compte rendu intégral

Présidence de M. Roger Karoutchi

vice-président

Secrétaires :

Mme Corinne Imbert,

M. Dominique Théophile.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Article additionnel avant l'article 1er - Amendement n° 4473 rectifié (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Demande de renvoi à la commission de l'article 1er

Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, dont le Sénat est saisi en application de l’article 47-1, alinéa 2, de la Constitution (projet n° 368, rapport n° 375, avis n° 373).

Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus à la motion n° 4738 tendant au renvoi en commission de l’article 1er.

PREMIÈRE PARTIE (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2023

Demande de renvoi à la commission de l’article 1er

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Article 1er

M. le président. Je suis saisi, par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco et MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon, d’une motion n° 4738.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer à la commission l’article 1er du projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 2023 (n° 368, 2022-2023).

Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l’article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant pour deux minutes maximum, un orateur d’opinion contraire pour deux minutes maximum, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond, et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour la motion.

Mme Raymonde Poncet Monge. L’article 1er du projet de loi vise à supprimer plusieurs régimes spéciaux ou autonomes.

En réalité, les régimes spéciaux concernent non pas l’ensemble des salariés de ces branches, mais uniquement ceux qui ont les conditions de travail les plus dures.

À la RATP, les conducteurs et agents de maintenance représentent 31 000 personnes sur 45 000. À l’échelle du pays, la part de retraités recevant une pension des régimes spéciaux était, en 2019, d’environ 6 %.

Mettre fin aux régimes spéciaux et autonomes sous prétexte d’équité et de supposée universalité est une diversion visant à faire oublier que tout le monde pâtira du report de l’âge légal de départ à la retraite.

Les régimes d’EDF et de la RATP, par exemple, prévoient de meilleures anticipations de départ et une meilleure prise en compte de la pénibilité. Les travailleurs concernés sont en effet exposés à des facteurs de pénibilité qui sont décrits dans des tableaux détaillés et, par conséquent, à des risques d’incapacité importante. Après dix-sept ans de catégorie active, donc d’exposition à ces risques et facteurs de pénibilité, ils peuvent partir à 57 ans et, demain, à 59 ans.

Nous n’avons pas eu le temps de débusquer en quoi ils seraient des privilégiés. La justice sociale et l’équité voudraient que l’on applique ces mesures sérieuses de prise en compte de la pénibilité à tous les travailleurs accomplissant des travaux pénibles, plutôt que de niveler par le bas, et, comme le font ces régimes spéciaux, que l’on prévienne avant de réparer.

S’agissant des discussions en commission, je précise qu’elles ont eu lieu à huis clos, sans captation vidéo, sans que nous ayons eu le temps de nous exprimer sur tous les amendements.

Au-delà du recours abusif à l’article 47-1 de la Constitution et de l’attente lancinante de la note du Conseil d’État, les problèmes que ce texte soulève et la manière dont le débat est muselé vous forceront bien, monsieur le ministre, à reconnaître que nous avons un véritable problème démocratique.

Le groupe écologiste estime donc que le sujet des régimes spéciaux et de son impact sur la vie de milliers de travailleurs mérite, au préalable, un débat en commission bien plus approfondi. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?…

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Madame Poncet Monge, par cette motion, vous demandez en somme le retour du débat en commission. Il me semble que vous étiez présente lors de nos réunions et que, comme un certain nombre de vos collègues, vous avez pu vous y exprimer.

Formulez-vous ici une demande de rattrapage à destination des absents ?

En l’occurrence, nous avons procédé à des heures et des heures d’auditions. Nous avons reçu l’ensemble des représentants des régimes spéciaux et leur avons d’ailleurs posé un certain nombre de questions. Certains d’entre vous, qui étaient présents lors de ces auditions, mes chers collègues, ont obtenu, me semble-t-il, des réponses.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cette motion. Le retour en commission, c’est non.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de linsertion. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement émet évidemment un avis défavorable sur cette motion. (M. Pierre Laurent sexclame.)

Les auditions ont eu lieu. En outre, la question des régimes spéciaux n’est pas nouvelle dans le paysage politique. Année après année, projet de loi de financement de la sécurité sociale après projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce sujet est amplement débattu au sein de votre assemblée.

