Assises de la subsidiarité



Palais du Luxembourg, 24 octobre 2008

Allocution de M. Jean-Pierre JOUYET, Secrétaire d'État chargé des Affaires européennes au nom de la Présidence française de l'Union européenne

Monsieur le Président du Comité des régions, cher Luc Van Den Brande, Monsieur le Vice-président du Sénat, cher Bernard Frimat, Monsieur le Vice-président de la Commission des Affaires européennes du Sénat, cher Denis Badré - qui va animer une bonne partie de ces débats - chère Madame la Vice-présidente de la Commission, chère Margot Wallström, Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs les élus, cher amis, c'est un grand plaisir pour moi et un honneur d'intervenir devant vous lors de ces Assises de la subsidiarité. Comme cela a été très bien dit, la subsidiarité est un enjeu démocratique de premier ordre. Un enjeu qu'il nous faut également borner pour les raisons qui ont été excellemment indiquées par Bernard Frimat, et qu'il faut plus particulièrement définir - et c'est en cela que vos débats seront très utiles - dans la période dans laquelle nous entrons. C'est une période économique et financière beaucoup plus difficile, une période qui va remettre en cause un certain nombre de dogmes et d'idées reçues, et surtout, une période qui va nécessiter que l'on ait un dialogue plus étroit aux différents niveaux de responsabilités, qu'ils soient européens, nationaux ou locaux.

De cela, je suis absolument convaincu, compte tenu de ce que les enjeux liés au développement économique, à l'innovation, à la formation, vont être tout à fait centraux et très politiques. C'est un enjeu pour vos collectivités, c'est un enjeu pour nous, également, représentants de l'État, et c'est un enjeu extrêmement fort pour les institutions communautaires. Donc, je suis très heureux que la Vice-présidente de la Commission, Margot Wallström, ait pu s'associer à nos travaux aujourd'hui. Je suis très heureux que mon ami Michel Delebarre, le Premier Vice-président du Comité des régions et les représentants de collectivités régionales et territoriales des différents États membres de l'Union puissent en débattre. Je salue également, avec amitié, les membres français du Comité des régions, et leur Président, mon ami Jean-Louis Destans qui est là, avec qui nous avons déjà pu débattre de ces sujets, ainsi qu'avec François Loncle, ce matin.

Comme j'ai eu l'occasion de le rappeler lors des Open Days à Bruxelles il y a quelques jours, l'association étroite des collectivités régionales et territoriales m'est toujours apparue comme une condition essentielle d'une construction européenne équilibrée, comprise et démocratique.

Loin de s'opposer, les différents niveaux de responsabilités en Europe se complètent. L'État conserve toute sa légitimité et ses prérogatives; il est vrai que la subsidiarité ne doit pas être un prétexte à renationalisation. Je le dis parce que les temps vont, tout de même, aller dans le sens de certaines tentations dans ce domaine, alors qu'il faut savoir au contraire ce qui, laissé au niveau communautaire, est utile et nécessaire. Les institutions communautaires sont particulièrement nécessaires et les mieux adaptées pour impulser, dans le cadre des compétences qui sont les leurs dans les traités, une action commune à l'ensemble des États membres.

Les collectivités territoriales, enfin, démontrent partout en Europe qu'elles constituent un relais absolument indispensable pour la mise en place de politiques publiques, ainsi que pour répondre aux défis globaux qui sont les nôtres, et qui le demeurent aujourd'hui, en dépit de la crise. Je pense notamment à tout ce qui a trait au développement durable, ou au développement de manière plus large. Et de ce point de vue-là, les collectivités locales et régionales ont un rôle de plus en plus important à jouer.

Cela ne signifie pas que l'équilibre à trouver entre ces différents pôles de responsabilités soit facile. Bernard Frimat y a fait allusion.

Et c'est tout l'intérêt du débat européen sur la subsidiarité; débat qui a commencé, Michel Delebarre le sait bien, il y a déjà plus de vingt ans lorsque la Commission était présidée par Jacques Delors. Au moment de Maastricht, ces premières réflexions existaient déjà, mais elles retrouvent aujourd'hui une actualité beaucoup plus importante. Ce débat est nécessaire, il doit être permanent, et les questions qui se posent doivent être à la fois renouvelées et rester concrètes. De ce point de vue-là, les travaux qui sont conduits par le Sénat sur la subsidiarité sont extrêmement importants. Tout l'intérêt de vos débats réside dans votre capacité à faire émerger un consensus sur un certain nombre de principes, pour établir cet équilibre indispensable entre acteurs européens, nationaux et locaux. Le consensus peut se trouver et s'établir, notamment grâce au dialogue qui a été nourri entre le Comité des régions et le Parlement européen.

