M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Jean-Pierre Moga, je veux d’abord, encore une fois, m’associer à la douleur de toute la population, des élus, des gendarmes et de la famille.

Vous me demandez s’il est possible de nous immiscer ou de nous projeter dans le cerveau d’un individu qui, adulte, décide de s’en prendre à des enfants, de la pire des manières.

Je vous avoue que j’en suis incapable, car cet exercice a ses limites. J’ai pourtant exercé la psychiatrie comme interne, et la neurologie. Je connais les profondeurs noires des esprits humains et les ravages que peuvent provoquer certains troubles mentaux.

Je ne crois pas, mais l’enquête le dira, que l’état de cette personne était de nature à justifier un suivi psychologique ou psychiatrique. En tout cas, ce n’est pas ce qui avait été décidé lorsqu’il avait 15 ans. Cependant, vous l’avez dit vous-même, c’était il y a seize ans.

Ce genre d’acte abject, monstrueux, nous interroge, parce que c’est la barrière même de la notion d’empathie, d’humanité et de rapport à l’autre qui est percutée à grands coups de pied quand on s’en prend à un enfant, comme cet homme l’a fait.

Évidemment, chaque fois qu’un tel drame intervient, on cherche des réponses. Je ne sais pas si on les trouvera dans le cerveau de cette personne, y compris à l’issue de l’enquête. En tout cas, nous aurons les réponses sur ce qui lui a permis de réaliser cet acte et nous trouverons des moyens, si c’est nécessaire, de renforcer la prévention, le contrôle et la surveillance pour éviter que ces drames terribles, qui peuvent émailler la vie de notre pays ou d’autres pays, ne se reproduisent.

Est-ce un enjeu de surveillance ? Honnêtement, je n’en suis pas sûr, mais sans les éléments complets de l’enquête il m’est difficile de vous répondre sur ce point.

Néanmoins, sachez que la détermination des services de justice et de police, ainsi que du Gouvernement et de la représentation nationale, est totale, non pas pour comprendre ce que nos cerveaux humains ne peuvent pas comprendre, mais pour faire en sorte qu’un tel drame n’arrive plus jamais. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et RDSE. – Mme Agnès Canayer applaudit également. )

difficultés budgétaires et compétences des communes

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Mathieu Darnaud. Madame la Première ministre, les maires sont inquiets devant un changement de la situation économique aussi inattendu que brutal, l’inflation entraînant une explosion du coût des énergies et une hausse des prix des produits alimentaires, qui pèse sur le budget de nos cantines scolaires. J’ajoute la hausse du point d’indice de la fonction publique.

Devant cette situation, la réponse du Gouvernement est trop timide, voire peu opérante. Trop timide, comme dans le cas de la hausse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) en 2022, qui ne masquera pas une baisse tendancielle de cette dernière et ne permettra pas de compenser l’inflation.

Peu opérante, comme c’est le cas de la mesure dite du « filet de sécurité ». On a vu que les ambitions étaient fortes et qu’à l’arrivée peu de communes pourront en bénéficier en 2022. Le Sénat, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, jouera son rôle pour essayer d’élargir le champ des communes éligibles au filet de sécurité.

Notre inquiétude ne s’arrête pas là, madame la Première ministre. Nous sommes aussi inquiets de vos propos lorsque vous appelez, finalement, à privilégier le lien entre les présidents d’intercommunalité et les préfets. Où sont les maires dans tout cela ? (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)

Notre inquiétude, c’est aussi l’absence de réaction, ou, à tout le moins, la faible réaction du Gouvernement devant les préconisations de la Cour des comptes, qui invite à verser la DGF aux intercommunalités. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ma question, madame la Première ministre, est très claire : croyez-vous encore en la France communale ? Si tel est le cas, nous attendons, comme les maires, des preuves d’amour. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – Mme Anne-Catherine Loisier et M. Loïc Hervé applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. Mme la Première ministre se défile !

