déjà, ce budget de la sécurité sociale prévoit des mesures que nous pensons justes et proportionnées, pour que nos déficits ne pèsent pas sur les générations futures et que nous puissions respecter l’engagement du Gouvernement de ne pas baisser les droits ni augmenter les impôts.

Nous allons ainsi exiger du secteur de la radiologie qu’il renforce la transparence et l’information sur le coût de ses équipements matériels.

Nous allons également demander une contribution à la biologie, en ouvrant une négociation avec ce secteur, parallèlement au lancement d’une mission pour mieux préparer son avenir.

Nous allons aussi réguler la trajectoire très dynamique de dépenses sur les médicaments, tout en préservant les engagements pris pour soutenir nos capacités d’innovation et de production de nos plus vieux médicaments, qui restent nécessaires dans le quotidien des Français, ainsi que notre souveraineté nationale et européenne.

Nous travaillerons également avec les complémentaires santé sur de multiples chantiers, notamment pour élaborer un partage équitable des remboursements dans le champ de la santé.

Enfin, ce PLFSS adresse aussi un message de fermeté à l’égard de tous les types de fraudes.

Mesdames, messieurs les sénatrices et les sénateurs, vous le voyez, notre ambition pour la santé de nos concitoyens s’incarne pleinement dans le PLFSS que je vous présente aujourd’hui.

Notre engagement pour la santé des Françaises et des Français n’est pas fait de mots : il est fait de moyens, de propositions nouvelles et de réformes courageuses.

Ce PLFSS pour l’année 2023, c’est une première pierre à l’effort de refondation que nous voulons mener, pour que la devise de notre République – « Liberté, Égalité, Fraternité » – soit une réalité en matière de santé comme dans tous les autres aspects de la vie de nos concitoyens.

Je le dis aussi avec franchise : ce PLFSS est une première page, une page importante, mais il n’achève pas l’ensemble des réponses que nous devons à nos concitoyens.

Cela sera notamment le rôle des négociations conventionnelles, pour lesquelles j’ai rendu publiques mes orientations voilà quelques jours, et celui du volet santé du CNR, que j’ai lancé le mois dernier, au Mans, et qui crée une dynamique importante dans les territoires, en lien notamment avec les élus.

Bien sûr, ces travaux n’ont pas vocation à remplacer le débat au sein de la représentation nationale ; ils en sont complémentaires. Malgré le contexte, le débat fut fécond à l’Assemblée nationale. Nous avons pu, en lien avec les députés de l’arc républicain,…

Mme Annie Le Houerou. C’est quoi, l’arc républicain ?

M. François Braun, ministre. … progresser sur des sujets importants comme le cumul emploi-retraite des médecins, le contenu des rendez-vous de prévention, l’encadrement de la quatrième année d’internat de médecine générale ou encore la permanence des soins. Nous avons pu également progresser sur la mise en place d’expérimentations, par exemple pour le dépistage de la drépanocytose ou la réalisation de certificats de décès par les infirmiers.

Mesdames, messieurs les sénatrices et les sénateurs, construisons ensemble des apports utiles au service des Français ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Jean-Christophe Combe, ministre des solidarités, de lautonomie et des personnes handicapées. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénatrices et les sénateurs, en ouvrant avec vous la discussion du budget de la sécurité sociale pour 2023, je veux avoir une pensée pour tous les professionnels du soin et tous les professionnels du lien qui, cette année encore, ont accompagné nos compatriotes, malgré la crise, malgré les doutes et malgré la pression.

Épidémie de covid-19, été de canicule, manque de personnels : sur toutes les travées, on connaît la situation ; sur toutes les travées, on salue le rôle décisif de ces femmes et de ces hommes.

En cette période de difficultés et d’incertitudes, le choix que nous vous proposons pour l’année prochaine est d’augmenter les moyens que la Nation consacre aux personnes âgées en perte d’autonomie, aux personnes en situation de handicap et aux familles.

Nous octroyons 1,5 milliard d’euros supplémentaires à la branche autonomie et 1,6 milliard à la branche famille. C’est inédit, c’est du concret. Cela marque aussi la volonté du Gouvernement de protéger les Français qui en ont le plus besoin tout en poursuivant la réforme de notre modèle social pour qu’il soit plus performant.

Ces 3 milliards d’euros supplémentaires, nous proposons de les engager pour régler des problèmes du quotidien.

Il s’agit, d’abord, de restaurer la confiance dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et d’augmenter le nombre de soignants pour que les enfants ne s’inquiètent pas pour leurs parents âgés et que nos aînés soient dignement accompagnés.

Nous entendons, ensuite, soutenir les services à domicile pour que chacun puisse avoir le choix de rester chez soi et d’y bien vieillir.

Nous voulons aussi faciliter l’accès à des solutions d’accueil pour les jeunes enfants, afin de permettre à leurs parents de travailler ; je pense notamment aux femmes et aux familles monoparentales.

Enfin, il faut offrir aux parents la possibilité de scolariser dans de bonnes conditions leur enfant en situation de handicap.

Voilà quelques exemples de sujets sur lesquels ce budget va nous permettre d’avancer.

Ces 3 milliards d’euros supplémentaires sont aussi là pour protéger de l’inflation le secteur médico-social, déjà fragilisé par les tensions de recrutement. Nous faisons, par exemple, le choix de compenser l’impact de l’inflation sur les charges non salariales des dotations de soin des Ehpad et de faire bénéficier ces établissements du bouclier tarifaire sur l’énergie.

Ce secteur économique est précieux en matière d’emploi et indispensable par les services qu’il rend à un grand nombre de Français. Nous assumons donc ce soutien, qui est d’intérêt général.

Ce soutien à la consolidation du secteur, nous l’apportons face à l’urgence, mais également dans la durée, avec la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) et l’ensemble des acteurs. Ce budget est un nouveau signe fort de la volonté de l’État.

La question des moyens est importante, mais celle de la méthode l’est tout autant. C’est pourquoi je fais clairement le choix du dialogue avec les secteurs concernés et de la coconstruction avec les collectivités, notamment les départements.

J’étais ce matin avec les aidants et je serai demain avec les assistantes maternelles ; j’étais en fin de semaine dernière dans la Marne avec les élus et tous les acteurs du grand âge, toujours dans cet esprit d’écoute et de recherche de solutions.

En effet, les solutions ne peuvent pas attendre ; c’est notamment le cas en matière d’autonomie. Comme je le disais, nous devons restaurer la confiance dans les Ehpad, ce qui passe notamment par davantage de contrôles et de sanctions.

Sur ce sujet, nous nous sommes appuyés sur les travaux parlementaires. Je salue à cet égard la sénatrice Michelle Meunier et le sénateur Bernard Bonne, auteurs d’un rapport dont de nombreuses recommandations ont déjà été reprises et dont d’autres se retrouvent dans le présent texte.

L’article 32, renforcé par l’Assemblée nationale, nous permettra d’intensifier les contrôles et de durcir les sanctions contre les établissements fautifs. Je pense aussi au financement des moyens humains nécessaires pour contrôler l’intégralité des établissements dans les deux ans à venir, comme nous l’avons annoncé. Ces contrôles ont déjà commencé et j’en rendrai compte régulièrement et en toute transparence devant la représentation nationale. Cette transparence, nous la devons aux familles et aux professionnels eux-mêmes.

Restaurer la confiance dans les Ehpad, c’est aussi soutenir leurs professionnels. Notre objectif est clair : 50 000 soignants de plus dans les prochaines années et 3 000 dès 2023. J’entends les critiques de celles et ceux qui considèrent que nous n’allons pas assez vite, mais j’étais il y a encore quelques mois directeur général de la Croix-Rouge française et c’est précisément parce que je connais la réalité de la situation que je veux tenir devant vous un discours de vérité : il est bien trop facile de promettre des centaines de milliers de postes si nous ne sommes pas capables de former, d’attirer et de fidéliser les professionnels.

C’est donc bien sur l’ensemble du problème que nous agissons : la question de la rémunération – sur laquelle aucune majorité n’a autant fait que la nôtre – se pose, mais il faut aussi s’intéresser aux questions de formation, de management, de parcours, de reconnaissance et de santé de nos professionnels.

Dans la droite ligne de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, le Gouvernement propose de poursuivre et d’accélérer le développement de l’aide à domicile.

Nous le ferons, d’abord, en renforçant les services de soins infirmiers à domicile, avec le financement de 4 000 nouvelles places, qui nous mettent sur la trajectoire d’augmentation de 20 % dont nous avons besoin d’ici à 2030. Pour mieux les financer, nous proposons également d’adapter leur tarification de manière à mieux prendre en compte le profil des personnes accompagnées.

Ensuite, nous entendons renforcer la lisibilité de l’offre pour les Français. En 2022, nous nous sommes engagés dans une logique de guichet unique en regroupant les différents services. Pour 2023, nous vous proposons d’accélérer en incitant financièrement les services à dispenser des activités à la fois d’aide et de soins avec le forfait coordination.

Développer l’aide à domicile, c’est aussi permettre aux professionnels de passer plus de temps auprès des personnes qu’ils accompagnent. Trop souvent, les intervenants ont tout juste le temps de faire les gestes élémentaires pour assurer le lever, le coucher et le repas. Trop souvent aussi, les personnes qui les accueillent vivent ces interventions comme des temps mécaniques, minutés et déshumanisés.

Nous avons ouvert la discussion avec les départements pour pouvoir ajouter deux heures de présence supplémentaire chaque semaine auprès des 780 000 personnes qui bénéficient de l’allocation personnalisée d’autonomie à domicile : deux heures dédiées à la convivialité et à la prévention, deux heures qui permettront aussi d’améliorer les conditions de travail de professionnels qui, trop souvent, subissent des temps partiels ou du travail fractionné.

Dans la continuité des travaux engagés à l’Assemblée nationale, le Gouvernement présentera par ailleurs un amendement visant à introduire davantage de souplesse pour les bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), afin qu’ils puissent mobiliser davantage d’interventions à domicile.

Développer l’aide à domicile, c’est enfin faire en sorte que l’inflation ne pèse pas sur le reste à charge des bénéficiaires.

L’année dernière, nous avions instauré un tarif horaire plancher de 22 euros ; cette année, nous faisons le choix non seulement de l’augmenter à 23 euros, mais aussi de l’indexer, pour les années suivantes, sur la majoration pour tierce personne, c’est-à-dire sur un indice proche de l’inflation.

Ces mesures permettent de diversifier l’offre de services sur nos territoires. Tel est également le sens de la priorité donnée au développement de l’habitat inclusif et à toutes les formes alternatives et innovantes qui permettent de s’adapter aux parcours de vie des personnes.

Toutes ces mesures, nous les bâtissons avec les structures et avec leurs financeurs, en premier lieu les départements. Avec l’Assemblée des départements de France, nous avons réuni, la semaine dernière, un comité des financeurs, qui se réunira de nouveau ce soir. Nous y discutons des deux heures hebdomadaires supplémentaires, dont j’ai déjà parlé, mais aussi du soutien aux conditions de travail dans les services d’aide à domicile, via notamment les concours financiers de la CNSA, qui méritent d’être réformés, aux conseils départementaux.

J’en viens aux moyens que nous consacrons aux personnes en situation de handicap, pour lesquels le Gouvernement fait le choix d’une augmentation sans précédent de 5,2 %. C’est à la hauteur des ambitions que nous portons, avec ma collègue Geneviève Darrieussecq, pour tenir les engagements pris lors de la dernière Conférence nationale du handicap et préparer la prochaine, qui se tiendra au tout début de l’année 2023.

Nous amplifions notamment la mise en œuvre de grands objectifs : pour l’école inclusive et la scolarisation des enfants et adolescents en situation de handicap ; pour l’accompagnement des adultes en situation de polyhandicap et des personnes handicapées vieillissantes ; enfin, avec 80 millions d’euros supplémentaires, pour des mesures concernant l’autisme et les troubles du neuro-développement.

Nous prévoyons ainsi d’étendre aux 7-12 ans la politique de détection précoce, l’une des réussites majeures de la stratégie nationale, qui a permis depuis trois ans à près de 30 000 enfants d’être détectés à temps et correctement accompagnés.

Cet investissement prioritaire dans l’enfance se retrouve également dans la branche famille, pour laquelle nous proposons une augmentation exceptionnelle de 1,6 milliard d’euros. Ce choix fort du Gouvernement rejoint deux objectifs placés au cœur du projet du Président de la République : le plein emploi et l’égalité des chances.

Pas de plein emploi dans une société où, trop souvent, des femmes doivent renoncer à travailler faute de mode d’accueil adapté pour leurs enfants.

Pas d’égalité des chances non plus dans une société qui reproduit les inégalités en ne soutenant pas les familles les plus fragiles.

Concrètement, nous proposons de réformer l’aide à la garde individuelle d’enfant, le complément de libre choix du mode de garde (CMG), dont les familles connaissent bien l’importance, suivant deux axes : d’une part, en modifiant le barème pour permettre aux familles qui ne recourent pas à la crèche de faire garder leur enfant au même coût par une assistante maternelle ou une garde à domicile en emploi direct ; d’autre part, en rallongeant son bénéfice au-delà de 6 ans et jusqu’à l’entrée au collège pour les familles monoparentales.

Nous assumons ce choix fort d’apporter une attention toute particulière aux familles monoparentales, dont 30 % vivent dans la pauvreté et 90 % sont des femmes. C’est ce même engagement aux côtés des familles monoparentales qui nous a conduits à augmenter voilà quelques jours la pension alimentaire minimale de 50 %, pour la porter de 123 à 185 euros par mois et par enfant.

Voilà mesdames, messieurs les sénatrices et les sénateurs, les grandes mesures de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Ces mesures vont changer concrètement la vie de millions de femmes et d’hommes. Elles vont permettre de soutenir des professionnels éprouvés par la crise, que nous devons accompagner dans les grandes transformations. Elles contribuent aux réformes structurelles du quinquennat, pour que notre modèle social réponde mieux aux besoins des Français.

C’est le cas des mesures de la branche famille, qui s’inscrivent dans la droite ligne de la politique des 1 000 premiers jours. Elles sont une brique du service public de la petite enfance. Cette grande réforme, nous allons la construire avec les collectivités locales tout au long du quinquennat, pour que chaque famille puisse avoir une solution d’accueil de qualité pour ses enfants.

C’est aussi le cas des mesures de la branche autonomie, qui s’inscrivent dans le chantier plus global que nous avons ouvert pour préparer la société, dans toutes ses dimensions, au vieillissement de la population.

J’étais, vendredi dernier, à Châlons-en-Champagne, pour animer le premier atelier territorial du Conseil national de la refondation, dédié au bien vieillir. Autour de cette question si fondamentale, l’une des plus cruciales auxquelles nous devons répondre dans les prochaines années, nous avons réuni des élus, des professionnels de tous les secteurs, des personnes âgées et leurs familles, ainsi que des acteurs associatifs et privés pour construire des solutions opérationnelles directement sur les territoires.

C’est ce même esprit de pragmatisme et d’ambition que porte ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est dans cette même méthode d’écoute et de coconstruction que je vous propose d’en discuter ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de lartisanat et du tourisme. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, madame, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom de mes collègues du Gouvernement et de Gabriel Attal, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence, puisqu’il est retenu à l’Assemblée nationale pour l’examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2022, permettez-moi d’abord d’exprimer une pensée pour nos professionnels de santé.

Aujourd’hui est une journée particulière pour moi, à titre personnel : en 1985, le 7 novembre, mon père a été victime d’un très grave accident ; depuis lors, je sais dans ma chair ce que nous devons à ces femmes et ces hommes. Au-delà de la considération que nous éprouvons, toutes et tous, pour eux, les épisodes extrêmement douloureux de la crise du covid-19 nous ont montré à quel point leur présence et leur engagement étaient absolument irréprochables.

L’État a bien évidemment répondu présent, à travers le « quoi qu’il en coûte », et a ainsi évité à notre pays un cortège de difficultés. C’est ensemble que nous avons pu traverser l’épreuve si difficile de la pandémie. Bousculée par le choc, notre société a su trouver les ressources et les ressorts nécessaires pour résister. La responsabilité qui nous incombe désormais est de poursuivre la reconstruction.

Dès lors, comme vient de l’exprimer mon collègue François Braun, il nous faut bâtir ensemble un système plus solide, plus accessible, plus efficace et plus juste.

Un système plus accessible, cela implique avant tout d’améliorer l’accès aux soins. L’effort ne débute pas aujourd’hui. Depuis 2017, nous avons investi 53 milliards d’euros supplémentaires dans notre système de santé, avec un Ondam passé de 191 milliards d’euros en 2017 à 244 milliards d’euros en 2023.

Nous avons mis fin aux baisses de tarifs hospitaliers, déployé l’offre 100 % Santé, supprimé le numerus clausus et soutenu l’aide à domicile et nos Ehpad. Nous allons poursuivre cet effort, conformément aux engagements pris devant les Français.

Voilà pourquoi, avec ce PLFSS, l’Ondam progressera en 2023 à un niveau historique de 3,7 %. C’est une progression plus rapide de 50 % qu’au cours de la décennie 2010.

Quant à l’Ondam hospitalier, son augmentation sera de 4,1 % en 2023. C’est deux fois plus qu’au cours de la décennie 2010. Cette augmentation finance notamment une enveloppe exceptionnelle de 800 millions d’euros en 2022, puis 800 millions d’euros supplémentaires en 2023, fruit d’une concertation de François Braun avec les fédérations hospitalières et médico-sociales.

En ville, nous encouragerons le cumul emploi-retraite des médecins proches de la retraite ou en retraite, comme durant la crise sanitaire. Cette incitation prendra la forme d’une exonération de cotisations vieillesse pour 2023, dans l’attente des conclusions du volet santé du CNR.

Renforcer l’accès aux soins, c’est aussi mieux prendre en charge nos aînés dépendants, comme vient de le rappeler mon collègue Jean-Christophe Combe. Avec un Ondam médico-social à +5,1 % en 2023, nous finançons le plein effet des augmentations de salaire, l’embauche de milliers de soignants et l’investissement pour les services à domicile. Rappelons que les augmentations salariales décidées depuis la crise sanitaire représentent un effort de 3,2 milliards d’euros par an pour la cinquième branche de la sécurité sociale, que nous avons créée en 2021.

Nous agissons pour faciliter l’accès aux modes de garde, parce que nous savons combien le destin de nos jeunes enfants se joue dès leurs 1 000 premiers jours.

Ce PLFSS pose la première pierre d’un véritable service public de la petite enfance en réduisant drastiquement le reste à charge des familles pour le recours aux assistants maternels : concrètement, un couple de classe moyenne, qui confie son enfant cinquante heures par semaine, économisera quasiment 2 000 euros sur une année – autant de pouvoir d’achat supplémentaire pour des dizaines de milliers de familles. Cette réduction s’ajoutera à la hausse du plafond du crédit d’impôt pour frais de garde des jeunes enfants que vos collègues députés ont relevé de 2 300 à 3 500 euros lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2023.

Tous ces progrès ne sont possibles que si nous continuons à donner la priorité au travail et à la production.

Les cotisations, socle du financement de notre sécurité sociale, vont passer de 391 milliards d’euros en 2022 à 407 milliards d’euros en 2023. Nous devons cette progression aux 310 000 créations d’emplois prévues en 2022, dont 220 000 ont déjà été réalisées lors du seul premier semestre et alors que 117 000 créations supplémentaires sont attendues en 2023. Au total, de 2020 à 2023, malgré la crise, notre pays pourrait créer 1,2 million d’emplois. Ne l’oublions jamais : c’est le travail qui finance notre système social.

Voilà pourquoi nous entendons, par ce PLFSS, rendre notre système social plus efficace. Les besoins sont immenses, aussi ne devons-nous ménager aucun effort pour trouver des marges d’efficience et pour réaliser des économies là où elles sont pertinentes – et elles peuvent être substantielles.

Gouverner, c’est choisir, vous le savez comme moi. C’est la raison pour laquelle nous assumons de demander des efforts à certains acteurs, qui peuvent contribuer à l’effort commun.

Nous assumons ainsi de demander des efforts aux laboratoires de biologie, qui ont réalisé 7,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en commercialisant des tests covid en 2020 et 2021 – même si nous saluons évidemment leur mobilisation sans faille durant la crise sanitaire. Leur rentabilité était par ailleurs déjà très élevée avant la crise, à un taux de près de 30 %. La Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) négociera dès 2023 une baisse de prix avec le secteur, au moins à hauteur de 250 millions d’euros.

Nous assumons aussi de demander des efforts au secteur de l’imagerie médicale, qui représente près de 5 milliards d’euros de dépenses. Nous pouvons limiter les examens redondants, inappropriés ou parfois inutiles. Nous demanderons à la Cnam de négocier un nouveau protocole pour juguler la dépense de 150 millions d’euros en 2023.

Nous assumons enfin de demander des efforts aux fabricants de médicaments. Les dépenses dans ce secteur sont dynamiques du fait du vieillissement démographique et de l’arrivée de nouvelles molécules sur le marché. Nous devons redoubler l’effort sur la pertinence des prescriptions et les baisses de prix ciblées sur les médicaments les plus anciens afin de mieux récompenser l’innovation. Ces baisses de prix s’élèveront à 800 millions d’euros en 2023.

Ces efforts, nous ne les demandons pas par plaisir de faire des économies, mais parce qu’ils sont indispensables pour dégager des marges de manœuvre budgétaires et mieux investir dans l’hôpital, en ville comme dans le médico-social. Soyons très clairs : lorsque nous parlons d’économies, il s’agit d’efforts de maîtrise par rapport à des dépenses qui continueront d’augmenter. C’est la condition indispensable pour garantir la soutenabilité et la résilience de nos comptes sociaux.

Je rappelle, à l’intention de ceux qui l’oublieraient, que les taux d’intérêt à 10 ans sur la dette française frôlent les 3 %, alors que ceux du Royaume-Uni dépassent les 4 % et que ceux de l’Italie approchent les 5 %. La parenthèse de l’argent gratuit sur les marchés s’est bel et bien refermée. Retrouver une trajectoire maîtrisée de nos comptes publics est la condition sine qua non de notre indépendance financière. (Mme Laurence Cohen sen émeut.)

Nous voulons, par ce PLFSS, construire un système plus juste. Or assurer la justice, c’est aussi adresser un message de fermeté à l’égard de tous les fraudeurs, sujet auquel je vous sais attentifs depuis longtemps, qu’il s’agisse de la fraude aux cotisations ou de celle aux prestations.

Puisque les fraudes se perfectionnent, nous allons également nous perfectionner en améliorant nos outils.

Des pouvoirs d’enquête cyber seront ainsi confiés à plus de 400 contrôleurs des caisses de sécurité sociale pour mieux repérer et réprimer les fraudes à enjeux.

Les échanges d’informations seront renforcés, notamment entre greffiers des tribunaux de commerce et caisses de sécurité sociale.

Reprenant une proposition émise par votre chambre, nous interdirons également le versement de prestations sociales, hors pensions, sur des comptes bancaires qui ne seraient pas situés dans l’espace unique de paiement en euros (Sepa), ces prestations étant soumises à la condition de résider sur notre territoire. Je sais que ce sujet a fait l’objet d’un rapport de votre commission des affaires sociales dont je salue le travail.

Le texte qui vous est soumis comporte des dispositions sur le transfert Agirc-Arrco. Je veux à cet égard formuler trois rappels.

Premièrement, le texte répond précisément aux recommandations du rapport que j’évoquais à l’instant de M. Savary et Mme Apourceau-Poly, en reportant à 2024 le transfert du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire aux Urssaf, comme le réclamaient également les syndicats et le patronat.

Deuxièmement, nous demandons à l’Agirc-Arrco et aux Urssaf de conclure une convention pour inscrire leur partage de responsabilités noir sur blanc. Soyons très clairs : le rôle des Urssaf est de recouvrer des cotisations, pas de verser des retraites. Ni aujourd’hui ni demain, les Urssaf ne verseront les retraites complémentaires. L’Agirc-Arrco continuera de fiabiliser les données personnelles des salariés.

Troisièmement, ce transfert s’inscrit dans le mouvement d’unification du recouvrement social au sein des Urssaf et du recouvrement fiscal à la direction générale des finances publiques (DGFiP). Il s’agit d’une démarche de simplification pour les entreprises, avec un objectif de gain de recouvrement pour le régime de l’Agirc-Arrco.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne doute pas que nous allons enrichir ensemble ce PLFSS au cours de nos débats. Sur ces travées, il me semble que vous partagez l’objectif de refondation et de consolidation de notre système social. Chacun d’entre vous est force de proposition sur ces enjeux, comme vous l’avez démontré.

Au-delà de nos clivages légitimes, sachons bâtir, avec confiance, mais aussi responsabilité, un PLFSS qui soit une brique importante d’un système social plus efficace, plus juste, et plus solidaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Laurence Rossignol. Cela fait du bien quand ça s’arrête !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de lorganisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure générale, madame, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale, c’est l’effort collectif consacré par notre nation pour protéger la collectivité face aux aléas de la vie.

Aux côtés de mes collègues, la ministre en charge de l’organisation territoriale et des professions de santé que je suis est honorée de présenter aux spécialistes des territoires que vous êtes les engagements forts de ce PLFSS.

Alors que notre système de santé a été fortement sollicité et qu’il a su relever le défi de la crise sanitaire, grâce à l’engagement sans faille de l’ensemble des acteurs de santé, que je tiens une nouvelle fois à saluer, la ligne de ce PLFSS est claire : défendre les préoccupations essentielles de nos concitoyens à travers plus de prévention, un accès renforcé aux soins et un système plus juste et plus éthique.

Ce PLFSS comporte ainsi des mesures fortes en matière de prévention, telles que la création de nouveaux rendez-vous aux âges clés de la vie ou pour améliorer la santé des femmes.

Il s’agit d’un PLFSS de défense de l’hôpital, très éprouvé par la pandémie et porté à bout de bras par l’ensemble du personnel soignant, comme François Braun l’a déjà longuement souligné.

Le Gouvernement a pris ses responsabilités en reprenant une partie de la dette hospitalière pour redonner de l’air aux établissements et leur permettre d’investir. Les engagements inédits pris lors du Ségur de la santé ont apporté une réponse forte à la demande légitime de reconnaissance et de valorisation de l’engagement des soignants. Ces efforts se prolongent dans ce PLFSS.

Nous créons également des outils pour encadrer l’intérim, qui fragilise les équipes et pèse sur les comptes des hôpitaux.

Par ailleurs, nous prenons à bras-le-corps la question de l’intégration des personnels de santé étrangers – c’est une priorité pour mon ministère.

Par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a souhaité décaler au 30 avril prochain la date butoir de régularisation des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue) soumis au cadre légal de la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé de 2019. En effet, la pandémie a porté un coup d’arrêt au processus d’évaluation et de reconnaissance de leurs compétences. En responsabilité, cette date limite avait été reportée une première fois au 31 décembre 2022.

Notre objectif est de ne pas pénaliser les hôpitaux – et donc les patients – au sein desquels ces praticiens jouent souvent un rôle essentiel dans la continuité des soins tout en conservant toutes les exigences nécessaires sur le niveau de compétence requis. Gardons toujours à l’esprit que les femmes et les hommes que l’on appelle « Padhue » participent pleinement au bon fonctionnement de notre système de santé.

Enfin, ce PLFSS traduit notre engagement en matière d’accès aux soins et de lutte contre les déserts médicaux à travers une simplification des aides à l’installation via le guichet unique, de nouvelles mesures pour favoriser le maintien en activité des médecins ou encore l’introduction de la notion de responsabilité collective en matière de permanence des soins.

Protéger notre modèle de protection sociale, c’est aussi agir avec responsabilité contre toutes les formes de fraudes, comme l’a rappelé à l’instant Olivia Grégoire.

La fraude, je le dis nettement, est un coup bas porté à notre pacte républicain et à la justice sociale. Parce qu’elle sape le consentement à l’impôt, elle pénalise en priorité les Français les plus modestes, c’est-à-dire tous ceux qui bénéficient légitimement de nos filets de sécurité.

Lutter contre les fraudes est aussi une exigence forte pour garantir la pérennité de notre modèle. Avec mon collègue Gabriel Attal, nous avons souhaité introduire plusieurs mesures dans ce PLFSS en nous appuyant sur de nouveaux outils. Il s’agit à la fois de mieux prévenir et mieux détecter les fraudes. Je pense notamment à l’élargissement des possibilités de déconventionnement d’urgence des professionnels de santé en cas de violation grave des engagements conventionnels ou à la mise en place d’un nouveau barème de pénalités financières en cas de fraude.

À cet égard, l’article 44 relatif à l’extrapolation a peut-être été mal compris : il s’agit d’une mesure visant avant tout à chiffrer au plus près le préjudice de l’assurance maladie, laquelle ne peut aujourd’hui contrôler qu’une fraction limitée des factures. Cette mesure avait été proposée par la Cour des comptes en 2020.

Parce que ce PLFSS est ambitieux, je me réjouis de l’ouverture de ces débats devant votre assemblée. Je sais le Sénat attentif à l’équilibre des comptes sociaux, condition essentielle à la pérennité de notre modèle. Je vous sais aussi particulièrement attachés à la prise en compte des réalités des territoires.

Ce PLFSS est une première étape ; elle sera complétée par le volet santé du CNR, qui se déploie en ce moment sur l’ensemble du territoire avec pour objectif non seulement de mettre en valeur toutes les initiatives locales déjà existantes, mais également de trouver des solutions nouvelles pour notre système de santé. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains.)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous nous apprêtons à examiner le premier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature.

L’examen du texte par l’Assemblée nationale a été réalisé dans des conditions particulières – vous ne me contredirez pas. Les députés ont tout d’abord rejeté les première et deuxième parties du texte relatives, respectivement, aux comptes du dernier exercice clos et à la rectification des prévisions de recettes et aux objectifs de dépenses de l’année 2022.

Le Gouvernement a ensuite engagé à deux reprises sa responsabilité en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution : une première fois sur la troisième partie du texte, relative aux recettes de l’année à venir, avant même d’avoir commencé l’examen de cette partie ; une seconde fois sur la quatrième partie, relative aux dépenses de l’année à venir et sur l’ensemble du PLFSS, après avoir examiné quelques articles concernant, pour l’essentiel, la branche autonomie.

Il en résulte que le PLFSS pour 2023 nous arrive tronqué, vidé de ses deux premières parties, ce qui est assez inédit, que le Gouvernement n’a pu rétablir lorsqu’il a engagé sa responsabilité sur les parties suivantes. Surtout, le débat parlementaire lui-même a jusqu’à présent été tronqué.

Au regard des enjeux financiers et politiques particulièrement importants des projets de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons la responsabilité de faire vivre, au Sénat, des débats complets sur le PLFSS pour 2023.

Soyez sûrs, mesdames, messieurs les ministres, que ces débats seront à l’image du Sénat, c’est-à-dire sérieux et respectueux, mais aussi exigeants et parfois en contradiction avec votre approche.

Comme l’ont souligné les ministres, les comptes de la sécurité sociale s’améliorent depuis le trou d’air historique de l’année 2020, pic de la crise sanitaire, économique et sociale provoquée par l’épidémie de covid-19. De ce point de vue, le Gouvernement considère que l’année à venir devrait de nouveau marquer une progression, avec un déficit réduit à 7,2 milliards d’euros. Cela reste significatif pour des comptes censés être équilibrés, mais nous sommes loin des quelque 39,8 milliards d’euros de 2020, record historique de déficit des comptes sociaux. Nous en acceptons l’augure.

Toutefois, notre commission a exprimé son inquiétude face aux chiffres que vous nous présentez.

Inquiétude, tout d’abord, quant à la crédibilité des comptes pour 2023. Le tableau d’équilibre repose en effet sur des hypothèses que le Haut Conseil des finances publiques qualifie d’optimistes : d’une part, le Gouvernement prévoit une croissance du PIB de 1 % et une nouvelle progression de la masse salariale de 5 % ; d’autre part, il prévoit une quasi-disparition des dépenses liées au covid-19, la provision correspondante ne s’élevant qu’à 1 milliard d’euros, ce qui nous semble un peu faible. Nous avons l’intention de vous donner les moyens de vérifier ce dernier point.

Vous comptez d’ailleurs uniquement sur cette vision optimiste de la conjoncture économique et sanitaire pour « tenir » les comptes et non sur les mesures que vous prendrez. À cet égard, il est significatif que le solde transmis par l’Assemblée nationale soit égal au solde tendanciel, c’est-à-dire à celui que l’on constaterait si aucune mesure n’était prise dans le cadre de ce PLFSS.

Notre inquiétude vaut aussi pour l’avenir. En effet, si l’on se projette au-delà de 2023, au travers de l’annexe B, quadriennale, de ce PLFSS, on peut observer que le déficit relativement modeste espéré pour 2023 devrait être, non pas une étape sur le chemin du retour à l’équilibre, mais seulement une embellie avant un nouveau creusement des déficits : selon vos propres prévisions, la situation des comptes de la sécurité sociale devrait se dégrader dès 2024, avec un déficit de 8,8 milliards d’euros, jusqu’à atteindre un niveau plus inquiétant encore, autour de 12 milliards d’euros par an en 2025 et 2026.

Or ce scénario repose, là encore, sur des hypothèses de croissance optimistes et des perspectives de maîtrise des dépenses, notamment en ce qui concerne l’Ondam, dont nous ne savons rien.

L’annexe B, qui vise également à donner une visibilité et une stratégie pour l’avenir, n’apporte aucun détail sur les moyens que le Gouvernement envisage de se donner pour maîtriser les comptes. Il y est tout juste précisé, par exemple, que le solde de la branche vieillesse « bénéficierait de l’objectif d’élévation progressive de l’âge effectif de départ sur le quinquennat ».

Le Haut Conseil des finances publiques déplore également que vos prévisions supposent des « effets importants et immédiats de réformes » dont « ni les modalités, ni les impacts, ni le calendrier ne sont documentés ».

En somme, cette trajectoire, qui devrait se dégrader dès 2024, n’est, hélas ! qu’une version optimiste de l’avenir des comptes sociaux. Il est donc à craindre que les déficits ne continuent de s’accumuler et que de nouveaux transferts à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades) ne doivent être envisagés à l’avenir.

Dans ce contexte, la commission des affaires sociales a adopté une approche responsable. Nous proposerons tout d’abord de rétablir les parties de loi de financement de la sécurité sociale qui doivent exister, quitte à les corriger, comme en première partie.

Nous marquerons ensuite notre refus de la vision que le Gouvernement présente de l’avenir de la sécurité sociale à l’annexe B, à la sincérité douteuse et dépourvue de dimension stratégique.

Nous poserons nous-mêmes les jalons de véritables mesures d’équilibre, en particulier sur les retraites, mais aussi en proposant quelques recettes supplémentaires.

Nous renforcerons, enfin, le contrôle du Parlement, notamment dans le cas où les hypothèses optimistes du Gouvernement ne se vérifieraient pas – par exemple, en cas de dépassement significatif de l’Ondam et des dépenses d’urgence.

Vous l’aurez compris, mesdames, messieurs les ministres, nous serons, tout au long de ce débat que nous espérons riche, des interlocuteurs à la fois exigeants et constructifs, mais aussi, le cas échéant, des contradicteurs. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et Les Républicains.)

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Corinne Imbert, rapporteure de la commission des affaires sociales pour lassurance maladie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce budget de l’assurance maladie est le troisième depuis le déclenchement de l’épidémie de covid-19 et le premier de la nouvelle équipe gouvernementale.

La première circonstance pourrait commander une certaine prudence dans le cadrage financier ; la seconde un peu d’audace dans les mesures nouvelles. Hélas, nous n’avons trouvé ni l’une ni l’autre.

Tout d’abord, la trajectoire financière est improbable. Le redressement annoncé est spectaculaire, mais il résulte d’un « effet recettes » anticipé sur la base, non de mesures nouvelles, mais d’hypothèses tant macroéconomiques qu’épidémiologiques très optimistes.

Les dépenses dans le champ de l’Ondam seraient en baisse en tenant compte des dépenses covid, mais elles augmenteraient de 3,7 % hors covid, selon un rythme de progression soutenu dans tous les sous-objectifs : 2,9 % pour les soins de ville, 4,1 % pour les établissements de santé…

On peine toutefois, derrière ces dynamiques de dépenses, à distinguer une grande politique de soutien au système de santé. L’Ondam hospitalier, par exemple, n’est renforcé que par la revalorisation du point d’indice et la forte inflation. Dans cinq ans, l’Ondam atteindrait ainsi 270 milliards d’euros, alors qu’il dépassait à peine 200 milliards d’euros en 2019, progressant ainsi de plus de 6,5 milliards d’euros par an. C’est impressionnant, mais à quoi correspondent ces montants ? Ni les professionnels de santé ni ceux qui cherchent à les consulter ne sauraient le dire. La crédibilité de ce budget est ainsi mise en cause tout comme la sincérité de la discussion parlementaire quand de généreuses annonces médiatiques interviennent durant son examen même.

Les mesures nouvelles n’ont pas le niveau d’ambition qu’exige notre système sanitaire. En ce qui concerne la prévention, l’article 17 constitue, à lui seul ou presque, l’emblème du nouvel intitulé du ministère, rebaptisé « de la santé et de la prévention ». Or il est peint en trompe-l’œil : s’agissant des trois rendez-vous de prévention tout au long de la vie, entre 20 ans et 25 ans, 40 ans et 45 ans et 60 ans et 65 ans promis dans le dossier de presse, le troisième est déjà en cours de déploiement et le deuxième ne prendra la forme que de « rendez-vous » ou de « séances » assez indéterminés.

La prévention est une chose trop sérieuse et, dans notre pays, trop urgente pour creuser à ce point l’écart entre promesses et réalisations.

En matière d’accès aux soins de ville, les mesures existent, mais elles sont timides ou brouillonnes – les deux qualificatifs n’étant pas mutuellement exclusifs.

À l’heure où tout semble prêter le flanc à la refondation, l’article 22 vise, plus modestement, à « rénover la vie conventionnelle ». En réalité, cet article ne modifie qu’à la marge les règles encadrant les conventions conclues entre les organisations représentatives des professions de santé et l’assurance maladie.

Le texte nous est, en outre, parvenu bardé d’articles additionnels, parfois à la limite de la recevabilité, et composant, davantage qu’une loi de financement, une espèce de loi Santé en costume d’Arlequin, avec accès direct aux infirmiers en pratique avancée, élargissement de la permanence des soins, dépistage de la drépanocytose, expérimentation de consultations avancées, certificats de décès…

Tous ces sujets sont bien sûr importants, mais ils gagneraient à être examinés de manière cohérente à l’abri des contraintes pesant sur le calendrier budgétaire.

M. Alain Milon. Tout à fait !

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Sur ces thématiques, comme sur celle de la téléconsultation, que le Gouvernement entend mieux encadrer, nous proposerons des améliorations. De même, nous souhaitons rétablir le dispositif de la proposition de loi du président Retailleau sur la quatrième année de médecine générale.

M. Laurent Burgoa. Très bien !

Mme Corinne Imbert, rapporteure. Curieusement, aucune mesure de ce PLFSS ne concerne le financement de l’hôpital, sinon l’interdiction de l’intérim médical, notamment pour les jeunes diplômés, médecins et infirmiers. Si cette mesure est souhaitable, l’intérim des jeunes diplômés n’est pas le seul facteur qui fragilise le fonctionnement des établissements de santé, la qualité et la continuité des soins. Nous proposerons d’aller plus loin.

Quant aux mesures de régulation des produits de santé et de la biologie médicale, elles étaient manifestement mal préparées.

Le Gouvernement a ainsi finalement supprimé la contribution spécifique aux médicaments en forte croissance et rééquilibré, en contrepartie, la clause de sauvegarde en plafonnant les contributions dues pour l’année 2023. Il a, en outre, abandonné le référencement périodique des médicaments, que les fabricants et pharmaciens avaient jugé dangereux et inadapté.

L’article 27 ne s’apparente à rien de moins qu’un ultimatum au secteur de la biologie médicale puisque, à défaut d’accord, un arrêté ministériel fixerait une baisse généralisée de la cotation des actes. Une contribution exceptionnelle, assise sur le remboursement du dépistage du covid-19 en 2021, nous semble plus juste.

Mes chers collègues, la déception est grande. Sous réserve du vote des modifications issues des travaux de la commission, je vous proposerai, sans grand enthousiasme, d’adopter ce projet de loi de financement dans son volet assurance maladie. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC.)

Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, excédentaire depuis 2013, la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) a renoué avec les excédents en 2021, après une année de déficit exceptionnel. Ce rebond se confirme en 2022.

Pour 2023, l’objectif de dépenses de la branche AT-MP est fixé à 14,8 milliards d’euros pour l’ensemble des régimes obligatoires de base. Le PLFSS confirme le retour à une situation financière favorable, avec un excédent de 2,2 milliards d’euros.

À moyen terme, l’écart entre les recettes et les dépenses s’amplifierait, atteignant 3,3 milliards d’euros en 2026.

Cette situation, qui peut sembler confortable, signifie surtout que le calibrage des recettes de la branche AT-MP reste structurellement déconnecté de ses besoins de financement : le ratio d’adéquation des recettes aux dépenses dépasserait 120 % en 2026 en l’absence de mesures nouvelles.

Des mesures de rééquilibrage doivent donc être envisagées. Elles peuvent passer par de nouvelles dépenses, notamment en matière de prévention, et par la poursuite de l’ajustement à la baisse des cotisations.

Il me semble important de réaffirmer, mesdames, messieurs les ministres, que les excédents de la branche ne doivent être utilisés pour des finalités autres que la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Malgré ces marges financières, le PLFSS ne contient cette année que peu de mesures affectant significativement les dépenses.

Il améliore la couverture des non-salariés agricoles pluriactifs en leur permettant de percevoir des indemnités journalières maladie au titre de l’activité non salariée qu’ils ne peuvent exercer en cas d’accident ou de maladie professionnelle dans le cadre d’une activité salariée, en sus des indemnités journalières AT-MP dont ils bénéficient à ce titre.

En outre, cet article tend à permettre aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux de bénéficier d’une rente AT-MP en cas d’incapacité permanente partielle.

Ces mesures, à l’impact financier très limité, sont néanmoins bienvenues.

Par ailleurs, deux articles additionnels ont été retenus par le Gouvernement dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité. Ils procèdent à des ajustements très ponctuels du dispositif d’indemnisation, par le fonds d’indemnisation des victimes de pesticides, des enfants atteints d’une pathologie causée par leur exposition prénatale du fait de l’activité professionnelle de leurs parents. Cette indemnisation reste marginale dans l’activité du fonds, créé en 2020 et adossé à la mutualité sociale agricole (MSA) : sept demandes ont été déposées en 2021, dont seulement deux ont donné lieu à des suites favorables.

De manière classique, le PLFSS fixe les montants des transferts et versements de la branche AT-MP aux fonds amiante et vers d’autres branches.

Le montant du versement à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP serait fixé à 1,2 milliard d’euros pour 2023, alors qu’il était de 1,1 milliard d’euros en 2022 et de 1 milliard d’euros les sept années précédentes. Cette augmentation en deux temps, annoncée l’an dernier par le Gouvernement, vise à approcher le point bas de l’estimation de la commission chargée d’en évaluer, tous les trois ans, le coût réel pour la branche maladie.

Or le nombre de maladies professionnelles a diminué de plus de 10 % entre 2012 et 2021. Des progrès ont été accomplis en matière de sensibilisation et d’information des victimes et de simplification des procédures. Dans ce contexte, l’augmentation de ce versement apparaît comme une ponction, réalisée dans des conditions peu transparentes et ne visant qu’à contribuer à combler le déficit de la branche maladie. Imagine-t-on qu’une autre caisse soit tenue de payer le coût supposé du non-recours aux prestations qu’elle est chargée de verser ?

La commission propose donc, comme l’an passé, de réduire le montant de ce versement à 1 milliard d’euros, ce qui nous semble représenter un maximum. Les 200 millions d’euros ainsi conservés par la branche pourraient utilement être fléchés vers la prévention et l’accompagnement.

Le montant des dotations aux fonds amiante – le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante et le fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante – augmente en valeur absolue de 547 à 557 millions d’euros, mais son poids relatif dans l’ensemble des dépenses de la branche continue de décroître, en cohérence avec la baisse tendancielle du nombre des travailleurs ayant été exposés à l’amiante au cours de leur carrière.

Sous réserve de l’adoption des amendements qu’elle a déposés, la commission vous invite à approuver l’objectif de dépenses de la branche, fixé à 14,8 milliards d’euros pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour lassurance vieillesse. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, année après année, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est l’occasion pour le Sénat d’alerter le Gouvernement sur la dégradation de la situation financière de la branche vieillesse.

Année après année, nous assumons nos responsabilités et nous adoptons les mesures difficiles que les circonstances imposent pour garantir le versement des pensions dans la durée et éviter à nos enfants d’avoir à travailler au-delà de 65 ans.

Année après année, le Gouvernement se voile la face en reportant sans cesse au lendemain l’une des décisions les plus importantes qu’il ait à prendre. Il y a cinq ans, souvenez-vous, le candidat Emmanuel Macron estimait qu’il n’y avait pas de problème de financement du système de retraite. Le temps a passé, les déficits se sont accumulés et, un beau jour, telle la vigie du Titanic, le Président de la République a fini par apercevoir l’iceberg ! C’est à nous, désormais, qu’il revient de fermer en urgence les cloisons étanches pour maintenir la France à flot.

En effet, la situation de la branche vieillesse n’autorise plus la moindre tergiversation. Le vieillissement démographique, le ralentissement de la croissance et la persistance d’une inflation soutenue devraient porter son déficit à 13,6 milliards d’euros d’ici à 2026. Notons que cette projection intègre les effets d’une réforme des retraites dont le Gouvernement n’a pas daigné nous communiquer les paramètres exacts et dont on sait uniquement qu’elle améliorerait le solde de la branche de 8 milliards à 9 milliards d’euros d’ici à 2027.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. C’est déjà bien ! (Sourires.)

M. René-Paul Savary, rapporteur. Face à un horizon aussi chargé, le PLFSS pour 2023 ne contient quasiment aucune mesure ayant une incidence financière sur la branche, hormis quelques articles portant sur la lutte contre la fraude sociale, qui ne produiraient que quelques millions d’euros de recettes supplémentaires au profit de la branche.

Dans ce contexte, je proposerai à notre assemblée d’instituer une convention nationale pour l’emploi des seniors et la sauvegarde du système de retraite, rassemblant des représentants des partenaires sociaux, de l’État et des associations familiales de retraités, ainsi que des personnalités qualifiées. Cette instance sera chargée de proposer au Gouvernement des mesures tendant notamment à favoriser le maintien des seniors dans l’emploi – il s’agit d’avoir une vision nouvelle des seniors dans notre société – ; à garantir la prise en compte de la pénibilité du travail, du handicap et des carrières longues ; à ramener la branche vieillesse à l’équilibre à l’horizon 2033.

Si cette convention aboutissait, ce que nous souhaitons vivement, à un compromis sur des mesures permettant d’atteindre ces objectifs, un projet de loi devrait être déposé sans délai au Parlement. En cas d’échec des discussions, ce que nous regretterions, plusieurs mesures paramétriques entreraient en vigueur le 1er janvier 2024.

Il s’agirait ainsi de fixer dans la loi, ce qui n’est pas le cas actuellement, l’âge du taux plein automatique à son niveau actuel, soit 67 ans ; de porter la durée de cotisation à 43 annuités dès la génération 1967 au lieu de la génération 1973, ce qui représenterait près de 3 milliards d’euros de recettes supplémentaires à l’échelle du système de retraite à l’horizon 2030 ; de reporter de deux ans l’âge légal de départ pour atteindre 64 ans à compter de la génération 1967, ce qui améliorerait le solde du système de retraites de près de 13 milliards d’euros en 2030.

Bien entendu, cette réforme concernerait également les régimes spéciaux, qui devront contribuer autant que les autres à l’effort collectif, et ce avant 2033.

Je vois dans ces mesures le seul moyen de ramener la branche vieillesse à l’équilibre sans augmenter les cotisations ni diminuer les pensions. À défaut, nous laisserions à la jeunesse un système de retraite en bien piètre état, avec, selon les estimations du Comité d’orientation des retraites (COR), un déficit de l’ordre de 45 milliards d’euros en 2070. Nous rendrons-nous coupables d’une telle négligence et, j’ose le dire, d’une telle lâcheté ? Je ne peux le croire ! Alors, mes chers collègues, laissons de côté les clivages partisans et unissons-nous autour de ce qui nous rassemble : sauvons ensemble notre système de retraite ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour l’exercice 2022, la branche famille connaîtrait un excédent de 2,6 milliards d’euros, qui se réduirait de moitié en 2023 pour atteindre 1,3 milliard d’euros. Cet amoindrissement de l’excédent résulte, pour 850 millions d’euros, de la décision bienvenue du Gouvernement de revaloriser de moitié l’allocation de soutien familial (ASF) en faveur des parents isolés. C’est l’une des rares lueurs de ce PLFSS.