Nous savons que ces régimes ont été créés à un moment où ils pouvaient sembler nécessaires. Aujourd’hui, cependant, les différences qu’ils présentent par rapport au régime général ne se justifient plus : elles ne se justifient plus au regard de l’évolution des conditions de travail des personnes concernées et encore moins quand on les compare aux conditions d’exercice de salariés affiliés au régime général qui exercent les mêmes tâches et les mêmes métiers et remplissent les mêmes missions.

Il est temps d’avancer.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. En 2019, le gouvernement a qualifié les régimes spéciaux de privilège pour diviser les Français et faire passer la retraite par points.

Monsieur le ministre, c’est un comble aujourd’hui de vous entendre vanter le régime par répartition, alors que vous vouliez l’abattre voilà à peine quatre ans.

Vous entendez mettre fin aux régimes spéciaux sous prétexte de renforcer la justice sociale entre les futurs retraités. Vous allez plus loin et vous proposez des mesures plus dures que ne l’avait fait Nicolas Sarkozy en son temps.

Les régimes spéciaux accordent des compensations à des travailleurs exerçant des métiers pénibles, qui exigent des astreintes fréquentes et entraînent une usure physique.

Nous nous opposons à leur suppression injuste. Il faudrait que vous nous expliquiez les raisons pour lesquelles ces métiers ne nécessitent pas de mesures spécifiques d’aménagement des carrières, comme la possibilité d’anticiper les départs à la retraite afin de mieux prendre en compte la pénibilité.

Dans ces secteurs en effet, les travailleurs ont une espérance de vie souvent inférieure à celle de la moyenne des salariés.

Nous souhaitons le maintien du modèle social actuel. Les régimes spéciaux ne sont pas des privilèges. Ambroise Croizat parlait d’ailleurs de « conquis sociaux ».

Au lieu de fermer le régime de la RATP, des électriciens et des gaziers, de la Banque de France, du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et des clercs de notaire, il faudrait généraliser ces compensations à l’ensemble des travailleurs qui accomplissent des travaux pénibles.

Notre groupe souhaite supprimer l’article 1er, qui ferme des régimes spéciaux fondés sur la reconnaissance de la pénibilité du travail. Pour cette raison, il votera la motion de renvoi à la commission déposée par le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Monsieur le ministre, une fois de plus, nous vous demandons l’avis du Conseil d’État que vous nous cachez soigneusement depuis le début ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Monsieur le ministre, les régimes spéciaux constituent selon vous des privilèges, alors qu’ils ont été pionniers en matière de droits à la retraite. Ils ont été mis en place en raison de l’organisation et de la nature du travail dans les différents secteurs concernés et sont le fruit d’une véritable conquête sociale, qui s’est construite au fil des décennies. Ces régimes fonctionnent, en outre, sur la base d’une solidarité restreinte à une profession.

Vous voulez supprimer ces supposés privilèges, alors qu’ils ne sont que la simple reconnaissance de la pénibilité du travail exercé.

Les régimes spéciaux ont été construits et négociés pour compenser les nuisances inhérentes à des métiers qui méritent pourtant une attention particulière.

Pour notre part, nous sommes convaincus que l’ensemble des salariés qui sont exposés à la pénibilité doivent partir plus tôt à la retraite, sans qu’il faille pour autant organiser un régime favorable de reconnaissance de la pénibilité.

L’équité doit être construite en accordant davantage de droits et en améliorant la qualité du travail dans les métiers difficiles, y compris ceux qui bénéficient de régimes dits spéciaux.

D’ailleurs, monsieur le ministre, j’aimerais que vous nous expliquiez pourquoi seuls cinq régimes parmi l’ensemble des régimes spéciaux sont touchés par votre réforme. Comment avez-vous fait le tri ?

Le fait de revenir en arrière et de niveler ainsi par le bas risque en outre de nuire à l’attractivité de ces professions.

Pour ces raisons, nous sommes favorables à un renvoi à la commission afin de mieux étudier les caractéristiques de ces métiers. (M. Pierre Laurent applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, vous avez raison : il y a des salariés qui sont affiliés au régime général – surtout depuis que l’on privatise les services publics et que l’on n’embauche plus que des contractuels – et qui ont les mêmes conditions de travail.

