Sénats d'Europe - Les Sénats et la représentation des collectivités locales



Palais du Luxembourg, 6 juin 2001

M. Tone Hrovat, Président du Conseil national de Slovénie :

Le système parlementaire de la République de Slovénie est très jeune. Mais le bicamérisme est inscrit dans la Constitution et nous gardons bon espoir non seulement de le conserver mais aussi de le renforcer. Dans sa partie consacrée aux pouvoirs d'État, la Constitution de 1991 définit le Conseil national immédiatement après l'Assemblée nationale. Si l'Assemblée nationale se compose de députés qui représentent l'ensemble de la population nationale, le Conseil national rassemble les représentants des intérêts de la sphère sociale ainsi que les intérêts économiques professionnels et locaux.

Les attributions constitutionnelles du Conseil national sont l'initiative législative, le droit de donner son avis à l'Assemblée nationale sur toutes les affaires de la compétence de celle-ci, le droit de veto suspensif, c'est-à-dire le droit de demander à l'Assemblée nationale un deuxième examen des lois avant leur promulgation, le droit de demander la tenue d'un référendum législatif (conformément au deuxième alinéa de l'article 90 de la Constitution) et le droit de demander une enquête parlementaire sur des affaires d'intérêt public (conformément à l'article 93 de la Constitution).

A la demande de l'Assemblée nationale, il doit donner son avis sur une affaire particulière. Les compétences du Conseil national en matière de procédure législative ont été élargies avec la dernière modification du Règlement du Conseil national. Le Conseil national acquiert ainsi le droit d'amender les propositions de lois même lorsqu'il n'est pas à l'initiative de celles-ci.

D'une certaine façon, le dispositif actuel rassemble l'idée d'un conseil national et l'idée d'une deuxième chambre, représentant des intérêts locaux. La majorité des membres du Conseil national, cela ne fait aucun doute, représentent les intérêts des parties du territoire organisées au niveau local, dans le cadre de l'autogestion locale, et défend donc les intérêts locaux. Le Conseil national, dans sa forme actuelle, regroupe cependant une gamme d'intérêts particuliers beaucoup plus large, non seulement les intérêts locaux, mais aussi les intérêts socioprofessionnels. Outre les représentants des intérêts locaux, siègent au Conseil national les représentants des secteurs non économiques, des employeurs, des salariés, des agriculteurs, des artisans et des professions libérales.

Les résultats du travail effectué par le Conseil national prouvent de manière certaine que celui-ci assume pleinement et efficacement sa fonction correctrice par rapport au travail de l'Assemblée nationale. Son expérience contribue à former le socle du développement du système bicaméral et du renforcement de la démocratie.

La position et la structure du Conseil national impliquent un régime électoral différent de celui de l'Assemblée nationale.

En tant que représentants des intérêts particuliers, les conseillers nationaux sont élus au suffrage restreint par les expressions de ces intérêts particuliers, à la différence des députés de l'Assemblée nationale qui sont élus au suffrage universel. En matière de représentation des intérêts locaux, étant donné que ceux-ci s'articulent dans les collectivités locales, ce sont les grands électeurs de chacune des 22 circonscriptions territoriales qui élisent leur conseiller national représentant des intérêts locaux.

Si la loi régissant le Conseil national a posé le principe du suffrage indirect, les dispositions transitoires de l'article 66 prévoyaient une exception pour les premières élections des représentants des intérêts locaux qui devaient être élus au suffrage direct.

L'exception avait été motivée par le fait que les structures d'autogestion locale existantes n'étaient pas conformes à la nouvelle Constitution, les nouvelles communes et autres collectivités locales n'ayant pas encore été constituées ni, à plus forte raison, leurs différents organes comme porteurs des intérêts locaux.

Pour les élections suivantes, de décembre 1997, qui ont permis d'élire les conseillers de la législature actuelle, le Conseil national avait proposé d'appliquer de nouveau le mode de scrutin de 1992 qui prévoyait l'élection des représentants des intérêts locaux au suffrage universel direct avec scrutin majoritaire. Toutefois, la proposition avait été refusée par l'Assemblée nationale.

L'élection des 22 représentants actuels des intérêts locaux s'est fait au suffrage indirect par les collèges électoraux locaux et l'élection des 18 représentants des intérêts socioprofessionnels au suffrage indirect, comme déjà en 1992, par les collèges socioprofessionnels nationaux.

Les 22 circonscriptions électorales des représentants des intérêts locaux sont formées par le territoire d'une ou de plusieurs collectivités locales.

Les circonscriptions électorales sont déterminées par la loi.

Le régime électoral institué par la loi de 1992 confère aux partis politiques un rôle qui mérite d'être examiné. Les candidats au mandat de conseiller national au titre de la représentation des intérêts locaux peuvent être proposés par tous les électeurs de la circonscription (disposition transitoire prévue pour les premières élections de 1992), par les Conseils des collectivités locales mais aussi par des partis politiques, alors que ceux-ci ne peuvent pas proposer de candidats au mandat de conseiller national pour les quatre autres Groupes de conseillers nationaux qui représentent les intérêts socioprofessionnels.

