On ne doit toucher à la Constitution que d’une main tremblante

Illustration : carte de France et termes © FotoliaFaute de conduire la France sur le chemin de la croissance économique et du retour à l’emploi, peinant à masquer l’absence de ses résultats depuis 3 ans, le gouvernement et sa majorité tentent de faire diversion en projetant de modifier notre équilibre et nos principes constitutionnels.

Ratification de la charte des langues régionales, projet de réforme du Conseil Supérieur de la Magistrature, réflexions sur l’avenir des institutions ou débat sur la proportionnelle pour les législatives, la majorité se situe dans la droite ligne de ce qu’avait fait en son temps François Mitterrand.

Ce révisionnisme constitutionnel de diversion, caractéristique de la gauche française, conduirait à une remise en cause de nos institutions uniquement guidée par l’idéologie entretenue par une partie de la gauche, nostalgique d’une assemblée unique toute puissante fragilisant le Gouvernement.

L’équilibre de nos institutions doit être préservé afin de ne pas avoir à faire face, comme cela a été le cas sous les IIIe et IVe Républiques à une instabilité gouvernementale qui mènerait la France à une situation de blocage.

Le bicamérisme, tel qu’il a été imaginé par Michel Debré et les constituants de 1958, est la garantie de la stabilité de notre régime politique. Le principe fondamental, théorisé il y a près de trois siècles par Montesquieu est plus que jamais d’actualité : on ne doit toucher à nos institutions que d'une main tremblante.

La Constitution de la Ve République ne doit pas être une variable d’ajustement pour les gouvernements en échec. En près de 60 ans, elle a prouvé sa capacité à préserver l’État français en toute situation, même face aux crises les plus graves qu’il ait eu à affronter.
Loin de tout conservatisme, nous devons veiller à ce qu’au-delà des logiques politiques, ce soit en permanence l’intérêt des Français qui prime.

Gérard LARCHER

Dialogue social : un texte gouvernemental à minima



Illustration: dialogue social © FotoliaAprès l'échec des négociations des partenaires sociaux sur la modernisation du dialogue social, en janvier dernier,  le gouvernement a présenté un projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi.
Ce projet est un texte a minima qui, non seulement ne règle pas la question des seuils sociaux qui sont un des freins à la création d’emplois et au développement des TPE/PME, mais il comprend des dispositions nocives, encore renforcées après l’examen à l’Assemblée nationale.

Il en est ainsi de la façon dont la création des commissions paritaires régionales pour les entreprises de moins de 11 salariés a été conçue. En leur donnant un  pouvoir de médiation en cas de conflit dans une très petite entreprise, au lieu d’en faire une instance générale de dialogue et de concertation, on ne tient pas compte des spécificités des TPE.
La sanctuarisation du régime des intermittents n’est pas non plus une bonne chose car elle remet en cause le caractère interprofessionnel de l’assurance chômage.

Le projet de loi comprend aussi des dispositions qui vont dans le bon sens mais il s’agit toujours de demi-mesures. En ce qui concerne les institutions représentatives du personnel, il y a, par exemple, des vraies simplifications. Ainsi pour les entreprises de 300 salariés et plus, un accord majoritaire peut regrouper les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail au sein d’une instance unique. Dans le cas des PME entre 50 et 300 salariés, la délégation unique du personnel est élargie aux entreprises de moins de 300 salariés et elle pourra intégrer les attributions du CHSCT. Le texte clarifie les rôles et compétences respectives du comité central d’entreprise et des comités d’établissement ainsi que des CHSCT et de l’instance temporaire de coordination des CHSCT. Il rend possible la tenue de réunions communes à plusieurs instances. Il simplifie les procédures d’information-consultation et de négociation. Mais tout cela reste insuffisant.

Et si le gouvernement a enfin reconnu que le dispositif qu’il voulait mettre en œuvre pour la pénibilité était une usine à gaz, tant pour les entreprises que pour les salariés, il n’en a pas tiré, malheureusement, toutes les conséquences.

Le Sénat examine le texte issu de l’Assemblée nationale en séance depuis le 22 juin. Il cherche, de façon constructive, à simplifier vraiment tout ce qui peut l’être dans les mécanismes d’information-consultation et de négociation. Il s’attache à améliorer le projet de loi, notamment en réglant la question des seuils, en proposant des solutions sur le dialogue social dans les TPE, la pénibilité ou le régime des intermittents.

La délégation aux entreprises : le Sénat en prise directe avec ceux qui assurent le développement économique de notre pays


Illustration : repousse du métal - entreprises © FotoliaDans le projet que j’ai proposé le 1er octobre 2014 pour le Sénat, je faisais valoir que les territoires sont le vrai berceau de la croissance française et proposais la création d’une délégation aux entreprises.

La création de cette délégation a été approuvée par le Bureau du Sénat le 12 novembre 2014 et celle-ci est opérationnelle depuis le mois de janvier 2015.

