Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF pour 2000 - Justice et article 71 rattaché - Examen du rapport

Poursuivant l'examen du projet de loi de finances pour 2000, la commission a procédé à l'examen des crédits de la justice sur le rapport de M. Hubert Haenel, rapporteur spécial.

En introduction, M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a invité ses collègues à se reporter à sa note écrite pour les indications chiffrées. Il a seulement constaté la poursuite de l'effort entrepris en faveur de la justice depuis le vote, en 1995, de la loi de programme sur la justice.

Ainsi, il a annoncé que les crédits demandés pour 2000 progressaient de 3,9 %, et atteignaient 27,29 milliards de francs.

De même, il a expliqué que les effectifs seraient considérablement renforcés l'année prochaine, puisque 1.237 emplois seraient créés, dont 256 de magistrats, 145 de greffiers et greffiers en chef, 290 de personnels de surveillance pénitentiaire et 258 de personnels éducatifs.

M. Hubert Haenel a ensuite présenté l'article 71 qui tend à revaloriser l'unité de valeur de référence pour l'aide juridictionnelle qui sert à déterminer la dotation affectée au barreau au titre de l'aide juridique.

Il a déclaré que, conformément à la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'Etat affecte chaque année, à chacun des barreaux, une dotation représentant sa part contributive à la rétribution des avocats accomplissant des missions d'aide juridictionnelle, calculée en fonction d'une unité de valeur de référence.

Il a ajouté que l'article 71 de la loi de finances pour 2000 proposait de porter le montant de l'unité de valeur à 134 francs, soit une hausse de 1,52 %.

Par ailleurs, M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a proposé un article additionnel après l'article 71 visant à établir une comptabilité retraçant le détail des dépenses de frais de justice par dossier d'instruction.

Il a souligné que les frais de justice avaient connu ces dernières années une croissance telle que le garde des sceaux avait fait procéder à une enquête sur les causes de leur forte augmentation. Il était apparu qu'une grande partie de ces dépenses était inéluctable, du fait de la technicité croissante des affaires et du recours beaucoup plus systématique aux expertises et contre-expertises. Il a précisé qu'une liste de dysfonctionnements avait également été dressée, qui concernait principalement les dépenses de fourrière et de scellés ainsi que les réquisitions aux opérateurs de télécommunication.

Toute une série de réformes avait donc été mise en oeuvre pour éviter les gaspillages. Il a pour autant regretté qu'à l'heure actuelle, les présidents des chambres d'accusation ne disposent d'aucun outil leur permettant d'exercer un suivi des dépenses de frais de justice engagées par les juges d'instruction pour chaque dossier d'instruction. Il a jugé cette situation paradoxale dans la mesure où l'actuel garde des sceaux avait multiplié, depuis trois ans, les actions d'évaluation des services.

Il a alors estimé que les dépenses de frais de justice ne devaient pas rester à l'écart de ces réformes qui visent, à moyens constants, à améliorer la qualité des services rendus par une responsabilisation de tous les acteurs de la justice et par l'introduction de réformes d'organisation.

C'est pourquoi il a proposé de rendre obligatoire la tenue d'une telle comptabilité. Il a insisté sur le fait que cette proposition n'avait pas pour objectif d'entraver les juges d'instruction dans leurs missions, mais qu'elle visait à évaluer le coût d'une instruction et de permettre des comparaisons entre affaires de nature similaire et, le cas échéant, de demander des explications lorsque les écarts apparaissent peu justifiés.

M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a ensuite présenté ses principales observations.

Il a constaté que l'effort budgétaire réel fourni en faveur de la justice ne se traduisait pas encore par une amélioration visible pour le justiciable.

Ainsi, le stock d'affaires en cours auprès de la Cour de cassation, des cours d'appel, des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance s'est-il accru en 1998, tandis que la durée moyenne des procédures s'est, elle, encore allongée.

M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a fait état de la difficulté d'obtenir un chiffre fiable de la part de la Chancellerie sur le nombre des vacances de postes. Il a évoqué l'enquête réalisée en 1997 par l'Union syndicale des magistrats auprès de toutes les juridictions afin de comptabiliser le nombre des postes vacants. Il a précisé que cette étude avait révélé un taux d'emplois vacants de 7,7 % (soit 482 postes), alors que la Chancellerie avançait un taux de 3 % d'emplois vacants (soit 195 magistrats).

Puis M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a insisté sur la nécessité de renforcer les crédits pour l'entretien des juridictions et des établissements des services pénitentiaires. Il a regretté que les crédits de fonctionnement mis à leur disposition ne permettaient pas d'assumer l'entretien courant de ces bâtiments. Il a ajouté que, faute de crédits suffisants, les travaux de maintenance, de modernisation du parc et d'adaptation aux normes de sécurité n'étaient pas réalisés, ce qui obligeait à effectuer de manière beaucoup trop fréquente de gros travaux de réparation, voire de reconstruction financés sur le titre V.

Il a également plaidé en faveur de l'adoption d'une nouvelle loi de programme pour achever la rénovation des juridictions et des établissements pénitentiaires.

En conclusion, il a annoncé que son rapport écrit sur les crédits du ministère de la justice pour 2000 serait également consacré au 40e anniversaire de l'école nationale de la magistrature et au renforcement de l'inspection générale des services judiciaires.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Maurice Blin a constaté que la justice était à l'image de la société où elle devait évoluer. Ainsi, il a fait remarquer que la multiplication des divorces et le développement des entorses au droit social créaient des besoins croissants en matière de justice.

M. François Trucy a souhaité obtenir des renseignements supplémentaires sur le paiement des frais de justice, sur la date d'achèvement de l'établissement pénitentiaire de La Farlède, et sur l'augmentation des dépenses liées à la présence d'un avocat dès la première heure de garde à vue.

M. Roland du Luart a plaidé en faveur de l'adoption d'une nouvelle loi de programme pour financer la rénovation ou la construction des établissements pénitentiaires en mauvais état. Puis il s'est demandé si la responsabilité des maires pouvait être engagée en cas d'accident dans une maison d'arrêt.

M. René Ballayer s'est inquiété du phénomène de surpopulation observé dans les établissements pénitentiaires.

M. Alain Lambert, président, a rappelé qu'une commission d'enquête, présidée par M. Hubert Haenel, et dont le rapporteur était M . Jean Arthuis, avait été créée en 1990 pour réfléchir sur " l'autorité judiciaire ". Il a estimé qu'une mission pourrait être menée afin d'en tirer un bilan et d'examiner si les dysfonctionnements constatés à l'époque persistaient et s'il avait été tenu compte des propositions émises.

En réponse, M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, s'est félicité de cette proposition. Il a également annoncé qu'il souhaitait mener une mission en collaboration avec l'Inspection générale des services judiciaires afin d'évaluer le coût de fonctionnement des juridictions relevant d'une cour d'appel donnée.

Puis, M. Hubert Haenel, a fait remarquer que les règles de sécurité concernant les maisons d'arrêt ne relèvent pas du dispositif réglementaire général, dans la mesure où le garde des sceaux et le ministre de l'intérieur, en les fixant, engagent ainsi leur responsabilité.

Concernant la procédure d'engagement des frais de justice, M. Hubert Haenel a expliqué que certains frais étaient payés par l'administration centrale du ministère de la justice tandis que d'autres étaient réglés sans ordonnancement par les régies des juridictions.

Puis, M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a reconnu que la judiciarisation de la société multipliait les attentes des citoyens en direction de la justice. En outre, il a estimé que l'amélioration du fonctionnement de la justice susciterait de nouvelles demandes de la part des justiciables qui renonçaient jusqu'à présent à faire appel à la justice en raison de sa lenteur.

A l'issue de ce débat, la commission a décider de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la justice, l'article 71 rattaché sans modification et l'article additionnel après l'article 71 proposé par le rapporteur spécial.

PJLF pour 2000 - Emploi et solidarité - Ville - Examen du rapport

Puis, la commission a procédé, sur le rapport de M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, à l'examen des crédits pour 2000 de l'emploi et de la solidarité : III. - Ville.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, a tout d'abord souligné l'importance des blocages institutionnels et le manque de transparence de la politique de la ville. Il a également déploré le saupoudrage des crédits et la croissance des moyens de fonctionnement, trop souvent privilégiés par rapport aux investissements nécessaires à une véritable action de fond.

Il a indiqué que la progression de 40 % du budget de la ville pour 2000 n'était qu'apparente, compte tenu des transferts de crédits dans le cadre du fonds d'intervention pour la ville (FIV) et de la rebudgétisation d'une partie des crédits du fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France (FARIF). Les crédits augmentent donc de 10 % à structure constante.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, a indiqué que le total de l'effort financier consacré à la politique de la ville représentait près de 35 milliards de francs, mais que les dépenses de l'Etat ne s'élevaient qu'à 18,2 milliards de francs, en hausse de 6,8 % par rapport à 1999. Il a rappelé que les crédits du budget de la ville ne représentaient que 4 % de l'ensemble des crédits contribuant à l'effort financier consacré à la politique de la ville.

M. Alain Joyandet a souligné que l'existence de problèmes importants concernant le faible taux de consommation des crédits d'investissement au cours des dernières années avait conduit le ministère de la ville à mener une enquête. Il s'est étonné d'un tel laxisme qui conduit à la non-consommation des crédits votés.

Il a indiqué que les moyens de fonctionnement de la délégation interministérielle à la ville progressaient de 16,1 % en 2000, avec un budget de communication reconduit à 5 millions de francs, et un nouvel article doté de 4 millions de francs pour financer les expertises, colloques et animations.

Il a souligné l'inflation importante des dépenses consacrées à la communication et aux colloques, et a noté la sollicitation croissante d'organismes de consultants par les collectivités locales pour la réalisation de diagnostics et d'études, qui se limitent parfois à des compilations de statistiques qui n'apportent aucune valeur ajoutée pour la définition des actions à mener.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, a ensuite évoqué la formation des acteurs de la politique de la ville, et a rappelé les problèmes auxquels ont donné lieu certaines opérations " Ville Vie Vacances ". Il a indiqué que, en dépit des mesures prises pour améliorer la formation du personnel d'encadrement, le ministère de la ville reconnaît que " le public visé par le dispositif Ville Vie Vacances nécessite un niveau de formation que ne détient pas la majorité des encadrants ".

Il a également souligné l'insuffisance de la formation des emplois-jeunes affectés dans les quartiers de la politique de la ville, compte tenu du caractère délicat des missions que ces jeunes sont amenés à remplir.

M. Alain Joyandet a souligné que des mesures positives avaient été prises dans le budget pour 2000, avec la simplification de la nomenclature autour du fonds d'intervention pour la ville, qui améliorera la disponibilité et la fongibilité des crédits. Cependant, il a considéré que le financement des actions de la politique de la ville connaissait des problèmes structurels du fait de la conception interministérielle de cette politique, qui implique, pour chaque action, de solliciter des crédits auprès de plusieurs ministères. Ce mode de fonctionnement entraîne des retards et des blocages inacceptables dans la mise en oeuvre des projets, et alourdit " l'inertie " de la politique de la ville.

M. Alain Joyandet a évoqué le remplacement des 14 grands projets urbains (GPU), dont plusieurs étaient en situation d'échec, par 50 grands projets de ville (GPV), à compter de l'année 2000. Il a souhaité que ce dispositif permette de débloquer les crédits nécessaires à la mise en oeuvre d'opérations importantes de renouvellement urbain.

Il a également évoqué la question des zones franches urbaines, dont il a souligné qu'elles constituaient un outil performant pour développer l'activité économique dans les quartiers défavorisés. Il a déploré l'attitude du Gouvernement, qui se focalise sur les effets d'aubaine et de fraude engendrés par le dispositif, et estimé que la question de la sortie des zones franches devrait être étudiée dès à présent.

Le rapporteur spécial a ensuite souligné les déceptions engendrées par le retard considérable dans la mise en oeuvre de l'établissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), ainsi que les carences de cet établissement, qui ne répond pas aux attentes des communes.

Pour conclure, M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, a indiqué que le budget de la ville n'était pas à la hauteur des enjeux actuels. Il a déploré qu'un saupoudrage des crédits soit privilégié, de préférence à la mise en oeuvre de programmes de grande ampleur et a souligné l'importance du décalage entre les déclarations du Gouvernement en faveur de la reconstruction des villes, et les mesures prises. Il a enfin rappelé que les problèmes de financement de la politique de la ville ne pourraient pas être réglés tant que les montages financiers demeureraient aussi complexes.

M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, a donc proposé à la commission le rejet du projet de budget de la ville pour 2000.

Un large débat s'est alors engagé.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, a indiqué qu'il partageait totalement l'analyse du rapporteur spécial, et a souligné la croissance inconsidérée des dépenses de communication et d'animation. Il a également déploré le fait que le volet concernant l'action économique de la politique de la ville ne puisse pas être connu avant le mois de décembre.

M. René Ballayer a souhaité obtenir des précisions sur les subventions versées aux communes participant à un grand projet urbain et connaissant d'importantes difficultés financières.

M. François Trucy a noté l'importance de la participation financière de la Caisse des dépôts et consignations à la mise en oeuvre de la politique de la ville, et s'est interrogé sur les modalités de distribution du fonds de 3 milliards de francs consacré à la rénovation urbaine.

En réponse à M. René Ballayer, M. Alain Joyandet, rapporteur spécial, a indiqué que les subventions versées aux communes participant à un grand projet urbain et connaissant d'importantes difficultés financières se sont élevées à 45 millions de francs en 1999, et que 12 millions de francs supplémentaires sont prévus en 2000. Il a noté que le montant des subventions était réparti en fonction des programmes d'investissement réalisés et d'une analyse des charges supportées par les communes concernées.

En réponse à M. François Trucy, M. Alain Joyandet a indiqué que l'inscription d'une participation de 6,8 milliards de francs de la Caisse des dépôts et consignations à la politique de la ville ne représentait pas une subvention, mais correspondait au montant des prêts à taux préférentiels accordés par l'établissement. Concernant la dotation du fonds pour la rénovation urbaine, il a indiqué que les modalités d'attribution des prêts n'avaient pas encore été annoncées.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la ville.

PJLF pour 2000 - Budget annexe de la Légion d'Honneur et de l'Ordre de la Libération - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, à l'examen des crédits pour 2000 des budgets annexes de la Légion d'Honneur et de l'Ordre de la Libération.
Dans un premier temps, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a présenté les crédits du budget de la Légion d'Honneur. Il a noté que le montant des recettes et des dépenses du budget annexe s'élevait, en 2000, à 123,91 millions de francs, soit une progression de 9,42 % par rapport à 1999.

Abordant les recettes, il a rappelé qu'elles provenaient d'une double origine : la subvention de l'Etat, d'une part, les ressources propres, d'autre part. La subvention de l'Etat versée par le budget de la justice augmente de 0,26 % et s'établit à 105,75 millions de francs. Les ressources propres sont liées à l'activité de la Grande Chancellerie et des maisons d'éducation ; en 2000, elles progresseront de 5,16 % pour atteindre 8,16 millions de francs. Elles comprennent les droits de chancellerie qui restent stables, les pensions et trousseaux des élèves des maisons d'éducation, qui augmentent de 3,43 % en 2000, ainsi que les produits accessoires en augmentation de 32,77 % du fait de l'intégration des recettes du musée de la Légion d'honneur.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a ensuite exposé les dépenses du budget annexe de la Légion d'honneur, qui sont de trois ordres. Les crédits de fonctionnement de l'administration centrale de la Grande Chancellerie de la Légion d'honneur et des maisons d'éducation s'élèvent à 98,97 millions de francs, soit une progression de 1,17 % liée à la création nette de 3 emplois. Au paiement des traitements des membres de la Légion d'honneur et des médaillés militaires sont alloués, comme en 1999, 8,16 millions de francs. Enfin, la dotation consacrée aux secours accordés par la Grande Chancellerie aux légionnaires et médaillés militaires, connaissant une situation difficile, est maintenue à son niveau antérieur, soit 345.884 francs.

Le rapporteur spécial a relevé une importante augmentation des opérations en capital avec 16,43 millions de francs, tant en autorisations de programme (AP) qu'en crédits de paiement (CP), en précisant que 10,15 millions de francs de CP concernaient des programmes déjà engagés. Il a ajouté que sur les 6,28 millions de francs de mesures nouvelles, 4,4 millions étaient destinés à l'entretien des bâtiments.

