M. René-Paul Savary, rapporteur. Ce n’est pas moi qui l’ai choisi…

Mme Corinne Féret. … qui ne convient absolument pas à cette réforme des retraites ?

Vous nous annoncez en même temps un futur projet de loi Travail, évoqué par notre collègue Claude Raynal. Mais pourquoi renvoyer à ce texte, dont, pour l’heure, nous ne savons rien ?

Il faudrait vous accorder une confiance absolue au sujet des mesures que vous proposez de renvoyer à ce projet de loi ; prenez les choses dans le bon sens et travaillons ensemble. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Je me pose inlassablement cette question et je vais sans aucun doute continuer de me la poser : quelle est la pertinence de ce texte pour les outre-mer ?

Au total, 15 % des 53-69 ans ne sont ni en emploi, ni en retraite, ni en préretraite dans les outre-mer, contre 5 % en métropole. Les pensions du régime général s’y élèvent en moyenne à 680 euros, contre 900 euros pour les hommes en métropole, et 715 euros pour les femmes. En Guadeloupe, comme en Martinique et en Guyane, les pensionnés totalisent en moyenne 110 trimestres, contre 180 en métropole : c’est dire combien les carrières sont hachées.

On parle de l’index seniors et des dispositions y afférentes : elles s’appliquent aux entreprises de plus de 300 salariés, qui sont très peu nombreuses outre-mer.

Monsieur le ministre, ce texte ne s’applique pas là-bas et, s’il y est mis en œuvre, il ne fera qu’aggraver une situation déjà catastrophique. J’en veux pour preuve les éléments fournis par les caisses générales de sécurité sociale et par la Cnav ; vous n’en avez pas tenu compte.

Je demande à nos compatriotes d’être très vigilants sur ce qui se passe ici et sur ce qui se passera demain, après la commission mixte paritaire (CMP).

M. Roger Karoutchi. Oh, la CMP…

M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour explication de vote.

Mme Annick Billon. Monsieur Raynal, si, pour notre part, nous voulons étudier ce texte, c’est tout simplement parce que nous sommes le Parlement et que notre rôle est de débattre.

J’ajoute que le 5 avril prochain, sur l’initiative du groupe Union Centriste, nous discuterons dans cet hémicycle d’une proposition de loi visant à renforcer l’accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique.

Nous travaillons bien en faveur de l’égalité professionnelle et de l’amélioration des carrières des femmes, y compris dans la fonction publique. Ce texte se fonde sur le travail de nos collègues sénatrices Dominique Vérien et Martine Filleul. Nous allons le coconstruire pour les femmes et les carrières des femmes !

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.

Mme Michelle Meunier. J’abonde dans le sens de mes collègues Claude Raynal et Corinne Féret.

Monsieur le rapporteur, vous l’avez reconnu vous-même, ce projet de loi est un véhicule législatif très réduit. Il est même totalement inadapté.

Nombre de nos amendements ont été déclarés irrecevables au motif qu’ils tendaient à augmenter les prestations et les pensions servies : tous les groupes siégeant à la gauche de cet hémicycle ont pu dresser le même constat.

Ce texte ne fait que des perdantes et des perdants. Bien sûr, je voterai l’amendement de Mme Lubin.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2806 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 2599 rectifié bis, présenté par MM. Capus, Grand, Guerriau, Médevielle, Verzelen, Chasseing, Decool et Lagourgue, Mmes Mélot et Paoli-Gagin et MM. Wattebled et Menonville, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale est complété par trois phrases ainsi rédigées : « Ce taux peut être modulé selon l’âge des travailleurs salariés ou assimilés. Ce décret applique une dégressivité du taux à partir de dix ans avant l’âge légal d’ouverture du droit à une pension de retraite mentionné à l’article L. 161-17-2 du présent code et telle que ce taux devient nul deux ans avant cet âge. Afin d’assurer l’équilibre budgétaire, ce décret veille à compenser cette baisse des cotisations de l’assurance vieillesse par une éventuelle hausse de ces mêmes cotisations à la charge des autres travailleurs salariés ou assimilés. »

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

M. Jean-Pierre Grand. Cet amendement vise à prendre en compte l’âge des salariés dans le calcul des cotisations patronales vieillesse.

