Mme la présidente. Nous allons maintenant examiner l’amendement déposé par le Gouvernement avant d’en venir aux explications de vote des groupes.

articles 1er à 13

Sur les articles 1er à 13, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

article 14

Article 37 quater
Dossier législatif : proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° La section 1 du chapitre II du titre III est complétée par un article L. 132-4-2 ainsi rédigé :

II. – Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

III. – Alinéa 5

Remplacer la référence :

L. 134-19

par la référence :

L. 132-4-2

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Franck Riester, ministre délégué. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Pascal Martin, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Le vote est réservé.

articles 14 bis à 37 quater

Mme la présidente. Sur les articles 14 bis à 37 quater, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 14
Dossier législatif : proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie
Explications de vote sur l'ensemble (interruption de la discussion)

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans le texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre planète brûle. Jamais citation n’aura été si vraie et c’est pourquoi nous saluons les travaux de Mme Loisier, ainsi que des rapporteurs de cette proposition de loi qui contient un grand nombre d’articles.

Les mégafeux de l’an dernier ont emporté près de 70 000 hectares de forêt. Ils appelaient une action du législateur.

Cévennes, Gironde, Bouches-du-Rhône, mais aussi Bretagne aujourd’hui, aucun de nos massifs forestiers n’est à l’abri. C’est une alerte, une traduction concrète du changement climatique. En effet, bien que la saison des feux n’ait pas encore commencé, 1 000 hectares ont déjà brûlé au mois d’avril dernier à Cerbère, dans les Pyrénées-Orientales.

C’est pourquoi nous accueillons favorablement ce texte qui vise à renforcer la capacité de l’État et de ses services, de la sécurité civile et de la population à prévenir et à lutter contre le risque incendie en posant les bases d’une stratégie nationale interministérielle, en abaissant le seuil d’élaboration des plans simples de gestion dans les forêts privées ou encore en imposant l’élaboration d’une carte d’aléas pour cartographier le risque d’incendie.

Nous partageons également la décision d’un renforcement de la sensibilisation des citoyens, élus et professionnels concernés.

De même, nous saluons le renforcement des sanctions en cas de non-respect des obligations de débroussaillement. En effet, la question des zones d’interfaces entre l’habitat et les forêts est essentielle, car, dans ces espaces, le risque de départs de feux est élevé et la difficile protection par les pompiers est coûteuse. Aujourd’hui, pourtant, à peine 30 % d’entre elles sont réalisées. Si les départs de feux sont souvent le fait de comportements humains, l’assèchement de la végétation sous le soleil brûlant facilite les départs, puis le développement de ces feux.

En ce sens, le respect des OLD est un élément majeur d’une politique de prévention. À cet égard, il serait opportun que les communes bénéficient de dispositifs d’accompagnement, y compris financiers, pour faire face à leurs obligations.

Toutefois, malgré des progrès indéniables, ce texte ne propose pas de changement de modèle dans notre approche de la forêt et de sa multifonctionnalité via un plan plus général d’adaptation de la forêt au changement climatique, afin de permettre à la forêt française de jouer pleinement son rôle dans l’atténuation du réchauffement climatique et de ses conséquences. Il nous faut investir dans une politique forestière préventive, qui permettra la résilience de nos forêts, à commencer par la diversification des essences. Les forestiers doivent renouveler les peuplements dépérissants et adapter les forêts françaises en tenant compte des risques futurs.

De plus les moyens restent en deçà des besoins, notamment pour l’ONF, qui a perdu plus du tiers de ses effectifs en vingt ans, alors qu’il gère près de 25 % de la forêt métropolitaine. Des 16 000 salariés que comptait l’Office en 1986, il n’en reste plus que 8 400 aujourd’hui, auxquels l’État continue pourtant de confier un nombre équivalent de missions et desquels il exige une plus grande rentabilité.

Les Sdis, le Centre national de la propriété forestière (CNPF) ou encore Météo-France connaissent la même problématique. Tous manquent des moyens matériels et humains nécessaires à l’accomplissement de leurs missions.

