Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Alain Lambert, président.

Protection des trésors nationaux - Examen du rapport pour avis

La commission a tout d'abord examiné, sur le rapport de M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis, la proposition de loi n° 444 (1998-1999) relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane.

M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis, a d'abord indiqué que, s'il avait pris l'initiative de demander à la commission de se saisir pour avis, c'était moins parce que celle-ci avait été saisie au fond de la loi du 31 décembre 1992 à l'époque, que parce que l'important travail qu'il avait accompli sur le marché de l'art en France avait précisément mis l'accent sur les difficultés rencontrées par notre pays pour protéger son patrimoine dans un marché ouvert sur le monde.

Rappelant que la France enregistrait des " excédents " record en matière d'oeuvres d'art ces dernières années, d'un montant moyen de l'ordre de 2 milliards de francs par an, le rapporteur pour avis a souligné que la loi du 31 décembre 1992 comportait de graves lacunes. Au départ, l'oeuvre qualifiée de trésor national pouvait être, soit acquise, soit classée, à l'issue de l'appel de trois ans après le refus du certificat lui tenant lieu " de passeport ". Or, la jurisprudence résultant de l'affaire du " Jardin à Auvers " de Van Gogh a placé l'Etat dans le dilemme suivant : acheter le trésor national ou le laisser sortir. Compte tenu des efforts de maîtrise des dépenses publiques, le rapporteur pour avis a souligné un paradoxe : plus un trésor national est cher, plus il a des chances de quitter le territoire national.

M. Yann Gaillard a ensuite présenté les principales novations résultant de la proposition de loi déposée par M. Serge Lagauche et Mme Dinah Derycke : l'instauration d'une procédure d'acquisition à dires d'experts des biens ayant fait l'objet d'un refus de certificat et l'octroi de garanties supplémentaires pour l'Etat, les propriétaires et les tiers.

Sur le premier point, le rapporteur pour avis a signalé que le nouveau régime permettrait à l'Etat d'acquérir l'oeuvre à un prix déterminé par une expertise contradictoire, sauf si le propriétaire n'accepte pas l'offre, auquel cas le refus de certificat est indéfiniment renouvelé.

Puis il a détaillé les diverses améliorations ponctuelles que la proposition de loi envisage pour renforcer les garanties offertes aux différentes parties prenantes :

- l'administration devra ainsi être tenue informée de toute mutation portant sur un bien ayant fait l'objet d'un refus de certificat ;

- le propriétaire d'un bien n'ayant pas obtenu le certificat doit en informer un acquéreur éventuel, tout comme il doit porter à la connaissance de ce dernier les offres d'acquisition faites par l'Etat ;

- les biens importés à titre temporaire sont dispensés de certificat ;

- la durée de validité du certificat, qui est de cinq ans actuellement, deviendrait valable, sans limitation de durée, pour les objets ayant plus de cent ans ;

- enfin, il est prévu que la composition de la commission chargée de délivrer les certificats serait désormais constituée paritairement de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées.

Puis M. Yann Gaillard a exposé brièvement les principales améliorations que la commission des affaires culturelles, saisie au fond, s'est efforcée d'apporter au texte initial de la proposition de loi.

Ces modifications ont essentiellement pour objet de raccourcir et d'encadrer les délais de procédure dans l'intérêt des collectionneurs privés, et de préserver la marge de manoeuvre de l'Etat.

Abordant enfin ses propres propositions, le rapporteur pour avis a souligné qu'elles tendaient à mieux associer les propriétaires privés à la défense du patrimoine national en accordant des avantages fiscaux à ceux qui feraient l'acquisition de trésors nationaux.

Il a alors exposé le principe des quatre amendements qu'il voulait soumettre à la commission. Ceux-ci ont pour objet de prévoir :

- l'exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit des objets mobiliers classés avec l'accord de leur propriétaire ;

- la possibilité pour l'Etat de présenter une offre émanant d'une personne privée dans le cadre de la nouvelle procédure d'acquisition à dires d'experts ;

- l'articulation entre les lois de 1913 et de 1992, afin de prévoir que le classement d'un objet mobilier interdit d'exportation est de droit ;

- un agrément de droit au titre de la dation en paiement pour les oeuvres classées après un refus de certificat.