Pour les 70 % restants, la baisse provient du transfert à la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) de la charge des indemnités journalières du congé postnatal de maternité. Cette mesure grève les dépenses de 2 milliards d’euros sans que les familles y trouvent concrètement le moindre avantage. La trajectoire financière pluriannuelle de la branche en serait fortement affectée. Son excédent serait réduit à 500 millions d’euros en 2025, ce qui la priverait des moyens d’une ambition nouvelle. C’est pourquoi, sur l’initiative de la rapporteure générale, la commission vous proposera de supprimer ce transfert de charges.

Les articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale portant sur la branche famille se concentrent sur la réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG).

Le CMG « emploi direct » compense aux familles le coût de la garde de leurs enfants âgés de moins de 6 ans lorsqu’elles recourent à une assistante maternelle ou à une personne salariée pour une garde à domicile.

Le barème actuel induit des effets de seuil importants et entraîne des restes à charge élevés pour les foyers aux revenus les plus modestes. Il rend quasiment impossible le recours à un mode de garde individuel pour ces familles. Une telle fracture sociale n’est pas juste.

L’article 36 prévoit de remédier à ces difficultés en prenant désormais en compte pour le calcul du CMG les ressources de la famille, le nombre d’enfants à charge, le nombre d’heures et le coût médian de la garde, dans un objectif d’égalisation des taux d’effort des familles recourant à un assistant maternel et de celles recourant à un accueil en crèche relevant de la prestation de service unique (PSU) de la branche famille

L’article 36 prévoit aussi la possibilité pour les familles monoparentales de percevoir le CMG « emploi direct » jusqu’aux 12 ans de leurs enfants, contre 6 ans pour le droit commun. C’est là une autre lueur !

La commission soutient la réforme proposée du CMG, qui correspond aux attentes des familles. Elle a en outre adopté un amendement visant à prévoir la suspension sans délai du versement du CMG aux familles cessant de rémunérer l’assistante maternelle ou la garde à domicile.

L’article 36 suscite toutefois plusieurs regrets, à commencer par la date tardive de son entrée en vigueur, fixée en juillet 2025.

Par ailleurs, une évolution du barème, accompagnée d’un mécanisme de compensation satisfaisant, aurait sans doute été possible. En l’état du texte, 43 % des bénéficiaires actuels du CMG seraient défavorisés par la mise en œuvre de la réforme.

Qu’est-il proposé à ces familles perdantes ? L’article prévoit un complément compensatoire, aux paramètres incertains. Il serait soumis à des conditions de ressources et au recours minimal au mode de garde. La réforme se fera donc bel et bien au détriment de certaines familles déjà engagées auprès d’une assistante maternelle ou d’une garde à domicile.

Une seconde mesure, prévue à l’article 37, oblige l’employeur à verser au salarié, en lieu et place des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM), une somme au moins égale aux indemnités journalières pour congé de maternité, d’adoption ou de paternité. L’employeur serait ainsi subrogé de plein droit à l’assuré dans le versement des indemnités journalières dues par la CPAM. Si certains employeurs ont librement choisi cette option ou appliquent en la matière un accord de branche, une telle obligation légale de versement semble disproportionnée en raison des charges de trésorerie qu’elle fait peser sur les entreprises, indépendamment de leur taille ou de leur situation. La commission vous proposera donc de supprimer cette disposition.

Comme vous le constatez, mes chers collègues, de nombreuses autres mesures, attendues des familles, sont absentes de ce PLFSS. Je pense à la réforme de la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE) ou à la fin de la modulation des allocations familiales selon le revenu, soit le retour à l’universalité, mesure pourtant votée par le Sénat en février dernier.

Il convient aussi de s’atteler à la création de places en crèches. C’est une attente des familles, mais aussi une mesure indispensable pour assurer l’égalité entre les femmes et les hommes et accroître l’employabilité des femmes. Il faut par ailleurs résoudre les difficultés de recrutement des professionnels de la petite enfance, qui sont chaque jour plus criantes, sachant que 10 000 postes ne seraient pas pourvus.

Toutes ces avancées représenteront un coût financier. C’est pourquoi nous devons préserver les marges de manœuvre budgétaires de la Cnaf pour une relance véritablement ambitieuse de la politique familiale. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Mouiller, rapporteur de la commission des affaires sociales pour lautonomie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, annoncée triomphalement par le précédent gouvernement, la nouvelle étape de l’histoire de la sécurité sociale que devait être la création de la branche autonomie présente pour le moment un bilan bien mince.

Le débat sur le périmètre de la branche s’est éteint et, pour l’instant, les assurés n’ont pas vu évoluer les choses. Une nouvelle concertation vient de s’ouvrir pour tracer les perspectives du bien vieillir. Elle rendra ses conclusions au printemps prochain, au moment où débutera la concertation sur le handicap.

Il ne faut plus tarder, monsieur le ministre, les défis à relever sont connus, les besoins de recrutement ne font que croître et le secteur a besoin de financements supplémentaires : environ 1,5 milliard d’euros pour le seul secteur des personnes âgées.

L’objectif de dépenses de la branche pour 2023 s’élève à 37,4 milliards d’euros, en augmentation de 5,3 % par rapport à l’année précédente.

Malgré cet effort, comme l’année dernière, cette hausse résulte principalement des revalorisations salariales mises en œuvre dans le cadre du Ségur de la santé et de leur extension à d’autres personnels non médicaux des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Je ne peux que regretter que ces efforts budgétaires supplémentaires ne permettent toujours pas de traiter la situation de l’ensemble des oubliés du Ségur, agents pourtant indispensables au fonctionnement du secteur.

Selon les projections pluriannuelles, la branche autonomie retrouverait une situation excédentaire à compter de 2024. Cet excédent diminuerait les années suivantes du fait de la création annoncée de 50 000 postes dans les Ehpad et du financement du temps dédié au lien social auprès des personnes âgées qui bénéficient du plan d’aide à domicile.

Dans ce contexte, il ne resterait aucune marge budgétaire disponible pour faire évoluer la situation et les conditions de vie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap, ce qui est inquiétant. Nous sommes sollicités de toutes parts par les associations du monde du handicap, qui s’inquiètent de cette situation.

Lors de votre audition par la commission, monsieur le ministre, vous avez parlé d’un PLFSS de fin de cycle. C’est le cas ! Les dispositifs proposés dans le texte viennent sécuriser des réformes déjà lancées les années précédentes et renforcent le virage domiciliaire, qui est la principale orientation stratégique suivie par la branche. Cette orientation répond à la demande des personnes en situation de perte d’autonomie.

Bien sûr, le PLFSS porte la marque des soubresauts qui ont secoué le secteur des Ehpad, à la suite de la publication du livre Les fossoyeurs, mais il traduit aussi la nécessité pour le Gouvernement de combler ce que nos collègues Bernard Bonne et Michelle Meunier ont appelé « les angles morts du contrôle ».

Ces mesures – virage domiciliaire, contrôle – vont dans la bonne direction. Elles illustrent aussi les limites d’une méthode consistant à retoucher ce qui peut être retouché en loi de financement : la vision d’ensemble est quasi absente, la concertation préalable avec les professionnels ou les départements est faible, mais la complexité s’accroît à chaque dispositif nouveau. Songez ainsi que les concours de la CNSA aux départements transiteront désormais par plus d’une dizaine de canaux différents !

Outre ces dispositifs d’intérêt variable, l’Assemblée nationale a ajouté dix-neuf articles – un record ! –, dont onze demandes de rapport pour la seule branche autonomie…

Parmi ces dispositions, j’en mettrai trois en exergue : la revalorisation annuelle du tarif plancher, qui passera à 23 euros en 2023 ; la création d’un parcours de rééducation et de réévaluation des enfants en situation de polyhandicap ou de paralysie cérébrale ; une expérimentation visant à assurer un meilleur accompagnement des aidants.

Toutefois, la question du financement de ces mesures nouvelles reste entière et inquiète les départements, qui ne peuvent supporter de nouvelles charges sans aucune visibilité. Aujourd’hui, des discussions sont en cours, mais les départements n’ont aucune certitude.

Un souffle nouveau est nécessaire. Il est indispensable d’engager une réflexion stratégique sur l’autonomie. Il faut réfléchir à la création de ressources nouvelles et surtout imposer une vision pluriannuelle qui ne se résume pas à d’innombrables missions et groupes de travail. Le terme « pluriannuel » est essentiel pour l’ensemble du secteur.

Pour maintenir les questions d’autonomie dans l’agenda politique, pour que, enfin, une vision stratégique soit nourrie par des données, pour que des décisions de financement soient prises, la commission des affaires sociales vous propose d’institutionnaliser le dialogue entre les différents partenaires, sous la forme d’une conférence des générations et de l’autonomie. Puissent ces instances jouer le rôle confié à la conférence nationale du handicap pour faire progresser la prise en charge des plus fragiles.

En conclusion, permettez-moi de me faire le relais de nombreux acteurs du secteur, qui s’inquiètent non pas de la prise en compte de leurs préoccupations, mais des délais de la programmation et surtout de l’octroi des moyens nécessaires. Ils veulent des perspectives d’avenir. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Christian Klinger, rapporteur pour avis de la commission des finances. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des finances a constaté que le PLFSS comportait peu de mesures ayant des impacts financiers significatifs pour 2023. L’évolution des recettes et des dépenses résulte essentiellement de paramètres inchangés par rapport à cette année et des hypothèses macroéconomiques retenues par le Gouvernement.

Les hypothèses concernant la masse salariale ont été jugées plausibles par le Haut Conseil des finances publiques, mais nous savons qu’il existe un aléa sur la prévision de croissance et que des signes de ralentissement apparaissent.

La prévision de dépenses table sur une quasi-extinction des prises en charge dérogatoires liées au covid-19. Cette moindre dépense escomptée, mais incertaine, explique à elle seule la diminution du déficit de la sécurité sociale en 2023.

Hors crise sanitaire, le déficit en 2023 sera simplement stabilisé par rapport à 2022, malgré des hypothèses de revalorisation des prestations pour l’an prochain sensiblement inférieures à l’inflation, et à condition de conserver une évolution positive de l’emploi et une bonne dynamique de la masse salariale.

Le déficit de l’assurance maladie se réduit fortement. C’est l’effet du faible montant de la provision pour la crise sanitaire. S’y ajoute la ponction de 2 milliards sur la branche famille, injustifiée et inopportune, au moment où le fléchissement de la natalité exigerait une politique familiale plus ambitieuse.

Les mesures de maîtrise des dépenses d’assurance maladie paraissent conjoncturelles, plus que structurelles. Certaines économies attendues sont peu documentées, notamment les actions sur la pertinence des actes et des prescriptions.

La commission des finances relève néanmoins plusieurs dispositions du texte visant à renforcer la lutte contre les abus et les fraudes. Dans l’enquête qu’elle a remise voilà deux ans à la commission des affaires sociales du Sénat, la Cour des comptes avait dressé un constat sévère sur l’insuffisance des contrôles réalisés par l’assurance maladie. Les modifications proposées vont dans le bon sens, mais il faudra amplifier ces actions.

Les prévisions pour 2024 et au-delà nous paraissent inquiétantes pour plusieurs raisons.

Premièrement, le déficit persiste et s’accentue à partir de 2024, alors que les hypothèses de croissance, d’emploi et de recettes sont optimistes.

Deuxièmement, les prévisions de dépenses d’assurance maladie sont elles aussi optimistes, le rythme d’évolution étant inférieur à celui de la croissance majorée de l’inflation. Ce résultat supposerait une maîtrise des dépenses particulièrement efficace, mais les instruments sur lesquels s’appuyer ne sont pas véritablement précisés.

Troisièmement, enfin, la trajectoire des dépenses de retraite, marquée par une nette dégradation dès 2024, est d’autant plus préoccupante que le Gouvernement indique avoir en partie pris en compte, à un niveau qu’il n’a cependant pas clairement précisé, les effets d’une nouvelle réforme.

Le relèvement de l’âge de départ est désormais jugé absolument indispensable, alors que cette idée avait été totalement écartée en 2017. Le Sénat, lui, a été constant sur ce point, en inscrivant depuis 2014, dans chaque PLFSS, une mesure en ce sens.

En tout état de cause, cette réforme, constamment repoussée, sera engagée trop tardivement pour avoir un effet sensible sur le rythme de progression des dépenses de retraites d’ici à 2027.

En résumé, le PLFSS pour 2023 comporte peu de mesures de nature à rééquilibrer les comptes sociaux. L’amélioration affichée pour l’an prochain n’est due qu’à une quasi-disparition escomptée de toute mesure spécifique de gestion du covid-19. Les déterminants des déficits persistent et ils sont sans doute sous-évalués.

En outre, le PLFSS est fondé sur une perspective de dégradation des comptes sociaux durant plusieurs années et sur une remontée des déficits dès 2024. La question de leur financement se posera donc inévitablement d’ici à deux ans, quand les possibilités de reprise par la Cades auront été épuisées, dans un contexte de taux d’intérêt sans doute plus difficile que celui de ces dernières années.

Pour ces raisons, la commission des finances a considéré que le projet de loi de financement de la sécurité sociale n’était pas acceptable en l’état. Elle a donc conditionné son avis favorable à l’adoption des amendements présentés par la commission des affaires sociales, dont elle partage pleinement l’objectif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi quau banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 est le premier que nous examinons sous l’empire d’un cadre organique rénové, qui était censé, en particulier, améliorer nos délais d’examen et renforcer l’information du Parlement.

Or je pense que nous n’avons jamais connu de délais d’examen aussi courts et dégradés. À cet égard, je tiens à rendre hommage à nos rapporteurs, qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour présenter à la commission, puis au Sénat, une position cohérente sur ce texte.

Quant à l’information du Parlement, nous aurons sans doute encore à y travailler, la loi organique n’étant pas suffisante pour atteindre les objectifs fixés.

Sur le fond, nous aurions pu attendre, dans les circonstances de l’engagement de la responsabilité du Gouvernement, un texte resserré sur l’essentiel, traçant quelques axes stratégiques pour l’avenir de la sécurité sociale.

L’article 49, alinéa 3, de la Constitution ne nous aura pourtant pas épargné un texte bavard, dont le volume a encore une fois plus que doublé. Le PLFSS est lesté non seulement de quelques fonds de tiroir des ministères, mais aussi de nombreuses demandes de rapports, dont l’effet concret sur le cours des choses est inversement proportionnel à l’émotion suscitée par leur adoption.

Je n’évoquerai pas dans le détail des dispositions, certes sympathiques, mais dont la place dans le texte n’est pas toujours évidente. C’est sans doute qu’il demeure un malentendu assez fort sur ce qui nous occupe aujourd’hui.

Le PLFSS n’est pas le lieu d’une discussion prospective sur notre système de santé, ni même sur l’organisation de notre protection sociale en général. Il devrait être un des points d’orgue de notre vie démocratique, le moment où le Gouvernement et le Parlement justifient, devant nos concitoyens, du bon emploi des sommes qui leur sont demandées pour le financement de la protection sociale.

Rappelons que nous allons franchir, l’année prochaine, le cap symbolique des 600 milliards d’euros de dépenses. C’est bien plus que le budget de l’État ; c’est bien plus que le financement d’autres politiques publiques, qui ont toutes leur importance, que l’on songe à la défense, à l’éducation et à la recherche, ou encore à la justice, pour n’en citer que quelques-unes.

Dans un contexte où les Français souffrent de la hausse des prix et de conditions de vie de plus en plus difficiles, nous sommes ici pour justifier des prélèvements qui sont effectués sur leurs revenus afin de leur assurer une protection solidaire.

En effet, malgré les sommes très importantes qui lui sont consacrées, notre modèle social est en crise structurelle. L’hôpital semble en plus mauvaise posture qu’au plus fort de la crise, l’accès aux soins souffre d’inégalités insupportables, qu’elles soient sociales ou territoriales. Les retraites sont mises à l’épreuve de la démographie et nous abordons, non sans inquiétude et dans l’impréparation, le mur de la dépendance des générations du papy-boom.

Alors que le modèle solidaire de notre protection sociale est menacé, que nous propose ce texte ? Un statu quo quelque peu incompréhensible en ce que le tableau d’équilibre avant mesures nouvelles est identique à celui après mesures, à cela près que des dépenses nouvelles sont venues absorber les recettes nouvelles.

Nous sommes responsables devant les Français de l’efficacité de la dépense publique et de la préparation du pays aux défis de demain. C’est à cela que nous devrions consacrer nos débats d’aujourd’hui.

Comment sortir d’une économie de crise ? Comment faire face à l’inflation et à la remontée des taux d’intérêt, alors que la dette sociale s’est accumulée ? Comment accueillir l’innovation et favoriser le vieillissement en bonne santé ?

Nous n’avons trouvé aucune réponse à ces questions dans le PLFSS. Néanmoins, en responsabilité, portée par l’exigence que nous devons aux Français et par un attachement profond à la soutenabilité de notre modèle social afin de pouvoir le laisser aux générations futures, la commission des affaires sociales vous en proposera quelques-unes.

Ces réponses passent par une adaptation de notre modèle social aux défis du moment, mais aussi par un renforcement de la reddition des comptes du Gouvernement devant le Parlement et, à travers lui, devant l’ensemble de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. le président. Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Question préalable

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Discussion générale (début)

M. le président. Je suis saisi, par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, d’une motion n° 762.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3 du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (n° 96, 2022-2023), considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la motion.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, permettez-moi de rappeler les propos du Gouvernement lors de la présentation, le 23 septembre dernier, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 : « En sortie de crise sanitaire, et en début de quinquennat, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte d’ambitions pour répondre aux enjeux du quotidien des Français ».

La crise sanitaire et la crise du pouvoir d’achat de nos concitoyennes et concitoyens allaient-elles vous faire abandonner votre logiciel libéral ? Le Gouvernement allait-il enfin arrêter d’épuiser les recettes de la sécurité sociale avec les exonérations de cotisations patronales ? Que nenni ! Le PLFSS pour 2023 prévoit une augmentation de 5 milliards d’euros des exonérations sociales patronales, qui atteindront 70 milliards d’euros en 2023.

Le Gouvernement allait-il enfin prendre ses responsabilités et assumer la dette de 18 milliards d’euros de la Cades, liée à la pandémie de covid-19 ? Au contraire, le Gouvernement a actionné à deux reprises l’article 49, alinéa 3, de la Constitution pour passer outre l’opposition parlementaire. Au passage, il a supprimé une disposition qui avait été proposée par le groupe communiste à l’Assemblée nationale visant à transférer la dette de la sécurité sociale vers le budget de l’État, laquelle avait été adoptée.

Pour débattre, mes chers collègues, il faut en avoir la volonté politique ; or elle n’est pas au rendez-vous, loin de là !

Monsieur le ministre, vous refusez d’entendre la souffrance des personnels des secteurs de la santé et du médico-social, celle des patients qui n’ont plus de médecin traitant ou qui attendent des heures sur les brancards dans les couloirs des hôpitaux.

En persévérant dans vos choix, en amplifiant la logique qui est la vôtre, selon laquelle la santé est un coût qu’il faut réduire, vous détruisez la sécurité sociale, à laquelle les Françaises et les Français sont tellement attachés et vous précipitez les départs des hospitaliers. La situation est critique et atteint un point de non-retour. Pourtant, vous persévérez et signez une politique irresponsable.

En prévoyant une progression des dépenses de l’assurance maladie de seulement 3,7 % – elle est en réalité en diminution de 0,8 % si l’on tient compte de la crise sanitaire –, le budget de la santé va augmenter moins vite que l’évolution naturelle des dépenses de santé de 4 %.

L’Ondam va demeurer un point en dessous de l’inflation, estimée à 4,7 % pour 2023, ce qui est une première bien funeste. Ainsi, vous allez réaliser 1,7 milliard d’euros d’économies en 2023 sur le budget de la santé : autant d’argent qui va manquer pour recruter et mettre fin à l’hémorragie du personnel, qui n’en peut plus, et améliorer les conditions de travail.

Pis, vous justifiez les fermetures de lits – 21 000 entre 2017 et 2022 – et de services par manque de personnel, mais à qui la faute ? Qui refuse de donner des moyens supplémentaires aux universités ? Qui ne réintègre pas les personnels licenciés durant la crise du covid-19 ? Qui ne prend pas en charge les formations, laissant les hôpitaux se débrouiller ?

Vous attendez la montée des colères pour débloquer quelques millions sans vous en prendre à la racine des maux de notre système de santé : le manque de recettes volontairement entretenu.

Quand une maison menace de s’effondrer, pensez-vous que l’urgence soit de repeindre la façade ? C’est pourtant ce que fait le Gouvernement.

Je pense notamment à la situation des services pédiatriques sur laquelle je vous ai interpellé lors des questions d’actualité, monsieur le ministre, le 26 octobre dernier. Là encore, vous m’avez opposé une fin de non-recevoir, balayant les faits que je rapportais d’un revers de main. Pourtant, je ne faisais que relayer la colère et l’indignation des principaux intéressés.

Écoutez ainsi le professeur Stéphane Dauger, chef du service de réanimation pédiatrique de l’hôpital Robert-Debré, qui ne décolère pas : « Entendre que tout est sous contrôle, ça relève presque de la provocation pour ceux qui, sur le terrain, se confrontent à cette crise. Même en travaillant jusqu’à l’épuisement, on doit refuser des patients. »

Alors que les personnels de la pédiatrie dénoncent depuis des années les manques de moyens humains et financiers, le Gouvernement a jugé suffisant d’accorder une prime d’exercice en soins critiques et de doubler la rémunération des heures de nuit, mais ce uniquement jusqu’au 31 mars 2023.

L’épidémie de bronchiolite n’est que le sommet de l’iceberg de la réalité des difficultés que connaissent les urgences pédiatriques tout au long de l’année.

Le déblocage de 400 millions d’euros est une insulte pour les personnels mobilisés, et ce d’autant plus que 150 millions d’euros étaient déjà prévus pour l’ensemble des services en tension de l’hôpital.

Les services pédiatriques, à l’instar de l’ensemble des services des hôpitaux, ont besoin de mesures structurelles pour pallier les conséquences des politiques d’austérité menées depuis près de vingt ans par les gouvernements successifs.

Les difficultés d’accès aux soins rencontrées par nos concitoyennes et nos concitoyens exigent de recruter 100 000 personnes dans les hôpitaux et d’augmenter les capacités des universités à former davantage de médecins, mais aussi de paramédicaux, comme les infirmières et les infirmiers confrontés, dans les instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi), à des conditions de travail dégradées.

Au lieu de ces mesures d’urgence, vous préférez ajouter une dixième année aux internes en médecine et priver les territoires d’une génération de médecins en 2026.

Cette réforme s’est faite sans consultation des organisations syndicales des internes ni réflexion sur son contenu pédagogique. Alors que les études de médecine ont subi tout récemment de profondes réformes, dont les effets n’ont pas encore été évalués, vous allez réduire l’attractivité de la formation de médecine générale.

Le Gouvernement, comme la majorité sénatoriale, n’est pas en phase avec l’aspiration des jeunes générations à exercer un emploi salarié dans des structures collectives.

Monsieur le ministre, pourquoi refuser de financer les centres de santé à hauteur des maisons de santé ou des médecins libéraux ? Pourquoi un centre de santé devrait-il se contenter d’une aide financière à l’installation de 30 000 euros quand les maisons de santé et les médecins libéraux bénéficient, eux, de 50 000 euros ?

La création de centres de santé est pourtant l’une des réponses pour combattre les déserts médicaux et paramédicaux, qui s’étendent partout dans le pays.

Pourquoi ne pas avoir le courage de rétablir les gardes de médecins le soir, le week-end et les jours fériés ? Pour ce faire, il y aurait urgence à revaloriser le montant des gardes et à étendre cette obligation à l’ensemble des médecins généralistes, y compris en secteur 2.

Au lieu de ces mesures de bon sens et de justice réclamées par les établissements hospitaliers de nos territoires, les syndicats et les collectifs, vous choisissez d’exonérer les médecins retraités de cotisations sociales pour qu’ils poursuivent leur activité. On marche sur la tête !

Ce PLFSS était l’occasion de tirer des enseignements de la pandémie et des conséquences incertaines de l’apparition d’un nouveau variant. Comment ne pas être en colère en constatant, monsieur le ministre, que vous avez seulement provisionné 1 milliard d’euros en 2023 pour le financement des tests et des vaccins contre le covid-19 quand les mesures d’urgence sanitaire ont coûté plus de 11 milliards d’euros en 2022 à l’assurance maladie ?

Alors que l’espérance de vie en bonne santé est de 64 ans dans notre pays, le Gouvernement et la majorité sénatoriale souhaitent reculer l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans plutôt que d’augmenter les cotisations patronales de 4 euros par mois pour assurer le financement des retraites. De cette réforme, nous n’en voulons pas !

Ce PLFSS était l’occasion, à défaut d’une grande loi sur le grand âge annoncée à maintes reprises, de s’engager sur la voie du recrutement de 100 000 professionnels par an pendant trois ans dans les Ehpad, avec pour objectif un taux d’encadrement d’un soignant par résident. On en est loin : les 170 millions d’euros dédiés au recrutement dans les Ehpad représentent un demi-poste de plus dans chacun des 7 000 Ehpad de France.

Après le scandale Orpea, continuerez-vous à laisser des organismes à but lucratif gérer massivement les établissements qui accompagnent nos aînés et faire des profits sur leur dos ? Monsieur le ministre, votre projet pour accompagner nos anciens est aux antipodes du projet de société que je porte avec mon groupe.

J’évoquais, au début de mon propos, l’étatisation de la sécurité sociale et sa remise en cause. Ce constat se confirme par le transfert à la branche famille des indemnités journalières des congés de maternité post-naissance, jusqu’ici pris en charge par l’assurance maladie.

En conclusion, mesdames, messieurs les ministres, ce budget est totalement déconnecté de l’urgence. Il est injuste, pour ne pas dire provocateur, inégalitaire et insincère. Alors que le Sénat doit examiner en quatre jours un budget de 600 milliards d’euros, je rappelle que le projet de loi de finances est examiné pendant trois semaines, pour un solde de seulement 480 milliards d’euros.

Alors que le Gouvernement a utilisé l’article 49.3 à deux reprises à l’Assemblée nationale, le Sénat a utilisé son 49.3 interne en déclarant irrecevables la moitié des amendements déposés sur ce PLFSS.

Dimanche dernier, le président du Sénat expliquait pourtant dans Le Parisien que le Sénat discuterait sur le fond de tous les sujets. Le soir même, la commission des finances jugeait irrecevables des amendements visant, par exemple, à mettre à contribution les entreprises responsables d’accidents médicaux pour financer la branche accidents du travail. L’argument invoqué vaut son pesant de cacahuètes : l’adoption de cet amendement aurait un effet trop indirect et incertain sur les finances de la sécurité sociale ! (Sourires au banc des commissions. – Mme Éliane Assassi sourit également.)

Cette censure du Sénat et le coup de force démocratique du Gouvernement démontrent l’absence de volonté de débattre réellement des propositions alternatives de l’opposition.

Pour l’ensemble de ces raisons, les sénatrices et les sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste invitent tous les parlementaires attachés à la sécurité sociale solidaire, universelle et financée par les cotisations à voter notre motion. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. Personne ne demande la parole contre la motion ?…

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, il y a chez vous une grande appétence à débattre. Pourtant, vous proposez de couper court à l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Sourires.)

Mme Éliane Assassi. L’argument est facile !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous l’accorde, madame la présidente.

Vous vous faites le porte-voix d’insatisfactions qui méritent sans doute d’être transmises au Gouvernement. Débattre de chaque article, de chaque amendement, vous donnera justement l’opportunité d’exposer les difficultés de terrain dont vous avez connaissance.

Pour ces raisons, mes chers collègues, je vous invite à ne pas voter cette motion. Il est d’autant plus important de tenir ce débat qu’il n’a pu avoir lieu, dans son intégralité, à l’Assemblée nationale : avis défavorable.

Mme Éliane Assassi. Près de 600 amendements ont été déclarés irrecevables !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Braun, ministre. Le Gouvernement veut permettre aux sénateurs de débattre des sujets de santé : avis défavorable.

Mme Éliane Assassi. L’argument est facile, une fois de plus !

M. Julien Bargeton. C’est le seul !

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Si nous votions avec le cœur, nous soutiendrions probablement la motion de nos collègues communistes. En effet, beaucoup des arguments avancés par Laurence Cohen, et pas seulement le premier, sont justes.

Il en est ainsi, en particulier, des conditions d’examen du texte. Il est rare qu’un PLFSS arrive au Sénat après un recours à l’article 49.3 de la Constitution à l’Assemblée nationale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C’est la première fois.

M. Bernard Jomier. En tout état de cause, l’Assemblée nationale n’a pas complètement débattu de ce texte, qui mérite d’être examiné à fond et sereinement.

Cette situation rend incertaines nos délibérations, puisque nous savons déjà que l’article 49.3 sera utilisé en deuxième lecture, à l’Assemblée nationale. Dès lors, est-il bien utile de mener certains débats ?

Par ailleurs, la majorité sénatoriale, dans sa gestion des irrecevabilités, ne nous a pas simplifié la tâche. Une fois encore, je m’inscrirai dans les pas du très respecté Jean-Pierre Sueur pour souligner que des amendements qui étaient recevables l’an dernier ne le sont plus cette année et que la lecture faite par les différentes commissions du régime des irrecevabilités nous empêche de mener au fond certains débats et nous contraint à utiliser des artifices, tels que des demandes de rapport.

Mis bout à bout, tous ces éléments font que ce budget de la sécurité sociale sera débattu dans des conditions dégradées.

Pour autant, nous nous abstiendrons sur la motion, afin de pouvoir débattre de ce texte.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Nous partageons le constat du groupe CRCE sur ce PLFSS, qui est loin de répondre aux défis qui sont les nôtres.

Nous reviendrons en discussion sur la situation de l’Ondam, et notamment de l’Ondam hospitalier, encore une fois insuffisant, qui oblige à de nouvelles économies alors que la situation de l’hôpital public est plus que critique. Des pans entiers du soin, comme la psychiatrie ou la pédiatrie, sont tout simplement oubliés.

L’Ondam est également insuffisant en matière d’autonomie et de famille, les mesures annoncées étant de surcroît reportées.

Ce PLFSS sans souffle perpétue la lente désintégration du système de santé par une gestion comptable de court terme.

Ce PLFSS nous est arrivé après recours au 49.3 à l’Assemblée nationale. Nous ne sommes pas assurés qu’il ne ressortira pas de nouveau de l’Assemblée nationale, en deuxième lecture, selon ce processus antidémocratique.

Les motifs d’irrecevabilité invoqués à l’encontre de nos amendements sont assez paradoxaux : l’amendement est déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution soit parce que la mesure envisagée aurait un impact négatif sur les recettes de la sécurité sociale, soit parce que son adoption aurait des conséquences insuffisantes, indirectes ou mal évaluées sur les ressources ou les dépenses de sécurité sociale. Les irrecevabilités sont clairement utilisées de manière abusive. (Mme Esther Benbassa applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. On ne peut pas dire que l’Ondam n’ait pas progressé puisqu’il a augmenté de 57 milliards d’euros depuis 2017.

Nous manquons de médecins et trépigner n’y changera rien. Certes, le numerus clausus a été supprimé, mais il faudra attendre dix ans avant d’en constater les effets. Il faut rappeler également combien le covid a perturbé la sécurité sociale avec 35 milliards d’euros de déficit en 2020.

Ce PLFSS contient des éléments de progrès, comme les incitations pour les médecins retraités à continuer leur activité ou celles, pour les médecins libéraux, à participer aux services d’accès aux soins et à la régulation.

Le report de certaines mesures – comme celui, qui avait été annoncé, des 50 000 créations de postes dans le secteur médico-social – ne doit pas faire oublier les progrès, tels que le dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST) – très important pour la stérilité et les grossesses extra-utérines –, les vaccinations par les pharmaciens, infirmiers et sages-femmes – mesure très importante également –, la consultation aux différents âges de la vie, la contraception d’urgence pour toutes les femmes ou encore les efforts en direction des familles monoparentales.

Pour les Français, nous devons examiner ce PLFSS et l’améliorer. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Martin Lévrier applaudit également.)

M. Joël Guerriau. Très juste !

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Je n’aborderai pas le fond de ce PLFSS – nous aurons l’occasion d’en débattre lors de la discussion des amendements – et m’en tiendrai à la motion tendant à opposer la question préalable.

Notre groupe est attaché au débat ; la démocratie, c’est la discussion. Adopter la motion reviendrait à un 49.3 à l’envers. Imaginez que l’Assemblée nationale adopte le texte par la procédure du 49.3 et que le Sénat vote la motion tendant à opposer la question préalable : ce serait la négation du Parlement, mais aussi celle du Sénat. (Vives protestations sur les travées du groupe CRCE.)

Par attachement à la démocratie…

Mme Éliane Assassi. Nous y sommes tout aussi attachés que vous !

M. Olivier Henno. … et parce que nous sommes impatients d’écouter vos arguments, même si nous ne sommes pas d’accord, nous avons la responsabilité de débattre de ce PLFSS. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.

M. Joël Guerriau. Eu égard à l’importance des enjeux, on ne peut que débattre. Un amendement peut toujours être retenu ; le 49.3 n’empêche pas le texte de progresser et d’évoluer.

Il est extrêmement important, ne serait-ce que par respect pour les Français, de montrer que le Sénat travaille de manière constructive. (Marques dironie sur les travées du groupe CRCE.)

Mme Éliane Assassi. C’est ce que nous allons voir !

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 762, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 30 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 278
Pour l’adoption 27
Contre 251

Le Sénat n’a pas adopté.

Discussion générale (suite)

Question préalable
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Chantal Deseyne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Bernard Bonne applaudit également.)

Mme Chantal Deseyne. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce premier PLFSS du quinquennat, fondé sur des hypothèses économiques optimistes – PIB à 1 %, masse salariale à 5 % – et sur des dépenses de santé sous-estimées, montre une amélioration des comptes en trompe-l’œil et temporaire.

Le déficit initial de la sécurité sociale, fixé à l’origine à 6,8 milliards d’euros, est passé à 7,3 milliards d’euros. Il manque une stratégie ambitieuse de réduction des déficits.

D’après les prévisions de recettes inscrites à l’article 3, le solde de la branche famille devait être excédentaire, à hauteur de 2,6 milliards d’euros, au titre de l’année 2022.

Au travers d’un tour de passe-passe budgétaire, nous assistons en réalité à un transfert de plus de 2 milliards d’euros au détriment de la branche famille pour améliorer le solde de la branche maladie, fortement déficitaire. Les dépenses d’assurance maladie sont donc artificiellement allégées.

Je rappelle que la bonne situation financière de la branche famille a été rendue possible au prix d’importantes mesures d’économie touchant directement le budget des familles.

Dans la continuité du quinquennat de François Hollande, votre majorité rabote chaque année la politique familiale. Notre système de politique familiale a perdu sa vocation universaliste.

M. Jean-Christophe Combe, ministre. Nous l’assumons !

Mme Chantal Deseyne. Cette orientation est une grave erreur au moment où les familles subissent de plein fouet une baisse drastique de leur pouvoir d’achat.

Je déplore également un manque de réformes structurelles. L’absence d’une loi sur le grand âge et le manque de nouveaux moyens financiers montrent que les crédits supplémentaires accordés à la branche autonomie ne sont qu’une rustine sur un système à bout de souffle.

Chaque année, on nous promet une loi sur le grand âge et l’autonomie pour la renvoyer ensuite aux calendes grecques. Or, d’après les projections de l’Insee, la part des seniors de 65 ans et plus va augmenter de 33 % entre 2022 et 2041, puis de 51 % d’ici à 2070. Il est urgent d’anticiper cette évolution démographique.

Enfin, nous estimons que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie ne sera pas tenable, comme l’a souligné Corinne Imbert. La hausse de 3,7 % de l’Ondam ne tient compte ni de l’inflation à 4,7 % ni de la hausse tendancielle des besoins de santé, estimée à 4 % par la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS).

Certaines mesures vont dans le bon sens, comme la réforme du complément de libre choix du mode de garde (CMG), allocation perçue par les parents faisant garder leur enfant par une assistante maternelle, une microcrèche, une garde à domicile ou encore une garde partagée.

Dans ses intentions, cette réforme est une mesure de justice et d’équité. Toutefois, dans sa forme actuelle, elle risque d’abaisser les aides versées à 43 % des familles concernées. C’est inacceptable, qui plus est au moment où les familles subissent la hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation.

La réforme du CMG doit éviter de faire des familles perdantes. Lorsque la garde d’enfant est indisponible ou trop chère, de nombreuses mères risquent de décrocher de l’emploi. Mieux soutenir les familles, c’est soutenir l’égalité hommes-femmes.

Attention aussi à ne pas rendre la garde trop coûteuse pour les familles faisant garder leur enfant à temps partiel, que ce soit du fait du travail à temps partiel d’un parent ou de l’utilisation d’une garde périscolaire.

Nos politiques de santé se résument souvent à une approche curative. Or la prévention doit être renforcée.

Le texte prévoit la mise en place de rendez-vous de prévention, dont l’objectif est de renforcer l’intervention des professionnels de santé. Mais comment allez-vous organiser ces trois rendez-vous aux différents âges de la vie, alors que l’on a déjà du mal à trouver des professionnels de santé ?

En outre, c’est non pas forcément l’âge de la personne qui doit définir la période de dépistage, mais plutôt ses antécédents médicaux.

En matière de prévention, j’attire votre attention sur la première épidémie non infectieuse de l’histoire de l’humanité : l’obésité.

En 2012, le ministère de l’économie estimait déjà à 20 milliards d’euros le coût social du surpoids, comparable à celui du tabac ou de l’alcool. Il est regrettable que le PLFSS ne porte aucune mesure de prévention contre l’obésité, dont le coût est si important.

Enfin, monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur un tout autre sujet, celui de l’illectronisme en santé. L’illettrisme numérique résulte de l’inaptitude d’un individu à utiliser les outils numériques du quotidien. Ce phénomène touche 17 % de la population, soit près de 13 millions de personnes en France.

Selon une enquête du journal Le Monde, 67,2 % des patients de 75 ans et plus sont concernés et 43 % d’entre eux sont non diplômés.

Ces patients, victimes de la fracture numérique, sont souvent issus de milieux défavorisés et vivent dans des territoires périphériques éloignés du service public hospitalier. Ne pas pouvoir accéder aux solutions de télésurveillance médicale est pour eux une sorte de double peine.

La télésurveillance a démontré sa pertinence durant la crise sanitaire, permettant la continuité des soins sur des pathologies chroniques. Elle est aujourd’hui indispensable, tant notre territoire est touché par les déserts médicaux et frappé par une pénurie de spécialistes.

Le dispositif actuel se concentre sur le remboursement des seules solutions technologiques. Il écarte par conséquent le suivi humain, seul adapté aux patients en situation d’illectronisme.

Nous devons penser à des solutions pour développer l’accompagnement au digital dans le secteur de la santé, à l’instar de ce que font les associations qui accompagnent les personnes en situation d’illectronisme. Ce n’est pas très compliqué à mettre en œuvre ; la seule difficulté porte sur les moyens. Afin de lutter plus efficacement contre un système à deux vitesses, une partie du budget alloué à la télésurveillance pourrait être fléchée vers des solutions qui rendent le télésuivi accessible à tous.

Ce PLFSS manque d’ambition et d’une vision pour l’avenir de notre système de santé. Le premier PLFSS du quinquennat est un renoncement à réformer en profondeur notre système de santé et laisse encore de côté une partie des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Nadia Sollogoub et M. Martin Lévrier applaudissent également.)

M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans ce PLFSS, l’Ondam augmente de 3,7 % pour atteindre 244,1 milliards d’euros en 2023, en progression de 57 milliards depuis 2017. Certes, l’inflation vient tempérer cette hausse, même si les salaires ont beaucoup augmenté depuis 2020.

Le présent texte prévoit de ramener le déficit à 6,3 milliards d’euros contre 18 milliards en 2022, dont seulement 1 milliard pour le covid-19.

Permettez-moi tout d’abord de saluer le travail des soignants à l’hôpital et dans le secteur médico-social.

En matière de prévention, le projet de loi comporte un certain nombre de progrès : le dépistage IST, la vaccination, la contraception d’urgence, les trois consultations aux âges clés de la vie, l’effort pour les familles monoparentales…

En ce qui concerne l’accès aux soins, les crédits de l’hôpital augmentent de 4,1 % contre 2 % entre 2012 et 2017.

Monsieur le ministre, vous proposez une montée en charge du Ségur de la santé, afin de prendre en compte les « oubliés » et l’investissement. L’hôpital est en difficulté depuis longtemps. Les médecins et infirmières manquent à l’appel pour occuper les postes non pourvus. Quant à la suppression du numerus clausus, elle n’aura de résultats que dans dix ans.

Il nous faut massivement former des aides-soignantes et infirmières pour le secteur médico-social et l’hôpital. Encourager les médecins à participer la régulation est une bonne mesure.

Afin de désengorger les urgences, il faut accueillir les patients sans gravité dans une salle en amont et ouvrir des lits en aval quand cela est possible. Monsieur le ministre, mettez les internes dans les hôpitaux hors centres hospitaliers universitaires (CHU) !

Si le budget alloué au secteur médico-social augmente de 5 %, les 3 000 créations de postes de soignants en Ehpad sont insuffisantes eu égard à l’augmentation de la dépendance – le groupe iso-ressources moyen pondéré, ou GMP, est à 730. Nous comptons 0,3 équivalent temps plein (ETP) par pensionnaire ; il en faudrait 0,5, ce qui représente 35 000 emplois…

Alors que 90 % des Français souhaitent rester à domicile jusqu’à la fin, vous proposez, à l’article 34, de créer des heures supplémentaires d’allocation personnalisée d’autonomie. C’est bien, mais il faudra un budget dépendance pour aider les départements.

Vous proposez également d’augmenter, au cours du quinquennat, le nombre de places en services de soins infirmiers à domicile (Ssiad). C’est indispensable : 240 millions d’euros, c’est un bon début pour le virage domiciliaire.

Tout cela doit se concrétiser par la mise en place du plan grand âge, différé – nous pouvons le comprendre – en raison du covid. Je sais très bien, madame la ministre, que le financement arrive via l’emploi et les cotisations. Toutefois, monsieur le ministre, vous devez fixer au plus vite un objectif pour financer les 50 000 emplois dédiés à la prise en charge de la dépendance.

Dans le secteur du handicap, vous proposez la création de places et la détection des troubles du spectre de l’autisme (TSA). Il faut également renforcer les mesures en matière d’inclusion, notamment le maintien des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) pendant le repas et les interclasses.

En ce qui concerne les zones sous-denses, 6 millions de personnes n’ont pas de médecin traitant. L’article 23 instaure une quatrième année d’internat de médecine en autonomie supervisée, qui a poussé les internes à descendre dans la rue. Nous devons, monsieur le ministre, écouter leurs revendications en matière de rémunération.

Ces décisions, j’en ai bien conscience, se prennent par décret. Toutefois, j’estime qu’un médecin junior en dixième année peut remplacer un confrère et doit percevoir, à raison de dix consultations par jour minimum, 5 000 euros pour vingt jours de travail.

Nous pensons que les médecins retraités poursuivant leur activité en cabinet doivent pouvoir, s’ils le souhaitent, être maîtres de stage. J’ai déposé un amendement en ce sens.

Mobiliser les médecins retraités en les exonérant des cotisations à la Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf) est une mesure juste.

L’article 24 prévoit des aides à l’installation importantes et simplifiées, qui restent malheureusement insuffisantes. J’ai ainsi déposé un amendement peu contraignant, qui me paraît utile, pour le cas de médecins qui souhaiteraient s’installer en zone hyperdense.

La téléconsultation, ce n’est pas un miracle, comme le soulignait notre excellente rapporteure Corinne Imbert. Elle représente toutefois un plus dans les zones où il n’y a pas de médecin, par exemple sous la forme d’une cabine, souvent installée dans une pharmacie.

Les pharmaciens ont joué un rôle très important durant la crise du covid-19. Vous étendez leurs compétences, comme vous l’avez fait pour les infirmières, en matière de vaccination, ce dont je me réjouis.

Monsieur le ministre, si vous avez une cystite sans fièvre le samedi après-midi (Sourires.) ou que votre nourrisson souffre d’une gastro-entérite, le pharmacien ne sera pas rétribué par l’assurance maladie en cas de délivrance de Fosfomycine, d’Adiaril ou de Tiorfan. Il est pourtant le seul professionnel de santé accessible, à l’exception des urgences.

Il en est de même pour le sevrage du tabac : il faut encore améliorer la convention avec les pharmacies.

Ce PLFSS contient des avancées, en particulier sur la prévention, la vaccination et les modes de garde. Toutefois, mesdames, messieurs les ministres, malgré les difficultés de la sécurité sociale liées au covid-19, vous devez fixer un cap pour l’hôpital – je pense notamment aux urgences, à la psychiatrie et à la pédiatrie –, pour le médico-social – nous avons besoin d’un plan grand âge –, pour la rémunération des médecins juniors, pour mobiliser des médecins retraités, pour former massivement des aides-soignantes et des infirmières, pour plus d’internes hors CHU et pour faire preuve de davantage pragmatisme avec les pharmaciens.

En ce qui concerne les retraites, à titre personnel, je voterai l’amendement de M. René-Paul Savary pour équilibrer notre système et préserver les régimes par répartition qui seront en déficit de près de 16 milliards d’euros en 2026.

Cet amendement appelle à renforcer l’action des partenaires sociaux et tend à accélérer la mise en œuvre de la loi Touraine, en particulier avec un report de l’âge de départ à 64 ans – ce sont les partenaires sociaux qui le diront. Mais nous devons aussi tenir compte de la pénibilité de certains métiers et nous mobiliser pour l’emploi des seniors. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées des groupes RDPI et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, des années durant, la France fut enviée pour son système de santé. Aujourd’hui, ce dernier risque de s’effondrer, notamment son hôpital public.

Des urgences aux déserts médicaux, le système de santé repose désormais sur les dernières forces d’un personnel en sous-effectif chronique qui, après la politique active de fermeture des gouvernements successifs, assiste impuissant aux fermetures de lits, de places et de berceaux en raison du manque de personnel. Je citerai deux exemples : mille berceaux pour les crèches du Rhône et jusqu’à 20 % des places du centre de lutte contre le cancer Gustave-Roussy. Sans parler de la psychiatrie et de la pédiatrie qui sont sinistrées – la moitié des lits de neurochirurgie pédiatrique de Necker sont fermés !

Six années durant, les PLFSS se sont succédé sans programmation pluriannuelle de financement comme le supposerait une vision à long terme, tandis que tous les acteurs de santé, qu’ils soient hospitaliers ou de ville, réclament un texte sur l’autonomie et une grande loi sur la santé.

Passer l’été, passer l’hiver, puis de nouveau l’été ne fait pas une politique ! Seul un horizon d’amélioration radicale de notre protection sociale, en lui allouant des moyens en conséquence, pourrait redonner du sens à l’effort du personnel et mettre fin à sa désertion.

Au lieu de cela, les budgets successifs valident un Ondam de pure maîtrise comptable, qui maintient le système en asphyxie financière à la suite d’une politique organisée – j’y insiste, organisée ! – de mises en déficit des comptes sociaux à coups d’exonérations de cotisations, loin d’être toutes compensées, et d’exemptions d’assiette touchant près de 10 % de la masse salariale privée, et ce alors que les besoins sont en progression.

Le Gouvernement esquive cette critique, en présentant un Ondam hospitalier à 4,1 %, mais sa base 2022 n’a pris en compte que deux tiers de l’indice hospitalier de l’inflation, estimé à 5,4 %, soit plus d’un point au-dessus de l’Ondam, et pas tous les surcoûts liés au covid. D’après le calcul unanime des fédérations hospitalières, il manque 1 milliard d’euros.

Avec l’inflation, notamment celle liée aux coûts de l’énergie, et une évolution mécanique de 4 % due à la transition démographique et à la progression des maladies chroniques, le compte n’y est toujours pas.

Cet écart fixe, de fait, un niveau d’économies exigées, même en l’absence d’une ligne spécifique. Avec ce sous-financement chronique de l’Ondam la destruction de l’hôpital public se poursuit.

Ainsi, sans revalorisation de l’indemnité de sujétion et avec du temps de travail additionnel pérenne, les professionnels continueront de déserter l’hôpital, l’intérim prospérera et la loi Rist accélérera la fermeture des services publics et privés non lucratifs.