Toujours en matière de moyens, les sapeurs-pompiers soulignent entre autres l’insuffisance du parc de camions-citernes feux de forêt (CCF). Ils chiffrent les besoins à 10 000 camions – ils en ont actuellement 3 700. Avec un coût unitaire moyen de 300 000 euros, un tel investissement est impossible pour les Sdis.

De même, comment oublier qu’en matière de renouvellement de la flotte aérienne le premier canadair n’arrivera pas avant 2028, alors même qu’en 2010 un rapport de la mission interministérielle sur le changement climatique et l’extension des zones sensibles aux feux de forêt préconisait déjà un renforcement des moyens aériens ?

La dimension de la flotte n’a pas augmenté depuis les années 1980, alors que le risque, hier circonscrit au pourtour méditerranéen, s’est étendu à l’ensemble du territoire.

Tout cela, c’est le résultat de politiques austéritaires aveugles à la réalité et de décisions politiques. Ainsi, en 2020, le Gouvernement a retiré le soutien de l’État aux dépenses d’investissement des Sdis ; malheureusement, ce texte n’y remédiera pas.

Malgré ces réserves, le groupe CRCE votera le texte de la commission mixte paritaire.

M. Pascal Martin, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)

Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à peine plus d’un an se sera écoulé entre le lancement de la mission sénatoriale conjointe de contrôle relative à la prévention et à la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie et la promulgation, que nous espérons très prochaine, de ce texte d’initiative sénatoriale, adopté en première lecture à l’unanimité ici même. Je veux saluer l’engagement de tous les groupes sur cette proposition de loi.

Face à l’importance des enjeux, nous nous réjouissons tous que l’objectif d’une loi opérationnelle avant la saison des feux ait pu être tenu.

La version finale de ce texte, dont, je le rappelle, la logique s’inscrit dans une adaptation continue de notre politique de prévention des feux en fonction de l’évolution de l’aléa, conserve la majeure partie des propositions initiales de notre rapport d’information : élaboration d’une stratégie interministérielle et territoriale, nouveaux outils de régulation entre la forêt et ses interfaces, avec les zones habitées et les infrastructures, notamment en matière d’OLD.

S’agissant du volet forestier, le rapport d’information préconisait une forêt mieux gérée pour être moins vulnérable aux risques. Je pense au risque que le feu se développe avant d’être détecté, au risque de ne pouvoir accéder au feu, faute de dessertes aménagées et entretenues, au risque de progression rapide de l’incendie alimenté par une masse de combustible au sol.

L’accord trouvé en commission mixte paritaire préserve les dispositions combinant progrès des pratiques et accompagnement de la filière. Il dessine au final un texte équilibré, à même de répondre à l’extension du risque.

Sont ainsi mis en place des financements publics destinés à l’amont forestier, notamment au reboisement, qui seront assujettis à une écoconditionnalité et à une conditionnalité DFCI, par exemple en termes de diversification ou de respect de zones pare-feu, afin de ne pas répéter les erreurs du passé.

Le seuil à partir duquel il sera obligatoire, pour un propriétaire forestier, de se doter d’un plan simple de gestion, passe de vingt-cinq à vingt hectares, emportant 500 000 hectares supplémentaires dans la gestion durable. Parallèlement, le risque incendie est intégré de façon plus cohérente dans les documents-cadres de la politique forestière.

Nos communes pourront faire valoir, dans des conditions encadrées, un nouveau droit de préemption DFCI sur des parcelles boisées non gérées se situant au milieu d’un couloir de feu, afin de prévenir le risque par une gestion forestière adaptée.

Le taux réduit de TVA pour travaux sylvicoles et d’exploitation forestière est également prorogé de deux ans, jusqu’en 2025.

Enfin, dans une même logique et afin de susciter des travaux de gestion en forêt, le périmètre du dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt (Defi forêt) est étendu aux 24 000 petites propriétés boisées et 210 000 hectares dotés de ce que l’on appelle les codes des bonnes pratiques sylvicoles +, c’est-à-dire dotés d’un programme de coupes et travaux.

Au-delà de ces progrès actés demeurent tout de même des points déterminants sur lesquels nous n’avons pas pu aboutir.