M. Olivier Klein, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement. Monsieur le sénateur Darnaud, comme la Première ministre vous l’a rappelé tout à l’heure, face aux défis inédits auxquels sont confrontées les collectivités territoriales, le Gouvernement est au rendez-vous. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il est au rendez-vous pour les aider et pour maintenir leurs capacités d’investissement. Il agit en concertation avec les associations d’élus pour coconstruire les solutions au plus proche du terrain.

Vous pouvez aussi faire confiance aux anciens maires que nous sommes, Caroline Cayeux, Christophe Béchu et moi-même, pour être particulièrement attentifs à ces questions. (Nouvelles exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Vous avez bien changé !

M. Olivier Klein, ministre délégué. Nous sommes nous aussi des élus locaux attachés à nos territoires. (M. Martin Lévrier applaudit vigoureusement.)

Je veux dire en premier lieu que le Gouvernement et la majorité peuvent être fiers des mesures proposées dans le PLF en faveur des collectivités locales (On ironise à droite.), avec, pour la première fois depuis treize ans, comme l’a rappelé Mme la Première ministre, une augmentation de la DGF de 320 millions d’euros. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Pemezec. Répondez à la question !

M. Olivier Klein, ministre délégué. Face à l’inflation, nous avons prévu un mécanisme complet qui permettra à plus de 95 % des communes de voir leur DGF maintenue ou augmentée.

Vous le savez, et vous l’avez même dit, d’ailleurs, l’État soutiendra aussi les collectivités locales, en particulier les plus fragiles, face à la hausse du prix des énergies, grâce aux différents boucliers tarifaires que nous avons mis en place. Plus d’un milliard d’euros seront destinés à cette action. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

Sur les questions liées à la décentralisation, que vous évoquez à la fin de votre question, le Président de la République l’a rappelé, le sujet sera mis en débat avec l’ensemble des collectivités locales et des associations d’élus. Nous vous invitons à écouter son discours, demain, au Salon des maires. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour la réplique.

M. Mathieu Darnaud. Monsieur le ministre, vous avez totalement éludé la question sur l’avenir de la France communale, mais je m’y attendais.

Nous avons en partage, madame la Première ministre, cette volonté de prêter plus d’attention aux actes qu’aux mots. C’est bien de cela qu’il s’agit et nous attendons toujours. Concernant le filet de sécurité, alors que l’on pensait que 22 000 communes seraient éligibles en 2022 à cette protection, force est de constater que l’on sera largement en dessous de 10 000. Mettez en application vos propos en passant aux actes ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – M. Loïc Hervé et Mme Valérie Létard applaudissent également.)

contrats de redressement en outre-mer pour les communes

M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Victoire Jasmin. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des outre-mer, qui n’est malheureusement pas là. C’est dommage !

M. Jacques Grosperrin. Il y en a d’autres qui sont absents !

Mme Victoire Jasmin. L’Association des maires de France réserve par tradition la première journée de son congrès aux outre-mer, tant nos problématiques, nombreuses, que ce soit en matière institutionnelle, de précarité, de culture et d’économie sont spécifiques et requièrent des adaptations par rapport à l’Hexagone.

Néanmoins, comme en métropole, les collectivités locales sont essentielles pour le bien vivre ensemble, trop souvent mis à mal dans ces territoires éloignés, en raison d’une défiance originelle à l’égard de l’État et de l’autorité.

Or les collectivités territoriales d’outre-mer, qui pâtissent déjà d’un sous-financement chronique, d’une masse salariale très importante et d’un coût de la vie supérieur de 30 %, doivent, elles aussi, faire face à l’inflation sur les matières premières et sur l’énergie.

C’est dans ce contexte de grande tension que le Gouvernement a consenti à des efforts supplémentaires en faveur du budget des outre-mer. Bien qu’insuffisants, ils sont néanmoins appréciables, pour peu qu’ils soient intégralement utilisés ! La sous-exécution des crédits dédiés aux outre-mer fonde ainsi l’une des mises en garde du récent rapport de la Cour des comptes, qui demande que les engagements de l’État soient mieux suivis, avec un appui en ingénierie locale, en vue d’une meilleure utilisation des crédits alloués aux collectivités d’outre-mer.