A l'issue de cet exposé, M. Yann Gaillard, rapporteur pour avis, a notamment précisé, en réponse à une question de M. Philippe Marini, rapporteur général, qu'il n'existait pas, en France, de doctrine pour la détermination de la qualification de trésor national sur le modèle des critères dits loi Waverley applicables en Grande-Bretagne.

Puis la commission a procédé à l'examen des articles.

Après une intervention de M. Michel Charasse, elle a adopté, avant l'article 5, un article additionnel, modifiant l'article 793 du code général des impôts pour prévoir que les objets classés à la demande et avec le consentement de leur propriétaire, ne sont pris en compte au titre des droits de mutation à titre gratuit qu'à concurrence de la moitié de leur valeur.

La commission a adopté un deuxième article additionnel avant l'article 5 modifiant l'article 16 de la loi du 31 décembre 1913, pour prévoir que le classement d'un objet mobilier auquel est refusé le certificat de la loi du 31 décembre 1992, est de droit lorsqu'il est demandé par son propriétaire.

A l'article 5 (possibilité pour l'Etat de présenter au propriétaire d'une oeuvre ayant fait l'objet d'un refus de certificat une offre émanant d'une personne privée acceptant le classement de l'oeuvre), la commission a adopté sur, proposition du rapporteur pour avis, un amendement permettant à l'Etat de présenter l'offre d'une personne privée qui s'engage à demander, en cas d'acceptation de son offre, le classement du bien et à le rendre accessible au public.

Enfin, après l'article 5, la commission a adopté, sur proposition du rapporteur pour avis, un amendement à l'article 1716 bis du code général des impôts prévoyant que l'agrément est de droit au titre de la dation en paiement pour les biens ayant fait l'objet d'un certificat, dès lors que la valeur libératoire proposée est celle à laquelle sont parvenus les experts dans le cadre de la procédure de l'article 9-1 de la loi du 31 décembre 1992.

A l'issue de ce débat, au cours duquel sont notamment intervenus MM. Michel Charasse et Roland du Luart, la commission a donné un avis favorable à la proposition de loi, sous réserve de l'adoption des amendements exposés ci-dessus.

Programme de travail de la commission et des missions de contrôle

La commission a ensuite entendu une communication du président, relative au programme de travail de la commission et des missions de contrôle des rapporteurs spéciaux.

Le président a rappelé que le bureau de la commission venait de se réunir pour établir ce programme. Il a insisté sur la nécessité pour les commissaires des finances de remplir leur mission de contrôle comme le droit en vigueur leur en donne le pouvoir. Il a informé les membres de la commission que ce programme leur serait transmis par voie écrite, afin qu'ils puissent faire leurs observations, et que les missions des rapporteurs spéciaux seraient ensuite rendues publiques, la commission leur donnant mandat d'accomplir ces missions.

La commission a pris acte de cette communication.

Mercredi 26 janvier 2000

- Présidence de M. Alain Lambert, président.

Programme pluriannuel des finances publiques à l'horizon 2003 - Audition de M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget

La commission a procédé à l'audition de M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, sur le programme pluriannuel des finances publiques à l'horizon 2003.

En accueillant la nouvelle secrétaire d'Etat, M. Alain Lambert, président, a signalé que son arrivée pouvait être l'occasion d'un renouvellement du dialogue entre le Gouvernement et le Parlement. Il a, à cet égard, souligné qu'il observait depuis quelques années une dégradation de ce dialogue et un mépris croissant des droits du Parlement.

M. Alain Lambert, président, a fait part de son étonnement devant le fait que les parlementaires pouvaient être informés par la presse des intentions, ou même des propositions, du Gouvernement. Il a, à cet égard, rappelé que l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que les citoyens ont le droit de suivre l'emploi des deniers publics par l'intermédiaire de leurs représentants, et a formé le voeu que les prérogatives du Parlement soient mieux respectées à l'avenir.

