Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte européen
Examen : 07/10/2009 (commission des affaires européennes)

Ce texte a fait l'objet de la proposition de résolution : n° 23 (2009-2010) : voir le dossier legislatif


Institutions européennes - Budget communautaire

Rapport d'information de M. Denis Badré sur l'évaluation de l'activité des agences européennes 1(*)

(Réunion du mercredi 7 octobre 2009)

Le développement des agences européennes n'est plus un phénomène marginal. Il soulève non seulement des problèmes de maîtrise des moyens budgétaires qui sont alloués aux agences, mais aussi de respect du principe de subsidiarité puisqu'il complique les relations entre la Commission européenne, les États membres, les agences européennes et les agences nationales.

Le débat sur les agences européennes n'est pas nouveau, mais il était surtout focalisé sur la place qu'elles devaient occuper dans le paysage institutionnel de l'Union européenne. L'accord interinstitutionnel proposé par la Commission européenne en 2005 n'avait pas reçu de suite de la part du Conseil, qui avait estimé qu'il était dépourvu de base juridique.

Cette question institutionnelle demeure entière. En mars 2008, la Commission a présenté une communication, intitulée Agences européennes - Orientations pour l'avenir, dans laquelle elle « estime que le moment est venu de rouvrir le débat sur le rôle des agences et sur leur place dans le système de gouvernance de l'UE ». Ce débat gagnerait toutefois à aller plus loin et à aborder la question des moyens des agences et de l'amélioration de leur gestion, ainsi que celle du respect du principe de subsidiarité.

En effet, notre attention a été appelée par la progression très importante des moyens alloués aux agences, d'autant plus que l'usage de ces ressources toujours croissantes ne semble faire l'objet d'aucun contrôle véritable. Cette analyse a été confirmée par le rapport spécial que la Cour des comptes européenne a consacré, en juillet 2008, à l'évaluation des agences et qui a mis en évidence les lacunes de celle-ci.

Il m'a semblé important, compte tenu du sujet, que mon rapport soit établi au nom de la commission des finances et de la commission des affaires européennes. Pour ce rapport, j'ai effectué un déplacement à Bruxelles, où j'ai rencontré un conseiller de notre représentation permanente, un membre du cabinet de la commissaire européenne de l'époque en charge du budget, ainsi que plusieurs fonctionnaires de la Commission européenne, issus de différents services. Cette réunion a d'ailleurs donné l'occasion à ces fonctionnaires communautaires de travailler ensemble, ce qui n'est probablement pas toujours le cas. Je suis ensuite allé à Lisbonne, où se trouve le siège de deux agences européennes, l'Observatoire européen des drogues et toxicomanies et l'Agence européenne de sécurité maritime, puis à Angers, où se trouve l'Office communautaire des variétés végétales, qui présente la particularité d'être une agence auto-financée. Enfin, j'ai entendu, à Paris, la direction du budget, les correspondants nationaux des deux premières agences précitées, la direction des affaires maritimes et la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT), ainsi que la directrice française de l'Agence européenne pour la sécurité des aliments, dont le siège se trouve à Parme.

La banalisation du recours aux agences comme mode de fonctionnement institutionnel de l'Union européenne évoque un phénomène d' « agenciarisation ». Les agences, en effet, occupent une place grandissante dans le paysage institutionnel de l'Europe. Elles ne relèvent toutefois pas d'un statut juridique unique. Il existe deux principales catégories d'agences :

- les agences de régulation, dites aussi agences décentralisées car leurs sièges sont répartis sur le territoire de l'Union européenne, sont des organismes de droit public européen distincts des institutions communautaires et dotés d'une personnalité juridique propre, sans limitation de durée. Il n'existe pas, en effet, de dispositions générales régissant la création et le fonctionnement des agences de régulation. Ce sont les agences de régulation qui font l'objet de l'essentiel de mon rapport ;

- les agences exécutives sont des organismes institués par la Commission dans le but d'exécuter tout ou partie de programmes communautaires pour le compte de celle-ci, sous son contrôle et sa responsabilité. Ces agences sont également dotées de la personnalité juridique, mais leur existence a une durée déterminée. Leur siège est généralement établi à Bruxelles.