Tout d’abord, les députés n’ont pas voulu faire figurer dans le texte deux puissants leviers financiers, nous privant d’outils opérationnels majeurs pour aider les collectivités locales et les particuliers à faire face au risque incendie.

Ainsi, les collectivités locales mettant à disposition du Sdis leurs salariés ne pourront pas être soutenues financièrement par le biais d’exonérations de charges.

De même, les particuliers, singulièrement les plus modestes, qui sont confrontés à des coûts élevés de premières OLD, ne pourront pas être aidés par un crédit d’impôt incitatif.

Autre point en suspens, le financement de la présence humaine supplémentaire préconisée par ce texte est nécessaire dans nos massifs forestiers. Pour l’ONF, l’hémorragie a été stoppée lors du dernier exercice budgétaire, mais il faudra renforcer les effectifs sur le terrain.

Quant aux missions supplémentaires que nous confions au Centre national de la propriété forestière, elles appellent la création d’une trentaine de postes, tant pour constituer le réseau de référents DFCI prévu par le texte que pour prendre en charge le flux important des nouveaux documents de gestion durable qui seront mis en place.

Avec ce texte que le groupe Union Centriste soutient, nous sommes donc à l’aube de nouvelles adaptations de notre organisation DFCI.

Les règles et principes fixés se mettront progressivement en place dans les territoires et contribueront à construire cette nécessaire « culture du feu » partout dans l’Hexagone.

Notre rôle de législateur sera de veiller avec soin à la bonne application de ce texte, en revenant dès cet automne et l’examen du projet de loi de finances pour 2024 sur les manquements et ajustement nécessaires à son efficacité. (Applaudissements au banc des commissions. – Mme Vanina Paoli-Gagin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. André Guiol, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

M. André Guiol. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, renforcer la prévention et la lutte contre les incendies de forêt est devenu une impérieuse nécessité aujourd’hui.

En 2022, l’Europe a dû faire face à un niveau record de surfaces brûlées par les feux de forêt : plus de 785 000 hectares, soit plus du double de la moyenne enregistrée entre 2006 et 2021.

Nous ne pouvons pas, dans le cadre de cette proposition de loi, ne pas évoquer aussi les gigantesques et dramatiques incendies canadiens qui viennent altérer notre atmosphère et qui, demain, perturberont probablement le climat planétaire.

J’en profite pour saluer l’intervention de nos sapeurs-pompiers qui sont allés prêter main-forte à leurs collègues et à nos amis canadiens. (M. le rapporteur acquiesce.)

Le département dont je suis élu, le Var, n’est, hélas ! pas épargné par les incendies de forêt, et ce depuis longtemps. Il s’agit d’un territoire largement couvert par la forêt, par ses collines, mais aussi d’une région confrontée à une sévère sécheresse.

Les prévisions météorologiques de l’été 2023 annoncent une saison encore plus chaude qu’à l’habitude. Si le mistral fait son apparition, nous craignons de devoir affronter une période encore plus critique.

On compte d’ailleurs, en ce début de saison, déjà plusieurs départs de feu, comme à Grimaud et à Carqueiranne, que la politique de prévention et de vigilance de nos comités communaux des feux de forêts (CCFF) couplée avec la réactivité de nos sapeurs-pompiers ont pu maîtriser.

Il fallait donc s’armer de tous les moyens nécessaires pour faire face à ces crises récurrentes et en voie d’intensification : des moyens humains, matériels et juridiques.

Certes, le Sénat n’a pas attendu pour se mobiliser, puisque nous nous étions déjà engagés dans des travaux relatifs à la lutte contre les incendies, au moyen d’une mission conjointe de contrôle.

Je tiens donc à saluer nos collègues Anne-Catherine Loisier, Jean Bacci, Pascal Martin et Olivier Rietmann de leur investissement à la hauteur de ces enjeux. Il devenait en effet impératif d’élaborer une stratégie nationale et interministérielle de lutte contre les incendies, comme nous devions poursuivre nos efforts afin de mieux réguler les interfaces entre la forêt et les zones urbaines, de dynamiser la gestion forestière tout en respectant la biodiversité et en sensibilisant davantage les populations au risque incendie.