Dans chaque secteur, l’heure devrait être à un choc d’attractivité par des emplois valorisés permettant un travail de qualité auprès de tous les publics. Comment peut-on se tromper de diagnostic, en ne voyant pas le problème du point de vue de la qualité des emplois ? Pourtant, 20 % des places ne sont pas remplies en deuxième année de formation de sages-femmes, 10 % des étudiants en médecine abandonnent en cours d’études et des secteurs entiers font face à des démissions et n’arrivent plus à recruter.

La détérioration continue des conditions de travail engendre un sous-effectif qui dégrade de nouveau les conditions de travail. Les secteurs entrent alors dans un cercle vicieux dont il n’est possible de sortir qu’avec une ambition. Or ce n’est pas l’objectif de 3 000 créations de postes en Ehpad, par exemple, qui le permettra, puisqu’il en faudrait six fois plus chaque année !

Face à la transition démographique et au virage domiciliaire, nous prenons un grave retard dans la prévention de la perte d’autonomie. Comme pour la transition écologique, ce retard nous coûtera bien évidemment en termes financiers, mais il nous coûtera encore davantage en espérance de vie en bonne santé.

Aujourd’hui, 20 % des plans d’aide de l’APA et de la prestation de compensation du handicap (PCH) ne se réalisent pas, faute de personnel. Au moins un dossier sur cinq reste en souffrance. Selon la Cour des comptes, des millions de journées de travail sont perdues tous les ans du fait d’accidents de travail dans les Ehpad dus au trop faible ratio d’encadrement.

Cette sinistralité exceptionnelle en Ehpad s’inscrit dans un contexte où la France est la plus mauvaise élève d’Europe en termes de morts liées à l’activité professionnelle. Or, tandis que 1 200 personnes meurent tous les ans, la branche AT-MP est en excédent ! Et cela même après le transfert financier à la branche maladie, lié à la sous-évaluation des accidents du travail et des maladies professionnelles qui prive les salariés des droits afférents.

La Confédération européenne des syndicats exhorte les États à s’engager pour zéro mort au travail en 2030. Voilà de quoi utiliser au mieux les excédents.

Nous saluons les mesures en faveur des familles monoparentales, nonobstant des délais abusifs. Toutefois, rappelons que la pauvreté touche un enfant sur cinq et que, si la monoparentalité est une prévalence, ces mesures devraient concerner l’ensemble des ménages modestes, dans lesquels les femmes sont contraintes au temps partiel et la précarité progresse.

De plus, la politique d’austérité a dégradé les services de la Cnaf, soumise à des restitutions d’effectifs, alors qu’elle devait assumer les réformes de l’APL – le traitement des dossiers connaît d’ailleurs d’importants retards.

Ces situations dégradées ont à voir avec un partage des richesses de plus en plus inégalitaire, qui prive notre protection sociale des moyens de relever les défis du vieillissement et de la prévention.

Ce PLFSS apporte quelques mesures bienvenues, mais il perpétue une gestion comptable sans réflexion critique sur sa partie recettes. Nous appelons à un changement de paradigme, et ce d’autant plus que les professionnels alertent sur la dégradation très rapide de la situation de l’hôpital public et que nous approchons du moment de bascule où l’effondrement du système de santé sera notre legs à la nouvelle génération.

Le groupe écologiste votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Abdallah Hassani. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Abdallah Hassani. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale est un moment d’importance.

Il l’est pour l’accès aux soins et la protection de nos concitoyens, pour le soutien aux familles face à la précarité, pour l’avenir de nos enfants.

Il l’est pour nos professionnels de santé, dont je tiens ici à saluer le dévouement, et pour la recherche médicale.

Cette année, le Sénat a un rôle particulier : nous aurons à débattre de sujets centraux qui, pour certains, n’ont pas encore été discutés dans un hémicycle en profondeur – je pense à la prévention, aux mesures de soutien pour les familles monoparentales ou encore à l’organisation des soins sur notre territoire.

Ce texte est un engagement fort du Gouvernement. Il augmente en effet le budget de la santé de près de 9 milliards d’euros en 2023, soit 43 milliards d’euros de plus qu’en 2019, c’est-à-dire avant la pandémie.

Il permettra la prise en charge de trois rendez-vous de prévention aux âges clés pour protéger nos concitoyens ou diagnostiquer en amont certaines pathologies.

C’est avec cette même ambition que le groupe RDPI a souhaité déposer un amendement, déclaré – hélas ! – irrecevable, visant à expérimenter la prise en charge d’une consultation lors de l’adolescence destinée à prévenir les troubles mentaux. Nous devrons être attentifs à cette problématique. Des mesures ont été engagées, comme la prise en charge de rendez-vous en psychologie, votée l’an passé. Toutefois, nous croyons fondamental d’assurer une prise en charge plus ample des troubles mentaux qui, pour près de la moitié d’entre eux selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), sont présents dès 14 ans.

En ce qui concerne mon département, je salue l’effort réalisé pour accélérer la convergence sociale. L’article 38 étend enfin à Mayotte la complémentaire santé à des conditions de revenus adaptées au faible niveau de vie de ses habitants.

Du chemin reste à faire : certaines prestations sont encore inexistantes à Mayotte ou servies avec des montants inférieurs et des conditions plus restrictives.

L’article 7 quinquies sécurise par ailleurs l’exonération de la contribution spécifique d’assurance maladie applicable à Mayotte.

Ces deux articles montrent que l’État est bien aux côtés des Mahorais ; c’est mon sentiment.

Afin que les outre-mer demeurent au cœur des innovations publiques, nous proposerons qu’un territoire ultramarin soit sélectionné dans le cadre de l’expérimentation prévue à l’article 24 quater qui vise à améliorer l’accès aux soins sur les territoires sous-dotés.

Il est en outre nécessaire de s’interroger sur les causes de la prévalence très élevée de l’obésité dans ces territoires. C’est un véritable problème de santé publique. Un rapport publié en juin dernier par mes collègues de la commission des affaires sociales a souligné la spécificité des enjeux ultramarins en la matière.

Ce projet de loi de financement porte des mesures d’encadrement et de contrôle nécessaires tant pour prendre en compte les pratiques nouvelles que pour agir face à des situations d’abus.

Il contient des expérimentations visant à faciliter et à harmoniser les parcours de soins, tout en intégrant une responsabilité collective pour assurer la permanence de ces soins. Nous avons souhaité porter sur ce sujet difficile plusieurs amendements, avec une attention particulière sur les zones les moins dotées.

Le groupe RDPI votera ce texte, qui comprend à la fois des engagements financiers forts et des avancées concrètes pour chaque Français. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Bernard Jomier. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord évoquer le fait que ce projet de loi de financement, issu de l’utilisation de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, a un avenir incertain.

Le Gouvernement aurait pu profiter de cette circonstance pour nous proposer un projet de loi structuré et cohérent. Or il hésite, encore une fois, entre une loi de finances et une loi d’organisation du système de santé, loi que nous appelons par ailleurs de nos vœux.

Depuis la crise sanitaire, les collectivités territoriales se saisissent de l’organisation du système de soins dans les territoires, contribuant ainsi à modifier la gouvernance en santé du pays.

Il nous faut partir des besoins des territoires pour ensuite procéder aux arbitrages budgétaires. L’outil de régulation qu’est l’Ondam montre ses limites. La maîtrise qu’il porte s’impose avant toute délibération sur les besoins en matière de santé dans nos territoires comme au Parlement, où aucun débat sur les besoins sociaux de la Nation n’a lieu en amont de la délibération budgétaire. Pourtant, passer d’une logique d’offre à une logique de besoins en santé est primordial. Mais dans ce texte, vous en restez à une politique de l’offre.

L’an dernier, nous regrettions un budget de fin de quinquennat sans grande nouveauté. Cette année, nous espérions un PLFSS à la hauteur d’un Président de la République réélu, mais le souffle est court.

Le Gouvernement revendique d’inscrire ce budget dans la continuité de ceux de 2010 à 2019 en termes de trajectoire de réduction des déficits. Cette mise à l’équilibre s’était faite au détriment de l’hôpital public. À l’époque, ce choix était déjà discutable ; aujourd’hui, il n’est pas supportable.

L’Ondam, hors dépenses de crise, évolue de 3,7 %, soit une évolution nettement inférieure à l’inflation, évaluée à 6 % cette année et qui se situera probablement entre 4 % et 5 % en 2023. En définitive, malgré une communication volontariste du Gouvernement, ce budget post-covid réduit les moyens financiers attribués au système de soins.

Par ailleurs, nous affirmons avec force que les comptes de la sécurité sociale pourraient retrouver un équilibre. En témoigne l’augmentation depuis 2017 des exonérations de cotisations sociales.

En 2018, elles représentaient moins de 40 milliards d’euros contre 71 milliards en 2023. Bien que les baisses de cotisations puissent être utiles sur les bas salaires, la majorité d’entre elles relèvent d’une politique fiscale favorisant les plus aisés. Le Conseil d’analyse économique a publié en 2019 une note intitulée Baisses de charges : stop ou encore ? dans laquelle il recommandait l’abandon des exonérations de cotisations sur les salaires supérieurs à 2,5 Smic au motif qu’elles sont sans effet sur l’emploi.

J’ajouterai que le Gouvernement a décidé de faire porter le coût du covid-19 à la sécurité sociale, ce qui représente cette année une perte de recettes de 17,7 milliards d’euros. Il serait plus pertinent que l’État prenne en charge cette dette.

Si l’on prenait en compte ces sommes, les administrations de sécurité sociale dégageraient un fort excédent. De même, cela permettrait d’accroître les investissements nécessaires au système de santé.

De façon plus globale, nous désapprouvons cette logique politique de fléchage de la dépense publique vers des exonérations et des allégements de charge. Notre pays a besoin d’investissements structurels, stratégiques et de long terme.

En quarante ans, la dépense publique est passée de 46 % à 55 % du PIB. Certes, mais il faut aller au bout de l’analyse : seulement un tiers de cette dépense est consacré au fonctionnement de l’État et de ses services – salaires, achats, prestations, loyers… Les deux tiers restants consistent aujourd’hui en transferts aux ménages et aux entreprises.

À la lecture de ces chiffres, on comprend le paradoxe ressenti par beaucoup de Français : alors que la dépense publique augmente, nos services publics subissent une décrépitude. En 2020, nous ne consacrons pas plus d’argent à nos services publics qu’à la fin du septennat de Valéry Giscard d’Estaing ! (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)

En revanche, en seulement cinq années, de 2018 à 2023, les exonérations de cotisations sociales sont passées de 39 milliards d’euros à 71 milliards ! C’est votre choix, votre politique, mais cela détruit nos services publics, dont celui de la santé.

En ce qui concerne la branche maladie, monsieur le ministre, vous connaissez, la gravité de la situation dans laquelle se trouve notre système de soins. Vous savez que nos hôpitaux publics sont en voie d’affaissement – d’effondrement, diront certains. Or ce PLFSS, qui devait apporter des réponses structurelles après la crise du covid-19, esquive ce sujet majeur. L’hôpital est le grand absent de ce budget.

Mesdames, messieurs les ministres, vous continuez à arguer des revalorisations, certes bienvenues, du Ségur de la santé pour illustrer votre investissement dans l’hôpital, mais cela est largement insuffisant. Preuve en est, vous avez ajouté ces dernières semaines des enveloppes budgétaires opportunes, mais qui traduisent un pilotage à la petite semaine.

Nous assistons à une hémorragie de personnel : les soignants quittent l’hôpital et des services d’urgences doivent être réduits, voire fermés. La direction statistique des ministères sociaux, la Drees, indique que les capacités hospitalières ont subi des contraintes de personnel ne permettant pas de maintenir les lits.

Ce budget entraînera en réalité des personnels en moins, alors que les services sont déjà obligés de fermer le tiers, voire la moitié, de leurs lits, que des activités de soins partent vers le privé et que des patients sont trimballés d’une région à une autre.

Pour ce qui est des soins de ville, la dépense augmente de seulement 2,7 %, soit deux fois moins vite que l’inflation. La majorité présidentielle désorganise le parcours de soins texte après texte, même si nous prenons acte, monsieur le ministre, contrairement à ce que faisait votre prédécesseur, de votre volonté de renvoyer à la négociation un certain nombre de questions.

Quelques mots, enfin, sur la prévention. Un texte ne peut se révéler ambitieux en la matière quand il traite le tabac et l’alcool comme le fait celui-ci.

La mise en place, à partir de 2017, d’une campagne programmée d’augmentation de la taxation du tabac a permis de réduire le tabagisme dans notre pays. Mais, en ce début de quinquennat, le Gouvernement s’est contenté d’aligner l’augmentation des prix du tabac sur l’inflation. Pire, vous avez reculé sur le tabac à chauffer après la venue du ministre chargé des comptes publics au congrès des buralistes – on comprend où se décide la santé publique…

Sur l’alcool, il n’y a tout simplement rien dans ce projet de loi de financement.

Vous l’avez compris, nous ne pouvons nous satisfaire de ce PLFSS. Imposer, en cette période charnière, des économies au système de soins est irréaliste et dangereux.

Le premier texte de ce gouvernement concernant la santé est peu ambitieux et mal financé. Nous proposerons de rectifier sa trajectoire pour mettre en œuvre les réformes nécessaires et permettre à notre sécurité sociale d’assurer à l’avenir l’ensemble des missions de protection sociale dont notre démocratie peut être fière. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en six ans, la politique de santé des différents gouvernements n’a amélioré ni les conditions de travail du personnel ni le sort de nos concitoyens – bien au contraire !

Il y a eu la crise du covid et ses conséquences, me direz-vous. Certes, mais vous avez préféré faire payer à la sécurité sociale les dépenses liées à la crise, alors qu’elles auraient dû être imputées sur le budget de l’État.

Nous vous proposerons, à travers ceux de nos amendements qui ont survécu aux irrecevabilités des articles 40, 45 et j’en passe – car c’est l’hécatombe ! – de changer de braquet.

Ces amendements ont été rédigés en lien avec des personnels de santé, des représentants du secteur médico-social, des associations et des citoyens. Ils ne sont pas dogmatiques, mais visent à mettre en place une politique qui rompe avec votre logique libérale, qui n’a pas fait ses preuves.

Lorsque quelque chose ne fonctionne pas – à l’image de votre politique de santé –, on change de méthode, on essaye d’améliorer, d’écouter, de prendre en considération les remarques. On n’a jamais raison seul. Avec ce PLFSS pour 2023, vous avez encore, si vous le souhaitez, l’occasion de revoir votre copie.

Partout dans le pays, notre système de soins craque. Les soignants manquent à l’appel ; ils sont fatigués de ne pas être entendus. Nos concitoyens ont de plus en plus de mal à trouver un médecin de ville, même en cas d’urgence. Aujourd’hui, 6 millions de Français n’ont plus de médecin traitant.

Les maires, les élus, sont nombreux à tirer la sonnette d’alarme pour leur population tant en zone urbaine que rurale. Nous vous proposons, pour pallier l’urgence, d’augmenter les moyens des territoires et des hôpitaux, ce qui passe évidemment par un budget ambitieux.

Une des seules options que vous nous proposez, dans une course de vitesse avec la droite sénatoriale, est d’ajouter une année supplémentaire aux études de médecine générale, qui passent de neuf à dix ans. Cette mesure, proposée sans concertation, incite les internes en neuvième année à aller dans les déserts médicaux, à moindre coût, encadrés par un médecin senior.

Mais savez-vous que la plupart des territoires manquent cruellement de médecins seniors pour encadrer ces internes ? Pensez-vous réellement régler le problème de cette façon ?

Le comble, c’est que cette mesure va entraîner une année blanche pour l’installation de nouveaux médecins. En faisant cela, vous aggravez donc la situation. À l’inverse, nous vous proposons d’augmenter les moyens des universités pour former chaque année davantage de médecins.

L’Ondam est lui aussi sous-évalué : il est fixé à 3,7 %, quand la commission des comptes de la sécurité sociale estime l’évolution naturelle des dépenses de santé à 4 %, soit 0,3 point de plus. Et si l’on compare cet Ondam à l’inflation, qui est de 6,2 %, le compte n’y est pas ! Au total, c’est 1,7 milliard d’euros pour la santé qui disparaît.

C’est donc un budget au rabais que vous nous présentez aujourd’hui ; un budget décevant qui n’est pas à la hauteur des besoins.

Ce manque d’ambition se traduit également dans le secteur de l’autonomie. Vous mettez en avant le recrutement de 3 000 infirmiers et aides-soignants dans les Ehpad, ce qui est largement insuffisant par rapport aux besoins estimés, notamment pour atteindre un taux d’encadrement équivalent à un agent pour un résident.

Ce PLFSS prévoit 170 millions d’euros pour recruter dans les Ehpad, ce qui représente un demi-poste de plus dans les 7 000 établissements de France, alors que les besoins sont estimés à 300 000 postes.

Ce premier PLFSS depuis la publication du livre de Victor Castanet Les Fossoyeurs sur la gestion calamiteuse des Ehpad est décevant.

À ce titre, le renforcement des pouvoirs de l’inspection générale des affaires sociales n’est pas suffisant. Nous demandons le remboursement automatique des subventions publiques indûment perçues par Orpea.

Malheureusement, vous avez jeté aux orties la loi sur le grand âge et l’autonomie, pourtant promise voilà quelques mois par votre gouvernement.

Dans son rapport annuel sur le financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes dénonce l’étatisation de la sécurité sociale via le remplacement croissant des cotisations sociales par l’impôt. De 90 % à la fin des années 1980, la part de ses recettes issues du travail est tombée à 50 % depuis 2019.

Le système de tuyauterie entre le budget de l’État et la sécurité sociale est devenu tellement multiple et complexe que la Cour des comptes appelle elle-même à y mettre fin.

Dans la même veine des tours de passe-passe, le Gouvernement a inscrit dans ce projet de loi le transfert précipité du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco vers l’Urssaf, alors que le 21 juin 2022 le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale et de la commission des affaires sociales du Sénat sur l’unification du recouvrement social, que nous avons réalisé avec mon collègue René-Paul Savary, avec lequel je n’ai donc pas que des désaccords (Sourires.), préconisait de reporter ce transfert.

Les difficultés techniques et les risques pour les assurés d’une perte de contrôle sur leurs cotisations de retraite justifient l’abandon de ce projet. D’ailleurs, l’ensemble des organisations syndicales et patronales y sont opposées – écoutons-les ! Mais le Gouvernement n’en tient pas compte et accélère, via l’article 6 de ce texte, le transfert du recouvrement des 87 milliards d’euros de cotisations Agirc-Arrco.

De même, sur les retraites, si le Gouvernement a finalement reculé, c’est pour mieux sauter : la réforme promise divise tellement que même vos alliés ont renâclé devant l’obstacle, récusant la volonté de passage en force qui est votre marque de fabrique.

La précipitation et la détermination affichée du Président de la République et de son gouvernement sont pourtant à contre-courant des perspectives du Conseil d’orientation des retraites : son dernier rapport démontre en effet que les dépenses de retraites du pays resteront stables dans le temps à 13,9 % du PIB et que, si les régimes deviennent légèrement déficitaires de 2022 à 2032, c’est essentiellement parce que l’État prévoit d’économiser sur la masse salariale publique en réduisant les traitements des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers.

Comme chaque année, nous aurons le débat sur l’allongement de l’âge légal de départ à la retraite avec l’amendement du rapporteur de la branche vieillesse, René-Paul Savary, qui prévoit son report progressif jusqu’à 64 ans.

Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste défend, au contraire, le principe d’abaisser l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans.

Ce PLFSS pour 2023, premier budget de la Nation, va encore aggraver les inégalités. Il ne sera pas, comme vous l’annonciez dans le journal Le Point, monsieur le ministre, celui de la santé et de la solidarité, celui qui vous rendait si fier. Il n’en sera rien, puisque vous avez décidé de façon autoritaire d’actionner l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, alors que ce budget de la sécurité sociale aurait dû être l’occasion d’un débat constructif avec l’ensemble des parlementaires. La balle était dans votre camp, mais vous n’avez pas su la saisir : vous avez préféré passer en force.

Nous voterons contre ce PLFSS pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mmes Esther Benbassa, Raymonde Poncet Monge et Émilienne Poumirol applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, de toutes parts monte la même complainte : il faut plus !

Plus d’argent pour l’hôpital, plus de médecins et de soignants, plus de crèches, plus d’argent pour les retraites, plus de moyens pour la cinquième branche – sujet dont vous parlera ma collègue Jocelyne Guidez.

Bref, autant de questions, mesdames, messieurs les ministres, pour le Gouvernement. Et pour nous, une seule question : le PLFSS pour 2023 y répond-il vraiment ?

En apparence, je dirais oui.

Avec 601 milliards d’euros pour les cinq branches, les dépenses sont supérieures de plus de 12 milliards à la prévision de 2022 et le déficit total est ramené à 6,8 milliards contre 17,8 milliards cette année.

L’Ondam progresse de 3,7 % hors crise covid, donc à champ constant, ce qui est significatif.

Mais les apparences ne sont-elles pas trompeuses ? Seules deux branches sont à l’équilibre : famille et AT-MP. Quant aux hypothèses, ne sont-elles pas trop optimistes ?

L’assurance maladie accuse encore un déficit de 6,5 milliards d’euros et l’hôpital va de crise en crise, que ce soit aux urgences, en pédiatrie ou en psychiatrie. Et ce n’est pas en ponctionnant 2 milliards à la branche famille qu’on le sauvera.

L’hôpital est malade, mais c’est tout notre système de santé qu’il faut soigner. Il est à bout de souffle ! Son mode de fonctionnement est à revoir.

Emmanuel Macron a promis de ramener la tarification à l’activité (T2A) à 50 % pour mieux rémunérer la qualité et le travail en équipe.

Nous attendons donc, monsieur le ministre, un plan d’action, et surtout des actes pour apporter à l’hôpital un financement sain et pérenne.

Le mode de gouvernance est aussi à revoir, et point n’est besoin d’une loi supplémentaire à cette fin. Nous avons vu que des établissements sont parvenus à le faire seuls.

Le centre hospitalier de Valenciennes, en particulier, expérimente un mode de fonctionnement antipyramidal, antibureaucratique, et ça marche ! Plus d’autonomie, plus de délégation ; on fait confiance aux médecins et à leurs équipes pour raccourcir les circuits de décision au bénéfice des patients et du budget, qui ne comporte plus qu’une part de 5 % dédiée à l’administratif, contre cinq fois plus ailleurs ! Le directeur canalise les énergies, équilibre le budget et entretient la paix sociale.

Monsieur le ministre, la solution est là. N’attendons pas pour la généraliser.

Il faut aussi, vous le savez, fluidifier le système de soins pour désengorger l’hôpital et ses urgences. La clé existe, c’est la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS). La coordination ville-hôpital est essentielle pour lutter contre les déserts médicaux. Et quand je dis hôpital, je pense aussi aux établissements privés. L’amélioration de la permanence des soins et de l’accès aux soins passe par la mise en place, partout, de CPTS.

Comment accepter que 40 % des médecins de ville seulement assurent les gardes de nuit et du week-end ? Si les médecins veulent retrouver du temps médical, ils doivent déléguer aux autres soignants une partie de leur travail. Je salue d’ailleurs l’accord conclu en ce sens entre les différents ordres.

Monsieur le ministre, vous parlez souvent de votre « boîte à outils »… Les solutions existent et elles marchent. Il faut les diffuser. Les élus locaux sont prêts à faire les efforts nécessaires pour que l’égalité, inscrite au fronton des mairies, s’applique aussi à l’accès aux soins !

La question essentielle est celle de l’économie du système.

Les professionnels réclament des plans pluriannuels pour anticiper les évolutions thérapeutiques et permettre à notre pays de rester à la pointe du progrès dans ce domaine. Cela mérite la plus grande attention.

Enfin, j’en viens aux ressources.

La première piste, que tous les ministres ont utilisée, est celle des économies. La source n’est pas tarie. Elle reste même abondante, mais encore faut-il ne pas se tromper.

Longtemps, la ressource humaine a été pressurée, mal rémunérée. Le Ségur de la santé a produit un effet salvateur, mais il doit être poursuivi, et cela coûte !

D’autres pistes sont donc à privilégier. Les actes redondants et inutiles représentent 20 % à 30 % de notre système de soins, soit 40 à 60 milliards d’euros de dépenses à revisiter. La Haute Autorité de santé (HAS) s’y emploie, mais vous avez ciblé à peine plus d’un milliard d’euros d’économies sur la radiologie, la biologie et les médicaments dans votre projet. C’est bien, mais c’est insuffisant.

Par ailleurs, à notre demande, l’estimation des fraudes aux cotisations et aux prestations est en cours.

La Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) et la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), bons élèves, ont rendu leurs résultats. En revanche, la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) est très en retard. Si nous voulons éviter l’exploitation fantasmée du montant de ces fraudes, il faut des chiffres, et rapidement !

Enfin, un mot sur les retraites. Le déficit et la dette se creusant, une réforme s’impose, mais, attention, si nous ne voulons pas mettre des millions de personnes dans la rue, il faut qu’elle soit comprise et acceptée. (Mme Éliane Assassi sesclaffe.)

L’amendement déposé par notre collègue René-Paul Savary, dont je salue la compétence et la constance dans l’effort, y répond-il ? Partiellement, seulement, à mes yeux. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.)

En effet, si je crois utile la réunion d’une convention nationale pour préparer la loi, étant partisan du paritarisme, je ne partage pas l’idée d’un recul à 64 ans de l’âge de départ. J’ai retenu ce qu’ont dit le Président de la République et la Première ministre : 64 ans ou 65 ans ne sont pas des totems ! À titre personnel, je serais plutôt partisan d’une « fenêtre de départ », comme le préconisent les économistes Jean Tirole et Olivier Blanchard dans leur rapport de 2021.

L’âge moyen de départ étant déjà de 62 ans et demi, on pourrait simplement le reculer à 63 ans.

Par justice, parce que cette réforme doit être juste, j’entends les avancées sociales sur la durée de cotisation pour les carrières longues, fracturées, pour la pénibilité. Par justice, j’entends aussi le relèvement des petites pensions et l’insertion des chômeurs de longue durée. Par justice, j’entends enfin le maintien au travail des seniors licenciés prématurément. Selon Jean-Hervé Lorenzi, l’activité des seniors pourrait rapporter 13 milliards d’euros en dix ans.

Pour conclure, je salue l’excellent travail de nos rapporteurs. J’espère, monsieur le ministre, que vous en tiendrez compte pour que le Sénat trouve pleinement sa place dans la fabrication de cette loi de financement de la sécurité sociale pour 2023. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – MM. Bernard Bonne et René-Paul Savary applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, ce PLFSS que le Gouvernement souhaite imposer coûte que coûte manque d’ambition et de sincérité. Nous sortons à peine de la crise sanitaire et vous nous promettiez, après le Ségur de la santé, que le personnel soignant serait écouté, que l’hôpital public connaîtrait une véritable restructuration, que les Français auraient enfin un système de santé digne de ce nom.

Il est vrai aussi que tant d’années de négligence et de casse ne se rattrapent pas d’un coup de baguette magique. Nous attendions un projet de loi de financement de la sécurité sociale plus fort, plus ambitieux, laissant plus de place à la justice sociale. Il y avait en effet de quoi de faire ! Le bilan du précédent quinquennat parle de lui-même : plus de 21 000 fermetures de lit ; à la fin de 2019, la dette de l’hôpital public s’élevait à plus de 30 milliards d’euros ; des hôpitaux en faillite qui ferment, ainsi que des services d’urgence et de maternité ; un personnel soignant complètement découragé et démissionnaire.

Pourquoi ce texte n’aborde-t-il pas les sujets qui fâchent ? Je pense notamment à la pénurie de main-d’œuvre que connaît actuellement l’hôpital, aux personnes âgées en perte d’autonomie, aux Français d’outre-mer, qu’on oublie trop souvent, et, enfin, aux assistantes maternelles, qui gagnent prétendument trois Smic, mais qui vivent pourtant dans des conditions précaires.

Vous aviez aussi la possibilité de concrétiser la promesse du Président de la République, qui voulait mettre la cause des femmes au cœur de sa politique. Qu’en est-il réellement de la gratuité des protections hygiéniques pour toutes, de la lutte contre l’endométriose et de l’inégalité territoriale d’accès aux établissements de santé pratiquant l’IVG ? Je pourrais encore allonger la liste de mes critiques.

J’estime que ce projet de loi n’est pas une réponse sérieuse et convaincante aux enjeux colossaux de notre système de santé. J’ai une pensée pour mes collègues députés, qui ont travaillé pendant des jours pour amender ce projet de loi, et qui ont vu leurs efforts réduits à néant la semaine dernière. Bien que le 49.3 soit un outil constitutionnel, vous ne pouvez pas à ce point mépriser le travail parlementaire. Ici, au Sénat, la menace du 49.3 ne plane pas au-dessus nos têtes. Nous mènerons les discussions jusqu’au bout pour améliorer votre copie. (Mmes Michelle Meunier et Raymonde Poncet Monge applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens d’abord à remercier la présidente de commission et nos rapporteurs : ils nous ont permis d’entamer ces débats dans la clarté, et cela n’était pas simple.

La crise sanitaire s’éloigne, mais gardons en tête qu’elle a été et demeure un marqueur fort de ce PLFSS, puisqu’elle a aggravé de manière inédite la situation de nos comptes sociaux. Nos finances se sont toutefois redressées de façon spectaculaire, plus vite et plus fort que prévu.

Pour autant, selon les prévisions du Gouvernement, le budget ne sera pas encore à l’équilibre l’an prochain. Il devrait même se dégrader dans les années à venir, avec des prévisions de recettes qualifiées d’optimistes par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis sur le budget pour 2023.

En même temps, les dépenses de santé paraissent sensiblement sous-estimées, notamment l’Ondam de ville, avec seulement 0,5 point de plus que le rythme d’avant-covid, dans un monde à faible inflation, et sans compter le virage ambulatoire qu’il faut poursuivre, voire accélérer.

Quant au secteur hospitalier, la hausse de 4,1 % saluée par les acteurs du secteur questionne tout autant ces derniers au regard de l’inflation, de la hausse des salaires, du coût de l’énergie et d’une activité pas encore revenue à la normale, d’où les demandes légitimes pour certains hôpitaux de la pérennisation de la garantie de financement.

Je reconnais la difficulté de l’exercice qui consiste à assurer la maîtrise de nos comptes sociaux, tout en répondant aux besoins de la population et à un système de santé à bout de souffle, et ce dans un contexte économique et social plein d’incertitudes.

Malgré les efforts financiers importants consentis par le Gouvernement – il faut le dire –, malgré la deuxième place de la France parmi les pays de la zone euro qui consacrent la plus grande part de leur PIB à la santé, malgré sa septième place parmi les pays qui consacrent pour la santé le plus d’argent par habitant, notre système de santé est au bord de la rupture.

Monsieur le ministre, j’ai mis quelques années à me rendre compte que le véhicule législatif qu’est le PLFSS n’est pas vraiment adapté au pilotage de la transformation d’une politique de santé, qui nécessite une vision de long terme. (Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales acquiesce.)

Cette transformation en profondeur ne peut, me semble-t-il, s’envisager qu’à travers une loi d’orientation et de programmation pluriannuelle qui fixerait un cap, ladite loi étant accompagnée par une étape de décentralisation sur les sujets de prévention et d’éducation à la santé, mais aussi par des réformes structurelles : je pense à la réforme des retraites, à la loi sur le grand âge et à un financement de la sécurité sociale plus efficient et plus lisible.

Reconnaissons quand même que la problématique centrale est le manque de médecins et que l’on ne peut l’imputer à ce gouvernement.

Après les remarques que je viens de faire, j’en reviens aux mesures concrètes de ce PLFSS, notamment à la question de l’accès aux soins, qui me paraît centrale.

Le texte prévoit un meilleur partage des tâches pour libérer du temps aux médecins et valoriser les professionnels de santé non médicaux. Notre groupe est favorable aux diverses mesures d’extension des autorisations de vaccination. Nous sommes pour que les infirmières puissent signer des certificats de décès et nous voyons d’un bon œil l’expérimentation de l’accès direct au statut d’infirmier en pratique avancée (IPA). Nos amendements, qui visaient à accélérer le déploiement de ces mesures, ont malheureusement été frappés d’irrecevabilité. Nous le regrettons, car le temps presse et nous souhaitions accélérer le mouvement.

Compte tenu du nombre important de médecins qui atteindront l’âge de départ à la retraite dans les années à venir, nous sommes aussi favorables à toute mesure visant à faciliter le cumul emploi-retraite pour les inciter à poursuivre leur activité.

À nos yeux, la simplification des démarches administratives via le guichet unique, tout comme la régulation de l’intérim, va dans le bon sens.

L’autre grand sujet est celui de la prévention. C’est la première fois que nous avons un ministre de la santé et de la prévention. Quand on sait à quel point la prévention et le soin sont liés, ce titre n’est pas anodin. Sans vouloir faire preuve de cynisme, je dirai qu’il revêt aussi un caractère d’importance pour nos finances publiques : prévenir coûte moins cher que guérir.

Ce PLFSS prévoit ainsi plusieurs rendez-vous de prévention, remboursés par la sécurité sociale, à des périodes clés de la vie, afin de repérer et traiter les fragilités liées à l’âge ou les addictions, et de promouvoir l’activité physique et un mode de vie sain. Laissons les professionnels organiser de la manière la plus efficace possible ces journées de prévention.

Nous voterons bien sûr cette mesure, tout comme celles qui permettent un meilleur accès au dépistage des infections sexuellement transmissibles et à la pilule du lendemain.

J’en viens enfin à la mesure qui occupe une bonne partie de nos débats depuis plusieurs semaines maintenant : la réforme du troisième cycle des études médicales. Cette année professionnalisante est utile pour bien préparer les jeunes médecins à leur futur exercice ambulatoire. Si elle répond à leurs besoins, par un encadrement et un contenu pédagogique adapté, alors, je n’ai aucun doute qu’ils seront nombreux à s’installer là où ils ont été bien accueillis et bien formés.

Cependant, la communication autour de cet article et sa rédaction dévoilent le véritable objectif visé par certains : lutter contre la désertification médicale en déployant un bataillon de jeunes en formation.

Je crois les déclarations de nos ministres, qui sont sincères quand ils se positionnent contre la coercition. Alors, pourquoi ne pas clarifier nos intentions en mettant la formation au cœur de la réforme et au cœur de la rédaction de cet article ?

Je proposerai ainsi de l’amender sur trois critères qui me paraissent essentiels.

Tout d’abord, la supervision doit être effectuée par un maître de stage des universités.

Ensuite, cette année supplémentaire doit pouvoir être réalisée sur tout le territoire. En effet, la limitation aux zones sous-denses, dont la définition est d’ailleurs trop imparfaite, puisqu’elle concerne 80 % du territoire, est une mesure inefficace, voire contre-productive en période de pénurie de médecins.

Enfin, laissons la liberté d’opter pour un stage en hôpital de proximité en complément du stage ambulatoire : cela répond aux besoins des territoires, au décloisonnement ville-hôpital que nous appelons de nos vœux et aux aspirations des nouvelles générations pour l’exercice mixte.

Pour le reste, nous aurons l’occasion, mes collègues du groupe RDSE et moi-même, de défendre nos amendements et de nous prononcer sur les autres mesures au cours de cette semaine de débats. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Florence Lassarade. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, nous entamons l’examen du premier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature.

Je commencerai mon propos en évoquant quelques chiffres.

Ce projet de loi porte sur près de 600 milliards d’euros de prélèvements obligatoires et de dépenses publiques. Il prévoit une diminution forte du déficit de la sécurité sociale, qui passerait à 7 milliards d’euros, contre 18 milliards d’euros en 2022, en se fondant sur une croissance économique très optimiste : 1 % en France, là où les instituts prévoient 0,6 %.

Les déficits restent tout de même inquiétants et vos hypothèses budgétaires, je le répète, sont trop optimistes !

Concernant l’accès aux soins, l’hôpital est le grand oublié de ce PLFSS.

J’aimerais évoquer la situation particulière de la pédiatrie et de la santé des jeunes.

En premier lieu, je souhaite attirer votre attention sur un phénomène inquiétant. Dans une étude publiée en mars 2022 dans la revue The Lancet, des chercheurs de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) font apparaître une hausse des décès de nourrissons entre 2012 et 2019, avec une augmentation de la mortalité infantile de 7 %. Alors que la France figurait parmi les meilleurs élèves en la matière, elle a chuté de la septième à la vingt-cinquième place entre 1989 et 2017. Or, malgré ces chiffres inquiétants, la réduction du taux de mortalité infantile n’est actuellement pas considérée comme une priorité de santé publique.

Depuis début octobre, les urgences et services de réanimation pédiatriques des hôpitaux de tout le pays sont saturés du fait d’une simple épidémie de bronchiolite. Des plans blancs sont déclenchés, mais cela conduit in fine à déstabiliser un peu plus notre système hospitalier.

Comment en est-on arrivé là ?

Les capacités d’accueil des services se dégradent en raison du manque de personnels soignants, qui a abouti à la fermeture de 15 % à 20 % de lits.

Face à la dégradation de la situation, vous avez annoncé, dans un premier temps, le déblocage d’une enveloppe de 150 millions d’euros à partager entre les services en tension. Mercredi dernier, c’est une enveloppe de 400 millions d’euros que vous annonciez en réponse à la crise de la pédiatrie. Ces mesures non structurantes ne permettront pas la survie de la pédiatrie et l’arrêt de la dégradation des soins.

Aujourd’hui, 44 % des pédiatres libéraux ont plus de 60 ans. Leur répartition sur le territoire est inégale : 8 départements comptent même moins d’un pédiatre pour 100 000 habitants !

Dans ce contexte, les médecins généralistes sont appelés à jouer un rôle croissant, mais ils demeurent inégalement formés à la médecine de l’enfant.

L’article 20 du PLFSS étend la compétence d’administration et de prescription des vaccins par les pharmaciens, les sages-femmes et les infirmiers. Les délégations de tâches, oui, mais pas n’importe comment ! Il ne faut pas déconnecter la vaccination du suivi médical et de l’examen obligatoire des enfants.

L’accès aux pédiatres en premier recours dans le parcours de soins ambulatoires pour tous les enfants doit être maintenu. Les puéricultrices et auxiliaires de puériculture doivent également voir leurs compétences valorisées.

La pédopsychiatrie manque aussi cruellement de moyens, alors que les confinements, la distanciation sociale, le port du masque provoqués par la crise sanitaire ont eu des effets majeurs sur la santé mentale des jeunes.

Idem pour le secteur de la psychiatrie, qui est complètement sinistré, et auquel le Gouvernement n’apporte aucune mesure de soutien.

La situation de l’hôpital public appelle des efforts courageux et des réformes structurelles. Les professionnels de la santé attendent des mesures fortes, notamment en matière d’organisation, de gestion et de répartition plus juste des moyens.

Ce PLFSS propose d’instituer l’interdiction de l’intérim médical, notamment pour les jeunes diplômés, médecins ou infirmiers. C’est souhaitable, mais l’intérim des jeunes diplômés n’est pas seul à fragiliser le fonctionnement des établissements de santé, la qualité et la continuité des soins. La commission des affaires sociales a renforcé les dispositions inscrites dans le texte en indiquant que l’intérim ne pouvait pas être le seul mode d’exercice « à plein temps » des professionnels de santé. Je proposerai personnellement un amendement pour limiter la période d’intérim à cinq ans dans le service public hospitalier.

L’article 22, qui est censé rénover la vie conventionnelle, ne modifie en réalité qu’à la marge les règles encadrant les conventions conclues entre les organisations représentatives des professions de santé et l’assurance maladie. La mesure la plus discutable est sans doute l’ajout, parmi les thèmes pouvant être abordés à l’occasion des négociations pour la plupart des professions, du conventionnement conditionnel.

Ma conviction, en tant que médecin, est que ce type de mesure ne sert pas à grand-chose dans un contexte de pénurie médicale généralisée. Près de 90 % du territoire manque de médecins libéraux ! L’exaspération monte chez les médecins et les étudiants. Vos réponses restent insuffisantes pour faire face à la paupérisation du secteur médical.

Les établissements de santé nous alertent sur leurs charges, les libéraux attendent des revalorisations, et le secteur du médicament se plaint d’économies drastiques ! Des réponses doivent être apportées rapidement à ces problèmes avec des mesures structurelles et pérennes.

Nous souhaitons notamment une augmentation du nombre de places d’étudiants en médecine, le redoublement possible de la première année de médecine et une tarification des actes fortement revalorisée pour tous les modes d’exercice, hospitalier comme libéral. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Xavier Iacovelli. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, après un déficit de 17,8 milliards d’euros en 2022, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit un déficit de 6,8 milliards d’euros.

Cette perspective est encourageante, mais je souhaiterais néanmoins rappeler ici les enjeux auxquels nous sommes toujours confrontés.

Ce PLFSS doit répondre à un double objectif.

Il doit tout d’abord permettre de réduire le déficit budgétaire tout en s’attaquant aux problématiques que vivent nos concitoyens en matière de santé au quotidien.

Il doit ensuite poser les fondations d’un système plus ambitieux et plus juste, qui protège tous les Français.

C’est cette vision que notre groupe souhaite porter. Avec une politique sociale forte et synonyme de progrès, qu’il entend projeter à l’horizon 2025, ce PLFSS pose les fondations dont notre pays a besoin afin de préserver et d’améliorer notre système de santé et de protection sociale.

Je pense à des mesures volontaristes en matière de prévention et d’accès aux soins, avec la mise en place du « rendez-vous de prévention » aux âges clés de la vie.

Je pense également au dépistage sans ordonnance des infections sexuellement transmissibles, sur le modèle du dépistage du VIH, ou encore à l’accès gratuit et sans ordonnance pour toutes les femmes à la contraception d’urgence, alors que 10 % seulement des femmes concernées sont actuellement remboursées.

Cette prise en charge doit, comme le prévoit ce PLFSS, s’accompagner d’une information renforcée vis-à-vis de toutes les femmes, en particulier les plus jeunes d’entre elles.

Il s’agit là de mesures fortes en matière de santé des femmes, dans la continuité de l’action du Gouvernement et de la majorité présidentielle depuis 2017. Je vous rappelle la mise en œuvre de la gratuité de la contraception pour toutes les femmes de moins de 25 ans.

Il me semble par ailleurs essentiel d’entamer une réflexion sur la précarité menstruelle, qui touche de nombreuses femmes, notamment les plus jeunes. Ainsi, 13 % des étudiantes déclarent avoir déjà dû, faute de moyens, choisir entre acheter des protections périodiques ou un produit de première nécessité.

La lutte contre toutes les inégalités d’accès à la santé, qui abîment notre pacte social, doit être une priorité. Il s’agit d’un enjeu de justice sociale, à l’heure où près de 4 millions de Français vivent dans une zone sous-dotée en professionnels de santé.

Je pense notamment à la mise en place du guichet unique dans chaque département, ce qui vise à simplifier l’installation de nouveaux médecins, ou encore à la création d’une quatrième année d’internat de médecine générale.

Cette année supplémentaire sera consacrée à des stages en cabinet médical, en particulier dans les zones médicalement tendues. Il s’agit là aussi d’un signal fort, qui pose les bases d’une politique pour réduire les inégalités sur le territoire national.

Avec 1,6 milliard d’euros dédiés à la politique familiale, ce PLFSS se veut également ambitieux en la matière.

Est visé le complément de libre choix du mode de garde (CMG), qui doit être réformé. Aujourd’hui, en effet, les parents employant une assistante maternelle sont défavorisés par rapport aux familles qui recourent à une crèche.

Notre groupe se félicite donc des propositions avancées sur ce sujet, avec le nouveau mode de calcul du CMG « emploi direct », qui permettra de rendre l’accueil par une assistante maternelle aussi accessible que la crèche et d’harmoniser le reste à charge entre ces deux modes d’accueil.

Par ailleurs, les études récentes montrent que les enfants des familles monoparentales sont deux fois plus touchés par la pauvreté que l’ensemble des enfants. Je tiens donc à saluer le renforcement des aides en faveur de ces familles. L’allocation de soutien familial, destinée aux parents isolés, sera notamment revalorisée de 50 %. C’est une bouffée d’oxygène pour ces parents et ces enfants, qui font face à des situations problématiques.

Enfin, notre groupe se réjouit du travail mené sur ce PLFSS pour 2023, qui pose les bases d’une politique plus juste et qui tend à améliorer notre système de santé pour les années à venir.

Nous proposerons d’étendre les « rendez-vous de prévention » au diagnostic précoce des troubles de santé mentale. C’est essentiel pour assurer une bonne prise en charge de ces pathologies. Nous savons que la psychiatrie constitue le premier poste de dépenses de l’assurance maladie, loin devant le cancer ou les maladies cardiovasculaires.

Nous entendons également mener une réflexion sur les inégalités qui persistent entre les femmes et les hommes en matière de contraception. Cela nous semble fondamental pour mieux répartir la responsabilité de la vie sexuelle, alors que l’achat des moyens de contraception est majoritairement réalisé par les femmes.

Pour toutes ces raisons, et en complément des propos de mon collègue Abdallah Hassani, le groupe RDPI soutiendra pleinement les mesures et l’orientation de ce budget. Il s’agit d’un budget ambitieux, qui répond au double objectif de réduction du déficit et de meilleure protection des Français. Un budget de justice sociale, qui finance des progrès nouveaux et fait le choix de renforcer le volet prévention de notre système de santé. Un budget, enfin, qui apporte des réponses concrètes aux défis structurels auxquels est confronté notre modèle social de santé, qui devra nécessairement être modernisé. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Michelle Meunier. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, je m’attarderai plus particulièrement sur la position de notre groupe sur la branche autonomie. Si l’on s’en tient aux quatre articles présentés par le Gouvernement dans ce PLFSS, deux mots suffisent à la caractériser : manque d’ambition.

Nous ressentons un immense décalage entre les attentes de notre société pour le grand âge, exprimées de multiples façons, et la réalité de ce budget.

Quelques dispositions vont néanmoins dans le bon sens. Je pense notamment au renforcement du contrôle financier des Ehpad et de leurs groupes – à cet égard, je salue tout particulièrement le travail de Bernard Bonne –, ou à l’introduction d’un accompagnement au lien social pour les personnes âgées dépendantes jusqu’à deux heures, ce qui est une manière de reconnaître les vertus de l’attention au-delà du seul soin physiologique. Cependant, ces dispositions, avec la poursuite de la refonte tarifaire des soins à domicile, ne changeront pas le paysage de la perte d’autonomie, loin de là. Le rapporteur Philippe Mouiller ne porte pas une analyse différente de la mienne, et je le sais très attaché lui aussi à l’examen d’une vraie grande loi relative au grand âge et à l’autonomie.

Le chantier majeur, toujours repoussé par le Gouvernement, reste la convergence des politiques de l’âge et du handicap, pour mettre fin aux injustices face à des incapacités similaires survenues à différentes périodes de la vie.

Les amendements socialistes portant sur la levée des seuils d’âge ou la prestation universelle de compensation ont été jugés irrecevables, et cela rend encore plus impérieux le besoin d’un texte d’ambition dans ce domaine.

Au-delà des missions de cette branche, nous ne pouvons pas passer sous silence la situation alarmante du médico-social. Ces métiers peinent à attirer, on y rencontre toujours des personnels exclus du Ségur, et les aides-soignantes s’y épuisent plus que les travailleurs du BTP : c’est la Cour des comptes qui le souligne, notant qu’une hausse des effectifs serait bénéfique pour le budget de la branche accidents du travail. C’est tout dire ! Face à ce constat, votre intention d’embaucher 3 000 personnes cette année en Ehpad, dans une perspective de 50 000 recrutements durant le quinquennat, surprend et ne suscite que de la déception : cela représente à peine un demi-poste par établissement !

À ces besoins criants s’ajoute désormais la prise en compte de l’inflation. Les établissements alertent sur les coûts des fluides : votre gouvernement ne pourra pas s’en sortir en proposant de mettre un col roulé à toutes les personnes âgées de nos Ehpad… Il n’y aura pas assez de personnel pour cela ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Les socialistes prennent la mesure de ces enjeux. Nous savons qu’il faut augmenter la part de dépenses publiques et nous proposons d’y consacrer des contributions nouvelles, par exemple assises sur les dividendes ou sur les bénéfices des Ehpad privés. Avec ces moyens nouveaux, nous avons pour objectif de remédier au manque de places et aux délais insupportables : non, il n’est pas normal en France d’être sur une liste d’attente pour entrer en foyer d’accueil médicalisé ni de devoir patienter deux ans pour être suivi en centre médico-psychologique. Les soignants s’épuisent, les aidants désespèrent, les familles attendent : agissons ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais évoquer la cinquième branche de la sécurité sociale, dont l’objectif de dépenses pour 2023 s’élève à 37,3 milliards d’euros, en augmentation de 5,3 % par rapport à l’année précédente, afin de répondre aux besoins croissants de financement.