Ces dernières sont bien évidemment volontaires pour plus d’accompagnement et de contractualisation. J’en veux pour preuve le fait que la Guadeloupe compte plusieurs communes qui ont bénéficié du contrat de redressement en outre-mer (Corom) depuis 2021.

Aujourd’hui, il est nécessaire de prévoir une extension de ce dispositif, avec un peu plus de flexibilité, car de nombreuses communes envisagent de contractualiser avec le Gouvernement.

Aussi, j’aimerais savoir quelles mesures d’ajustement sont envisagées par le Gouvernement pour élargir les Corom à plus de communes volontaires et pour donner davantage de moyens d’action aux maires des outre-mer sans obérer leur autonomie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Stéphane Artano applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Madame la sénatrice Victoire Jasmin, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de mon collègue Jean-François Carenco, qui est actuellement avec le Président de la République au salon des maires, auprès d’élus ultramarins.

Permettez-moi ensuite de témoigner de la solidarité du Gouvernement à l’égard du conseil régional de Guadeloupe, frappé par une cyberattaque d’ampleur qui paralyse un certain nombre de ses services aux populations. J’ai eu le président Ary Chalus au téléphone et les services de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) sont en lien étroit avec ceux du conseil régional pour remédier à cette attaque et apporter des solutions.

Vous avez évoqué les contrats de redressement en outre-mer (Corom), dits aussi contrats Patient-Cazeneuve – saluons le sénateur Georges Patient pour ce travail –, qui ont été lancés en 2021. Le dispositif, comme vous le savez, vise à accompagner les communes ultramarines faisant face à des difficultés financières. Neuf communes contractantes se sont engagées à optimiser leur gestion et à fiabiliser leurs comptes : il s’agit de Sada à Mayotte, Saint-Benoît à La Réunion, Cayenne et Iracoubo en Guyane, Pointe-à-Pitre, Saint-François et Basse-Terre en Guadeloupe, ainsi que Fort-de-France et Saint-Pierre à la Martinique.

Il s’agit d’un partenariat gagnant-gagnant, la collectivité s’engageant sur une trajectoire financière de redressement et d’amélioration de gestion, l’État apportant des subventions de fonctionnement si les engagements sont tenus.

Je veux vous rassurer sur un point : l’autonomie du maire est pleinement respectée, l’État ne faisant que l’accompagner dans la mise en œuvre de ces contrats.

La vague de contrats en cours est dotée de 30 millions d’euros répartis sur la période 2021-2023.

Nous pouvons, par ailleurs, répondre à votre volonté d’élargir ces contrats à plus de communes, puisque l’Assemblée nationale a voté 30 millions d’euros supplémentaires pour les Corom en 2023. Cela nous permettra d’amplifier ce dispositif d’accompagnement des collectivités, qui, nous le croyons, fait largement consensus et je vous remercie de l’avoir rappelé dans votre question.

Vous le voyez, madame la sénatrice, le Gouvernement agit et continuera de travailler, sous l’autorité de la Première ministre, en lien avec les maires ultramarins, pour accompagner leur volonté d’assurer une gestion saine de leurs finances, meilleur moyen de leur donner des marges de manœuvre supplémentaires dans l’exercice de leur mission auprès de nos concitoyens d’outre-mer. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Pierre Frogier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pierre Frogier. Madame la Première ministre, le 28 octobre dernier s’est tenue à Matignon, sous votre autorité, une réunion dite « convention des partenaires », consacrée à l’avenir de la Nouvelle-Calédonie.

En cette circonstance, vous avez rappelé avec raison que, à l’issue du processus référendaire, l’avenir appartenait aux Calédoniens et qu’il leur revenait d’élaborer un projet d’avenir consensuel.