Au cours de ses six premiers mois d’existence, la délégation, présidée par Elisabeth Lamure, sénateur du Rhône (Les Républicains), a travaillé de manière pragmatique et concrète pour renforcer les échanges entre les sénateurs et les entrepreneurs : plusieurs réunions et cinq déplacements ont eu lieu, dans des départements aux caractéristiques différentes mais également à l’étranger (Londres), ce qui a permis aux sénateurs de dialoguer avec une centaine de chefs d’entreprise et de mieux comprendre leurs problèmes quotidiens.

La délégation a ainsi pu identifier un certain nombre de points sensibles qui l’ont amenée à enrichir les débats du Sénat lors de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, par exemple sur la simplification de procédures applicables aux entreprises ou sur les seuils sociaux.

La délégation a mené sur ce dernier point un travail approfondi en faisant appel à un institut de recherche allemand réputé, l’IFO, pour analyser les effets des seuils sociaux en comparant les situations française et allemande. C’est en menant de telles études que le Sénat entend améliorer la préparation des textes législatifs et rendre plus objectifs certains débats économiques faisant trop l’objet d’approches idéologiques.
Alors que la France compte un nombre record de 3,5 millions de chômeurs, il est grand temps de briser les tabous !

La délégation a poursuivi cette approche concrète en conduisant une étude sur les bonnes pratiques des collectivités territoriales en matière d’accueil des entreprises et de soutien à leur développement, et en travaillant à une amélioration des études d’impact associées aux dispositions législatives applicables aux entreprises, gage d’une meilleure législation.
Elle utilise également les moyens de contrôle à la disposition du Parlement pour dresser, le 10 juin 2015, un bilan de la circulaire du 17 juillet 2013 relative au gel de la réglementation applicable aux entreprises. Elle sert ainsi d’aiguillon en faveur du développement économique de notre pays, en s’attachant à ce que les annonces du gouvernement soient réellement suivies d’effets.

En appuyant ces démarches parlementaires sur les échanges d’idées et les expériences de terrain, la délégation aux entreprises s’affirme donc comme un outil utile, concret et pragmatique pour renforcer les liens du Sénat avec les entrepreneurs, qui sont les créateurs de richesse et les moteurs de la croissance.
Elle contribue à ce que le Sénat, représentant constitutionnel des territoires, soit leur porte-voix dans leur dimension entrepreneuriale.

Promouvoir les langues régionales sans porter atteinte à l’indivisibilité de la République


Illustration : ilôt de paysage © Fotolia« Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Nul ne saurait contester ce qui figure désormais, depuis la révision constitutionnelle de 2008, à l’article 75-1 de notre Loi fondamentale.

Les langues régionales sont le reflet de l’histoire de la France et de la manière dont elle s’est construite, en sommant ses particularismes pour construire son unité.

Cette unité, la nation l’a définitivement trouvée avec l’ordonnance de Villers-Cotterêts, lorsque François 1er, en 1539, a fait du français la langue officielle du droit et de l’administration, en lieu et place du latin. La France s’émancipait  alors de la tutelle du monde ancien qui l’avait en partie structurée.

Depuis maintenant plusieurs années, conformément aux 39 « engagements concrets » pris par la France, des mesures propices à la préservation et à la vitalité des langues régionales ont été prises, qu’il s’agisse de l’action des autorités publiques, notamment dans le domaine culturel ou éducatif, d’initiatives du milieu associatif ou privé.

Faut-il pour autant aujourd’hui vouloir modifier la Constitution pour ratifier la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires ?

Cette ratification, et la révision constitutionnelle qu’elle impose, ne modifiera en rien la situation concrète des langues régionales, puisque la France a rempli la plupart des 39 engagements qu’elle avait souscrit en 1999. Et si d’aventure, il apparaissait nécessaire de porter l’effort sur un ou plusieurs d’entre eux, nul besoin de changer la Constitution : une loi normale, un décret, voire parfois une simple décision publique suffirait et serait bien plus efficace.

En revanche, la  Charte Européenne des langues régionales ou minoritaires contient, non pas dans la partie relative aux engagements « concrets », mais dans ses articles premiers, une idée fondamentalement étrangère à nos principes républicains, en ce qu’elle confère des droits spécifiques à des groupes particuliers.

Et même s’il s’agit des locuteurs de langue régionale ou minoritaire, à l’intérieur de territoires dans lesquels ces langues sont pratiquées, conférer des droits spécifiques à des groupes particuliers porte un risque : celui du communautarisme.

Après les évènements de janvier 2015, jamais l’importance de l’unité nationale n’a été aussi souvent invoquée par l’Exécutif. Quel sens alors faudrait-il donner à une révision constitutionnelle qui aurait pour conséquence d’affaiblir un des symboles les plus évidents et les plus acceptés de la cohésion de notre Nation : le français comme langue unique de la République.

En 1999, dans l’avis qu’il a rendu au chef de l’Etat, le Conseil Constitutionnel, au sein duquel siégeait des personnes aussi éminentes que Simone Veil, Pierre Mazeau ou Yves Guéna ne disait pas autre chose.