Vous prenez l’exemple d’un conducteur de bus RATP et d’un conducteur de car Macron. J’ignore d’ailleurs pourquoi vous citez souvent les conducteurs de bus RATP, vous devez avoir un problème avec eux… Leur exposition aux facteurs de pénibilité est en effet identique. Ce n’est pas le cas des salaires et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle vous privatisez.

Vous proposez que le conducteur de bus RATP soit soumis aux mêmes conditions que le conducteur de car Macron : il ne partirait à la retraite qu’à 64 ans, mais potentiellement avant, s’il est « cassé » ou a été licencié pour inaptitude.

Voyez-vous, les régimes spéciaux sont préventifs. Ils n’attendent pas que les gens soient cassés pour leur permettre de partir à 59 ans ou 57 ans. Il y a là une présomption, celle selon laquelle les facteurs de pénibilité altèrent l’espérance de vie.

Quand les conducteurs de car Macron atteindront 63 ans ou 64 ans, vous devrez réparer, à défaut d’avoir prévenu ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 4738, tendant au renvoi à la commission de l’article 1er.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 145 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 91
Contre 251

(La motion nest pas adoptée.)

M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion de l’article 1er.

Demande de renvoi à la commission de l'article 1er
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023
Rappels au règlement

Article 1er

I. – Après l’article L. 2142-4-1 du code des transports, il est inséré un article L. 2142-4-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 2142-4-2. – Les salariés dont le contrat de travail est régi par le statut particulier mentionné à l’article L. 2142-4-1 et qui sont recrutés avant le 1er septembre 2023 sont affiliés à un régime spécial de retraite régi par l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. »

II. – Après le troisième alinéa de l’article L. 142-9 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les agents titulaires régis par ce statut et recrutés avant le 1er septembre 2023 sont affiliés à un régime spécial de retraite régi par les dispositions mentionnées à l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale. »

III. – Les deux premiers alinéas du paragraphe 2 de l’article 1er de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Par. 2. – Cette caisse a pour objet la constitution, au profit de l’affilié, d’une pension en cas d’invalidité prématurée, la gestion des risques maladie, longue maladie, maternité et décès, le versement d’indemnités en cas de chômage et, éventuellement, la création d’œuvres sanitaires et sociales, dans des conditions déterminées par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 5 de la présente loi.

« L’affiliation à cette caisse est obligatoire pour tous les clercs et employés, dès leur entrée en fonctions, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État.

« Cette caisse a également pour objet la constitution, au profit des clercs et employés de notaire recrutés avant le 1er septembre 2023 et qui remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à la caisse, d’une pension en cas de vieillesse et, en cas de décès, d’une pension au profit du conjoint et des enfants mineurs. »

III bis (nouveau). – Le paragraphe 1er de l’article 3 de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d’assistance des clercs de notaires est ainsi modifié :

1° La deuxième phrase du 1° est complétée par les mots : « des clercs et employés de notaire mentionnés au troisième alinéa du paragraphe 2 de l’article 1er de la présente loi » ;

2° Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Une autre cotisation obligatoire pour tous les notaires en exercice, les chambres, les caisses et les organismes mentionnés à l’article 1er. Cette cotisation est assise sur les revenus d’activité entrant dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale, en application de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, de l’ensemble des clercs et employés de notaire affiliés à la caisse. Le taux de cette cotisation est fixé par décret ; »

3° À la fin de la première phrase du 3°, les mots : « visés à l’article 1er » sont remplacés par les mots : « mentionnés au deuxième alinéa du paragraphe 2 de l’article 1er ».

IV. – Le premier alinéa du I de l’article 16 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières est ainsi modifié :

1° À la première phrase, le mot : « vieillesse, » est supprimé ;

2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le fonctionnement du régime d’assurance vieillesse prévu au même article 47, pour les personnels salariés recrutés avant le 1er septembre 2023 et qui remplissent, sans aucune interruption à compter de cette date, les conditions d’affiliation à ce régime, est également assuré par cette caisse. »

V. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 160-17, les mots : « assurés mentionnés aux articles L. 712-1 et L. 712-2 » sont remplacés par les mots : « fonctionnaires et des anciens fonctionnaires de l’État, ne relevant pas de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale, ainsi que de leurs ayants droits » ;