Il a précisé que si l'inscription de crédits pour le financement partiel de la restauration du cloître de la maison d'éducation de Saint-Denis n'était intervenue qu'en loi de finances rectificative pour permettre les travaux en 1998 et 1999, ces crédits étaient programmés dans la loi de finances initiale pour 2000. Il a cependant constaté que les 10 millions de francs attribués en AP et en CP, pour la réalisation pluriannuelle de ces travaux, dont le coût total était estimé à 37 millions, provenaient d'un ajustement de trésorerie.

M. Jean-Pierre Demerliat s'est félicité de la persistance de l'effort consenti par le budget annexe de la Légion d'Honneur, en matière de travaux, ajoutant qu'il permettra également la poursuite de la réfection des toitures et des menuiseries extérieures du palais de Salm.

Il a approuvé la dissolution prochaine de l'établissement public administratif, gérant le musée national de la Légion d'Honneur, pour l'intégrer au budget annexe, ce qui permettra l'utilisation de sa trésorerie pour réaliser les travaux nécessités par l'état de vétusté du musée. A cet égard, il a formulé le souhait que l'ensemble des travaux prévus puisse être terminé avant 2002, année du bicentenaire de l'Ordre.

Il a ensuite mis en évidence la qualité de l'enseignement dispensé dans les maisons d'éducation, attesté par l'excellence des résultats obtenus. Enfin, il a souhaité que la qualité d'ordonnateur principal du grand Chancelier de l'Ordre de la Légion d'Honneur soit confirmée.

Dans un second temps, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a présenté les crédits relatifs au budget annexe de l'Ordre de la Libération. Il a rappelé qu'au 4 août 1999, l'Ordre comptait 161 compagnons de la Libération encore en vie, ainsi que 6.300 médaillés de la Résistance. Il a expliqué que la subvention du budget général, qui est la seule ressource du budget annexe, s'élèverait en 2000 à 4,96 millions de francs, en diminution de 1,1 % en raison d'une mesure d'ajustement. Il a noté que les dépenses de fonctionnement, qui s'établiront à 4,11 millions de francs, diminueraient de 1,32 %.

Il a précisé que les crédits en capital s'élèveront à 850.000 francs en 2000, ce qui correspond à la deuxième tranche de la réfection totale de l'installation électrique dans les locaux de la Chancellerie, dont le coût global devrait s'élever à 2,5 millions de francs. M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a regretté l'étalement de ces crédits sur trois années qui entraînait leur exécution à la fin 2000.

Il s'est enfin félicité de l'adoption de la loi créant le Conseil national des communes " Compagnon de la libération " qui permettra de pérenniser l'Ordre de la Libération par l'institution d'un établissement public à caractère administratif. Retenue pour lui préserver personnalité morale et autonomie financière, cette organisation repose sur le souci de fonder l'avenir de l'ordre sur les seuls cinq compagnons permanents : Grenoble, Nantes, Paris, l'Île de Sein et Vassieux en Vercors. Il a surtout apprécié le large consensus observé dans les deux chambres à l'occasion du débat sur ce texte permettant de sauvegarder la mémoire et les traditions de l'Ordre.

A l'issue de cette présentation, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter ces budgets annexes de la Légion d'Honneur et de l'Ordre de la Libération.

PJLF 2000 - Budget annexe des Journaux officiels - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport des crédits du budget annexe des Journaux officiels pour 2000 sur le rapport de M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial.

M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a tout d'abord présenté l'évolution globale du budget annexe, qui augmentera de 13,14 % en 2000 par rapport à 1999, pour atteindre 1,221 milliard de francs, contre 1,080 milliard en 1999. Il a constaté que les recettes d'exploitation connaîtront une augmentation de plus de 13 %, principalement du fait des recettes des annonces légales au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales et au Bulletin officiel des annonces des marchés publics. Cette forte progression, pour la quatrième année consécutive, permettra de compenser la stagnation des recettes constatées sur les ventes au numéro, la baisse des abonnements et celle liée aux travaux d'impression effectués pour les ministères.

Le rapporteur spécial a ensuite souligné que les dépenses d'exploitation (+ 3,62 %) augmenteront quatre fois moins rapidement que les recettes.

Il a ainsi constaté avec satisfaction que l'exercice 2000 dégagerait un excédent d'exploitation prévisionnel de 247 millions de francs, en augmentation de plus de 77 %, et il a indiqué que cet excédent serait intégralement reversé au Trésor.

Puis M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a présenté ses principales observations. Il a tout d'abord dressé un bilan positif de l'exécution du plan "Horizon 2000" et a souligné les efforts de redressement et de modernisation entrepris depuis cinq ans. Il a cité la réforme de la ligne éditoriale du Bulletin officiel des annonces des marchés publics, la nouvelle convention signée entre la société anonyme de composition et d'impression des journaux officiels (Saci-JO) et la direction des journaux officiels et l'étude lancée en vue de réformer le système des retraites.

Il a ensuite évoqué le programme gouvernemental pour la " société de l'information " auquel les Journaux officiels sont associés. Il a précisé que certaines annonces légales feraient, à l'avenir, l'objet d'une saisine directe sur internet de la part des annonceurs.

Puis M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a regretté la trop faible dotation des chapitres d'investissement, qui permettront difficilement aux Journaux officiels de consacrer aux nouvelles technologies informatiques les crédits nécessaires à la création.

Enfin, il s'est interrogé sur l'opportunité de la concession liant les Journaux officiels à la société OR-Télématique, et ce d'autant plus que les résultats financiers du concessionnaire ont enregistré une forte baisse en 1998 : de ce fait, la redevance perçue par les Journaux officiels a fortement diminué.

En réponse à M. René Ballayer qui l'interrogeait sur ce dernier point, M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial, a expliqué que l'année 1998 avait été particulièrement désastreuse du fait du changement du mode de facturation et du renouvellement de la concession.

Il a indiqué que les prévisions pour 1999 étaient meilleures.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption du budget annexe des Journaux officiels pour 2000.

Présidence de M. Alain Lambert, président, puis de M. Roland du Luart, vice-président.

PJLF pour 2000 - Affaires européennes (article 35) - Examen du rapport

La commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Denis Badré, à l'examen de l'article 35 du projet de loi de finances pour 2000 fixant le montant de la contribution française au budget européen.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a indiqué que le projet de loi de finances évaluait le prélèvement au profit du budget européen à 98,5 milliards de francs, soit environ 1,1 point de produit intérieur brut (PIB) et 6 % des recettes fiscales nettes de l'Etat, et qu'il progressait ainsi de 3,7 % par rapport aux prévisions de 1999, et de 5,3 % par rapport au prélèvement effectif attendu (93,5 milliards de francs).

Il a rappelé que ce prélèvement servait à financer un peu plus de 17 % d'un budget européen dont il a alors exposé les principaux traits : une masse de crédits de 88 milliards d'euros, soit 581 milliards de francs, une progression de 2,8 % des crédits de paiement, une diminution des crédits d'engagement de 4,6 %, une réduction des crédits agricoles fixés à un niveau très inférieur au plafond des dépenses autorisées, et un accroissement des autres crédits de 5 %.

Il a alors observé que le sort réservé à la dépense agricole était inspiré d'un certain optimisme quant à l'évolution comparée des prix européens et mondiaux, rappelant que les crises en cours et l'évolution du dollar pourraient bien distendre, au-delà des prévisions initiales, les prix européens et de marché, et précisant qu'une baisse du dollar de 10 % équivalait à 450 millions d'euros de dépenses agricoles supplémentaires.

Il a ensuite relativisé la signification des variations portant sur les crédits d'actions structurelles (35,3 % du budget) en faisant valoir que la diminution de 10,4 % des crédits d'engagement prévue en 2000 devait être mise en rapport avec leur augmentation de plus de 16 %, l'an dernier, destinée à solder la programmation d'Edimbourg.

Ayant évoqué la progression des crédits de la rubrique 3 consacrée aux politiques internes et les modifications de la rubrique 4, relative aux actions extérieures, il a mentionné la croissance de 3,6 % des dépenses administratives, soulignant un certain défaut de lisibilité de ses dépenses résultant de l'éclatement des dépenses de gestion dans les différentes rubriques du budget européen.

Il a alors évoqué l'effritement continu des ressources propres traditionnelles (prélèvements agricoles et droits de douane), qui ne représentent plus que 16 % du total des recettes du budget européen. Il a précisé que, si la France apportait, avec 98,5 milliards de francs, 17,1 % des recettes du budget européen, notre contribution s'élèverait à 120 milliards en 2006, progressant ainsi beaucoup plus que ce qui serait compatible avec une stabilisation en francs constants, ajoutant qu'en contrepartie de sa contribution, notre pays recevait des versements européens qui, en 1997, dernière année connue, avaient couvert 91 % de cette dernière.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a alors exposé ses observations en remarquant d'abord que le projet de budget européen, base de calcul de la contribution inscrite dans le projet de loi de finances, n'était pas le budget définitif, mais le projet élaboré par le Conseil qui, soumis à l'examen du Parlement, risquait d'être augmenté par lui de 3 milliards d'euros. Il a souligné que si tel devait être le cas, le budget augmenterait de 5,4 % et la contribution française dépasserait 101 milliards de francs.

Évoquant la nouvelle programmation financière adoptée à Berlin pour la période 2000-2006, il a observé que le budget pour 2000 n'en portait pas entièrement la marque et que cette situation en faisait un budget de transition. Il a souligné qu'il en résultait un traitement contestable réservé aux crédits de paiement des actions structurelles, puisque la modération relative de leur augmentation relevait, pour une grande part, d'une volonté d'afficher une progression contenue des crédits budgétaires. Il a précisé qu'en effet, les dotations en crédits de paiement des actions structurelles couvraient moins de 30 % des crédits d'engagement inscrits en 2000 à ce titre, la très grande majorité des crédits de paiement inscrits étant destinée à apurer les restes à liquider de la programmation d'Edimbourg.

Il a alors déploré qu'à peine entamée une nouvelle période de programmation, l'on répète les erreurs du passé qui avaient conduit à une accumulation de restes à liquider. Il en a conclu que plus d'un quart des ressources mobilisées pour financer le budget 2000 étant destiné à honorer les engagements antérieurs, ce budget était donc largement un budget " à crédit ".

Il a alors mis en évidence une ambiguïté fondamentale dans la politique de cohésion communautaire soutenue par les crédits d'actions structurelles, censée être une politique de cohésion entre les Etats membres. Il a alors observé qu'elle était devenue une politique européenne d'aménagement du territoire non prévue par les traités et au terme de laquelle les pays " riches " se trouvaient destinataires de la moitié des crédits destinés à la cohésion entre Etats membres.

Il a indiqué que cette interrogation lui paraissait d'autant plus légitime que les crédits d'actions structurelles ne comportaient aucune réserve mobilisable pour amortir les chocs économiques asymétriques entre Etats qui pourraient se révéler, en régime de monnaie unique, difficiles à gérer.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a enfin développé quelques questions posées par la programmation budgétaire 2000-2006 adoptée à Berlin.

Il a d'abord regretté la teneur anti-européenne du compromis de Berlin qui, s'étant centré sur la question des soldes budgétaires, avait privilégié une approche fondée sur des données comptables fausses, sur une méconnaissance totale de la dimension économique du budget européen et sur une posture politique entièrement contraire à la logique même d'un budget européen.

Il a estimé que cette polarisation du débat avait produit deux effets pervers : l'absence de vraie réflexion sur le sens et donc la structure des interventions d'un budget pour l'Europe et une réforme à contresens du financement du budget.

Évoquant le problème du financement du budget européen, il a rappelé que le système en vigueur correspondait globalement aux exigences d'équité horizontale, la seule vraie difficulté qui subsistait venant de la correction britannique. Il a alors déploré que le compromis de Berlin n'ait pas résolu cette difficulté et en ait, au contraire, accentué les effets pervers en prévoyant qu'un certain nombre d'Etats qui s'étaient plaints de trop contribuer au budget bénéficieraient d'une exemption de contribution au financement de la correction britannique au détriment des autres.

Il a alors regretté que deux très grosses impasses aient été faites à Berlin : la première sur le consentement au prélèvement européen ; la seconde sur la nature du financement du budget européen.

Ayant souligné que le consentement au prélèvement européen était fortement dilué, il a observé qu'il obéissait, de fait, à une fiction selon laquelle les décideurs ne sont pas responsables, les responsables pas décideurs et les contribuables dénués de toute vraie représentation.

Il a ensuite souligné les inconvénients d'une alimentation du budget à travers les contributions des Etats, faisant valoir qu'elle nourrissait des contestations permanentes.

Évoquant les dépenses, il a jugé que la programmation de Berlin avait tout simplement visé à constituer des marges de manoeuvre dans la perspective de l'élargissement en préservant les moyens des dépenses non obligatoires, mais au détriment de la politique agricole commune.

Il a déploré qu'on ne trouve pas trace, dans la programmation financière, de réels projets nouveaux comme ceux concernant la défense européenne. Puis il a jugé que les moyens consacrés à l'élargissement apparaissaient sous-dimensionnés, de telle sorte que l'ouverture de l'Europe à de nouveaux membres poserait inévitablement le problème de leur augmentation.

Il a conclu sa présentation en indiquant à la commission que, sauf à provoquer une crise majeure, l'adoption de l'article 35 du projet de loi de finances fixant le montant du versement au budget européen était une figure imposée.

M. Roland du Luart, vice-président, s'est inquiété des suites données aux observations de la Cour des Comptes européenne, mentionnant un niveau de fraude portant sur 5 % des crédits européens.

En réponse, M. Denis Badré, rapporteur spécial, a rappelé qu'il convenait, pour apprécier la fraude aux intérêts financiers de l'Union européenne, de faire la distinction entre les fraudes imputables à des carences de la Commission et celles résultant de la gestion des finances européennes dans les différents Etats membres.

Ayant rappelé les initiatives prises pour améliorer le contrôle de la gestion du budget européen, il a souhaité que l'effort réalisé dans ce domaine ne se relâche pas.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 35 du projet de loi de finances.

Organisme extraparlementaire - Commission centrale de classement des débits de tabac - Désignation d'un candidat proposé à la nomination du Sénat

La commission a ensuite désigné M. Auguste Cazalet à la nomination du Sénat pour siéger au sein de la commission centrale de classement des débits de tabac.

Nomination de rapporteur

Enfin, la commission a désigné M. Michel Mercier, rapporteur sur le projet de loi n° 56 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, modifiant le code général des collectivités territoriales et relatif à la prise en compte du recensement général de la population de 1999 pour la répartition des dotations de l'Etat aux collectivités locales.

Outre-mer - Additif à la réunion du mardi 2 novembre- Vote



La commission a procédé au vote sur les crédits de l'outre-mer, précédemment réservés, sur le rapport de M. Henri Torre, rapporteur spécial. Elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de l'outre-mer.

Mercredi 17 novembre 1999

- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF pour 2000 - Examen des articles de la première partie

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2000, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général.

La commission a adopté sans modification l'article premier, relatif à l'autorisation de percevoir les impôts existants.

A l'article 2, relatif au barème de l'impôt sur le revenu, la commission a adopté un amendement tendant à modifier les modalités d'actualisation du barème de l'impôt sur le revenu, ainsi qu'un amendement de coordination.

Elle a adopté deux amendements portant article additionnel avant l'article 2 bis, tendant à la mise en place d'aménagements de l'impôt sur le revenu favorables à la famille, ou à l'actualisation des abattements relatifs au régime d'imposition des plus values.

A l'article 2 bis (nouveau) relatif au régime fiscal des indemnités de licenciement, elle a adopté un amendement visant à supprimer le plancher d'imposition de 2,35 millions de francs et la rétroactivité du dispositif. A M. Michel Charasse, qui suggérait au rapporteur général d'enquêter sur l'interprétation, par l'administration, de certaines conventions collectives ou de certains contrats individuels, M. Philippe Marini, rapporteur général, a répondu que les contribuables qui s'estimaient lésés disposaient de la faculté de saisir le Comité de répression des abus de droit. Puis, à M. Yann Gaillard, qui estimait qu'une suppression de l'article serait un signal plus clair donné au Gouvernement, il a indiqué que le dispositif, tel qu'il proposait de l'amender, renforçait la sécurité juridique des citoyens en élevant, au niveau législatif, le principe jurisprudentiel selon lequel la fraction des indemnités de rupture du contrat de travail représentative de dommages-intérêts n'était pas un revenu imposable. La commission a ensuite adopté l'article ainsi amendé.