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a indiqué que l'établissement du programme pluriannuel des finances publiques constituait désormais un exercice annuel en application de traités sur l'Union européenne, qui poursuivait pour la période 2001-2003 un double objectif : éclairer l'ensemble des pays membres de la zone euro ainsi que la Banque centrale européenne sur la politique budgétaire conduite par le Gouvernement français, en vue de la coordination des politiques économiques menées au sein de l'Union économique et monétaire, mais aussi poursuivre une réflexion sur la stratégie optimale en matière de finances publiques, visant à assurer une croissance durable et le retour au plein emploi. A cet égard, il a estimé que ce programme pluriannuel s'inscrivait dans la continuité de la politique du Gouvernement depuis deux ans et demi qui, selon lui, a donné des résultats favorables en matière de croissance, d'emploi et de maîtrise des finances publiques.

Le ministre a présenté l'analyse du Gouvernement sur le taux de croissance retenu pour la période couverte par le programme pluriannuel. Il a indiqué que ce taux était de 3 % par an sur la période, soit une hypothèse forte, et notamment plus forte que celle retenue par de nombreux Etats membres de l'Union économique et monétaire, mais toutefois réaliste. En 1999, l'hypothèse de croissance s'établissait à 2,7 %, tandis que la fourchette retenue pour 2000 était comprise entre 2,6 % et 3 %, alors que la croissance devrait effectivement s'établir à au moins 3 % en 2000, en raison notamment de la bonne conjoncture du second semestre de l'année 1999. Il a considéré que, si la croissance française était sensiblement plus forte que celle de l'Allemagne et de l'Italie, c'est parce qu'elle était soutenue par la demande intérieure et la consommation des ménages, encouragées par le Gouvernement. Il a en outre estimé qu'il était absolument nécessaire d'entreprendre des réformes structurelles de grande ampleur afin d'accroître la productivité des entreprises françaises. Il a cité l'encouragement de l'innovation, source de croissance et d'emplois, en particulier grâce au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication, ainsi que les biotechnologies. Il a également évoqué l'effort de formation, qui consiste en particulier à permettre aux chômeurs de rejoindre le marché du travail, mais aussi à accroître le niveau de qualification professionnelle, ce qui pose le problème de la formation tout au long de la vie professionnelle. Il a indiqué qu'existaient des aléas internationaux risquant de peser sur la croissance, tels que les déséquilibres de l'expansion économique américaine, forte malgré une pénurie d'épargne. C'est pourquoi le Gouvernement a retenu une hypothèse de croissance " de repli " de 2,5 % par an sur la période 2001-2003. Il a néanmoins considéré que le Gouvernement envisageait une croissance soutenue au cours des six prochaines années.

M. Christian Sautter a indiqué que le Gouvernement poursuivait l'ambition de maîtriser les dépenses publiques et qu'il avait fixé une norme de progression de ces dernières de 4 % sur la période, soit de 1,3 % par an en moyenne, son objectif étant de ramener la part des dépenses publiques de 55,6 % du produit intérieur brut (PIB) en 1996 à 50,4 % en 2003, traduisant ainsi une réduction relative de la dépense publique dans la production nationale. S'agissant des prélèvements obligatoires, il a rappelé qu'ils avaient sensiblement augmenté de 1993 à 1997. Le Gouvernement a décidé de les réduire progressivement jusqu'en 2003, et de les ramener à leur niveau de 1995. Cette réduction des prélèvements obligatoires poursuit, selon le ministre, deux objectifs : favoriser le retour à l'activité des personnes aujourd'hui inactives, mais aussi soutenir la consommation et l'emploi, en particulier au sein des classes populaires et moyennes. Il a affirmé que l'engagement pris par son prédécesseur de réduire la part de la dette publique dans le PIB en 2000 sera respecté, ce ratio devant s'établir à 57 % en 2003 au lieu de 60,3 % en 1999. Cet objectif ne devrait pas être contrarié par la stabilisation, voire la légère reprise, des taux d'intérêt, puisqu'il est rendu possible par la réduction des déficits décidée par le Gouvernement. Les déficits publics, en effet, devraient s'établir à 0,3 % en 2003, ou à 0,5 % si l'hypothèse de croissance de 2,5 % se réalise.

Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, a considéré que la réduction des impôts à l'horizon 2003 résultait de la gestion sérieuse des finances publiques depuis juin 1997. Elle a expliqué que la définition d'un objectif de dépense constituait une nouveauté par rapport à la définition d'un objectif de déficit, le Gouvernement ne souhaitant pas que la dépense publique serve de variable d'ajustement. La fixation d'un objectif de dépenses, au contraire, présente trois avantages : elle inscrit les actions ministérielles sur le moyen terme, ce qui accroît leur efficacité et leur lisibilité ; elle permet de faire jouer les stabilisateurs automatiques, aussi bien en période de doute sur la croissance comme à la fin de 1998 et au début de 1999, qu'en période de forte expansion ; enfin, elle permet de dégager des marges de manoeuvre mises à profit par le Gouvernement pour réduire les prélèvements obligatoires et les déficits et pour alléger la dette.

Le secrétaire d'Etat au budget a clairement réfuté l'argument selon lequel la maîtrise de la dépense publique conduisait à l'immobilisme. Elle a rappelé que huit départements ministériels étaient prioritaires dans la loi de finances pour 2000, les crédits qui leur sont alloués progressant quatre fois plus vite que la moyenne. Elle a également ajouté que le service de la dette était passé de la deuxième à la troisième place des postes budgétaires depuis 1997, derrière l'éducation nationale et l'emploi et la solidarité. Elle a précisé que, chaque année, la loi de finances redéployait 30 milliards de francs, et a cité l'exemple du budget de l'emploi, les emplois-jeunes, notamment, étant financés à hauteur des deux tiers grâce à un redéploiement de crédits à l'intérieur de ce budget.

Mme Florence Parly a indiqué que le Gouvernement entendait généraliser la pratique de contrats triennaux passés avec les ministères, de manière à fixer les priorités, les objectifs de dépenses ainsi que les moyens permettant de les réaliser. Les dépenses de l'Etat devraient progresser de 1 % sur l'ensemble de la période, soit un objectif se situant dans la continuité du précédent programme. Elle a rappelé que, depuis 1997, les dépenses de l'Etat avaient évolué, en moyenne, de 0,33 % par an, contre 1,7 % par an au cours de la précédente législature. En revanche, les dépenses de sécurité sociale devraient croître de 4,2 % sur la période, soit une moyenne inférieure à 1,4 % par an. En ce qui concerne le seul objectif national, les dépenses d'assurance maladie, il devrait croître de 4,5 % sur la période, soit un point de plus que l'objectif affiché dans le précédent programme, afin de prendre en considération la situation des hôpitaux publics. Quant aux administrations publiques locales, leurs dépenses devraient croître de 5,8 % sur la période.