Ce texte doit marquer une meilleure prise de conscience de notre nation face aux catastrophes qui s’intensifient année après année.

Je me réjouis donc que les deux assemblées soient parvenues à trouver un accord en commission mixte paritaire sur un sujet aussi fondamental pour notre sécurité, pour la sauvegarde des biens et pour la préservation de l’environnement, dans un contexte de défis climatiques qu’illustre bien cette proposition de loi.

Nos institutions, et tout particulièrement le Sénat, se sont donc mobilisées pour créer de nouveaux outils et renforcer ceux qui existaient déjà.

Le résultat est imposant : alors que le texte comprenait initialement trente-huit articles, il en compte désormais plus de soixante-dix. Cela montre bien qu’il n’est pas juste un affichage politique. Il est le fruit d’un travail de fond détaillé et approfondi.

J’en profite également pour saluer l’importante contribution de notre collègue Nathalie Delattre, sénatrice de Gironde, également concernée par ces sinistres, dont les travaux imprègnent la proposition de loi que nous nous apprêtons à adopter.

Je pense, en particulier, au renforcement dans l’ensemble du texte du rôle des associations syndicales autorisées de défense des forêts contre l’incendie, notamment en vue d’élaborer une stratégie nationale et interministérielle de défense des forêts et des surfaces non boisées contre les incendies.

Je pense également à son amendement, adopté par notre assemblée, tendant à ajouter les coupes tactiques aux méthodes de lutte contre les incendies auxquelles le commandant des opérations de secours peut recourir.

Nous regrettons cependant, cela vient d’être dit, la suppression du crédit d’impôt pour la dépense de travaux réalisés en application des obligations légales de débroussaillement, notamment sur les terrains voisins des zones naturelles. Un tel dispositif aurait pourtant constitué un outil efficace.

Rappelons qu’il est nécessaire, en vue d’établir une véritable stratégie nationale cohérente, de disposer d’une quatrième unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile, qui serait située dans le sud-ouest du pays, une unité identique à celles de Brignoles, de Nogent-le-Rotrou en Eure-et-Loir, et de Corte, comme l’a annoncé le Président de la République le 28 octobre 2022, après les terribles feux de forêt de Gironde.

Au-delà de toutes ces considérations, cette proposition de loi est une véritable avancée en matière de prévention et de lutte contre les incendies. Gageons qu’elle sera à la hauteur des attentes.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe du RDSE votera cette proposition de loi à l’unanimité. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI. – Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Laurent Burgoa. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 4 avril dernier, nous adoptions ici même, à l’unanimité, la proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie. Ce texte, né des recommandations d’une mission de contrôle, est le fruit d’un important travail sénatorial.

En tant qu’élu d’un département particulièrement concerné par les incendies, permettez-moi de saluer le travail et l’investissement de nos collègues Jean Bacci, président de la commission spéciale sur la proposition de loi, Anne-Catherine Loisier, Pascal Martin et Olivier Rietmann, rapporteurs.

Mieux vaut prévenir que guérir : voilà un adage de bon sens, qui s’applique également en matière de risque incendie.

Les feux hors normes de l’été 2022 et la sécheresse de ces derniers mois n’ont fait que confirmer qu’il était urgent d’agir pour prévenir l’embrasement de nos forêts.

Lors de la réunion de la commission mixte paritaire le 19 juin dernier, nous avons su préserver des avancées notables sur des mesures stratégiques et, surtout, opérationnelles.

Nous pouvons ainsi nous féliciter de la mise en place de nouveaux outils de régulation entre les espaces forestiers et les zones habitées, ou encore les surfaces agricoles, grâce à la clarification des OLD.

Plusieurs aides fiscales sont instaurées : l’exonération de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), c’est-à-dire de la taxe sur le carburant, pour les véhicules des services d’incendie et de secours. Aux yeux de nos concitoyens, cette taxe devait apparaître comme une aberration.

Par ailleurs, le dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt est étendu à 24 000 petits propriétaires.