2° L’article L. 200-1 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « articles », la fin du 2° est ainsi rédigée : « L. 411-1, L. 412-2 et L. 412-8 ; »

b) Après le 5°, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Au titre de l’assurance vieillesse, les assurés relevant de l’article L. 381-32. » ;

3° L’article L. 311-2 est complété par les mots : « ou la nature de leur statut » ;

4° La section 10 du chapitre Ier du titre VIII du livre III est ainsi rétablie :

« Section 10

« Membres du Conseil économique, social et environnemental

« Art. L. 381-32. – Les membres du Conseil économique, social et environnemental sont affiliés à l’assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale. » ;

5° À la fin de l’article L. 411-1, les mots : « salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise » sont remplacés par les mots : « mentionnée à l’article L. 311-2 » ;

6° Les articles L. 711-3, L. 711-6, L. 712-1, L. 712-2, L. 712-10 et L. 713-4 sont abrogés ;

7° Le second alinéa de l’article L. 711-7 est supprimé ;

8° À l’article L. 712-3, après le mot : « décédés, », sont insérés les mots : « sont aux moins égales à celles qui résultent de la législation relative au régime général de sécurité sociale. Elles » ;

9° L’article L. 712-9 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « invalidité », sont insérés les mots : « dont bénéficient les fonctionnaires civils » et, à la fin, les mots : « des fonctionnaires et pour ceux qui sont en activité une cotisation au moins égale de l’État » sont remplacés par les mots : « à la charge de l’employeur » ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

10° À l’article L. 712-10-1, les mots : « L. 712-1 et L. 712-3 du premier alinéa de l’article L. 712-9 et de l’article L. 712-10 » sont remplacés par les mots : « L. 712-3 et L. 712-9 » ;

10° bis (nouveau) Après le mot : « intéressés », la fin de la seconde phrase de l’article L. 761-5 est supprimée ;

11° Le début de la première phrase de l’article L. 921-1 est ainsi rédigé : « Les personnes mentionnées à l’article L. 311-2 et les salariés des professions agricoles qui ne relèvent… (le reste sans changement). » ;

12° Au premier alinéa de l’article L. 921-2-1, après le mot : « public », sont insérés les mots : « et les personnes mentionnées à l’article L. 381-32 ».

bis (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 722-24-2 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « L. 712-1 et L. 712-3, du premier alinéa de l’article L. 712-9 et de l’article L. 712-10 » sont remplacés par les mots : « L. 712-3 et L. 712-9 ».

VI. – Au premier alinéa de l’article L. 4163-4 du code du travail, les mots : « ainsi que » sont remplacés par les mots : « , les salariés régis par un statut particulier et ».

VII. – Le 4° du V s’applique aux membres du Conseil économique, social et environnemental entrant en fonction à compter du 1er septembre 2023. Les I à IV, les 1° à 3° et 5° à 12° du V et le VI entrent en vigueur à la même date.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.

M. Fabien Gay. L’histoire sociale de notre pays est faite de luttes et de gains sociaux, mal nommés « acquis sociaux » et que nous appellerons plutôt « conquis sociaux », puisque l’on peut – c’est ce que vous voulez, messieurs les ministres – les remettre en cause.

La question de l’égalité et de la justice sociale s’est toujours réglée par le haut, et non en tirant les droits des travailleurs et des travailleuses vers le bas.

Les régimes spéciaux sont aussi un acquis lié au statut, qui tient compte de la pénibilité du travail des cheminots, des traminots, des gaziers-électriciens et de tant d’autres d’ailleurs. Nous ne connaissons chez eux aucun privilégié ni aucun milliardaire. Ces hommes et femmes assurent chaque jour une mission de service public dans des conditions difficiles.

Les régimes spéciaux étaient des régimes pionniers. Ils avaient vocation à s’étendre à l’ensemble des travailleurs et des travailleuses.

À l’occasion de la discussion de cet article 1er, j’ai une question à poser à la droite sénatoriale. Nous sommes en désaccord sur la question des retraites ; pour autant, nous pouvons nous mettre par exemple d’accord sur la question énergétique.

Nous aurons à nous prononcer prochainement sur la création de huit réacteurs pressurisés européens (EPR). Comment ferez-vous pour recruter les ingénieurs, les soudeurs et autres professionnels du nucléaire dont nous manquons, dès lors que vous cassez leur statut et mettez fin aux régimes spéciaux qui protègent leur sécurité autant que la nôtre, mais qui sont surtout un élément d’attractivité de la filière ?