Le ministre a rappelé que, en 1997, le déficit des administrations publiques au sens de Maastricht s'élevait à 3,5 % du PIB, hors la soulte France Télécom. Or l'objectif que s'est assigné le Gouvernement est d'aboutir en 2003 à un déficit de 0,5 %, dans l'hypothèse basse de croissance et de 0,3 % dans le haut de la fourchette. Enfin, elle s'est félicitée de ce que la réduction des déficits permette de réduire le poids de la dette, pour la première fois depuis vingt ans. Ceci permet d'alléger la charge pesant sur les générations futures. Elle a conclu en précisant que l'objectif du Gouvernement consistait à dépenser mieux.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a considéré que la presse avait déjà apporté les principales informations présentées par les ministres, et a évoqué un " exercice d'auto-célébration ". Il a néanmoins tenu à retracer l'évolution des prélèvements obligatoires depuis 1997. Il a fait observer que le programme d'allégement d'impôts annoncé par le Gouvernement ne présentait aucun caractère de nouveauté par rapport à celui présenté en décembre 1998, et qu'il repoussait au contraire d'un an, de 2002 à 2003, l'objectif de diminution des prélèvements obligatoires qui est chiffré à 43,7 % du PIB. Il a jugé que la seule nouveauté de ce programme résidait dans le constat du niveau historique atteint par ces prélèvements en 1999, soit au minimum 45,3 % du PIB, ce qui a conduit le Gouvernement à réviser ses objectifs. Prenant comme point de comparaison le programme d'allégement du Gouvernement allemand présenté en décembre dernier, et portant sur 230 milliards de francs sur cinq ans, avec des mesures précises concernant les taux de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés, M. Philippe Marini, rapporteur général, a noté l'absence totale à ce jour de concrétisation du programme du Gouvernement français, celui-ci n'ayant jusqu'à présent présenté aucune mesure réelle d'allégement fiscal. Il a rappelé que le caractère soutenu de la croissance était à l'origine de l'importance des rentrées fiscales effectives, les recettes supplémentaires engendrées s'élevant à 270 milliards de francs en 1998 et 1999, et à 160 milliards de francs en 2000. Il a, dès lors, voulu savoir quels impôts le Gouvernement entendait réduire, ainsi que les modalités pratiques de cette réduction. Il s'est notamment interrogé sur la manière dont serait allégée la taxe d'habitation, expliquant que, en cas de compensation, cette réforme entraînerait une augmentation des dépenses publiques, mais qu'elle compromettrait l'équilibre des finances locales si elle n'était pas compensée. Il s'est également enquis de la façon dont serait allégé le poids de l'impôt sur le revenu. Enfin, il a rappelé que le rapport établi par M. René Teulade sur les retraites, au nom du Conseil économique et social, prévoyait qu'un taux de croissance de 3,5 % par an en moyenne jusqu'en 2040 permettrait d'éviter l'apparition d'un problème de financement des retraites. Il s'est dès lors inquiété de ce que le Gouvernement envisage dès 2001 une hypothèse de croissance s'établissant entre 2,5 % et 3 %.

M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a rappelé que les prélèvements obligatoires avaient enregistré une hausse en 1999, passant de 44,9 % du PIB à 45,3 % du PIB. Il a donné deux explications à cette augmentation : tout d'abord, une progression des revenus en 1998 supérieure aux prévisions, qui avait conduit l'Etat à encaisser des suppléments d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés, ensuite une hausse moyenne des prix en 1999 plus faible que prévu. Il a toutefois rappelé que le Gouvernement avait décidé de diminuer les impôts de 40 milliards de francs dès l'an 2000, et a estimé que la comparaison avec le programme de réduction d'impôts en Allemagne n'était pas défavorable à la France, au regard de la période considérée, et du montant du produit intérieur brut allemand. La réduction de 40 milliards de francs des impôts chaque année voulue par la France est à mettre en parallèle avec les 45 milliards de francs indiqués par le Gouvernement allemand.

Concernant les baisses d'impôt à venir, M. Christian Sautter a indiqué que celles-ci porteraient essentiellement sur l'impôt sur le revenu et la taxe d'habitation, avec deux objectifs : favoriser le retour à l'activité et encourager l'initiative. S'agissant plus particulièrement de la taxe d'habitation, il a expliqué que le Gouvernement attendait l'exécution définitive des comptes de l'Etat pour 1999, afin de voir s'il disposait des marges de manoeuvre suffisantes pour la diminuer rapidement. Il a souhaité que le débat d'orientation budgétaire pour 2001 soit l'occasion d'un débat plus général sur les baisses d'impôts. Enfin, il a souligné que le rapport de référence en matière de retraites restait, pour le Gouvernement, le rapport de M. Charpin, commissaire général au plan, le rapport de M. Teulade au nom du Conseil économique et social, ayant vocation à contribuer à la réflexion. Il a indiqué que le Gouvernement annoncerait les mesures nécessaires pour consolider les régimes par répartition au mois de février.

M. Jacques Oudin a souhaité connaître le partage de la diminution des prélèvements obligatoires entre prélèvements sociaux et autres prélèvements. Il a souligné que les objectifs en termes de croissance des dépenses sociales n'avaient pas été tenus, si bien que l'objectif du programme de stabilité de les contraindre à une progression de 1,6 % par an ne lui apparaissait pas réaliste. Enfin, il s'est étonné qu'un nouvel impôt dit écologique, comme la taxe générale sur les activités polluantes, serve à financer la politique de réduction du temps de travail, plutôt que des actions de défense de l'environnement, comme la lutte contre les pollutions par les hydrocarbures, particulièrement d'actualité.