Je tiens à souligner deux points importants : l’un concerne la prévention, l’autre la possibilité de vieillir à domicile.

D’abord, le PLFSS pour 2023 accorde une importance particulière à une « meilleure prévention », avec la mise en place de « rendez-vous de prévention » à certains âges clés de la vie, sans obligation toutefois.

Chez les adultes de 60-65 ans, ce rendez-vous permettra de prévenir les maladies chroniques, les troubles de la vision, les fragilités ou la perte d’autonomie. J’ai déposé un amendement visant à repérer les aidants lors de ces rendez-vous et à prévenir les conséquences de la situation d’aidant sur leur état de santé.

Ensuite, le PLFSS pour 2023 donne priorité au « vieillir à domicile », le plus longtemps possible, pour les personnes âgées en perte d’autonomie.

« Vivre, c’est vieillir, rien de plus », écrivait Simone de Beauvoir dans LInvitée. Rappelons que 90 % des Français souhaitent vieillir et être accompagnés dans leur vieillissement ou leur handicap à domicile.

Afin de répondre à cette attente de la société civile, quelques mesures phares ont été prises.

L’article 33 vise ainsi à sécuriser la réforme de la tarification des services de soins infirmiers à domicile, qui devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2023. Aussi, 4 000 places supplémentaires seront créées.

L’article 34 permet au département de compléter, voire dépasser le plafond des plans d’aide personnalisée à l’autonomie par deux heures d’accompagnement et de temps social, lorsque cela est nécessaire.

Même si cette mesure constitue une avancée importante, dans l’intérêt des professionnels, ainsi que des personnes âgées, les sénateurs de l’Union Centriste regrettent profondément la restriction de son périmètre aux seuls bénéficiaires de l’APA, excluant de facto les bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap.

Par ailleurs, les plans d’aide actuellement tendus des bénéficiaires de l’APA ne permettant pas de répondre en tout ou partie aux gestes de la vie quotidienne dont ils ont besoin, il est à craindre que ces heures ne se limitent à répondre aux besoins vitaux des personnes âgées, au détriment du lien social, pourtant nécessaire. Par conséquent, nous nous interrogeons sur la soutenabilité de son financement par les départements.

Malgré les besoins grandissants de la population en matière de recours aux services à la personne, le secteur, à forte intensité de main-d’œuvre, est confronté à de vives tensions dans les recrutements sur l’ensemble des métiers. Ce sont 1 million d’emplois qui sont à pourvoir d’ici à 2030 !

Toutefois, le PLFSS pour 2023 ne contient aucune mesure à application immédiate pour ce secteur. Le texte présente des éléments positifs, comme le « bouclier inflation » et le « bouclier énergie » ; il faudra élargir ce dernier aux services à domicile, pour lesquels les factures d’essence pèsent lourdement, surtout dans les territoires ruraux.

Pour améliorer la prise en charge des personnes âgées dans les Ehpad, ce projet de loi prévoit plusieurs mesures : revalorisations salariales, actualisation des coupes Pathos, déploiement de centres de ressources territoriaux, simplification des modalités de financement de l’habitat inclusif. L’aide à la vie partagée est une bonne solution, qui retardera les entrées dans les Ehpad.

Par ailleurs, les Ehpad bénéficieront de 3 000 aides-soignants et infirmiers supplémentaires en 2023. Même si ces annonces vont dans le bon sens, une réflexion sur les problèmes rencontrés par le secteur s’avère nécessaire : attractivité, formation, validation des acquis de l’expérience, postes vacants. Comment donner envie à des femmes et des hommes de s’engager dans les services d’aide à domicile, de devenir auxiliaire de vie ou infirmier en pratiques avancées en gériatrie ?

Nous saluons enfin l’inscription du « bien vieillir » dans les travaux du Conseil national de la refondation, avec trois axes dédiés : adapter la société au vieillissement, promouvoir la citoyenneté des personnes âgées et le lien social, revaloriser les métiers. Dix ateliers de concertation sont prévus dans dix départements de métropole et d’outre-mer. La feuille de route issue de la concertation sera présentée en mai 2023.

Je profite de cette occasion pour mettre l’accent sur la participation des aidants à ces échanges et la nécessité d’améliorer les mesures en faveur du répit, qui jouent un rôle important dans la lutte contre l’isolement social des personnes âgées ou handicapées.

S’agissant des aidants, les articles 34 bis et 34 ter du PLFSS pour 2023, que le Gouvernement a choisi de retenir lors de son usage de l’article 49.3 de la Constitution, traitent de l’élargissement de la durée et de l’indemnisation du congé de proche aidant, ainsi que de l’identification des moyens d’élargir l’allocation journalière du proche aidant (Ajpa) aux aidants des personnes malades du cancer. Ce que le Gouvernement propose, sur ces sujets, c’est de nous remettre des rapports. Je soutiendrai le maintien de ces articles dans le texte, puisque c’est une demande que j’exprime moi-même depuis plusieurs années.

L’article 35 ter, issu de l’adoption d’un amendement, ouvre une expérimentation permettant la création d’un véritable parcours d’accompagnement harmonisé des aidants familiaux, parcours qui pourrait notamment passer par la prise en charge d’une consultation médicale spécifique.

Rappelons aussi qu’une politique de l’autonomie ne se réduit pas au grand âge et au « bien vieillir ». Sur le champ du handicap, le PLFSS encourage la transformation des établissements médico-sociaux et promeut les démarches inclusives.

Nous nous réjouissons de l’augmentation des moyens budgétaires : près de 70 millions d’euros destinés à développer l’offre pour le public atteint de troubles du spectre de l’autisme. Je préférerais parler de troubles du neurodéveloppement, afin de mieux prendre en charge le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et les troubles « dys ».

L’article 33 quater organise la revalorisation annuelle du tarif plancher, qui passera à 23 euros en 2023. L’article 35 bis, issu d’un amendement du Gouvernement, crée un parcours de rééducation et de réévaluation des enfants en situation de polyhandicap ou de paralysie cérébrale.

Enfin, nous regrettons la non-présentation, par le Gouvernement, d’une loi consacrée au grand âge et l’absence de projections pluriannuelles indispensables pour relever les défis de cette branche.

Mes chers collègues, le secteur médico-social souffre du contexte d’inflation et de la crise du recrutement. Des oubliés du Ségur de la santé mettent en cause une forte inégalité de traitement. Le temps des constats et des propositions est révolu. Il est l’heure d’agir sur le terrain, d’y déployer un plan d’action, des dispositifs d’urgence et des modalités concrètes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Véronique Guillotin et M. Daniel Chasseing applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Alain Milon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Milon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames les ministres, mes chers collègues, notre système de santé vit depuis quelques années une crise sans précédent.

Alors qu’au XXe siècle il faisait figure de référence mondiale, nous devons constater désormais son inadaptation totale face aux défis de la transition écologique, de la transition démographique et de la transition technologique. Les différentes réformes mises en place depuis quelques dizaines d’années n’ont pas permis de reconstruire notre système de santé à la hauteur de ces enjeux, malgré la bonne volonté de chacun de leurs auteurs.

Le PLFSS pour 2023, monsieur le ministre, est à l’exemple des précédents.

Il ne présente aucune réforme majeure, il modifie à la marge les modalités d’exercice de certains professionnels de santé et continue de mélanger les genres : loi de financement et loi d’organisation de la santé sur le territoire national. C’est évidemment la meilleure façon d’entretenir la confusion ! En sus, cette fois, l’application de l’article 49.3 de la Constitution met en doute, dans mon esprit, la volonté du Gouvernement de respecter la légitimité du Parlement.

J’étais naïvement persuadé qu’avec cette nouvelle mandature et avec le constat que nous faisons tous, vous alliez présenter un projet qui aurait remis la santé sur les rails.

Pourquoi ne pas avoir eu la volonté, dès ce PLFSS, de refonder la gouvernance de la santé en proposant, par exemple, une loi de programmation sanitaire sur la durée du mandat présidentiel ?

Pourquoi ne pas émettre au moins un signe de votre volonté de fixer une stratégie de santé fondée sur l’évaluation des besoins et l’établissement d’objectifs sur cinq ans ?

Pourquoi ne pas développer une vraie politique de gouvernance autonome démocratique de l’hôpital ? J’avais en son temps, à la demande du président Gérard Larcher, fait des propositions au Président de la République… Elles sont restées lettre morte.

Pourquoi ne pas marquer votre volonté de mettre en place une vraie démocratie sociale et sanitaire au centre du fonctionnement de l’hôpital et de rééquilibrer le management entre la médecine et l’administration ?

Pourquoi ne pas permettre la mise en place des patients experts qui apporteraient aux soignants l’expertise des malades ?

Pourquoi ne pas assurer aux professionnels libéraux qu’ils soient garants des missions territoriales de santé ?

Pourquoi ne pas proposer une restructuration de la permanence des soins ambulatoires, afin de garantir la pertinence des urgences hospitalières ?

Pourquoi ne pas réviser les ordonnances Debré de 1958 pour permettre un meilleur ancrage territorial des hôpitaux ?

Je pourrai continuer la liste des pourquoi, mais j’entends votre réponse, monsieur le ministre : « Tout cela sera discuté dans le cadre du Conseil national de la refondation… »

Mme Émilienne Poumirol et M. Bernard Jomier. Eh oui !

M. Alain Milon. Or, monsieur le ministre, il y a urgence et les conclusions de ce conseil n’interviendront que l’an prochain. Il faudra ensuite des mois et des mois pour élaborer les lois qui en découleront. Nous aurons alors encore perdu un an ou deux et vous serez contraint, une fois de plus, de mettre des rustines, comme vous le faites actuellement pour la pédiatrie.

J’aimerais revenir sur un point plus particulier : le financement.

Notre modèle solidaire impose un financement solidaire, c’est-à-dire dont les ressources et les dépenses respectent le caractère solidaire : payer selon ses moyens, recevoir selon ses besoins. Cette règle s’applique pour la sécurité sociale, mais pas pour les assureurs privés.

Pratiquement tous les pays développés qui disposent d’un modèle universel ont un payeur unique de type solidaire. Ce système est garant de la liberté des acteurs et de l’indépendance professionnelle des soignants.

Notre système à deux étages est structurellement coûteux et défaillant – selon des publications, 5,6 % de la dépense totale contre 2,8 % pour l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). C’est un système très peu efficace dans la couverture du risque et inégalitaire, favorable aux actifs – mais pas tous, en particulier les indépendants – ; défavorable aux inactifs, en particulier les retraités.

Dans les faits, seul le financeur public supporte le vrai risque. Seul le financeur public garantit le libre choix de son professionnel de santé et l’indépendance professionnelle des soignants.

On le voit dans la mise en place des réseaux en matière d’optique ou de certains centres de soins dentaires – la liste serait longue –, mais nous pouvons constater, avec le financement assurantiel privé, une diminution de l’équité d’accès aux prestations de santé.

Il serait nécessaire, selon moi, que l’on revoie complètement le système de financement de la santé. À l’instar d’autres pays en Europe, les assurances complémentaires devraient devenir supplémentaires et chacun d’entre nous devrait savoir combien coûte la santé. Ce serait d’ailleurs une façon, pour le Parlement, de fixer chaque année le tarif de base des organismes complémentaires de santé.

Si j’en reviens au PLFSS tel qu’il s’impose à nous, celui-ci fait état d’une nette amélioration des comptes avec un déficit à 7,3 milliards d’euros, contre près de 18 milliards d’euros en 2022.

Première constatation, combien de temps notre système peut-il vivre encore avec de tels déficits ? Deuxième constatation, le Haut Conseil de la santé publique a émis des doutes sur la sincérité de ce PLFSS, puisque celui-ci s’appuie sur des prévisions macroéconomiques excessivement optimistes.

Les recettes pour 2023 sont surestimées. Quant aux dépenses, elles me semblent sous-estimées, surtout au niveau de l’Ondam soins de ville, enregistrant une augmentation de 0,5 point par rapport à son niveau d’avant la pandémie de covid-19, alors que l’inflation était pratiquement nulle à cette époque.

J’espère que l’estimation des dépenses liées au covid-19 correspondra à la réalité et que ces dépenses ne seront pas non plus sous-évaluées. Mais on voit bien que d’autres épidémies arrivent. L’exemple de la bronchiolite montre à quel point nous avons l’obligation de réussir, cette fois, les réformes nécessaires.

Je ne voudrais pas entrer dans le détail de ce PLFSS. Nous aurons toute cette semaine pour nous exprimer sur les différents articles du texte, sanctionné par l’usage du 49.3.

Je voudrais néanmoins m’appesantir un instant sur la branche famille. Si mes souvenirs sont bons, chaque branche a été créée indépendamment des autres ; chaque branche a sa fonction propre et doit occuper intégralement cette fonction.

Depuis des années, au nom de je ne sais quel principe, les différents gouvernements, quelle que soit leur tendance politique, ont ponctionné allègrement la branche excédentaire des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP).

Cette fois, vous allez plus loin encore, en profitant des excédents de la branche famille pour imposer à celle-ci le remboursement du congé de maternité, soit 2 milliards d’euros, évidemment insuffisants pour équilibrer les comptes de la branche maladie.

Pourquoi, monsieur le ministre, ne pas avoir relancé la politique de natalité avec ces excédents ? Depuis 2014, les familles ont subi : la modulation des allocations familiales, dont l’effet cumulé atteint à ce jour 4 milliards d’euros ; la suppression du complément de libre choix d’activité majoré ; la modulation de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant – la fameuse Paje – ; l’alignement du montant du plafond de l’allocation de base sur le complément familial. Il y avait, vous le voyez, beaucoup à faire pour améliorer la politique de natalité !

Je viens de vous exprimer mon désenchantement et mon angoisse de voir notre système devenir obsolète, faute de réforme en profondeur.

Au moment du mouvement des gilets jaunes, j’avais dit à la ministre Agnès Buzyn qu’il fallait éviter le mouvement des gilets bleus et des blouses blanches. La crise du covid-19 est passée par là, mais la réalité nous rejoint de nouveau : il est grand temps de réagir ! En effet, comme le chantait Barbara : le temps qui passe ne se rattrape guère, le temps perdu ne se rattrape plus. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC, RDSE, INDEP et SER.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Laurence Rossignol. Monsieur le président, mesdames, monsieur les ministres, mes chers collègues, je regrette que le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées ne soit plus présent dans l’hémicycle au moment où nous parlons de solidarité. Le PLFSS, ce n’est pas que l’assurance maladie !

Je vais, en particulier, enchaîner avec les propos tenus à l’instant par mon collègue sur la ponction effectuée sur la branche famille.

Celle-ci a désormais atteint l’équilibre ; elle est même excédentaire, ce qui donne au Gouvernement des marges considérables pour relancer une politique familiale adaptée, moderne, compatible avec la volonté des familles. Or, il profite de cet excédent pour faire un petit jeu comptable, dont j’imagine bien qu’il a été conçu par les cerveaux de Bercy, le ministère des finances ayant aussi tutelle sur le PLFSS – le jour où nous avons accepté cela, nous avons commis une énorme erreur.

À la question de savoir où prendre l’argent pour assurer les dépenses du PLFSS, Bercy répond : il n’y a qu’à le prendre à la famille, et ce n’est pas tout à fait neutre. En effet, on ne réfléchit pas à Bercy comme on réfléchit aux ministères de la santé ou des solidarités. Or il n’est pas neutre de transférer la prise en charge des indemnités journalières de l’assurance maladie à la branche famille. La politique familiale est une politique fondée sur le choix : les familles ont le choix du mode de garde, le choix de prendre des congés familiaux, notamment pour l’éducation à travers la prestation partagée d’éducation de l’enfant (PreParE)… En transférant les dépenses liées au congé post-accouchement, on rapproche celui-ci du congé de paternité qui, lui, est bien naturellement pris en charge par la branche famille.

J’alerte l’hémicycle, et, au-delà, les associations familiales, sur le fait que les indemnités journalières post-accouchement sont versées, non pas au titre d’un congé pour s’occuper de l’enfant, mais au titre d’un congé nécessaire pour la santé de la mère et la protection maternelle. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.) En alignant le financement de ce dernier sur celui du congé de paternité, on le fait donc entrer dans la catégorie des congés à option et l’étape suivante, je l’imagine aisément, c’est de demander aux parents lequel des deux prendra le congé post-accouchement ! Il me semble important d’attirer l’attention sur ce point.

Je veux aussi parler brièvement de la déconjugalisation de l’allocation de soutien familial, l’ASF.

J’ai aujourd’hui l’exemple d’une mère de famille veuve avec deux enfants, qui gagne 1 000 euros par mois de pension d’invalidité, auxquels s’ajoutent 300 euros de revenus. La caisse d’allocations familiales (CAF) lui réclame 5 000 euros de trop-perçu au titre de l’ASF, au motif qu’elle a un homme dans sa vie, lui-même gagnant le Smic et ayant un enfant à charge. La CAF considère que cet homme est supposé prendre en charge les enfants de cette femme seule !

Déconjugaliser l’allocation de soutien familial, c’est une exigence pour les familles monoparentales, pour les mères, pour la lutte contre leur solitude et, tout simplement, pour leur capacité à avoir un niveau de vie correct. (M. François Braun, ministre, semble marquer son étonnement.)

Votre attitude, monsieur le ministre, me laisse penser que vous ne connaissez peut-être pas le dossier… (Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée, sexclame.) Je vous le confirme, quand une mère de famille monoparentale a une nouvelle relation amoureuse, on lui supprime son allocation de soutien familial, au motif qu’elle n’est plus seule et que le nouvel homme de sa vie est supposé financer l’entretien de ses enfants. Ce n’est pas normal ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Braun, ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la rapporteure générale, je ne vais pas réagir à l’ensemble des remarques formulées, car l’occasion me sera donnée, au cours des débats, de revenir à votre convenance sur chacun des points et de compléter des informations discutables.

Je tiens toutefois à dire que je suis sensible à ce que Mme la rapporteure générale a exposé s’agissant de la nécessaire rectification de l’Ondam 2022. Cette rectification, proposée dans le texte initial, n’a pas été retenue par l’Assemblée nationale. Je suis de toute évidence favorable à son rétablissement : c’est un élément essentiel pour la crédibilité du PLFSS pour 2023, et qui garantira un financement nécessaire pour le système de santé en 2022.

Toutefois, pour aller plus loin que le simple rétablissement proposé par Mme la rapporteure générale, le Gouvernement présente un sous-amendement tendant à ajouter encore 600 millions d’euros au sous-objectif concernant les établissements de santé, donc à l’Ondam 2022 dans son ensemble.

Il s’agit de financer les engagements pris pour assurer le bon fonctionnement des établissements de santé dans la période actuelle de crise et d’épidémies hivernales, ainsi qu’une partie des engagements relevant de mes dernières annonces concernant les établissements en tension, particulièrement les services de pédiatrie – bien qu’étant régulièrement à leur contact, je les assure une fois de plus de mon soutien le plus complet face à la difficile crise qu’ils traversent. Il faut, certes, appliquer un traitement symptomatique immédiat, mais nous démarrons également avec eux des travaux sur le traitement de fond, travaux qui aboutiront, comme je l’avais annoncé, à l’organisation d’assises de la santé de l’enfant au printemps et à l’établissement d’une feuille de route pour les années à venir autour de la santé de l’enfant.

Ces crédits supplémentaires permettront notamment de soutenir financièrement les agents travaillant la nuit et en soins critiques, en particulier les puériculteurs et auxiliaires de puériculture.

La rectification de l’Ondam des établissements de santé permettra aussi de rendre solvables les établissements de santé ayant déployé des mesures de la mission flash de l’été dernier. Je pense notamment aux mesures relatives aux heures supplémentaires et au temps additionnel.

Le relèvement de l’Ondam 2022 serait donc porté à 9,7 milliards d’euros par rapport au montant voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022. Par cette décision, le Gouvernement matérialise de nouveau sa détermination à consacrer tous les moyens nécessaires au bon fonctionnement des établissements de santé.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée. Je ne serai pas longue, mais je voudrais dire quelques mots sur la stratégie macroéconomique sous-tendant ce PLFSS, laquelle a fait l’objet de nombreux questionnements et remarques, notamment de la part de Mme la rapporteure générale.

Je souhaite tout d’abord préciser que le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a rendu un avis positif sur le scénario macroéconomique des textes financiers cet automne. Les prévisions de croissance et d’inflation pour 2022 ont été jugées – et j’emploie les mots du HCFP – « crédibles », tout comme la prévision d’inflation pour 2023. La prévision de croissance pour cette même année a, elle, été jugée « un peu élevée », mais le Haut Conseil des finances publiques relève également la « grande incertitude » qui entoure ces prévisions et concerne tous les pays développés. La prévision de masse salariale pour 2023, en hausse de 5 %, a également été jugée « plausible ».

C’est donc un tableau plutôt nuancé qui est dressé. J’indique que l’été dernier, alors que nous avions déjà ce débat, qui me semble important, le HCFP avait pour le coup estimé la prévision de croissance à 2,5 % pour 2022 un peu élevée. Aujourd’hui, l’Insee nous signale qu’avant même de comptabiliser le quatrième trimestre de cette année, nous avons atteint ce niveau !

Je rappelle aussi que la France est sortie un peu plus rapidement de la crise que ses voisins, retrouvant dès la fin de l’année 2021 un niveau de production d’avant-crise, le « quoi qu’il en coûte » ayant notamment contribué à maintenir l’investissement à un niveau dynamique. Ainsi, selon la dernière note de conjoncture de l’Insee, datant du mois d’octobre, l’investissement des entreprises devrait croître d’au moins 2,8 % en 2022. Le climat des affaires, quant à lui, également mesuré par l’Insee, reste un peu supérieur à la norme, avec un indicateur à 102, contre 100 en moyenne. Les créations d’emplois s’élèvent à 220 000 au premier semestre, comme j’ai déjà eu l’occasion de le signaler.

Par ailleurs, les textes financiers qui vous sont soumis cet automne, mesdames, messieurs les sénateurs, que ce soit le PLF, le PLFR ou encore le PLFSS, comportent justement des mesures pour atteindre le niveau de 1 % de croissance en 2023, avec, notamment, le maintien d’un soutien vigoureux aux entreprises, mais aussi aux collectivités territoriales face aux effets de l’inflation. Comme vous le savez, ce soutien s’est illustré, d’abord, par l’adoption d’un filet de sécurité énergétique de 430 millions d’euros en 2022 et de 1,5 milliard d’euros en 2023 pour les collectivités, mais aussi par la poursuite du bouclier tarifaire pour les ménages, qui représente une masse financière de 100 milliards d’euros et permettra d’éviter une dépense allant de 160 à 175 euros par mois et par foyer français.

Au moment où nous nous parlons, mesdames, messieurs les sénateurs, l’économie française continue donc, malgré les difficultés, à résister. C’est à l’aune de ces hypothèses et de cette réalité macroéconomique que nous avons fondé les grands arbitrages et équilibres du PLFSS. Notre vision de la conjoncture n’est ni optimiste – encore moins démesurément optimiste – ni pessimiste : elle reflète bien, semble-t-il, l’état de notre pays.

M. le président. La discussion générale est close.

Mes chers collègues, dans la mesure où la commission des affaires sociales doit se réunir, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.)

PRÉSIDENCE DE Mme Laurence Rossignol

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Discussion générale (suite)

4

Mise au point au sujet d’un vote

Mme la présidente. La parole est Mme Sabine Drexler, pour une mise au point au sujet d’un vote.

Mme Sabine Drexler. Lors du scrutin public n° 29 sur l’ensemble du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, Mme Béatrice Gosselin souhaitait voter contre, et non pour.

Mme la présidente. Acte est donné de votre mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.

5

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article liminaire

Financement de la sécurité sociale pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.

Je rappelle que la discussion générale a été close.

Nous passons à la discussion des articles.

projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023

Discussion générale (suite)
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Première partie

Article liminaire

Les prévisions de dépenses, de recettes et de solde des administrations de sécurité sociale pour les années 2022 et 2023 s’établissent comme suit, au sens de la comptabilité nationale :

 

(En points de produit intérieur brut)

2022

2023

Recettes

27,0 %

26,9 %

Dépenses

26,5 %

26,1 %

Solde

0,5 %

0,8 %

 

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article liminaire.

(L’article liminaire est adopté.)

Mme Laurence Cohen. Nous votons contre !

Article liminaire
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Article 1er (supprimé)

Mme la présidente. J’ai bien compté, ma chère collègue, mais vous étiez tout de même minoritaires.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2021

Première partie
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Article 2 (supprimé)

Article 1er

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 19, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au titre de l’exercice 2021, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(en milliards deuros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

206,8

235,4

-28,7

Accidents du travail et maladies professionnelles 

15,1

13,9

1,3

Vieillesse

247,8

250,5

-2,7

Famille

51,1

48,9

2,2

Autonomie

32,7

32,6

0,2

Toutes branches (hors transferts entre branches) 

539,2

567,0

-27,7

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse 

538,0

567,3

-29,3

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(en milliards deuros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

205,3

235,0

-28,7

Accidents du travail et maladies professionnelles 

13,6

12,4

1,2

Vieillesse

141,2

143,9

-2,7

Famille

51,1

48,9

2,2

Autonomie

32,7

32,6

0,2

Toutes branches (hors transferts entre branches) 

430,1

457,9

-27,7

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse 

430,1

459,5

-29,4

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(en milliards deuros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de Solidarité Vieillesse

17,7

19,3

-1,5

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 240,1 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 17,8 milliards d’euros.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous souhaitons rétablir l’article 1er, supprimé par l’Assemblée nationale, tout en modifiant l’affectation de certaines cotisations des travailleurs indépendants.

Cet article, qui retrace les résultats de la gestion pour 2021, n’implique d’ordinaire qu’un vote de validation purement formel. Le rejet de cet article par l’Assemblée nationale et l’appréciation sévère de la Cour des comptes quant à l’exactitude des comptes du régime général nous ont toutefois conduits à nous interroger.

Afin de renforcer la sécurité juridique du texte, nous avons fait le choix de cet amendement de rétablissement, tout en proposant une rectification des tableaux d’équilibre, qui afficheraient désormais un solde négatif de 29,4 milliards d’euros.

Mme la présidente. L’amendement n° 993, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au titre de l’exercice 2021, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(en milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

209,4

235,4

-26,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

15,1

13,9

1,3

Vieillesse

249,4

250,5

-1,1

Famille

51,8

48,9

2,9

Autonomie

32,8

32,6

0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches)

544,2

567,0

-22,7

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

543,0

567,3

-24,3

 

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(en milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

207,9

234,0

-26,1

Accidents du travail et maladies professionnelles

13,6

12,4

1,2

Vieillesse

142,8

143,9

-1,1

Famille

51,8

48,9

2,9

Autonomie

32,8

32,6

0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches)

435,1

457,9

-22,8

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

435,1

459,5

-24,4

 

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de Solidarité Vieillesse

17,7

19,3

-1,5

 

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie s’élevant à 240,1 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 17,8 milliards d’euros.

La parole est à M. le ministre délégué, pour présenter cet amendement et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 19.

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de lindustrie. L’esprit et l’objectif des deux amendements sont identiques, à savoir le rétablissement des comptes de l’année 2021.

Notre amendement comporte toutefois une nuance importante, puisqu’il tend à comptabiliser un certain nombre de recettes au titre de l’année 2021, ce que Mme la rapporteure générale n’a pas souhaité faire.

Madame la rapporteure générale, votre amendement ne permet pas de rétablir les tableaux correspondant aux comptes clos établis par le Gouvernement et présentés à l’Assemblée nationale. Vous avez choisi de ne pas faire apparaître 5 milliards d’euros de recettes, qui sont pourtant bien comptabilisés, et qui ne manquent donc pas dans les caisses de l’État !

Vous justifiez votre modification par le refus de la Cour des comptes de certifier les comptes de l’activité de recouvrement, au motif que certaines recettes auraient dû être enregistrées en 2020, et non en 2021. Le Gouvernement conteste cette interprétation, ne la jugeant pas conforme aux textes.

Je vous rappelle au demeurant que la Cour des comptes a certifié les comptes de toutes les branches de la sécurité sociale figurant dans le projet de loi, reconnaissant dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale que les comptes étaient « cohérents ». Ce dernier constat est le seul, à ce jour, à porter sur les tableaux d’équilibre.

Le refus de certification par la Cour de deux comptes bien précis, et non de ceux de l’ensemble du régime général, n’a certainement pas la portée que votre amendement lui confère, lequel, au demeurant, ne nous semble pas parfaitement cohérent avec ce qu’il faudrait faire si l’on voulait suivre à la lettre les recommandations de la Cour. Nous avons donc des interprétations différentes du désaccord avec le certificateur.

Les recettes que vous ne voulez pas faire apparaître dans les comptes de l’année 2021 existent bel et bien ; la Cour des comptes ne les conteste pas. Au contraire, l’article que vous entendez rétablir serait manifestement insincère s’il faisait comme si ces recettes n’avaient jamais été enregistrées dans les comptes. Or, contrairement à ce que la Cour demandait, vous ne corrigez pas le bilan.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 19 de la commission.

L’amendement n° 993 que nous proposons rétablit pour sa part les comptes de l’année 2021 corrigés des 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires que je viens d’indiquer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 993 ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En effet, ces éléments sont bien enregistrés, mais nous considérons qu’ils auraient dû l’être en 2020 plutôt qu’en 2021, comme l’a indiqué la Cour des comptes. Ce point pourra faire l’objet d’une rectification de la part du Gouvernement lors de la navette.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Pourquoi le Gouvernement a-t-il transmis au Sénat un texte dont les quatre premiers articles sont supprimés ? Si je ne m’abuse, une loi de financement de la sécurité sociale ne peut être présentée sans son article 3, lequel s’avère obligatoire. J’aurais souhaité que le Gouvernement nous donne une explication avant l’examen des articles.

La procédure sera différente lors de l’examen du projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale en 2023, mais nous n’y sommes pas encore !

Il aurait été intéressant de nous expliquer la suppression de ces quatre premiers articles avant de qualifier d’insincères les propositions de la commission.

Par ailleurs, je constate que Mme la rapporteure générale prend en compte les remarques de la Cour des comptes, alors que vous avez préféré, de votre côté, faire l’impasse, en dépit de vos explications.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Je suis un peu étonné du ton employé par M. le ministre pour expliquer que l’amendement de Mme la rapporteure générale n’est pas sincère.

M. Philippe Mouiller. Vous n’êtes pas propriétaire du principe de sincérité ; votre gouvernement n’est du reste pas le mieux placé à ce sujet.

Nous sommes en train d’examiner un texte donnant lieu à des modifications. Nous apprenons par la presse que les chiffres changent, et vous émettez dès le début de nos débats des doutes sur un rapport de la Cour des comptes…

Vous devriez davantage considérer les propositions de Mme la rapporteure générale ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Burgoa. Très bien ! Gabriel Attal aurait été mieux !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Monsieur Jomier, si nous vous avons transmis un projet de loi « allégé » des quatre premiers articles traditionnels détaillant le règlement des comptes pour les deux années précédentes, c’est parce que l’Assemblée nationale les a rejetés !

Cette partie du projet de loi n’ayant pas été soumise à l’article 49.3 – une exception qui confirme la règle pour les comptes budgétaires, ces temps-ci… –, nous sommes pour ainsi dire repartis de zéro.

Nous sommes totalement en phase avec ces quatre articles de rétablissement de la certification des comptes, en dépit de notre désaccord de principe avec la Cour des comptes, et donc avec Mme la rapporteure générale, sur la prise en compte de certaines recettes. Ces dernières ont été reportées de 2020 à 2021 pour permettre aux professions indépendantes de faire face à la crise. Elles ont été effectivement versées aux comptes de la sécurité sociale en 2021, ce dont nous tenons compte dans notre amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 1er est rétabli dans cette rédaction et l’amendement n° 993 n’a plus d’objet.

Article 1er (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Deuxième partie

Article 2

(Supprimé)

Mme la présidente. L’amendement n° 20, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2021, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2021 figurant à l’article 1er.

ANNEXE A

RAPPORT RETRAÇANT LA SITUATION PATRIMONIALE, AU 31 DÉCEMBRE 2021, DES RÉGIMES OBLIGATOIRES DE BASE ET DES ORGANISMES CONCOURANT À LEUR FINANCEMENT, À L’AMORTISSEMENT DE LEUR DETTE OU À LA MISE EN RÉSERVE DE RECETTES À LEUR PROFIT ET DÉCRIVANT LES MESURES PRÉVUES POUR L’AFFECTATION DES EXCÉDENTS ET LA COUVERTURE DES DÉFICITS CONSTATÉS POUR L’EXERCICE 2021

I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2021 :

(en milliards d’euros)

ACTIF

2021 (net)

2020 (net)

PASSIF

2021

2020

Immobilisations

7,3

7,3

Fonds propres

-93,5

-86,7

Immobilisations non financières

5,2

5,2

Dotations

21,5

19,0

 

Régime général

3,8

0,2

Prêts, dépôts de garantie

1,3

1,3

Autres régimes

8,4

7,3

 

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

0,2

0,2

Avances/ prêts accordés à des organismes de la sphère sociale

0,8

0,9

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

9,2

11,3

 

Réserves

23,5

22,9

 

Régime général

3,8

3,8

 

Autres régimes

7,1

7,2

 

FRR

12,6

11,9

 

Report à nouveau

-136,3

-108,1

 

Régime général

-4,1

5,1

 

Autres régimes

-0,0

-0,2

 

FSV

1,0

-3,7

 

CADES

-133,2

-109,3

 

Résultat de l’exercice

-4,9

- 22,9

 

Régime général

-22,8

-36,2

 

Autres régimes

0,1

-1,0

 

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

-1,5

-2,5

 

CADES

17,8

16,1

 

FRR

1,6

0,7

 

Écart d’estimation (réévaluation des actifs du FRR en valeur de marché)

2,7

2,4

 

Provisions pour risques et charges

21,4

20,9

Actif financier

63,9

68,1

Passif financier

179,2

178,8

Valeurs mobilières et titres de placement

39,1

39,2

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, europapiers commerciaux)

167,4

165,5

Régime général

0,0

0,0

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)

44,1

62,5

Autres régimes

13,7

13,8

CADES

123,4

103,0

CADES

0,0

0,0

Dettes à l’égard d’établissements de crédits

6,1

7,3

FRR

25,4

25,3

Régime général (ordres de paiement en attente)

5,0

6,0

Encours bancaire

24,3

26,9

Autres régimes

0,0

0,4

Régime général

10,9

10,6

CADES

1,0

1,0

Autres régimes

5,9

5,6

 

FSV

0,0

0,0

Dépôts reçus

0,2

0,4

CADES

7,0

9,9

ACOSS

0,2

0,4

FRR

0,6

0,7

 

Créances nettes au titre des instruments financiers

0,5

2,0

Dettes nettes au titre des instruments financiers

0,0

0,0

CADES

0,3

1,7

ACOSS

0

0

FRR

0,2

0,3

Autres

5,5

5,4

 

Autres régimes

4,1

5,3

 

CADES

1,3

0,1

Actif circulant

108,0

101,6

Passif circulant

72,0

64,1

Créances de prestations

8,6

12,1

Dettes et charges à payer à l’égard des bénéficiaires de prestations

34,4

29,0

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

20,5

16,9

Dettes et charges à payer à l’égard des cotisants

4,5

4,4

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions

57,1

52,1

 

Créances sur entités publiques et organismes de sécurité sociale

13,4

13,1

Dettes et charges à payer à l’égard d’entités publiques et organismes de sécurité sociale

21,9

16,4

Produits à recevoir de l’État

1,5

1,9

 

Autres actifs

6,9

5,5

Autres passifs

11,2

14,2

Total de l’actif

179,2

177,0

Total du passif

179,2

177,0

 

Sur le champ des régimes de base, du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), de la Caisse d’amortissement de la dette publique (CADES) et du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses fonds propres négatifs, et qui recouvre pour l’essentiel le cumul des déficits passés restant à financer, s’élevait à 93,5 milliards d’euros au 31 décembre 2021. L’encours de dette sur les produits techniques à fin 2021 était de l’ordre de 17 %, soit environ 2 mois de recettes.

Alors qu’il atteignait un niveau très élevé à la fin de la précédente décennie, en partie imputable à la crise économique, le passif net a été en recul constant entre 2014 et 2019. Tout au long de cette période, la réduction des déficits des régimes de base et du FSV et les bons résultats de la CADES et du FRR ont conduit à dégager un résultat consolidé positif sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale.

Cependant, dans le contexte de crise sanitaire et économique, le passif net connaît une inversion de tendance marquée depuis 2020, il s’est accru de 25,3 milliards d’euros entre 2019 et 2020 puis de 6,8 milliards d’euros entre 2020 et 2021. Cette évolution reflète le niveau exceptionnellement élevé, bien que moins dégradé qu’attendu pour 2021, des déficits des régimes de base et du FSV sur les deux derniers exercices (déficit de 39,7 milliards d’euros sur ce champ en 2020 puis de 24,3 milliards d’euros en 2021). De fait, le résultat consolidé sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale, retracé dans le tableau ci-dessous, ressort à nouveau déficitaire (– 4,9 milliards d’euros, après – 22,9 milliards d’euros en 2020), malgré le résultat annuel positif de la CADES (+17,8 milliards d’euros en 2021, résultat qui traduit sa capacité annuelle d’amortissement des déficits passés) et celui du portefeuille du FRR en nette progression (résultat de +1,6 milliard d’euros).

Le financement du passif net de la sécurité sociale est assuré à titre principal par un recours à l’emprunt, essentiellement porté par la CADES et l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre les dettes financières et les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie, suit donc en premier lieu les mêmes tendances que le passif net auquel il est fait référence ci-dessus, en subissant secondairement les effets de la variation du besoin en fonds de roulement lié au financement des actifs et passifs circulants (créances et dettes) et des acquisitions d’actifs immobilisés, qui ont également un impact sur la trésorerie. Après s’être accru de 36,0 milliards d’euros fin 2020, atteignant alors 110,6 milliards d’euros, l’endettement financier a continué d’augmenter en 2021 (115,3 milliards d’euros en fin d’exercice, soit +4,7 milliards d’euros), en cohérence avec l’évolution du passif net qui n’est que partiellement atténuée par le moindre besoin en fonds de roulement.

Évolution du passif net, de l’endettement financier net et des résultats comptables consolidés de la sécurité sociale depuis 2009

(en milliards d’euros)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Passif net au 31/12 (fonds propres négatifs)

- 66,3

- 87,1

- 100,6

- 107,2

- 110,9

-110,7

-109,5

-101,4

-88,5

-77,0

-61,4

-86,7

-93,5

Endettement financier net au 31/12

- 76,3

- 96,0

- 111,2

- 116,2

- 118,0

-121,3

-120,8

-118,0

-102,9

-86,8

-74,6

-110,6

-115,3

Résultat comptable consolidé de l’exercice (régimes de base, FSV, CADES et FRR)

-19,6

-23,9

-10,7

-5,9

-1,6

+1,4

+4,7

+8,1

+12,6

+14,9

+15,4

-22,9

-4,9

II. – Couverture des déficits et affectation des excédents constatés sur l’exercice 2021

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits de l’année 2011 des branches Maladie et Famille du régime général. Elle a également prévu la reprise progressive, à compter de 2012, des déficits des années 2011 à 2018 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV, dans la double limite de 10 milliards d’euros chaque année et de 62 milliards d’euros au total. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a étendu cette reprise progressive aux déficits des années 2012 à 2017 des branches Maladie et Famille.

L’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a modifié ce schéma et supprimé le plafond annuel de 10 milliards d’euros afin de tenir compte de conditions de financement à moyen et long termes particulièrement favorables. Il a ainsi ouvert la possibilité d’une saturation du plafond de 62 milliards d’euros dès 2016 et a conduit à reprendre un montant total de 23,6 milliards d’euros en 2016, correspondant au transfert de la totalité des déficits de la branche Famille et de la branche Maladie au titre de 2013 et 2014 et de ceux de la branche Vieillesse et du FSV au titre de 2015, ainsi que d’une partie du déficit de la branche Maladie au titre de 2015.

Le plafond de reprise ayant été saturé après les transferts intervenus en 2016, fin 2019, l’ACOSS portait en dette à court terme les déficits des derniers exercices. Son endettement financier brut atteignait 26,9 milliards d’euros au 31 décembre 2019.

Dans le contexte d’accroissement de la dette des régimes de base de sécurité sociale et du besoin de financement de l’ACOSS, l’article 1er de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie a prévu un transfert à la CADES d’un montant global de 136 milliards d’euros, organisé en plusieurs étapes.

Dans un premier temps, des versements effectués avant le 30 juin 2021 ont financé, dans la limite de 31 milliards d’euros, les déficits cumulés non repris constatés au 31 décembre 2019 de la branche Maladie du régime général, du FSV, de la branche Vieillesse du régime des non-salariés agricoles et de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Le décret n° 2020-1074 du 19 août 2020 et le décret n° 2021-40 du 19 janvier 2021 ont ainsi organisé des transferts de la CADES à hauteur de 20 milliards d’euros en 2020 et de 11 milliards d’euros en 2021.

Dans un second temps, des versements à partir de 2021 ont vocation à financer, dans la limite de 92 milliards d’euros, les déficits cumulés des exercices 2020 à 2023 des branches Maladie, Vieillesse et Famille du régime général, du FSV et de la branche Vieillesse du régime des non-salariés agricoles. Conformément au décret du 19 janvier 2021 précité et au décret n° 2022-23 du 11 janvier 2022, un montant total de 23,8 milliards d’euros a d’ores et déjà été transféré au bénéfice de la branche Maladie et du FSV qui présentaient une situation nette négative fin 2020.

Concernant la situation des branches et régimes en 2021, dans le contexte de pandémie sanitaire, le déficit du régime général atteint 22,8 milliards d’euros et celui du FSV, 1,5 milliard d’euros. Les déficits des branches Maladie et Vieillesse du régime général se sont élevés respectivement à 26,1 et 1,1 milliards d’euros. Par contre, déficitaires en 2020, les branches Famille et Accidents du travail et maladies professionnelles sont redevenues bénéficiaires en 2021, avec des excédents respectivement de 2,9 et 1,2 milliards d’euros. Par ailleurs, le périmètre du régime général s’est élargi en 2021 à la nouvelle branche autonomie dont l’exercice s’est soldé par un excédent de 0,3 milliard d’euros.

Concernant les régimes de base autres que le régime général, seule la CNRACL affiche un déficit en 2021, son résultat ressortant à -1,2 milliard d’euros. La CADES a repris les déficits des exercices 2018 et 2019 de la caisse lors du transfert organisé en janvier 2021.

La branche Vieillesse du régime des exploitants agricoles a de nouveau présenté un bénéfice en 2021, à hauteur de 0,5 milliard d’euros. Le transfert de la CADES en 2020 d’un montant de 3,6 milliards d’euros avait permis de couvrir l’ensemble de ses déficits cumulés depuis 2011 (les déficits des années 2009 et 2010 avaient été repris par la CADES en 2011).

L’excédent de la branche Vieillesse du régime de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (0,3 milliard d’euros en 2021) progresse de 0,2 milliard d’euros par rapport à 2020, tandis que celui du régime de retraite des professions libérales reste stable (0,1 milliard d’euros en 2021). Légèrement déficitaire en 2020, le régime de base de la caisse nationale des barreaux français dégage un excédent de 0,1 milliard d’euro en 2021. Ces excédents sont affectés aux réserves des régimes concernés.

Les autres régimes présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des branches et régimes intégrés financièrement au régime général (ensemble des branches Maladie des différents régimes de base depuis la mise en œuvre, en 2016, de la protection universelle maladie, branches Vieillesse de base du régime des salariés agricoles depuis 1963 et du régime social des indépendants jusqu’en 2017). Il en est de même des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins) et des régimes d’employeurs équilibrés par ces derniers (fonction publique de l’État, industries électriques et gazières). Concernant le régime des mines, les déficits passés cumulés de la branche Maladie avaient été transférés à la CNAM à hauteur de 0,7 milliard d’euros dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de rétablir l’article 2 et l’annexe A, qui contient le tableau patrimonial de la sécurité sociale pour le dernier exercice clos.

Il reviendra au Gouvernement de tenir compte des modifications apportées à l’article 1er dans la suite de la navette.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 20.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’ensemble constitué de l’article 2 et de l’annexe A est rétabli dans cette rédaction.

Vote sur l’ensemble de la première partie

Article 2 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article 3 (supprimé)

Mme la présidente. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.

(La première partie du projet de loi est adoptée.)

DEUXIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2022

Deuxième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article 4 (supprimé)

Article 3

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 784, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Au titre de l’année 2022, sont rectifiés :

1° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

240,2

241,9

-1,7

Accidents du travail et maladies professionnelles 

16,2

14,2

2,0

Vieillesse

258,9

261,9

-3,0

Famille

53,5

50,9

2,6

Autonomie

34,9

35,4

-0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches) 

570,1

589,3

-19,2

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

571,7

589,6

-17,8

 

2° Les prévisions de recettes, les prévisions de dépenses et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

19,3

18,0

1,3

3° Les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

4° Les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

5° L’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale est nul.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement tend à réaffecter à l’assurance maladie les dépenses engagées durant la pandémie et indûment affectées à la dette sociale.

Le Gouvernement a décidé de faire porter en partie le coût du covid sur l’assurance maladie. Il n’est pas question de revenir sur ces dépenses et de refaire l’histoire – nous en avons déjà débattu. En revanche, la dette covid n’est pas une dette sociale !

Vous étranglez la sécurité sociale avec une dette de plus, alors même que les dépenses engagées sont hors du champ de son intervention. La crise a déjà fragilisé temporairement ses recettes ; voilà que vous continuez à lui porter des coups.

Vous avez chanté devant l’Assemblée nationale et la commission des affaires sociales du Sénat le refrain classique de la dette laissée aux générations futures, mais rien n’est plus malhonnête !

Notre amendement vise donc à voir cette dette supportée par tous, et non par les seuls salariés et retraités, d’autant qu’une dette d’État est plus aisée à gérer, vous le savez aussi bien que moi.

La Commission pour l’avenir des finances publiques, dans son rapport de mars 2021 Nos Finances publiques post-covid-19 : pour de nouvelles règles du jeu, a proposé que « l’intégralité de la dette liée au covid-19 soit plutôt refinancée par l’État, dans le cadre de ses programmes d’émission classiques, qui assurent les meilleures garanties de refinancement (moindre coût) et avec un horizon de très long terme de remboursement. La logique de ce raisonnement aboutit d’ailleurs à s’interroger sur la légitimité de la reprise d’une partie de la dette liée au covid-19 par la Cades, décidée en août 2020. »

En grevant les dépenses qui pourraient être consacrées à nombre de besoins sociaux, le Gouvernement – et lui seul – hypothèque l’avenir des générations futures.

Mme la présidente. L’amendement n° 702, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au titre de l’année 2022, sont rectifiés :

1° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

221,6

241,9

-20,3

Accidents du travail et maladies professionnelles 

16,2

14,2

2,0

Vieillesse

258,9

261,9

-3,0

Famille

53,5

50,9

2,6

Autonomie

34,9

35,4

-0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches) 

570,1

589,3

-19,2

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

571,7

589,6

-17,8

 

2° Les prévisions de recettes, les prévisions de dépenses et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

19,3

18,0

1,3

 

3° Les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

4° Les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

5° L’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale qui est fixé à 18,6 milliards d’euros ;

6° Les prévisions de recettes impactées par les aides directes ou indirectes fournies aux entreprises peuvent être revues à la hausse dès lors que ces entreprises ne respectent pas les contreparties sociales ou environnementales. Celles-ci sont prévues par décret en Conseil d’État.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Afin de faire face à la crise du covid-19, l’État a octroyé des sommes considérables aux entreprises sans aucune contrepartie écologique et sociale.

Une étude d’octobre 2022 de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires), corroborée par les chiffres de la direction générale du Trésor, estime à 8,4 % du PIB le montant total des aides publiques reçues par les entreprises, c’est-à-dire 205 milliards d’euros en 2021 ou près de 41 % du budget de l’État. Cette somme est financée par la dette publique et par l’augmentation de la fiscalité des ménages, alors même que les inégalités sociales sont criantes et que la précarisation et la paupérisation progressent.

De plus, selon un rapport du Giec de février 2022, de 3,3 à 3,6 milliards d’humains vivent dans un contexte de fortes vulnérabilités liées au changement climatique. D’ici à 2030, jusqu’à 132 millions de personnes pourraient basculer dans l’extrême pauvreté en raison du changement climatique. En effet, si les pauvres sont ceux qui contribuent le moins à la crise climatique, ils sont aussi les premiers – et les plus durement – touchés !

Afin de respecter nos engagements climatiques, les sociétés françaises doivent accélérer leur transformation dans le but d’être plus respectueuses et plus résilientes au regard des risques sociaux et environnementaux.