Quel signal enverrez-vous, en cassant le régime spécial des industries électriques et gazières (IEG) ? Ce régime est d’ailleurs bénéficiaire et contribue à l’équilibre du régime général – en vingt ans, il a versé à trois reprises au régime général !

Voilà la question que je vous pose. Si vous y répondez, nous continuerons le débat. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Victoire Jasmin, MM. Thomas Dossus et Jean-Michel Houllegatte applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, sur l’article.

M. Pierre Laurent. Nous discutons de l’article 1er, qui porte sur les régimes de retraite improprement appelés régimes spéciaux.

Soyons clairs, la question n’est pas financière : les gains escomptés par la suppression de ces régimes seront peanuts au regard des problèmes dont on parle.

Il ne s’agit pas davantage d’une question de justice sociale : on ne fait jamais de justice sociale en tirant quelques dizaines de milliers de travailleurs supplémentaires vers le bas.

La vérité, monsieur le ministre, c’est qu’en vous attaquant à ces régimes spéciaux vous voulez continuer à démanteler des services publics dont nous avons absolument besoin pour relever le pays et le sortir de la crise actuelle.

D’ailleurs, dans les secteurs concernés, la conquête de ces statuts a constitué une part du contrat à l’origine de la construction du service public ferroviaire ou, comme l’a dit Fabien Gay, du système électrique public français.

En continuant dans la voie de la suppression, vous enverrez un signal désastreux.

À la RATP – nous y reviendrons –, 4 000 postes sont à pourvoir. Or, pour faciliter la tâche de M. Castex, qui doit recruter ces 4 000 personnes, vous enverrez le signal selon lequel les conditions de travail des embauchés de demain seront encore dégradées. Vous le faites, alors même que l’on ne parvient pas à pourvoir ces emplois à cause de la dégradation des conditions de travail dans tous les métiers de la RATP.

J’aperçois en face de moi Jean-François Rapin. Au mois d’août dernier, il manquait 300 conducteurs de trains express régionaux (TER) dans les Hauts-de-France. Comment les trouverez-vous, alors que vous envoyez le signal selon lequel les conditions de travail continueront de se dégrader ?

La question qui se pose n’est pas une question de justice. Vous allez porter un coup aux capacités de reconstruction de nos services publics, dont nous avons besoin pour la transition écologique et la réindustrialisation du pays. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Rémi Féraud applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je prendrai l’exemple, rarement cité, des clercs de notaire.

On le sent : l’avenir du pays dépend du statut et du régime de retraite des clercs de notaire ! (Sourires sur les travées du groupe CRCE.) Il se trouve que ce dernier ne coûte pas un centime à l’État : il n’y a jamais eu la moindre subvention d’équilibre.

Par ailleurs, ce régime assez particulier est géré de façon paritaire entre les patrons – les notaires – et les clercs de notaire. D’habitude, monsieur le ministre, vous soutenez les patrons. En l’occurrence, les patrons demandent le maintien du système !

Le taux de cotisation élevé du régime s’explique par le fait qu’il est intégré, c’est-à-dire qu’il inclut à la fois la retraite de base et la retraite complémentaire.

En quoi s’attaquer à ce système ferait-il progresser l’égalité républicaine ? La profession de clerc de notaire n’est, qui plus est, pas très attractive non plus : des milliers de postes restent aujourd’hui non pourvus. Enfin, je rappelle que les notaires sont présents sur l’ensemble du territoire national.

Franchement, je ne vois pas à quoi répond ce projet de loi, si ce n’est à une vision idéologique de l’égalité par le nivellement par le bas. C’est la toise pour tout le monde !

Si, par malheur, le progrès dans un secteur amenait les autres salariés à formuler des revendications comparables, rendez-vous compte du désastre !

La réalité est que vous n’avez de cesse de fragiliser le salariat et de supprimer des statuts et avantages qui ne sont tout de même pas le Pérou !

Avec votre mesure, les clercs de notaire perdraient tout de même 25 % du taux de réversion de leur pension. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe GEST. – M. Jean-Claude Tissot applaudit également.)