Il existe par ailleurs des entreprises communes chargées de la mise en oeuvre de projets de recherche et l'Institut européen d'innovation et de technologie (IET).

Le nombre d'agences a considérablement augmenté depuis l'institution de la première d'entre elles, en 1975. Il existe actuellement 43 organismes assimilés aux agences, dont 26 agences de régulation, qui illustrent le démembrement de l'administration communautaire. La multiplication du nombre d'agences a pris une ampleur considérable au cours des dernières années, en particulier depuis les années 1990, et s'est encore accélérée au cours des premières années de cette décennie.

Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène : l'accroissement progressif des compétences de l'Union européenne, en particulier le développement du marché intérieur ; les élargissements successifs, chaque État membre revendiquant son agence, dont le siège se situe parfois dans des villes mal desservies par les transports, Vilnius ou Héraklion par exemple ; la volonté de dépassionner un antagonisme d'ordre politique en « technicisant » le débat ; la survenue de crises majeures qui ont fait apparaître un besoin de sécurité, en matière sanitaire ou écologique par exemple ; la recherche d'une plus grande réactivité et d'une plus grande souplesse de gestion, les services de la Commission étant tenus au respect de procédures plus lourdes.

La taille des agences est très variable. Celles-ci se voient confier des tâches multiples, telles que l'adoption de décisions individuelles produisant des effets juridiques contraignants à l'égard des tiers, la fourniture d'une assistance directe à la Commission et, le cas échéant, aux États membres, la réalisation d'activités opérationnelles - c'est le cas de l'Agence européenne pour la sécurité maritime -, la collecte, l'analyse et la mise en réseau d'informations - par exemple par l'Observatoire européen des drogues et toxicomanies.

La création de nouvelles agences intervenant dans des domaines parfois relativement proches d'autres pose la question d'éventuels recoupements de compétences. Il m'a même été indiqué que cette situation pouvait amener les agences à prendre des décisions parfois contradictoires.

L'existence des agences soulève la question du positionnement institutionnel de celles-ci. Elles sont en effet chargées de préparer, sur le plan technique, les décisions de la Commission, mais sont-elles vraiment autonomes dès lors que la Commission siège à leur conseil d'administration ? Au contraire, quelle est la marge de manoeuvre de la Commission au moment de décider ? La tentation peut être grande pour celle-ci de s'en remettre systématiquement aux avis des agences, dont l'autonomisation sera alors grandissante, avec le risque d'une déresponsabilisation du politique.

J'ai également souhaité étudier les relations des agences européennes avec les États membres et leurs administrations. Ces relations sont, ici aussi, très hétérogènes. La plus-value des agences européennes par rapport à l'échelon national est inégale. Certaines agences ont des missions exclusives, qui ne se retrouvent pas au niveau des États membres. Le plus souvent, ces missions sont cependant complémentaires de celles des administrations et des agences nationales. Il peut aussi exister des cas de doublons, tous les États membres n'allouant pas les mêmes ressources administratives aux politiques publiques entrant dans le champ de compétences de telle ou telle agence. L'enchevêtrement des compétences entre les services de la Commission, les administrations nationales, les agences européennes et les agences nationales brouille l'appréciation que l'on peut avoir du respect du principe de subsidiarité.

La multiplication du nombre d'agences couvrant un champ de compétences de plus en plus vaste s'est logiquement traduite par une augmentation considérable des moyens qui leur sont alloués. Cette évolution a pris une telle ampleur au cours des dernières années qu'elle conduit à se demander si elle demeure maîtrisée.