Pour y parvenir, vous avez proposé la mise en place de groupes de travail, que le ministre de l’intérieur et des outre-mer doit installer lors de sa visite à Nouméa dans les jours prochains. Cette initiative est utile, puisqu’elle s’inscrit dans le choix que la Nouvelle-Calédonie a fait de rester française. Mais est-elle suffisante ?

Les référendums de 2018, 2020 et 2021 ont ravivé les tensions et les divisions, réduisant en miettes cette « exception calédonienne » symbolisée par la fameuse poignée de main entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou en 1988. De partenaires, madame la Première ministre, nous sommes redevenus des adversaires. J’en veux pour preuve l’absence des mouvements indépendantistes à cette convention dite « des partenaires ».

Et pourtant, pour élaborer ce projet d’avenir consensuel que vous appelez vous-même de vos vœux, nous n’avons pas d’autre choix que de renouer ces liens de confiance, car notre avenir ne se construira pas l’un sans l’autre ni l’un contre l’autre.

M. Philippe Bas. Très bien !

M. Pierre Frogier. Madame la Première ministre, concrètement, quelles initiatives le ministre de l’intérieur envisage-t-il de prendre lors de son séjour à Nouméa pour que les trois partenaires qu’étaient l’État, les indépendantistes et nous-mêmes, se retrouvent en confiance ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Patrick Kanner, Stéphane Artano, Stéphane Demilly et Franck Montaugé applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur Frogier, le déplacement officiel prévu la semaine prochaine en Nouvelle-Calédonie fait suite à l’organisation de la convention des partenaires, qui s’est réunie le 28 octobre dernier, à la demande de la Première ministre. Vous étiez d’ailleurs présent.

Comme vous le savez, le lancement de la convention des partenaires a marqué le début des discussions sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie au terme du processus politique prévu dans l’accord de Nouméa. Le processus de définition d’un projet pour la Nouvelle-Calédonie, qui consacre sa place dans la République française et respecte ses singularités, est désormais engagé. Si les échanges du 28 octobre ont été denses et fructueux, ils sont restés incomplets, et vous en avez été le témoin, monsieur le sénateur, en raison notamment de l’absence d’une partie des forces politiques. Or, pour que le processus que nous avons engagé aboutisse, toutes les forces politiques calédoniennes doivent y contribuer.

Le ministre de l’intérieur et des outre-mer se rendra donc en Nouvelle-Calédonie, accompagné du ministre délégué chargé des outre-mer, pour prendre le temps du dialogue et de l’écoute, afin que tous les partenaires politiques participent aux discussions dans un esprit de responsabilité et de consensus.

Dans cette démarche, monsieur le sénateur, le Gouvernement sait qu’il pourra compter sur votre engagement personnel et sur votre capacité à nouer le dialogue avec les responsables indépendantistes, mais les discussions ouvertes par la convention des partenaires ont également vocation à traiter de sujets stratégiques pour l’avenir des Calédoniens. Au-delà des sujets institutionnels, qui feront l’objet de discussions ad hoc, plusieurs groupes de travail seront organisés sur les sujets suivants : égalité des chances et cohésion sociale, développement économique, emploi, grands investissements, nickel, souveraineté énergétique et transition écologique, souveraineté alimentaire, foncier, valeurs, identité commune et réconciliation, intégration et rayonnement régional.

Dans ce contexte, le déplacement du ministre lui permettra également de rencontrer la société civile, la jeunesse, les acteurs économiques ou associatifs de Nouvelle-Calédonie, afin de comprendre les enjeux et les attentes, et de faire en sorte qu’ils puissent contribuer à la définition d’un projet qui intéresse d’abord l’ensemble des Calédoniens. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Bruno Retailleau. Vous auriez pu au moins répondre, madame la Première ministre !

recul de la condition des femmes dans certains pays

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Annick Billon. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

À l’avant-veille de la Journée internationale de la lutte contre les violences faites aux femmes, deux mois après la mort de Mahsa Amini, la situation des droits et libertés des femmes dans le monde est extrêmement préoccupante. En Afghanistan, les talibans nient les femmes ; en Ukraine, des femmes sont violées et subissent des violences sexuelles de l’envahisseur russe ; en République démocratique du Congo, en Syrie, en Éthiopie, en République centrafricaine, au Soudan, au Yémen, en Birmanie, le viol est utilisé comme arme de guerre. Les minorités yézidie, ouïghoure ou kurde ne sont pas plus épargnées.