A l'article 2 ter (nouveau), relatif à la simplification des réductions d'impôt sur le revenu au titre des dons et subventions versés par les particuliers, la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 3, relatif à l'application du taux réduit de 5,5 % de la taxe sur la valeur ajoutée aux travaux, elle a adopté un amendement visant à clarifier ce régime pour les travaux effectués dans les copropriétés.

Puis elle a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 3, tendant à l'application du taux réduit de la TVA aux services funéraires.

Elle a ensuite adopté sans modification l'article 3 bis (nouveau), relatif à la modification du régime simplifié d'imposition, l'article 4, relatif à l'application du taux réduit de 5,5 % de la taxe sur la valeur ajoutée aux services d'aide à la personne, et l'article 4 bis (nouveau), relatif à l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations réalisées par les SAFER.

A l'article 5, relatif à la réduction des droits de mutation à titre onéreux, la commission a adopté deux amendements, l'un tendant à prendre en compte l'évolution des bases dans le calcul de la baisse des droits de mutation, l'autre relatif à l'absence de prise en compte de la compensation des pertes de produit fiscal dans le montant de la dotation générale de décentralisation retenu pour le calcul de l'enveloppe normée des concours de l'État aux collectivités locales. Puis elle a examiné quatre amendements portant article additionnel après l'article 5.

Pour le premier, tendant à l'amélioration du régime successoral des frères et soeurs isolés domiciliés avec le défunt, elle a porté l'abattement sur la part de chaque frère ou soeur à 375.000 francs. Elle a alors adopté l'amendement.

Elle a ensuite adopté le deuxième amendement, tendant à l'assouplissement du régime de la " tontine ", ainsi que le troisième amendement tendant à l'extension des modalités d'évaluation de la résidence principale, et le quatrième amendement tendant à prolonger le régime instaurant une réduction de 30 % sur les donations sans limite d'âge.

A l'article 5 bis (nouveau) relatif à l'incitation à la constitution et au maintien à long terme d'un actionnariat stratégique dans l'entreprise, elle a adopté un amendement tendant à ramener de seize à dix ans la durée pendant laquelle la fraction du capital de l'entreprise transmise sous des conditions préférentielles ne peut pas changer de propriétaire. M. Philippe Marini, rapporteur général, a estimé que cet amendement tendait à remédier à la rigidité excessive d'un dispositif aux intentions par ailleurs justifiées.

Puis elle a adopté un article additionnel après l'article 5 bis, tendant à l'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit pour les immeubles anciens donnés en location dans le cadre du nouveau régime fiscal en faveur de l'investissement locatif, créé par la loi de finances pour 1999.

A l'article 6, relatif à la suppression de la contribution annuelle représentative du droit de bail, elle a adopté un amendement tendant, d'une part, à supprimer les plafonds introduits dans le dispositif et d'autre part, à supprimer progressivement la contribution additionnelle au droit de bail.

Puis elle a adopté sans modification l'article 7, relatif à l'extension du régime simplifié d'imposition des revenus fonciers.

Elle a ensuite adopté quatre amendements portant article additionnel après l'article 7, le premier tendant à prendre en compte l'inflation pour la détermination des plus-values résultant de la cession d'un fonds de commerce, le second tendant à abaisser le taux d'imposition des plus-values de cession à 15 %, le troisième tendant à actualiser le barème de conversion de l'usufruit et de la nue-propriété qui datait de 1901, le quatrième tendant à la suppression de l'interdiction de louer à un ascendant ou un descendant dans le nouveau régime fiscal en faveur de l'investissement locatif.

Elle a adopté sans modification l'article 7 bis (nouveau) relatif à la suppression de toute condition d'âge pour la réduction d'impôt au titre des frais d'hospitalisation et de cure, l'article 8, relatif à l'institution d'une exonération d'impôts commerciaux en faveur des associations, fondations et congrégations qui exercent des activités lucratives accessoires, l'article 8 bis (nouveau) relatif au relèvement de l'abattement de taxe sur les salaires au profit des associations, et l'article 9, prévoyant des mesures en faveur des versements effectués par les entreprises dans le cadre du mécénat.

A l'article 10, prévoyant des mesures en faveur de la création d'entreprises, elle a adopté un amendement, tendant à rétablir le dispositif initial du Gouvernement sur les bons de souscription de parts de créateur d'entreprise (BSPCE), qui avait été supprimé par l'Assemblée nationale.

A l'article 11, relatif à la suppression de l'imposition forfaitaire annuelle pour les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500.000 francs, elle a adopté un amendement tendant à doubler la durée du délai de déductibilité, de l'impôt sur les sociétés, de l'imposition forfaitaire.

A l'article 12, qui augmente le taux de la quote-part de frais et charges pour l'application du régime mère-fille, elle a adopté un amendement, tendant à diminuer l'assiette de cette quote-part pour aligner le droit français sur la directive communautaire du 23 juillet 1990, et à en augmenter le taux afin que la charge que représente cette quote-part, en pourcentage des dividendes distribués par une société fille à sa mère, demeure inchangée par rapport à l'état actuel du droit.

A l'article 12 bis (nouveau), relatif à la réduction du taux de l'avoir fiscal, la commission a adopté un amendement tendant à maintenir le taux de l'avoir fiscal à son niveau actuel de 45 %.

Après l'article 12 bis, la commission a adopté un amendement tendant à supprimer l'exigibilité du précompte pour les distributions opérées sur les bénéfices d'exercices clos depuis plus de cinq ans.

Ensuite, la commission a adopté, sans modification, l'article 13 relatif à la réduction du délai de conservation des titres prévu en cas d'opérations d'apports partiels d'actifs et l'article 13 bis (nouveau) relatif à la suppression du crédit d'impôt pour création d'emplois.

A l'article 14 relatif aux modalités de plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée, la commission a adopté quatre amendements : un premier amendement tendant à transposer le dispositif proposé par l'article 14 aux établissements publics de coopération intercommunale ayant fait application de la taxe professionnelle unique entre 1996 et 1999, un deuxième amendement, d'ordre rédactionnel, un troisième amendement visant à éviter de pénaliser les entreprises s'installant dans les zones rurales, et un quatrième amendement de précision.

Puis la commission a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 14 qui vise à diminuer l'assiette de la taxe professionnelle pour les titulaires de bénéfices non commerciaux.

La commission a adopté, sans modification, l'article 14 bis (nouveau) relatif à la réduction du montant maximum de taxe d'habitation supporté par les contribuables disposant de faibles revenus, l'article 14 ter (nouveau) relatif à l'indexation de la compensation accordée aux collectivités locales au titre de la réforme de la taxe professionnelle et l'article 14 quater (nouveau), relatif à la demande d'un rapport sur la réforme de la taxe d'habitation.

A l'article 15, relatif à l'actualisation du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune, la commission a rétabli l'actualisation en fonction de l'évolution des prix, telle qu'elle figurait dans le projet de loi initial.

Puis, la commission a examiné un amendement portant article additionnel après l'article 15, visant à rétablir le plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune.

M. Roland du Luart a souligné la nécessité de tenir compte de la contribution sociale généralisée dans la fixation du plafonnement. La commission a alors adopté l'amendement présenté par son rapporteur général.

La commission a ensuite adopté, sans modification, l'article 15 bis (nouveau) relatif à l'extension de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune des ayants droit des auteurs aux droits de la propriété littéraire et artistique, ainsi que l'article 16 relatif à la suppression de diverses taxes.

A l'article 17 relatif à la suppression de certains droits de timbre et taxes assimilés à ces droits, la commission a adopté un amendement visant à rétablir le droit de timbre sur la délivrance de la carte de séjour des étrangers.

La commission a alors adopté, sans modification, l'article 17 bis, relatif à l'exonération de droits de timbre pour la conversion en euros du capital des sociétés.

Par ailleurs, la commission a adopté un amendement visant à supprimer l'article 17 ter (nouveau) relatif à la dispense du droit de timbre pour les requêtes engagées contre une décision de refus de visa.

En outre, la commission a adopté l'article 18 relatif à la suppression de l'impôt sur les spectacles applicables aux réunions sportives.

A l'article 19 relatif à la suppression de la majoration de 3 % applicable aux contribuables ayant opté pour le paiement mensuel de la taxe d'habitation et des taxes forestières, la commission a adopté un amendement visant à supprimer un article désuet du code général des impôts.

La commission a également adopté, sans modification, l'article 19 bis (nouveau) relatif à l'exonération de taxe d'habitation au profit d'un bénéficiaire du revenu minimum d'insertion ayant retrouvé un emploi, l'article 20 relatif à la suppression du droit d'inscription au baccalauréat, l'article 21 relatif à la modification de taxes afférentes à l'exercice d'une activité dans le secteur des télécommunications, et l'article 22 relatif à la modification des tarifs et à l'aménagement de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers et sur le gaz naturel.

La commission a également adopté, sans modification, l'article 22 bis relatif au relèvement de l'exonération de la taxe sur les véhicules de société pour les moteurs à bi-carburation, et l'article 23 relatif à l'alignement à 4,5 % du taux de la taxe forfaitaire sur les bijoux, objets d'art, de collections ou d'antiquité.

A l'article 24 relatif à la taxe sur les installations nucléaires de base, la commission a adopté un amendement tendant à rétablir un abattement de 80 % pour les installations nucléaires dont la mise à l'arrêt a été validée par les autorités de sûreté.

Par ailleurs, la commission a adopté un amendement visant à supprimer l'article 24 bis (nouveau) relatif à la suppression de la déductibilité du revenu imposable des pénalités de recouvrement sanctionnant le versement tardif des impôts.

Ensuite, la commission a adopté, sans modification, l'article 24 ter (nouveau) relatif à l'option pour la comptabilisation des stocks de spiritueux, et l'article 24 quater (nouveau) relatif à l'exonération de droits de mutation à titre gratuit des dons et legs faits aux associations de protection de l'environnement et des animaux.

En revanche, la commission a adopté un amendement visant à supprimer l'article 24 quinquies (nouveau) demandant au Gouvernement de déposer un rapport sur la concurrence fiscale dommageable et la régulation internationale des mouvements de capitaux et un amendement visant à supprimer l'article 24 sexies (nouveau) relatif au relèvement des tarifs de la taxe sur les véhicules des sociétés.

Puis la commission a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 24 sexies relatif au crédit d'impôt imputé sur la contribution des institutions financières.

Par ailleurs, à l'article 25 relatif aux recettes des missions d'ingénierie publique, la commission a adopté un amendement rédactionnel et un amendement tendant à l'extension de l'intégration au budget général de ces comptes extra-budgétaires.

En outre, la commission a adopté, sans modification, l'article 26 relatif à la contribution des organismes collecteurs du 1 % logement, et l'article 27 contenant des dispositions relatives aux affectations.

La commission a examiné un amendement visant à supprimer l'article 27 bis (nouveau) relatif à l'affectation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

M. Jacques Oudin a fait remarquer qu'il serait nécessaire d'établir un premier bilan du fonctionnement de la TGAP, avant de proposer son élargissement à d'autres catégories. La commission a alors adopté l'amendement proposé par son rapporteur général.

A l'article 28, relatif à l'actualisation des taux de la taxe sur les huiles perçue au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles, la commission a adopté un amendement rétablissant la possibilité d'une correction des taux au titre de l'année en cours.

A l'article 28 bis (nouveau) relatif au financement de la revalorisation des petites retraites agricoles, la commission a adopté un amendement proposant un financement, la revalorisation des petites retraites agricoles, et d'autre part, les exonérations de charges sociales des jeunes agriculteurs.

A l'article 29 relatif à l'affectation du droit de consommation sur les tabacs manufacturés, la commission a adopté un amendement tendant à supprimer l'affectation du produit du droit de consommation sur les tabacs au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale.

A l'article 30 relatif aux modifications d'affectations et à la suppression de ressources liées à la clôture de comptes d'affectation spéciale, la commission a adopté deux amendements, l'un supprimant l'affectation directe des produits de la redevance sur l'édition et sur l'emploi de la reprographie au Centre national du livre et l'autre relatif à la suppression de l'affectation directe, à la région Ile-de-France, d'une quotité plafonnée de la taxe sur les locaux à usage de bureaux.

Puis la commission a examiné un amendement visant à supprimer l'article 31 relatif à l'institution du prélèvement de solidarité pour l'eau et aux modifications du compte d'affectation spéciale n° 902-00.

M. Jacques Oudin a décrit la réforme du dispositif général des agences de l'eau en distinguant la réforme des redevances en 2001 et l'instauration, dès 2000, d'un fonds national de solidarité pour l'eau (FNSE) visant à donner à ministère de l'environnement les moyens nécessaires à l'accomplissement de sa mission. Il s'est par ailleurs inquiété des conséquences de la création de ce fonds sur la pérennité du fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE) géré par le ministère de l'agriculture.

M. Henri Torre a précisé qu'au sein du nouveau compte d'affectation spéciale coexisteraient deux fonds : le FNSE et le FNDAE gérés respectivement par le ministère de l'environnement et le ministère de l'agriculture.

M. Paul Loridant a souligné qu'il évoquerait ce sujet dans son rapport sur les comptes spéciaux du Trésor.

M. Denis Badré a insisté sur le maintien de l'esprit de solidarité qui sous-tend le dispositif des agences de l'eau.

M. Philippe Adnot a manifesté son soutien à l'amendement présenté par le rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait remarquer que cet amendement constituait un signal en direction du Gouvernement afin d'une part, d'obtenir des renseignements supplémentaires sur les modalités de mise en place du dispositif proposé et d'autre part, de s'interroger sur la pertinence d'un compte d'affectation spéciale divisé en deux sous-comptes.

La commission a alors adopté l'amendement proposé par son rapporteur général.

Par ailleurs, la commission a examiné un amendement à l'article 31 bis (nouveau) relatif aux prélèvements sur les droits de retransmission télévisuels des manifestations sportives.

MM. Paul Loridant et Michel Moreigne ont fait part de leur opposition à l'amendement de suppression proposé par le rapporteur général, que la commission a adopté.

La commission a alors adopté, sans modification, l'article 32 relatif à la modification des quotités de répartition de la taxe d'aviation civile.

Puis la commission a adopté un amendement visant à supprimer l'article 33 relatif au relèvement du taux de la taxe due par les concessionnaires d'autoroutes.

La commission a également adopté un amendement portant article additionnel avant l'article 34 visant à majorer la fraction du taux de croissance pris en compte dans le calcul de l'enveloppe normée.

A l'article 34 relatif à l'abondement de la dotation globale de fonctionnement (DGF), la commission a adopté un amendement portant à 450 millions de francs le montant de cet abondement.

A l'article 34 bis (nouveau) relatif à la reconduction du mécanisme compensant les diminutions des dotations de compensation de la taxe professionnelle subies par les collectivités défavorisées, la commission a adopté deux amendements, l'un compensant en 2001 les pertes de dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) enregistrées entre 2000 et 2001, et l'autre tendant à majorer de 150 millions de francs la dotation de l'État au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP).

Puis la commission a adopté un article 34 ter (nouveau) relatif à la majoration de 500 millions de francs de la dotation de solidarité urbaine.

A l'article 34 quater (nouveau) relatif à la majoration de 150 millions de francs de la première fraction de la dotation de solidarité rurale, la commission a adopté un amendement tendant à prévoir que cette majoration est financée par l'État et non par le FNPTP.

Le président a ensuite rappelé que l'article 35, relatif à l'évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'État, au titre de la participation de la France au budget des communautés européennes, avait été examiné et adopté la veille sur le rapport de M. Denis Badré, rapporteur spécial.

Enfin, la commission a adopté, sans modification, l'article 36 relatif à l'équilibre général du budget.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2000 ainsi modifiée.

PJLF 2000 - Aménagement du territoire - II - Environnement - Examen du rapport

Au cours d'une deuxième séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Bernard Angels, vice-président, puis de M. Alain Lambert, président, et de M. Roland du Luart, vice-président, la commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, à l'examen des crédits de l'environnement dans le projet de loi de finances pour 2000.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a tout d'abord observé que le périmètre de ce budget avait beaucoup évolué sur les deux dernières années, notamment avec les subventions budgétaires accordées à l'Agence pour l'environnement et la maîtrise de l'énergie (ADEME). Il a ajouté qu'il convenait de considérer également la création d'une section d'un nouveau compte spécial du Trésor pour financer la politique de l'eau, dotée de 500 millions de francs.