Je ne souhaite pas multiplier les données chiffrées, me permettant de vous renvoyer sur ce point à mon rapport écrit.

Je rappelle simplement que les agences sont financées par une subvention du budget communautaire ou par des ressources propres ou par une combinaison des deux. La subvention aux diverses agences s'établit à environ 1,28 milliard d'euros en 2009, dont 537 millions pour les seules agences de régulation. Leurs budgets varient dans des proportions importantes, l'hétérogénéité des agences se retrouvant également en matière budgétaire. Les modalités du calibrage des subventions versées aux agences apparaissent largement perfectibles. En particulier, l'exécution du budget et les résultats des exercices précédents ne sont pas suffisamment pris en compte. Dans ces conditions, la plupart des agences présentent un excédent de trésorerie. La Commission a toutefois indiqué que, à l'avenir, le surplus de trésorerie serait déduit chaque année de la subvention des agences.

La subvention versée aux agences par le budget communautaire représente environ 1 % de celui-ci. En comparaison, leurs effectifs sont bien plus importants, puisque leur part constitue à peu près 15 % des effectifs des différentes institutions de l'Union européenne. Les diverses agences européennes disposent en 2009 de près de 6 500 emplois, dont plus de 1 600 contractuels. Ces effectifs ont connu une très forte progression en quelques années seulement. Entre 2004 et 2009, les agences européennes ont vu leurs personnels croître de plus de 160 %. En cinq ans, le nombre d'emplois dans les agences de régulation a plus que doublé ; il a été multiplié par plus de douze dans les agences exécutives. Enfin, on peut constater, parallèlement, une augmentation des effectifs de la Commission.

Alors que les moyens dont bénéficient les agences ont considérablement augmenté en quelques années seulement, leur contrôle et l'évaluation des résultats obtenus comportent des lacunes.

Jusqu'à une date récente, les données budgétaires concernant les agences étaient très parcellaires, voire quasi inexistantes. Seule une forte pression du Conseil a permis d'obtenir des informations budgétaires plus précises.

Quant au système d'évaluation des agences, il semble « tourner à vide ». Les carences en matière d'appréciation des résultats relevées par la Cour des comptes européenne, dans son rapport spécial de juillet 2008, ont mis en évidence les limites des modalités des évaluations existantes. Les agences font l'objet de diverses évaluations, internes et externes, ex ante et ex post. Ces évaluations font elles-mêmes régulièrement l'objet d'une analyse d'ensemble, dite méta-évaluation. La portée de ces évaluations demeure toutefois limitée. Comme l'a relevé la Cour des comptes européenne, les conseils d'administration des agences, auxquels les conclusions des évaluations sont transmises, se sont globalement peu préoccupés par les suites qui leur ont été données.

Quant au Parlement européen, il donne la décharge à la Commission pour l'exécution de son budget, et donc aux agences dont les crédits sont inscrits au budget de la Commission, alors même que la gestion de certaines agences fait l'objet de critiques parfois sévères, dont il n'est donc tiré aucune conséquence.

Le caractère récurrent des critiques mettant en évidence les insuffisances de la portée des évaluations des agences a conduit la Commission et le Conseil à présenter un certain nombre de propositions traduisant une volonté de progresser vers une meilleure gestion des agences.

D'une part, la Commission a annoncé, dans sa communication du 11 mars 2008, qu'elle procéderait à une évaluation approfondie des agences de régulation, dont les résultats seront présentés d'ici la fin de l'année ou en 2010. Il convient de noter que la Commission a indiqué qu'elle n'envisageait pas de créer de nouvelles agences tant que cette évaluation ne serait pas terminée, cet engagement ne prenant pas en compte les nouvelles agences dont l'institution a déjà été décidée. Pour le Conseil, il est important que cette évaluation ne constitue pas un exercice théorique supplémentaire et qu'elle se traduise au contraire par des résultats concrets, à la fois en termes budgétaires et de gouvernance.