Mes chers collègues, l’objectif d’une telle incitation est de renforcer l’employabilité des seniors en diminuant le coût du travail pour cette catégorie spécifique d’actifs sans abaisser la rémunération – je vous fais grâce des explications techniques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Mon cher collègue, soyons vigilants : de toute évidence, une dégressivité systématique pour l’emploi d’un salarié de 50 ans et plus entraînerait un effet d’aubaine. Son coût ne serait pas, comme pour le CDI senior, de 800 millions d’euros : il serait absolument exorbitant. Je ne pense pas que tel soit votre but.

Selon moi, mieux vaut privilégier des dispositifs plus intéressants, comme la formation professionnelle, la validation des acquis de l’expérience (VAE) ou encore l’aménagement des conditions de travail.

Je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Défavorable.

M. Jean-Pierre Grand. Je retire cet amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 2599 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 2620 rectifié bis, présenté par Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Lurel, Chantrel et Féraud, Mme Monier, MM. Marie, Bourgi et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Tissot, Leconte, Raynal, Stanzione et Durain, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mmes Van Heghe et Conway-Mouret, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 5127-7 du code du travail, il est inséré un article L. 5121-7-… ainsi rédigé :

« Art. L. 5121-7-. – Un accord interprofessionnel national mentionné à l’article L. 2232-1 définit les modalités de majoration ou de minoration de cotisations des employeurs en fonction du nombre de salariés de plus de 50 ans présents dans leurs effectifs.

« À défaut de conclusion d’un tel accord avant le 1er septembre 2024, les conditions d’atteinte de cet objectif mentionnées au premier alinéa sont définies par voie réglementaire.

La parole est à Mme Corinne Féret.

Mme Corinne Féret. Selon nous, le principe du bonus-malus doit être appliqué à l’emploi des salariés de plus de 50 ans sur l’initiative des partenaires sociaux, c’est-à-dire dans le cadre d’un accord national interprofessionnel (ANI).

Cet amendement tend ainsi à concrétiser une recommandation formulée par nos collègues Monique Lubin et René-Paul Savary dans le rapport qu’ils ont dédié à l’emploi dit « des seniors ».

En la matière, le dernier ANI date du 13 octobre 2005. Les partenaires sociaux s’accordaient alors sur l’importance de faire évoluer les « représentations socioculturelles » des seniors.

Si les objectifs identifiés par cet accord demeurent valables, un certain nombre des mesures prévues dans ce cadre sont aujourd’hui dépourvues d’objet.

En outre, force est de constater que la volonté affirmée par les partenaires sociaux en 2005 n’a pas permis d’améliorer substantiellement les conditions de retour vers l’emploi des seniors.

Aussi, nous proposons de fixer comme objectif au futur ANI l’élaboration d’un bonus-malus applicable à l’emploi des plus de 50 ans.

M. le président. L’amendement n° 42 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 5127-7 du code du travail, il est inséré un article L. 5121-7-… ainsi rédigé :

« Art. L. 5121-7-. – Un accord interprofessionnel national mentionné à l’article L. 2232-1 définit les modalités de majoration ou de minoration de cotisations des employeurs en fonction du nombre de salariés de plus de 55 ans présents dans leurs effectifs.

« À défaut de conclusion d’un tel accord avant le 1er septembre 2024, les conditions d’atteinte de cet objectif mentionnées au premier alinéa sont définies par voie réglementaire.

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Il est défendu, monsieur le président !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. René-Paul Savary, rapporteur. Nous parlons tour à tour de bonus-malus, d’incitation et de coercition, d’index et de labels…

Soyons attentifs. Certes, les partenaires sociaux peuvent tout à fait mener cette réflexion, mais les négociations interprofessionnelles ne peuvent certainement pas conduire à déterminer des quotas de seniors. C’est plutôt au niveau des branches que de tels dispositifs peuvent être examinés ; et, ensuite, la gestion prévisionnelle de l’emploi, notamment l’emploi des seniors, relève des entreprises, en particulier au-delà d’un certain seuil.

