Mme le président. L’amendement n° 32, présenté par MM. Salmon, Labbé, Dantec, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dossus et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er, qui définit le cadre d’application des mesures d’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires – nous nous sommes déjà exprimés sur cette affaire.

Nous disons que ce n’est pas le moment d’accélérer la construction d’installations nucléaires, alors que nous débattrons, en 2023, du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat. Et nous répétons que le nucléaire est dangereux, qu’il est coûteux et qu’il arrivera trop tard.

Pour ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 1er.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Nous avons déjà beaucoup discuté de cette question, je serai donc bref.

Mon cher collègue, l’adoption de cet amendement aurait pour conséquence l’impossibilité de construire de nouveaux réacteurs nucléaires, alors qu’il s’agit d’une nécessité absolue, comme l’ont montré nos débats.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Même avis.

Mme le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Puisque l’on nous ressert en permanence l’argument de l’inéluctabilité, il me faut revenir à la charge. Nous n’avons pas le choix, nous dit-on : c’est ainsi et pas autrement, il faut y aller et tant pis pour le débat démocratique ! Non : il existe autant de choix que de scénarios de l’Ademe ou de RTE !

C’est donc un choix de société qui se présente devant nous et qui nous oblige à prendre nos responsabilités : reporterons-nous sur les épaules des générations futures non seulement la dette climatique, mais aussi la dette nucléaire ? Une telle décision serait dramatique.

Les discussions auxquelles nous assistons sont parfois surréalistes : on parle de construire six EPR, mais certains demandent qu’il y en ait huit, d’autres vont jusqu’à dix ! Sommes-nous en train d’acheter des baguettes de pain ? Heureusement que l’on n’a pas procédé de cette manière pour l’EPR 1 de Flamanville ! Imaginez : nous aurions aujourd’hui six fiascos industriels au lieu d’un ! On serait bien…

Il est désormais question de commander un nombre incalculable d’EPR 2, alors même que nous ne savons pas si nous pourrons en faire fonctionner un demain.

Soyons un peu réalistes : attendons au moins que la preuve soit faite que ces installations fonctionnent. Ensuite, nous verrons.

Tout cela n’est pas très sérieux…

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 32.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 63, présenté par MM. Devinaz, Houllegatte, Montaugé, Tissot, Michau, Kanner et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Blatrix Contat et Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

1° Après le mot :

aux

insérer le mot :

six

2° Remplacer les mots :

y compris ceux de petits réacteurs modulaires

par les mots :

identifiés par Électricité de France et faisant actuellement l’objet d’une concertation publique organisée par la Commission nationale du débat public

La parole est à Mme Martine Filleul.

Mme Martine Filleul. Considérant que les mesures d’accélération et de simplification doivent demeurer exceptionnelles et limitées dans le temps, nous souhaitons restreindre le champ d’application du titre Ier aux seuls six EPR 2 dont la construction a été annoncée par le Président de la République dans son discours de Belfort.

Nous plaidons pour une accélération des procédures afin de consolider rapidement notre mix énergétique et d’éviter tout risque de rupture de notre système électrique, par exemple face à une situation de froid extrême.

Si ce projet de loi est un texte d’anticipation destiné à amorcer la relance de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, les mesures d’anticipation ne doivent toutefois pas devenir la règle.

EDF a d’ores et déjà prévu le calendrier de dépôt des dossiers de demande d’autorisation de construction des six EPR 2 annoncés. Ces installations pourront bénéficier, dès la promulgation de la loi, de tout un arsenal de mesures de simplification et d’accélération permettant d’amorcer la relance du nucléaire.

En parallèle de ces décisions, la Commission nationale du débat public (CNDP) a lancé, en ce début d’année, le débat public sur les projets de construction de ces six EPR 2, concertation qui devrait se clôturer à la fin du mois de février 2023. Nous en avons largement parlé.

Avant la fin de l’année 2023, le Parlement devrait de son côté s’être prononcé sur le projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, qui fixera un cap en même temps que la planification censée en découler. Nous disposerons donc d’une feuille de route qui devrait permettre de basculer de nouveau dans les procédures normales de droit commun.

Tel est l’objet de cet amendement, qu’il faut voir comme un amendement de compromis, madame la ministre.