M. Paul Loridant a rappelé que le programme pluriannuel sur les finances publiques n'avait qu'un caractère indicatif, et il a souhaité connaître les analyses qui avaient conduit le Gouvernement à retenir une fourchette de croissance de 2,5 % à 3 % par an. Il a également demandé la manière dont le Gouvernement comptait concilier la maîtrise des dépenses publiques et la réponse aux attentes sociales des Français, notamment en matière de revendications salariales, alors que les revenus du patrimoine continuent de progresser.

M. Joël Bourdin a approuvé les prévisions de croissance retenues dans le programme pluriannuel sur les finances publiques, ayant, en tant que président de la délégation du Sénat pour la planification, retenu les mêmes hypothèses. Il a toutefois souligné les risques pesant sur la croissance, notamment l'endettement croissant des ménages, et une possible défaillance des marchés financiers. Il a souhaité connaître les recettes définitives de l'Etat pour 1999. Faisant référence au rapport de M. Malinvaud, concernant l'allégement des charges sur les bas salaires, il a demandé quel serait l'impact de la baisse des prélèvements envisagée par le Gouvernement sur l'activité économique.

M. Bernard Angels a estimé que la majorité de la commission des finances avait été, il y a un an, sceptique sur les hypothèses de croissance et de création d'emplois présentées par le Gouvernement, alors que celles-ci s'étaient confirmées. Il a souhaité travailler en collaboration avec le Gouvernement sur la réforme de la taxe d'habitation et de l'impôt sur le revenu. Il a demandé si le Gouvernement comptait, dans le cadre de sa réforme de l'impôt sur le revenu, supprimer l'ensemble des " niches fiscales ", et s'il envisageait des baisses ciblées de TVA. Il a souhaité, au-delà du débat sur la répartition des fruits de la croissance, qu'une attention toute particulière soit portée au fonctionnement des services publics, dont les Français avaient pu mesurer l'utilité lors d'événements récents.

Mme Marie-Claude Beaudeau a déclaré que le nouveau programme sur les finances publiques s'inscrivait dans la continuité de la politique gouvernementale, dont il fallait toutefois réviser certaines orientations. Rappelant les demandes formulées à la fin de l'année 1999, elle a plaidé pour une action en faveur des plus démunis, considérant que le soutien à la consommation intérieure jouerait un rôle déterminant dans la poursuite de la croissance. Elle a demandé si le Gouvernement entendait réduire de manière générale le taux de la TVA, ou s'il entendait ne procéder qu'à des baisses ciblées. Enfin, elle a fait état de la situation difficile des hôpitaux, et des risques pesant sur le fonctionnement des caisses d'allocations familiales.

M. Christian Sautter a répondu à M. Jacques Oudin que, par convention, dans les programmations pluriannuelles sur les finances publiques, la diminution des prélèvements obligatoires était entièrement imputée à l'Etat.

A M. Paul Loridant, il a précisé que l'hypothèse de croissance du PIB de 2,5 à 3 % par an, pour la période 2001-2003, se fondait sur le constat que la France avait enregistré un retard entre 1991 et 1997, en termes de demande. Le rattrapage de la consommation et de l'investissement des ménages et des entreprises devrait permettre d'enregistrer une croissance provisoirement plus forte que la tendance de long terme de l'économie française. Il a ajouté qu'au-delà de ce rattrapage, la croissance devrait être soutenue par l'investissement technologique et humain, l'exemple des Etats-Unis montrant que cette hypothèse était réaliste. S'agissant de la question sociale, il a rappelé que le Gouvernement anticipait une croissance du pouvoir d'achat des ménages de 2,5 % par an après impôt pour les années à venir, et il a précisé que les inégalités entre les revenus du travail et du capital seraient corrigées par les décisions qui seront prises par le Gouvernement en matière de fiscalité et d'épargne salariale. Il a rappelé que des mesures avaient déjà été prises en matière de logement social, de couverture maladie universelle, d'accès à l'emploi et de formation.

