Seule parlementaire encore en fonction parmi les quatre rapporteurs de la proposition de loi à l’Assemblée nationale et au Sénat, Mme Anne Chain-Larché est rapporteure de cette mission, dans la continuité de ses travaux de l’automne 2021 lors de l’examen du texte, et sur le fondement de l’article 19 bis B du règlement du Sénat.

Lancée en décembre 2022, un an après la promulgation de la loi « maltraitance animale », la mission a rendu son rapport le 7 juin 2023.

Pourquoi ce contrôle ?

Après des débats marqués par des postures idéologiques et une prise à témoin systématique des franges les plus militantes de l’opinion publique, la commission mixte paritaire sur cette proposition de loi avait malgré tout été conclusive. Mais elle l’avait été au prix de divergences d’interprétations voire de malentendus sur certaines des dispositions les plus emblématiques et les plus radicales de la loi, dont témoigne le grand écart de communication entre l’Assemblée nationale et le Sénat au sortir de cette CMP. Ainsi, ce travail de contrôle devrait permettre de clarifier plusieurs notions-clés de la loi :

  • sur l’interdiction des cirques itinérants avec animaux sauvages, la rapporteure s’intéressera de près aux contours concrets du principe « pas d’interdiction sans solution » fixé dans la loi ;
  • s’agissant de la période de transition avant l’entrée en vigueur de certaines dispositions, soucieuse de l’ordre public et du bien-être animal, la rapporteure demandera aux ministres chargés de l’application de la loi de renforcer l’accompagnement des professionnels du cirque et à faciliter leur activité, dans le respect de la loi, d’ici à 2028 ;
  • sur l’interdiction de la captivité de cétacés, la rapporteure veillera à ce que la notion de « programme scientifique », qui permet de déroger à l’interdiction, soit définie par voie réglementaire de façon suffisamment fine.

Un an après la publication de la loi au journal officiel, le travail de contrôle vise plus généralement à s’assurer du caractère opérationnel de l’application de cette loi, qui compte cinquante articles, dans des champs très variés, modifiant le code rural et de la pêche maritime, le code de l’environnement mais aussi le code pénal.

De nombreux principes fixés dans cette loi d’initiative parlementaire sont encore en attente d’une traduction réglementaire. La commission des affaires économiques du Sénat poursuit donc, en lien avec les professionnels du monde animal et les associations de protection animale, son travail d’anticipation et de suppression des effets de bords, qui risqueraient de nuire aux animaux eux-mêmes malgré les bonnes intentions initiales.

La rapporteure est convaincue que grâce à une collaboration en bonne intelligence entre pouvoirs législatif et exécutif, il sera possible de faire de ce texte une loi pour les animaux, et pas seulement une loi pour les animalistes.

Quels constats et recommandations ?

À l'issue d'un nouveau cycle d'auditions, la rapporteure Anne Chain-Larché déplore que 14 textes réglementaires manquent et formule 16 observations sur la faune sauvage captive et sur les animaux de compagnie, qui lui semblent spécialement urgentes pour garantir que la loi soit bien une loi pour les animaux et non pour les animalistes.

Elle appelle à respecter pleinement les échéances et garde fous fixés par le législateur afin de garantir une application la plus sereine possible : accompagnement financier des cirques et aides pour se fixer, stabilisation du cadre normatif pour les parcs aquatiques accueillant des cétacés, autorisation d'exercer plusieurs jours à distance pour les voleries...

Le rapport d'Anne Chain-Larché affirme que la protection des animaux de compagnie par des mesures pragmatiques devrait être le seul horizon des pouvoirs publics, par delà les considérations idéologiques ou médiatiques. Il souligne que les progrès à attendre dans la lutte contre la maltraitance - et y compris l'abandon - des animaux de compagnie viendront du renforcement des contrôles par une hausse des moyens dédiés, plutôt que de l'édiction de nouvelles règles ou interdictions à moyens constants.

À cette fin, la rapporteure a souhaité formuler des recommandations sur six points d'attention en particulier, trois pour les animaux sauvages captifs et trois pour les animaux de compagnie :

Les animaux sauvages captifs

Garantir une acception suffisamment large de la notion de « programme scientifique », pour assurer une pérennité de l'activité et une visibilité d'au moins quatre ou cinq ans pour les parcs aquatiques (recommandation n° 2).

Augmenter l'enveloppe provisionnée pour l'accompagnement des professionnels du cirque, afin de garantir une transition la plus sereine possible en sortant les circassiens du désarroi, et exiger en contrepartie la transparence sur le nombre d'animaux sauvages captifs pour un meilleur suivi (recommandation n° 4).

Exempter clairement les voleries des interdictions visant les spectacles itinérants avec animaux sauvages en définissant pour elles un régime spécifique - soit en modifiant l'arrêté du 25 mars 2004 relatif aux zoos, soit, de préférence, en prenant un arrêté spécifique à cette activité (recommandation n° 7).

Les animaux de compagnie

Retirer les lapins et les furets du champ des animaux concernés par le certificat d'engagement et de connaissance et par le délai de réflexion de sept jours avant l'acquisition d'un animal de compagnie (recommandation n° 9).

Demander à l'Observatoire de la protection des animaux de compagnie de procéder enfin à une étude évaluant l'impact de l'interdiction de la vente des chats et chiens en animalerie sur les abandons ; dans le même temps, procéder à une évaluation du coût économique de cette interdiction pour les professionnels (recommandation n° 11).

Augmenter les moyens dédiés au contrôle des services vétérinaires, pour alimenter en dossiers l'unité spécialisée dédiée à la maltraitance animale qui vient d'être créée au sein de la police (recommandation n° 14).