Nous pouvons également nous réjouir de la mise en place, contre les incendies, d’une stratégie interministérielle et territoriale de défense des forêts, mais aussi des surfaces non boisées.

Soulignons aussi la mise en place d’un cadre réglementaire adaptable, ainsi qu’une intégration plus cohérente du risque incendie dans la gestion de nos forêts.

Néanmoins, et comme souvent lors d’âpres négociations, les avancées obtenues sont aussi teintées de regrets, mais pas de remords, monsieur le ministre !

À cet égard, nous ne pouvons qu’être déçus par l’absence dans le texte final de deux mesures auxquelles le Sénat était attaché et pour lesquelles nous avons bataillé jusqu’au bout. Force est de reconnaître que l’Assemblée nationale s’est montrée peu constructive, alors même que nous lui avions proposé plusieurs compromis.

Ainsi, en tant que défenseurs des collectivités territoriales, nous regrettons l’exclusion de ces dernières du dispositif de réduction des cotisations patronales accordé en contrepartie de la mise à disposition d’employés sapeurs-pompiers volontaires.

Par l’exclusion des collectivités, notamment les communes rurales, pour lesquelles une telle mise à disposition constitue une charge non négligeable, la sécurité civile se trouve privée d’un vivier considérable de sapeurs-pompiers volontaires, au nom de considérations budgétaires court-termistes. Je rappelle que les études sur la valeur du sauvé montrent qu’un euro investi dans la prévention et la lutte contre les feux de forêt en rapporte vingt à vingt-cinq fois plus. Il faudrait que Bercy le comprenne !

Enfin, pour le Gardois que je suis, il a été difficile de prendre acte du retrait du texte du crédit d’impôt pour les dépenses réalisées en application des obligations légales de débroussaillement, les fameuses OLD.

La création de ce crédit d’impôt, adopté à l’unanimité par le Sénat, aurait provoqué un électrochoc et incité les propriétaires à répondre à ces obligations.

Comme d’autres, je tiens à le rappeler ici : seulement 30 % de ces obligations sont aujourd’hui respectées alors même que leur efficacité n’est plus à démontrer. Bien sûr, il peut parfois s’agir d’irresponsabilité, mais, croyez-en les témoignages que j’ai reçus lors de mes déplacements dans le Gard, il s’agit bien plus souvent soit d’une ignorance de la réglementation en elle-même, soit, bien plus couramment, d’un manque de moyens. D’ailleurs, qui ne voudrait pas mieux protéger son domicile contre les incendies ?

Alors oui, ce crédit d’impôt aurait constitué un véritable coup de pouce pour les foyers les plus modestes, pour qui ces travaux représentent un coût bien trop élevé.

Étant de nature optimiste – il le faut bien ! –, j’aime à croire que les graines que nous avons plantées au cours de cette navette parlementaire pourront prochainement porter leurs fruits, notamment lors des débats de l’automne prochain sur le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. En tout cas, nous serons au rendez-vous !

En conclusion, mes chers collègues, malgré ces regrets, le groupe Les Républicains votera ce texte, car, comme le formulait l’abbé Pierre : « On ne peut pas, sous prétexte qu’il est impossible de tout faire en un jour, ne rien faire du tout. » (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Vanina Paoli-Gagin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en avril dernier, lors de l’examen en première lecture de ce texte, j’introduisais mon propos en alertant sur le fait que l’été passé serait malheureusement notre avenir. Il est même notre avenir immédiat. Notre sécheresse estivale s’est transformée en sécheresse hivernale. Les violents feux de forêt de cet été ont tristement cédé la place aux feux de cet hiver.

Nous ne cessons de le répéter : plus aucun territoire n’est épargné. L’adaptation n’est plus une option, c’est une urgence. Plus aucun citoyen ne peut ne pas se sentir concerné par ce défi majeur. La prévention est l’une des pièces maîtresses de la lutte contre les incendies. Enfin, nous sommes tous conscients qu’une réaction appropriée, avec des outils renouvelés, agiles et efficaces, est nécessaire.

Le triptyque « adaptation-prévention-réaction » a guidé nos travaux, et je m’en réjouis. Je note que le texte a presque doublé de volume entre son passage au Sénat et son examen à l’Assemblée nationale.