D'autre part, la Commission a mis en place un groupe de travail interinstitutionnel sur les agences de régulation, qui réunit à ses côtés le Parlement européen et le Conseil, et qui doit discuter d'une approche commune applicable aux agences de régulation. C'est dans ce cadre que les principales décisions sur les agences devraient être négociées.

Compte rendu sommaire du débat

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances :

Le rapporteur général de la commission des finances avait déjà dénoncé, au niveau national, ce phénomène « d'agenciarisation », qui se développe maintenant au niveau européen. Les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ont également engagé des travaux sur les relations entre les agences européennes intergouvernementales et les agences nationales. Je pense à un rapport récent sur l'articulation entre l'Agence spatiale européenne et le Centre national d'études spatiales français. L'activité des agences européennes vous paraît-elle apporter une réelle valeur ajoutée ?

M. Denis Badré :

Les agences européennes se dotent de personnels qui sont généralement de vrais experts dans leur domaine d'activités, reconnus comme tels par leurs pairs. Ces experts sont d'ailleurs souvent les seuls dans leurs États membres d'origine à disposer de ces compétences. Il n'en demeure pas moins que, étant soumis à un contrôle politique pour le moins ténu, ils ont tendance à l'autonomisation. J'ai bien ressenti cette situation lors de mon déplacement à Lisbonne, au siège de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies et de l'Agence européenne pour la sécurité maritime.

M. Hubert Haenel :

Les conclusions de notre rapporteur me satisfont d'autant plus que la commission des affaires européennes s'inquiète depuis plusieurs années de la prolifération d'agences aux statuts hétérogènes, qui bénéficient d'une subvention communautaire d'un montant total de 1,3 milliard d'euros par an. Au-delà de ces incidences budgétaires, le développement des agences appelle aussi notre attention sur le respect du principe de subsidiarité.

Plusieurs membres de la commission des affaires européennes ont, il y a quelques années, effectué un déplacement à La Haye, où se trouve le siège de deux agences, Europol et Eurojust, dont les personnels font du bon travail. Je rappelle que le traité de Lisbonne permettra aux parlements nationaux d'être associés au contrôle des activités d'Europol et à l'évaluation des activités d'Eurojust. J'observe également que nous éprouvons de grandes difficultés à obtenir du gouvernement des informations sur la façon dont ce contrôle et cette évaluation conjoints aux parlements nationaux et au Parlement européen seront organisés.

A l'occasion de la dernière COSAC, qui s'est tenue à Stockholm hier et avant-hier, le phénomène de la comitologie a été évoqué. Je rappelle qu'il s'agit d'environ 300 comités réunissant des experts nationaux, amenés à prendre environ 2000 décisions de nature prétendument technique, souvent en dehors de tout contrôle politique. Or, les affaires récentes des profils nutritionnels et du vin rosé obtenu par coupage ont montré que ces comités pouvaient prendre des décisions éminemment contestables.

M. Jean Arthuis :

Je voudrais savoir si l'on dispose des comptes consolidés de l'ensemble des agences européennes, auxquelles une subvention communautaire de 1,3 milliard d'euros est allouée cette année et qui bénéficient également, pour certaines d'entre elles, de ressources complémentaires.

M. Denis Badré :

Le budget des agences européennes est effectivement constitué d'une subvention du budget communautaire et, dans certains cas, du produit de redevances. Les informations budgétaires relatives aux agences sont encore lacunaires en dépit de progrès récents.