Cet amendement vise donc à rétablir l’article 3 du PLFSS pour 2023 en y ajoutant un alinéa 6 permettant de conditionner les aides aux entreprises à des contreparties sociales et environnementales qui devront être définies par décret.

Mme la présidente. L’amendement n° 21, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Au titre de l’année 2022, sont rectifiés :

1° Les prévisions de recettes, les objectifs de dépenses et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

221,6

241,9

-20,3

Accidents du travail et maladies professionnelles 

16,2

14,2

2,0

Vieillesse

258,9

261,9

-3,0

Famille

53,5

50,9

2,6

Autonomie

34,9

35,4

-0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches) 

570,1

589,3

-19,2

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

571,7

589,6

-17,8

 

2° Les prévisions de recettes, les prévisions de dépenses et le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

19,3

18,0

1,3

 

3° Les prévisions des recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites lesquelles sont nulles ;

4° Les prévisions de recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse lesquelles sont nulles ;

5° L’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale qui est fixé à 18,6 milliards d’euros.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de rétablir l’article rectifiant les tableaux d’équilibre des régimes obligatoires de base de sécurité sociale (Robss) et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), ainsi que l’objectif d’amortissement de la dette sociale pour 2022. L’ensemble de la deuxième partie du PLFSS ayant été rejeté par les députés, cet article a été supprimé par l’Assemblée nationale, alors même qu’il est rendu obligatoire par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale.

Le Parlement doit pouvoir prendre acte de l’évolution des prévisions de recettes, de dépenses ainsi que de leur solde depuis le vote de la dernière LFSS.

Malgré notre proposition de rétablissement, nous regrettons que le Gouvernement n’ait pas pris la peine de consulter le Parlement en cours d’année : il aurait fallu examiner un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, nous l’avons souvent dit, en raison notamment de la très forte hausse des dépenses des régimes obligatoires de base par rapport aux objectifs votés en loi de financement pour 2022.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1129, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 21, alinéa 4, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

(en milliards d’euros)

 

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

221,6

242,4

-20,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

16,2

14,2

2,0

Vieillesse

258,9

261,9

-3,0

Famille

53,5

50,9

2,6

Autonomie

34,9

35,4

-0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches)

570,1

589,8

-19,7

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

571,7

590,1

-18,4

La parole est à M. le ministre.

M. François Braun, ministre. Mme la rapporteure générale propose par son amendement n° 21 de rétablir l’article 3 qui rectifie les tableaux d’équilibre des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse ainsi que l’objectif d’amortissement de la dette sociale pour l’année 2022.

Cet article a été supprimé par l’Assemblée nationale en raison du rejet de l’ensemble de la deuxième partie du texte par les députés.

Je suis bien évidemment favorable à ce rétablissement, car c’est un élément essentiel de la crédibilité de ce PLFSS.

À travers ce sous-amendement, je propose de rectifier le tableau d’équilibre pour 2022 afin de tenir compte du rehaussement de l’Ondam de 0,6 milliard d’euros : annoncé dans la discussion générale, il sera discuté lors de l’examen de l’article 4.

Cette enveloppe complémentaire permettra d’abonder le financement des mesures de soutien au système hospitalier prises cet été, notamment les heures supplémentaires et le temps de travail additionnel, et de financer les efforts engagés au titre de la période hivernale, en particulier pour la pédiatrie.

L’Ondam serait ainsi rectifié de 9,7 milliards d’euros par rapport au montant voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022.

Le déficit des régimes obligatoires et du FSV s’élèverait à 18,4 milliards d’euros pour l’année 2022, contre 17,8 milliards d’euros dans la version du texte adopté en première lecture à l’Assemblée nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 784, qui prévoit de réaffecter à l’assurance maladie les dépenses engagées pendant la pandémie et indûment affectées à la dette sociale. La commission souhaite en effet rétablir l’article dans sa version initiale.

Supprimer l’objectif d’amortissement de la dette sociale de la Cades en 2022 n’aurait de surcroît pas de réelle portée, puisqu’une grande partie des remboursements a déjà été effectuée. En outre, même si cet ajout était normatif, il encourrait un fort risque d’inconstitutionnalité, car il n’est pas compatible avec l’objectif fixé par la loi organique d’amortissement de la dette sociale avant 2033.

La commission demande le retrait de l’amendement n° 702 de Mme Poncet Monge ou, à défaut, émettrait un avis défavorable, puisque cet amendement rétablit l’article en se fondant sur une pétition de principe selon laquelle les recettes pourraient être majorées du produit d’aides aux entreprises si celles-ci ne respectent pas des contreparties sociales ou environnementales. Ce dispositif n’est pas assez précis pour être opérationnel et ne trouve pas sa place dans un article dont l’objet est de rectifier les comptes de l’année en cours.

Le sous-amendement n° 1129 se justifie par l’augmentation de l’Ondam 2022, sur laquelle nous reviendrons lors de l’examen de l’article 4.

La commission émet un avis favorable, même si la méthode employée par le Gouvernement pour procéder à ces rectifications me semble un peu critiquable – pour rester dans la mesure qui caractérise le Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Braun, ministre. Madame Cohen, vous souhaitez, au travers de l’amendement n° 784, rétablir l’article 3 tout en affectant à la branche maladie le montant inscrit dans l’article au titre de l’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Cades. En conséquence, celle-ci serait dotée d’un objectif d’amortissement nul, ce qui n’est pas possible et ce qui rend votre amendement inopérant. Année après année, le législateur a affecté des recettes afin d’apurer la dette sociale. L’objectif d’amortissement en est la résultante, et non le fait générateur.

Par ailleurs, un transfert de déficit cumulé à hauteur de 136 milliards d’euros a été voté en 2020. Cette reprise vise à financer dans les meilleures conditions qui soient les déficits cumulés non repris constatés au 31 décembre 2019, ainsi que les déficits des exercices 2020 à 2023 résultant de la crise sanitaire. Des recettes ont été affectées à la Cades afin d’assurer le remboursement de ces transferts, prévu au plus tard pour 2033. Supprimer ces recettes aurait pour conséquence directe d’empêcher le remboursement de la dette, ce qui serait contraire à la loi organique du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie.

Il est pourtant essentiel de rembourser la dette sociale afin d’assurer la pérennité et la soutenabilité de notre système de protection sociale. Il y va de notre crédibilité financière.

Vous proposez une opération artificielle, qui affecte la sincérité du tableau d’équilibre que vous souhaitez voter, alors que le rôle de la Cades, bien réel, est de garantir la soutenabilité de notre modèle de protection sociale.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 784.

Madame Poncet Monge, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 702, dont la seconde partie est inopérante. La règle de fond que vous prévoyez sur le respect de contreparties sociales et environnementales, dont les contours sont très imprécis, n’aurait aucune portée juridique, puisque vous en renvoyez la rédaction au pouvoir réglementaire, alors même que l’objet de nos discussions est de définir le contenu d’une disposition législative.

Enfin, le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 21, présenté par Mme la rapporteure générale.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 784.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 702.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1129.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 21, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 3 est rétabli dans cette rédaction.

Article 3 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Troisième partie

Article 4

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 703, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au titre de l’année 2022, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs sont rectifiés ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

Sous-objectif

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

106

Dépenses relatives aux établissements de santé

97,4

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées 

15,1

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées 

14,3

Dépenses relatives au fonds d’intervention régional et au soutien national à l’investissement

6,3

Autres prises en charge

6,8

Total

245,9

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Depuis le début de l’année 2022, les établissements médico-sociaux font face à une inflation sans précédent qui pèse fortement sur leur situation financière. Selon l’Insee, les prix de l’énergie ont augmenté de 26,5 % en un an, ce qui fragilise très largement les hôpitaux et les autres établissements de santé dont les comptes sont déjà en déficit ou à peine à l’équilibre.

Selon les fédérations hospitalières, les effets de l’inflation seraient évalués à plus de 1,1 milliard d’euros pour l’ensemble des établissements de santé. Or, l’Ondam hospitalier révisé ne couvre l’inflation qu’à hauteur de 738 millions d’euros. Ainsi, la compensation annoncée ne correspond qu’à deux tiers du besoin de compensation des établissements de santé et la base 2022, sur laquelle se fonde le taux d’évolution de l’Ondam, est durablement minorée.

La situation est tout aussi difficile, voire pire, lorsque l’inflation pèse sur des structures médico-sociales privées à but non lucratif. En avril dernier, l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), la Fédération hospitalière de France (FHF), le Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa) et d’autres associations avaient déjà appelé le Gouvernement à revoir la circulaire budgétaire médico-sociale pour 2022 afin de prendre en compte la flambée des prix.

Cet amendement vise à rétablir l’article 4 dans sa version adoptée à l’Assemblée nationale et à augmenter les financements des établissements de santé et du médico-social, afin de leur fournir pleinement les moyens de juguler l’inflation, sans pénaliser les personnes malades, en situation de handicap, en difficulté et les personnes âgées qui en dépendent.

Mme la présidente. L’amendement n° 785, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au titre de l’année 2022, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs sont rectifiés ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

Sous-objectif

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

106,1

Dépenses relatives aux établissements de santé

98,1

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées 

14,7

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées 

13,9

Dépenses relatives au fonds d’intervention régional et au soutien national à l’investissement

6,3

Autres prises en charge

6,8

Total

245,9

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 4 du PLFSS prévoit les objectifs de dépenses de l’assurance maladie pour 2022. Nous sommes dans une situation inédite. Il n’y a jamais eu autant de fermetures de services d’urgence, de manque de personnel, de suppressions de lits et de taux d’absentéisme aussi élevé dans tous les hôpitaux !

Face à cette situation, le Gouvernement fait l’autruche et renvoie les patients vers le 15 pour réguler l’entrée aux urgences des malades. Notre amendement vise donc à renforcer les crédits des hôpitaux pour 2022 afin de mieux couvrir l’ensemble des dépenses supplémentaires liées à la lutte contre le covid-19, à l’inflation et au rattrapage des soins qui ont été mis en suspens durant la pandémie. L’hôpital est en souffrance, mais également la médecine de ville et les établissements et services pour personnes âgées !

Nous sommes donc favorables à une augmentation des crédits de l’ensemble des sous-objectifs de l’Ondam. Cependant, pour garantir la recevabilité de notre amendement, nous préconisons une réduction des autres sous-Ondam.

Mme la présidente. L’amendement n° 22, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au titre de l’année 2022, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que ses sous-objectifs sont rectifiés ainsi qu’il suit :

(en milliards d’euros)

Sous-objectif

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

107,3

Dépenses relatives aux établissements de santé

97,1

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées 

14,6

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées 

13,8

Dépenses relatives au fonds d’intervention régional et au soutien national à l’investissement

6,3

Autres prises en charge

6,8

Total

245,9

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Au travers de cet amendement, je propose de rétablir l’article 4 ayant pour objet la révision de l’Ondam 2022, supprimé par l’Assemblée nationale.

Cet article doit être discuté, car c’est une disposition obligatoire de la partie rectificative des projets de loi de financement de la sécurité sociale.

Alors que l’Ondam 2022 rectifié dépasse de 9,1 milliards d’euros le montant voté en loi initiale, la commission souhaite, dans un esprit de responsabilité, prendre acte de la nouvelle trajectoire de dépenses et de la justification des dépenses engagées par le Gouvernement.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1128, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 22, alinéa 3, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

(en milliards d’euros)

Sous-objectif

Objectif de dépenses

Dépenses de soins de ville

107,3

Dépenses relatives aux établissements de santé

97,6

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées

14,6

Dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées

13,8

Dépenses relatives au fonds d’intervention régional et au soutien national à l’investissement

6,3

Autres prises en charge

6,8

Total

246,5

La parole est à M. le ministre.

M. François Braun, ministre. Le Gouvernement est favorable au rétablissement de l’article 4 présenté par Mme la rapporteure générale. C’est un élément essentiel de la crédibilité du PLFSS.

Par ce sous-amendement, le Gouvernement propose d’aller au-delà du simple rétablissement de l’Ondam 2022, tel qu’il a été proposé par Mme la rapporteure générale, en ajoutant 0,6 milliard d’euros de dépenses dans le sous-objectif des établissements de santé et par conséquent à l’ensemble de l’Ondam 2022.

Il s’agit de financer les engagements pris pendant l’été et plus récemment qui visent à soutenir les établissements de santé, en particulier pendant la période d’épidémie hivernale.

Les résultats des mesures prises cet été, à la suite de la mission flash, ont été positifs, puisque nous avons constaté pour la première fois depuis plus de dix ans une diminution de la fréquentation des services d’urgence, grâce à la régulation médicale. Nous avons également constaté une meilleure prise en charge des patients, grâce à leur orientation vers des parcours de santé plus adaptés.

La prise en compte de ces dépenses dans le sous-amendement permet de garantir la solvabilité des établissements de santé au titre des mesures qui ont été prolongées, à savoir le paiement des heures supplémentaires et du temps de travail additionnel pour les médecins.

De plus, ce montant permet de financer les dernières annonces réalisées en vue de la période d’épidémie hivernale, pour les établissements en tension et les services de pédiatrie, que j’assure de nouveau de mon total soutien. Nous prenons des mesures d’urgence, mais nous menons également un travail de fond avec les Assises nationales de la protection de l’enfance, qui aboutiront, au printemps, à l’établissement d’une feuille de route.

Enfin, ces crédits supplémentaires permettront de soutenir financièrement les agents exerçant la nuit et de faire bénéficier les puéricultrices et les aides-puéricultrices de la prime d’exercice en soins critiques qu’elles ne touchaient pas jusqu’à présent.

La rectification de l’Ondam 2022 est ainsi portée à 9,7 milliards d’euros par rapport au montant voté dans la LFSS pour 2022.

Encore une fois, le Gouvernement s’engage auprès des soignants et des hôpitaux non seulement à faire voter des mesures indispensables pour faire immédiatement face à l’urgence, mais également à poursuivre les efforts budgétaires en 2023 afin d’entamer la refondation de notre système de santé, pour la pédiatrie en particulier et l’hôpital en général.

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, je regrette de devoir rappeler un point de méthode avant de passer au vote et aux explications sur les amendements déposés à cet article.

L’Assemblée nationale – je ne reviendrai pas sur ses motifs – a rejeté l’Ondam rectifié pour 2022 et la deuxième partie dans son ensemble. Si nous n’avions pas voté en faveur du rétablissement des articles, ces derniers seraient supprimés conformes ce soir. La commission a souhaité rétablir cette rectification par esprit de responsabilité – j’insiste – et parce que le rôle du Parlement est de constater les dépenses prévues pour l’assurance maladie.

Le Gouvernement a annoncé en septembre dernier un dépassement d’un montant de 9,1 milliards d’euros. Pourtant, ce soir vous déposez un sous-amendement visant à modifier l’Ondam rectifié en ajoutant 600 millions d’euros de dépenses, rien de moins !

Monsieur le ministre, le Gouvernement savait pourtant, depuis le mois d’avril, que l’Ondam serait largement dépassé – le comité d’alerte l’avait prévu et la Commission des comptes l’a confirmé en juin dernier.

Envisagez-vous de venir parfois rendre compte de la dérive des dépenses en cours d’exécution devant le Parlement ?

Le Gouvernement annonce régulièrement des dépenses nouvelles – il l’a encore fait cet automne –, alors que la discussion budgétaire a déjà débuté. Selon vous, est-ce vraiment la bonne méthode de présenter le coût de ces mesures aux parlementaires, quelques heures seulement avant la discussion des articles ?

La commission souhaite agir avec responsabilité, je l’ai dit. Monsieur le ministre, la responsabilité ne peut s’exercer que si le Gouvernement de son côté respecte et considère notre travail. Il s’agit de prendre acte de quelque 250 milliards d’euros de dépenses publiques pour la santé des Français. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et SER. – Mmes Raymonde Poncet Monge et Laurence Cohen applaudissent également.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je veux rappeler que les prévisions de dépenses dans le champ de l’assurance maladie s’élevaient, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, à 236,8 milliards d’euros. Ce montant a été révisé par le Gouvernement à 245,9 milliards d’euros dans le projet de loi de financement pour 2023, tel que déposé le 26 septembre dernier. Les surcoûts sont essentiellement liés à la crise sanitaire, avec les vagues occasionnées par les variants delta et omicron, en début d’année, mais pas seulement. Le contexte inflationniste est également responsable d’une partie du dépassement.

Ce soir, le Gouvernement a déposé un sous-amendement visant à ajouter 600 millions d’euros à l’Ondam rectifié.

Je veux, pour commencer, faire une observation. La somme des sous-objectifs produit un total de 246,4 milliards d’euros, et non 246,5 milliards d’euros, contrairement à ce qui est affiché. Voilà un nouvel exemple de la nécessité que nous disposions de données exploitables, comme nous le réclamons au titre de la loi organique. Il est urgent que nous puissions avoir un Ondam détaillé plutôt qu’une somme arrondie à la centaine de millions d’euros près – j’y insiste, car ces différences ne sont pas rien.

Je veux surtout vous faire part d’une réflexion que m’inspire votre sous-amendement, monsieur le ministre. Vous nous demandez de constater une dépense supplémentaire de 600 millions d’euros, comme si de rien n’était. Est-il besoin de traduire cette somme en milliards pour impressionner davantage ? En ce cas, je rappelle qu’il s’agit tout de même de 0,6 milliard d’euros !

Or vous justifiez cette dépense très vaguement. Je souhaite que vous nous précisiez l’affectation de ces crédits avant que nous passions au vote.

Surtout, je constate que, pour partie, il s’agit de prendre en compte des dépenses au titre de mesures effectives du 1er juin au 15 septembre. Pourquoi celles-ci ne figuraient-elles pas au sein de l’Ondam rectifié déposé le 26 septembre devant l’Assemblée nationale ?

Quand nous parlons de sincérité des débats budgétaires, monsieur le ministre, ce ne sont pas des vœux pieux : il est indispensable que les textes présentés soient assis sur des hypothèses crédibles et justifiées.

Sous ces réserves, et dans l’attente des précisions du ministre, la commission a, à ce stade, émis un avis favorable sur l’amendement de rectification du Gouvernement.

Enfin, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 703 et 785, qui entendent modifier la ventilation des dépenses de l’Ondam. Une telle modification ne serait absolument pas contraignante sur l’affectation des résultats.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. François Braun, ministre. L’amendement n° 703 tend à rétablir l’article 4 rectifiant le niveau de l’Ondam 2022. Je suis en accord avec cette proposition.

Cependant, l’amendement vise également à modifier la répartition entre les sous-objectifs de l’Ondam pour augmenter les crédits des établissements de santé et prendre en compte l’inflation, à hauteur de 1,1 milliard d’euros. Or la rectification de l’Ondam 2022 que nous avions proposée dans le texte initial visait précisément à tenir compte du contexte d’inflation. Ainsi, elle comprenait déjà 0,8 milliard d’euros à destination des établissements de santé et médico-sociaux pour assurer la compensation de l’impact sur la charge non salariale d’une inflation nettement supérieure à celle qui avait été prévue lors du vote de la LFSS pour 2022. Ce complément de financement s’appuie sur une étude détaillée, dont les résultats ont par ailleurs été partagés avec l’ensemble des fédérations hospitalières.

En outre, je rappelle que cette rectification de l’Ondam comprenait aussi 1,5 milliard d’euros supplémentaires, destinés à permettre le financement de la hausse du point d’indice dans les établissements de santé et médico-sociaux publics ainsi que des mesures salariales pour les salariés des établissements privés. Cette mesure découle elle aussi du contexte d’inflation particulier à cette année. Ce contexte est donc déjà pleinement pris en compte dans la rectification de l’Ondam que nous vous avions proposée dans le texte initial. Nous sommes par ailleurs favorables à l’amendement de Mme la rapporteure générale qui rétablit l’article portant sur la rectification de l’Ondam, sur lequel je vais revenir.

En conséquence, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 703, de même qu’à l’amendement n° 785, qui tend à rectifier l’Ondam afin de tenir compte, pour les établissements de santé, de l’inflation, des dépenses liées au covid-19 et du rattrapage des soins mis en suspens durant la pandémie. En complément de la réponse que je viens d’apporter, et d’une première rectification de l’Ondam à hauteur de 0,2 milliard d’euros pour financer les mesures d’urgence décidées cet été, je rappelle qu’une rectification complémentaire aura lieu à hauteur de 556 millions d’euros très précisément – je vous l’ai annoncée avant la suspension. J’y reviendrai dans le détail en répondant à Mme la rapporteure générale et à Mme la présidente.

Comme je l’ai déjà dit, je suis favorable à l’amendement n° 22. Je remercie d’ailleurs la commission d’avoir proposé le rétablissement de cet article, qui avait été supprimé par l’Assemblée nationale.

Je tiens à apporter quelques précisions concernant les mesures nouvelles que nous proposons : je répète que ce rajout prend en compte le prolongement, dans les établissements, des mesures d’été concernant le temps additionnel et les heures supplémentaires. Vous le savez comme moi : pour assurer la continuité de service, il a fallu prolonger les mesures d’été, en particulier s’agissant du temps additionnel, au-delà de la date butoir initiale de septembre. C’est ce qui explique l’existence d’un dépassement, mais c’est aussi ce qui a permis – fort heureusement – de continuer à assurer les prises en charge le mieux possible.

Les mesures de soutien à la pédiatrie face à l’épidémie de bronchiolite précoce et de soutien à l’ensemble des services en tension ont été décidées voilà quatre jours, raison pour laquelle je n’ai pu vous les présenter plus tôt. Il était nécessaire d’établir leur financement. Elles font l’objet du sous-amendement que nous vous proposons ce soir.

Bien entendu, je resterai tout au long de la discussion à la disposition de la commission pour toute explication sur les financements, sachant que, concernant l’Ondam 2023, nous devrons probablement, compte tenu en particulier de l’avancée du volet santé du Conseil national de la refondation (CNR), envisager des mesures structurelles dans le courant de l’année. Nous avons, jusqu’à présent, beaucoup parlé de mesures d’urgence. Il est temps d’entamer une refonte structurelle de notre système de santé. Je serai amené à revenir devant le Sénat pour présenter des propositions lorsque celles-ci auront émergé des différents groupes de travail du CNR, qu’ils soient territoriaux ou nationaux.

Si le diagnostic est connu et partagé par tout le monde, il serait hasardeux de partir trop vite sur des solutions qui ont l’apparence de la simplicité. C’est malheureusement ce qui a été fait dans les années 1970 avec le numerus clausus ; nous en payons encore les effets. Cela explique donc ma prudence quant aux mesures à venir sur la restructuration de notre système.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.

Mme Corinne Imbert. Je vous ai bien écouté, monsieur le ministre. Je souhaite intervenir, en tant que rapporteure pour la branche assurance maladie, avant que nous ne votions sur le sous-amendement du Gouvernement. Mme la rapporteure générale et la présidente de la commission ont parlé de responsabilité. Je considère qu’il est aussi de ma responsabilité que le débat soit clair.

Je poserai donc des questions simples, qui appellent des réponses précises. Pourquoi le financement des mesures de la mission flash n’était-il pas inscrit dans l’Ondam rectifié déposé à l’Assemblée nationale ? J’insiste, le dépôt du texte a eu lieu le 26 septembre, tandis que les mesures couvraient la période du 1er juin au 15 septembre. Ce n’est pas crédible.

Surtout, si ce financement n’était pas assuré, pourquoi l’annexe 5 revendique-t-elle 200 millions d’euros à ce titre ? Les 370 millions d’euros au titre des mesures de l’été comprennent-ils ces 200 millions d’euros inscrits à l’annexe ou s’y ajoutent-ils ? En clair, les mesures Braun ont-elles coûté 570 millions d’euros ou l’annexe 5 était-elle fausse ?

Enfin, comment se traduisent dans l’Ondam 2022 rectifié – celui que nous votons ce soir – les 400 millions d’euros que le Gouvernement a annoncés dernièrement à destination de la pédiatrie et des soins critiques ? Vous l’avez un peu évoqué, mais j’aimerais obtenir des réponses plus précises.

Pourquoi seulement 186 millions d’euros sont-ils présentés à ce titre ? Surtout, on nous parle, pour financer en partie ces mesures, d’un fléchage du reliquat de la sous-exécution tarifaire pour l’hôpital et du dégel du coefficient prudentiel : est-ce à croire que ce qui était promis par le Gouvernement comme rendu aux hôpitaux est désormais fléché ? Est-ce à croire que ce que le Gouvernement nous présente comme un effort supplémentaire n’est en réalité qu’une réaffectation en vase clos ? Autrement dit, l’hôpital finance-t-il lui-même sa rallonge ?

Enfin, vous avez évoqué la nécessité de poursuivre les efforts en 2023. Vous venez un tout petit peu de l’évoquer avec l’Ondam 2023. Allez-vous modifier par anticipation l’Ondam 2023 ? Il s’agit là d’une question de sincérité nécessaire à nos débats.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Monsieur le ministre, je veux à mon tour intervenir sur ce point essentiel du PLFSS, pour dire que nous considérons que l’hôpital – et particulièrement l’hôpital public – est le grand oublié de ce projet de loi.

Pourtant, et vous l’avez dit, l’hôpital a subi un pic de crises majeures tout au long de cet été, concernant l’accès aux soins, aux soins non programmés et aux urgences, sans oublier la pédiatrie.

L’hôpital est aussi durement touché par l’inflation, qu’il s’agisse de l’inflation liée aux dépenses de fonctionnement, du coût de l’énergie – les établissements hospitaliers sont de grands consommateurs d’électricité et de gaz – ou du coût de l’alimentation, qui explose également et les touche très directement. Par ailleurs, dans le cadre des dépenses d’investissement, un certain nombre de ces établissements ont été retenus au titre des investissements dits « du Ségur », mais le coût des travaux, pour parler de manière très générale, a aussi considérablement augmenté. Or aucun accompagnement n’est prévu pour aider à prendre en charge ce surcoût, de nature à remettre réellement en question certains projets pour les établissements qui ne pourront les supporter, comme on peut l’observer dans mon département du Calvados.

Vous annoncez, à cet instant, un complément de dotation de 600 millions d’euros au travers de l’article 4, mais le compte n’y est pas, monsieur le ministre : rien que sur l’inflation, les établissements hospitaliers ont besoin de plus de 1 milliard d’euros !

Pour conclure, je m’associe aux propos de notre présidente de commission. Déjà, nous avons préparé l’examen de ce PLFSS sur la base d’un texte qui nous a été transmis tardivement, et, ce soir, vous nous annoncez de nouveaux montants par voie de sous-amendement. Nous devrions acquiescer à ce geste supplémentaire que vous consentez – le troisième, après un premier à 150 millions d’euros et un deuxième à 400 millions d’euros. Mais le compte n’y est toujours pas.

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Corinne Féret. C’est un vrai manque de respect à l’égard des parlementaires. (Applaudissements sur des travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je souscris également largement aux remarques formulées par Mme la présidente de la commission et Mme la rapporteure générale.

Monsieur le ministre, vous bénéficiez d’une clémence particulière du Sénat aujourd’hui : il n’y a pas si longtemps, de telles modifications du budget de la sécurité sociale juste avant la séance publique avaient entraîné la suspension de nos travaux. Nous exerçons notre mandat dans des conditions dégradées, qui nous empêchent de travailler.

L’amendement de Raymonde Poncet Monge prévoit désormais, pour les établissements de santé, une ligne budgétaire inférieure à celle du sous-amendement du Gouvernement… Je crois que tel n’était pas son objectif !

Vous modifiez sans cesse les tableaux. Par ailleurs, les avez-vous modifiés suffisamment ? Je pense que vous répondrez dans le détail aux justes et légitimes questions de Corinne Imbert, mais votre sous-amendement fait état d’une progression de l’inflation de 5,7 % pour 2022, quand le ministre de l’économie table plutôt actuellement sur une inflation comprise entre 6,2 % et 6,5 %. Les budgets sont donc intenables. Les restrictions imposées par Bercy sont tellement intenables, monsieur le ministre, que vous n’avez d’autre choix que de courir dans tous les sens pour poser des rustines. Voilà la réalité ! L’année ne sera pas terminée que vous devrez de nouveau intervenir.

Comme toutes les fédérations hospitalières nous l’ont dit, la dépense d’énergie est insuffisamment prise en compte. Ce n’est pas réaliste.

Nous ne pouvons pas délibérer dans des conditions satisfaisantes. Bien sûr, votre sous-amendement est le plus favorable, mais nous ne le voterons pas, parce que nous n’acceptons pas ces conditions d’examen. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je fais le rapprochement avec l’article 3, qui, sauf erreur de ma part, présentait l’avantage de mettre des recettes en face de dépenses et d’établir un solde.

Monsieur le ministre, votre sous-amendement conduit à une augmentation de 0,6 milliard d’euros, mais, dans l’article 3, les recettes sont toujours identiques, à 221,6 milliards d’euros. Cela veut dire que les dépenses supplémentaires sont financées par de l’argent non dépensé, notamment sur les fonds prudentiels. Est-ce bien cela, monsieur le ministre ? Est-ce l’hôpital qui paie l’hôpital pour financer vos annonces ? (Oui ! au banc des commissions.)

Autrement dit, avec une recette, vous faites deux dépenses. Nous avons déjà largement dénoncé de telles pratiques, dignes de l’« ancien monde ». (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe SER.) C’est très habile d’engager une nouvelle dépense avec des recettes supplémentaires non dépensées, mais ce n’est pas acceptable.

Nous sommes mis devant le fait accompli dans un délai très réduit. Je suis désolé, monsieur le ministre, mais vous faites des annonces aux hospitaliers sur le dos des hospitaliers. Cette situation me semble particulièrement difficile.

Cela dit, je commets peut-être une erreur dans mon analyse… Mais je suis sûr que la pertinence de la réponse que vous m’apporterez sera à la hauteur de l’impertinence de ma remarque ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Annick Jacquemet applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Je partage toutes les remarques de mes collègues, notamment celle de la présidente de notre commission des affaires sociales.

Nous travaillons dans des conditions épouvantables, ce qui, déjà, en soi, n’est pas acceptable.

Monsieur le ministre de la santé, c’est une bonne chose que vous vous aperceviez tout à coup que les hôpitaux ont besoin de moyens. Mieux vaut tard que jamais.

Cependant, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste veut vous alerter sur la situation des hôpitaux et vous demander de répondre aux besoins. L’une de mes collègues a notamment évoqué les problèmes d’énergie. Une délégation de la commission des affaires sociales s’est récemment rendue à Gustave-Roussy. Cet établissement très reconnu nous a signalé que ces dépenses en énergie avaient augmenté de 150 % pour l’électricité et de 550 % pour le gaz. Comment voulez-vous que les établissements hospitaliers financent ce genre de dépenses, compte tenu des moyens qui leur sont alloués ?

Ce soir, vous nous prenez par les sentiments : vous semblez faire un geste. Comment notre groupe pourrait-il refuser un plus pour les établissements ? Sauf qu’il s’agit d’un jeu de dupes : en vertu du principe des vases communicants, vous ne faites que déplacer les choses au sein d’une enveloppe qui reste la même. Ce procédé n’est pas correct à l’égard des parlementaires que nous sommes.

Il faut des financements à la hauteur des besoins. Pas plus que vous ne les aviez prévus dans le PLFSS pour 2022, vous ne les prévoyez dans le PLFSS pour 2023.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je veux revenir sur les réserves. Lors de l’examen de la loi de programmation des finances publiques, qui a été votée récemment, il a été proposé, par le groupe CRCE me semble-t-il, de supprimer la réserve prudentielle de 5 %, qui permet d’annoncer deux fois des dépenses et d’octroyer aux hôpitaux des budgets supplémentaires en prenant sur cette réserve qui a été gelée.

Il me semble, madame Imbert, monsieur Savary, que votre groupe s’est opposé à cette suppression. Tout ce que vous avez proposé, à juste titre, c’est que cette réserve prudentielle ne serve pas systématiquement à faire passer des crédits de l’Ondam hospitalier à l’Ondam de ville – les économistes ont montré que cela était le cas depuis dix ans. Nous étions d’accord sur ce point. Le mieux, pour éviter ce jeu de bonneteau, serait de la supprimer, ce qui permettrait une meilleure transparence sur ce surcroît de crédits qui n’en est pas un, puisqu’il s’agit simplement du dégel de la réserve prudentielle.

Monsieur le ministre, toutes les fédérations ont déclaré que vous n’aviez pris en compte que deux tiers de l’inflation et que, de surcroît, vous n’aviez pas intégré tous les surcoûts de la covid.

Effectivement, ma proposition est désormais moins ambitieuse que la vôtre, mais vous parlez d’autre chose : du dégel de la réserve prudentielle. Supprimons cette réserve, et ce sera très bien.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le ministre, le fait que nous ne disposions toujours pas du texte définitif de l’Assemblée nationale est tout de même un problème. Nous aimerions savoir sur quoi exactement nous travaillons.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. François Braun, ministre. Monsieur le sénateur Bernard Jomier, je remercie le Sénat de sa clémence ! Comme je vous l’ai expliqué, ces crédits correspondent à des besoins qui sont apparus récemment pour faire face aux difficultés que connaît la pédiatrie du fait d’une épidémie de bronchiolite beaucoup trop précoce.

Je pense que, si nous n’avions pas pris de mesures, ou si nous n’avions pas accepté de financer ces mesures, vous me l’auriez également reproché. Surtout, j’aurais eu du mal à regarder dans les yeux mes confrères qui sont actuellement en grande difficulté dans la prise en charge de ces patients !

Mme Laurence Cohen. Ils trouvent votre rallonge insuffisante !

M. François Braun, ministre. Je respecte les engagements que j’ai pris à l’issue des mesures flash de cet été. Comme je l’ai dit tout à l’heure, un peu plus de la moitié de la somme qu’il vous est proposé d’ajouter au travers de ce sous-amendement concerne la rémunération du temps additionnel et des heures supplémentaires qui ont été effectués en prolongation des mesures de l’été, et un peu plus de 200 millions d’euros ont trait aux mesures de l’hiver sur la nuit et la prime de soins continus.

Il ne vous aura pas échappé que la somme de 400 millions d’euros qui a été annoncée courait jusqu’au 31 mars 2023. Je m’y engage ici, ces mesures seront financées, comme les 556 millions d’euros supplémentaires, sans toucher aux autres financements de l’hôpital.

En ce qui concerne l’énergie, je rappelle que l’Assemblée nationale a proposé que les établissements de santé bénéficient des mêmes avantages que les PME à partir du 1er janvier – cela figure dans le texte du projet de loi adopté en vertu de l’article 49, alinéa 3 de la Constitution et transmis au Sénat.

M. René-Paul Savary. Vous n’avez pas répondu aux questions !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 703.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 785.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1128.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 22, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 4 est rétabli dans cette rédaction.

Vote sur l’ensemble de la deuxième partie

Mme la présidente. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.

Article 4 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article 5

(La deuxième partie du projet de loi est adoptée.)

TROISIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Troisième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 736 rectifié

Article 5

I. – La sous-section 2 de la section 4 du chapitre III bis du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :

A. – L’article L. 133-8-4 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, les mots : « suivantes réalisées » sont remplacés par les mots : « réellement effectuées suivantes qui sont facturées » ;

2° Le 1° du II est ainsi modifié :

a) Les mots : « qui réalise les prestations » sont supprimés ;

b) Après la seconde occurrence du mot : « prestations », la fin est ainsi rédigée : « réellement effectuées qui ont fait l’objet d’une facturation. L’organisme de recouvrement en est simultanément informé ; »

3° Le III est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « réalise » est remplacé par le mot : « déclare » ;

b) Le 2° est ainsi modifié :

– à la première phrase, le mot : « réalisé » est remplacé par le mot : « déclaré » ;

– au début de la deuxième phrase, les mots : « Le prestataire est tenu » sont remplacés par les mots : « La personne morale ou l’entreprise individuelle est tenue » ;

– à la dernière phrase, les mots : « le prestataire » sont remplacés par les mots : « la personne morale ou l’entreprise individuelle » ;

B. – L’article L. 133-8-6 est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du 1°, le mot : « réalisé » est remplacé par le mot : « déclaré » ;

2° Au 3°, le mot : « réalise » est remplacé par le mot : « déclare » ;

C. – À l’article L. 133-8-8, le mot : « réalise » est remplacé par le mot : « déclare ».

II. – La section 4 du chapitre III du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :

1° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 243-7, après le mot : « général », sont insérés les mots : « ou qui déclare la réalisation de prestations en vue de bénéficier du versement prévu au 3° du III de l’article L. 133-8-4 du présent code » ;

2° L’article L. 243-7-1 A est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « ou de toute mise en œuvre des procédures de recouvrement mentionnées à l’article L. 133-8-7. Dans ce dernier cas, la lettre vaut notification et comporte les informations prévues au premier alinéa du même article L. 133-8-7. » ;

b) (nouveau) Au second alinéa, les mots : « du cotisant » sont remplacés par les mots : « de la personne contrôlée » et, après le mot : « prévue », sont insérés les mots : « à l’article L. 133-8-7 ou celle prévue ».

III. – L’article 20 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 est ainsi modifié :

A. – Le I est ainsi modifié :

1° Au 1, les mots : « aux 2° et 3° de » sont remplacés par le mot : « à » et les mots : « le 31 décembre 2022 » sont remplacés par les mots : « une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2023 » ;

2° Le b du 3 est remplacé par des b à d ainsi rédigés :

« b) L’aide spécifique mentionnée au 5° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale ;

« c) L’aide spécifique mentionnée au 6° du même II ;

« d) La prestation sociale mentionnée à l’article L. 531-8-1 du même code pour les particuliers mentionnés au a du 2 du présent I. » ;

B. – Le second alinéa du II est supprimé ;

C. – Le b du 1° du III est ainsi modifié :

1° Les mots : « de l’aide spécifique » sont remplacés, deux fois, par les mots : « des aides spécifiques » ;

2° Les mots : « du crédit d’impôt mentionné à l’article 199 sexdecies » sont remplacés par les mots : « des crédits d’impôt mentionnés aux articles 199 sexdecies et 200 quater B » ;

D. – Le IV est ainsi modifié :

1° La première phrase est ainsi modifiée :

a) Les mots : « pour une durée de trois ans, » sont supprimés ;

b) Les mots : « du b » sont remplacés par les mots : « des b à d » ;

c) (nouveau) À la fin, les mots : « la fin de cette période » sont remplacés par les mots : « le 31 décembre 2023 » ;

2° La seconde phrase est ainsi modifiée :

aa) (nouveau) Les mots : « à la fin de cette période d’expérimentation » sont remplacés par les mots : « au plus tard le 31 décembre 2023 » ;

a) Les mots : « du crédit d’impôt mentionné à l’article 199 sexdecies » sont remplacés par les mots : « des crédits d’impôt mentionnés aux articles 199 sexdecies et 200 quater B » ;

b) Après le mot : « familles », sont insérés les mots : « et à l’article L. 531-8-1 du code de la sécurité sociale ».

IV. – Le IV de l’article 13 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, l’année : « 2024 » est remplacée par l’année : « 2023 » et les mots : « mentionnées au 1° du même article L. 7231-1 et » sont remplacés par les mots : « pour un enfant âgé de six ans et plus au 1er janvier de l’année des prestations. Ils s’appliquent à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard à compter du 1er janvier 2024, pour les activités de garde d’enfant à domicile pour un enfant âgé de moins de six ans au 1er janvier de l’année des prestations et » ;

2° Après la première occurrence du mot : « compter », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « du 14 juin 2022, aux prestations de garde d’enfant à domicile pour un enfant âgé de six ans et plus à compter du 1er janvier 2023 et aux prestations de garde d’enfant à domicile pour un enfant âgé de moins de six ans au 1er janvier de l’année des prestations. Ils s’appliquent aux prestations d’accueil des enfants réalisées par les assistants maternels agréés mentionnés à l’article L. 421-1 du code de l’action sociale et des familles à compter du 1er janvier 2024. » ;

3° À la fin de la première phrase du dernier alinéa, les mots : « du 1er janvier 2023 » sont remplacés par les mots : « d’une date fixée par décret, et au plus tard à compter du 1er janvier 2024 » ;

4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux deux premiers alinéas du présent IV, les trois premiers alinéas du I, le II et les deux premiers alinéas du III de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale ainsi que les articles L. 133-8-4 et L. 133-8-5 du même code sont applicables dès le 1er septembre 2022 aux prestations de garde d’enfant à domicile pour un enfant âgé de six ans et plus au 1er janvier de l’année des prestations. »

Mme la présidente. L’amendement n° 23, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 20

1° Remplacer la première occurrence du mot :

de

par le mot :

à

2° Remplacer les mots :

et comporte les informations prévues

par les mots :

des sommes versées à tort et procède à l’invitation prévue

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 23.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 29

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

… – Le II est ainsi rédigé :

« II. – Les aides et prestations mentionnées au 3 du I du présent article sont versées, pour les particuliers mentionnés au a du 2 du même I, dans les conditions prévues à l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale et, pour les particuliers mentionnés au b du 2 dudit I, dans les conditions prévues à l’article L. 133-8-4 du même code. » ;

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La loi prévoit que, dans le cadre de l’expérimentation du versement immédiat des aides sociales et fiscales aux services à la personne, les clients de prestataires perçoivent directement de l’Urssaf le montant des aides faisant l’objet de l’avance.

Or un dispositif spécifique de versement immédiat des aides aux clients de prestataires a été créé par la LFSS pour 2022 afin de permettre aux Urssaf de verser directement au prestataire le montant des aides avancées. C’est par le biais de ce dispositif qu’a été mise en œuvre la généralisation, en 2022, du versement immédiat des aides fiscales aux clients de prestataires.

L’expérimentation devant être prolongée, cet amendement de coordination précise que le dispositif généralisé dédié aux clients de prestataires est utilisé dans le cadre expérimental.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 24.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 25, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 43

1° Remplacer les mots :

l’année : « 2024 » est remplacée par l’année : « 2023 »

par les mots :

la date : « 1er janvier 2024 » est remplacée par la date : « 1er septembre 2022 »

2° Après les deux occurrences des mots :

de l’année

insérer les mots :

de réalisation

II. – Alinéa 44

1° Première phrase

a) Remplacer l’année :

2022,

par les mots :

2022 et

b) Remplacer les mots :

à compter du 1er janvier 2023

par les mots :

au 1er janvier de l’année de réalisation des prestations à compter du 1er septembre 2022

c) Supprimer les mots :

et aux prestations de garde d’enfant à domicile pour un enfant âgé de moins de six ans au 1er janvier de l’année des prestations

2° Seconde phrase

a) Après les mots :

Ils s’appliquent

insérer les mots :

à compter du 1er janvier 2024 aux prestations de garde d’enfant à domicile pour un enfant âgé de moins de six ans au 1er janvier de l’année de réalisation des prestations et

b) Supprimer les mots :

à compter du 1er janvier 2024

III. – Alinéas 46 et 47

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1126, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 25, alinéa 26

Remplacer le mot :

du

par les mots :

d’une date fixée par décret ou au plus tard le

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Ce sous-amendement est également rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 1126 ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1126.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 25, modifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5, modifié.

(Larticle 5 est adopté.)

Article 5
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 1101 rectifié bis

Après l’article 5

Mme la présidente. L’amendement n° 736 rectifié, présenté par MM. Iacovelli et Buis, Mme Duranton, MM. Dennemont, Rohfritsch, Marchand, Hassani, Lévrier et Mohamed Soilihi, Mmes Phinera-Horth et Havet et MM. Théophile, Patient et Haye, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 6° du II de l’article L. 133-5-12 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Du montant alloué au titre de l’aide financière prévue à l’article L. 7233-4 du code du travail. »

II. – Le I du présent article s’applique aux déclarations réalisées au titre des périodes d’emploi de salariés à domicile courant à compter du 1er janvier 2023.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Bernard Buis.

M. Bernard Buis. Cet amendement propose d’intégrer le chèque emploi service universel (Cesu) préfinancé à l’avance immédiate sur le crédit d’impôt services à la personne.

L’avance immédiate est un dispositif nécessaire pour soutenir la trésorerie des salariés, l’accès à la garde d’enfants et la création d’emplois déclarés dans le secteur des services à la personne. Elle a été généralisée avec l’ambition d’inclure tous les acteurs et toutes les activités des services à la personne.

Or le Cesu préfinancé est totalement absent du dispositif, excluant de fait ses 800 000 bénéficiaires et 1 million d’intervenants.

Ce titre spécial de paiement permet aux employeurs, publics comme privés, de participer au financement des services à la personne utilisés par leurs salariés. Avec un volume de 1 milliard d’euros émis chaque année, il s’agit d’un avantage social clé dont les objectifs rejoignent ceux de l’avance immédiate : la réduction du reste à charge des particuliers et la simplification des démarches permettent de mieux concilier la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés, en particulier les travailleurs en situation de handicap, les aidants et les familles, et de réduire le recours au travail non déclaré.

Près de la moitié des salariés bénéficiant de Cesu préfinancés les utilisent pour de la garde d’enfants. La persistance de l’exclusion du Cesu préfinancé du dispositif d’avance immédiate installe une inégalité entre les salariés aidés par leur employeur et les autres particuliers employeurs, à l’inverse de l’intention du Gouvernement, qui a justement accéléré l’élargissement à la garde d’enfants.

Des solutions opérationnelles peuvent être mises en place rapidement, d’ici à la fin de l’année, afin de pallier cette carence et de garantir l’accès de l’ensemble des acteurs au dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à intégrer le dispositif du Cesu préfinancé dans le versement immédiat des aides sociales et fiscales aux services à la personne.

Il semble que ce soit déjà possible en théorie, raison pour laquelle nous sollicitons l’avis du Gouvernement. A priori, l’avance n’est pas encore opérationnelle sur les Cesu préfinancés.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Monsieur le sénateur Bernard Buis, je vous remercie de cet amendement. Sur le fond, nous sommes d’accord, mais c’est un peu tôt. Des enjeux techniques doivent encore être réglés et la mise en place de cette disposition dans huit semaines, c’est-à-dire dès le 1er janvier 2023, nous semble prématurée.

Le bénéfice d’un Cesu préfinancé fait partie des prises en charge qui nécessitent des développements spécifiques. Nous échangeons d’ores et déjà avec les émetteurs de titres en ce sens. Nous n’avons naturellement aucune opposition de principe à leur inclusion dans le projet, dès lors qu’une solution technique permettra de mieux identifier, au sein des Cesu préfinancés, les dépenses réellement exposées par le salarié, ce qui est malheureusement impossible actuellement.

Nous y travaillons d’ores et déjà avec les représentants du secteur, qui ont été reçus par les services du ministère voilà moins d’une semaine.

Le Gouvernement sollicite le retrait de l’amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Buis, l’amendement n° 736 rectifié est-il maintenu ?

M. Bernard Buis. Monsieur le ministre, dès lors qu’un engagement est pris, je retire bien volontiers cet amendement.

Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 736 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendements n° 704 et n° 1029 rectifié

Mme la présidente. L’amendement n° 736 rectifié est retiré.

L’amendement n° 1101 rectifié bis, présenté par Mme Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 133-8-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 133-8-… ainsi rédigé :

« Art. L. 133-8-…. – À l’occasion de chaque transaction réalisée par l’intermédiaire d’une plateforme de mise en relation par voie électronique en vue de fournir une activité de services à la personne à domicile, celle-ci transmet au particulier employeur les éléments d’identification du prestataire de services à domicile nécessaires pour l’établissement des déclarations sociales et fiscales afférentes. »

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à créer une obligation pour les plateformes de mise en relation pour des prestations à domicile couvertes par le Cesu associées à un paiement en ligne de fournir aux particuliers employeurs les renseignements nécessaires à l’établissement des déclarations Cesu.

Il s’agit ainsi de lutter contre le travail au noir, même occasionnel, voire involontaire, provoqué par un défaut de communication des renseignements nécessaires, et, ainsi, d’assurer à la sécurité sociale le recouvrement des cotisations qui lui sont dues.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Le dispositif de votre amendement paraît peu ou prou opérationnel, dans la mesure où sont évoqués les prestataires de services, tandis que l’exposé des motifs mentionne les salariés du particulier employeur.

En tout état de cause, les dispositifs Cesu et Cesu+ permettent de déléguer à l’Urssaf le calcul et, surtout, le recouvrement des cotisations sociales et du prélèvement à la source pour les particuliers employeurs.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis : défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1101 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 1101 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendements n° 705, n° 776 rectifié et n° 1035 rectifié

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 704 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 1029 rectifié est présenté par Mme Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début des cinquième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 704.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement a pour objet d’augmenter significativement la taxation des retraites chapeaux les plus importantes.

Aujourd’hui, le taux de la contribution due par les bénéficiaires de rentes supérieures à 24 000 euros par mois – pesons bien ce chiffre, alors que l’on débat par ailleurs d’une retraite minimale de 1 000 euros par mois – est de 21 %. Cet amendement vise à le porter à 30 %.