Cette semaine à Strasbourg, pour notre part, cher Michel Delebarre, nous avons fait en sorte, avec Madame Wallström, qu'il y ait un accord politique qui associe le Comité des régions au Parlement européen, à la Commission et au Conseil, de façon à ce que nous définissions une vraie stratégie de communication, au niveau européen, national et local. C'est particulièrement important.

Nous avons échangé sur ce point car, dans le cadre de la subsidiarité, il est fondamental qu'il y ait une bonne communication sur ce qui est fait à Bruxelles, sur l'impact que peuvent avoir les directives, les règlementations et la manière dont elles sont comprises également au niveau local. Il est très important qu'il y ait de multiples niveaux de communication, mais que tous concourent à l'élaboration d'une stratégie plus cohérente. Et je remercie Madame Wallström pour son engagement à ce sujet.

C'est cette gouvernance "multi-niveaux" que nous devons inventer, ou tout au moins actualiser. Dans les faits, nous devons faire en sorte que ces principes, un peu abstraits, de subsidiarité et de proportionnalité soient concrétisés, puisque, comme vous le savez, ces principes sont fortement réaffirmés dans le Traité de Lisbonne. Donc, la traduction concrète de ce mode de gouvernance m'apparaît comme le sujet le plus important à aborder aujourd'hui, et vos débats le feront amplement. Des mécanismes sont déjà bien en place pour faire vivre ce dialogue multi-niveaux, notamment pour ce qui concerne tout le processus de préparation de la législation européenne.

Nous avons en France une commission consultative d'évaluation des normes qui vient d'être installée par le Premier ministre. Pour discuter de l'impact des législations sur les différentes collectivités, il faut que les collectivités soient bien associées à cela, nous l'avons abordé dans nos échanges ce matin. Et il faut qu'entre vous, vous puissiez échanger sur les expériences existantes afin de voir comment, dans les différents États membres, sont mises en oeuvre ces études d'impact des législations et de règlementations communautaires, comment tout cela est décliné et articulé entre le niveau national et le niveau local. Là aussi, je crois que le Comité des régions a un rôle essentiel à jouer puisque il a mis en place un système d'alerte précoce, afin de mobiliser rapidement les collectivités territoriales, en amont des projets législatifs. Ce Comité doit renforcer son action sur ce point et coopérer de manière très étroite, notamment avec la Commission européenne.

Le travail de suivi de la mise en oeuvre du principe de subsidiarité s'est également beaucoup développé au niveau national et au niveau des Assemblées parlementaires. Un rôle actif est joué par l'Assemblée nationale, mais beaucoup aussi par le Sénat, dont je tiens particulièrement à saluer le rôle de sa Commission pour les Affaires européennes. Ce travail doit être développé dans les Parlements nationaux et mis en réseaux sous l'égide du Comité des régions au niveau européen. Des progrès importants doivent être faits en ce domaine. Pour sa part, la Commission a déjà fait un certain nombre de progrès en développant les études d'impacts et en les généralisant, notamment dans le cadre du processus "Mieux Légiférer" - Better regulation , en bon français.

Les Collectivités territoriales doivent être parmi les premiers bénéficiaires de cette nouvelle approche des services de la Commission et le dialogue véritablement renforcé entre ces Collectivités territoriales et les services de la Commission.

L'échange d'expériences étant très utile il faut aussi et enfin qu'au niveau national - le Sénat est très sensible à cela et il a raison - le dialogue soit renforcé entre les États et les différentes catégories de collectivités locales, afin de renforcer leur expression collective au niveau communautaire. Nous devrons chacun, dans nos États, mieux nous organiser pour cela afin de mieux porter notre parole dans la diversité de nos structures. Nous menons une réflexion en France concernant l'organisation des structures territoriales, compte tenu de leur diversité. Je pense que cette diversité doit subsister. C'est un des atouts de l'Europe. Mais nous devons faire en sorte qu'au niveau des États, les soucis des Collectivités territoriales au plan communautaire soient mieux pris en compte.

Voilà donc ce que je souhaite pour vos travaux. Je souhaite qu'ils soient extrêmement fructueux et que tous ces sujets d'importance, renouvelés par l'environnement économique et financier difficile que nous connaissons, puissent être abordés aujourd'hui, Monsieur Le Président.

Merci à vous.

M. Bernard FRIMAT

Merci Monsieur le ministre. Je vais maintenant passer la parole à Monsieur Luc Van Den Brande, Président du Comité des régions. Monsieur le Président, vous avez la parole.

Page mise à jour le

Partager cette page