Il a indiqué qu'en 2000 le budget de l'environnement connaîtrait la troisième plus forte hausse de tous les budgets civils, soit 8,6 % d'augmentation par rapport à 1999, pour un montant global de l'ordre de 4,3 milliards de francs. Il s'est étonné que le ministère de l'environnement soit exonéré de la sorte de tout effort de maîtrise des dépenses de l'État. En outre, il a douté de la capacité du ministère à faire face à une telle augmentation de ses moyens.

Il a ensuite souligné l'évolution très déséquilibrée de ce budget entre des dépenses de fonctionnement, qui augmentent de 22 %, et des dépenses d'investissement, en stagnation relative.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a indiqué que l'augmentation des crédits de fonctionnement était principalement due à l'augmentation des emplois budgétaires, et en particulier à la création de 140 emplois. Il a remarqué que le renforcement global des effectifs, de 210 emplois, bénéficiait essentiellement à l'administration centrale avec une augmentation de plus de 19 % de son personnel pour 2000, alors que l'augmentation pour les directions régionales de l'environnement (DIREN) n'était que de 3 %.

Il a ensuite présenté les quatre priorités du ministère de l'environnement pour 2000 et leur financement : le renforcement des capacités d'expertise et de contrôle du ministère, la prévention des risques, les actions de solidarité et de péréquation dans le secteur de l'eau et le renforcement du réseau de protection des zones naturelles sensibles.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a poursuivi son propos en indiquant qu'il n'était pas favorable au renforcement des structures administratives centrales du ministère. En effet, il a indiqué que cette évolution allait déboucher sur une rigidification des dépenses de l'État et qu'elle allait à contre-sens de la logique actuelle de la réforme de l'État qui privilégie la déconcentration. Il lui a semblé que le ministère de l'environnement était entré dans une logique de concurrence avec les autres départements ministériels, au lieu de conserver une dimension interministérielle et transversale.

Il a ensuite fait part de son inquiétude à l'égard du détournement de la fiscalité écologique. A ce sujet, il a indiqué que la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), étendue et affectée au financement des allégements de charges sociales dans le cadre de la seconde loi sur la réduction du temps de travail, avait perdu son objectif environnemental pour devenir une simple taxe de rendement. Il a rappelé que les assiettes et les taux choisis n'étaient absolument pas incitatifs à la limitation des pollutions et qu'en particulier un amendement voté à l'Assemblée nationale lors de l'examen en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 avait encore réduit la progressivité du barème de taxation des lessives. Il a en outre estimé que les conséquences des récentes intempéries dans le Sud-Ouest de la France devaient rappeler au Gouvernement, et à la représentation nationale, que les ressources qui pourraient aller à des équipements environnementaux ne devaient pas en être détournées.

Enfin, s'agissant de l'ADEME, M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a indiqué que si la suppression des taxes affectées avait eu au moins l'avantage de donner une plus grande souplesse de gestion à l'établissement, elle n'en devait pas moins s'analyser comme une perte d'autonomie pour l'ADEME, et surtout comme un détournement en sa défaveur.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a conclu son propos en préconisant le rejet de ce budget pour trois raisons principales :

- d'abord, parce qu'il a estimé que l'évolution des crédits était globalement trop forte et que le ministère de l'environnement était exonéré de tout effort de rigueur budgétaire ;

- ensuite, parce qu'il a considéré que les dépenses de fonctionnement, et en particulier de personnel, connaissaient une croissance trop forte, qu'elles contribuaient à la rigidification des dépenses de l'État et allaient dans le sens d'une plus grande centralisation de l'administration de l'environnement ;

- enfin, parce qu'il s'est dit opposé au détournement de la fiscalité écologique pour financer la politique de réduction du temps de travail.

M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, a indiqué qu'il présenterait son propre rapport devant la commission des affaires culturelles dans les semaines prochaines, après l'audition de la ministre de l'environnement.

M. Henri Torre a indiqué que l'accroissement sensible des moyens à la disposition du ministère s'expliquait en partie par un prélèvement de 500 millions de francs sur les recettes des agences de l'eau, qui s'établissait pour 2000, après négociation entre le Gouvernement et les agences, à 500 millions de francs, mais qui par la suite serait déterminé de facto par le Gouvernement. Il a également souligné, s'agissant de la TGAP, qu'il partageait la position du rapporteur spécial et a estimé qu'il y avait un risque que cette taxe soit assimilée à un droit à polluer.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, s'est dit d'autant plus inquiet que l'affectation de ce prélèvement au secteur de l'eau, prévue en 2000, pourrait, a-t-il estimé, ne pas être confirmée les années suivantes.

M. Maurice Blin a estimé que les dépenses d'équipement devaient relever du ministère de l'équipement et que le ministère de l'environnement n'avait pasa priori à s'occuper d'investissement. Par ailleurs, il a souhaité savoir quelles actions le rapporteur spécial privilégierait au sein des dépenses de fonctionnement, hors les dépenses de personnel.

En réponse à M. Maurice Blin, M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a considéré que peu lui importait quel ministère prenait en charge les projets d'investissement, pourvu que ceux qui sont utiles soient réalisés. S'agissant des dépenses de fonctionnement, il a affirmé que la recherche aurait pu être plus favorisée, car elle constituait la voie principale de résorption des pollutions et des risques.

M. Joël Bourdin a souhaité connaître l'opinion du rapporteur spécial sur l'amélioration de la qualité de l'eau.

M. Philippe Adnot, rapporteur spécial, a indiqué que les agences de l'eau avaient la responsabilité de cette importante politique et qu'il fallait donc veiller à ce qu'elles conservent les moyens de leurs missions. Il a ensuite indiqué qu'il fallait être vigilant à l'égard de la présentation de la politique du Gouvernement. En effet, s'agissant de l'ADEME, il s'est dit étonné que le Gouvernement ait justifié, l'an dernier, l'augmentation du taux de la taxe sur les déchets de 50 % par l'accroissement des besoins de l'ADEME, alors que quelques mois plus tard on diminuait les taux d'aide aux investissements des communes de 50 % pour les mêmes motifs.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de l'environnement.

Outre-mer - Ratification des ordonnances relatives aux mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer - Examen du rapport

Puis sur le rapport de M. Henri Torre, rapporteur, la commission a procédé à l'examen du projet de loi n° 422 (1998-1999) portant ratification des ordonnances n° 98-524 du 14 juin 1998, n° 98-252 du 24 juin 1998, n° 98-581 du 8 juillet 1998, n° 98-775 du 2 septembre 1998 prises en application de la loi n° 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer.

M. Henri Torre, rapporteur,
a souligné que l'examen d'un projet de loi de ratification d'ordonnances dans le domaine du droit applicable outre-mer constituait une nouveauté pour la commission des finances et que, d'ordinaire, ces textes étaient renvoyés au fond devant la commission des lois.

Il a indiqué que les quatre ordonnances soumises à l'examen de la commission s'inscrivaient dans un vaste chantier ouvert par le Gouvernement, celui de la modernisation du droit applicable outre-mer. Il a rappelé que la loi d'habilitation du 6 mars 1998, dont résultent les quatre ordonnances, avait autorisé le Gouvernement à légiférer par ordonnances dans dix-sept domaines.

Le rapporteur a noté qu'une nouvelle loi d'habilitation, promulguée le 25 octobre 1999, concernait douze domaines, dont deux relevaient a priori de la compétence de la commission des finances, le statut et les missions de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer et la contribution de l'État aux ressources des communes de la Polynésie française.

M. Henri Torre, rapporteur, a estimé que les quatre ordonnances visées par le projet de loi concernaient des matières très différentes et que leur contenu était parfois technique.

Il a indiqué que la première ordonnance, portant le n° 98-524, concernait le contrôle par l'administration des douanes des échanges de marchandises entre la Guadeloupe et la Martinique. Après avoir rappelé que les importateurs et les exportateurs de biens entre ces deux îles devaient remplir une déclaration auprès de l'administration des douanes, il a expliqué que l'ordonnance avait pour objet d'aligner le régime des sanctions du non-respect de cette obligation sur celles applicables en matière de TVA.

Évoquant la deuxième ordonnance, portant le n° 98-525, M. Henri Torre, rapporteur, a observé qu'elle visait à actualiser les dispositions des codes des douanes applicables dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et dans les collectivités territoriales de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon en matière de pouvoirs des agents des douanes et de procédure contentieuse douanière. Il a insisté sur le fait qu'une ordonnance ne pouvait transposer que des dispositions relevant de la compétence de l'État et que, en ces matières, la ligne de partage avec les compétences territoriales était parfois ténue.

Le rapporteur a ajouté que cette ordonnance renforçait le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux, en prévoyant que les personnes qui entrent et qui sortent d'un des territoires concernés avec des sommes de plus de 50.000 francs devaient en faire la déclaration à l'administration des douanes. Il a précisé que cette obligation déclarative existait en métropole.

S'agissant de la troisième ordonnance, qui porte le n° 98-581, M. Henri Torre, rapporteur, a signalé qu'elle résultait d'une demande du territoire de Polynésie française qui, à la suite de l'introduction de la TVA en 1998, avait exprimé le besoin de moderniser les règles qui lui sont applicables en matière de recouvrement et de contentieux de l'impôt. Il a constaté que le texte de l'ordonnance était un décalque des dispositions en vigueur en métropole, en tenant cependant compte des spécificités de l'organisation administrative et juridictionnelle de la Polynésie.

M. Henri Torre, rapporteur, a considéré que la dernière ordonnance, qui porte le n° 98-775, est d'une importance non négligeable, et qu'elle avait pour objet de mettre à jour le droit des activités financières applicable outre-mer, en transposant notamment la loi de modernisation des activités financières du 2 juillet 1996.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a demandé si l'obligation de déclarer les transferts de sommes de plus de 50.000 francs mise en place par l'article 4 de l'ordonnance n° 98-524 s'appliquait à Saint-Martin et à Saint-Barthélémy.

En réponse, M. Henri Torre, rapporteur, a indiqué que l'obligation déclarative ne s'appliquait que dans les territoires de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna et dans les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon. S'agissant de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy, il a observé que ces îles faisaient juridiquement partie du département de la Guadeloupe, soumis au principe de l'assimilation législative et que, par conséquent, l'obligation déclarative en vigueur en métropole devrait déjà s'y appliquer.

Puis la commission a procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.

Elle a adopté l'article premier sans modification.

Après l'article premier, elle a adopté un article additionnel tendant à tenir compte, dans le texte des ordonnances, du changement de statut de la Nouvelle-Calédonie, puis l'article 2 sans modification.

Après que le rapporteur eut constaté que l'article 3 conduisait à autoriser le territoire de Polynésie française à fixer lui-même le montant des amendes applicables à des infractions définies par l'État, dans des domaines qui sont de la compétence de l'État, et que cette disposition était contraire aux règles de partage des compétences définies par le statut de la Polynésie française, la commission a adopté un amendement de suppression de l'article 3.

Elle a ensuite adopté l'article 4 sans modification.

Après l'article 4, la commission a adopté un article additionnel modifiant le texte de l'ordonnance n° 98-581 relative aux garanties de recouvrement et à la procédure contentieuse en matière d'impôts en Polynésie française, dans le but de tenir compte des particularités de l'organisation juridictionnelle de la Polynésie française.

M. Henri Torre, rapporteur, a ensuite remarqué que l'ordonnance n° 98-775 relative à l'actualisation du régime des activités financières étendait aux territoires d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux collectivités territoriales de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon certains textes, non pas dans leur rédaction actuelle, mais dans leur rédaction antérieure à la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 2 juillet 1998. Il a expliqué cette situation par le fait que la loi du 2 juillet 1998 était postérieure à la loi d'habilitation du 6 mars 1998, et que des ordonnances ne sauraient étendre des dispositions qui n'étaient pas en vigueur lors de la promulgation de la loi d'habilitation.

M. Henri Torre, rapporteur, a cependant déploré que la rédaction actuelle du projet de loi de ratification conduise à étendre à l'outre-mer des dispositions déjà obsolètes en métropole. Il a considéré qu'il appartenait au législateur d'y remédier en modifiant l'ordonnance n° 98-775, de manière à prendre en compte les dispositions de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier.

La commission alors adopté six articles additionnels tendant à étendre les textes visés par l'ordonnance n° 98-775 dans leur rédaction issue de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier et, le cas échéant, de la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est félicité de l'initiative du rapporteur, qui permettra à l'outre-mer de rattraper son retard en matière de réglementation des activités financières. Il s'est interrogé sur les modalités d'extension aux territoires et collectivités concernés par l'ordonnance n° 98-775 des futures modifications apportées aux textes visés par cette ordonnance.

M. Henri Torre, rapporteur, a estimé qu'il était nécessaire, désormais, de prévoir plus souvent des articles d'extension dans les textes adoptés par le Parlement, de manière à rendre exceptionnel le recours à la procédure des ordonnances.

Puis la commission a décidé de proposer au Sénat d'approuver l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

PJLF pour 2000 - Audition de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, sur l'exécution de son budget pour 1999 et les crédits de son département ministériel pour 2000.

M. Jean-Claude Gayssot a tout d'abord fait une brève présentation des crédits de son ministère.

Il a indiqué que le ministère de l'équipement, des transports et du logement bénéficierait d'un budget satisfaisant pour l'an 2000, puisque les crédits de paiement devraient s'élever à 147 milliards de francs, soit une évolution positive de 2,7 % par rapport au budget de 1999, contre une moyenne de 0,9 % pour le budget de l'État. Il a précisé qu'il intégrait dans cette dotation les crédits figurant au budget annexe de l'aviation civile et aux comptes d'affectation spéciale, " fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien " (FIATA) et " fonds pour l'investissement dans les transports terrestres et les voies navigables " (FITTVN). Il a ajouté que, avec l'adoption de deux amendements du Gouvernement par l'Assemblée nationale, en première lecture, et en ajoutant la dotation de 12 milliards de francs à Réseau ferré de France, le volume total de crédits s'établissait à 165 milliards de francs.

S'agissant des effectifs du ministère, M. Jean-Claude Gayssot a indiqué qu'il avait obtenu de limiter à 385 le nombre de suppression de postes en 2000, alors que 1.000 postes étaient supprimés chaque année depuis 15 ans. Prenant en compte les créations d'emploi dans le secteur aérien, il en a conclu que la diminution des effectifs du ministère était, pour 2000, six fois moins importante que celle de 1997.

M. Jean-Claude Gayssot a ensuite détaillé les mesures fiscales du projet de loi de finances concernant le secteur du logement. Il a estimé qu'elles représenteraient un coût de 28 milliards de francs pour l'État, essentiellement en raison de l'application du taux réduit de TVA aux travaux réalisés dans les logements d'habitation, et de la suppression progressive du droit de bail.

S'agissant du secteur de l'équipement et des transports, M. Jean-Claude Gayssot a rappelé que son ministère était le premier ministère civil par l'importance de ses investissements directs, et que sa capacité d'investissement était préservée pour 2000, avec une progression des dépenses ordinaires et autorisations de programme de 2,6 %, atteignant 99 milliards de francs. Il a rappelé que depuis 1997, les seules autorisations de programme avaient progressé en moyenne de 5,7 % par an. Il a précisé que ces moyens d'investissement seraient en grande partie utilisés dans le cadre d'un partenariat avec les collectivités locales, à la fois par l'intermédiaire des contrats de plan Etat-région, et sous une autre forme de contractualisation, pour des projets d'intérêt national, comme le TGV-Est européen ou la construction de " Port 2000 " au Havre.

Le ministre de l'équipement, des transports et du logement a souhaité mettre l'accent sur le transport ferroviaire et combiné, dans un souci de rééquilibrage par rapport au transport routier. Il a évoqué les investissements sur les lignes à grande vitesse, mais également les lignes classiques et le programme de " régénération " c'est-à-dire de maintenance et d'entretien du réseau existant, pour un coût d'environ 4 milliards de francs annuel, sur une période de dix ans. Il a expliqué que la contribution de l'État progressait, sous la forme notamment de l'augmentation des moyens du FITTVN, qui devrait consacrer plus de la moitié de ses crédits au transport ferroviaire en 2000. Il a enfin rappelé son objectif de doubler le volume de marchandises transportées par voie ferrée.

Puis M. Jean-Claude Gayssot a déclaré qu'il poursuivrait les efforts sur les transports collectifs en 2000, précisant que l'État contribuerait au financement du fonctionnement des transports urbains en Ile-de-France à hauteur de 5,4 milliards de francs en 2000 et que 470 millions de francs seraient consacrés à l'investissement. Il a indiqué qu'un projet de loi serait présenté début 2000 réformant le syndicat des transports parisiens par l'entrée de la région Île de France afin de renforcer la responsabilité, des collectivités territoriales et des entreprises de transport en Ile-de-France.

