L'avenir de la codification en France et en Amérique latine



Palais du Luxembourg, 2 et 3 avril 2004

Sebastián Ríos

Membre de l'Association Andrés Bello des juristes franco-latino-américains et chargé de l'édition des textes de ce chapitre, professeur assistant à l'Université du Chili

M

ême si l'on considère qu'il s'agit d'un grand - normalement herculéen - travail, de coordination, de synthèse et de perfectionnement du droit, la codification n'a engendré que des oeuvres mortelles. Les codes, admettons-le, ne sont pas voués à l'éternité, et le Code civil des Français, même s'agissant d'un code bicentenaire, n'est pas l'exception, puisque après sa promulgation en 1804, sa première modification est presque aussitôt parue, avec la loi du 4 juillet 1806.

C'est ainsi que, parfois, on peut arriver à une situation beaucoup plus difficile que celle antérieure à la promulgation du code : les modifications aux codes ou la promulgation des lois spéciales - toutes tes deux issues de la nécessité ou de l'empressement, voire de la réalité - peuvent rendre les codes précisément ce qu'ils ne voulaient pas être : une source de confusion, de désordre. Curieusement, c'est parfois l'attachement « au code » ce qui engendre cette situation.

Ainsi, on peut deviner un phénomène en trois phases : codification, décodification, recodification. Aux codes, ces oeuvres mortelles en tant que humaines, atteintes par le processus inverse de celui qui leur a donné naissance, se succèdent de nouveaux codes. Cette affirmation n'est pas nouvelle : Andrés Bello, codificateur lui-même, était conscient de ce risque, au point d'écrire dès le début du message préliminaire de son code, le Code civil chilien, que « plusieurs des peuples modernes ont éprouvé la nécessité de codifier leurs lois. On peut dire que celle-ci est un besoin périodique des sociétés ».

Les communications de cette table ronde, d'un côté, rendent compte de la façon dont ce « besoin périodique » s'est exprimé dans quelques pays de l'Amérique Latine, et d'autre côté, elles donnent une réponse à la question posée, quant à la justification des nouveaux codes. D'abord, la conférence du professeur Atilio ALTERINI, présente le projet du Nouveau Code civil de l'Argentine, en commençant par sa longue genèse ; puis, en se plongeant sur ses dispositions principales dans le domaine des contrats : l'incorporation des figures telles qu'une rescision par lésion plus étendue que d'ordinaire, la possibilité de révision du contrat à cause d'imprévision ou la frustration du but du contrat.

Ensuite, la conférence du professeur Arnoldo WALD aborde la promulgation en 2002 du Nouveau Code brésilien, en remarquant le fait d'avoir regroupé les anciens code civil et de commerce, mais surtout en faisant le point, de la même manière que son prédécesseur, sur le caractère éthique et solidariste du code, notamment quant à la protection de la personne et au domaine contractuel.

Mme. Noemia DE OLIVEIRA NOVAES complète la conférence de M. Wald, en nous donnant une vision critique de certains aspects du Nouveau Code civil brésilien. Cette vision permet de penser que ce code, à peine deux ans après sa promulgation, pourra être soumis à des modifications et, éventuellement, aussi à la promulgation de lois spéciales le privant d'une partie de son contenu... pour recommencer, peut être (voire sans doute) le processus déjà décrit !

Par contre, les commentaires du professeur Salvador ROMERO-BALLIVIAN, expriment un point de vue plus sociologique et historique de la codification en Bolivie et illustrent les causes qui feraient de la codification une tâche beaucoup plus fréquente que ce qu'on croit normalement.

En guise de synthèse, il y a deux points de convergence dans ces communications : elles rendent compte d'un processus déjà déclenché, la nouvelle vague de codification dans l'Amérique Latine, et réaffirment, en même temps, que le code, non comme tel ou tel corps de règles quelconques, mais comme une idée d'ordre, de cohérence, d'intelligibilité, de facilité à l'accès de la loi, demeure. S.R.

LOS NUEVOS CÓDIGOS LATINOAMERICANOS EN EL SIGLO XXI

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