M. Jean-Claude Frécon :

J'étais loin de me douter de la complexité du phénomène des agences européennes et de l'ampleur des moyens qui leur sont attribués. Des doublons existent indubitablement. Le président Arthuis a évoqué la question du domaine spatial. Pour ma part, je souhaiterais rappeler que l'Union européenne dispose d'une agence des médicaments qui emploie 500 personnes, alors que la qualité des travaux de la Pharmacopée, accord partiel conclu dans le cadre du Conseil de l'Europe, est largement reconnue. Sans doute y aurait-il, dans ce domaine, matière à rationalisation des moyens. En ce qui concerne la comitologie, je considère que de véritables experts vinicoles n'auraient jamais proposé que le vin rosé résulte de coupages de vin blanc et de vin rouge. Enfin, il me semble que la Commission européenne devrait se montrer aussi exigeante pour le recrutement du personnel des agences qu'elle l'est pour l'application de la réglementation applicable aux collectivités territoriales dans les États membres.

Mme Nicole Bricq :

En ma qualité de rapporteur spécial des crédits de la mission Sécurité sanitaire, j'avais effectué, il y a deux ans, un contrôle sur les agences françaises en matière sanitaire. J'observe des similitudes entre les conclusions auxquelles j'avais abouti à l'époque et celles de Denis Badré, notamment en ce qui concerne la prolifération des agences, leur hétérogénéité et les risques de doublons. J'avais noté la puissance de la Direction générale Santé et protection du consommateur (SANCO) de la Commission européenne, qui explique les difficultés à exister de l'Agence européenne pour la sécurité des aliments, dont le siège se trouve à Parme. En application de la loi organique relative aux lois de finances, les emplois des agences françaises sont désormais inscrits en loi de finances. Les agences françaises doivent également respecter les termes des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels qu'elles concluent avec leur ministère de tutelle. Ce système existe-t-il au niveau européen ?

M. Richard Yung :

L'intitulé de certaines agences me paraît peu clair. Je constate que les experts nationaux qui siègent dans les conseils d'administration des agences européennes peuvent travailler dans des agences nationales qui, le cas échéant, se trouvent en concurrence avec ces agences européennes. Je pense par exemple à l'agence chargée de la protection des marques, dont le siège est à Alicante. Selon moi, le ministère des Affaires étrangères devrait s'impliquer davantage dans le fonctionnement des agences européennes. L'attribution du siège des agences donne lieu traditionnellement à des marchandages politiques très compliqués entre États membres. Je m'interroge sur les formes que la mutualisation des moyens de fonctionnement des agences pourrait prendre. Enfin, en ce qui concerne le budget des agences, certaines d'entre elles rétrocèdent à la Commission européenne une partie de leurs ressources propres, celle qui siège à Alicante en est un exemple.

M. Simon Sutour :

D'une manière générale, ce rapport pose la question du contrôle insuffisant des institutions communautaires et du déficit démocratique qui en résulte. Comme l'indiquait le président Haenel, la comitologie a été évoquée lors de la dernière COSAC à Stockholm. J'estime que la réponse de la commissaire Wallström sur ce point, qui a semblé limiter les problèmes à des défauts de communication, n'est pas satisfaisante. Je considère que les experts ont pour mission d'éclairer la prise de décision et non pas de décider eux-mêmes. Je constate toutefois que, dans l'affaire du vin rosé, l'action des parlementaires, notamment français, a permis de faire évoluer les choses dans la bonne direction. Le contrôle démocratique des agences européennes gagnerait à être développé, notamment grâce à une meilleure implication du Parlement européen et des parlements nationaux. Le contrôle des agences ne saurait être limité à celui exercé par les seules directions générales de la Commission.

M. Pierre Fauchon :

Je constate que, si bien des choses restent à faire pour améliorer le fonctionnement des agences européennes, un tel système a aussi des avantages, à condition qu'il soit soumis à un contrôle démocratique. Je me souviens également avoir rencontré des personnels de grande qualité à Eurojust et à Europol. Je me demande si nous n'aurions pas intérêt à entendre un commissaire européen sur cette question.

M. Jean Arthuis :

Quelles sont les principales différences entres les agences de régulation et les agences exécutives ? Je constate qu'il existe également des agences purement intergouvernementales.