En matière d'investissement routier il a indiqué que les contrats de plan Etat-régions bénéficieraient, pour 2000, d'une enveloppe de crédits de 3,6 milliards de francs en autorisations de programme, soit 540 millions de francs de plus qu'en 1999, afin de tenir les engagements de l'État. Il a toutefois insisté sur le fait que l'effort devrait être soutenu pour les années à venir. Il a précisé que les investissements à réaliser, en 2000, seraient notamment les opérations de désenclavement du Massif Central et l'aménagement de l'axe est-ouest, dénommé " route centre Europe-Atlantique ".

En matière de sécurité routière, M. Jean-Claude Gayssot a rappelé que le Gouvernement en avait fait une grande cause nationale pour l'année 2000, ce qui expliquait une progression des crédits de 17 %, afin, essentiellement, de financer des opérations de communication.

Concernant les transporteurs routiers, il a rappelé que le dispositif de remboursement d'une fraction de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), institué par la loi de finances pour 1999, était reconduit.

En matière de transport fluvial, il a indiqué que les crédits progressaient de plus de 40 % depuis 3 ans et étaient portés, pour 2000, à 500 millions de francs dans le FITTVN. Il a ajouté à ces crédits la dotation de 13 millions de francs, en faveur de la batellerie, dans le budget des transports terrestres.

S'agissant du domaine maritime et portuaire, il a fait état d'une hausse des crédits de 15 %, hors prise en compte du régime social des marins. Il a rappelé que 220 millions de francs de crédits avaient été réservés pour le démarrage de la première tranche de " Port 2000 " au Havre. Il a ajouté que l'année 2000 verrait la création d'un service public de l'enseignement maritime.

Concernant le transport aérien, il a déclaré que la forte progression du trafic nécessitait de mettre à niveau les moyens de contrôle de la navigation aérienne et d'anticiper sur les départs à la retraite, ce qui expliquait la création nette de 180 emplois dans ce secteur en 2000. Il a ajouté que le budget 2000 permettrait de préserver le soutien public à l'industrie aéronautique, et notamment la poursuite du développement de la gamme Airbus, avec l'A3XX.

Enfin il a rappelé que le Gouvernement avait mis en place des outils de concertation permettant d'associer le Parlement avec la création du conseil supérieur du service public ferroviaire et l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires.

Il a conclu sa présentation en évoquant les dossiers qui devraient prochainement être traités, à savoir la réforme du financement des sociétés concessionnaires d'autoroutes et le développement du réseau européen de fret ferroviaire. Enfin, il a annoncé que le Gouvernement présenterait au Parlement un projet de loi sur l'urbanisme, l'habitat et les déplacements au cours de la présente session parlementaire.

Un large débat s'est alors engagé, au cours duquel sont intervenus successivement MM. Alain Lambert, président, Philippe Marini, rapporteur général, Auguste Cazalet, rapporteur spécial des crédits des transports terrestres, Gérard Miquel, rapporteur spécial des crédits des routes et de la sécurité routière, Yvon Collin, rapporteur spécial des crédits des transports aériens et de la météorologie, Marc Massion, rapporteur spécial des crédits des ports maritimes, Mmes Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial des crédits du tourisme, Anne Heinis, rapporteur pour avis des crédits de la mer de la commission des affaires économiques, MM. Maurice Blin, M. François Trucy, M. Claude Belot, M. Hubert Haenel, M. Michel Moreigne et M. Roland du Luart.
En réponse à M. Alain Lambert, M. Jean-Claude Gayssot s'est déclaré favorable à l'allongement de la durée de concession des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA). Il a souhaité leur donner les capacités financières et juridiques pour répondre aux futurs appels d'offre, dans des conditions équitables de concurrence. Il a toutefois ajouté que l'allongement des concessions ne signifiait pas que des dotations publiques ne soient pas nécessaires, dans la mesure où les sections autoroutières les plus rentables étaient déjà en concession. Il a indiqué qu'un projet de loi serait présenté dans les prochaines semaines, après réception de l'avis de Bruxelles.

S'agissant de l'extension de l'utilisation des fonds d'épargne, il a indiqué que si la baisse du livret A profitait au logement social, notamment sous la forme d'un allégement de l'endettement des bailleurs sociaux, il était nécessaire d'aller plus loin, et notamment de permettre le financement de grands équipements, comme des investissements de sécurité ou les transports ferroviaires et collectifs, au coût de la ressource. Il a toutefois indiqué que l'avis de la Commission européenne sur ce sujet serait requis.

En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, il a précisé que le coût de la réduction du temps de travail à trente-cinq heures à la SNCF ne donnerait pas lieu à subvention de l'État. Il s'est réjoui que l'accord intervenu en juin 1999 ait pour effet d'imposer à la SNCF plus de 6.000 recrutements supplémentaires pour 2000 dans le cadre de 25.000 embauches en trois ans. Il a indiqué que la SNCF serait ainsi la seule entreprise ferroviaire de l'Union européenne à créer des emplois en 2000.

S'agissant des dotations au transport fluvial, et notamment du projet Seine-Nord, il a indiqué qu'il s'agissait d'un projet que le Gouvernement soutenait, mais qui nécessitait encore des études, notamment dans la partie centrale de son tracé.

M. Jean-Claude Gayssot a répondu à Mme Anne Heinis que l'information, publiée dans la presse, selon laquelle la SNCF envisageait l'arrêt du trafic de fret ferroviaire à Valognes, était erronée. Il a indiqué que le port de Cherbourg avait été intégré dans les propositions de corridors de fret ferroviaire européens soumis par la France à la Commission européenne. Il a précisé qu'une réunion des ministres des transports de l'Union européenne se tiendrait le 10 décembre prochain sur ce sujet. Enfin, il a rappelé que le Gouvernement avait donné son accord au projet " fast-ship ", projet de liaison de fret maritime à grande vitesse entre la France et les États-Unis, que les crédits pour soutenir les dessertes terrestres liées à ce projet étaient disponibles, mais qu'il fallait attendre la décision des investisseurs privés.

Répondant aux observations de MM. Auguste Cazalet et Hubert Haenel sur la dégradation de la situation du fret ferroviaire en France, M. Jean-Claude Gayssot a confirmé que ces mauvais résultats étaient en contradiction avec la priorité accordée par le Gouvernement au fret ferroviaire. Il a cherché à en analyser les causes : tout d'abord, il a cité la politique tarifaire de certains pays européens, qui entraînait des coûts de fret trop importants. Il a déclaré avoir obtenu l'accord du conseil des ministres européens des transports pour une harmonisation des tarifs en matière de fret ferroviaire. Ensuite, il a évoqué l'engorgement des sillons ferroviaires et la nécessité de procéder à des contournements, de manière à augmenter la vitesse moyenne des trains de marchandises. Enfin, il a parlé de l'évolution nécessaire des mentalités, afin que le trafic de marchandises ne soit pas considéré comme secondaire par rapport au transport de passagers. Il a conclu que le développement du fret ferroviaire était devenu une réponse indispensable à la saturation du réseau routier national.

S'agissant de la régionalisation des services de transports de voyageurs, il a confirmé que l'expérimentation était une réussite et qu'il entendait la généraliser, avec un transfert de compétences et de moyens. Il a considéré que le projet de loi " urbanisme, habitat et déplacements " pourrait être le cadre d'une telle réforme.

Concernant la traversée des Pyrénées, il a rappelé qu'un observatoire avait été créé et qu'il était en attente d'éléments de propositions. Il a considéré que le fait que le transit entre le Portugal, l'Espagne et la France soit réalisé à 90 % par la route en traversant les Pyrénées n'était pas satisfaisant.

Concernant les investissement en Ile-de-France, il a rappelé que l'État n'en payait que 25 % contre 75 % pour la région, l'essentiel de l'aide de l'État allant au budget de fonctionnement des transports parisiens.

En réponse à M. Gérard Miquel, il a indiqué que le XIè plan avait été exécuté à hauteur de 23 milliards de francs pour les investissements routiers, et qu'il a avait bon espoir que la dotation en faveur des routes pour le prochain contrat de plan atteigne 30 milliards de francs. S'agissant du prochain projet de loi réformant les sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA), il a indiqué qu'il comprendrait des dispositions allongeant les durées de concessions autoroutières et modifiant le code de la voirie routière. Il a ajouté qu'une disposition serait introduite dans le collectif budgétaire ou par voie d'amendement au projet de loi de finances, concernant l'affectation des dividendes des sociétés concessionnaires d'autoroutes. S'agissant des dotations en faveur de la sécurité des infrastructures, il a indiqué que 125 millions de francs seraient consacrés à la sécurité des tunnels ferroviaires.

En réponse à M. Yvon Collin, il a indiqué que l'accord de fusion entre Aerospatiale-Matra et Dasa était une chance pour le développement du secteur aérospatial français et pour l'emploi. Concernant la part de l'État français dans le capital de la nouvelle entreprise, il a précisé que les actionnaires français devant détenir 30 % du capital de la société, soit la moitié du capital disponible (60 %), l'État français qui détient la moitié de cette participation se trouverait porter 15 % du capital du nouvel ensemble. Il existe surtout une clause dans l'accord de fusion, qui permettrait à la partie française de se porter acquéreur en cas de cession. Concernant l'A3XX, il a souhaité que des décisions soient prises rapidement, le projet étant soutenu par le Gouvernement. S'agissant de l'implantation du siège social de la nouvelle société aux Pays-Bas, M. Jean-Claude Gayssot a indiqué que cette décision résultait d'un choix des industriels européens, après prise en considération des aspects juridiques et fiscaux. Il a toutefois indiqué que ce choix portait peu à conséquence, les actifs restant par ailleurs logés dans les différentes filiales.

S'agissant de l'arrêt du 20 mai 1998 du Conseil d'État concernant les arrêtés fixant pour les années 1991 à 1996 les taux de la redevance pour services terminaux de la navigation aérienne, M. Jean-Claude Gayssot a indiqué que ces arrêtés avaient été annulés au motif qu'avait été prise en compte pour déterminer l'assiette de la redevance le coût de service relevant de missions d'intérêt général qui ne pouvaient pas être financées de cette manière. Une taxe d'aviation civile et une taxe d'aéroport ont été créées en 1999 afin de tirer les conséquences de cette décision pour l'avenir. Pour le passé, le Parlement a accepté une validation législative. Le Conseil d'État estime que la loi de validation ne s'applique pas aux contentieux entre 1996 et 1997. Aussi, seront remboursés les redevables pour les titres de perception dont le fondement juridique a été annulé par l'arrêt du 20 mai 1998. Cette procédure sera mise en oeuvre dans le respect des prescriptions relatives aux voies et délais de recours en faveur des redevables ayant au préalable fait opposition aux titres de recettes. Enfin, il n'a pas relevé de difficultés pour la mise en place de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires.

En réponse à M. Marc Massion, il a indiqué que le rapport de la Cour des comptes sur la politique portuaire comportait des analyses très intéressantes. Il a précisé que la réponse du ministère figurait dans le rapport lui-même, et il a suggéré de s'y reporter. Il a rappelé que le Gouvernement avait fait progresser les dotations aux ports maritimes de 30 % en trois ans, celles-ci atteignant 803 millions de francs en l'an 2000, ce qui demeurait évidemment encore insuffisant. Il a ajouté que les futurs contrats de plan Etat-régions devraient accorder un milliard de francs aux investissements portuaires, contre 470 millions de francs pour le XIe plan. Il a rappelé que 595 millions de francs seraient apportés par l'État pour la desserte ferroviaire, et 60 millions de francs pour la desserte routière de " Port 2000 " au Havre, le projet lui-même représentant 2 milliards de francs sur trois ans, dont 575 millions de francs financés par l'État. Concernant les statuts des personnels des ports, il a souhaité qu'une réflexion s'engage avec les professionnels avant toute réforme. Il a enfin précisé qu'un décret du 9 septembre 1999 avait modifié le code des ports maritimes dans le sens souhaité par la Cour des comptes.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, il a confirmé que les crédits du tourisme avaient été revalorisés de 15 % en deux ans. Il a indiqué que des efforts restaient à réaliser, notamment en matière de qualité, d'accueil et de formation. Il a ajouté que plus de 500 millions de francs seraient prévus pour le tourisme dans les contrats de plan Etat-régions et que le Gouvernement étudiait le rapport de M. Le Pors sur les travailleurs saisonniers.

En réponse à M. Maurice Blin, qui l'avait interrogé sur les tarifs élevés des voyages dans les trains à grande vitesse, M. Jean-Claude Gayssot a répondu que la politique tarifaire était un élément essentiel dans le choix du mode de transport. Il a évoqué le succès de la carte " Imagine R " mise en place en région Ile-de-France pour les jeunes et étudiants de moins de 25 ans. S'agissant du décalage entre les crédits de paiement en matière d'investissement routier et les autorisations de programme, il a déclaré que le collectif budgétaire de fin d'année devrait accorder 300 millions de francs complémentaires pour les crédits routiers.

En réponse à M. Claude Belot, il a indiqué qu'une concertation s'était engagée entre l'État et le département de la Charente maritime sur les investissements routiers à prévoir dans ce département, et qu'il n'était pas encore possible de préciser le contenu du contrat de plan. Il a rappelé qu'en matière d'investissements routiers, l'octroi d'une " deuxième enveloppe " serait décidé et que des investissements d'intérêt national seraient financés hors contrats de plan, comme " Port 2000 " ou le TGV Est-européen. S'agissant des crédits du littoral, il a estimé que la situation actuelle résultait de celle héritée en 1997, qu'il s'efforçait depuis d'enrayer. Il a enfin promis de porter un intérêt particulier à la formation aéronautique civile.

En réponse à M. Michel Moreigne, il a indiqué que le comité interministériel d'aménagement du territoire avait prévu 600 millions de francs pour les contrats de plan en Limousin et 480 millions de francs en Poitou-Charentes.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, qui l'interrogeait sur les nuisances sonores aéroportuaires générées par le trafic de fret aérien, et le projet de création d'un troisième aéroport en région Ile-de-France, M. Jean-Claude Gayssot a indiqué qu'il s'engageait à lancer la création de l'aéroport avant que le seuil de 55 millions de passagers par an ne soit franchi. Il a souhaité que la décision soit prise en même temps que l'élaboration des schémas collectifs de services de transport.

En réponse à M. Roland du Luart, il a précisé que l'appel d'offres concernant l'autoroute A 28 Rouen-Alençon était en cours, et qu'une solution alternative à la concession (route à deux fois deux voies) était également à l'étude. Il a estimé que tous les éléments de décision seraient réunis pour mars 2000.

Jeudi 18 novembre 1999

- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF pour 2000 - Charges communes et article 67 rattaché - Examen du rapport

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen des crédits des charges communes sur le rapport de M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, rapporteur spécial.

M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, rapporteur spécial, a tout d'abord indiqué que le budget des charges communes pour 2000 s'élevait à 701,12 milliards de francs. Ses crédits, nets des dégrèvements et remboursements, qui s'élèvent à 330,73 milliards de francs, et des recettes d'ordre, soit 17,2 milliards de francs, s'établissent à 353,19 milliards de francs, soit une diminution de 1,3 % par rapport à 1999, à structure constante. Il a indiqué que ce budget subissait, traditionnellement, d'importants transferts de crédits, le projet de budget pour 2000 n'échappant pas à la règle, et a noté que 13,53 milliards de francs " sortaient " de ce budget, tandis que 10,57 milliards de francs y étaient inscrits pour la première fois. Il a, par ailleurs, attiré l'attention sur le fait que l'article 67 du projet de loi de finances pour 2000, rattaché, pour son examen, au budget des charges communes tendait à préciser les modalités de prise en charge de l'indexation des obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation. L'article 19 de la loi du 2 juillet 1998 a, en effet, autorisé l'État à émettre des obligations indexées sur l'inflation. L'article 67 dispose, dès lors, que la charge budgétaire correspondant au coût représentatif de l'indexation de ces obligations est inscrite, chaque année, en loi de finances. Le provisionnement de cette charge budgétaire pour 2000 s'établit à 895,535 millions de francs, inscrits au chapitre 11-05 du budget des charges communes.