C’est la raison pour laquelle nous sollicitons le retrait de ces amendements. À défaut, nous émettrons un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2620 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 42 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 2975 rectifié, présenté par M. Cardon, Mme Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Le Houerou et Jasmin, M. Jomier, Mmes Poumirol, Meunier, Rossignol et Blatrix Contat, MM. Bourgi et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Durain et Leconte, Mme Monier, MM. Temal, Tissot, Lurel, Féraud et Marie, Mme de La Gontrie, MM. Raynal et Stanzione, Mme Carlotti, M. Redon-Sarrazy, Mme Artigalas, MM. Jacquin, Assouline et Mérillou, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Devinaz, Mmes S. Robert et Briquet, MM. Houllegatte et Lozach, Mme Van Heghe, M. Magner, Mme Bonnefoy, MM. Roger, Montaugé, Cozic et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le taux de ces cotisations est fixé à :

« 1° 0,40 % pour les salariés et 1,90 % pour les employeurs sur la part des revenus inférieurs au plafond mentionné au présent article ;

« 2° 2 % pour les salariés et 3,8 % pour les employeurs sur la part des revenus strictement supérieurs au plafond mentionné au présent article. »

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 2630 rectifié bis, présenté par M. Féraud, Mme Lubin, MM. Kanner et Raynal, Mme Briquet, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, P. Joly et Lurel, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le taux de ces cotisations est fixé à :

« 1° 0,40 % pour les salariés et 1,90 % pour les employeurs sur la part des revenus inférieurs au plafond mentionné au présent article ;

« 2° 1 % pour les salariés et 4,8 % pour les employeurs sur la part des revenus strictement supérieurs au plafond mentionné au présent article. »

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Mme Isabelle Briquet. Cet amendement du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à créer, au bénéfice de l’assurance vieillesse, une surcotisation sur les hauts salaires pour résorber le déficit temporaire du système de retraite lié au papy-boom.

Il existe aujourd’hui dans le droit une contribution des hauts salaires, versée par les employeurs et les employés, pour financer les systèmes de retraite de l’assurance vieillesse et de l’assurance veuvage.

À nos yeux, ce dispositif présente un véritable intérêt : il fait contribuer à la fois les employés et les employeurs, dans un contexte où le Gouvernement entend réduire encore et toujours la contribution des entreprises à notre vivre ensemble.

De manière temporaire, le papy-boom va entraîner un déséquilibre de ces assurances, ce qui légitime, aux yeux du Gouvernement, une contraction des droits sociaux de nos concitoyens.

Selon nous, cette analyse est à la fois partielle et partiale. Nous estimons au contraire qu’il est possible de relever le niveau des cotisations pour assurer la solidarité nationale.

Je précise que le mécanisme proposé ne concerne que les salaires mensuels supérieurs à environ 3 650 euros et qu’en deçà de ce seuil l’on continuerait d’appliquer le taux en vigueur. C’est bien pourquoi nous parlons de surcotisation sur les hauts salaires au bénéfice de l’assurance vieillesse.

La politique est l’art de faire des choix : nous estimons que, si ce geste de solidarité nationale peut éviter la dégradation de la situation de millions de nos concitoyens, il s’agit clairement d’une avancée.

M. le président. L’amendement n° 4284 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, après les mots : « ces cotisations », sont insérés les mots : « , qui ne peut être inférieur à 2,44 % pour les salariés et 4,24 % pour les employeurs, ».

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Mes chers collègues, chacun d’entre vous devrait trouver son bonheur parmi les amendements qui suivent. Comme vous le savez, nous sommes des militants des jours heureux !

Nous proposons de relever le taux des cotisations sociales déplafonnées.

Nous avons calculé l’effet de ces dispositions sur le traitement de l’un de nos collaborateurs de groupe, que nous rémunérons – vous vous en doutez – bien au-dessus du salaire médian. Le salaire brut de cotisations salariales auquel cette cotisation salariale s’appliquerait s’élève à 3 745 euros.

On est loin du « matraquage fiscal » – formule que l’on entend régulièrement – auquel on voudrait nous faire croire : la part socialisée du salaire de ce collaborateur serait de 148 euros par mois. Pour une travailleuse ou un travailleur au salaire médian, elle serait d’environ 90 euros par mois. Nous présenterons ensuite des amendements tendant à instaurer des taux moindres.