En réponse à M. Joël Bourdin, M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a précisé que les hypothèses du Gouvernement prenaient en compte les risques potentiels, et notamment une diminution de la croissance des Etats-Unis, pour 0,5 point de PIB. S'agissant de la progression des dépenses publiques, de 1,3 % par an, il a estimé qu'elle était compatible avec le maintien d'un service public de qualité, utile aux particuliers comme aux entreprises. Il a indiqué qu'il transmettrait à la commission des finances du Sénat les résultats de l'exercice budgétaire 1999, dès qu'ils seraient connus. S'agissant des analyses du rapport de M. Malinvaud, il a rappelé que le Gouvernement avait déjà engagé des allégements de cotisations sociales sur les bas salaires pour 110 milliards de francs, à terme.

En réponse à M. Bernard Angels, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a déclaré que le Gouvernement travaillait à l'aménagement de la taxe d'habitation pour l'an 2000, et à des diminutions d'impôts pour 2001. Il a ajouté que la suppression des " niches fiscales " et les réductions de TVA pouvaient faire partie de la réflexion globale menée par le Gouvernement.

A Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Christian Sautter a précisé que si la hausse du taux de TVA avait une répercussion immédiate dans les prix pour les consommateurs, la baisse risquait d'avoir une répercussion sur les marges des producteurs, si bien qu'une telle mesure devait faire l'objet d'une réflexion approfondie.

Mme Florence Parly a répondu à M. Jacques Oudin que les objectifs du Gouvernement en matière de dépenses sociales se situaient dans la continuité du programme élaboré pour 1998-2000, si bien que l'objectif de 1,6 % de croissance des dépenses d'assurance maladie pour 2000 et de 1,5 % ensuite était réaliste. En matière de fiscalité écologique, elle a rappelé que le budget de l'environnement était passé de 1,5 milliard de francs en 1997 à 4,3 milliards de francs en 2000.

En réponse à M. Paul Loridant, Mme Florence Parly a indiqué que la maîtrise des dépenses n'impliquait pas le renoncement du Gouvernement à ses objectifs sociaux, au contraire : ainsi, le Gouvernement a procédé à 30 milliards de francs de redéploiement par an, depuis 1997, pour financer ses priorités.

En réponse à M. Joël Bourdin, elle a indiqué que l'augmentation des dépenses en volume serait tenue à hauteur de 1 % en 1999, en dépit d'une inflation moins importante que prévu (0,5 % au lieu de 1,3 % prévus). S'agissant des performances de la France dans sa réduction des déficits publics, elle a rappelé que notre pays avait réduit ses déficits de 1,7 point de PIB depuis 1997, et que l'objectif de croissance des dépenses publiques de 1,3 % par an était très raisonnable par rapport au programme des autres pays européens.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, elle a indiqué que le budget de l'emploi et de la solidarité permettait de répondre aux attentes des exclus, et qu'il avait progressé de 4 % en 1999 et en 2000. Elle a ajouté que ces crédits étaient complétés par 10 milliards de francs votés en loi de finances rectificative pour 1999 pour des politiques sociales, notamment le versement de l'allocation de rentrée scolaire, et que le pouvoir d'achat des minima sociaux avait augmenté de 8 % depuis 1998, soit deux fois plus que la moyenne nationale. Au sujet des difficultés de gestion des caisses d'assurance maladie et des caisses d'allocations familiales, elle a rappelé que le ministre de l'emploi et de la solidarité avait annoncé des moyens supplémentaires en leur faveur.

En conclusion, M. Christian Sautter a indiqué qu'il était prêt, avec Mme Florence Parly, à répondre prochainement aux questions des membres de la commission, concernant la réforme du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, afin de dissiper toutes les inquiétudes au sujet du devenir des services locaux de ce ministère. M. Bernard Angels a alors rappelé qu'il présenterait prochainement devant la commission une communication sur les services de la direction générale des impôts.