Mme le président. L’amendement n° 60, présenté par MM. Montaugé, Devinaz, Houllegatte, Tissot, Michau et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer les mots :

y compris ceux de petits réacteurs modulaires

La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. La commission, sur proposition de notre rapporteur, a intégré dans le périmètre du texte les SMR. Madame la ministre, je réitère ma demande : au-delà des questions qui se posent concernant cette technologie – dans quelle mesure est-elle au point ? –, quelle est la doctrine du Gouvernement en matière de déploiement des SMR ?

Par ailleurs, la place des SMR doit évidemment être traitée dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie, puisqu’il s’agit de l’un des instruments qui doivent concourir à l’élaboration de notre mix énergétique futur.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Ces deux amendements ont un objet proche, bien que le dispositif de l’amendement n° 60 soit davantage axé sur les SMR.

Dans les deux cas en effet, il s’agit de supprimer les SMR du champ d’application de l’article 1er, l’amendement n° 63 visant en outre à limiter à six EPR 2 les réacteurs concernés par le dispositif.

Concernant la limitation à six EPR 2 du périmètre de l’article 1er, je ne m’étendrai pas davantage : nous avons déjà largement évoqué ce sujet.

Quant à l’exclusion des SMR, elle serait très regrettable en matière d’innovation. Les auditions que j’ai réalisées ont montré toute l’importance de ce fléchage vers les SMR – ce qu’a approuvé la commission –, du point de vue des évolutions technologiques et de la recherche.

La commission demande donc le retrait des amendements nos 63 et 60 ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 63. En revanche, il s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l’amendement n° 60, qui est satisfait par le projet de loi.

Le texte prévoit la construction de réacteurs électrogènes produisant de l’électricité d’origine nucléaire à proximité des sites existants : nulle dissémination, donc, mais l’application d’un principe de neutralité technologique, l’apport nucléaire afférent se faisant sur ou à proximité des sites actuellement pilotés par EDF. Aucune ambiguïté n’existe donc à cet égard.

Quid par ailleurs des SMR de manière générale, monsieur le sénateur Montaugé ? Ce texte, je le redis, porte sur l’apport au réseau d’électricité général d’un complément d’électricité nucléaire dans les quinze années à venir ainsi que dans les années qui suivront, apport dont la vocation est de remplacer celui que nous fournissent des réacteurs qui, un jour – nous en sommes tous d’accord –, arriveront en fin de vie. Quand cela se produira-t-il ? Nous ne le savons pas complètement ; nous essayons de poursuivre le plus longtemps possible leur exploitation, en toute sécurité, évidemment.

Pour ce qui est des SMR en général, au-delà du contexte que je viens de décrire, qui est celui de la production d’électricité pour le compte du réseau national dans le cadre d’opérations menées par EDF, la discussion aura lieu à l’occasion de la programmation pluriannuelle de l’énergie. La perspective qui se dessine renvoie à deux types d’usage des SMR.

En premier lieu, l’idée d’une offre à l’exportation est parfaitement légitime. Nous disposons déjà en effet de technologies approchantes, celle, par exemple, des sous-marins nucléaires, dont la puissance n’est certes pas tout à fait de 400 mégawatts, mais n’est pas non plus ridicule. Ainsi accompagnons-nous le projet de petit réacteur modulaire Nuward (Nuclear forward), promu par EDF, et finançons-nous, au travers d’un appel à manifestation d’intérêt du plan France 2030, des projets de réacteurs de type SMR, ce qui nous permet de rester dans la course en matière de recherche et développement, d’innovation et de préindustrialisation.

En second lieu, sur le territoire national, une telle technologie peut servir notamment à décarboner de grandes plateformes industrielles. Elles ne sont pas si nombreuses, les cinq plateformes industrielles françaises les plus carbonées étant celles de Dunkerque, Le Havre, Fos-sur-Mer, Chalampé et Roussillon, ces deux dernières étant des plateformes de chimie lourde.

Notre intention n’est pas d’installer partout de tels réacteurs. Reste que considérer cette option, parmi les autres options d’électricité bas-carbone possibles, fait sens dans la perspective d’utiliser l’hydrogène bas-carbone pour décarboner ces plateformes, étant entendu que, pour produire de l’hydrogène bas-carbone, il faut du renouvelable ou du nucléaire, en tout cas de la puissance électrique.