Au sein du Conseil national, les représentants des intérêts locaux forment le Groupe d'intérêts des intérêts locaux. Les quatre autres Groupes d'intérêts représentent chacun respectivement les intérêts des secteurs non économiques, des employeurs, des salariés, et du groupe des agriculteurs, artisans et professions libérales.

Par leur mode de scrutin, les conseillers représentants des intérêts locaux sont davantage liés à la communauté qui leur a confié leur mandat.

On peut s'étonner que des partis politiques représentés au Parlement et, à plus forte raison, les partis de la majorité parlementaire témoignent d'une si faible propension à collaborer de manière constructive avec les représentants des intérêts locaux au Conseil national.

Cette attitude est d'autant plus surprenante que, lors des élections à l'Assemblée nationale, les partis politiques proposent volontiers comme candidats leurs membres qui exercent déjà un mandat de maire.

Il serait plus raisonnable que ceux-ci rejoignent le Conseil national plutôt que d'agir au sein de l'Assemblée nationale comme des représentants des intérêts territoriaux, aux côtés d'autres députés davantage tournés vers l'intérêt général.

La structure du Conseil national garantit aux représentants des intérêts locaux la possibilité de faire valoir des intérêts spécifiques qui ne seraient pas suffisamment perçus par l'Assemblée nationale ou par le gouvernement, tant dans le domaine législatif que dans l'orientation des politiques spécifiques. L'action du Conseil National est menée à travers de nombreuses initiatives, avis et questions de ses conseillers.

Au sein du Conseil national, les représentants des intérêts locaux constituent un des cinq Groupes d'intérêts. Le Groupe élit un chef qui organise et dirige le travail de son Groupe, convoque les réunions et les présides. Les experts du service technique du Conseil national sont à la disposition des Groupes. Les Groupes formulent leurs postions par rapport aux sujets inscrits à l'ordre du jour du Conseil national et de ses commissions. Les membres des Groupes prennent part aux travaux des commissions permanentes et des commissions ad hoc du Conseil national. Il est de règle que le Groupe d'intérêts des intérêts locaux délègue au moins un de ses membres dans chacune des commissions.

L'appartenance à un des Groupes d'intérêt met à l'arrière plan l'appartenance politique des conseillers, ce qui apporte au débat politique une fraîcheur inaccoutumée. Avec ses 22 conseillers sur les 40 que compte le Conseil national, le Groupe d'intérêts des intérêts locaux est le mieux représenté. Il se garde cependant de la tentation d'imposer ses vues par la mécanique du vote majoritaire ou par l'effet du nombre. Les intérêts qu'il représente se réalisent à travers le dialogue et l'harmonisation avec les Groupes socioprofessionnels du Conseil national.

Les représentants des intérêts locaux défendent au mieux les intérêts des communes qu'ils représentent. Ils encouragent la coopération intercommunale et l'association des communes de leur circonscription. Ils entretiennent des relations directes avec leurs électeurs, c'est-à-dire avec les maires et les conseillers municipaux. Ils restent à l'écoute des autres citoyens par le truchement d'un système de permanences tenues dans différentes communes de leur circonscription. Les locaux et une aide d'expert sont mis à leur disposition par les communes. Cette forme de coopération constitue l'occasion de se sensibiliser aux besoins et aux opinions des citoyens. Les conseillers disposent ainsi d'informations de première main et se trouvent mieux à même de présenter ces intérêts dans les commissions du Conseil national et dans leur propre Groupe d'intérêts. Certains conseillers organisent dans leur circonscription des rencontres ou débats en vue de communiquer sur des initiatives législatives ou en vue d'une formulation appropriée de celles à venir.

Les conseillers nationaux représentants des intérêts locaux sont perçus par les collectivités locales comme des intermédiaires pour faire prévaloir leurs positions ou réaliser leurs propositions, particulièrement lorsque celles-ci nécessitent la collaboration avec d'autres institutions de l'État.

Aux conseillers nationaux est échu le rôle d'informer et de convaincre les différentes instances de l'État de manière à ce qu'elles prennent des décisions qui conviennent aux communes. C'est un exercice délicat mais bien confirmé à travers le travail quotidien des différentes structures du Conseil national. Au cours des réunions des comités et commissions du Conseil national il est possible d'établir des contacts plus aisés avec des structures analogues de l'Assemblée nationale, avec le Gouvernement et avec les ministères.

Il me semble que Conseil national slovène est un instrument efficace pour mener à bien ses objectifs. Il reste ouvert tant aux initiatives de ses propres conseillers qu'aux initiatives des personnes extérieures intéressées, des collectivités locales et des institutions de la société civile.

Conscient de l'importance des organisations non gouvernementales, le Conseil national collabore avec plus de cinquante organisations non gouvernementales présentes en Slovénie et leur apporte son aide, particulièrement en les invitant à participer à l'organisation de colloques. Rassembler les intérêts différents à travers la coopération et l'harmonisation demeure un des rôles importants du Conseil national.

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