M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, rapporteur spécial, a ensuite fait part des observations que lui inspirent les dotations allouées au budget des charges communes pour 2000. Il a d'abord relevé l'effort appréciable de clarification opéré par le projet de budget. Estimant que le budget des charges communes présente un caractère à la fois paradoxal - représentant près de la moitié des dépenses du budget général, il est relativement méconnu, alors qu'il aborde des thèmes très variés - et hétéroclite, puisqu'il comprend les crédits destinés à l'ensemble des services de l'État ou à plusieurs d'entre eux, qui ne peuvent être inscrits dans le budget d'un ministère particulier. Il a toutefois souligné que les modifications de structure réalisées pour 2000 permettent de clarifier la présentation du budget, la rendant plus lisible, suite à la suppression de 44 chapitres budgétaires.

Il a ensuite observé que les crédits inscrits sur ce budget correspondaient essentiellement à des dépenses de constatation, résultant de la prise en compte de circonstances extérieures. Il a rappelé que la dette de l'État, qui s'établissait à 4.022 milliards de francs au 31 décembre 1998, soit 47 % du PIB, n'apparaissait pas au budget de l'État, qui ne prend en compte que sa charge budgétaire. Cette dernière revient de 237,2 milliards de francs en 1999 à 234,7 milliards de francs en 2000, soit une baisse de 2,5 milliards de francs (-1,07 %). Il a toutefois estimé, comme l'avait exposé le rapporteur général, que la réduction du déficit budgétaire était insuffisante, eu égard à la conjoncture économique actuelle. Il a également noté que les dépenses de garanties évoluaient en fonction des aléas de la conjoncture internationale, et que l'évolution des dépenses en atténuation de recettes était étroitement liée à des facteurs exogènes ou à l'effet de mesures législatives antérieures.

M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, rapporteur spécial, a insisté sur le fait que le budget des charges communes ne donnait qu'une vue partielle des dépenses " transversales ". Ainsi, si 1,24 milliard de francs sont inscrits au titre des garanties de l'État, ces crédits ne prennent pas en considération les garanties " implicites " qui sont pourtant à la charge de l'État, c'est-à-dire les engagements à plus ou moins long terme auxquels le secteur public, dans son ensemble, devra faire face, et qui ne sont pas retracés en tant que tels dans le budget général. Il a relevé que l'État sera pourtant confronté, dans un avenir relativement proche, à un problème majeur, celui du " hors-bilan ", également appelé " dette publique invisible ". Il a regretté que cette notion fasse l'objet d'une grande imprécision, le Gouvernement s'en tenant à une définition purement juridique, extrêmement restrictive. Il a observé que le hors-bilan n'était ni complètement connu, ni totalement provisionné, qu'il s'agisse du coût des structures de défaisance, des garanties de l'État pour les prêts au logement, du démantèlement des centrales nucléaires ou des pensions de la fonction publique.

De même, si le budget des charges communes comporte une dotation de 230 millions de francs au titre des rémunérations d'activités, ces dernières s'élèvent, dans leur ensemble, à plus de 400 milliards de francs. Il a estimé que la situation était similaire pour les retraites de la fonction publique, la totalité des charges de pensions de l'État pour 2000 étant évaluée à 192,2 milliards de francs, alors que le budget des charges communes est doté de seulement 35,75 milliards de francs au titre des pensions, soit 18,6 % de l'ensemble.

Enfin, il a observé que les estimations de certaines dépenses étaient incertaines. C'est le cas, par exemple, des dépenses éventuelles et, surtout, des dépenses accidentelles, prévues par les articles 10 et 11 de l'ordonnance organique de 1959. Il a rappelé que la dotation inscrite au titre des dépenses accidentelles passait de 450 millions de francs en 1999, à 1.640 millions de francs en 2000, soit une augmentation de plus de 260 %, sans que le Gouvernement en donne la moindre justification autre qu'un vague " ajustement aux besoins ".

M. François Trucy a souhaité savoir la façon dont les dépenses accidentelles avaient été utilisées jusqu'à présent, et s'est interrogé sur les crédits inscrits au budget des charges communes au profit des rapatriés.

M. Denis Badré, observant que les charges de pensions progressaient en 2000 de 6,8 %, a voulu connaître les prévisions d'évolution des pensions de retraite à moyen terme.

M. Alain Lambert, président, s'est interrogé sur les suites qui seraient données par le Gouvernement au rapport François sur la comptabilité patrimoniale de l'État.

En réponse aux différents intervenants, M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, rapporteur spécial, a apporté les éléments d'information suivants :

- les crédits inscrits au titre des dépenses accidentelles ont un objet extrêmement varié, qu'il s'agisse de l'indemnisation des victimes de calamités naturelles, d'opérations de restructuration du secteur public, du financement de travaux concernant le Parlement européen, ou encore du plan humanitaire français en faveur des réfugiés du Kosovo ;

- les aides aux rapatriés, financées par le budget des charges communes, qui s'élèvent à 215,6 millions de francs en 2000, peuvent être regroupées en trois domaines : l'aide à la réinstallation, l'indemnisation et l'amélioration des retraites, cette dernière bénéficiant d'un montant de 164 millions de francs en 2000 ;

- l'évolution du montant des pensions de retraite à la charge de l'État est particulièrement inquiétante, cette charge budgétaire devant s'établir à 218 milliards de francs en 2005, 270 milliards de francs en 2010 et 325 milliards de francs en 2015, à législation constante ;

- le rapport François, qui a révélé les nombreux dysfonctionnements concernant la connaissance de son patrimoine par l'État, devrait, selon la réponse apportée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, lors de son audition par la commission le 9 novembre dernier, faire l'objet d'une réflexion permettant d'aboutir à des décisions concrètes, la commission des finances pouvant toutefois engager une étude sur le sujet du " hors-bilan ".

A l'issue de cette présentation, le rapporteur spécial a proposé l'adoption des crédits des charges communes, rappelant que ce sont, pour l'essentiel, des dépenses de constatation.

Puis la commission, conformément aux conclusions de son rapporteur spécial, a adopté les crédits du budget des charges communes pour 2000, ainsi que l'article 67 rattaché.

PJLF 2000 - Équipement, transports et logement - Transports terrestres - Examen du rapport

Puis la commission a procédé à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et du logement, III. Transports, 1. Transports terrestres, sur le rapport de M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial.

M. Auguste Cazalet a indiqué que les moyens de paiement demandés pour les transports terrestres en 2000, soit 45,3 milliards de francs, étaient stables par rapport aux crédits votés en 1999, mais représentaient une part croissante des crédits des transports, ceux-ci étant globalement en légère baisse pour 2000.

Il a précisé que les autorisations de programme augmentaient de 27,5 % par rapport à 1999, en partie du fait de la rebudgétisation du fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France, FARIF.

Les dépenses ordinaires, qui sont constituées en quasi-totalité de dépenses d'intervention publique, et représentent 97,5 % des crédits des transports terrestres, sont pratiquement stables.

Les dépenses en capital, très minoritaires au sein du budget, sont cependant dynamiques pour 2000, en raison de la budgétisation de crédits autrefois inscrits sur le FARIF.

En première observation, il a indiqué que le budget des transports terrestres était un budget de continuité, avant la mise en oeuvre des nouveaux contrats de plan.

Il a déclaré que les crédits affectés à la section transports terrestres évoluaient modérément pour 2000, mais que ces crédits ne retraçaient pas l'ensemble de l'effort de l'État, puisqu'il fallait leur ajouter 2,8 milliards de francs en provenance du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN), et surtout la dotation en capital de 12 milliards de francs à Réseau ferré de France (RFF), prélevée sur les recettes de privatisation.

Au total, il a évalué l'effort de l'État en faveur des transports terrestres à 60,1 milliards de francs pour 2000, soit une baisse de 0,9 % par rapport à 1999.

M. Auguste Cazalet a estimé que cette très légère diminution des crédits des transports terrestres pour 2000 était en contradiction avec la priorité affichée par le Gouvernement en faveur de l'investissement dans le transport ferroviaire. Cependant, il a rappelé que l'année 2000 était une période de transition, entre l'achèvement des contrats de plan 1994-1999 et la mise en oeuvre des nouveaux pour 2000-2006, encore en cours de négociation.

En deuxième observation, il a souhaité rendre sa vocation au FITTVN, pour lequel les intentions du Gouvernement demeuraient encore imprécises.

Il a rappelé que dans son rapport sur l'exécution du budget 1998, la Cour des comptes était très critique sur le fonctionnement du FITTVN, notant que la montée en puissance de ce fonds ne s'était pas accompagnée d'une majoration des moyens d'investissement dans les transports terrestres.

Il a rappelé que la Cour des comptes observait notamment que le FITTVN finançait l'acquisition de trains express régionaux (TER) qui n'entraient pas dans le champ d'action du fonds, tel que défini par le législateur, à savoir "la réalisation d'infrastructures fluviales, ferroviaires, de transport combiné et de routes".

Il a ajouté à ces critiques celles de la mission d'évaluation et de contrôle menée par l'Assemblée nationale, qui proposait de supprimer le FITTVN.

Il a conclu que le FITTVN, créé par l'article 37 de la loi d'aménagement du territoire de 1995, répondait à un besoin essentiel, à savoir le développement de nouvelles infrastructures, mais que ce fonds avait été détourné de son objet, et visait désormais à compenser les défaillances du budget des transports terrestres. Il a estimé que le budget des transports terrestres, qui était devenu presque exclusivement un budget de fonctionnement, devait redonner une priorité à l'investissement, afin que le FITTVN soit véritablement dédié au financement de nouvelles infrastructures. Il a enfin cité le ministère de l'équipement, des transports et du logement, qui reconnaissait lui-même que " l'ampleur du FITTVN reste limitée " et que " la question de son extension, tant du point de vue des ressources que des projets susceptibles d'en bénéficier, va rapidement se poser ".

En troisième observation, M. Auguste Cazalet a fait part de ses inquiétudes pour l'avenir de la société nationale des chemins de fers français (SNCF).

Il a précisé que ces inquiétudes étaient de deux ordres : d'une part, il s'agissait de la capacité de la SNCF à parvenir à retrouver un équilibre d'exploitation et donc à maîtriser son endettement, d'autre part il s'agissait des menaces sur la compétitivité future de l'entreprise publique.

Il a remarqué que l'année 1998 avait été apparemment marquée par une amélioration de la situation courante de l'entreprise, le résultat net, négatif, de l'exercice 1998 s'établissant à - 649 millions de francs, soit une légère amélioration.Pour 1999, la SNCF prévoit un chiffre net positif.

Malgré les mouvements sociaux, il a relevé que le bon niveau de traficgénéral en 1998 s'expliquait par des efforts en faveur de la clientèle et les effets de la Coupe du Monde. Cependant il a attribué ces résultats à la progression du trafic TGV et des lignes internationales, alors que la fréquentation des trains rapides nationaux diminue, traduisant un important déséquilibre dans les performances de la SNCF.

De plus, il a relevé que les charges pesant sur la SNCF s'étaient accrues en 1999. Il a noté que les barèmes des redevances d'infrastructures versés par la SNCF à RFF avaient été relevés par un arrêté du 8 juillet 1999. Compte tenu du volume de circulation prévu par la SNCF en 1999, le nouveau barème conduit à un montant prévisionnel de redevances de 9,8 milliards de francs.

Il a cité une réponse du ministère de l'équipement, des transports et du logement faisant savoir que " l'État s'est engagé à garantir à la SNCF des concours supplémentaires pour l'aider à faire face à ces augmentations sans compromettre son équilibre ". Il a cependant noté que les contributions budgétaires au transport ferroviaire n'avaient pas progressé pour 2000.

Au contraire, il a noté que la dette de la SNCF continuait à croître. Fin 1998, l'endettement à long terme de la SNCF s'élevait à 47,2 milliards de francs pour la dette de l'entreprise, alors que le service annexe d'amortissement de la dette représentait 55,2 milliards de francs.

Pour l'avenir, il s'est inquiété des entraves au développement de la SNCF.

Tout d'abord, il a souligné que la persistance des difficultés de l'entreprise dans sa gestion du dialogue social pourrait continuer à grever son résultat. Il a noté que le résultat commercial de l'année 1998 avait été considérablement affaibli par l'ampleur des mouvements sociaux, 180.000 jours de travail ayant été perdus en 1998, ce qui représentait 40% des jours de grève au niveau national. Il a rappelé, à ce sujet, que le 11 février 1999, le Sénat avait adopté, sur le rapport de M. Claude Huriet, au nom de la commission des affaires sociales, une proposition de loi tendant à assurer un service minimum en cas de grève dans les services et les entreprises publics.

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial, a ensuite rappelé qu'un accord national avait été signé le 7 juin 1999 sur l'application des trente-cinq heures, dont le coût pourrait être de l'ordre de 1,5 milliard de francs pour l'entreprise. Il a relevé que la conséquence directe des 35 heures serait un retour à la hausse du nombre d'agents de la SNCF, après plusieurs années d'effort de compression des effectifs.

Enfin, en matière de fret ferroviaire et de transport combiné, deux éléments clefs pour l'avenir de la SNCF, il a déclaré que les résultats de l'entreprise et les moyens budgétaires n'étaient pas à la hauteur des déclarations du gouvernement.

Il a relevé que des mesures avaient été prises, en 1998 et 1999, pour ouvrir le réseau ferroviaire français à l'Europe. Un décret du 23 décembre 1998 a ouvert aux entreprises ferroviaires exploitant des services de transport combiné la possibilité d'accéder au réseau ferré national. Un corridor de fret Est-Ouest a également été ouvert en 1999.

Dans ce contexte d'ouverture, il lui est apparu que la SNCF risquait de ne pas être prête pour faire face au défi européen dans les années à venir, notamment en matière de fret ferroviaire.

Il a noté que le transport de fret avait légèrement reculé en 1998, en raison d'une tension sur les moyens de production, qui entraîne une dégradation de la qualité du service. Il a ajouté que l'activité fret reculait encore de 4,7 % au premier semestre 1999.

Dans ce contexte, il a considéré que l'objectif de doublement du trafic fret d'ici 2010 semblait inaccessible, seule la réalisation d'infrastructures importantes, comme l'a souligné la commission d'enquête du Sénat, permettant de répondre à cet objectif.

Enfin, il a déclaré que le Gouvernement annonçait que le transport combiné était une de ses priorités, ce qui allait entièrement dans le sens préconisé par le Sénat, mais que les moyens d'investissement consacrés étaient dérisoires : les dotations du FITTVN au transport combiné représentent seulement 120 millions de francs.

En quatrième observation, il a souhaité que de nouveaux moyens soit donnés à l'expérience de régionalisation des services de voyageurs, dont le succès se confirmait. Il a relevé que le trafic régional avait progressé en 1998 de 2,4 % dans les six régions volontaires, contre une stagnation dans les autres régions. Le Limousin est devenu, le 1er janvier 1999, la 7e région expérimentale, et cinq régions ont signé avec la SNCF des conventions d'exploitation de transition vers la régionalisation.

Il a rappelé que sur l'initiative du Sénat, la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999 avait prolongé l'expérimentation jusqu'au 31 décembre 2001. Il a rappelé que le ministre de l'équipement, des transports et du logement avait annoncé que le transfert de compétence aux régions en matière de transport local de voyageurs devrait être intégré dans le projet de loi " urbanisme, habitat et déplacement ". Il a souhaité que ce sujet soit traité dans ce prochain projet de loi.

En cinquième observation, le rapporteur spécial a noté une réduction des dotations aux transports en Ile-de-France.

Il a indiqué que pour 2000, la contribution de l'État au budget de fonctionnement des transports en Ile-de-France régresserait de 3,9 %. Il a observé que la diminution de la contribution de l'État au budget de fonctionnement se confirmait, parallèlement à la hausse des contributions des usagers et de la part employeurs. En matière d'investissement, il a noté que les dotations de l'État serviraient, au moins en partie, à la poursuite des opérations du Xie plan (prolongation de Meteor jusqu'à Saint-Lazare, déplacement de la gare Massena, financement de transports en site propre) avant d'être consacrées aux opérations du XIIe plan, qui restent à préciser.

Il a tout de même vu deux éléments de satisfaction s'agissant des transports en Ile-de-France : une évolution du trafic à la hausse et, pour la première fois, le fait que la contribution de l'État serait versée directement au syndicat des transports parisiens, autorité organisatrice des transports, qui conclura des contrats avec les entreprises comprenant des engagements sur le niveau du service rendu. Il a considéré cette opération de contractualisation comme une avancée dans la bonne direction.