M. Franck Montaugé. Quid de la maîtrise d’ouvrage ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Sur cette discussion, que nous aurons, nous n’avons pas encore tous les éclairages requis. Je rappelle que, par construction, en tant qu’installations nucléaires, ces équipements seront soumis à l’Autorité de sûreté nucléaire et à toutes les contraintes qui s’imposent au nucléaire. Il n’y aura pas, d’un côté, le réacteur SMR, sans contrainte et sans contrôle, de l’autre, l’EPR, avec contraintes et avec contrôles ! Toutes les installations relèveront du même cadre réglementaire, qui est très lourd.

Étant donné les barrières à l’entrée existantes, seul un acteur ayant pignon sur rue, en l’occurrence EDF, assez naturellement, pourra intervenir dans ce domaine.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 63.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 60.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)

PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 59, présenté par MM. Devinaz, Houllegatte, Montaugé, Tissot, Michau, Kanner et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Blatrix Contat et Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer le mot :

vingt

par le mot :

dix

La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.

M. Jean-Michel Houllegatte. Nous estimons que les mesures d’accélération et de simplification doivent demeurer exceptionnelles et raisonnablement limitées dans le temps. À cet égard, la durée d’application de ces mesures, fixée à vingt ans par l’article 1er, nous paraît excessive.

En effet, comme cela a été rappelé, avant la fin de l’année 2023, le Parlement devra s’être prononcé sur le projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, qui fixera un cap et déterminera la planification censée en découler. Ainsi disposerons-nous d’une feuille de route qui devrait permettre de rebasculer dans les procédures normales de droit commun.

D’après la synthèse du rapport pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, le calendrier actuel d’EDF prévoit que le dépôt des dossiers de demande d’autorisation de création ait lieu tous les deux ans environ à partir de 2023, soit en 2023 pour Penly, en 2025 pour Gravelines, en 2027 pour les centrales du Bugey et du Tricastin. Comme le fait observer la commission de l’aménagement du territoire, en prévoyant que les dispositions du titre Ier s’appliquent jusqu’en 2029, c’est-à-dire pour une durée de six ans, on couvrait les six premiers EPR annoncés par le Président de la République ; or il est proposé vingt ans dans le texte de la commission des affaires économiques…

Nous demandons, au travers de cet amendement, la réduction de cette durée d’application à dix ans.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 5 rectifié quater est présenté par M. Menonville, Mme Paoli-Gagin, MM. Médevielle, Guerriau et Grand, Mme Mélot et MM. Lagourgue, Chasseing, Longeot, Kern, A. Marc, Wattebled, Verzelen et Capus.

L’amendement n° 8 rectifié est présenté par MM. Piednoir et Longuet, Mme Deroche, MM. D. Laurent et Charon, Mme Lassarade, M. Paccaud, Mme Belrhiti, MM. Calvet et Burgoa, Mme Gosselin, MM. Sautarel, Bouchet et Anglars, Mme Garriaud-Maylam, MM. Cardoux, Brisson, Bascher et Savin, Mme Garnier, MM. Favreau, Pointereau, E. Blanc et Belin, Mmes L. Darcos, Muller-Bronn et Ventalon, MM. H. Leroy et Somon, Mme Procaccia et M. Grosperrin.

L’amendement n° 28 rectifié bis est présenté par M. Moga, Mme Férat, M. Louault, Mmes Ract-Madoux, Gacquerre et Loisier, M. Chauvet et Mme Létard.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 1

Remplacer le mot :

vingt

par le mot :

vingt-sept

La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 5 rectifié quater.

M. Franck Menonville. Cet amendement tend à allonger jusqu’en 2050 la période d’application des mesures du projet de loi relatives à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité des sites nucléaires existants.

Actuellement, en effet, l’horizon des prévisions en matière d’énergie est fixé à l’année 2050.

Il s’agit d’apporter davantage de visibilité à la filière nucléaire et aux branches professionnelles qui contribuent à son développement, afin qu’elles investissent dans le domaine industriel et dans les compétences, nous donnant les moyens de construire de nouvelles capacités nucléaires et de prolonger les capacités existantes.

Cette disposition me paraît nécessaire pour assurer la bonne réussite du développement du nucléaire et, ainsi, améliorer la compétitivité de notre électricité et garantir la sécurité de notre approvisionnement. Il est en effet impératif de s’inscrire dans le temps long pour apporter la visibilité nécessaire et assurer l’attractivité de cette filière.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.