Les retraites chapeaux sont des rentes viagères versées par les entreprises à certains salariés, les sommes ciblées ici concernant plutôt des cadres dirigeants. Ce dispositif est actuellement exonéré de cotisations sociales et de la contribution sociale généralisée (CSG).

Il a notamment fait parler de lui durant la dernière décennie, alors que les Français découvraient les montants attribués à certains patrons de grandes entreprises. En 2014, le ministre de l’économie de l’époque, M. Emmanuel Macron, déclarait vouloir le supprimer. En attendant la concrétisation de cette annonce, notre amendement vise à revenir sur la fiscalité des sommes, parfois indécentes, que reçoivent les personnes concernées.

En France, en 2020, les 17 millions de Français à la retraite percevaient en moyenne 1 500 euros bruts de pension par mois, quand certains bénéficiaires de retraites chapeaux touchaient plus de 25 000 euros par mois, soit plus de 300 000 euros par an, en plus de leur retraite obligatoire et complémentaire.

Face à ces écarts, nous proposons de faire davantage participer les très riches à la solidarité nationale, afin de dégager des ressources. Nous entendons ainsi agir sur les recettes pour mieux répondre aux besoins.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin pour présente l’amendement n° 1029 rectifié.

Mme Monique Lubin. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Bien que les sommes évoquées soient élevées, je rappelle que, en 2012, d’après l’IGF et l’Igas, 84 % des 205 000 bénéficiaires d’une retraite chapeau percevaient une rente annuelle d’un montant inférieur à 5 000 euros. Ces derniers ne seraient donc pas redevables de cette contribution.

Du reste, un taux de 34 % pour cette tranche de revenus me paraît confiscatoire.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Les sénateurs ont proposé de nombreux amendements visant à augmenter, parfois de manière significative, la fiscalité ou les cotisations sociales sur tels ou tels types de revenus, ou à les baisser, de manière tout aussi significative.

Je profite de cette occasion pour leur indiquer que nous avons fait le choix d’une stabilité des prélèvements en général, et dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en particulier. (Marques dironie sur les travées du groupe SER.)

La France figure déjà parmi les pays qui fiscalisent le plus les revenus ; nous bénéficions aussi de l’un des systèmes de santé les mieux financés et les plus universels du monde. (Mme Monique Lubin marque son désaccord.) Félicitons-nous de cette situation et essayons de maintenir autant que possible les prélèvements à leur niveau actuel.

Nous aurons d’autres débats plus approfondis sur ce sujet, mais je tenais à faire cette remarque dès le premier amendement de hausse des prélèvements.

Je rejoins donc l’avis de la rapporteure générale.

De plus, vous proposez d’augmenter le prélèvement de 21 % à 30 %, alors que le taux de 21 % lui-même avait été jugé inconstitutionnel en 2012, à l’époque de l’étude susmentionnée. Il est en réalité fixé aujourd’hui à 14 %, pour une bonne raison : le taux de 21 % auquel vous faites référence, ajouté à l’impôt sur le revenu, conduisait à un total dépassant 75 %. Or, n’en déplaise à un ancien Président de la République, un tel taux est confiscatoire.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Un mot pour réagir aux propos de M. le ministre. Nous nous sommes longtemps gargarisés de bénéficier du meilleur système de santé au monde, nous nous félicitons maintenant d’avoir le système le mieux financé.

Pourtant, en choisissant l’indicateur le plus favorable, le budget que nous consacrons à la santé a augmenté de 8 % en trente ans, quand la population de plus de 60 ans a crû de 30 % et celle qui a plus de 75 ans de 50 %, avec toutes les dépenses de santé qui en découlent.

Nous ne sommes pas obtus, nous débattons des recettes. Toutefois, ainsi que je le rappelais en discussion générale, la hausse de la dépense publique tient pour l’essentiel à une progression des transferts aux ménages et aux entreprises.

Certains d’entre eux sont justifiés pour soutenir l’activité économique ou à titre de politique sociale, mais la part du financement dédiée aux services publics n’a cessé de baisser et ne représente plus que 35 % à 38 % de la dépense publique. Nos services publics sont sous-financés.

Nous sommes d’accord, la santé s’en tire mieux que d’autres secteurs, mais les pourcentages de progression que j’ai cités sont bien en deçà de ce que l’évolution de la population nécessiterait, ce qui explique la paupérisation et la décrépitude actuelle de nos services publics.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. On nous parle de mesure confiscatoire.

M. Roland Lescure, ministre délégué. C’est le Conseil constitutionnel qui dit cela !

M. Pascal Savoldelli. Très bien, monsieur le ministre.

À mon sens, pourtant, la véritable mesure confiscatoire, c’est la retraite chapeau elle-même : ceux qui en bénéficient ne paient ni cotisations sociales ni CSG, à l’inverse de tous les autres retraités, notamment des 17 millions d’entre eux qui perçoivent moins de 1 500 euros bruts par mois. C’est cela, une mesure confiscatoire, et totalement inégalitaire ! (Voilà ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 704 et 1029 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 5 - Amendements n° 704 et n° 1029 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 770 rectifié bis

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 705 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 776 rectifié est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 1035 rectifié est présenté par MM. Mérillou, Jomier et Kanner, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début de la première phrase du 2° du II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 705.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement a pour objet de revenir sur l’allégement de la fiscalité sur les actions gratuites inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui prévoyait une baisse du taux de contribution patronale de 30 % à 20 %. Nous proposons de corriger cette mesure, votée au milieu de la nuit, qui nous semble inappropriée et occasionne une perte de recettes de 120 millions d’euros par an pour la sécurité sociale, de l’aveu même de l’étude d’impact accompagnant ladite loi de financement de la sécurité sociale.

Outre ce coût non négligeable pour les finances sociales, cette disposition concerne essentiellement des dirigeants et des salariés très bien payés de grands groupes. La baisse des recettes de la sécurité sociale sert donc à offrir un cadeau aux plus aisés, au détriment de notre protection commune.

La distribution de parts gratuites se substitue parfois à une politique classique d’augmentation des salaires, c’est-à-dire de rémunérations socialisées et fiscalisées, en privant ainsi de façon durable la protection sociale de ressources.

Or la solidarité et la justice sociale ne peuvent s’accommoder de compléments de rémunérations dont les bénéficiaires ne participent pas « selon leurs moyens » à la pérennité de notre modèle social.

C’est pourquoi notre amendement vise à rétablir la contribution patronale au taux qui était le sien avant 2018 : 30 %.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 776 rectifié.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le ministre, le problème, c’est qu’il faut répondre aux besoins de santé de nos concitoyens. Pour cela, notre système de protection sociale, la sécurité sociale, doit recevoir des recettes nouvelles.

C’est cela que porte notre groupe, avec cet amendement, parmi beaucoup d’autres. Vous devriez nous écouter ; nous éviterions ainsi beaucoup de difficultés, nous cesserions de détricoter notre système de protection sociale et nous n’assisterions pas au spectacle que donnent à voir nos établissements publics de santé, hôpitaux comme Ehpad.

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Mérillou, pour présenter l’amendement n° 1035 rectifié.

M. Serge Mérillou. Nous ne nous sommes pas donné le mot, mais nous défendons la même mesure.

Notre objectif est de contribuer au financement du système de santé, mais aussi à la justice fiscale, à laquelle nous devons être très attentifs. Si nous continuons à privilégier les plus riches et à toujours faire payer les mêmes, c’est-à-dire la masse de ceux qui ont des retraites comprises entre 1 000 et 1 500 euros, je vous garantis que la situation nous sautera un jour ou l’autre au visage. Ce procédé n’est plus accepté !

Je ne me fais aucune illusion sur le sort de cet amendement, mais je forme le vœu que cet avertissement soit entendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’entends bien vos analyses, mon cher collègue, mais la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.

Madame Poncet Monge, en effet, le Parlement a voté l’abaissement de ce taux à 20 % en 2018, afin de favoriser l’attribution d’actions gratuites par les entreprises à leurs salariés et de soutenir ainsi l’actionnariat salarié. C’est une manière de redistribuer.

Mme Laurence Cohen et M. Serge Mérillou. Que les entreprises augmentent plutôt les salaires !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Du reste, la mesure proposée conduirait à une quatrième modification de ce taux en quelques années, au risque de rendre le dispositif illisible.

Mme Laurence Cohen. C’est toujours illisible quand on s’attaque aux banques !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. En effet, ce taux a été modifié trois ou quatre fois entre 2015 et 2018. Depuis lors, nous avons privilégié la stabilité. Il s’agit tout de même du plafond, du taux maximum de forfait social. Nous ne faisons pas de cadeau : nous taxons les gens au plafond !

Vous proposez de l’augmenter, alors qu’il avait été ramené à la normale en 2018 ; l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 705, 776 rectifié et 1035 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 5 - Amendements n° 705, n° 776 rectifié et n° 1035 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 708

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 770 rectifié bis, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Une cotisation spécifique est prélevée sur les revenus générés par les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes privés à but lucratif, dont le taux et l’assiette sont définis par décret. Les recettes sont directement affectées à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. La publication du livre Les Fossoyeurs par le journaliste Victor Castanet a mis en lumière le dysfonctionnement de la gestion des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes privés à but lucratif.

La marchandisation de la prise en charge de nos aînés a ouvert un boulevard à la spéculation financière et à ses dérives en matière de conditions de travail des personnels, de non-respect du droit syndical dans les établissements, de détournement de fonds publics et, enfin, de maltraitance des résidents. C’est inacceptable.

Nous sommes favorables à l’interdiction de la gestion des Ehpad par les sociétés privées à but lucratif, au profit d’une implication exclusive des structures publiques ou privées à but non lucratif.

À nos yeux, les actes de l’entreprise Orpea ne découlent pas seulement de l’absence de contrôles, mais aussi de la nature même des sociétés à but lucratif. Dès lors que le ver est dans le fruit, il est vain de chercher à éviter qu’il n’atteigne l’arbre ; il faut d’abord l’empêcher d’entrer.

En attendant une telle évolution, cet amendement vise à mettre à contribution les dividendes des Ehpad privés à but lucratif, afin de renforcer les Ehpad publics et privés à but non lucratif.

Au deuxième trimestre 2022, la société Korian a réalisé 13 millions d’euros de bénéfices sur le dos de nos aînés ; la moindre des choses est d’exiger le versement d’une part des sommes destinées aux actionnaires.

Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 770 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendements n° 937 rectifié bis et n° 1097 rectifié ter

Mme la présidente. L’amendement n° 708, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est créé une cotisation exceptionnelle sur les dividendes des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes privés lucratifs.

Le taux de cette contribution est fixé à 8,55 %. Elle est reversée intégralement à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. La contribution est assise sur l’ensemble des dividendes distribués dans les entreprises mentionnées au premier alinéa, réalisés en France ainsi que de ceux dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions. Un décret fixe la date et les modalités d’application du présent article.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Les enquêtes menées à la suite du scandale Orpea, complétées par les audits des organisations syndicales, ont mis au jour les pratiques délétères des Ehpad privés à but lucratif : rationnement de la nourriture et des fournitures médicales, transfert de charges entre sections au détriment des financements publics pour doper la rentabilité financière, pression sur le personnel, opacité quant aux profits tirés de la spéculation immobilière, etc.

Alors que les personnes éligibles à l’aide sociale à l’hébergement ont droit à une place à moindre coût, de nombreux établissements privés à but lucratif limitent le nombre de ces places, voire les suppriment entièrement.

À l’issue des travaux de la mission d’information du Sénat, il apparaît que les taux de profit insolents de ces grands groupes privés à but lucratif, supérieurs à la moyenne du CAC 40, sont rendus possibles par des mécanismes de prédation appuyés sur les dotations publiques et par l’industrialisation de l’accompagnement des personnes âgées.

Ainsi, sans aucune prise de risque, compte tenu de l’évolution démographique du pays, des profits sont engrangés au détriment des usagers et des contribuables, par le recours à l’optimisation fiscale.

Par cet amendement, nous proposons de taxer à 8,55 %, soit la part patronale de la cotisation vieillesse plafonnée, les dividendes des actionnaires de ces grands groupes et de reverser le produit de cette contribution à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’ensemble du Sénat a été choqué par les révélations du livre de Victor Castanet et la commission des affaires sociales a lancé une mission d’enquête, menée par Michelle Meunier et Bernard Bonne. Nous souhaitons que ses préconisations très importantes soient reprises, autant que possible. Le Gouvernement a quant à lui décidé de mesures, concernant en particulier le contrôle des établissements.

Pour autant, je suis défavorable aux propositions que vous avancez.

L’amendement n° 708 vise à créer une cotisation exceptionnelle sur les dividendes des Ehpad privés à but lucratif dont le produit serait affecté à la CNSA. Celle-ci s’en satisferait probablement, elle pourrait ainsi faire plus de propositions que n’en contient ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Toutefois, il me paraît nécessaire de travailler avec les partenaires sociaux et les collectivités territoriales à l’identification des recettes potentielles de la branche autonomie, avant de mettre en place diverses contributions par voie d’amendement.

Du reste, dans ce cas particulier, l’alourdissement des prélèvements obligatoires pesant sur les Ehpad pourrait être répercuté sur la facture à la charge des résidents, ce que vous ne souhaitez sans doute pas.

L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 770 rectifié bis vise à instaurer une cotisation spécifique sur les revenus générés par les Ehpad privés à but lucratif et à affecter son produit à la CNSA.

L’avis est défavorable, pour les mêmes motifs : cette disposition risque de nuire aux résidents.

Mme Laurence Cohen. N’importe quoi !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. À la suite des rapports préparés par l’Assemblée nationale et le Sénat, le Gouvernement a choisi de privilégier des mesures de transparence, voire la confiscation de sommes exagérément versées dans le cas où les établissements concernés auraient mal utilisé l’argent public pour les raisons extrêmement choquantes que ces travaux ont révélées.

Nous préférons ce contrôle accru, qui sera discuté très bientôt dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, et nous émettons un avis défavorable sur tous les amendements qui tendent à instituer des prélèvements supplémentaires.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 770 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 708.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 708
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 1030 rectifié

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 937 rectifié bis est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 1097 rectifié ter est présenté par Mme Meunier, MM. Jomier et Kanner, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 313-1-3 du code de l’action sociale et de la famille, il est inséré un article L. 313-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 313-1-…. – Une redevance solidaire est appliquée à l’ensemble des établissements relevant du I de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles dont l’autorisation d’activité prévoit un pourcentage de places habilitées à l’aide sociale inférieur à 50 % afin de financer le soutien à l’investissement des établissements médico-sociaux par la branche autonomie. Cette redevance est assise sur une part des bénéfices réalisés par l’opérateur sur la section hébergement, dont le niveau est fixé par décret. Le produit de cette redevance est affecté à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. »

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 937 rectifié bis.

Mme Raymonde Poncet Monge. Nous ne souhaitons donc pas taxer à 8,55 % des dividendes pourtant supérieurs à ceux qui sont versés en moyenne par les entreprises du CAC 40. À un tel niveau de profit, il ne me semble pourtant pas que cela aurait conduit à augmenter le prix de l’hébergement.

Cet amendement a quant à lui pour objet de créer une redevance applicable aux Ehpad dont l’autorisation d’activité par les pouvoirs publics prévoit un pourcentage de places habilitées à l’aide sociale inférieure à 50 %, afin de financer le soutien à l’investissement des établissements et services médico-sociaux (ESMS) de la branche autonomie, pour lesquels ces places habilitées représentent plus de 50 % de l’offre, sinon la totalité.

L’autorisation d’activité en question engendre de facto la perception de dotations publiques issues de la branche autonomie par l’opérateur, lui permettant de financer principalement le salaire des soignants, à travers la section soins. Les opérateurs publics et privés peuvent donc en bénéficier.

Les Ehpad qui ne sont pas majoritairement agréés à l’aide sociale peuvent fixer librement leurs tarifs sur la section hébergement, ce qui leur permet de dégager les profits pointés du doigt dans le rapport d’information sur le contrôle de ces établissements.

Le présent amendement vise à traduire dans la loi l’une des propositions dudit rapport : le versement d’une redevance par les Ehpad commerciaux. Ceux-ci doivent participer au financement de l’adaptation de notre société à l’enjeu démographique.

Un système de contribution solidaire serait appliqué sur les bénéfices réalisés par ces opérateurs sur leur budget hébergement, dont les recettes seraient directement affectées au budget d’investissement de la CNSA – cette affectation conditionne la recevabilité de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 1097 rectifié ter.

Mme Michelle Meunier. Il s’agit de créer une redevance solidaire pour les Ehpad privés à but lucratif, afin de limiter leurs bénéfices. En effet, dès lors qu’ils sont autorisés à ouvrir, ces établissements perçoivent de l’argent public.

Une telle disposition existe dans d’autres domaines d’activité, comme les sociétés routières. Elle reprend l’une des propositions de la mission d’information du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes d’accord, le scandale Orpea doit nous conduire à davantage contrôler et pénaliser les dérives.

Pour autant, faut-il instaurer une redevance solidaire ? C’est un peu difficile à accepter, parce que cela jetterait l’opprobre sur l’ensemble des établissements privés à but lucratif, alors qu’ils ne sont pas tous responsables des agissements constatés.

En outre, une telle mesure présente des risques d’effets indésirables, notamment d’une répercussion du poids de ce prélèvement sur les tarifs, au détriment des résidents.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Nous avons tous été scandalisés par les révélations concernant certains Ehpad privés à but lucratif ; celles-ci ont suscité une grande émotion. Au sein de la commission des affaires sociales, nous étions tous sidérés. Nos collègues ont produit un excellent rapport, contenant des recommandations qui me paraissaient avoir recueilli l’unanimité. Et voilà que la rapporteure générale semble douter de leur bien-fondé. Je ne comprends plus !

Nous essayons d’encadrer le secteur, d’avancer des propositions pour lui imposer le respect d’une certaine éthique. Un point devrait nous réunir, quelle que soit notre couleur politique : il est inadmissible de faire du profit sur les personnes âgées.

Or dès qu’une proposition vise à renouer avec l’humain, avec l’éthique, on la refuse, parce que cela conduirait à jeter l’opprobre sur les établissements ! C’est n’importe quoi !

Les personnes âgées sont maltraitées dans un certain nombre d’Ehpad, mais on va réfléchir à mettre en place des contrôles, alors même qu’il n’existe pas de moyens humains et financiers pour les mener efficacement. En parallèle, on ne pourrait taxer ceux qui se sont engagés à titre lucratif dans la réalisation d’une mission de service public bien juteuse et dont ils tirent des profits. C’est inadmissible !

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Madame la rapporteure générale, il n’est pas question d’appliquer la disposition proposée à tous les établissements. Prétendre le contraire est un prétexte pour refuser toute mesure et se contenter d’annoncer que l’on va contrôler plus.

Mais nous savons bien que les moyens pour cela n’existent pas !

Mme Laurence Cohen. Ni les moyens financiers ni les moyens humains !

Mme Monique Lubin. On nous explique que l’on va en dégager, mais nous en doutons, et c’est un euphémisme : je n’ai aucune confiance à ce sujet.

Le scandale Orpea a révélé non seulement les tarifs exorbitants imposés aux familles, qui ne correspondaient absolument pas aux prestations rendues, mais aussi la spoliation de l’argent public, de l’argent de la sécurité sociale et des départements. Ces gens ont osé prendre l’argent des départements pour le thésauriser !

Pourtant, nous allons continuer à répondre en annonçant l’envoi de contrôleurs. Pardonnez-moi, mais il ne me semble pas que cela effraie beaucoup les personnes concernées.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote.

M. Bernard Bonne. Je ne saurais me prononcer contre les propositions que nous avons inscrites dans le rapport, mais, selon moi, un amendement ne permettra pas de traiter cette question importante.

Mme Laurence Cohen. Alors, que devons-nous faire ?

M. Bernard Bonne. Nous avons évoqué une éventuelle redevance – et non une sanction – concernant les établissements privés commerciaux, à partir du moment où ils sont autorisés à ouvrir.

S’agissant d’un secteur commercial, c’est une possibilité, mais, à mon sens, nous ne pouvons en décider aujourd’hui par un simple amendement. La situation exige que notre analyse aille un peu plus loin.

Nous avions écrit cela parmi nos propositions, lesquelles avaient en effet été approuvées à l’unanimité de la commission des affaires sociales, mais le problème est trop important pour agir ainsi, au risque de donner le sentiment d’imposer une punition à tous les opérateurs privés. Nous devons réfléchir à la manière de ne viser que certains d’entre eux.

Je souhaite bien entendu exécuter les sanctions et accentuer les contrôles, mais je suis défavorable à cet amendement.

Mme Laurence Cohen. Quels moyens humains et financiers seraient-ils consacrés aux contrôles ?

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Quelques mots pour revenir sur l’état d’esprit du texte concernant les contrôles.

Dans cette partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement a repris certaines des préconisations du rapport Meunier-Bonne.

La commission des affaires sociales en a, quant à elle, repris beaucoup : ces mesures sont dans le texte.

Globalement, le Sénat a donc tenu compte du contexte issu de l’affaire Orpea, en mettant en place des outils basés sur le contrôle.

Nos collègues tendent à généraliser les pratiques pointées du doigt et à considérer que tous les acteurs privés seraient dans le collimateur. Or nous avons besoin d’éléments plus précis pour éclairer la situation.

Mme Laurence Cohen. Les résidents souffrent, mais ce n’est pas grave !

M. Philippe Mouiller. À entendre Mme Lubin, cette redevance permettrait de contrebalancer le manque d’efficacité des contrôles. Quel drôle d’état d’esprit ! Je préfère que nous inscrivions les moyens nécessaires et que nous proposions au Gouvernement le suivi de ces contrôles par la commission des affaires sociales, qui a les capacités de les évaluer.

Exiger une taxe pour solde de tout compte me paraît être le signe d’une réflexion par trop limitée.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je partage certaines des interventions de mes collègues ; quoi que nous décidions, il faut faire un geste !

M. Pascal Savoldelli. Heureusement, nos administrations travaillent bien ; la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a ainsi mené un millier de contrôles des Ehpad privés à but lucratif entre 2019 et 2021 et a conclu que leurs pratiques commerciales étaient majoritairement malhonnêtes. Il faut maintenant envoyer un signal ; c’est d’autant plus nécessaire que ces structures ont besoin d’une habilitation de l’État pour fonctionner.

Je n’ai donc pas le sentiment qu’il s’agit d’une taxe de plus : l’État doit se faire respecter par ces sociétés privées à but lucratif, son habilitation et les responsabilités que celle-ci impose face à l’opinion publique doivent être honorées. À ce titre, on pourrait presque parler d’amende plutôt que de redevance.

Savez-vous quelle est la conclusion de cette étude révélant les comportements frauduleux d’un millier d’Ehpad ? « Il faut appeler les familles à la vigilance » ! On ne peut pas répondre cela aux citoyens sans nous contraindre nous-mêmes à faire preuve de la même vigilance. (Mme Laurence Cohen applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Nous partageons tous de réelles interrogations quant à ce modèle d’établissement à but lucratif. Pour celles et ceux qui ont participé aux auditions de la mission d’information, ce sont d’ailleurs un peu plus que des interrogations.

L’instauration de cette redevance est-elle le bon choix pour autant ? En assimilant celle-ci à une amende, je crois que vous avez démontré que non, monsieur Savoldelli.

Je partage les craintes de Mme la rapporteure générale. Si l’on applique cette redevance sans en avoir mesuré toutes les conséquences, ce seront les résidents et leurs familles qui la paieront directement. Ce serait aller un peu vite en besogne, sans traiter le problème à la racine.

Mon groupe suivra l’avis de la commission.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je vous invite à lire l’exposé des motifs de notre amendement, madame la rapporteure générale : ne sont visés que les Ehpad privés à but lucratif dont le pourcentage de places habilitées à l’aide sociale est inférieur à 50 %, c’est-à-dire le sous-marché très lucratif qui peut fixer et faire évoluer ses tarifs d’hébergement librement.

Orpea a par exemple des contrats d’hébergement indexés sur l’inflation. En raison de ces contrats en or, les tarifs d’hébergement de ses établissements augmenteront de 6 % l’année prochaine. Nul doute que le groupe se portera bien !

Nous ne jetons pas l’opprobre sur tous les établissements privés, mais seulement sur ceux qui segmentent le marché pour bénéficier de la niche la plus lucrative et qui ne veulent pas assumer la solidarité des lits d’habilitation sociale. Celle-ci est prise en charge à 98 % par les établissements publics et à 80 % par les établissements privés à but non lucratif qui, eux, peinent à équilibrer leurs comptes.

Comme je l’ai indiqué, le privé lucratif bénéficie d’une profitabilité supérieure à celle des entreprises du CAC 40.

Dans ces conditions, taxer ces établissements qui n’assument pas la solidarité des lits d’habilitation sociale ne revient pas tout à fait à jeter l’opprobre sur tout le privé lucratif ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je suis contre le fait que des établissements accueillant des personnes âgées puissent faire des bénéfices, mais j’estime que c’est à l’État qu’il revient de restreindre ces derniers. Ne pourrait-on instaurer un plafonnement des bénéfices réalisés ?

En tout état de cause, à l’instar de Bernard Bonne, j’estime qu’une telle décision ne peut être prise par voie d’amendement.

Mme Laurence Cohen. Ce n’est jamais le moment !

M. Daniel Chasseing. Il est scandaleux qu’il existe des Ehpad à but lucratif, et je répète, il faut que nous parvenions à mettre un terme à cette situation. (M. Jean-Luc Fichet applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. Il faut distinguer la redevance et les sanctions.

En ce qui concerne la redevance, nous savons que la CNSA aura besoin d’argent pour ses investissements futurs. Cela appelle une réflexion, mais celle-ci ne peut être menée dans le cadre du présent débat.

Quant aux sanctions qu’évoquait notre collègue sur les travées d’en face, elles ne doivent être prises sous forme d’amendes qu’à l’encontre des escrocs. Or les gestionnaires d’Ehpad ne sont pas tous des escrocs, y compris dans le secteur privé.

Je propose donc de rejeter ces amendements identiques au profit d’une réflexion portant à la fois sur une redevance conçue comme une participation solidaire des Ehpad privés à la mise en place de la branche autonomie – celle-ci permettra de financer des Ehpad publics ou privés – et sur un système de sanctions visant les escrocs qui gèrent leur Ehpad d’une manière inadmissible – pour ne pas dire horrible – comme ce fut le cas pour Orpea.

M. René-Paul Savary. C’est la sagesse.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je souscris aux propos de la rapporteure générale, d’Alain Milon et de Bernard Bonne : il me paraît prématuré de légiférer dans ce domaine.

Pour autant, j’estime moi aussi qu’il faut agir pour limiter ces profits indus. C’est d’ailleurs l’une des préconisations formulées par la mission sénatoriale qui a travaillé sur ce sujet.

Qu’adviendra-t-il des recommandations de cette mission sénatoriale, monsieur le ministre ? Devons-nous déposer une proposition de loi ? Dans ce cas, la soutiendrez-vous ? Au contraire, le Gouvernement prend-il l’engagement de présenter un projet de loi tenant compte des conclusions de notre mission ?

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Permettez-moi de revenir sur l’argument selon lequel il serait nécessaire de différer l’adoption d’une telle disposition au motif qu’il s’agirait d’une réforme d’ampleur.

Par le passé, des collègues de la majorité sénatoriale ont souhaité réformer le système de retraite par amendement… (Sourires.)

M. Alain Milon. Voilà six ans que nous déposons un tel amendement !

M. Bernard Jomier. Nos propositions ne relèvent tout de même pas du même ordre de grandeur. Donnez-nous en acte, mes chers collègues !

Par ailleurs, la vraie question qui est posée est celle de la place du privé à but lucratif dans le système médico-social et des méthodes de régulation dont on use.

Cette question relativement vaste appelle plusieurs niveaux de réponse – nous en sommes bien d’accord. Faut-il exclure un premier niveau de réponse pour autant ? La proposition de nos collègues n’est pas une attaque contre tout un système, mais un mode de régulation de la profitabilité de ces établissements. Elle vise simplement à instaurer une borne supérieure aux bénéfices des établissements qui s’exonèrent de la participation à la solidarité par l’habilitation à l’aide sociale.

C’était du reste une des propositions, très raisonnable et modérée, du rapport de Michelle Meunier et de Bernard Bonne. Si ce rapport s’était limité à cette proposition, cela n’aurait pas révolutionné la question qui nous est posée ! Pourquoi ne pas l’appliquer ?

Personne ne cherche à stigmatiser l’ensemble du privé à but lucratif, même si nous pourrons débattre du bien-fondé de celui-ci. En tout état de cause, nous pouvons déjà instaurer une borne.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.

Mme Michelle Meunier. L’année dernière à la même époque, lorsque nous présentions ce type d’amendements, la ministre au banc nous répondait que ce n’était pas le bon texte et qu’il y aurait bientôt un projet de loi à l’occasion duquel nous pourrions débattre de nos propositions.

Aujourd’hui, ce sont nos collègues de droite, avec qui nous travaillons le plus souvent de façon consensuelle au sein de la commission des affaires sociales, qui nous font ce genre de réponse.

Il est lassant de se voir opposer cet argument de timing. J’estime au contraire que cette mesure a pleinement sa place au sein du PLFSS. Nous proposons en effet de nouvelles recettes pour la CNSA, au travers d’une mesure que vous avez caricaturée en prétendant qu’elle visait l’ensemble des Ehpad, madame la rapporteure générale, alors que seuls les établissements dont le pourcentage de places habilitées à l’aide sociale est inférieur à 50 %, c’est-à-dire ceux qui sont réellement lucratifs, le sont.

Délibérons, mes chers collègues !

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Ce débat m’interpelle, mes chers collègues, car de nombreux établissements privés que je connais – certains anciens présidents de département parmi nous ont d’ailleurs permis leur agrément – rendent un service considérable. Les résidents y sont bien traités et y contractent peu de complications. Or le secteur public n’aurait pas été en mesure de financer un certain nombre de ces établissements. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain !

Par ailleurs, qu’en est-il des cliniques privées ? Faut-il attendre qu’un livre sorte, pointant le mouton noir parmi les moutons blancs, pour que nous prenions dans l’émotion des mesures vis-à-vis de ces établissements, qui, eux aussi, rendent un service complémentaire à celui du public ?

Le dossier est un peu plus large que l’approche retenue par les auteurs de ces amendements identiques. C’est pourquoi je vous invite à ne pas voter ces derniers, mes chers collègues, au profit d’une réflexion qui nous permettra de trouver une solution consensuelle.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. J’ai été interrogé sur les suites que le Gouvernement comptait donner au rapport sénatorial sur le contrôle des Ehpad, notamment sur les procédures qu’il envisageait de mettre en place et les moyens qui leur seraient alloués.

Les sous-parties du premier chapitre de la première section du rapport sénatorial s’intitulent « Contrôler tous les Ehpad dans un délai de 24 mois » et « Imposer un choc de transparence ». L’article 32 du PLFSS, dont vous débattrez prochainement, prévoit de rendre effectifs ce choc de transparence et ces contrôles.

En parallèle, dans le PLFR pour 2022 que nous présenterons dans les jours qui viennent, nous affectons 80 nouveaux équivalents temps plein (ETP) aux agences régionales de santé. Les moyens seront donc au rendez-vous.

L’objectif – je le répète – est d’accroître les contrôles de manière que tous les Ehpad soient contrôlés dans les vingt-quatre mois.

L’article 32 prévoit de plus la possibilité de confisquer des sommes indûment reçues, au profit notamment de la CNSA, la fameuse cinquième branche, y compris à la demande des présidents de conseils départementaux ou des communes.

Nous appliquons donc un certain nombre de recommandations du rapport du Sénat, que nous avons apprécié à sa juste valeur, et nous y consacrons les moyens nécessaires pour que les horreurs que nous avons découvertes il y a maintenant quelques mois ne se reproduisent plus.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 937 rectifié bis et 1097 rectifié ter.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Article additionnel après l'article 5 - Amendements n° 937 rectifié bis et n° 1097 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article 6

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 31 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 338
Pour l’adoption 97
Contre 241

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 1030 rectifié, présenté par Mme Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – A. – Il est institué une contribution additionnelle sur les bénéfices des sociétés redevables de l’impôt sur les sociétés prévu à l’article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros.

B. – La contribution additionnelle est due lorsque le résultat imposable de la société pour l’exercice considéré au titre de l’impôt sur les sociétés précité est supérieur ou égal à 1,25 fois la moyenne de son résultat imposable des exercices 2017, 2018 et 2019.

C. – La contribution additionnelle est assise sur le résultat imposable supplémentaire réalisé par rapport à 1,25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités. La contribution additionnelle est calculée en appliquant à la fraction de chaque part de résultat imposable supérieur ou égale à 1,25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités le taux de :

1° 20 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,25 fois et inférieure à 1,5 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;

2° 25 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,5 fois et inférieure à 1,75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;

3° 33 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités.

II. – A. – Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du code général des impôts, la contribution additionnelle est due par la société mère. Elle est assise sur le résultat d’ensemble et à la plus-value nette d’ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D dudit code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.

B. – Le chiffre d’affaires mentionné au I du présent article s’entend du chiffre d’affaires réalisé par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d’un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du code général des impôts, de la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

C. – Les réductions et crédits d’impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution additionnelle.

D. – Sont exonérées de la contribution prévue au présent I, les sociétés dont la progression du résultat imposable par rapport à la moyenne des exercices 2017, 2018 et 2019 résulte d’opérations de cession ou d’acquisition d’actifs, pour la fraction du résultat imposable de l’exercice concernée.

E. – La contribution additionnelle est reversée aux caisses de retraite du régime de base obligatoire.

Les dispositions relatives à la répartition entre caisses de retraite sont renvoyées à un décret pris en Conseil d’État.

III. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur à compter de la publication de la présente loi et sont applicables jusqu’au 31 décembre 2023.

IV. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation provisoire de l’application du I de la présente loi avant le 31 décembre 2023 et un rapport d’évaluation définitif au plus tard le 31 juillet 2026.

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à créer une taxe sur les superprofits des grandes entreprises réalisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires, dont le produit financera la branche retraite de la sécurité sociale.

Au premier semestre 2022, le bénéfice du groupe TotalEnergies a progressé de 122 % par rapport à 2021.

En 2020, le groupe Sanofi a quant à lui vu ses bénéfices progresser de 338 % par rapport à 2019.

Je m’arrête là, car vous connaissez nos arguments, mes chers collègues. (Sourires.)

À l’heure où notre système de santé a plus que jamais besoin d’être sauvé, il nous paraîtrait normal que les groupes qui ont gagné énormément d’argent, notamment après la crise du covid-19 – les profits de certains d’entre eux s’expliquent par la situation qui résulte aujourd’hui de cette crise – participent à la solidarité nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. (Marques détonnement sur les travées des groupes SER et CRCE.)

Mme Laurence Cohen. C’est étonnant !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En d’autres temps, j’avais certes cosigné un amendement visant à taxer les superprofits.

Mme Laurence Cohen. C’était avant !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mais l’avis de la commission prévaut.

Quoi qu’il en soit, certaines entreprises rencontrant des difficultés dans la période inflationniste actuelle, il ne paraît pas opportun de taxer les superprofits de la sorte.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. L’avis est défavorable, mais je vous engage à voter l’article 4 du PLF qui vous sera prochainement transmis.

Celui-ci retranscrit en effet dans le droit français une proposition européenne qui a été acceptée avec le sourire et les applaudissements des socialistes espagnols et portugais, des sociaux-démocrates allemands et suédois et de l’ensemble de nos partenaires européens.

Il s’agit de la contribution sur la rente inframarginale des énergéticiens. Ces derniers ont – il est vrai – bénéficié de rentes exceptionnelles du fait de la crise énergétique, et il est normal qu’une part de celles-ci revienne aux citoyens. Cette contribution sera bien plus efficace que l’impôt que vous proposez, car elle s’appliquera, non pas à toutes les entreprises qui ont la chance de gagner de l’argent – ce n’est pas nécessairement un malheur ! – (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), mais aux seules entreprises qui ont bénéficié de la crise.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Il ne s’agit pas de taxer les entreprises qui gagnent de l’argent, mais celles qui réalisent des superprofits !

M. Roland Lescure, ministre délégué. Cette contribution rapportera 8 milliards d’euros en 2022, et 26 milliards d’euros en 2023, soit bien plus que la recette qui serait perçue au titre de la taxe que le présent amendement vise à instaurer.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Respectons les positions de chacun, mes chers collègues !

Il est risible d’arguer de l’inflation pour rejeter cet amendement de notre collègue socialiste. Je me demande si la majorité sénatoriale porte autant d’attention à l’inflation qui frappe les Françaises et les Français, les personnels de santé, les hôpitaux, etc.

De même, permettez-moi de sourire de l’argument du Gouvernement selon lequel il serait proposé de taxer toutes les entreprises qui ont le malheur de gagner de l’argent.

À chaque fois que nous proposons des mesures visant à créer des recettes nouvelles, vous les refusez au motif que cela égratignerait les profits. Mais il s’agit de superprofits ! Ces entreprises réalisent des milliards d’euros de bénéfices ! Je rappelle d’ailleurs que par cet amendement, notre collègue socialiste reprend une proposition de taxation symbolique des superprofits à laquelle il n’a manqué que trente-trois voix, le 1er août dernier, pour être adoptée par le Sénat.

Assumez la différence de projet entre nous au lieu d’essayer de noyer le poisson, mes chers collègues : vous ne souhaitez pas créer de nouvelles recettes au bénéfice de la sécurité sociale en taxant ceux qui réalisent des superprofits, notamment en profitant de la crise du covid-19. (Mme Émilienne Poumirol et M. Serge Mérillou applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Monsieur le ministre, les arguments que vous avancez pour rejeter cet amendement m’ont choquée.

L’exposé des motifs de notre amendement vise bien les entreprises qui ont réalisé des superprofits.

Les bénéfices du groupe Sanofi ont progressé de 338 %, et ceux du groupe TotalEnergies de 122 % au premier semestre 2022, pendant que le profit net de l’armateur CMA CGM augmentait de 14 milliards d’euros.

Il ne s’agit pas d’entreprises qui, pour reprendre vos propos, ont le « malheur » de réaliser quelques euros de bénéfices, mais de super-superprofits.

Vous nous renvoyez à l’article 4 du PLF, mais nous débattons aujourd’hui du PLFSS. Or nous avons souligné précédemment qu’à l’article 4 du présent texte, le compte n’y était pas, en particulier pour l’abondement du budget de l’Ondam hospitalier que vous avez proposé, monsieur le ministre.

Vous nous revoyez à un autre budget, mais les besoins sont là, dans ce PLFSS. Or ces entreprises doivent prendre leur part à la solidarité nationale, et l’on ne peut écarter leur contribution au motif que leurs bénéfices ne seraient pas suffisants. (Mme Émilienne Poumirol applaudit.)

Mmes Cathy Apourceau-Poly et Laurence Cohen. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1030 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 5 - Amendement n° 1030 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 6 - Amendement n° 6 rectifié ter

Article 6

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

A. – L’article L. 133-4-5 est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) À la première phrase, les mots : « n’a pas rempli » sont remplacés par le mot : « méconnaît » ;

2° Après la référence : « L. 133-4-2 », la fin de la deuxième phrase du deuxième alinéa est supprimée ;

3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un II ainsi rédigé :

« II. – L’annulation des réductions ou exonérations de cotisations ou contributions est plafonnée à hauteur du montant total des sommes mentionnées aux articles L. 8222-2 et L. 8222-3 du code du travail dues aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du présent code et à l’article L. 723-3 du code rural et de la pêche maritime.

« Lorsqu’il n’a été procédé à aucune annulation contre le donneur d’ordre dans les cinq ans qui précèdent le constat du manquement, le plafond mentionné au premier alinéa du présent II est réduit à 15 000 € pour une personne physique et à 75 000 € pour une personne morale, sauf si le plafond prévu au même premier alinéa est inférieur à ces montants. » ;

4° Au début du troisième alinéa, est ajoutée la mention : « III. – » ;

B. – L’article L. 133-5-3 est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa du I, les mots : « à un organisme désigné par décret » sont remplacés par les mots : « à celui des organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du présent code et à l’article L. 723-3 du code rural et de la pêche maritime dont il relève, » et les mots : « , ainsi que, le cas échéant, » sont remplacés par les mots : « . Les personnes soumises à l’obligation mentionnée au présent alinéa sont tenues, le cas échéant, de procéder à » ;

2° Le II bis est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« II bis. – Tout organisme qui verse, à un titre autre qu’employeur, des sommes imposables ou soumises à cotisations ou contributions sociales ou qui verse des prestations sociales figurant sur une liste fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget adresse mensuellement aux organismes mentionnés aux articles L. 213-1 ou, s’il en relève, L. 752-1 du présent code ainsi qu’à l’administration fiscale une déclaration sociale nominative comportant, pour chacune des personnes attributaires de ces sommes et prestations et après information de ces personnes, les informations relatives à ces versements. Cette déclaration est effectuée par voie électronique, selon des modalités fixées chaque année par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les employeurs qui versent des sommes ou prestations mentionnées au premier alinéa du présent II bis uniquement à leurs salariés ou assimilés ou à leurs anciens salariés ou assimilés déclarent ces versements au moyen de la déclaration mentionnée au I. » ;

3° Au II ter, les mots : « les informations, déterminées par décret » sont remplacés par les mots : « en vue d’en faciliter les démarches, les informations dont les catégories sont définies par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget » ;

4° Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ce décret détermine les modalités particulières selon lesquelles sont remplies les obligations prévues aux I et II bis au titre des rémunérations dues à l’occasion des périodes de congés des salariés relevant des caisses mentionnées à l’article L. 3141-32 du code du travail. Il prévoit, le cas échéant, les modalités des échanges d’informations entre ces caisses et les employeurs de ces salariés permettant la transmission, par une déclaration unique, de l’ensemble des données dont la déclaration est obligatoire en application du présent article. » ;

C. – L’article L. 133-5-3-1 est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

a) À la dernière phrase, après le mot : « organismes », sont insérés les mots : « de sécurité sociale » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Elle tient compte des demandes de correction signalées par les autres organismes ou administrations destinataires des données. » ;

2° Au troisième alinéa, après le mot : « organisation », sont insérés les mots : « permettant la prise en compte des demandes de correction de l’ensemble des organismes et administrations mentionnées au deuxième alinéa et » ;

D. – Au 3° de l’article L. 213-1-1, les mots : « d’assurance vieillesse dues au titre des » sont remplacés par les mots : « et contributions sociales dont le recouvrement n’était pas assuré au 1er janvier 2020 par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 et qui sont dues au titre de salariés relevant de » et, après les mots : « de cotisations », sont insérés les mots : « d’assurance vieillesse » ;

E. – L’article L. 243-7-4 est ainsi rétabli :

« Art. L. 243-7-4. – Dans le cadre de leurs missions, les agents chargés du contrôle peuvent utiliser les documents et informations obtenus lors du contrôle de toute personne appartenant au même groupe que la personne qu’ils contrôlent. Pour l’application du présent article, un groupe est entendu comme l’ensemble des personnes entre lesquelles existe un lien de détention ou de contrôle au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3 du code de commerce.

« L’agent chargé du contrôle est tenu d’informer la personne contrôlée de la teneur et de l’origine des documents ou informations, obtenus dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article, sur lesquels il se fonde. Sur sa demande, il communique une copie des documents à la personne contrôlée.

« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions et garanties applicables à cette utilisation de documents ou d’informations ainsi que le délai d’information de la personne contrôlée. » ;

F. – Le II de l’article L. 243-7-7 est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les donneurs d’ordres peuvent également bénéficier, selon les mêmes modalités, d’une réduction des majorations mises à leur charge en application du 1° de l’article L. 8222-2 du code du travail. » ;

2° Au début du dernier alinéa, les mots : « Cette réduction » sont remplacés par les mots : « La réduction des majorations » ;

G. – Le I de l’article L. 243-13 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « vingt » ;

2° Au deuxième alinéa, les mots : « l’employeur contrôlé » sont remplacés par les mots : « la personne contrôlée » ;

3° Après les mots : « lorsqu’est », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « établie au cours de cette période l’une des situations suivantes : » ;

4° Le 4° est remplacé par des 4° et 5° ainsi rédigés :

« 4° Un constat de comptabilité insuffisante ou de documentation soit inexploitable, soit transmise ou remise plus de quinze jours après la réception de la demande faite par l’agent chargé du contrôle ;

« 5° Le report, à la demande de la personne contrôlée, d’une visite de l’agent chargé du contrôle. »

II. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’article L. 724-11 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La durée de la période contradictoire peut être prolongée sur demande du cotisant reçue par l’organisme avant l’expiration du délai initial, à l’exclusion des situations où est mise en œuvre la procédure prévue à l’article L. 725-25 du présent code ou en cas de constat des infractions mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 8211-1 du code du travail. » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 722-24, après la référence : « L. 722-1 », sont insérés les mots : « ou de l’article L. 722-20 » ;

3° L’article L. 722-24-1 devient l’article L. 722-24-2 ;

4° L’article L. 722-24-1 est ainsi rétabli :

« Art. L. 722-24-1. – Lorsqu’une entreprise de travail temporaire établie à l’étranger met à la disposition d’une entreprise exerçant une activité mentionnée aux articles L. 722-1 ou L. 722-20 des salariés, liés par des contrats de travail temporaire, entrant dans le champ d’application des mêmes articles L. 722-1 ou L. 722-20, pour lesquels elle demande le maintien à la législation de sécurité sociale d’un autre État et que les conditions de ce maintien ne sont pas remplies, ces salariés relèvent ou, le cas échéant, continuent de relever du régime applicable aux salariés agricoles. » ;

5° L’article L. 725-3 est complété par six alinéas ainsi rédigés :

« La caisse centrale de la mutualité sociale agricole assure la notification et le versement à chaque attributaire des sommes recouvrées qui lui reviennent.

« Par dérogation au onzième alinéa du présent article, le versement est effectué à hauteur du montant des sommes dues par les redevables, après application d’un taux forfaitaire fixé au regard du risque de non-recouvrement d’une partie de ces sommes :

« – pour les versements, cotisations et contributions mentionnés aux abc et e du 5° de l’article L. 225-1-1 du code de la sécurité sociale ;

« – pour les cotisations mentionnées aux a et b du présent article ;

« Le taux mentionné au douzième alinéa est fixé par attributaire ou catégorie d’attributaires, dans des conditions fixées par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale, de l’agriculture et du budget.

« Sans préjudice des dispositions particulières prévoyant d’autres règles d’affectation, le produit des majorations de retard et des pénalités dues par les redevables dans les conditions prévues aux douzième à quatorzième alinéas n’est pas reversé aux attributaires. » ;

6° Après le premier alinéa de l’article L. 725-3-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 243-7-4 du code de la sécurité sociale est applicable aux contrôles effectués en application de l’article L. 724-7 du présent code. » ;

7° (nouveau) Au II de l’article L. 725-12, les mots : « à l’avant-dernier » sont remplacés par les mots : « au quatrième » ;

8° (nouveau) L’article L. 725-12-1 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « agricole », sont insérés les mots : « et aux cotisants de solidarité » ;

b) Sont ajoutés les mots : « ou pour celui de l’entrepreneur individuel défini à la section 3 du chapitre VI du titre II du livre V du même code ».

III. – Le premier alinéa des 1° et 3° du paragraphe 1er de l’article 3 de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires est ainsi modifié :

1° Après le mot : « est », la fin de la seconde phrase est ainsi rédigée : « assise sur les rémunérations entrant dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale en application de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale. » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Le taux de cette cotisation est fixé par décret. »

IV. – Au c du 4° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, après la dernière occurrence du mot : « publique, », sont insérés les mots : « à la cotisation due au titre de l’allocation temporaire d’invalidité des agents des collectivités locales, ».

V. – La dernière phrase du A du III de l’article 12 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 est complétée par les mots : « , à l’exception des organismes complémentaires et des autorités organisatrices de la mobilité, pour lesquels le montant et les modalités de règlement de ces créances sont constatés et fixés par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ».

VI. – Les I à III entrent en vigueur le 1er janvier 2023, sous réserve des A et B du présent VI.

A. – Les 1° à 3° du B du I entrent en vigueur le 1er janvier 2024.

B. – Le 5° du II est applicable aux cotisations et contributions reversées par la caisse centrale de la mutualité sociale agricole à compter du 1er janvier 2025. Cette date peut être reportée par décret, dans la limite d’un an. Les créances de cotisations et de contributions sociales et les créances accessoires correspondant aux restes à recouvrer dus aux attributaires par la caisse centrale de la mutualité sociale agricole avant cette date font l’objet d’un versement à hauteur de la valeur estimée recouvrable de ces créances à cette même date. Les modalités de règlement desdites créances, notamment leur échelonnement, sont fixées par convention entre la caisse centrale de la mutualité sociale agricole et les attributaires concernés, à l’exception des organismes complémentaires et des autorités organisatrices de la mobilité, pour lesquels le montant et les modalités de règlement de ces créances sont constatés et fixés par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et de l’agriculture.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 6 prévoit la mise en œuvre de l’unification du recouvrement des cotisations sociales. Il y a quelques mois, mon collègue René-Paul Savary et moi-même avions rendu un rapport d’information sur ce sujet au nom de la commission des affaires sociales intitulé Unification du recouvrement social : un bilan contrasté, des perspectives à sécuriser.