Dans une sixième observation, M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial, a regretté l'insuffisance des dotations en faveur du transport fluvial.

Il a noté que la dotation destinée aux voies fluviales pour 2000, 500 millions de francs, était encore à peine suffisante pour maintenir le réseau en l'état.

En matière de grands projets, malgré la priorité clairement donnée au projet Seine-Nord et la mise en place d'une mission d'évaluation du projet et de proposition d'un scénario d'aménagement, il a remarqué qu'aucun plan de financement n'avait encore été établi.

Puis, un large débat s'est instauré, au cours duquel sont intervenus MM. Maurice Blin, François Trucy, Denis Badré et Gérard Miquel.

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial, a approuvé les propos de M. Maurice Blin sur la difficulté de lecture, d'une année sur l'autre, de l'évolution des crédits des transports terrestres.

Il a regretté, avec M. François Trucy, qu'aucun dispositif de remboursement automatique en cas de retard d'avion n'existe, contrairement à ce qui se passe en matière de retards de trains.

En réponse à M. Denis Badré, qui l'interrogeait sur les transports en Ile-de-France, il a confirmé que le trafic des bus était orienté à la baisse, notamment en raison des problèmes d'insécurité dans certaines zones de l'agglomération parisienne. Il a approuvé le projet de contractualisation avec les entreprises de transports parisiens, tout en notant qu'il convenait évidemment de considérer la manière dont il serait appliqué.

En réponse à M. Gérard Miquel, qui l'interrogeait sur la progression du trafic grandes lignes et la mise en service de trains pendulaires, il a répondu que son expérience personnelle de la liaison Pau-Bordeaux montrait l'excellence du réseau à grande vitesse français, mais témoignait également des défaillances des liaisons routières. Il a ajouté que l'expérimentation de la nouvelle technologie des trains pendulaires se poursuivait et qu'il était encore trop tôt pour savoir dans quelles conditions et sur quelles voies ils pourraient être utilisés.

A l'issue de ce débat, M. Alain Lambert, président, a rappelé que la commission se prononcerait par un seul vote sur les crédits du ministère de l'équipement.

PJLF pour 2000 - Équipement, transports et logement - Routes et Sécurité routière - Examen du rapport

Puis, la commission a procédé à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et du logement, III. Transports, 2. Routes et 3. Sécurité routière, sur le rapport de M. Gérard Miquel, rapporteur spécial.

Le rapporteur spécial a tout d'abord indiqué que le budget des routes pour 2000 se caractérisait par une diminution importante des moyens de paiement, à 6,4 milliards de francs (-9,5 %), mais par une progression des moyens d'engagement, à 7,1 milliards de francs (+ 7,1 %).

Il a ajouté que ces crédits étaient complétés par ceux du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables, dont les crédits destinés aux routes diminueraient toutefois de 3,9 % pour 2000, pour s'établir à 1,5 milliard de francs.

Au total, même après prise en compte des dotations du FITTVN, il a observé que les crédits destinés aux routes étaient en repli pour 2000. Il a noté que les moyens d'engagement, qui traduisent l'engagement de programmes nouveaux pour les années à venir, étaient en nette augmentation.

Puis, il a fait part de ses principales observations sur le budget des routes.

En première observation , il a considéré que l'année 2000 constituait une année de transition avec la première année de mise en oeuvre des nouveaux contrats de plan Etat-région (2000-2006)

Il a indiqué que le XIe plan, élaboré pour la période 1994-1998 et prolongé jusqu'à fin 1999, prévoyait une enveloppe globale de 65,4 milliards de francs pour les routes, dont 27,4 milliards de francs pour la part État, hors investissements concernant l'exploitation routière. Au 31 décembre 1999, ce programme devrait être réalisé à 82,7%.

Il a ajouté que lors du comité interministériel d'aménagement du territoire (CIADT) du 23 juillet 1999 à Arles, le Premier ministre avait annoncé une enveloppe de 95 milliards de francs pour les contrats de plan Etat-région 2000-2006, dont 20,6 milliards de francs consacrés par l'État au réseau routier, y compris les investissements concernant l'exploitation routière. Il a observé que cette dotation était plus faible que celle prévue dans le XIe plan, mais qu'une seconde enveloppe devrait être prochainement décidée.

Pour la première année du XIIème plan, soit 2000, il a indiqué que les volets routiers des contrats de plan Etat-régions seraient dotés de 3,65 milliards de francs en autorisations de programme, soit une progression de 543 millions de francs par rapport à 1999.

En seconde observation, le rapporteur spécial des crédits des routes a noté que le programme d'investissements routiers serait réduit pour 2000, aussi bien sur le réseau national non concédé que sur le réseau autoroutier concédé.

Il a expliqué la chute des nouvelles mises en service par une réduction des moyens, mais également par le fait que 2000 serait une année charnière entre la fin du XIème plan et le début du XIIème plan, avec le changement de mode de financement du système autoroutier concédé, et l'attente des résultats de la négociation menée par le Gouvernement français avec la Commission européenne pour obtenir un allongement de la durée des concessions.

En troisième observation, il a noté que les dotations à l'entretien du réseau routier national étaient encore insuffisantes.

Il a estimé que le problème de l'entretien du réseau routier national était devenu crucial, la faiblesse des crédits budgétaires accordés à l'entretien des routes étant génératrice de surcoûts supplémentaires, liés aux nécessaires opérations de réhabilitation. Il a fait état d'études menées sur le réseau national et les ouvrages d'art, qui avaient permis de conclure que 11 % des voies nécessitaient des interventions lourdes, les travaux les plus importants étant à réaliser sur le réseau autoroutier non concédé. D'autre part, 18 % de la structure des ouvrages d'art est atteinte, dont 5 % gravement -a-t-il précisé- ce qui nécessite des travaux d'urgence. Au total, un programme complet de réhabilitation coûterait 15 milliards de francs.

Après une revalorisation l'an dernier, il a noté que les moyens d'entretien pour 2000 étaient stables, à 2,6 milliards de francs, ainsi que les moyens de réhabilitation et renforcement à 433 millions de francs.

En revanche, il s'est félicité de la revalorisation des dotations à la rénovation des ouvrages d'art, avec la mise en oeuvre des travaux de rénovation du pont d'Aquitaine sur la Garonne à Bordeaux.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a conclu que le renforcement des crédits d'entretien au secteur routier était un objectif prioritaire, dans la mesure où la faiblesse des dotations conduisait immanquablement à une dégradation du patrimoine routier, dont le coût à terme pour l'État serait bien plus élevé.

En quatrième observation, il a noté que la situation des sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes (SEMCA) restait préoccupante.

L'endettement des SEMCA atteint 154 milliards de francs au 31 décembre 1998. Il apparaît que l'endettement progressera jusqu'en 2004, en raison du lancement des sections prévues dans les conventions de concession actuelles, pour se résorber ensuite.

Il a souligné l'excellence du système d'adossement et la forte contribution des sociétés concessionnaires d'autoroutes aux recettes budgétaires de l'État. Entre 1994 et 1998, les transferts financiers fiscaux et non fiscaux du secteur autoroutier vers l'État ont représenté plus de 34 milliards de francs.

Il a craint que dans l'avenir, l'abandon du système de l'adossement ne conduise l'État à débourser des sommes importantes pour subventionner les nouvelles opérations autoroutières, ce qui ne pourrait qu'avoir un effet de freinage du programme autoroutier français.

Il a rappelé que le ministre de l'équipement, des transports et du logement avait annoncé devant la commission le dépôt, dans les prochaines semaines, d'un projet de loi réformant les sociétés concessionnaires d'autoroutes.

Puis le rapporteur spécial a présenté les crédits de la sécurité routière.

En première observation, il a indiqué qu'il s'agissait d'un budget prioritaire pour l'an 2000. Les crédits consacrés à la sécurité routière progresseront de 17 % pour 2000, pour s'établir à 534 millions de francs.

Il a relevé que l'augmentation des dotations avait pour objectif de traduire les priorités du comité interministériel pour la sécurité routière du 2 avril 1999, qui avait déclaré la sécurité routière grande cause nationale en 2000.

Il a rappelé que le budget affichait deux priorités : la communication et l'action locale d'une part, la formation des conducteurs d'autre part.

Il s'est félicité de l'accent mis, en 2000, sur la sécurité routière. Il a estimé les efforts d'autant plus nécessaires que les résultats de la France en matière de sécurité routière étaient déplorables. Il a souhaité toutefois que des moyens nouveaux, essentiellement des moyens de communication, fassent l'objet d'une étude d'impact précise, et que la politique de sécurité routière française tire profit des exemples étrangers, afin de répondre au plus près aux besoins en matière de sécurité routière.

Les seuls moyens d'information et de communication ne suffisant pas, il a rappelé, en seconde observation, que l'année 2000 devrait être également l'occasion d'accentuer le dispositif de sanctions en matière d'infraction à la sécurité routière.

Dans sa deuxième observation, M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a fait état des résultats catastrophiques de la France en matière de sécurité routière en 1998. La France se situe en effet à la troisième place dans l'Union européenne pour le nombre d'accidents corporels, derrière l'Allemagne et la Grande-Bretagne, mais au premier rang pour le nombre de tués (soit 8.918 tués). Ainsi, la France a été en 1998, le pays qui a connu la plus forte hausse du nombre de tués, alors même que la plupart des autres pays européens enregistraient des diminutions.

Il a considéré que l'année 1999 avait été l'occasion d'une prise de conscience des efforts à réaliser.

La loi du 18 juin 1999 portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents a introduit une nouvelle série de dispositions destinées à améliorer les comportements sur les routes.

Elle a notamment instauré une responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule en cas d'excès de vitesse ou de franchissement irrégulier du feu rouge ou du stop et elle a créé une sanction pour récidive de grand excès de vitesse (3 mois d'emprisonnement et 25.000 francs d'amende).

Le rapporteur spécial a noté que le comité interministériel de la sécurité routière, qui s'était tenu sous la présidence du premier ministre, avait également préconisé le renforcement des contrôles routiers et des sanctions. Parmi ces contrôles figurent notamment les dépistages d'alcoolémie. Il a remarqué, quel que soit le type de dépistage, que la proportion de dépistages positifs augmentait de façon sensible.

Il a ajouté que les effectifs des unités spécialisées de gendarmerie nationale affectés à la sécurité routière seraient accrus de 250 militaires, afin de répondre à l'objectif d'accroître de 10 % le nombre de contrôles routiers.

Il a rappelé qu'au-delà du renforcement de l'appareil répressif, le comité interministériel sur la sécurité routière avait souhaité faire des efforts sur la formation : des protocoles avec des assureurs devraient permettre de mener des rendez-vous d'évaluation pour les conducteurs novices et des plans de prévention des risques routiers seraient mis en oeuvre dans les entreprises et les services de l'État.

En troisième observation, il a noté l'accent mis sur la sécurité des infrastructures, après l'accident du tunnel du Mont-Blanc survenu le 24 mars 1999.

Il a indiqué qu'une circulaire interministérielle avait prescrit aux préfets de procéder à un diagnostic de sécurité des tunnels du réseau routier national d'une longueur supérieure à 1 kilomètre. S'agissant de la remise en service du tunnel du Mont-Blanc, il a déclaré que le coût des travaux préalables à la réouverture du tunnel s'élèverait à 1,3 milliard de francs et que le financement de ces travaux et la répartition de leur prise en charge ferait l'objet d'un protocole entre les deux sociétés concessionnaires d'autoroutes française et italienne.

Puis, il a rappelé qu'une dotation de 75 millions de francs serait inscrite au FITTVN pour la mise en sécurité des tunnels routiers de plus d'un kilomètre. Il a souhaité que les efforts soient poursuivis, avec la dotation nécessaire, pour les autres tunnels routiers.

Enfin, il a noté que le critère de la sécurité routière serait prioritairement pris en compte dans la sélection des projets entrant dans le cadre des contrats de plan Etat-région et des programmes d'actions cofinancés.

Il a rappelé, à cet égard, que les efforts en faveur de l'entretien des structures routières étaient essentiels pour garantir la sécurité des usagers. Il a souhaité, qu'au-delà des actions sur les comportements, des actions déterminées soient menées sur la sécurité des infrastructures.

Puis un large débat s'est ouvert, au cours duquel sont intervenus M. Philippe Marini, rapporteur général, MM. Jacques Pelletier, Maurice Blin, Denis Badré, Yann Gaillard, et Mme Marie-Claude Beaudeau.

M. Philippe Marini
a fait quelques observations sur le FITTVN, compte spécial du Trésor créé par la loi pour le développement et l'aménagement du territoire de 1995. En tant que membre du comité de gestion du fonds, il s'est inquiété de la tendance de plus en plus perceptible à faire du FITTVN un instrument de débudgétisation. Il a souhaité que le rapporteur spécial précise si les investissements routiers financés par le compte spécial du trésor permettaient de tracer une ligne de partage claire avec le budget. Puis, il a souhaité avoir des précisions sur la question de l'allongement des concessions autoroutières qui, selon lui, n'avait pas reçue de réponse précise du ministre de l'équipement, des transports et du logement, lors de son audition devant la commission. Enfin, il a demandé s'il était possible de faire une comparaison entre la qualité de l'entretien du réseau routier national et du réseau routier départemental.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a répondu que le FITTVN serait utilisé en 2000 pour la mise en sécurité des tunnels routiers, pour 75 millions de francs, et pour des opérations de désenclavement du massif central. Il a approuvé les propos de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur le fait que l'existence d'un compte spécial du trésor amenait à débudgétiser des crédits d'investissement routiers, mais il n'en a pas moins considéré qu'il s'agissait d'un instrument utile pour financer ces investissements. En matière de concessions autoroutières, il a regretté l'absence de choix politiques des élus locaux, qui avait conduit à laisser des itinéraires routiers importants sous forme de routes nationales. Il a pris l'exemple de la RN 20 et du trajet entre Paris, Toulouse et l'Espagne. Il a déploré que l'itinéraire soit morcelé entre autoroute concédée et non concédée, avec certaines portions payantes et d'autres gratuites. Il a expliqué qu'il aurait souhaité la réalisation d'une autoroute concédée avec la création de voies de raccordement sous forme de routes nationales.

Il a prédit que les pouvoirs publics, en raison de l'insuffisance des moyens, seraient tôt ou tard obligés de concéder des voies autoroutières existantes, faute de pouvoir les entretenir. Il a cité l'exemple de l'A 75, et de l'obligation de concéder le viaduc de Millau, alors même que sa rentabilité ne serait pas immédiate. Il a ajouté que l'accent aurait dû être mis sur la concession d'itinéraires structurants, avec le maintien en routes nationales des autres voies. Il a conclu que le projet de loi sur les sociétés concessionnaires d'autoroutes serait certainement l'occasion d'un débat sur ces thèmes.

Concernant plus particulièrement la comparaison entre l'entretien du réseau routier national et du réseau départemental, il a estimé qu'elle était très difficile, car dépendante de la situation financière de chaque département.

M. Alain Lambert, président, a insisté sur le fait que la commission des finances devrait être particulièrement attentive au prochain projet de loi sur les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Il a fait état d'une mauvaise interprétation de la position de la Commission européenne, celle-ci reprochant essentiellement à la France son manque de transparence, plutôt que le principe de l'adossement. Il a estimé que le ministère de l'économie et des finances, et notamment la direction du Trésor, tirait des enseignements discutables de la position de la commission européenne. Il a rappelé que les sociétés concessionnaires d'autoroutes subissaient des prélèvements élevés qui, eux, n'étaient pas conformes aux normes européennes. Il a conclu qu'à l'occasion de l'examen du futur projet de loi relatif aux sociétés concessionnaires, le rapporteur spécial, le rapporteur général et lui-même n'hésiteraient pas à s'enquérir auprès de la Commission européenne de ses prises de position.

En réponse à M. Jacques Pelletier, M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a précisé que les prochains contrats de plan prévoyaient une enveloppe de 20,6 milliards de francs pour les investissements routiers, contre 27,4 milliards de francs pour les anciens contrats de plan, mais qu'il convenait d'attendre de connaître la dotation de la seconde enveloppe pour en tirer des enseignements définitifs.

En réponse à M. Maurice Blin, il a précisé que les moyens de paiement en faveur des routes diminueraient effectivement de 9,5 %, avec une chute sensible des crédits en faveur du développement du secteur routier (-20,7%), et une stabilité des moyens accordés à l'entretien. En prenant en compte les effets de la budgétisation du FARIF, les moyens de paiement en faveur du développement du secteur routier régressent de 30%.