M. Stéphane Piednoir. Je rebondis sur les propos de Franck Menonville : s’agissant d’investissements extrêmement lourds, les filières ont en effet besoin de temps et de visibilité.

Je réagis également à ce qu’a dit plus tôt Jean-Michel Houllegatte : doit-on se cantonner au temps restreint nécessaire à la création des six premiers réacteurs ? En d’autres termes, les quinze années qui ont été initialement proposées par le Gouvernement sont-elles suffisantes ou bien faut-il prolonger cette durée ? La commission l’a portée à vingt ans ; je propose, quant à moi, d’aller jusqu’au renouvellement d’une majeure partie du parc nucléaire, c’est-à-dire au-delà des six EPR 2 qui sont dans les cartons depuis le discours prononcé par le Président de la République à Belfort, et de tenir compte des huit EPR 2 suivants – soit six plus huit. S’inscrire dans un horizon un peu plus lointain, en l’espèce 2050, me paraîtrait ainsi opportun.

À cet effet, cet amendement tend à porter à vingt-sept ans la durée d’application des mesures de simplification et d’accélération du titre Ier. J’espère que la commission lui réservera un accueil favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga, pour présenter l’amendement n° 28 rectifié bis.

M. Jean-Pierre Moga. Il est défendu : il s’agit là encore de repousser à 2050 le terme de la période d’application des dispositions du titre Ier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Daniel Gremillet, rapporteur. L’amendement n° 59 tend à réduire à dix ans la durée d’application des présentes mesures, ce qui va à rebours des demandes que la filière, notamment, a exprimées lors des auditions. La commission des affaires économiques a d’ailleurs porté cette durée à vingt ans. C’est pourquoi elle émet un avis défavorable sur cet amendement.

Pour ce qui est des amendements nos 5 rectifié quater, 8 rectifié et 28 rectifié bis, qui visent à allonger cette durée jusqu’en 2050, je comprends complètement le souhait de leurs auteurs de donner une visibilité aux acteurs. La commission s’en remet donc à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Sur l’amendement n° 59, le Gouvernement émet un avis défavorable : l’enjeu est précisément de couvrir les « six plus huit » centrales nucléaires dont la construction est envisagée dans le scénario dit haut de RTE. Dans sa sagesse, la commission a légèrement prolongé la durée d’application prévue. Le raisonnement du Gouvernement était le suivant : sachant qu’il faut construire quatorze réacteurs, à raison de deux chaque année et de quinze années de construction, cela nous emmène un peu au-delà de 2050.

Nous pouvons nous donner un peu de marge en optant pour vingt ans, durée destinée, je le rappelle, à couvrir les seules procédures – la phase de construction proprement dite étant lancée, il n’y a plus besoin d’alléger les procédures. Le délai proposé par les auteurs de l’amendement n° 59 est un peu trop serré ; quant à celui que les auteurs des amendements identiques nos 5 rectifié quater, 8 rectifié et 28 rectifié bis nous suggèrent de retenir, il est un peu trop long.

S’il s’agit de couvrir l’ensemble des quatorze réacteurs, la demande formulée par les auteurs des trois amendements identiques est par définition satisfaite, puisqu’il faut soustraire de la durée d’application des dispositions d’accélération les quinze ans de construction, qui débuteront nécessairement après que l’ensemble des procédures requises auront été suivies.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Je suis très embarrassé : dix ans, vingt ans, vingt-sept ans, tout cela nous inscrit dans le temps long… Nous le savons : il nous faut réagir dans les trois ans, à tout le moins dans les dix ans. Je n’arrive pas à choisir…

Nous voterons contre tous ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 59.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 5 rectifié quater, 8 rectifié et 28 rectifié bis.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 62, présenté par MM. Montaugé, Devinaz, Houllegatte, Tissot, Michau et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Pla, Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, MM. Gillé et Jacquin, Mmes Préville, Monier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 2 à 4

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 5, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.

M. Jean-Michel Houllegatte. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec les amendements que nous avons précédemment défendus, dont l’objet était de s’opposer à l’élargissement du champ d’application fixé par l’article 1er, qu’il s’agisse du périmètre, de la durée ou des types d’installation nucléaire concernés par les mesures de simplification et d’accélération des procédures de construction de réacteurs.