Si je pense que nous avions besoin de réformer en profondeur notre système, je m’interroge tout de même, mes chers collègues, sur l’inflation normative de manière générale, et en particulier sur ce texte.

Si nous voulons gagner en efficacité et déployer les trois grands axes que je viens de citer, nous devons avoir des règles claires, faciles à mettre en place. Nous oublions souvent que nos lois manquent de praticité. C’est pourtant primordial pour ceux qui les appliquent au jour le jour.

Je pense à nos élus, ainsi qu’à nos combattants du feu, et à notre sécurité civile dans sa globalité. En matière de risque incendie, chaque minute compte. Des outils trop complexes ne peuvent constituer un frein.

Je salue les travaux préparatoires, sous la houlette d’Anne-Catherine Loisier, qui nous ont menés, au Sénat, à la discussion de cette proposition de loi et à la construction législative que nous avons aménagée. Je me félicite que nous soyons arrivés rapidement à un accord sur ce texte. Il est équilibré. Le volet réglementaire, monsieur le ministre, devra intervenir très rapidement.

Les annonces faites depuis le 28 octobre dernier me semblent aller dans le bon sens. Les préconisations du rapport sur la modernisation de la sécurité civile et la protection contre les risques majeurs seront sûrement des pistes de réflexion intéressantes pour poursuivre notre travail.

Le renforcement des moyens financiers, matériels et humains est une bonne nouvelle. Le fonds vert, les informations délivrées aux élus, aux propriétaires et aux citoyens sont une étape essentielle. À cet égard, je salue particulièrement la météo des forêts introduite par Météo-France. Savoir, c’est anticiper. Notre vigilance via ce type d’outils est renforcée.

En première lecture, j’avais évoqué la sensibilisation des citoyens et des propriétaires à la fois sur l’interdiction de fumer dans les forêts et à leurs abords, qui doit devenir un réflexe, comme l’on met sa ceinture en entrant dans un véhicule. Il en est de même pour les obligations légales de débroussailler, qui constituent l’un des points centraux de la proposition de loi.

Je me réjouissais en avril dernier de la pérennisation du dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement en forêt, que nous avions déjà prolongé dans le dernier projet de loi de finances. Le texte de la commission mixte paritaire propose de le prolonger de nouveau jusqu’en 2027. Nous devrons néanmoins remettre ce point sur le métier et resterons vigilants à cet égard.

Nous avons bien observé le rôle décisif des agriculteurs dans la lutte contre les incendies. Je trouve ainsi tout à fait logique de les associer à différentes étapes, notamment via les chambres d’agriculture sur les plans de protection et de prévention. De plus, l’inclusion des surfaces agricoles dans la lutte contre les incendies marque leur connaissance de la complexité de nos territoires.

Cette proposition de loi est tellement riche, mes chers collègues, que je ne pourrai bien évidemment pas évoquer tous ses points, en particulier les mesures visant les salariés sapeurs-pompiers volontaires, que je trouve facilitatrices.

Je clôturerai mon propos en vous disant qu’il reste encore beaucoup à faire, malgré le travail qui a déjà été fourni. Je pense qu’il est particulièrement important, sous un angle structurel, de travailler sur le morcellement de nos forêts. Nous le faisons dans l’Aube, sous la houlette du pôle d’équilibre territorial et rural Othe-Armance afin de reprendre la main sur nos forêts et parcelles de forêts qui sont des biens sans maître ou abandonnées. Faisons une force de ce qui constitue aujourd’hui une faiblesse dans notre système. Il appartient aux élus locaux et au législateur de trouver des solutions adaptées.

La forêt souffre. Elle est pourtant l’un de nos meilleurs alliés dans la lutte contre le changement climatique et pour la protection de la biodiversité. Les dernières nouvelles sont alarmantes : dans le Grand Est – je suis élue dans l’Aube –, nos forêts commenceraient à émettre du CO2.

Ce texte est un espoir, mais ne nous trompons pas, mes chers collègues, l’action doit se poursuivre. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte à l’unanimité. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)