En Iran, la répression est terrible. C’est une répression contre les femmes, d’abord, car elles sont au centre du combat qui y est mené par les manifestants de la liberté, mais, plus largement, c’est une répression contre l’humanité.

Dans le cas de l’Iran, nous pouvons et nous devons agir, mais nous ne le faisons pas ou pas assez. L’Iran préside actuellement la commission onusienne de la condition de la femme… Quel cynisme !

Notre collègue Marie-Arlette Carlotti a déjà soulevé ce paradoxe, le 9 novembre dernier. Le Gouvernement s’est dit impuissant : avons-nous été impuissants quand la Russie a attaqué l’Ukraine ? Non, nous ne nous sommes pas résignés ! Contre l’Iran, les sanctions n’empêchent pas la violence envers les manifestants.

« Femme, Vie, Liberté » : madame la ministre, le slogan des femmes iraniennes impose à la France de s’élever contre la barbarie des mollahs et cela passe par la dénonciation de la présidence de cette commission onusienne de la condition de la femme par l’Iran. Qu’attendez-vous ? Quand cesserez-vous de mettre un voile sur la condition des femmes en Iran ? (Applaudissements sur toutes les travées, à lexception de quelques travées des groupes RDPI et INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Mme Catherine Colonna, ministre de lEurope et des affaires étrangères. Madame la sénatrice Billon, « Femme, Vie, Liberté » : face aux aspirations légitimes des Iraniennes et des Iraniens, le régime a choisi la voie de la répression, ce que nous avons condamné et continuons de condamner de la façon la plus claire.

Chaque jour, on recense de nouvelles victimes – plus de 300 déjà ! –, des jeunes femmes, comme Mahsa Amini, 22 ans, des enfants, comme Kian Pirfalak, 9 ans. Et cela dure depuis dix semaines ! À ces morts, il faut ajouter les arrestations, les détentions, la censure et les pressions contre les artistes, les avocats, les journalistes ou les simples citoyens.

La France soutient les aspirations des Iraniennes et des Iraniens à plus de liberté. Le Président de la République a rencontré, le 11 novembre dernier, plusieurs Iraniennes exilées, qui sont les visages de la lutte pour la liberté et pour les valeurs universelles. J’ai moi-même réaffirmé mon soutien à leur combat à plusieurs reprises, face à la représentation nationale, devant la presse ou par des vidéos, qui, je l’espère, ont pu être vues en Iran.

Notre action se décline dans toutes les enceintes internationales, qu’il s’agisse de l’Union européenne, qui a pris des sanctions à plusieurs reprises contre les responsables de la répression, ou de l’ONU, dont le Conseil des droits de l’homme, demain, jeudi, examinera la situation en Iran et créera un mécanisme d’établissement des faits pour que la vérité puisse être dite.

Nous serons vigilants aussi, madame la sénatrice, pour que l’Iran ne puisse pas détourner la commission de la condition de la femme des Nations unies de son objet.

Enfin, nous continuerons de demander à l’Iran de cesser la répression, de respecter le droit de manifester pacifiquement et, bien sûr, de libérer immédiatement nos compatriotes retenus en otage. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Et la question ?

autonomie fiscale des collectivités territoriales (II)

M. le président. La parole est à M. François Calvet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. François Calvet. Ma question s’adresse, ou plutôt s’adressait, à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales, qui est absente.