Les nouveaux alinéas introduits dans le texte par la commission des affaires économiques permettent notamment aux électrolyseurs d’hydrogène et aux projets d’installations d’entreposage de combustibles nucléaires de bénéficier de ces mesures.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, nous n’y sommes pas favorables. Selon nous, l’acceptabilité du nucléaire suppose de la transparence et de la concertation avec l’ensemble des parties prenantes. Elle exige aussi une évaluation démocratique et pluraliste des besoins de notre société en matière d’énergie, dans un contexte de transition énergétique et de décarbonation de nos économies.

Ce projet de loi, qui vise à accélérer les procédures pour amorcer la relance de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, ne saurait en aucun cas servir à anticiper sur les débats publics en cours et sur la future grande loi quinquennale que nous appelons tous de nos vœux.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 25 rectifié quater est présenté par MM. Menonville, Médevielle, Guerriau et Grand, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Chasseing, Longeot et Kern, Mme Paoli-Gagin et MM. A. Marc, Moga, Wattebled, Verzelen et Capus.

L’amendement n° 119 est présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

projet de réacteur électronucléaire, mentionné au I du présent article, ou à un réacteur nucléaire existant, mentionné

par les mots :

ou plusieurs projets de réacteurs électronucléaires, mentionnés au I du présent article, ou à un ou plusieurs réacteurs nucléaires existants, mentionnés

La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié quater.

M. Franck Menonville. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 119.

M. Daniel Gremillet, rapporteur. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 111 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Cet amendement vise à supprimer les électrolyseurs destinés à la production d’hydrogène du champ d’application du projet de loi, non parce que nous ne souhaitons pas soutenir ces installations, mais parce qu’il ne s’agit pas d’installations nucléaires ; or il y va, dans ce texte, des installations nucléaires.

Le problème posé est double.

D’une part, les électrolyseurs relèvent des procédures applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Or ce texte ne traite pas du tout des ICPE ; en d’autres termes, la simple mention des électrolyseurs ne suffit pas, en ce domaine, à simplifier quoi que ce soit.

D’autre part, en faisant bénéficier les électrolyseurs des dispositions applicables aux installations nucléaires, on risquerait de donner cours à une interprétation selon laquelle il faut leur appliquer le droit des installations nucléaires, ce qui n’est pas du tout une simplification, s’agissant de projets qui n’emportent strictement aucun risque nucléaire.

Pour ces raisons, le Gouvernement demande la suppression de cette mention.

J’entends bien qu’un intérêt existe pour les électrolyseurs couplés à un réacteur nucléaire – il en a été question lors de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables. Reste que c’est d’une autre manière, en s’intéressant aux ICPE, qu’il faut traiter ce sujet, et non dans le cadre d’une législation sur les installations nucléaires.

M. le président. L’amendement n° 110, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

V. – Le rapport mentionné à l’article 1er D de la présente loi tient compte des dispositions de la présente loi et en présente l’incidence.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Cet amendement vise à ce que l’incidence de l’application du présent texte fasse l’objet d’une présentation dans le rapport, mentionné à l’article 1er D, sur les modalités de mise en œuvre d’un programme de construction de nouveaux réacteurs.

Les dispositions de l’article 1er introduites par amendements de la commission des affaires économiques prévoient la production chaque année d’un rapport du Gouvernement sur l’application des mesures du titre Ier du projet de loi. Il est demandé, en outre, que ledit rapport précise la liste des sites soumis à la participation du public pour la construction de quatorze réacteurs pressurisés européens et de petits réacteurs modulaires.

Cette démarche paraît prématurée dès lors que ce projet de loi porte sur la simplification des procédures et que les orientations, tant qualitatives que quantitatives, applicables au développement de nouveaux réacteurs nucléaires seront définies par le Parlement dans le prochain projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, que le Gouvernement prévoit de présenter dans les prochains mois.

Le cadre approprié pour le suivi des projets qui en résulteront pourra alors être déterminé de manière cohérente. De surcroît, la production d’un tel rapport mobiliserait chaque année une part substantielle des ressources de la direction générale de l’énergie et du climat sans véritablement éclairer le Parlement sur les avancées réalisées en la matière.

Le Gouvernement propose donc de réajuster ce point.