Le sujet peut paraître technique, voire austère, mais ses enjeux sont lourds en termes d’organisation de la protection sociale, de ressources humaines et d’accès au droit pour les assurés.

Le projet d’unification du recouvrement des cotisations sociales remonte à la fondation de la sécurité sociale elle-même. À partir de 1952, les Urssaf se sont progressivement substituées aux caisses primaires de sécurité sociale et aux caisses d’allocations familiales pour assurer la collecte des cotisations du régime général, les autres régimes généraux gérant eux-mêmes le recouvrement de leurs cotisations.

Cette situation induisait une grande complexité pour les cotisants et une relative inefficience de la collecte. Compte tenu de la performance des Urssaf et des prérogatives spécifiques dont elles disposent, notamment leur capacité de diligenter des contrôles sur pièces et sur place, le projet de leur confier le recouvrement de l’ensemble des cotisations et contributions sociales a progressivement émergé.

Mais au-delà de la volonté, il faut des moyens. Notre rapport d’information a montré que l’unification du recouvrement ne peut se faire à moyens constants.

Si l’unification permet de simplifier les droits et d’harmoniser les prestations, il convient selon nous de faire une pause avant de la mettre en œuvre. Il faut en effet prendre le temps de fiabiliser les données individuelles, de mettre en œuvre des conventions préalables entre l’Urssaf et les organismes gestionnaires des réseaux et enfin d’assurer la normalisation des modalités de calcul et de recouvrement des cotisations sociales de tout régime de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 710 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 1026 rectifié est présenté par Mme Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 710.

Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 6 proposé par le Gouvernement prévoit que si un donneur d’ordre n’a fait l’objet d’aucune annulation de réductions ou d’exonérations de cotisations ou de contributions sociales depuis cinq années, son plafond de sanction sera réduit à 15 000 euros pour une personne physique et à 75 000 euros pour une personne morale.

Nous contestons cette disposition, car elle revient à réduire la pénalité de celui qui a fraudé. Nous souhaitons qu’en cas de fraude sociale aux cotisations – la fraude aux cotisations représente 90 % de la fraude sociale –, l’ensemble des donneurs d’ordre soient sanctionnés, non pas par un dispositif à deux vitesses, mais selon le même régime.

Rappelons qu’en France, le coût du travail dissimulé se situe entre 6,8 et 8,4 milliards d’euros par an.

En outre, le recours à la sous-traitance est de plus en plus souvent dévoyé par les employeurs et employeuses pour se soustraire à leurs responsabilités et obligations sociales, juridiques, voire fiscales, avec pour objectif de réduire les coûts de production pour accroître les profits. Souvent, l’objectif est de contourner les statuts sociaux des salariés : recours abusif au temps partiel, précarisation des salariés à travers des clauses de mobilité punitives, conditions d’emploi dégradées et déresponsabilisation des donneurs d’ordre quant aux conditions de travail.

Cet amendement vise donc à supprimer l’alinéa 9, qui permet ce plafonnement des sanctions pour travail dissimulé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1026 rectifié.

Mme Monique Lubin. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 26, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer les mots :

, sauf si le plafond prévu au même premier alinéa est inférieur

par les mots :

si les sommes mentionnées au même premier alinéa sont supérieures

La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les deux amendements identiques en discussion commune.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 26 est rédactionnel.

Les amendements identiques nos 710 et 1026 rectifié tendent à revenir sur le plafonnement à 15 000 euros pour une personne physique et à 75 000 euros pour une personne morale de l’annulation des exonérations ou réductions de cotisations sociales dont bénéficierait le donneur d’ordre ayant manqué à son devoir de vigilance en matière de travail dissimulé pour la première fois sur une période de cinq années.

L’article 6 prévoit le renforcement des sanctions prononcées à l’encontre des donneurs d’ordre fautifs. À l’heure actuelle, le plafond de l’annulation prononcée est en effet fixé pour l’ensemble des donneurs d’ordre fautifs, qu’ils soient récidivistes ou non, à 15 000 euros pour une personne physique et à 75 000 euros pour une personne morale.

Aux termes de l’article 6, ce plafond ne s’appliquerait plus qu’aux donneurs d’ordre commettant leur premier manquement sur une période de cinq années. Les autres ne bénéficieraient plus de ce niveau de plafonnement, mais se verraient infliger une annulation proportionnelle aux sommes mises à leur charge au titre de la solidarité financière à l’égard du cocontractant ayant commis l’infraction de travail dissimulé.

Dans le souci d’intensifier la lutte contre la fraude aux cotisations sociales, j’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Avis défavorable sur les amendements identiques nos 710 et 1026 rectifié, et avis favorable sur l’amendement n° 26.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 710 et 1026 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 786, présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, M. Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 21 à 30

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Le PLFSS pour 2023 prévoit à l’article 6 le transfert précipité du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco vers l’Urssaf.

Alors que dans son rapport d’information du 21 juin 2022, la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) du Sénat préconisait de reporter l’unification du recouvrement, le Gouvernement accélère la mise en œuvre de son projet. Alors que l’ensemble des organisations syndicales et patronales s’opposent au transfert des cotisations des régimes complémentaires de retraite, le Gouvernement n’en tient pas compte.

La tentation est grande pour Bercy de mettre la main sur le pactole de 87 milliards d’euros de cotisations retraite des cadres et de remettre en cause les droits des futurs retraités. Cette nouvelle étape de l’étatisation de la protection sociale en piochant dans les caisses de l’Agirc-Arrco est inacceptable. Pour ces raisons, nous demandons l’arrêt du projet de transfert du recouvrement vers l’Urssaf.

Mme la présidente. L’amendement n° 27, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 26

Après les mots :

au titre de

insérer les mots :

l’emploi de

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défendu !

Mme la présidente. L’amendement n° 546 rectifié bis, présenté par Mmes Gruny et Jacques, M. Cambon, Mmes Di Folco et Gosselin, M. D. Laurent, Mme Dumont, M. J.P. Vogel, Mme Demas, MM. Milon et Daubresse, Mme M. Mercier, MM. B. Fournier, Burgoa et Bacci, Mmes Malet, Lassarade et Thomas, MM. Karoutchi et Charon, Mme Puissat, MM. Genet, Savary, Houpert et Sido, Mmes Belrhiti, Chauvin et Delmont-Koropoulis, MM. Brisson, Somon, Sautarel, Piednoir et Laménie, Mmes Micouleau et Bourrat, MM. Mouiller et Belin, Mme Raimond-Pavero, M. Klinger et Mme Borchio Fontimp, est ainsi libellé :

Alinéa 29, seconde phrase

Après le mot :

demande

insérer les mots

et après que cette faculté lui a été précisée,

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. L’article dispose, en son alinéa 29, que l’agent de l’Urssaf en charge d’un contrôle est tenu d’informer la personne concernée de la teneur et de l’origine des documents qu’il a obtenus et sur lesquels il fonde le contrôle. Sur sa demande, il communique une copie des documents à la personne contrôlée.

Cet amendement vise donc à préciser que le cotisant est réellement informé de la possibilité qu’il a de demander copie de ces documents ou informations.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Apourceau-Poly, j’ai bien entendu vos propos sur l’article, ainsi que la présentation de votre amendement, mais nous débattrons de ce sujet à l’article 6 bis. Ne serait-il donc pas plus judicieux de retirer votre amendement ?

Mme Cathy Apourceau-Poly. Mais il porte sur l’article 6.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est vrai que la procédure est compliquée, mais en l’occurrence, si votre amendement était adopté, cela aurait pour effet de supprimer les autres dispositions de l’article 6. Il serait donc préférable de le retirer.

Quant à l’amendement de Mme Gruny, il vise à ce qu’une entreprise soit informée de la faculté dont elle dispose de demander la communication d’une copie des documents que l’agent chargé d’un contrôle a obtenus auprès d’une entreprise appartenant au même groupe et sur lesquels il fonde ce contrôle.

Bien que les entreprises concernées soient sans doute de taille suffisamment importante pour connaître leurs droits, il n’est pas inutile de les informer de cette possibilité. En effet, vous semblez donner suite à des cas de contrôle par l’Urssaf où le cotisant vous a indiqué ne pas connaître cette disposition. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 27, mais pas sur les amendements nos 546 rectifié bis et 786.

En effet, l’amendement n° 546 rectifié bis vise à préciser dans la loi que la personne contrôlée doit être informée et qu’elle peut se faire communiquer les documents obtenus auprès d’un tiers appartenant au même groupe.

Or, cette obligation existe déjà sous la forme d’une obligation générale d’information des cotisants sur leurs droits. Chaque personne contrôlée est destinataire, dans le mois qui précède le début des opérations de contrôle par l’Urssaf, de la charte du cotisant contrôlé, qui lui présente l’ensemble du déroulement de la procédure de contrôle et précise les droits dont elle peut se prévaloir à chacune des étapes qui composent cette procédure.

Si les garanties données aux cotisants relèvent du niveau de la loi, les précisions sur les modalités d’information concernant les conditions dans lesquelles ces garanties peuvent être exercées ne peuvent évidemment pas toutes figurer à ce niveau de normes.

Votre amendement de précision étant satisfait, j’en demande le retrait, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la rapporteure générale, si je réoriente mon amendement en le faisant porter sur l’article 6 bis, y serez-vous favorable ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mais vous avez déjà déposé un amendement à l’article 6 bis

Mme la présidente. Madame Apourceau-Poly, il ne s’agit pas de rouvrir la discussion avec Mme la rapporteure générale…

Je mets aux voix l’amendement n° 786.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 546 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 711 est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 812 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 35 à 41

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

G. – L’article L. 243-13 est abrogé.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 711.

Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 6 contient une mesure visant à généraliser l’expérimentation de la loi pour un État au service d’une société de confiance, ou loi Essoc, en faveur de contrôles courts pour les entreprises de moins de vingt salariés.

Or les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général doivent être en mesure de bénéficier du temps nécessaire pour effectuer leurs contrôles.

Nous proposons donc d’abroger la limitation de la durée des contrôles dans les entreprises.

La fraude est souvent réduite à la fraude sociale et, au sein de celle-ci, à la fraude aux prestations, qui n’en représente pourtant qu’un dixième – il est toujours intéressant de le rappeler. Cet effet de loupe vise à renforcer le contrôle social.

Ne bénéficiant pas d’une telle attention, la fraude aux cotisations et la fraude fiscale sont incomparablement plus importantes. Alors que l’on chiffre son montant entre 80 et 100 milliards d’euros, la fraude fiscale ne bénéficie pas encore des moyens de contrôle qui permettraient d’en recouvrer une grande partie. Elle ne fait pas l’objet d’une volonté politique comparable à celle qui s’applique en matière de prestations sociales.

Le total des redressements notifiés en 2021 ne s’élève en effet qu’à 13,4 milliards d’euros, ce qui signifie que des milliards d’euros échappent à l’État.

Selon la direction générale des finances publiques, « la lutte contre la fraude fiscale est un enjeu majeur de souveraineté et de redressement des comptes publics et une condition essentielle pour faire respecter le principe d’égalité devant l’impôt ». Dans un contexte d’accroissement des inégalités sociales, le juste contrôle des entreprises est donc primordial.

Cet amendement vise à garantir aux organismes effectuant les contrôles le temps nécessaire pour les mener efficacement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 812.

Mme Laurence Cohen. Le 26 octobre 2022, la commission des finances du Sénat a publié un rapport d’information relatif à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Cette mission d’information devait tirer un premier bilan de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude. Nous regrettons d’ailleurs que la commission des finances du Sénat ait occulté le changement de philosophie du contrôle fiscal engendré par la mise en place de la loi Essoc du 10 août 2018.

Face à la diversité des schémas de fraude et à l’internationalisation de la fraude et de l’évasion fiscales, il est indispensable non seulement d’améliorer les moyens juridiques et législatifs, mais aussi d’obtenir plus de moyens humains et techniques si nous voulons réellement pouvoir lutter efficacement sur le terrain contre ce phénomène.

L’article 6 limite la durée des contrôles dans les entreprises, alors que le montant de la fraude patronale est estimé par la Cour des comptes à près de 25 milliards d’euros. Dès lors que les entreprises n’ont rien à se reprocher, il n’y a pas de raison de limiter la durée des contrôles. La limitation des contrôles à trois mois contribuera à accroître les difficultés pour les inspecteurs de la sécurité sociale, qui n’auront plus le temps nécessaire pour les mener à bien et lutter ainsi contre la fraude sociale et le travail dissimulé.

Mme la présidente. L’amendement n° 542 rectifié ter, présenté par Mmes Gruny et Jacques, M. Cambon, Mmes Di Folco et Gosselin, M. D. Laurent, Mme Dumont, M. J.P. Vogel, Mme Demas, MM. Milon et Daubresse, Mme M. Mercier, MM. B. Fournier, Burgoa et Bacci, Mmes Malet, Lassarade et Thomas, MM. Karoutchi et Charon, Mme Puissat, MM. Genet, Savary, Houpert, Sido, Piednoir, Sautarel, Somon et Brisson, Mmes Delmont-Koropoulis, Chauvin et Belrhiti, M. Laménie, Mmes Micouleau et Bourrat, MM. Mouiller et Belin, Mme Raimond-Pavero, M. Klinger et Mme Borchio Fontimp, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 41

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…. - L’article L 243-13 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Dans les entreprises d’au moins vingt salariés et sous les mêmes restrictions que celles prévues au I, les contrôles prévus à l’article L. 243-7 ne peuvent s’étendre sur une période supérieure à six mois, comprise entre le début effectif du contrôle et la lettre d’observations. »

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. L’objet de cet amendement est de prévoir une durée maximale de la procédure de contrôle de l’Urssaf de six mois pour les entreprises d’au moins 20 salariés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Sur les deux premiers amendements identiques, je voudrais rappeler que l’article 6 tend à rendre applicable cette limite aux entreprises de moins de 20 salariés, en plafonnant à trois mois la durée des contrôles.

Dans le cadre de l’expérimentation menée entre 2018 et 2021, il semble que 38,5 % des contrôles diligentés ont duré moins de trois mois, tandis que les autres ont été prorogés.

De plus, il convient de noter que la limite de durée n’est pas applicable dans certaines situations problématiques, notamment en cas de travail dissimulé, d’obstacles à contrôle ou d’abus de droit.

L’encadrement proposé ne semble donc pas faire obstacle à l’accomplissement de leur mission par les agents chargés du contrôle. Il renforce dans le même temps les droits des cotisants et leur visibilité sur la durée des contrôles. La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 711 et 812.

Quant à l’amendement de Mme Gruny qui vise à limiter à six mois la durée des contrôles de l’Urssaf dans les entreprises d’au moins 20 salariés, je veux rappeler que, en dehors de certaines situations, notamment en cas de travail dissimulé, d’obstacles à contrôle ou d’abus de droit, cette durée est limitée à trois mois renouvelables une fois, à la demande de l’entreprise ou de l’Urssaf. Cette limitation est acceptable pour des entreprises de cette taille, dans la mesure où les contrôles n’y revêtent pas les mêmes enjeux que dans les grandes entreprises.

Il ne paraît pas souhaitable de limiter la durée des contrôles dans les entreprises de plus grande taille, où les sommes en jeu sont beaucoup plus importantes et la complexité des contrôles supérieure. Il s’agit en effet de garantir aux agents des Urssaf, un temps nécessaire à l’accomplissement de leur mission, de leurs contrôles et de leurs vérifications, ce que ne permettrait sans doute pas la fixation d’un délai limite de six mois dans un tel cas.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis que Mme la rapporteure générale sur les trois amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. Je parlerai d’après mon expérience professionnelle. Les contrôles de l’Urssaf – certains l’ont dit –, dans la plupart des cas, ne durent pas forcément très longtemps. Mais, parfois, ils durent longtemps. Le temps passe sans que l’on revoie le contrôleur, alors que l’on a sorti tous les documents nécessaires au contrôle et que l’on ne dispose pas forcément d’un bureau pour les stocker, et les mois passent ainsi. Encore une fois, je vous parle d’une expérience professionnelle que j’ai personnellement vécue. Telle est la raison pour laquelle je souhaite qu’on limite la durée des contrôles. Une période de six mois représente déjà un délai important.

En outre, qu’entendez-vous lorsque vous parlez des « grandes entreprises » ? S’agit-il de celles de 20 à 50 salariés ? C’est précisément celles que vise mon amendement.

Certes, les entreprises de 500 ou 1 000 salariés disposent sans doute de l’espace et du personnel nécessaires pour stocker les documents, mais ce n’est pas le cas de celles de 20 à 50 salariés.

Si les agents des Urssaf n’arrivent pas à faire leur contrôle en six mois, c’est qu’il y a un problème. Peut-être s’agit-il de fraude, à moins qu’il n’y ait une autre raison. Toutefois, en général, il leur suffit normalement de trois mois pour regarder tous les documents. D’autant que si, par le passé, dans les contrôles auxquels j’ai pu assister, les contrôleurs ne disposaient parfois même pas d’un ordinateur – cela ne fait pas si longtemps qu’ils sont équipés d’ordinateurs portables – cela ne les empêchait pas de réaliser très rapidement les calculs de cotisations pour un nombre assez important de salariés.

Voilà pourquoi j’insiste sur la nécessité de cette limite, qui est parfaitement raisonnable.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Roland Lescure, ministre délégué. J’entends ce que vous dites. En effet, une entreprise de plus de 20 salariés peut en compter 21 ou 250, voire 2 500, ce qui n’est pas comparable. Toutefois, en limitant la durée des contrôles de manière automatique pour toutes les entreprises de plus de 20 salariés, on risque paradoxalement que des sanctions plus importantes soient prises dans la précipitation, sans laisser aux entreprises le temps de réagir.

Telle est la raison pour laquelle nous avons souhaité généraliser l’expérimentation et la pérenniser pour les entreprises de moins de 20 salariés, en portant la durée maximale du contrôle à trois mois, tout en conservant le délai actuel pour les autres. Certes, celui-ci peut parfois poser problème, notamment pour les entreprises de taille intermédiaire – j’entends bien votre argument –, mais en le maintenant, nous favorisons une approche plus déterminée, qui correspond à la volonté affichée par le Gouvernement d’accélérer les contrôles et les résolutions, ce qui est en effet indispensable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 711 et 812.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 542 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 28, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 48

Remplacer les mots :

pour lesquels

par le mot :

dont

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 28.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 29, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 54

Après le mot :

fixées

insérer les mots :

par décret en Conseil d’État,

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 29.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 30, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 60

Remplacer les mots :

cotisants de solidarité

par les mots :

personnes redevables de la cotisation de solidarité mentionnée à l’article L. 731-23 du présent code

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 30.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 31, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 63

Remplacer le mot :

rémunérations

par les mots :

revenus d’activité

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 31.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 32, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 66 et alinéa 69, dernière phrase

1° Remplacer les mots :

organismes complémentaires et des

par les mots :

créances à régler aux organismes complémentaires et aux

2° Remplacer les mots :

pour lesquels

par le mot :

dont

3° Supprimer les mots :

de ces créances

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Amendement rédactionnel.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 32.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6, modifié.

(Larticle 6 est adopté.)

Article 6
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article 6 bis (nouveau)

Après l’article 6

Mme la présidente. L’amendement n° 6 rectifié ter, présenté par Mme N. Goulet, M. Henno, Mmes Férat et Guidez, MM. Delahaye et Longeot, Mme Billon, MM. Kern et Lafon, Mme Herzog, MM. Canévet, Détraigne, Levi et Janssens, Mmes Perrot, Mélot et Jacquemet, M. Duffourg et Mme de La Provôté, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 133-5-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 133-5-4-… ainsi rédigé :

« Art. L. 133-5-4-…. – Nonobstant l’article L. 133-5-3 et le code des relations entre le public et l’administration, un employeur est tenu d’accomplir sans délai auprès des administrations et organismes chargés des missions mentionnées au second alinéa du I de l’article L. 133-5-3 du présent code qui en font la demande les formalités déclaratives mentionnées au II du même article L. 133-5-3 lorsqu’il existe des présomptions graves et concordantes qu’il a contrevenu, contrevient ou va contrevenir à ses obligations à l’égard de ces administrations ou organismes ou à l’égard de ses salariés.

« L’existence de présomptions graves et concordantes est notamment considérée comme établie lorsque l’employeur dirige ou dirigeait une personne morale réunissant au moins trois des conditions suivantes :

« 1° Elle a été créée depuis moins de douze mois ;

« 2° Elle a mis fin à son activité moins de six mois après sa création ;

« 3° Elle utilise ou utilisait les services d’une entreprise de domiciliation au sens de l’article L. 123-11-2 du code de commerce ;

« 4° Son siège est ou était situé hors d’un État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen ;

« 5° Elle comptait plus de dix associés ou salariés dès le premier mois suivant sa création ou plus de vingt dès le deuxième mois.

« En cas de retard injustifié dans l’accomplissement d’une formalité déclarative relevant du premier alinéa du présent article, d’omission de données devant y figurer, d’inexactitude des données déclarées ou d’absence de correction dans le cas prévu au deuxième alinéa de l’article L. 133-5-3-1 du présent code, il est fait application des deux derniers alinéas de l’article L. 133-5-4 du même code. »

La parole est à M. Olivier Henno.

M. Olivier Henno. Il s’agit d’un amendement présenté par Nathalie Goulet, qui a co-écrit un rapport avec la députée Carole Grandjean sur la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, où elle montre que les entreprises éphémères sont souvent à la source de la fraude sociale. Cet amendement vise donc à donner les moyens de traquer cette fraude.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’avis est favorable sur cet amendement qui vise à contraindre les employeurs qui dirigent ou qui ont dirigé une entreprise éphémère à procéder sans délai à la transmission d’une déclaration sociale nominative aux administrations et organismes collecteurs des cotisations et contributions sociales qui en font la demande.

En effet, il s’agit d’éviter le non-versement des cotisations et contributions sociales dues par ces employeurs lorsqu’il existe des présomptions graves et concordantes qu’ils ont contrevenu, qu’ils contreviennent ou qu’ils contreviendront à leurs obligations à l’égard de ces administrations et organismes, ou bien à l’encontre de leurs salariés. Je souscris bien évidemment à cet objectif. Le Sénat a d’ailleurs adopté cette disposition l’an dernier dans le cadre de la proposition de loi tendant à appliquer vingt-quatre mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales. Chacun connaît, ici, le travail intransigeant de notre collègue Nathalie Goulet sur le sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. C’est un avis défavorable, non pas que nous nous opposions à votre objectif de lutte contre la fraude, mais parce que nous contestons les indicateurs que vous proposez. Le dispositif n’apparaît en effet pas suffisamment opérant pour prévenir les fraudes liées aux entreprises éphémères. Aucun des indices prévus ne constitue en réalité un critère fiable, à lui seul, pour présumer de la fraude, surtout si l’on n’en retient que trois sur cinq.

La problématique du repérage des sociétés dites « éphémères » est bien prise en compte par le Gouvernement qui, précisément, a souhaité faciliter les contrôles par une identification précoce des sociétés potentiellement frauduleuses. Pour gagner en efficacité, l’article 41 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit que les greffiers des tribunaux de commerce pourront transmettre des informations aux agents des organismes de protection sociale ou aux agents de l’État qui sont compétents en matière de fraude sociale.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 6 rectifié ter.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6.

Article additionnel après l'article 6 - Amendement n° 6 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 6 bis - Amendement n° 545 rectifié bis

Article 6 bis (nouveau)

I. – Le I de l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 6° est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , ainsi que le recouvrement des cotisations et contributions sociales des salariés expatriés qui relèvent du champ d’application des accords mentionnés à l’article L. 921-4 du présent code. Les organismes de recouvrement sont également subrogés dans les droits et obligations des organismes mentionnés aux articles L. 922-1 et L. 922-4 pour le recouvrement de cotisations et contributions réalisé par ces derniers en application d’une convention à la date du transfert ; »

2° Le 8° est ainsi rédigé :

« 8° La vérification de l’exhaustivité, de la conformité et de la cohérence des informations déclarées par les employeurs ainsi que la correction, dans les conditions prévues à l’article L. 133-5-3-1 du présent code, des erreurs ou anomalies susceptibles d’affecter les montants des cotisations, versements et contributions mentionnés au présent I ainsi que le contrôle des mêmes montants, sauf lorsque celui-ci est confié par la loi à un autre organisme. Dans des conditions prévues par décret, une convention conclue par l’organisme mentionné à l’article L. 225-1 avec les organismes pour le compte desquels ces cotisations et contributions sont recouvrées peut prévoir les modalités de contribution de ces organismes à ces opérations de vérification ; ».

II. – À la première phrase du 7° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, après la référence : « XII », sont insérés les mots : « , à l’exception de celle prévue au c du 4°, ».

III. – A. – Par dérogation aux 2° et 3° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, les 6°, 13°, 14° et 15° ainsi que les b et d du 16° du II du même article 18, en tant qu’ils concernent les cotisations et contributions dues aux organismes mentionnés aux articles L. 922-1 et L. 922-4 du code de la sécurité sociale, sont applicables au recouvrement des cotisations et contributions dues au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2024. Ces organismes demeurent, après cette date, pleinement compétents pour enregistrer les droits à la retraite complémentaire acquis par leurs assurées et pour leur verser les prestations.

B. – Par dérogation au c du 4° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 précitée, le 6° du II du même article 18 est applicable au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er janvier 2025 en tant qu’il concerne les cotisations d’assurance vieillesse des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, les cotisations d’assurance vieillesse des agents non titulaires de la fonction publique, les cotisations de retraite additionnelle des agents de la fonction publique et les contributions mentionnées à l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique.

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 172 rectifié sexies est présenté par MM. Milon et Retailleau, Mmes Lassarade, Gruny et Delmont-Koropoulis, MM. Genet et Karoutchi, Mmes Deseyne, L. Darcos et Lavarde, MM. Bascher, Sol, Daubresse et Somon, Mmes Noël et Puissat, M. Hugonet, Mme Malet, MM. Panunzi, Cadec, Cardoux, Brisson, Bonne, Sautarel, Frassa, Piednoir, Perrin et Rietmann, Mme Richer, MM. Allizard, Chaize et B. Fournier, Mmes Imbert, Dumas, Jacques, M. Mercier et Muller-Bronn, M. Laménie, Mmes Micouleau et Estrosi Sassone, MM. Bazin, Bouchet, Burgoa, Reichardt et Lefèvre, Mmes Bourrat et N. Goulet, M. Belin, Mme Belrhiti, M. Rapin, Mmes F. Gerbaud et Raimond-Pavero, M. C. Vial, Mme Lopez, M. Sido, Mme Joseph, MM. Calvet, Klinger et Pellevat, Mme Procaccia, MM. J.B. Blanc et Chatillon, Mmes Borchio Fontimp, Chauvin et Eustache-Brinio, MM. Babary et Bouloux, Mmes Schalck et Thomas, MM. Mouiller et Gremillet et Mme Garnier.

L’amendement n° 205 rectifié est présenté par MM. Henno et Vanlerenberghe, Mmes Guidez, Sollogoub, Jacquemet et Devésa, MM. Duffourg, Janssens et les membres du groupe Union Centriste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 8° du I de l’article L. 213-1 est ainsi rédigé :

« 8° La vérification de l’exhaustivité, de la conformité et de la cohérence des informations déclarées par les employeurs ainsi que la correction, dans les conditions prévues à l’article L. 133-5-3-1 du présent code, des erreurs ou anomalies susceptibles d’affecter les montants des cotisations, versements et contributions mentionnés au présent I ainsi que le contrôle des mêmes montants, sauf lorsque celui-ci est confié par la loi à un autre organisme. Dans des conditions prévues par décret, une convention conclue par l’organisme mentionné à l’article L. 225-1 avec les organismes pour le compte desquels ces cotisations et contributions sont recouvrées peut prévoir les modalités de contribution de ces organismes à ces opérations de vérification ; »

2° Après le premier alinéa de l’article L. 213-1-1, sont insérés six alinéas ainsi rédigés :

« … ° Des cotisations dues aux organismes mentionnés aux articles L. 922-1 et L. 922-4 du code de la sécurité sociale ;

« … ° Des cotisations dues à la caisse mentionnée à l’article 3 de l’ordonnance n° 45-993 du 17 mai 1945 relative aux services publics des départements et communes et de leurs établissements publics ;

« … ° Des cotisations dues à l’institution mentionnée à l’article L. 921-2-1 du code de la sécurité sociale ;

« … ° Des cotisations mentionnées à l’article 76 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites ;

« … ° Des contributions mentionnées à l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique ;

« … ° Des cotisations mentionnées à l’article L. 382-17 du code de la sécurité sociale ; ».

II. – Au c du 4° du XII de l’article 18 de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, les mots : « aux cotisations d’assurance vieillesse des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, aux cotisations d’assurance vieillesse des agents non titulaires de la fonction publique, aux cotisations de retraite additionnelle des agents de la fonction publique, aux contributions mentionnées à l’article 14 de la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 relative à l’organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique, » et les mots : « et à celles mentionnées à l’article L. 382-17 du code de la sécurité sociale » sont supprimés.

La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 172 rectifié sexies.

M. Alain Milon. Cet amendement concerne vingt millions de nos concitoyens.

Initialement prévu pour 2022, le transfert aux Urssaf de l’activité de recouvrement de l’Agirc-Arrco a été reporté à 2023 du fait de la crise sanitaire. Sans doute conscient des risques que présente ce projet pour les droits à retraite complémentaire de vingt millions de salariés, le Gouvernement propose désormais de le reporter d’une année supplémentaire.

De fait, les Urssaf ne sont pas en mesure d’assurer, comme le fait l’Agirc-Arrco, la fiabilisation des déclarations des employeurs, salarié par salarié, ce qui se révèle particulièrement problématique dans le cadre d’un régime par points comme l’Agirc-Arrco, où le premier euro cotisé ouvre autant de droits que le dernier.

Par ailleurs, l’unification du recouvrement social ne se justifie plus, dès lors que le projet d’instauration d’un système universel de retraites géré par une caisse unique a été abandonné par le Gouvernement.

Cet amendement vise donc à annuler le transfert aux Urssaf de l’activité de recouvrement de l’Agirc-Arrco au titre des cotisations de retraite complémentaire, ainsi que des cotisations des salariés expatriés et de la cotisation à l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) ; de celle de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) au titre des cotisations dues à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), à l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques (Ircantec), au régime additionnel de la fonction publique (RAFP) et au Fonds pour l’emploi hospitalier (FEH) ; et de celle de la Caisse d’assurance vieillesse invalidité et maladie des cultes (Cavimac).

Seul le transfert de la collecte des cotisations dues au régime des clercs et employés de notaires serait maintenu au 1er janvier 2023, compte tenu de la volonté de la caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) de confier cette responsabilité aux Urssaf.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 205 rectifié.

M. Olivier Henno. Cet amendement a été fort bien défendu par Alain Milon. Sans revenir sur l’argumentation, je veux seulement confirmer que si ce transfert pouvait se justifier dans le cadre d’une réforme des retraites systémique par points, à partir du moment où cela n’est plus d’actualité, il n’a plus lieu d’être. D’autant que la gestion de l’Agirc-Arrco est bonne et que la collecte des cotisations se fait très correctement.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 787 rectifié est présenté par Mmes Cohen et Apourceau-Poly, M. Lahellec et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 1031 rectifié est présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 213-1-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Des cotisations dues aux institutions de retraite complémentaire mentionnées à l’article L. 921-4 du présent code. »

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour défendre l’amendement n° 787 rectifié.

Mme Laurence Cohen. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 1031 rectifié.

Mme Monique Lubin. Défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’ai bien entendu les arguments portés par nos collègues. Comme vous le savez, la commission des affaires sociales n’est pas revenue sur le report à 2024 de la mise en œuvre du transfert de l’activité de recouvrement de l’Agirc-Arrco. Toutefois, j’envisage comme vous tous les obstacles qu’il reste à franchir, dont certains semblent très importants.

J’émets donc un avis de sagesse, sachant que vous portez, les uns et les autres, ces amendements de manière quasiment unanime.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. C’est un avis défavorable, qui est aussi d’étonnement, puisque dans cet article nous avons suivi les recommandations de la commission. Nous sommes des gens pragmatiques et raisonnables, et nous lisons les rapports du Sénat, qui sont le produit d’un travail conjoint des deux côtés de l’hémicycle.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Vous ne les lisez que quand cela vous intéresse !

M. Roland Lescure, ministre délégué. Ainsi, le rapport d’information du sénateur Savary et de la sénatrice Apourceau-Poly préconisait de reporter le transfert du recouvrement de l’Agirc-Arrco vers l’Urssaf à 2024, ce que nous avons fait par le biais d’un amendement défendu à l’Assemblée nationale. Nous avons donc suivi les recommandations du Sénat.

Il s’agit aussi – c’est important – d’une demande des organisations syndicales et professionnelles : elles ont écrit en ce sens à Bercy l’été dernier et nous les avons réunies dès la rentrée pour échanger sur les avancées du projet. (M. Alain Milon le conteste.)

Il n’est en aucun cas question de faire converger les régimes ni même leur gestion administrative ou financière, mais bien de transférer la collecte des cotisations au niveau de l’Urssaf.

Mme Monique Lubin. C’est ce que vous dites maintenant…

M. Roland Lescure, ministre délégué. Cela a déjà été fait pour un certain nombre d’autres systèmes, avec succès, comme vous le savez.

Ainsi, le bilan du transfert de l’Unédic, intervenu en 2011, est plutôt positif et le taux de recouvrement est jugé satisfaisant. Idem pour le régime social des indépendants (RSI) qui, grâce à l’unification du recouvrement passé à la charge de l’Urssaf, a pu rétablir un haut niveau de qualité de service, ou encore pour la caisse nationale des industries électriques et gazières (Cnieg), qui n’était initialement pas demandeuse d’un transfert, puisque son taux de recouvrement des cotisations oscillait entre 99,7 % et 99,8 %. Tous ces organismes déclarent très clairement que le transfert du recouvrement aux Urssaf s’est opéré dans d’excellentes conditions.

Vous disiez que la mesure concernerait des millions de Français. Certes, et elle permettra de réduire l’écart des taux de recouvrement de l’Agirc-Arrco – 98 % – et des Urssaf – 99 %. Une différence de 1 point, ce n’est sans doute pas grand-chose, mais quand on parle d’un montant total de cotisations sociales de 87 milliards d’euros, cela représente près de 1 milliard d’euros, qui renfloueront encore un peu plus les caisses de l’Agirc-Arrco.

Je vous engage donc à rejeter cet amendement. Je crains de ne pas être entendu, d’après les propos qui ont été tenus à gauche et à droite de l’hémicycle. Toutefois, je vous conjure de le faire, car il y va de l’efficacité de la collecte. En outre, nous avons accordé l’année de décalage que demandaient les députés et que préconisaient les sénateurs, auteurs du rapport d’information que j’ai cité, dans le cadre d’un amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. J’ai bien entendu ce qu’a dit M. le ministre, mais il se trouve que, René-Paul Savary et moi-même avons organisé des réunions de travail auxquelles ont participé les organisations professionnelles qui gèrent l’Agirc-Arrco. Or nous n’avons pas entendu le même message de leur part.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Merci, monsieur le ministre, de faire allusion à un rapport fort intéressant que vous avez lu avec non moins d’intérêt.

Nous avons suivi la question de très près. Pour en faire l’historique, au départ – souvenez-vous, c’était il y a quelques années –, le projet était celui d’un recouvrement universel des cotisations sociales et fiscales. Puis, l’on s’est rendu compte que la machine risquait d’être un peu lourde et complexe et l’on a décidé de séparer le recouvrement fiscal, d’un côté, et le recouvrement social, de l’autre.

Ensuite, quand a été envisagée l’universalité du recouvrement social, on en a tout de suite exclu la Mutualité sociale agricole (MSA), car c’est un régime concentré et décentralisé qui offre tous les services d’un guichet unique. Donc, il n’y a pas eu de recouvrement social universel.

Enfin, la réforme des retraites systémique qui pouvait justifier le transfert du recouvrement a été annulée, ce qui laisse à penser que ce transfert n’est pas forcément utile, puisque la collecte est déjà bien gérée par l’Agirc-Arrco.

Monsieur le ministre, comment avez-vous réussi en si peu de temps à vous mettre à dos autant de personnes ? (Sourires.) Nous avons organisé des auditions avec les partenaires sociaux durant toutes ces années. Ils avaient initialement une relative confiance dans ce transfert, mais au fil du temps, plus le projet avançait et plus ils donnaient de garanties, plus le dispositif s’est révélé défaillant, notamment en ce qui concerne la fiabilisation des données nominatives. Par conséquent, les partenaires sociaux que nous avons auditionnés – Alain Milon était présent – se disent désormais tout à fait rétifs au transfert de recouvrement.

Quand on veut faire une réforme des retraites qui se fonde sur les partenaires sociaux – c’est du moins ce que nous voulions, comme je l’ai encore redit dans la discussion générale –, il faut leur faire confiance et reconnaître qu’ils savent prendre des décisions quand il le faut, sans doute plus facilement parfois que les politiques. Il faut leur donner ce gage de confiance, monsieur le ministre, sinon vous n’arriverez à rien. C’est la raison pour laquelle je comprends que mes collègues présentent ce type d’amendements. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 172 rectifié sexies et 205 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que la commission s’en remet à la sagesse du Sénat et que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 32 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 330
Pour l’adoption 302
Contre 28

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 6 bis est ainsi rédigé et les amendements nos 787 rectifié, 1031 rectifié, 713 et 252 rectifié n’ont plus d’objet.

Article 6 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article 7

Après l’article 6 bis

Mme la présidente. L’amendement n° 545 rectifié bis, présenté par Mmes Gruny et Jacques, M. Cambon, Mmes Di Folco et Gosselin, M. D. Laurent, Mme Dumont, M. J.P. Vogel, Mme Demas, MM. Milon et Daubresse, Mme M. Mercier, MM. B. Fournier, Burgoa et Bacci, Mmes Malet, Lassarade et Thomas, MM. Karoutchi et Charon, Mme Puissat, MM. Genet, Savary, Houpert et Sido, Mmes Belrhiti, Chauvin et Delmont-Koropoulis, MM. Brisson, Somon, Sautarel, Piednoir et Laménie, Mmes Micouleau et Bourrat, MM. Mouiller et Belin, Mme Raimond-Pavero, M. Klinger et Mme Borchio Fontimp, est ainsi libellé :

Après l’article 6 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article L. 243-7-1 A du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le cotisant est informé de cette possibilité. »

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. L’article L. 243-7-1 A du code de la sécurité sociale dispose qu’à l’issue d’un contrôle de l’Urssaf, l’agent chargé du contrôle adresse à la personne contrôlée une lettre mentionnant, s’il y a lieu, les observations constatées au cours du contrôle et engageant la période contradictoire préalable à l’envoi d’une mise en demeure ou d’un avertissement. La durée de la période contradictoire peut être prolongée sur demande du cotisant, reçue par l’organisme avant l’expiration du délai initial, sauf exceptions énumérées dans le code.

Pour répondre aux observations de l’organisme de recouvrement, le cotisant dispose de trente jours, éventuellement renouvelables une fois, s’il le demande. Or, il vient d’être jugé qu’« aucune disposition légale ne contraint l’Urssaf à mentionner dans la lettre d’observations la possibilité pour la personne contrôlée de solliciter un délai complémentaire pour répondre auxdites observations ». Il est donc souhaitable que le cotisant soit informé de cette possibilité de renouvellement des trente jours.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Il est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 545 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6 bis.

Article additionnel après l'article 6 bis - Amendement n° 545 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 534 rectifié et n° 971

Article 7

À la fin du 4°du III de l’article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019, l’année : « 2023 » est remplacée par l’année : « 2026 ».

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 1038 rectifié, présenté par MM. Michau et Tissot, Mmes G. Jourda et Lubin, MM. Pla, Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel, P. Joly, Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Préville, M. Sueur, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le 4° du III de l’article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.

II. – L’article 16 de loi n° 2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021 est abrogé.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de la pérennisation de l’exonération définie à l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime au-delà de 2023 est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Jean-Jacques Michau.

M. Jean-Jacques Michau. Cet amendement a pour objet de pérenniser le système spécifique d’exonération de cotisations et de contributions sociales patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi du secteur agricole.

Pour rappel, ce dispositif est intéressant, car il permet aux employeurs qui embauchent des travailleurs saisonniers de bénéficier d’une exonération totale des cotisations patronales, pour les rémunérations inférieures ou égales à 1,2 Smic, et d’une exonération dégressive au-delà de ce seuil pour devenir nulle à hauteur de 1,6 Smic. Il permet chaque année la conclusion de plus de 900 000 contrats avec un montant de cotisations réduit.

Chaque année, à l’occasion du PLFSS, le Sénat prolonge ce dispositif. Et chaque année, nous discutons de l’opportunité de le pérenniser.

Cette année ne fait pas exception, puisqu’après avoir envisagé, au début de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale, de le maintenir jusqu’à la fin de l’année 2023, il est proposé, au terme de ce même examen, de le prolonger jusqu’en 2026. Plutôt que de débattre tous les ans de ce dispositif, ce qui cultive l’incertitude à l’égard de ce dernier, cet amendement vise donc à le pérenniser.

Mme la présidente. Les cinq amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 455 rectifié ter est présenté par MM. Menonville et Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Decool et Guerriau, Mme Paoli-Gagin et MM. A. Marc, Capus, Grand et Malhuret.

L’amendement n° 565 rectifié est présenté par M. Cabanel, Mme Guillotin, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

L’amendement n° 968 est présenté par M. Duplomb, Mme Férat et M. Tissot.

L’amendement n° 988 est présenté par MM. Henno et Vanlerenberghe, Mmes Guidez et Sollogoub, MM. Janssens et Duffourg, Mmes Devésa, Jacquemet et les membres du groupe Union Centriste.

L’amendement n° 1112 rectifié est présenté par MM. J.M. Boyer et Retailleau, Mme Chauvin, M. Karoutchi, Mme Puissat, M. Bas, Mmes Gruny et Noël, M. J.P. Vogel, Mme Estrosi Sassone, M. Bascher, Mme Garnier, M. B. Fournier, Mme Muller-Bronn, MM. Bouchet et Bacci, Mmes Dumont, Schalck et Thomas, MM. Calvet, Bazin et Genet, Mme Pluchet, MM. Burgoa et Savary, Mme Eustache-Brinio, M. Brisson, Mmes Petrus et Joseph, MM. Allizard, Houpert et Savin, Mmes Delmont-Koropoulis et Belrhiti, M. Frassa, Mmes Dumas, Demas et Micouleau, M. C. Vial, Mme Imbert, MM. Piednoir, Lefèvre, H. Leroy et Rapin, Mmes Bonfanti-Dossat, Drexler et Lassarade, M. Sautarel, Mmes Lopez et Raimond-Pavero, MM. Babary et Paul, Mme Borchio Fontimp, MM. Chevrollier, Saury, Cadec, Mouiller, Bouloux, Anglars et Chatillon, Mme Bourrat et M. Gremillet.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le 4° du III de l’article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 455 rectifié ter.

M. Daniel Chasseing. Comme expliqué à l’instant, l’objet de cet amendement est de pérenniser le système spécifique d’exonération de cotisations et de contributions sociales patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi du secteur agricole.

Selon mon collègue Franck Menonville, au nom duquel je présente cet amendement, un dumping social des concurrents européens de notre pays, notamment l’Espagne, l’Italie ou l’Allemagne, existe dans les filières de la viticulture, de l’arboriculture, du maraîchage, de l’horticulture, des pépinières viticoles et des semences. Or le dispositif permet chaque année la conclusion de 900 000 contrats.

Ainsi, pour continuer à produire en France, avec des standards sociaux élevés, l’agriculture a besoin d’être soutenue face à la concurrence de pays aux choix sociaux et sociétaux différents.

La prolongation du dispositif de soutien aux agriculteurs est donc tout à fait nécessaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 565 rectifié.

Mme Véronique Guillotin. L’amendement est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 968 n’est pas soutenu.

La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 988.

M. Olivier Henno. Défendu, madame la présidente !

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour présenter l’amendement n° 1112 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je ressens une certaine effervescence. Comme ce sujet est débattu chaque année, chacun s’est mobilisé au travers de ces amendements.

Bien que j’y sois sur le fond favorable – ne vous inquiétez pas –, je demande à M. Michau de retirer son amendement au profit des suivants.

Lors de l’examen de ce projet de loi, la commission s’en est tenue à la prolongation de trois ans du dispositif, dans un souci de cohérence avec le principe de bornage dans le temps des niches sociales qu’elle a soutenu dans le cadre des débats sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027.

Toutefois, il est également cohérent de soutenir cette exception, que la commission a déjà proposée – j’avais défendu ici même, l’an dernier, la pérennisation du dispositif – et qui offre une réponse structurelle à une réalité économique connue de tous, dans le secteur agricole comme dans l’emploi saisonnier en général.

La commission émet donc un avis favorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Je préférerais conserver l’équilibre trouvé à l’Assemblée nationale.

Comme le sénateur Michau l’a rappelé, le Gouvernement avait d’abord soumis à l’Assemblée nationale une prolongation d’un an, portée ensuite à trois ans par un amendement du groupe Les Républicains.

Nous avons beaucoup aidé le secteur – et nous en sommes fiers – avec, depuis 2021, 1 milliard d’euros versés au titre du plan gel, auquel s’ajoutent le plan grêle, le plan sécheresse, le plan de résilience économique et sociale, les mesures en faveur de la pêche, celles décidées pour résorber la crise du porc ou du sucre à La Réunion, celles en faveur de la lavande ou celles destinées à lutter contre la grippe aviaire avec jusqu’à 1 milliard d’euros d’aides en 2022.

Cette liste montre combien nos agriculteurs ont eu à affronter des crises et des intempéries extrêmement défavorables à leur activité depuis maintenant deux ans. Nous finançons aussi le chômage partiel, le fonds de solidarité, les reports et exonérations de cotisations sociales durant la crise de la covid-19…

Afin de respecter de surcroît le principe adopté par le Sénat d’un bornage à trois ans des niches sociales, voté lors de l’examen de l’article 20 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, je préférerais que nous en restions à cet équilibre.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Monsieur Michau, l’amendement n° 1038 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Jacques Michau. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 1038 rectifié est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 455 rectifié ter, 565 rectifié, 988 et 1112 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 7 est ainsi rédigé.

Article 7
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 197 rectifié quater, n° 223 rectifié ter et n° 1121 rectifié bis

Après l’article 7

Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 534 rectifié est présenté par Mmes Loisier et Guidez, MM. Delahaye et P. Martin, Mmes Létard, Dindar et Saint-Pé, MM. Bonnecarrère et Delcros, Mme de La Provôté et MM. Levi et Janssens.

L’amendement n° 971 est présenté par M. Duplomb et Mme Férat.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le troisième alinéa du I de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Après la référence : « 1°, », est insérée la référence : « 2°, » ;

2° Les mots : « , à l’exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés.

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 534 rectifié.

Mme Jocelyne Guidez. Le PLFSS pour 2023 adopté en première lecture à l’Assemblée nationale prévoit une nouvelle prolongation du dispositif d’exonérations patronales pour l’emploi de travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi jusqu’au 1er janvier 2026.

Les entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf) en sont toutefois exclues, ce que cet amendement présenté par Mme Loisier vise à corriger.

Ces entreprises sont confrontées à une augmentation importante de leurs coûts d’exploitation, notamment en raison des contraintes environnementales grandissantes. Dans ce contexte tendu, elles rencontrent des difficultés et peinent à recruter.

Ces entreprises qui entretiennent les espaces ruraux, dont les forêts, constituent aujourd’hui un maillon fragile et particulièrement vulnérable qui, s’il faisait défaut, pourrait provoquer des ruptures d’approvisionnement jusque dans les industries de transformation.

La fin des exonérations patronales en faveur de l’emploi de travailleurs saisonniers pour les Etarf avait pour objectif de favoriser l’embauche de salariés en CDI, dans la mesure où l’activité diversifiée de ces entreprises, auprès d’exploitants agricoles, de particuliers, de collectivités territoriales ou d’entreprises privées justifiait plutôt le recours à des salariés permanents.