Monsieur le ministre, au sujet d’un amendement de ce type, vous affirmiez en vous adressant à notre groupe : « C’est priver les salariés de pouvoir d’achat. Avec vous, c’est contre les salariés qu’il y aurait potion amère et hold-up ! »

Gardons notre calme, s’il vous plaît. En augmentant les cotisations, nous augmentons les salaires socialisés. En augmentant les cotisations déplafonnées, nous faisons peser l’effort sur les plus hauts revenus, même si je sais bien que cela ne vous plaît pas beaucoup. En augmentant les cotisations, nous augmentons les pensions de retraite et nous préservons notre système de retraite.

Pour votre part, vous proposez uniquement de repousser l’âge de départ, ce qui revient à priver de leurs meilleures années de retraite les travailleuses et les travailleurs de notre pays. Vous créez une machine à décote, une machine à exclure, une machine à pauvreté.

M. le président. Mon cher collègue, considérez-vous que les autres amendements de cette série sont également défendus ? (Protestations sur les travées du groupe CRCE.)

L’amendement n° 4283 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, après les mots : « ces cotisations », sont insérés les mots : « , qui ne peut être inférieur à 2,43 % pour les salariés et 4,23 % pour les employeurs, ».

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Il faut prendre en compte à la fois le salaire net, le salaire brut et les cotisations sociales patronales : c’est cet ensemble qui constitue le salaire. Chaque exonération de cotisations sociales patronales est donc, en réalité, une baisse de salaire pour les travailleuses et les travailleurs – on l’oublie souvent, à force de jongler avec les chiffres des salaires bruts et nets.

C’est pourquoi, chaque fois qu’une telle exonération est décidée, nous proposons une augmentation du salaire brut, car c’est le salaire global qu’il faut augmenter.

Puisque nous parlons des recettes, je propose ainsi, dans la même veine que mon collègue Éric Bocquet, d’augmenter légèrement – à un peu plus de 4 % – la part des cotisations déplafonnées pour les salaires supérieurs à 3 666 euros mensuels.

Selon nous, cette mesure participera d’un effort de solidarité nationale et intergénérationnelle tout en augmentant le salaire de toutes et tous.

M. le président. L’amendement n° 4282 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Apourceau-Poly et Cohen, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec et P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Varaillas et M. Savoldelli, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, après les mots : « ces cotisations », sont insérés les mots : « , qui ne peut être inférieur à 2,42 % pour les salariés et 4,22 % pour les employeurs , ».

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Avec ces amendements, nous défendons autant de propositions alternatives pour assurer l’équilibre du régime de retraite, aujourd’hui en débat.

Monsieur le ministre, le Gouvernement assure que nous sommes face à de lourds problèmes de financement ; or, selon nous, les ressources existent. D’ailleurs, mes deux collègues viennent de vous le prouver.

Vous écartez toute autre solution que le recul de l’âge de départ. Nous contestons cette mesure, qui est au cœur de votre projet de loi, et formulons plusieurs propositions, qui vont dans d’autres directions : à l’évidence, nos deux visions du partage de la richesse s’opposent.

Notre système de retraite par répartition repose sur les cotisations. La pension de retraite s’apparente donc à un salaire socialisé et l’équilibre du système dépend du partage de la valeur ajoutée entre le capital et le travail.

Or, depuis le début des années 1980, la part des salaires s’est effondrée au profit du capital dans le partage de la valeur ajoutée. Le système de financement des retraites s’en trouve nécessairement atteint. En effet, chaque point de PIB qui n’est pas versé en salaires équivaut à un manque à gagner de plus de 1 milliard d’euros de cotisations vieillesse.

C’est précisément ce qui se passe quand vous multipliez les exonérations et les baisses de cotisations.

Mes chers collègues, l’augmentation du taux de la cotisation déplafonnée permettrait d’accroître les cotisations proportionnellement au salaire perçu, alors que les prestations du régime général sont plafonnées. Elle a pour corollaire de faire contribuer relativement plus les salaires dépassant le plafond de la sécurité sociale. Elle permet de compenser partiellement les différences d’espérance de vie entre bas et hauts revenus.

C’est pourquoi, par cette série d’amendements, nous vous proposons d’augmenter la part déplafonnée de la cotisation sociale à l’assurance vieillesse. Ce faisant, l’on comblera le déficit temporaire du système de retraite tout en privilégiant une solution financière qui ne pénalise ni les bas salaires, en deçà d’un revenu mensuel de 3 666 euros, ni les personnes assujetties, tant l’effort demandé est modeste. J’espère que vous accepterez ces propositions.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Pierre Laurent.)