En réponse à M. Denis Badré, il a indiqué qu'il fallait effectivement développer l'entretien des routes et il a regretté les retards pris en matière d'investissement. Mais il a expliqué que les parlementaires devaient également considérer l'impact des lois qu'ils adoptaient, s'agissant notamment des contraintes d'environnement et de préservation de patrimoine, qui avaient pour effet de retarder considérablement les programmes routiers.

En réponse à M. Auguste Cazalet, qui expliquait que certains élus avaient une responsabilité dans le refus de mettre sous concession autoroutière des itinéraire structurants, le rapporteur spécial a répondu qu'il appartenait effectivement aux élus de faire des arbitrages. Il a considéré que la construction de routes nationales était un élément positif, lorsqu'elle venait en complément d'une liaison autoroutière, et non en concurrence.

Répondant à MM. Jacques Pelletier, Yann Gaillard, Denis Badré et Mme Marie-Claude Beaudeau sur les questions de sécurité routière, il a tenu à préciser qu'en la matière, les autoroutes étaient un gage de sécurité, puisqu'elles enregistraient un nombre considérablement moindre de tués que les autres voies routières. Il a ajouté que toutes les questions de sécurité routière ne pourraient être réglées par les seuls aménagements routiers, les moyens étant d'ailleurs limités, et qu'il était essentiel de compléter l'action sur les infrastructures par une politique de communication. Avec Mme Marie-Claude Beaudeau, il a déploré le nombre considérable d'accidentés de la route.

Le rapporteur spécial des crédits de la sécurité routière a considéré que le système répressif devait être plus adapté, et que la loi récemment votée créant un délit de grande vitesse répondait à un besoin et commençait à produire ses effets. Il a ensuite souhaité l'intégration des avancées technologiques, comme les radars embarqués, ou les régulateurs de vitesse pour l'équipement des véhicules, afin de mieux prévenir les accidents liés à la vitesse. Enfin, il a approuvé les propos de M. Jacques Pelletier et de Mme Marie-Claude Beaudeau sur la nécessité d'une pédagogie active, notamment dans les écoles primaires, pour enseigner les principes de la sécurité routière. Il a toutefois ajouté que le comportement des adultes jouerait un rôle déterminant.

A l'issue de cette présentation, M. Alain Lambert, président, a rappelé qu'en raison de la structure de vote retenue par le Gouvernement, les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement feraient l'objet d'un seul vote de la commission, comme en séance publique. Il a toutefois demandé à chaque rapporteur spécial d'exprimer son point de vue sur les crédits dont il a la charge, avant que la commission ne vote sur l'ensemble des crédits du département ministériel.

M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a souhaité le rejet du budget des services communs, et l'adoption du budget de l'urbanisme et du logement.

M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial, a préconisé le rejet des crédits des transports terrestres.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a émis un avis favorable aux crédits des routes et de la sécurité routière.

Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial, a souhaité l'adoption des crédits du tourisme.

M. Alain Lambert, président, a fait savoir que M. Marc Massion, rapporteur spécial, avait préconisé l'adoption des crédits des ports maritimes, de même que M. Claude Lise, rapporteur spécial des crédits de la marine marchande et M. Yvon Collin, rapporteur spécial des crédits des transports aériens et de la météorologie.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a rappelé les éléments suivants : le budget des services communs enregistre une hausse des rémunérations des personnels et un effort moins soutenu de compression des effectifs ; le budget de l'urbanisme et du logement présente des aspects positifs, mais une diminution des crédits d'investissement ; le budget des transports terrestres laisse planer des inquiétudes sur l'avenir de la SNCF, avec notamment la mise en oeuvre des trente-cinq heures ; le budget des routes enregistre une forte chute des moyens pour l'investissement routier, et le budget des ports maritimes inscrit des dotations encore très modiques pour " Port 2000 " au Havre, alors que dans un récent rapport, la Cour des comptes stigmatise l'absence de politique portuaire.

Tirant enseignement de ces observations, et rappelant l'insuffisance des moyens accordés aux investissements structurants dans le cadre des prochains contrats de plan Etat-régions et l'avis négatif de la commission sur le budget de l'aménagement du territoire, M. Philippe Marini, rapporteur général, a préconisé le rejet du budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement.

Puis elle a également proposé de rejeter les crédits du budget annexe de l'aviation civile.

Audition de M. Edouard Michelin, cogérant du groupe Michelin

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Edouard Michelin, cogérant du groupe Michelin sur la situation et les perspectives d'activité du groupe Michelin.

Après avoir exprimé l'appréhension que pouvait éprouver un jeune dirigeant de 36 ans qui vient d'être nommé à la tête de l'entreprise Michelin, à l'idée de prendre la parole devant la commission des finances du Sénat, M. Edouard Michelin a procédé à une présentation liminaire de l'industrie du pneumatique et de la stratégie de Michelin. Il a ainsi indiqué que le marché du pneumatique était un marché mondial au chiffre d'affaires d'environ 70 milliards d'euros et au rythme de croissance faible - de l'ordre de 2 à 3 % ; l'Amérique du Nord et l'Europe représentent chacune un tiers du marché, le dernier tiers étant réparti entre l'Asie - surtout le Japon - et l'Amérique du Sud. Il a souligné que les barrières à l'entrée d'un tel marché étaient très élevées en raison du montant élevé des dépenses de recherche-développement, de l'importance de la première monte (les clients en première monte, constructeurs automobile ou de camions, souhaitent être accompagnés dans leur développement sur tous les continents), du poids des investissements (un franc de chiffre d'affaires nécessite un investissement supérieur à un franc), et de la nécessité de disposer d'un portefeuille multimarque. Ces barrières à l'entrée expliquent le très faible nombre de nouveaux entrants.

M. Edouard Michelin a par ailleurs indiqué que la restructuration subie par le marché du pneumatique depuis trente ans avait ramené le nombre de principaux manufacturiers de dix à cinq - dont seulement trois de taille mondiale - sans que la situation soit pour autant figée, si l'on en croit l'alliance Goodyear Dunlop-Sumitomo. Aujourd'hui, le marché se répartit entre les acteurs " globaux " présents sur deux continents au moins et offrant une gamme de produits complète (Goodyear, Bridgestone et Michelin), les acteurs " semi-globaux " présents sur un grand continent au moins et offrant une gamme de produits plus limitée (Continental, Pirelli, Sumitomo-Dunlop avant son alliance avec Goodyear et Yokohama), et les acteurs locaux, qui représentent un quart du marché mondial. Les trois grands possèdent chacun une part de marché d'environ 30 % sur son continent d'origine, Bridgestone se distinguant par sa présence la plus équilibrée dans le monde.

S'agissant de Michelin, dont les 120.000 salariés sont présents dans plus de 170 pays, M. Edouard Michelin a montré que ses ventes avaient fortement progressé depuis 1960, notamment en Europe (48 sites de production dont 25 en France), puis en Amérique du Nord, grâce à l'acquisition d'Uniroyal-Goodrich en 1989. Il a précisé que l'essor de Michelin dans des zones où il était implanté depuis peu (Asie-Pacifique, Afrique-Moyen Orient) était également remarquable. Ses concurrents ayant toutefois fait connaître leurs ambitions sur le marché européen - plus gros que le marché asiatique -, il a souligné qu'il mettrait tout en oeuvre pour que Michelin préserve son avance technologique, notamment grâce aux efforts de recherche dans des centres comme Clermont-Ferrand, Greenville ou Tokyo. Les autres objectifs du groupe sont le renforcement de sa présence mondiale, des gains de productivité, particulièrement en Europe, l'engagement, la responsabilité et l'efficacité des hommes qui le composent, à tous les niveaux, et la fiabilité du pilotage. M. Edouard Michelin a conclu son exposé liminaire en rappelant les principales étapes dans l'innovation du groupe, depuis 1891, date de dépôt du brevet du pneu démontable à 1998, date de création du " Pax System ", en passant par 1946, année de l'invention du pneu " X ", premier pneu radial.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a alors interrogé le président du groupe Michelin sur l'actualité d'une forme juridique comme la société en commandite par actions, sur la politique menée par Michelin en matière de stock-options, sur les conséquences d'une mesure comme la réduction du temps de travail pour Michelin et sur la position du groupe Michelin en matière de normes environnementales.

M. Edouard Michelin a indiqué que Michelin était une société en commandite par actions depuis l'origine, et que cette structure avait marqué la culture du groupe et son mode de fonctionnement. Il a estimé que si cette forme juridique était ancienne, elle n'était pas pour autant obsolète dans la mesure où elle engageait la responsabilité des cogérants dans la durée et favorisait une gestion orientée vers le long terme.

Puis M. Edouard Michelin a rappelé que Michelin était l'une des deux seules sociétés du CAC 40 qui ne distribuait pas de plans de souscription d'actions. Sans exclure d'en mettre en place un jour, il a estimé que le cours de l'action était la conséquence de la bonne gestion de la société et de la confiance des actionnaires, mais ne devait pas être un objectif en soi. Il a indiqué que les rémunérations de l'encadrement de Michelin comportaient déjà une part variable liée à l'atteinte d'objectifs quantitatifs et qualitatifs. Après avoir observé que les stock-options étaient souvent utilisés pour dissuader les salariés de démissionner avant de pouvoir lever leurs options, il s'est montré réservé à l'égard de tout système faisant reposer l'attachement des salariés sur une " carotte " financière. Il a enfin considéré que la période était trop troublée pour légiférer en la matière.

S'agissant des 35 heures, M. Edouard Michelin a rappelé, à titre liminaire, que tout en étant très soucieux de maintenir une forte implantation en France, où Michelin dispose de 30 % de ses capacités de production, le groupe était très fortement soumis aux conditions de la compétition internationale. Ainsi, 25 à 30 % des investissements sont réalisés en France, alors que le marché français ne représente que 15 % des ventes du groupe et que 70 % des pneus fabriqués en France sont exportés. Il a souligné, par ailleurs, qu'au sein de Michelin, un grand nombre de personnes travaillaient déjà 28 ou 32 heures par semaine, tout en étant payées sur la base de 39 heures, grâce à une meilleure organisation du travail. Faisant valoir que la masse salariale représentait déjà 30 % du coût des produits, il a indiqué qu'il était primordial pour Michelin que l'application des 35 heures ne dégrade pas la compétitivité des usines françaises, déjà inférieure à celle des usines d'Amérique du Nord ou d'Asie.

Enfin, sur les aspects environnementaux, M. Edouard Michelin a indiqué que la filière pneumatique devait répondre à trois enjeux : l'utilisation optimale des ressources de la planète, la lutte contre l'effet de serre et la gestion des déchets. Sur le deuxième enjeu, il a observé que 20 % de la consommation de carburants automobiles (qui est elle-même à l'origine de 30 à 40 % des émissions de gaz carbonique dans le monde) avait pour origine la résistance des pneus au roulement, mais que grâce à des produits comme le " pneu vert " ou le PAX, Michelin était mieux positionné que ses concurrents. Sur le troisième, il a fait valoir, d'une part que les pneus Michelin faisaient montre d'une bonne durée de vie, et, d'autre part, que le taux de recyclage des pneus (60 %) était meilleur que celui du papier (50 %) ou du verre. Il a aussi remarqué que la France devait poursuivre ses efforts en ce domaine.

Puis un débat s'est engagé au cours duquel sont intervenus MM. René Ballayer, Jacques Pelletier, Maurice Blin, Roland du Luart, Bernard Angels, Michel Charasse et Alain Lambert, président.

Répondant à M. René Ballayer, M. Edouard Michelin a indiqué que les quatre matières premières principales pour fabriquer des pneus étaient le caoutchouc naturel (Michelin possède en propre six plantations d'hévéas), le caoutchouc synthétisé à partir du pétrole, le sable (silice), les câbles métalliques et les cablés textile. Interrogé sur les principales révolutions technologiques qu'il envisageait pour l'avenir dans le domaine du pneumatique, le président du groupe Michelin a considéré que l'avenir était, d'une part, à l'intégration la plus en amont possible avec les constructeurs automobiles, et, d'autre part, à la fabrication de pneus " intelligents ", capables de fournir des informations au système de pilotage. Il a estimé que les plus gros potentiels d'innovation résideraient dans le dépassement des frontières entre secteurs et dans l'optimisation des systèmes.

A M. Jacques Pelletier, M. Edouard Michelin a répondu que dans une logique strictement financière, l'usine Wolber de Soissons aurait dû être fermée il y a dix ans et que Michelin avait fait son maximum pour la sauver, notamment en rachetant sa production à 5 % au dessus de son prix de revient pour la revendre à perte, dans l'attente de trouver des solutions. Après avoir souligné que l'annonce de la fermeture avait été effectuée en juillet dans la dignité, il a formé le voeu que le plan social soit approuvé rapidement pour ne pas rendre plus douloureux un sujet qui l'était déjà trop. Il a enfin précisé que la société de reconversion (la SIDE, créée par Michelin) s'adjoindrait le concours d'autres sociétés dans le bassin du Soissonnais.

Répondant à M. Maurice Blin, qui l'interrogeait sur la responsabilité des fonds de pension américains dans la décision de licencier 7.500 personnes, et à M. Michel Charasse qui estimait injustes les critiques formulées contre Michelin, compte tenu, notamment, de l'admirable conduite de l'entreprise pendant la seconde guerre mondiale, M. Edouard Michelin a reconnu la maladresse qu'il avait commise en matière de communication et en a rappelé la genèse. Il a ainsi observé qu'en dépit des bénéfices réalisés - et qu'il convient d'ailleurs de relativiser -, le groupe qu'il dirigeait risquait, s'il n'accélérait pas ses progrès de productivité, de rencontrer à terme des difficultés, tant la concurrence était rude sur le marché européen, où la productivité de Michelin est inférieure de 15 à 20 % à celle de ses grands concurrents. Il a ainsi évoqué le risque d'un tassement de la compétitivité engendrant une diminution des ventes et la fermeture d'usines. C'est pour conjurer ce risque, a-t-il ajouté, qu'a été annoncée en septembre aux salariés du groupe, la suppression de 7.500 postes de travail en Europe sur trois ans. Cette annonce visait à donner un élément de gestion prévisionnelle de l'emploi à trois ans et à sensibiliser le personnel sur la nécessité d'améliorer la compétitivité. Après avoir souligné que Michelin n'avait procédé qu'à 186 licenciements par désignation sur 25.000 suppressions de postes en vingt ans, il a toutefois reconnu qu'il avait négligé le contexte social où intervenait une telle annonce, ainsi que la dimension symbolique d'une entreprise comme Michelin. Mais il a regretté l'acharnement médiatique dont il avait fait l'objet. Il a enfin précisé que les fonds de pension, contrairement à l'idée répandue, pouvaient être un facteur de stabilité dans le capital des sociétés, contrairement à certaines sociétés d'investissement à capital variable (SICAV), qui investissent à très court terme.

M. Edouard Michelin a ensuite indiqué que les premiers responsables de la compétition économique mondiale étaient les consommateurs, dont les choix individuels étaient guidés par les prix les plus bas. Il a observé que la difficulté consistait à concilier les intérêts du consommateur, du travailleur et de l'épargnant, qui sont autant de facettes d'une même personne.

A M. Roland du Luart, qui l'interrogeait sur le positionnement de Michelin au Japon et sur l'avenir du marché sud-américain, M. Edouard Michelin a répondu que l'Asie était une mosaïque de pays dont les barrières linguistiques, culturelles, politiques et douanières étaient fortes, et qu'il convenait par conséquent de procéder pays par pays, Michelin étant implanté au Japon, en Thaïlande, aux Philippines et, depuis peu, en Chine. Il a estimé que l'Amérique du Sud était un marché d'avenir.

Enfin, répondant à MM. Bernard Angels et Alain Lambert, président, M. Edouard Michelin a indiqué que les États-Unis, le Canada ou la Grande-Bretagne pratiquaient des politiques très incitatives à l'investissement. Il a évoqué, à cet égard, la concurrence que se livrent les différents États américains, pour attirer les entreprises. S'agissant de la France, il s'est montré très sensible à la stabilité fiscale, en indiquant que toute modification du cadre fiscal avait nécessairement un impact sur les décisions des entrepreneurs, qui sont des décisions à long terme. Enfin, le président de Michelin a souhaité que les fusions actuelles ne tuent pas les petites entreprises. Il a estimé qu'elles étaient loin d'être achevées dans le secteur du pneumatique et a formé le voeu que Michelin en bénéficie.