Dans son expression, limpide et synthétique, il affirmait déjà que la ratification de cette Charte était inconciliable avec nos valeurs fondamentales et qu’elle « porterait atteinte aux principes constitutionnels d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi et d'unicité du peuple français ».

La vigilance du Sénat face à la Loi de Programmation militaire

Illustration : soldat français en manoeuvres © FotoliaDepuis 2013, date de la parution du Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale, le Sénat exhorte le Président de la République à prendre des décisions en vue de sauvegarder notre outil de défense et préserver notre industrie, nos chercheurs et nos emplois.
Il pointe les menaces qui pèsent sur notre pays, les évènements du mois de janvier 2015 et la percée de Daech lui donnant raison.

Pour s’assurer de la bonne exécution de la programmation militaire, le Sénat adopte deux clauses de sauvegarde financière, l’une concernant les ressources exceptionnelles avec une compensation intégrale en cas de non réalisation ; l’autre concernant les opérations extérieures avec un financement interministériel automatique au-delà de l’enveloppe de 450 millions d’euros annuels.

Le Sénat adopte aussi une clause de réexamen permettant, en cas d’amélioration de la situation économique, de tendre vers 2 % du PIB consacrés à la défense.

Le 11 novembre 2014, j’adresse une lettre au Président de la République lui demandant que le financement de la loi de programmation militaire soit intégralement garanti dans la loi de finances 2015 et celles qui suivront.

En décembre de la même année, le Sénat rejette, le budget du ministère de la Défense. Les recettes exceptionnelles tirées pour l'essentiel de la vente de fréquences hertziennes de l'armée paraissent trop improbables aux sénateurs de la majorité. De plus ces derniers dénoncent une non-sincérité du budget concernant les opérations extérieures.

Faisant usage des prérogatives qui lui sont conférées en matière de contrôle "sur pièces et sur place », une délégation de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des forces armées du Sénat procède à un contrôle auprès de la direction du Budget, en mars 2015, sur l’organisation tendant à mettre en place les sociétés de projet qui doivent permettre de mobiliser 2,2 milliards d’euros de ressources financières à partir de la location à l’État, de frégates multi-missions et d’avions A400 M.

Après analyse des documents remis et inquiète de ce projet, la commission de la défense demande au Président de la République de faire appliquer son arbitrage en vue d’une sanctuarisation des crédits de la défense à 31,4 milliards d’euros. Début avril 2015, les sénateurs en commission retoquent l'article de la loi Macron qui porte sur les sociétés de projet.

Lors du Conseil de Défense du 29 avril dernier, François Hollande décide enfin de sanctuariser les crédits du ministère de la Défense, sans aucun appel à des ressources extérieures ou exceptionnelles. Les sociétés de projet sont désormais enterrées.
Le Sénat avait donc raison en décembre 2014 et poursuivra son action pour soutenir les efforts de nos armées dans cette période difficile et fera preuve de vigilance lors de l’examen de cette LPM actualisée en juillet prochain.

Réforme des collèges : un passage en force


Illustration : salle de cours © FotoliaLe 20 mai dernier, au lendemain de la mobilisation des professeurs contre le projet de réforme du collège, le Gouvernement a publié, à la surprise générale, les textes relatifs à l’organisation des enseignements dans les classes de collège.
Cet acte qu’il faut bien qualifier d’autoritarisme traduit une nouvelle fois le mépris et le refus du dialogue face aux inquiétudes et aux critiques de l’ensemble des acteurs de l’éducation mais aussi d’intellectuels de toutes tendances politiques.

L’école doit rester « le creuset de la République ». Sa mission est de transmettre des savoirs et de forger un citoyen rationnel et émancipé. Le slogan « la réussite pour tous » ne sert qu’à masquer le renoncement du Gouvernement au principe de méritocratie républicaine. Ce n'est pas en supprimant le latin tel qu'il est enseigné aujourd'hui ou les classes bi-langues, par exemple, que l'on œuvre pour le mérite et la réussite de tous les élèves.

L’important n’est pas non plus de tenter d’intéresser les élèves en proposant de vagues projets interdisciplinaires qui se feront au détriment des connaissances de base qu’il est indispensable d’acquérir et de consolider, ni de proposer plus tôt une deuxième langue à des élèves qui pour un nombre non négligeable rencontrent des difficultés avec la maîtrise du français, c’est d’assurer la maîtrise de la langue et des principaux outils mathématiques à la fin de l’école primaire. Or le devenir des élèves est aujourd’hui scellé très tôt.

C’est pourquoi j’ai demandé, comme nombre d’enseignants, de parlementaires et d’intellectuels de toutes tendances politiques,  l’abrogation des décret et arrêté portant réforme du collège et l’ouverture d’une réelle concertation pour engager une réflexion sur l’avenir du collège et restaurer la confiance dans l’institution scolaire.