M. Denis Badré :

Mon rapport comporte des développements sur cette distinction. Une agence de régulation est une structure autonome instituée sans limitation de durée. Au contraire, une agence exécutive est chargée d'une mission précise et ponctuelle et sa gestion est entièrement assurée par la Commission. Les problèmes soulevés par mon rapport concernent essentiellement les agences de régulation. L'existence de doublons est indéniable et pas seulement au niveau communautaire. Ainsi, je m'étais interrogé sur la création d'une Agence européenne des droits fondamentaux, chargée d'assurer la protection des droits de l'homme, alors que le Conseil de l'Europe détient une véritable expertise en la matière depuis 1949. La mutualisation des moyens de fonctionnement permettrait assurément de réaliser des économies, la plupart des « petites » agences consacrant une part importante de leurs effectifs à la gestion administrative. Enfin, je rappelle que, chaque année, le directeur d'une agence européenne est chargé de coordonner la position des différentes agences dans la procédure budgétaire.

M. Jean Arthuis :

Notre collègue Denis Badré conclut son travail par le dépôt d'une proposition de résolution. Je rappelle qu'aux termes du règlement du Sénat, seuls les membres de la commission des affaires européennes peuvent se prononcer sur ce texte.

A l'issue de ce débat, la commission des affaires européennes et la commission des finances ont autorisé la publication de ce rapport d'information, paru sous le numéro 17 et disponible sur Internet à l'adresse suivante :

www.senat.fr/europe/rap.html

*

Puis, la commission des affaires européennes a conclu au dépôt de la proposition de résolution suivante :

Proposition de résolution

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution ;

Vu la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil intitulée Agences européennes - Orientations pour l'avenir (COM (2008) 135 final),

Vu le rapport d'information de M. Denis Badré fait au nom de la commission des affaires européennes et de la commission des finances sur l'évaluation de l'activité des agences européennes,

Estime que le recours aux agences de régulation doit être encadré par des lignes directrices ;

Demande l'établissement de critères objectifs et préalablement définis pour déterminer le choix du siège des agences de régulation ;

Exige la stricte application des principes de discipline budgétaire et de bonne gestion financière aux agences de régulation ;

Demande que les résultats de l'exécution du budget communautaire soient pris en compte lors de la procédure budgétaire de l'exercice suivant afin d'adapter, éventuellement en les réduisant, les moyens budgétaires et en personnels affectés aux agences de régulation ;

Souhaite la mutualisation des moyens alloués aux agences de régulation au titre des fonctions support ;

Juge indispensable que les agences de régulation :

- disposent d'un contrat d'objectifs et de moyens assorti d'indicateurs de performance permettant de mesurer les ressources mobilisées, les travaux exécutés et les résultats obtenus ;

- se dotent d'instruments de contrôle de gestion ;

- présentent, au cours d'un exercice donné, leurs activités ainsi que leurs comptes et rapports de gestion budgétaire et financière selon des indicateurs communs permettant des comparaisons entre agences ;

- mettent en place des plans d'action visant à donner une suite aux conclusions des évaluations ;

Estime nécessaire que l'ensemble des États membres, via leurs représentants au sein des conseils d'administration des agences de régulation, s'impliquent davantage dans le fonctionnement et le contrôle de ces agences ;

Demande que l'évaluation « horizontale » des agences de régulation entreprise par la Commission européenne procède à un examen systématique de la plus-value de leurs missions par rapport à l'action des États membres, au regard du principe de subsidiarité ;

Considère que ces travaux d'évaluation doivent également aborder la question d'éventuels recoupements de compétences entre agences, dans la perspective d'un rapprochement, voire d'une fusion de certaines d'entre elles ;

Invite en conséquence le Gouvernement à faire valoir ces préoccupations au sein du groupe de travail interinstitutionnel mis en place sur les agences de régulation.


* 1Cette réunion est en commun avec la commission des finances.