L’article 72 de la Constitution garantit la libre administration des collectivités territoriales, donc des communes, cellules de base de la démocratie. Cependant, vues « d’en haut », les communes ne seraient qu’un échelon administratif, alors que, dans les faits, et on l’a constaté pendant la crise du covid-19, les communes et leurs élus se sont tenus au plus proche de nos concitoyens, en première ligne.

Or à quoi assiste-t-on depuis plusieurs années ? À une véritable mise sous tutelle des maires qui, malgré de prétendues lois de décentralisation, ne disposent plus d’aucune autonomie fiscale. L’État a progressivement supprimé les impôts locaux, dont les communes fixaient librement le taux, pour les remplacer par des dotations et des impôts nationaux partagés. Et que dire des fameux contrats de Cahors et du mal nommé pacte de confiance, que le Gouvernement veut imposer à toute force ?

Comme le constate l’économiste Michel Cabannes, « la garantie constitutionnelle de l’autonomie financière n’est plus qu’une façade », et, comme le dit Philippe Laurent, vice-président de l’AMF : « Ce que veut l’État, au fond, c’est la suppression de la fiscalité locale. »

Ce que les maires peuvent retenir, eux, c’est que ce jacobinisme et cette recentralisation de moins en moins déguisée dénotent le peu de considération que l’État a pour eux et le mépris dans lequel il les tient.

Quand le Gouvernement se décidera-t-il à entreprendre une vraie réforme fiscale, qui redonnera dignité et confiance aux maires, premiers élus du peuple ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.

M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée de lindustrie. Monsieur le sénateur Calvet, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. Gabriel Attal, qui est retenu à l’Assemblée nationale pour la lecture des conclusions de la CMP sur le PLFR, et de M. Bruno Le Maire, qui représente la France à la conférence ministérielle de l’Agence spatiale européenne. Ils m’ont chargé de vous répondre, ce que je ferai en prenant un angle un peu différent des réponses déjà complètes qui ont été faites par Mme la Première ministre et mon collègue Olivier Klein sur ces sujets.

L’autonomie fiscale, les collectivités territoriales l’ont. Elle est garantie par la Constitution depuis 2003. En aucun cas, depuis cette date, la part des impôts dans les recettes des collectivités territoriales n’a été diminuée. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Néanmoins, vous l’avez dit, nous avons souhaité diminuer un certain nombre d’impôts de production, et nous continuerons de le faire. Même si je regrette que le Sénat ait décalé d’un an la suppression de la CVAE, je tiens à rappeler à la Haute Assemblée les raisons pour lesquelles nous l’avons proposée. Aujourd’hui, les impôts de production sont quatre fois plus importants en France qu’en Allemagne, et deux fois plus que dans l’ensemble de la zone euro. Le ministre de l’industrie que je suis souhaite continuer à réindustrialiser la France, notamment dans cette période extrêmement compliquée de hausse des coûts de l’énergie. Oui, cela passe par une réduction des impôts de production locaux.

Est-ce que, pour autant, nous affaiblissons les recettes des collectivités locales ? (Oui ! sur les travées des groupes Les Républicains et SER.)

La réponse est non !

Mme Sophie Primas. C’est faux !

M. Roland Lescure, ministre délégué. Non, parce que, vous le savez, nous compensons cette baisse de la fiscalité par une part des recettes de la TVA, qui, permettez-moi de vous le rappeler, est plus dynamique que la CVAE. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

La TVA, depuis dix ans, c’est 3,5 % de hausse des recettes tous les ans, contre 2,5 % pour la CVAE. Mesdames, messieurs les sénateurs, les collectivités territoriales y gagneront. (Nouvelles exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Est-ce que, pour autant, nous devons réduire les incitations des collectivités territoriales à la réindustrialisation ? La réponse est encore non ! Nous créons un fonds d’attractivité industrielle qui sera doté… (M. Loïc Hervé sexclame.)

Nous allons le construire ensemble, monsieur le sénateur. Il sera doté de 250 millions d’euros en 2023, et jusqu’à 650 millions d’euros en 2027.