Toutes les entreprises de cette catégorie n’ont pas une activité diversifiée, puisqu’elle englobe également de simples entreprises de travaux forestiers à l’activité discontinue. Ces dernières sont soumises à la météo, mais aussi à des contraintes réglementaires telles que l’arrêté relatif aux règles de bonnes conditions agricoles et environnementales, l’arrêté « nidification », qui restreint les périodes durant lesquelles les travaux forestiers sont autorisés.

Par ailleurs, aucune aide particulière, pas même le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), n’est venue soutenir les très petites entreprises de travaux forestiers.

Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 534 rectifié et n° 971
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 349 rectifié, n° 456 rectifié quater et n° 649 rectifié

Mme la présidente. L’amendement n° 971 n’est pas soutenu.

Les quatre amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 159 rectifié bis est présenté par Mme Billon, MM. L. Hervé, Duffourg, Louault, Bonneau et Kern, Mmes N. Goulet et Gacquerre, MM. Moga, Delcros et Levi, Mme Morin-Desailly et MM. Janssens, Lafon et Hingray.

L’amendement n° 197 rectifié quater est présenté par MM. Verzelen, Guerriau, Wattebled, Médevielle, Grand et Chasseing, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Decool et Capus et Mme Paoli-Gagin.

L’amendement n° 223 rectifié ter est présenté par MM. Le Nay, Capo-Canellas, Chauvet, Cigolotti, Détraigne et Henno, Mme Jacquemet, M. P. Martin et Mme Saint-Pé.

L’amendement n° 1121 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet et D. Laurent, Mmes Lassarade et Jacques, M. Sautarel, Mme Richer, MM. Sido, Bouchet, Bacci et Cambon, Mmes Malet, Dumont, Schalck et Thomas, MM. Calvet, Karoutchi, Burgoa, Genet, Bonnus et Bazin, Mme Puissat, MM. Brisson, Perrin et Rietmann, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Procaccia, Joseph, Belrhiti et Chauvin, M. Rapin, Mmes Demas et Gruny, M. Somon, Mmes Dumas et Drexler, M. Piednoir, Mmes Micouleau et Bourrat, MM. Mouiller et Saury, Mme Ventalon, MM. Darnaud et Klinger, Mmes Canayer et Raimond-Pavero et M. Tabarot.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au troisième alinéa du I de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « 3°, à l’exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, », sont remplacés par la référence : « 2° ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

V. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

L’amendement n° 159 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 197 rectifié quater.

M. Daniel Chasseing. L’embauche d’un salarié occasionnel ouvre droit à une exonération des cotisations et des contributions sociales à la charge de l’employeur dont le champ est aligné sur celui de la réduction générale.

Ce dispositif devait être supprimé en 2021, mais il va perdurer. Depuis plusieurs années, il est limité aux agriculteurs employeurs de main-d’œuvre.

Cet amendement vise à revenir à une version antérieure du dispositif permettant d’inclure, à coût constant pour les comptes publics, les 20 000 employeurs de main-d’œuvre des secteurs des travaux agricoles et du paysage dans le champ de cette exonération.

Exclues de la loi de finances pour 2015, ces entreprises bénéficieraient ainsi d’un coup de pouce fiscal estimé à 30 millions d’euros, un montant peu élevé pour les finances de l’État, mais extrêmement important au regard de la situation de ce secteur. Comme beaucoup d’autres, après avoir souffert des conséquences économiques de la crise sanitaire, il connaît de nouveau des difficultés liées aux pénuries et hausses des prix actuelles.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 223 rectifié ter.

M. Olivier Henno. Défendu, madame la présidente !

Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l’amendement n° 1121 rectifié bis.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission a demandé la pérennisation du dispositif travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi (TO-DE) ; en revanche, elle s’est toujours opposée à l’élargissement du périmètre de cette niche sociale.

La commission émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Je rappellerai aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous avez voté, lors de l’examen de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, en faveur d’une évaluation de ces niches fiscales et sociales une fois tous les trois ans. Cette évaluation, qui est une mission commune de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale des affaires sociales, est lancée.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements et sur les suivants, qui visent à amender le dispositif TO-DE ainsi qu’à en élargir le champ.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 534 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 197 rectifié quater, 223 rectifié ter et 1121 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 197 rectifié quater, n° 223 rectifié ter et n° 1121 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 989 et n° 1041 rectifié

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 349 rectifié est présenté par MM. S. Demilly, Gremillet, Chauvet et Klinger, Mme Jacquemet, M. Capo-Canellas, Mme Perrot, MM. Laménie, Hingray et Détraigne, Mme Jacques, MM. Kern et Sautarel, Mme Dumas, MM. Guerriau et Janssens, Mme Morin-Desailly, MM. Levi, Wattebled et Decool, Mme Vermeillet, MM. Le Nay et Henno, Mmes Dumont et N. Goulet et M. Joyandet.

L’amendement n° 456 rectifié quater est présenté par MM. Menonville et Chasseing, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Capus, Grand et Malhuret.

L’amendement n° 649 rectifié est présenté par Mme Schillinger, MM. Iacovelli et Dagbert, Mme Havet et MM. Haye, Buis et Rambaud.

L’amendement n° 969 est présenté par M. Duplomb, Mme Férat et M. Tissot.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au cinquième alinéa du I de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 25 % ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour présenter l’amendement n° 349 rectifié.

Mme Annick Jacquemet. Cet amendement présenté par mon collègue Stéphane Demilly a pour objet d’améliorer le système spécifique d’exonération de cotisations et de contributions sociales patronales pour l’embauche de travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi du secteur agricole, en passant d’un seuil de dégressivité de 1,2 à 1,25 Smic, ce qui permettrait de mieux prendre en compte la réalité des rémunérations des salariés concernés.

Dans un contexte de dumping social des concurrents européens de notre pays, notamment l’Espagne, l’Italie ou l’Allemagne, dans les filières de la viticulture, de l’arboriculture, du maraîchage, de l’horticulture, des pépinières viticoles, des semences et de la polyculture, le dispositif permet, chaque année, la conclusion de plus de 900 000 contrats avec un poids des charges réduit.

Ainsi, pour continuer à produire en France avec des standards sociaux élevés, l’agriculture a besoin d’être soutenue face à la concurrence de pays aux choix sociaux et sociétaux différents.

De plus, les incertitudes sur l’évolution du coût du travail et sur l’environnement social et fiscal empêchent les entreprises agricoles d’avoir une vision à long terme, ce qui freine leur production et limite leurs investissements.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 456 rectifié quater.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 649 rectifié.

M. Xavier Iacovelli. Défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 969 n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Dans le prolongement de mes propos précédents, je précise qu’il ne s’agit pas de pousser toujours plus loin le curseur du seuil d’exonération complète, en l’occurrence à 1,25 Smic.

Le Smic ayant augmenté de plus de 8 % cette année, il en est de même des seuils de TO-DE, qui concernent donc une proportion plus importante de saisonniers.

Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Mérillou, pour explication de vote.

M. Serge Mérillou. Je ne suis pas un « accro » des exonérations de charges, mais nous sommes bien obligés de constater l’échec patent de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite Égalim 1, et de la loi visant à protéger la rémunération des agriculteurs, dite Égalim 2, qui devaient engendrer des revenus supplémentaires pour les agriculteurs et qui auraient évité d’avoir recours à ce type d’exonérations pour les aider à faire face aux difficultés.

L’agriculture n’est comparable ni au secteur pétrolier ni au transport maritime. Les revenus y sont excessivement bas et, sans ces exonérations de charges, beaucoup d’agriculteurs mettraient la clé sous la porte.

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je suivrai l’avis de la commission, mais je souhaite attirer l’attention de M. le ministre, notamment sur les travaux forestiers.

La COP27 vient de s’ouvrir et les difficultés environnementales sont bien visibles. La forêt est l’endroit favorisant le plus les échanges d’oxygène et de gaz carbonique. Le Gouvernement mise sur elle, puisque le Président de la République a déclaré vouloir planter des milliards d’arbres…

M. Roland Lescure, ministre délégué. Un milliard !

M. René-Paul Savary. C’est un début ! (Sourires.) Il a donc pris conscience de sa valeur inestimable.

Qui rencontrons-nous dans la forêt ? Quand il y a des entreprises forestières, elles recourent à des employés occasionnels, car le métier est particulièrement difficile. Je n’ai jamais croisé de bûcherons parlant français, ce qui montre bien qu’il est fait appel à une main-d’œuvre étrangère, et que ce travail est tout à fait occasionnel. De plus, les arbres ne peuvent pas être coupés à n’importe quel moment : lorsqu’il a plu, il est impossible d’aller dans les forêts…

Il est également nécessaire de replanter. Pour cela, les entreprises agricoles utilisent de la main-d’œuvre saisonnière, donc occasionnelle, et ne peuvent pas embaucher des gens toute l’année. Les travaux forestiers sont à réaliser à des périodes particulières.

Il faut donc être attentif à la fiscalité, et peut-être étendre le champ de ce dispositif aux entreprises forestières, ainsi qu’à d’autres, dans le but de développer l’emploi. En effet, moins la fiscalité sera élevée, plus les embauches seront nombreuses et les recettes de l’État importantes.

Une telle politique serait stratégique pour la préservation de l’environnement et l’augmentation des recettes de l’État. Peut-être le Gouvernement reverra-t-il sa position à l’avenir…

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 349 rectifié, 456 rectifié quater et 649 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 349 rectifié, n° 456 rectifié quater et n° 649 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 567 rectifié

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 970 rectifié est présenté par M. Duplomb et Mme Férat.

L’amendement n° 989 est présenté par MM. Henno et Vanlerenberghe, Mmes Guidez, Sollogoub, Jacquemet et Devésa, MM. Duffourg, Janssens et les membres du groupe Union Centriste.

L’amendement n° 1041 rectifié est présenté par M. Tissot, Mmes G. Jourda et Lubin, MM. Pla, Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel, P. Joly, Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Préville, M. Sueur, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

II. – Le V de l’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est abrogé.

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

L’amendement n° 970 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 989.

M. Olivier Henno. Cet amendement vise à étendre le dispositif afin de faire entrer les coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) dans le périmètre de l’exonération TO-DE. Ces coopératives en sont explicitement exclues, alors qu’elles sont dirigées par des exploitants agricoles.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 1041 rectifié.

Mme Annie Le Houerou. L’exclusion des Cuma de ce dispositif n’est pas juste. Elle constitue une rupture d’égalité avec les groupements d’employeurs agricoles associatifs, qui bénéficient de cette mesure, alors que les groupements d’employeurs en coopérative, via les Cuma, n’en bénéficient pas. Pourtant, dans les deux cas, il s’agit d’emploi partagé.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En réalité, les Cuma sont composées d’exploitants et d’employeurs agricoles qui peuvent avoir besoin d’embaucher des saisonniers. Ils pourraient donc éventuellement bénéficier de cette exonération TO-DE.

Cependant, aucune étude n’ayant pu évaluer le nombre d’employés saisonniers susceptibles d’être embauchés par ces Cuma, la commission émet un avis de sagesse sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Attendons de disposer d’une évaluation de ce dispositif dans les semaines ou les mois à venir – je l’espère –, qui permettra éventuellement d’envisager son adaptation. En attendant, conservons-le en l’état.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 989 et 1041 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 989 et n° 1041 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 593 rectifié bis

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.

L’amendement n° 567 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 731-19 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° À la première et à la dernière phrases, les mots : « précédant celle » sont supprimés ;

2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les cotisations sont calculées, chaque année, à titre provisionnel, en pourcentage du revenu professionnel de l’année précédente. Pour les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole qui ont effectué l’option mentionnée à l’alinéa précédent lors de leur affiliation au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles ou lorsque la durée d’assujettissement ne permet pas de déterminer ledit revenu professionnel, les cotisations sont calculées à titre provisionnel sur la base d’une assiette fixée forfaitairement dans des conditions déterminées par décret. Lorsque le revenu professionnel est définitivement connu, la cotisation fait l’objet d’une régularisation.

« Par dérogation au précédent alinéa, les cotisations peuvent être calculées à titre provisionnel sur la base d’une assiette forfaitaire dès lors que les éléments d’appréciation sur l’importance des revenus professionnels des assurés au cours de l’année au titre de laquelle la cotisation est due établissent que ces revenus sont différents de l’assiette retenue en application de cet alinéa. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Actuellement, les agriculteurs ont le choix entre deux méthodes de calcul pour leurs cotisations sociales : l’assiette triennale de droit commun, qui permet de lisser les revenus sur les trois années antérieures, ou l’assiette optionnelle, qui permet de cotiser sur les revenus de l’année précédente.

Le changement climatique est une réalité. Les agriculteurs sont les premiers à en subir les conséquences. Ils doivent faire face à l’augmentation de la fréquence et de l’intensité d’événements climatiques défavorables. Lorsqu’ils subissent de graves intempéries climatiques, les agriculteurs qui choisissent l’assiette optionnelle sont fortement pénalisés par un calcul qui ne correspond pas à la réalité de leurs revenus.

Les auteurs de l’amendement proposent de prendre en compte les revenus réels de l’année, sur la base d’une assiette provisoire, ce qui permettra aux agriculteurs d’affronter les difficultés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les agriculteurs font souvent face à des difficultés liées au climat et à la conjoncture économique.

Pour autant, passer d’un mode de calcul à un autre reviendrait, en réalité, à multiplier les filets de sécurité à destination de ceux qui regretteraient le choix du mode de calcul de leurs cotisations pour une année donnée.

Il est, en effet, peut-être un peu facile de changer chaque année de mode de calcul afin d’adopter le plus favorable, en raison d’événements difficiles. Cette possibilité n’est pas offerte à l’ensemble des cotisants et ne doit pas l’être davantage aux agriculteurs.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 567 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 567 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 203 rectifié bis, n° 290 rectifié et n° 366 rectifié bis

Mme la présidente. L’amendement n° 593 rectifié bis, présenté par MM. Gold, Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Fialaire et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2° du III de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale ayant pour objet l’action sociale ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. De plus en plus d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sont amenés à gérer des services d’aide et d’accompagnement à domicile, participant ainsi aux politiques de maintien à domicile et d’action sociale. Or les EPCI ne bénéficient pas de l’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale sur les rémunérations des aides à domicile, alors que c’est le cas des centres communaux d’action sociale (CCAS).

Aussi, cet amendement tend à mettre fin à cette inégalité de traitement.

Pour tenir compte de l’avis du Gouvernement sur ce sujet émis lors de l’examen du PLFSS pour 2022, le dispositif précise que seuls sont éligibles à l’exonération les EPCI à vocation unique portant sur l’action sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avions déjà adopté cet amendement l’année dernière. La commission émet donc un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Nous préférons, dans la continuité de la décision du Conseil constitutionnel du 5 août 2011, réserver l’exonération aux structures spécialisées, qu’elles soient publiques ou privées.

Les EPCI peuvent gérer les services d’aide à domicile dans le cadre d’un centre intercommunal d’action sociale (CIAS).

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 593 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 593 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 1034 rectifié

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.

L’amendement n° 376 rectifié n’est pas soutenu.

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 203 rectifié bis est présenté par MM. Favreau, Brisson, Sido et Houpert, Mmes Gosselin et Dumas, MM. Genet et Bacci, Mme M. Mercier, MM. Bouchet, Sautarel et Burgoa, Mme Di Folco, MM. Laménie, Charon, Lefèvre, Cadec, Belin, Klinger et Rapin, Mme Demas et M. Gremillet.

L’amendement n° 290 rectifié est présenté par Mme Mélot, MM. Chasseing, Lagourgue, Grand, Wattebled, Decool, Menonville, A. Marc et Capus et Mme Paoli-Gagin.

L’amendement n° 366 rectifié bis est présenté par Mmes Féret, G. Jourda, Jasmin et Monier, MM. Todeschini, Pla, Bourgi, Mérillou, Redon-Sarrazy et Cardon et Mme Conway-Mouret.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 4°bis du II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« 4°bis Dans des limites fixées par décret, la participation d’un employeur public au titre d’une couverture de protection sociale complémentaire, versée obligatoirement en application d’un accord prévu à l’article L. 827-2 du code général de la fonction publique ou en application de l’arrêté mentionné au II de l’article L. 4123-3 du code de la défense, ou destinées à couvrir les frais occasionnés par une maternité, une maladie ou un accident, effectués par les personnes publiques mentionnées à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, ainsi qu’aux remboursements de cotisations de protection sociale complémentaire des agents publics mentionnés à l’article L. 4 du code général de la fonction publique. Ces dispositions entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2023 et jusqu’au 1er janvier 2026 ; »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Patricia Demas, pour présenter l’amendement n° 203 rectifié bis.

Mme Patricia Demas. Le présent amendement propose la mise en place d’un dispositif d’exonération transitoire des cotisations sociales des employeurs de la fonction publique sur l’ensemble des couvertures de protection sociale complémentaire. Ce mécanisme transitoire sera mis en place pour la période allant du 1er janvier prochain aux dates respectives d’entrée en vigueur des dispositifs pérennes de protection sociale complémentaire en santé, pour les trois versants de la fonction publique. La disposition s’arrêtera au plus tard le 1er janvier 2026.

Alors que l’ensemble des employeurs de la fonction publique doivent désormais obligatoirement participer au financement de la protection sociale complémentaire des fonctionnaires, l’amendement a pour objet de garantir un haut niveau de protection en santé de ces derniers.

Il s’agit d’assurer l’équité de traitement et le respect du principe d’égalité entre les agents publics.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 290 rectifié.

M. Daniel Chasseing. Le présent amendement vise à mettre en place un dispositif d’exonération transitoire des cotisations sociales des employeurs de la fonction publique sur l’ensemble des couvertures de protection sociale complémentaire. Ce mécanisme sera mis en place pendant la période allant du 1er janvier prochain aux dates respectives d’entrée en vigueur des dispositifs pérennes de la protection sociale complémentaire en santé pour les trois versants de la fonction publique. La disposition s’arrêtera au plus tard au 1er janvier 2026.

Alors que l’ensemble des employeurs de la fonction publique doivent désormais obligatoirement participer au financement de la protection sociale complémentaire des fonctionnaires, l’amendement a pour objet de garantir un haut niveau de protection en santé de ces derniers.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 366 rectifié bis.

Mme Corinne Féret. L’amendement étant identique, il est déjà défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’année dernière, lors de la mise en place du régime social de la participation des employeurs publics à la protection sociale complémentaire de leurs agents, nous avions rejeté la même proposition. Il serait cohérent de conserver la même position.

En effet, les avantages dont bénéficient les salariés du privé sont liés à la conclusion d’un contrat collectif obligatoire (CCO) – nous avions insisté sur ce caractère collectif obligatoire –, qui constitue objectivement la formule permettant la plus grande mutualisation des risques sur une base solidaire.

Il paraît donc opportun de réserver les avantages fiscaux et sociaux liés à ces cotisations, à des assurances souscrites dans le cadre d’un CCO, formule qui a sans doute vocation à se généraliser à l’avenir.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 203 rectifié bis, 290 rectifié et 366 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendements n° 203 rectifié bis, n° 290 rectifié et n° 366 rectifié bis
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Article 7 bis (nouveau)

Mme la présidente. L’amendement n° 1034 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 131 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Ces dispositions s’appliquent aux cotisations et contributions dues pour les périodes courant jusqu’au 31 décembre 2025. »

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à répondre aux préconisations formulées par le rapport du Gouvernement évaluant l’efficacité du dispositif des jeunes entreprises innovantes (JEI).

Il entend limiter à trois ans le bénéfice des exonérations de cotisations patronales auquel le dispositif donne droit pour ces petites et moyennes entreprises (PME) qui engagent au moins 15 % de leurs charges en dépenses de recherche et de développement.

En effet, une interrogation triennale du dispositif permettrait d’en contrôler la bonne efficacité alors que le volet social du dispositif JEI ferait l’objet de près de 50 millions d’euros de fraudes ou de déclarations erronées chaque année.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement est cohérent avec les dispositions de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, examinée la semaine dernière.

Il était également cohérent avec le nouveau cadre organique qui, d’une part, réserve aux lois de financement de la sécurité sociale le droit d’instaurer des niches sociales de plus de trois ans – le dispositif, dont il est question ici, a été créé par une loi de finances – et qui, d’autre part, prévoit une évaluation de chaque niche sociale sur une base triennale.

Peut-être pourrions-nous attendre les résultats de la prochaine évaluation du dispositif propre aux JEI avant d’adopter une telle mesure.

La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Ces dispositifs sont en cours d’évaluation ; par conséquent, attendons les résultats.

Néanmoins, cette niche sociale a été jugée comme étant extrêmement utile, notamment par le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, publié l’année dernière, qui insiste sur l’efficacité de ce dispositif en matière d’emploi. Il a aussi été placé en tête des incitations fiscales à l’innovation ainsi qu’à la recherche et développement par la Commission européenne, en 2014.

Nous attendons donc tous avec impatience les résultats de l’évaluation de ce dispositif. Pour l’heure, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1034 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 7 - Amendement n° 1034 rectifié
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Article 7 ter (nouveau)

Article 7 bis (nouveau)

I. – À l’article L. 741-4 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 241-13, ».

II. – Le I s’applique aux cotisations dues au titre des périodes d’emploi courant à compter du 1er février 2022. – (Adopté.)

Article 7 bis (nouveau)
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Article 7 quater (nouveau)

Article 7 ter (nouveau)

Au 1° de l’article L. 640-1 du code de la sécurité sociale, après le mot : « psychologue, », il est inséré le mot : « psychomotricien, ». – (Adopté.)

Article 7 ter (nouveau)
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Article additionnel après l'article 7 quater -  Amendements n° 707 rectifié et n° 772 rectifié

Article 7 quater (nouveau)

I. – Le code des transports est ainsi modifié :

1° L’article L. 5553-11 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la première occurrence du mot : « sont » est remplacée par les mots : « peuvent être » ;

b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Le bénéfice de l’exonération prévue au premier alinéa est subordonné à une autorisation préalable délivrée, après vérification du respect des conditions prévues au présent article, par décision de l’autorité compétente de l’État. L’autorité compétente de l’État s’assure du respect des conditions mentionnées aux premier et troisième alinéas.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » ;

2° À la fin de la seconde colonne de la soixante-seizième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article L. 5785-1, la référence : « n° 2016-816 du 20 juin 2016 » est remplacée par la référence : « n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2023 ».

II. – Le présent article s’applique aux cotisations et contributions dues au titre des périodes d’emploi courant à compter du 1er janvier 2023.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Comme toutes les niches fiscales et sociales, il est opportun de procéder à des contrôles – cela arrive en l’occurrence dix-sept années après la création du dispositif.

Depuis la loi du 3 mai 2005, les entreprises d’armement à vocation internationale jouissent d’une exonération de la contribution patronale vieillesse à l’Établissement national des invalides de la marine, de la cotisation d’allocations familiales et de la contribution de l’allocation d’assurance contre le risque de privation d’emploi pour un coût évalué à 46 millions d’euros en 2020, compensé par l’État.

L’article prévoit enfin de subordonner l’octroi de cette niche à une autorisation préalable délivrée par l’État.

Si un tel article est proposé, il est difficile de ne pas penser que des abus ont été commis.

Une chose est certaine : les entreprises qui ont bénéficié de cette exonération, au premier rang desquels figure CMA CGM, n’ont absolument pas besoin de cet avantage indu qui s’ajoute à l’avantage fiscal de la taxe dite au tonnage.

Chaque fois, le chantage à la compétitivité et à la concurrence est avancé. En somme, le capitalisme s’exonère du modèle social pour préserver les règles de son modèle.

Si CMA CGM bénéficiait de l’intégralité de la niche sociale reconduite à cet article – nous ne pouvons toutefois pas démontrer ce point –, elle représenterait 0,26 % des bénéfices de l’entreprise pour le seul deuxième trimestre 2022.

Le coût pour l’État s’élèverait à 20 millions d’euros… S’agissant d’une entreprise réalisant 7,6 milliards d’euros de bénéfices en un trimestre, ce serait une hérésie !

Le fondement de cette niche réside peut-être dans les liens familiaux et d’intérêts qui existent au sommet même de l’État, par l’entremise d’Alexis Kohler, avec le croisiériste MSC…

Chaque mesure, lorsqu’elle paraît injustifiée sur le plan comptable et financier, jette le soupçon sur la décision politique qui en est à l’origine.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 7 quater.

(Larticle 7 quater est adopté.)

Article 7 quater (nouveau)
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Article additionnel après l'article 7 quater -  Amendement n° 813 rectifié

Après l’article 7 quater

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 707 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

L’amendement n° 772 rectifié est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.

« La détermination de l’effort de l’employeur en matière de prévention et de lutte contre les maladies professionnelles se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l’entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L. 2312-33 du code du travail. »

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 707 rectifié.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à prévenir les risques d’épuisement au travail en instaurant un malus pour les entreprises n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.

Le syndrome d’épuisement professionnel, plus communément appelé burn-out, est un phénomène croissant dans nos sociétés contemporaines.

Les chiffres de cette épidémie discrète sont alarmants : l’Institut de veille sanitaire évaluait en 2015 à près de 500 000 le nombre de salariés en état de souffrance psychologique liée au travail, parmi lesquels 7 % environ étaient en épuisement professionnel – il est évidemment très difficile d’obtenir des chiffres solides.

Cet amendement tend donc à prévenir les risques d’épuisement professionnel en incitant les entreprises à prendre les mesures nécessaires pour éviter les risques d’accidents du travail ou de maladies professionnelles. Concrètement, il s’agit de relever les taux de cotisations auprès de la branche AT-MP des entreprises présentant une sinistralité anormalement élevée.

Le rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur les maladies et pathologies professionnelles dans l’industrie (risques chimiques, psychosociaux ou physiques) et les moyens à déployer pour leur élimination, fruit du travail des députés Pierre Dharréville et Julien Borowczyk, qui invitait à mieux connaître, reconnaître et prévenir ces maladies, préconisait la mise en place d’un tel malus lié aux accidents du travail. Cette proposition a en outre été reprise par M. Didier Migaud, alors Premier président de la Cour des comptes, lors de son audition par notre commission des affaires sociales en 2018. Avec de tels parrains, mes chers collègues, vous n’hésiterez pas à voter cet amendement !

Cette tarification des risques professionnels permettrait également de dégager des fonds pour la réparation, l’évaluation et la prévention des risques professionnels ; ainsi, elle participerait à la promotion de la santé au travail.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 772 rectifié.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Deux raisons expliquent l’avis défavorable de la commission sur ces amendements.

En premier lieu, la tarification AT-MP est déjà calculée en fonction du nombre de sinistres survenus dans les entreprises ou dans leur secteur et de leur coût moyen : en moyenne, plus de 70 % du montant des cotisations dépend de la sinistralité des entreprises.

En second lieu, les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) peuvent imposer des majorations de cotisation aux entreprises qui présentent des risques exceptionnels, notamment lorsqu’elles ne respectent pas les règles d’hygiène et de sécurité ou n’observent pas les mesures de prévention édictées par la caisse.

Le malus supplémentaire proposé dans ces amendements serait donc superfétatoire, même si je reconnais, mes chers collègues, que vos arguments sont tout à fait légitimes et compréhensibles.

Je vous invite donc à retirer ces amendements, mes chères collègues.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Le Gouvernement a un avis similaire à celui de la commission.

Aux raisons avancées par Mme la rapporteure générale, j’ajouterai un argument sur les données qu’il est proposé d’utiliser pour définir les critères de ce malus : se servir des bilans sociaux ne paraît ni pertinent ni envisageable à moyen terme, car ceux-ci reposent sur des données beaucoup plus limitées que celles qu’exploitent les caisses de sécurité sociale.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 707 rectifié et 772 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 7 quater -  Amendements n° 707 rectifié et n° 772 rectifié
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Article 7 quinquies (nouveau)

Mme la présidente. L’amendement n° 813 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 7 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 242-7 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des cotisations supplémentaires sont en particulier imposées aux entreprises donneuses d’ordre lorsqu’une entreprise sous-traitante dépasse un taux de sinistralité fixé par décret. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement, dans le même esprit que les précédents, vise à la fois à trouver de nouvelles recettes pour notre système de sécurité sociale et à en finir avec les pratiques non vertueuses de certaines entreprises.

Il a en effet pour objet la sous-traitance, mode d’organisation du travail de plus en plus fréquent et qu’il convient de dénoncer.

S’il est demandé au sous-traitant de veiller à la sécurité de ses travailleurs, le donneur d’ordre est également, en principe, soumis à l’obligation légale de veiller à l’organisation de la prévention des risques liés à la coactivité.

L’article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale prévoit d’ailleurs que la valeur du risque qui aide à calculer les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles doit être partagée entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice.

Cependant, les donneurs d’ordres tendent toujours plus à externaliser vers leurs sous-traitants les risques physiques et psychosociaux associés à un travail d’exécution. Cette tendance inquiétante est confirmée par un rapport de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), élaboré par des chercheurs de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ce rapport démontre que les salariés des entreprises sous-traitantes sont plus exposés que ceux des donneurs d’ordre aux risques physiques et au manque d’autonomie dans le travail, à une intensité du travail liée aux contraintes de rythme, à des problèmes d’insécurité de l’emploi et de travail isolé, ainsi qu’à des horaires pénibles. Ce même rapport explique également que plus l’activité principale du donneur d’ordre est éloignée du site d’exécution de l’activité sous-traitée, plus ces risques sont importants.

Pour toutes ces raisons, la répartition du risque doit être rééquilibrée. Nous proposons donc logiquement, pour pallier ces conséquences nocives pour les travailleurs, que les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles soient augmentées pour les entités ayant recours à la sous-traitance lorsqu’une entreprise sous-traitante dépasse un taux de sinistralité fixé par décret.

Il est temps de dénoncer les entreprises qui ont souvent recours à la sous-traitance ; je pense en particulier, parmi les scandales récents et plusieurs luttes marquantes, aux travailleurs de Chronopost dans mon département du Val-de-Marne, auxquels Pascal Savoldelli et moi-même apportons notre soutien.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je pense, ma chère collègue, que nous partageons tous la dénonciation des abus que vous avez relatés. Il est vrai que le recours à la sous-traitance est très courant dans certains secteurs d’activité.

Le code du travail prévoit cependant que le responsable de l’entreprise utilisatrice doit assurer la coordination générale des mesures de prévention des risques professionnels qu’il prend et de celles que prennent les responsables de toutes les entreprises extérieures intervenant dans son établissement. En cas de risques spécifiques liés à la présence de salariés de différentes entreprises sur un même site, les entreprises concernées doivent établir un plan de prévention.

En outre, la Carsat peut, notamment en présence de risques liés aux interférences induites par la sous-traitance, enjoindre à l’entreprise utilisatrice de prendre des mesures de prévention. En cas d’inobservation des mesures prescrites, la Carsat peut imposer à l’entreprise utilisatrice des cotisations supplémentaires.

Pour ces deux raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 813 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 7 quater -  Amendement n° 813 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Après l’article 7 quinquies (début)

Article 7 quinquies (nouveau)

Le premier alinéa du VI de l’article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est complété par les mots : « ou, le cas échéant, de la contribution prévue à l’article 28-3 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité, décès et autonomie, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte ». – (Adopté.)

Article 7 quinquies (nouveau)
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Après l’article 7 quinquies (interruption de la discussion)

Après l’article 7 quinquies

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 509 rectifié ter, présenté par Mme Meunier, M. Fichet, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mmes Féret et Jasmin, M. P. Joly, Mme Le Houerou, MM. Antiste, Montaugé et Redon-Sarrazy, Mme Poumirol, MM. Cozic, Mérillou, Michau, Pla, Marie, Cardon et Tissot, Mmes Blatrix Contat et Monier et M. Stanzione, est ainsi libellé :

Après l’article 7 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation, la réduction est applicable à l’ensemble des établissements et services mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles quel que soit leur statut, à l’article L. 6111-4 du code de la santé publique et à l’article L. 162-22-6 du présent code. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Michelle Meunier.

Mme Michelle Meunier. Nous proposons par cet amendement d’élargir aux Ehpad et unités de soins de longue durée (USLD) du secteur public la réduction pérenne de cotisations sociales dont bénéficient les seuls Ehpad des secteurs privés, lucratifs et non lucratifs.

À la différence des établissements sociaux et médico-sociaux associatifs et commerciaux, le secteur public ne bénéficie pas, depuis 2019, de l’abattement de charges pérenne de 8 % de la masse salariale. Cela représente une surcharge d’environ 400 millions d’euros par an pour le secteur public.

Cette différence de traitement pénalise les établissements médico-sociaux publics, qui accueillent la grande majorité des résidents les plus modestes. Il est donc inéquitable de les surtaxer. Agréés intégralement à l’aide sociale, les Ehpad et USLD publics sont en première ligne pour assurer l’accueil des personnes âgées à faibles ressources, car ils pratiquent des tarifs d’hébergement inférieurs, en moyenne, de 600 euros par mois à ceux du secteur commercial, mais aussi du secteur associatif.

Par ailleurs, les tarifs d’hébergement n’ont pas suivi l’évolution des charges ; depuis bientôt dix ans, leur hausse est systématiquement inférieure à l’inflation.

Les abattements de cotisations sociales doivent s’appliquer aux établissements publics ; à défaut, ceux-ci se trouvent dans une situation de désavantage concurrentiel qui menace leur pérennité à terme.

Mme la présidente. L’amendement n° 709 rectifié bis, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon, est ainsi libellé :

Après l’article 7 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation, la réduction est applicable à l’ensemble des établissements et services mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, quel que soit leur statut, à l’article L. 6111-4 du code de la santé publique et à l’article L. 162-22-6 du présent code. »

II. – Le présent article est abrogé le premier jour du trente-septième mois à compter de son entrée en vigueur.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Son objet est similaire à celui du précédent, que Mme Meunier a très bien défendu.

Un petit retour en arrière s’impose. Nous rappelons l’existence d’un désavantage concurrentiel net des établissements médico-sociaux publics par rapport à ceux du secteur privé non lucratif, mais aussi lucratif.

Mme Émilienne Poumirol. C’est scandaleux !

Mme Raymonde Poncet Monge. La différence atteint 600 euros ! Or le Sénat s’est refusé à taxer les dividendes et les profits de ces établissements commerciaux et a négligé de les réguler.

Les établissements publics assument la responsabilité de procurer des lits d’aide sociale, ce qui les empêche d’augmenter les tarifs d’hébergement, à la différence d’Orpea, qui va suivre l’inflation cette année ; pourtant, contrairement aux autres établissements, ils ne bénéficient pas de l’abattement de charges de 8 % de la masse salariale.

À défaut d’avoir rééquilibré la situation dont bénéficient les Ehpad privés lucratifs, j’espère que nous admettrons du moins qu’il convient d’arrêter de désavantager les établissements médico-sociaux publics.

M. Bernard Jomier. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements, même si j’entends bien vos arguments, mes chères collègues.

Cette réduction des cotisations maladie avait été instaurée en compensation de la suppression du CICE. Or les Ehpad et USLD publics ne bénéficiaient pas de ce dernier dispositif. Les faire profiter de cette réduction des cotisations ne correspond donc pas à la réalité, puisque ces établissements n’ont pas bénéficié du CICE.

Mme Raymonde Poncet Monge. Justement, l’injustice a assez duré !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ce serait en quelque sorte un détournement : cette réduction de cotisations a été conçue comme une compensation de la suppression. Il serait absurde que des établissements n’ayant pas bénéficié du CICE y soient éligibles. Cela paraît quelque peu ubuesque ! (Protestations sur les travées des groupes GEST et SER.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements.

Pour compléter l’argument de Mme la rapporteure générale, je ferai remarquer que l’on compare ici des choses qui ne sont pas tout à fait comparables : les fonctionnaires du service public hospitalier ne sont pas soumis aux cotisations chômage !

On ne peut pas se focaliser sur une seule disposition, dont Mme Doineau a bien rappelé qu’elle venait compenser l’annulation d’une disposition antérieure, qui ne concernait que les établissements privés, pour affirmer qu’il existe un désavantage concurrentiel. C’est comparer des pommes et des oranges !

Mme Raymonde Poncet Monge. Si, il y a désavantage ! (On renchérit sur les travées des groupes SER et CRCE.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 509 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 709 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 451 rectifié ter, présenté par Mmes N. Goulet et Sollogoub, est ainsi libellé :

Après l’article 7 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les frais professionnels dont la liste est fixée par décret, notamment les indemnités de repas des salariés itinérants du bâtiment quelle que soit leur distance d’exercice avec le siège de leur entreprise. »

La parole est à Mme Nadia Sollogoub.

Mme Nadia Sollogoub. Cet amendement a été déposé par Nathalie Goulet, qui a constaté dans son département qu’en matière d’exonération des indemnités de repas la loi prêtait à interprétation.

En effet, une entreprise du bâtiment de l’Orne a subi un redressement de l’Urssaf au motif que les salariés déjeunaient dans le village où se situait le siège social de l’entreprise. Il a été considéré qu’ils n’étaient pas en déplacement, alors qu’ils étaient bien sur un chantier ; malheureusement, celui-ci se trouvait sur la même commune que le siège social. On imagine bien que la question ne se pose pas quand le chantier comme le siège se trouvent à Paris : aucun redressement n’est imaginable dans une telle situation.

Mme Goulet fait remarquer que, face à cette difficulté, il conviendrait de compléter l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale de manière à le rendre plus explicite ; tel est l’objet de cet amendement. Il faudrait à tout le moins que l’administration revoie son estimation de la situation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Madame la sénatrice, vous soulevez ici de véritables questions, qui nous sont remontées récemment. En effet, les critères mis en place par l’Urssaf étaient sans doute trop contraignants.

En revanche, si je puis dire, vous entendez remplacer Kafka par la liberté absolue : aux termes de votre amendement, ce type de dépenses pourrait donner lieu à exonération sans aucun critère contraignant, ce qui irait beaucoup trop loin.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; il va travailler à améliorer la précision des critères de manière à mieux qualifier ce genre d’aides aux salariés, dans le cadre d’un décret sur lequel vous pourrez d’ailleurs être consultée si vous le souhaitez.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. Pardonnez-moi, monsieur le ministre, mais je ne saurais retirer cet amendement. Mme Goulet aurait souhaité recevoir de votre part l’engagement que l’administration pourrait réviser son jugement dans ce cas particulier, où l’on fait face à une véritable aberration ! Pour l’avenir, il va évidemment falloir corriger le tir, mais retirer l’amendement m’est impossible. Il y a un préjudice, car il y a un flou.

M. René-Paul Savary. Et un loup ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Malheureusement, si le contrôle est en cours, je ne peux évidemment pas m’engager à le corriger par une loi votée a posteriori.

Le Gouvernement s’engage en revanche à préciser les critères par des textes à venir, qui, je l’espère, permettront de faire évoluer la doctrine, dont je reconnais qu’elle est assez kafkaïenne.

Mme la présidente. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L’expertise nous manquait pour nous prononcer, c’est pourquoi nous avons sollicité l’avis du Gouvernement.

Il est compliqué d’avoir une vision cohérente de tous les secteurs économiques sur l’ensemble du territoire. Le cas précis qui a donné lieu à cet amendement doit-il nous faire changer les règles pour tous ?

Le maintien de cet amendement me cause de l’embarras, car je crains que l’on ne généralise à l’excès à partir d’un cas particulier. Au vu de l’engagement pris par M. le ministre de travailler sur ce sujet, il convient sans doute d’attendre.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. On frise le ridicule !

Honnêtement, M. le ministre évoque Kafka, mais il serait extrêmement simple de résoudre ce problème : une circulaire d’application suffirait pour que la loi soit appliquée de la même façon dans tous les départements. Tout cela, c’est peanuts ! Cela ne mérite tout de même pas d’être inscrit dans la loi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 451 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 585 rectifié bis est présenté par MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

L’amendement n° 1027 rectifié bis est présenté par M. Lurel, Mmes Jasmin et Conconne, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mme Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la première phrase du C du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « concourant essentiellement à la réalisation de projets innovants » sont remplacés par les mots : « ayant un profil métier d’ingénieur-chercheur ou de technicien », et après le mot : « communication », sont insérés les mots : « et de la recherche et développement ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 585 rectifié bis.

Mme Véronique Guillotin. Cet amendement, déposé par Stéphane Artano, vise à assouplir les conditions d’application du quatrième barème, dit d’innovation et de croissance, du régime d’exonération de charges sociales patronales spécifiques applicables aux entreprises ultramarines.

En effet, la réforme mise en œuvre en 2019 ne permet pas, en l’état, de répondre à l’enjeu de création d’emplois hautement qualifiés outre-mer dans le domaine des nouvelles technologies et de la recherche et développement. L’appréciation de la réalité des « projets innovants dans le domaine des technologies de l’information et de la communication », ainsi que du périmètre des « salariés principalement occupés à la réalisation » de tels projets, rend en pratique le régime relativement impraticable, puisque les caisses générales de sécurité sociale ne disposent pas des ressources nécessaires pour juger de ces situations.

Du fait de cette imprécision, de nombreuses entreprises qui pourraient bénéficier de ce dispositif n’en font pas la demande.

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1027 rectifié bis.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement identique, déposé par mon collègue Victorin Lurel et soutenu par notre groupe, peut être considéré comme défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il faut être bien conscient que ces différents régimes mis en place par la loi pour le développement économique des outre-mer, dits exonérations Lodéom, constituent une version bien plus puissante et avantageuse des allégements généraux applicables dans l’Hexagone.

Le barème dit d’innovation et de croissance prévoit ainsi une exonération totale de cotisations jusqu’à 1,7 Smic, puis dégressive jusqu’à 2,5 Smic.

Au vu de ces paramètres, il est donc approprié de bien concentrer ce dispositif sur son objet, c’est-à-dire sur les emplois concourant essentiellement à la réalisation de projets innovants.

La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Même avis pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 585 rectifié bis et 1027 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 383 rectifié bis est présenté par Mmes Malet et Dindar, MM. Charon, Belin et Bascher, Mmes Gruny et Imbert, M. Bouchet, Mmes M. Mercier et Petrus, MM. Genet et Folliot, Mmes Billon, Dumas et Jacques, MM. Hingray, Favreau et Sido, Mmes Lassarade, Lopez et Canayer et MM. Gremillet, Levi, Bonne, Dennemont et Klinger.

L’amendement n° 1028 rectifié bis est présenté par M. Lurel, Mmes Jasmin et Conconne, M. Jomier, Mme Lubin, M. Kanner, Mme Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 1° du B du III de l’article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de l’exonération calculé selon les modalités prévues au dernier alinéa du présent B est applicable aux employeurs relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics pour le paiement des cotisations et contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 dues sur les années 2024 et 2025. » ;

II. – Le I entre en vigueur au 1er janvier 2024.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 383 rectifié bis.

Mme Viviane Malet. Cet amendement a pour objet de faire bénéficier les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics d’outre-mer du barème renforcé du régime d’exonération de charges sociales patronales spécifiques applicables aux entreprises ultramarines pour une durée de deux années s’étalant du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2025.

Cette filière est dans une situation critique ; elle doit donc bénéficier d’un allégement temporaire du coût du travail afin de maintenir l’outil productif et de sauvegarder les emplois jusqu’à la relance effective de l’activité.

Rappelons notamment que la filière réunionnaise du BTP, ou bâtiments et travaux publics, a perdu un tiers de ses salariés et la moitié de ses entreprises entre 2008 et 2017. Son chiffre d’affaires a chuté de 40 % en dix ans et a atteint en 2019 son niveau le plus bas depuis vingt ans.

Il est donc proposé de faire bénéficier les entreprises du BTP de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion du barème de compétitivité renforcée du régime d’exonérations de charges sociales patronales applicables aux entreprises ultramarines pour le paiement de leurs cotisations dues sur les années 2024 et 2025.

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 1028 rectifié bis.

Mme Victoire Jasmin. La situation de nos territoires est particulière. La délégation sénatoriale aux outre-mer a récemment rendu un rapport sur la politique du logement, où la situation de la filière du BTP est évoquée. L’obtention de certains matériaux est de plus en plus coûteuse. Ces entreprises répondent à un réel besoin, notamment en logements sociaux, mais elles ne peuvent pas travailler normalement du fait de ces surcoûts considérables.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous sommes très sensibles à la situation du BTP dans les outre-mer, qui est à l’évidence catastrophique, et ce davantage encore depuis la crise du covid-19.

Sur ces amendements identiques, la commission a donc décidé de s’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Sans nier les difficultés que vous évoquez, je rappelle que ce dispositif vise à soutenir des secteurs soumis à la concurrence internationale, ce qui n’est évidemment pas le cas du BTP.

La mesure proposée aurait un coût supplémentaire important, de l’ordre de 100 millions d’euros. En outre, le dispositif qu’il est prévu d’étendre a été créé en 2019 et doit être évalué après trois ans, donc à l’issue de l’année en cours. Cela nous donnera l’occasion de l’adapter éventuellement aux secteurs importants de nos départements d’outre-mer.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 383 rectifié bis et 1028 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7 quinquies.

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 587 rectifié bis est présenté par MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux.

L’amendement n° 874 rectifié est présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Conconne, M. Antiste, Mme G. Jourda, MM. Pla, Chantrel et Bourgi, Mme Espagnac, M. Montaugé, Mme Préville et M. Tissot.

L’amendement n° 922 rectifié bis est présenté par MM. Théophile, Hassani, Dennemont et Patient.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard un an après la promulgation de la présente loi, un rapport relatif à l’application des régimes prévus aux articles L. 752-3-2, L. 752-3-3 et D. 752-7 du code de la sécurité sociale aux exploitations hôtelières de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion.

La parole est à M. Bernard Fialaire, pour présenter l’amendement n° 587 rectifié bis.

M. Bernard Fialaire. Le tourisme est l’une des principales sources de revenus des Antilles françaises et de La Réunion ; son influence s’étend à d’autres secteurs. L’hôtellerie est essentielle au maintien de cette économie touristique.

Toutefois, si les performances commerciales de l’hôtellerie en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion sont souvent comparables à celles que l’on observe en métropole, les professionnels de la filière font face, depuis toujours, à des déficits de compétitivité du fait de la lourdeur de leurs charges d’exploitation, qui pénalisent la rentabilité et la capacité à se rénover.

Ainsi, la masse salariale représente 42 % du chiffre d’affaires des hôtels aux Antilles françaises et 40 % à La Réunion, contre environ 30 % en métropole et 14 % dans les îles des Caraïbes voisines des Antilles françaises. La faible rentabilité des structures hôtelières dans les Antilles françaises a conduit à une diminution du parc hôtelier de 45 % en Martinique et de 38 % en Guadeloupe entre 2000 et 2022.

C’est pourquoi Stéphane Artano demande la remise par le Gouvernement d’un rapport qui nous permettra de disposer d’une vision actualisée de la compétitivité des établissements hôteliers des départements d’outre-mer. De la sorte, nous pourrons soutenir des mesures d’aide à ce secteur.

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour présenter l’amendement n° 874 rectifié.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à défendre les emplois directs et indirects de ce secteur. Nous avons bien vu la situation qu’a causée la période du covid-19 pour nos territoires.

Je sais que le Sénat s’oppose souvent aux demandes de rapport, mais j’estime important de disposer d’un tel document pour que nous puissions, avec plus de visibilité et de transparence, réellement prendre en considération ces situations : on ne peut pas rester dans l’opacité et subir des sanctions régulières.

Mme la présidente. L’amendement n° 922 rectifié bis n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Les auteurs de ces amendements souhaitent la remise d’un rapport sur l’efficacité de ces niches sociales. C’est bien de cette question qu’il s’agit. Toutefois, il me semble que l’évaluation évoquée par M. le ministre dans son avis sur les précédents amendements constitue la vraie réponse à y apporter.

Au-delà du tourisme et de l’hôtellerie, il convient d’apprécier l’efficacité d’autres niches sociales. L’évaluation prévue, tous les trois ans, dans le cadre d’une loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss) permet justement de dresser un état des lieux et de déterminer s’il convient d’augmenter ces niches, de les supprimer ou de créer un autre dispositif plus efficace pour répondre à ces problématiques, que vous avez exposées de façon tout à fait légitime.

La commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Ces territoires nous tiennent tous à cœur ; les particularités sectorielles y sont extrêmement prégnantes. On a besoin d’une évaluation de ce dispositif, qui a été mis en place en 2019 ; nous la réaliserons en 2022. Elle tiendra compte en particulier des enjeux touristiques dans les territoires que vous mentionnez.

Je vous invite donc à retirer ces amendements et à avoir confiance dans cette évaluation, qui vous sera évidemment présentée dans le cadre de l’examen de ces niches sociales d’ici au prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 587 rectifié bis et 874 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous avons examiné 88 amendements aujourd’hui ; il en reste 560.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Après l’article 7 quinquies (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023
Discussion générale

6

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 8 novembre 2022 :

À quatorze heures quarante-cinq, le soir et la nuit :

Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2023 (texte n° 96, 2022-2023).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 8 novembre 2022, à une heure.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER