- Présidence commune de MM. Roland du Luart, vice-président de la commission des finances et Philippe François, vice-président de la commission des affaires économiques et du plan. Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Michel Camdessus, directeur général du Fonds monétaire international (FMI), sur la crise financière internationale.

Economie internationale - Audition de Michel Camdessus, directeur général du FMI

Le directeur général du FMI a insisté, sans succomber à la tentation de jouer les "Cassandre", sur la difficulté de porter une appréciation sur la situation mondiale.

S'agissant de la France, il a souligné que l'environnement était une variable aussi fondamentale que difficile à saisir pour déterminer la nature de l'évolution de l'économie nationale en 1999.

M. Michel Camdessus a estimé que les cent quatre-vingt-deux gouverneurs de banques centrales et ministres des finances, réunis au mois d'octobre 1998 à Washington, avaient quitté cette réunion plus inquiets qu'ils n'y étaient arrivés. Il a attribué cette situation à leur prise de conscience de l'importance de la chute du "hedge fund" LTCM, susceptible d'en préfigurer d'autres.

Le directeur général du FMI a observé que les perspectives d'évolution de l'économie mondiale s'étaient dégradées depuis un an et que le taux de croissance pour l'année 1998, révisé, s'établissait maintenant à 2 %. Toutefois, il a affirmé, avec "courage", qu'il n'était pas impossible que la conjoncture soit, marginalement, meilleure en 1999 qu'en 1998.

Exposant les causes du retournement de tendance, il a tout d'abord fait état d'une "crise dans la crise" en Asie, en raison de la situation du Japon. Ce pays, a-t-il expliqué, ne traverse pas une période de stagnation, mais de récession, la contraction du produit intérieur brut étant évaluée à 1,8 % par les autorités japonaises et à 2,5 % par le FMI. Il a ajouté que la croissance négative du Japon avait un impact récessif sur les autres économies de la zone, notamment celles de la Corée, de l'Indonésie et de la Thaïlande.

Puis M. Michel Camdessus a constaté que le "virus" de la crise circulait à travers le monde de manière aléatoire, frappant par exemple la Russie et le Brésil dans des délais rapprochés. Il a considéré que l'augmentation consécutive des taux d'intérêt dans les pays émergents ou en transition avait pour conséquence d'y raréfier l'offre de crédit.

Ce phénomène, qu'il a qualifié de "gravissime", est jugé d'autant plus dommageable et brutal que les pays frappés ont bénéficié, au cours de la période précédente, d'une facilité d'accès au crédit. Il n'a pas exclu un risque de retour à des mesures de contrôle des changes ou d'ajustement par restriction des importations, soulignant les effets négatifs de telles solutions pour les pays européens exportateurs.

Sans sous-estimer l'ampleur de la crise, le directeur général du FMI, faisant preuve d'un optimisme bien tempéré, a néanmoins identifié sept raisons d'espérer une amélioration de la santé de l'économie mondiale en 1998. En premier lieu, il a mis l'accent sur la situation favorable de l'économie des Etats-Unis d'Amérique qui, bien qu'en phase de décroissance du point de vue des cycles économiques, reste solide. Il s'est félicité de la situation budgétaire de ce pays, qui a retrouvé des marges de manoeuvre. Il a ajouté que sa politique monétaire souple, marquée par deux baisses récentes des taux d'intérêt, était favorable à la croissance mondiale. Il a avancé le chiffre d'une croissance prévisionnelle du produit intérieur brut américain de 2 % en 1999.

En second lieu, M. Michel Camdessus a mis en évidence la bonne tenue de l'économie européenne et des pays de la zone euro en particulier. Il a reconnu que l'Europe subissait le choc de la crise asiatique mais il s'est félicité de la qualité de sa réaction, qu'il a expliquée par l'existence de réserves de demande de consommation et d'investissement. Il a envisagé une croissance européenne de 2,5 % en 1999.

En troisième lieu, le directeur général du FMI a observé que la Chine et l'Inde, qui représentent à eux seuls le tiers de l'humanité, "tenaient bon". Il a ajouté que la bonne tenue du yen contribuait à repousser l'éventualité d'une dévaluation du yuan.

En quatrième lieu, il a ensuite salué les progrès en matière de gestion macro-économique prudente accomplis depuis le début des années quatre-vingt-dix par les pays en développement et en transition. Il a souligné qu'en Afrique, depuis plusieurs années, le taux de croissance de l'économie était supérieur à celui de la population.

Cinquièmement, M. Michel Camdessus s'est félicité de la maturité de la réaction de la communauté internationale, et notamment des pays émergents, face à la crise. Il a constaté que les appels au retour du protectionnisme ne recevaient qu'un écho limité, les mesures prises par la Malaisie constituant un cas isolé, ne trouvant d'équivalent guère qu'au Myanmar et en Belarus.

Sixièmement, il a qualifié d' "admirable" la réaction des pays les plus frappés, la Thaïlande, la Corée et l'Indonésie. Il a expliqué qu'après un temps de réaction, ils avaient mis en oeuvre des plans d'ajustement, élaborés en collaboration avec le FMI, dont les résultats étaient déjà tangibles.

Illustrant son propos, il a signalé que ces pays connaissaient à nouveau des surplus de balance des paiements, que le niveau de leurs taux d'intérêt était inférieur à celui d'avant la crise, que le niveau de leurs réserves de changes était supérieur à celui d'avant la crise et qu'ils avaient recouvré des marges de manoeuvre budgétaires. Au total, il a estimé que l'impact de la situation de ces pays sur la croissance mondiale en 1999 serait neutre.

Il a remarqué que les Philippines, pourtant au centre de la crise à ses débuts, avaient été relativement épargnées par la crise en Asie, ayant toujours scrupuleusement mis en oeuvre les recommandations du FMI.

En dernier lieu, il a constaté avec satisfaction que les pays contaminés, tels que le Brésil, réagissaient au choc en resserrant leurs politiques macro-économiques. Ces politiques correspondant largement à ses propres recommandations, le Fonds serait d'autant plus en mesure de soutenir ces pays en cas de besoin.

M. Michel Camdessus a alors rappelé quatre préalables au redressement de la situation économique mondiale, identifiés au début du mois de septembre 1998 par les experts qu'il avait consultés. En premier lieu, il fallait que les banques centrales émettent un signal tendant à montrer qu'elles se préoccupaient au moins autant de la chute de la demande que du niveau de l'inflation. En second lieu, il était jugé nécessaire que le Congrès des Etats-Unis vote l'augmentation de capital du FMI. En troisième lieu, il fallait que la communauté internationale s'engage à empêcher que le " domino " Brésil ne tombe. Enfin, il était primordial que les Japonais donnent des gages de leur volonté de réformer leur système financier.

Quelques semaines plus tard, le directeur général du fonds monétaire international a constaté que ces quatre préalables avaient été satisfaits. Il a noté que les banques centrales avaient baissé leurs taux d'intérêt, que le Congrès des Etats-Unis avait donné son accord à la participation à l'augmentation du capital du fonds monétaire et que le Brésil, à la suite d'un travail associant plusieurs pays de la sous-région, était sur le point de conclure un accord avec le FMI s'étalant sur les trois prochaines années. Il s'est félicité de l'accord intervenu entre la Diète japonaise et le Gouvernement de ce pays sur le soutien au système bancaire et de la mise en oeuvre d'une stimulation budgétaire de l'économie qui ne soit pas limitée à quelques mois de 1999. Il a ajouté que les réformes fiscales annoncées par le Gouvernement japonais auraient un caractère permanent.

M. Michel Camdessus a conclu son intervention en évoquant les prévisions de croissance de l'économie française pour 1999. Il s'est déclaré légèrement plus optimiste que le Gouvernement français. Il a indiqué que le FMI pronostiquait pour 1999 un taux de croissance du PIB de 2,8 %, contre un taux de 2,7 % retenu par le Gouvernement pour l'élaboration de la loi de finances pour 1999. Le directeur général du fonds monétaire international a toutefois rappelé que la moyenne des taux établis par les différents organismes de prévision s'établissait à 2,5 %.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a jugé rassurant le discours du directeur général du fonds monétaire international, comme se doivent de l'être les discours institutionnels. Il a qualifié le FMI de " pompier " du système financier international. A cet égard, il a considéré que le fonds devait remplir, pour prendre une image, à la fois les missions de régulation des commissions de sécurité et les missions d'intervention des brigades de sapeurs-pompiers.

S'agissant de la régulation, le rapporteur général a considéré que l'organisation du système financier de certains pays, d'Asie notamment, avait causé beaucoup de dommages à l'économie mondiale. Il a demandé au directeur général du fonds monétaire international quelles mesures avaient été prises pour améliorer la transparence et l'accès à l'information économique dans ces pays.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite évoqué l'augmentation de 90 milliards de dollars américains du capital du FMI. Il a demandé si le fonds avait calculé le montant des créances douteuses sur les systèmes bancaires européens, américains ou asiatiques à mettre en regard de cette augmentation de capital.

S'agissant des interventions du fonds, le rapporteur général a fait part d'un sentiment répandu selon lequel, au cours des années passées, les moyens n'avaient pas toujours été chichement mesurés vis-à-vis de pays où la malhonnêteté est érigée en système d'Etat. Par conséquent, il a souhaité savoir si le FMI envisageait d'établir un bilan critique de ses méthodes, mais aussi des canaux auxquels il a eu recours pour distribuer du crédit.

Après avoir relevé que personne n'avait prévu la crise financière des pays émergents d'Asie, M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques, a constaté que la théorie économique peinait à anticiper les évolutions, avant de s'interroger sur les moyens d'améliorer la fiabilité des prévisions. L'effondrement de certains fonds spéculatifs américains tel que le "hedge fund" LTCM a-t-il ajouté, pourrait-il entraîner une crise d'une ampleur comparable à celle de la faillite des caisses d'épargne américaines ? Il s'est, ensuite, demandé, si la correction boursière observée ces derniers mois avait ramené les cours à leur niveau d'équilibre. Il a, enfin, souhaité recueillir l'avis du directeur général du FMI sur la situation respective de la Chine et de la Russie.

En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, M. Michel Camdessus a apporté les précisions suivantes :

- le Fonds monétaire international avait souligné, dès la crise mexicaine de 1994-1995, la possibilité d'une déstabilisation des systèmes bancaires et financiers, ainsi que la nécessité de renforcer les moyens de régulation et de contrôle de ces réseaux, tant au niveau national qu'au niveau international ;

- plusieurs mois avant la crise, certains pays du Sud-Est asiatique, ont été mis en garde contre les risques encourus par leur économie ; dans le cas de la Thaïlande, il était intervenu personnellement auprès des autorités au cours des quinze mois précédant la crise ; dans certains de ces pays, celles-ci n'ont pas souhaité mettre en oeuvre les réformes préconisées par le Fonds monétaire international, ni même révéler la situation réelle de leur réserve de change ; de ce point de vue, les principaux enseignements de la crise asiatique sont la nécessité de renforcer la transparence des systèmes financiers nationaux et d'améliorer l'application des règles prudentielles qui leurs sont applicables ;

- le niveau des créances " douteuses " dans les pays émergents ne constitue pas un facteur de risque majeur, dans la mesure où la plupart d'entre eux dispose de ratio de solvabilité satisfaisants. En revanche, ces pays -dont les besoins de financement sont estimés entre 200 et 300 milliards de dollars- courent le risque d'une crise de liquidité compte tenu de l'augmentation de leurs taux d'intérêt et de la défiance des investisseurs privés ; pour faire face à une telle crise, le FMI dispose d'une enveloppe d'environ 110 milliards de dollars ; le recours exceptionnel aux droits de tirage spéciaux pourrait accroître les moyens du fonds ; ces moyens, complétés par la Banque mondiale et par les aides financières bilatérales des Etats, sont estimés suffisants pour faire face à une éventuelle crise, toute la question étant de les utiliser à point et à bon escient ;

- la création de l'Euro constitue un événement historique et économique considérable, qui devrait modifier le fonctionnement du système monétaire international. Elle pose cependant au FMI un problème institutionnel dès lors que, selon ses statuts, seuls les Etats sont membres, la Banque centrale européenne, ne pouvant, en tant que telle, y être représentée ; compte tenu de la lourdeur de la procédure de réforme des statuts, cette situation risque de perdurer pendant un certain temps ; aussi le FMI a-t-il négocié, pour le représentant de la Banque centrale européenne, un accord qui lui permettrait, en tant qu'observateur, d'assister à certaines réunions du conseil d'administration du fonds ; à terme, il serait souhaitable qu'une réforme des statuts permette à l'Union européenne d'être représentée en tant que telle et que les quotas des pays membres de l'Union européenne soient mis en commun ;

- la contribution du FMI au redressement des finances de la Russie a été approuvée à l'unanimité par les pays membres du fonds, son montant étant proportionnel au quota de ce pays conformément aux statuts du FMI ; cette mission était difficile dans un pays n'ayant jamais connu le capitalisme et dont les structures de l'Etat sont très affaiblies ; après six années de mise en oeuvre des réformes, le bilan reste largement positif ; si les autorités russes n'avaient pas commis l'erreur de procéder à un rééchelonnement autoritaire de la dette publique et si le prix du pétrole n'avait pas baissé de plus de 30 %, la Russie aurait pu récolter dès cette année les fruits des réformes accomplies ;

En réponse à M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques, M. Michel Camdessus a apporté les précisions suivantes :

- la théorie économique est aujourd'hui incapable de prévoir et de quantifier les phénomènes de contagion des crises financières ; en la matière, les connaissances restent empiriques et largement tributaires de l'intuition ;

- l'expérience de la Corée et de la Russie montre, en tous cas, qu'en l'absence d'une bonne " policy-mix ", d'institutions financières solides et de structures étatiques satisfaisantes, les risques de crise sont élevés ;

- l'effondrement de certains fonds spéculatifs américains tels que LTCM met en évidence la nécessité de renforcer les règles prudentielles et de s'assurer de leur application tout en imposant une plus large transparence des systèmes financiers ; il convient, par ailleurs, d'éviter qu'en cas de défaillance d'un établissement financier, le refinancement soit opéré avec l'argent des contribuables, afin notamment de responsabiliser les opérateurs privés ; les autorités américaines ont adopté une attitude judicieuse dans la crise du LTCM, mais il importe qu'elles améliorent la transparence du système financier américain ;

- depuis 1993, la Chine a entrepris d'importantes réformes économiques qui commencent à porter leurs fruits ; elle a notamment procédé à des réformes drastiques dans les secteurs de la banque et des entreprises publiques afin de les adapter aux règles du marché. En outre, le choix de ne pas dévaluer la monnaie chinoise, en dépit des dévaluations d'autres monnaies asiatiques, apparaît aujourd'hui judicieux. En effet, cela sert la crédibilité de la politique économique et ne met pas en danger la compétitivité des produits chinois en raison de la remontée des cours des principales monnaies asiatiques.

Observant que le FMI avait été institué à la suite des accords de Bretton Woods dans un contexte et avec des objectifs qui ont aujourd'hui évolué, M. Joël Bourdin s'est interrogé sur les moyens d'accroître l'efficacité des interventions du fonds, notamment en matière de contrôle de l'application des règles prudentielles dans les secteurs bancaire et financier.

M. Jacques Pelletier a demandé si le FMI disposait d'un service chargé d'évaluer les conséquences sociales des mesures qu'il préconise. Il a souhaité aussi savoir si l'on constatait aujourd'hui une tendance à moyen terme à la diminution des taux d'intérêt. Il s'est enfin interrogé sur la possibilité pour le fonds d'accroître ses ressources financières en vendant ses réserves d'or.

Citant un article de presse de M. Henry Kissinger, M. François Trucy a souhaité recueillir l'opinion du directeur général sur l'idée selon laquelle les réformes structurelles préconisées par le FMI s'étendraient aujourd'hui au champ politique.

Evoquant la crise asiatique, M. Henri Revol s'est demandé si les " prévisionnistes " ne se comportaient pas, de fait, comme des historiens.

M. René Trégouët s'est interrogé sur l'évolution de la parité entre le dollar et l'Euro.

M. René Ballayer a souhaité savoir quelles étaient les prévisions sur l'évolution des taux d'intérêt au sein de la zone " Euro ".

Evoquant la situation du Brésil, M. Roland du Luart, président, a demandé si le soutien du FMI au Brésil serait suffisant pour assurer le rétablissement de l'économie brésilienne.

En réponse aux différents intervenants, M. Michel Camdessus, directeur général du Fonds monétaire international, a apporté les précisions suivantes :

- les services du FMI et les autorités brésiliennes sont arrivés à un point de vue commun sur un programme susceptible de " catalyser " les financements des bailleurs de fonds bilatéraux et de redonner confiance aux banques ;

- depuis la création du fonds, le contexte économique et les missions du FMI ont effectivement évolué ; pour s'adapter à ce contexte, le directeur général a suggéré aux membres de l'organisation des propositions de réformes ; il a proposé, en particulier, une plus grande transparence de l'institution, un renforcement de ses pouvoirs afin de superviser le contrôle de l'application des règles bancaires prudentielles par les banques centrales, une augmentation de ses moyens d'intervention en cas de défaillance d'un Etat, un accroissement du contrôle politique sur le FMI, en transformant le comité intérimaire en conseil, une utilisation souple des droits de tirage spéciaux pour renforcer les moyens financier du fonds en cas de crise ;

- les conséquences sociales des réformes structurelles préconisées par le FMI sont prises en compte, le coût social des réformes n'étant d'ailleurs pas en soi lié aux réformes, mais à l'ampleur des crises économiques que connaissent certains pays. Le FMI a accru, ces dernières années, les moyens financiers destinés aux politiques sociales et il se félicite que la Banque mondiale ait décidé de multiplier par deux les fonds destinés à ces politiques ;

- l'évolution des taux d'intérêt dépend, à moyen terme, de l'inflation ; compte tenu de son niveau, il existe, dans les économies occidentales, une tendance, à moyen terme, à la diminution des taux d'intérêt ;

- la vente d'une partie du stock d'or du FMI pourrait être envisagée ; une partie du produit de cette vente pouvant être consacrée à l'allégement de la dette des pays en voie de développement, sans perdre de vue que le stock d'or sert à assurer la crédibilité financière du FMI ;

- compte tenu de la nature des crises économiques récentes, le FMI a été conduit à préconiser des réformes structurelles dans le domaine politique ; d'où la nécessité pour les pouvoirs politiques de renforcer leur contrôle sur cette institution ;

- les prévisionnistes ont pour fonction, en effet, de tirer les enseignements du passé pour tenter de prévoir l'avenir ;

- les banques centrales de la future zone Euro ont, en fait, décidé de soutenir la conjoncture en faisant converger leurs taux d'intérêt vers les plus bas pratiqués dans la zone, essentiellement ceux de la France et de l'Allemagne, plutôt que vers un taux moyen ; la question est aujourd'hui de savoir si cette diminution sera suffisante ; mais une diminution trop importante des taux d'intérêt français et allemands pourrait rendre plus difficile la convergence des pays qui ne sont pas encore qualifiés pour l'Euro ;

-  le taux de change de l'Euro par rapport au dollar, tel qu'il est préfiguré par les taux de change des monnaies qui feront place à l'Euro, est dans une " zone de vraisemblance ".

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a tout d'abord procédé à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et du logement : V-. Tourisme pour 1999, sur le rapport de Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget du tourisme

Après avoir indiqué qu'elle limiterait son exposé à l'énoncé des ses principales observations, le rapporteur spécial a rappelé la place du secteur du tourisme dans l'économie française et il a présenté les performances de la France, premier pays "récepteur" mondial, en attirant l'attention, toutefois, sur le fait que notre pays n'arrive qu'à la troisième place en termes de recettes.

En ce qui concerne le budget proprement dit, Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial, a souligné la croissance des dotations, qui augmentent de plus de 7 % en termes de dépenses ordinaires et de crédits de paiement, se félicitant, à cet égard, de ce que le budget du tourisme ne soit plus considéré comme marginal.

Commentant le détail de l'évolution des dotations, le rapporteur spécial a mis l'accent sur l'augmentation des crédits d'intervention en faveur des associations, -tout en regrettant le recul des dépenses en capital-, ainsi que sur les redéploiements de moyens entre l'administration centrale et les délégations régionales.

Mme Marie-Claude Beaudeau a ensuite présenté une série d'observations sur la politique du tourisme :

- sur le plan social, après avoir fait état des réflexions du commissariat général du Plan, notamment sur la nécessité de s'adapter aux nouveaux besoins nés de la multiplication des familles recomposées, elle a approuvé la volonté du Gouvernement de développer l'accès aux vacances des plus défavorisés et, en particulier, des handicapés, et elle s'est réjouie, à cet égard, du dépôt d'un projet de loi élargissant l'accès au chèque-vacances ;

- sur le plan économique, elle a surtout insisté sur le défi que constitue l'avènement de l'Euro par suite de l'intensification de la concurrence, ainsi que sur la nécessité de renforcer la formation des personnels et d'arriver à une meilleure répartition du tourisme sur l'ensemble du territoire.

Le rapporteur spécial a conclu son exposé en évoquant trois questions d'actualité :

 la suppression du commerce hors taxes à l'intérieur de l'Union européenne, actuellement programmée pour le mois de juillet 1999 et qui, si elle n'est pas reportée, aurait de graves conséquences pour l'emploi ;

 le nécessaire renforcement de la protection du consommateur de prestations touristiques, si l'on veut éviter, autant que faire se peut, des faits divers tragiques comme celui du naufrage du lac de Banyoles ;

 la lutte contre le tourisme sexuel, autour de laquelle il faut mobiliser tous les professionnels du tourisme.

En réponse aux questions qui lui ont été posées par MM. François Trucy, René Ballayer et Jacques Oudin, Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial, a indiqué que si la France est moins bien placée en termes de recettes que de nombre d'arrivées, c'est sans doute en partie dû à l'importance du trafic de transit ; elle a précisé que l'impact de la coupe du monde de football sur la saison touristique n'est pas encore connu, bien qu'il semble que l'afflux de touristes engendré par le "Mondial" avait pu avoir un effet dissuassif sur certaines clientèles traditionnelles ; elle a également signalé que les baisses de crédits que l'on pouvait constater, notamment en matière d'observation économique, devaient être compensées dans le cadre des futurs contrats de plan, tout en reconnaissant les difficultés créées par les fluctuations de crédits.

Enfin, après s'être inquiétée de l'évolution des taxes de séjour, fortement inégales selon les communes, elle a fait savoir, à la demande de M. Alain Lambert, président, qu'elle envisage de poursuivre le projet de contrôle de l'organisme de promotion, Maison de la France, entrepris par son prédécesseur dans la fonction de rapporteur spécial des crédits du tourisme. Elle a enfin indiqué qu'elle portait un jugement favorable sur l'ensemble des crédits du tourisme soumis à l'appréciation du Parlement.

La commission a alors décidé de réserver son vote sur le budget du tourisme jusqu'à l'audition du ministre.

Puis, la commission a procédé à l'audition de M. Alain Richard, ministre de la défense, sur les crédits de son département ministériel pour 1999.

Projet de loi de finances pour 1999 - Audition de M. Alain Richard, ministre de la défense

M. Alain Richard, a tout d'abord expliqué que le projet de budget du ministère de la défense pour 1999 faisait suite à celui de l'année 1998 qui avait été marqué par la volonté du Gouvernement de réduire rapidement le déficit public. La diminution des ressources consacrées à l'équipement des armées a été suivie d'une étude approfondie, la revue de programmes, qui a duré du mois d'octobre au mois de mars et qui a conduit à une prise de position du Premier ministre sur l'application de la loi de programmation militaire, votée en 1996. Une méthode nouvelle a été appliquée pour éviter les reports et les étalements de commandes qui ont des effets négatifs. Il a été, d'une part, renoncé à quelques programmes et, d'autre part, mis en oeuvre de nouvelles méthodes d'acquisition . Celles-ci procureront une économie de 20 milliards de francs de 1999 à 2002 et de 20 autres milliards au-delà de 2002. L'exercice ne s'est donc pas limité à repousser les dépenses au-delà de 2002. L'application de cette méthode est, selon le ministre, une source de réalisme. Il a indiqué qu'il n'avait d'ailleurs pas été nécessaire de recourir à l'arbitrage du Premier ministre pour arrêter le projet de budget du ministère de la défense pour 1999.

M. Richard a indiqué qu'avaient été prises en compte les demandes du Parlement pour aboutir à une plus grande transparence financière du budget du ministère de la défense. Toutefois, si les mesures entreprises en 1998 ont conduit à un démarrage plus lent de la gestion en début d'année, les services du ministère s'appliquent à rattraper ce retard initial.

M. Alain Richard a précisé que, hors pensions, le budget du ministère de la défense s'élevait à 190 milliards de francs (+ 2,9 %), soit 104 milliards pour le titre III (+ 0,2 %) et 86 milliards pour les titres V et VI (+ 6,2 %). Ce projet de budget permet de poursuivre la modernisation des armées.

M. Alain Richard a souligné que la réduction des effectifs militaires en 1999 serait de 39.000 appelés, 50 officiers et 2.700 sous-officiers. Il a rappelé qu'il n'y aurait plus d'appelés en 2002. En contrepartie, 16.000 professionnels seront recrutés en 1999 dont 8.400 militaires du rang, 4.750 volontaires (3.000 pour la seule Gendarmerie) et 1.700 civils.

M. Alain Richard a fait observer que le coût de la professionnalisation impose un resserrement des crédits consacrés au fonctionnement (- 9 %). Même si des éléments favorables peuvent intervenir, comme la réduction du coût de l'approvisionnement en produits pétroliers, une certaine tension risque d'exister dans les années qui viennent sur les crédits de fonctionnement.

Le ministre a confirmé que les crédits consacrés à l'équipement couvriraient l'ensemble des besoins redéfinis par la revue des programmes. Des modifications de calendrier ont permis d'aboutir à des économies. Ainsi en est-il du rapprochement des calendriers de mise en service du dernier sous-marin nucléaire lanceur d'engins et du nouveau missile stratégique. Par ailleurs, des projets d'acquisition de certains équipements ont été réduits (porte-chars, missiles MISTRAL) et certains programmes abandonnés (mines MACRED, satellite radar HORUS en raison de son financement par l'Allemagne).

M. Alain Richard a indiqué que les opérations de modernisation de nos armées se poursuivaient. Pour la dissuasion nucléaire, le deuxième SNLE/NG sera mis en service à la mi-99 et 1,45 milliard de francs seront consacrés au missile M51. Le missile air-sol moyenne portée sera développé à partir de 2000. Dans le domaine spatial, la priorité est donnée au projet HELIOS II qui sera opérationnel en 2002. La France ne renonce pas au projet de satellite d'observation radar mais il lui faudra trouver un nouveau partenaire européen. La Grande-Bretagne s'étant retirée du projet TRIMILSATCOM, une solution devra être trouvée en commun avec l'Allemagne pour poursuivre ce programme. S'agissant de l'armement classique les programmes principaux (char LECLERC, hélicoptères TIGRE et NH90, avion RAFALE, nouveau transport de chalands de débarquement) se dérouleront selon le calendrier prévu. Dans la Gendarmerie, 95 des 100 départements seront équipés du système RUBIS fin 1999.

M. Alain Richard a précisé que les crédits de recherche et de développement seront en augmentation. Ils s'élèveront à 21 milliards de francs en 1999, ce qui nous place en tête des pays européens, à un niveau comparable à celui de la Grande-Bretagne, mais bien supérieur à celui des autres grands pays.

Il a souligné que les crédits alloués à l'accompagnement de la professionnalisation seront augmentés. Plus d'un milliard de francs seront consacrés à l'accompagnement des restructurations militaires et industrielles, dont 740 millions pour le fonds d'adaptation industrielle et 202 millions pour le fonds de restructuration de la défense (FRED). 1,8 milliard de francs faciliteront la mobilité et le départ du personnel et 810 millions de francs permettront d'accorder des pécules aux officiers et sous-officiers, bien que les départs volontaires de ceux-ci se soient accélérés en raison de l'amélioration de la situation économique du pays.

M. Alain Richard a fait part de la modernisation des relations avec les industriels de la défense. Avec les entreprises les plus importantes, de nouvelles méthodes d'acquisition sont appliquées. Par ailleurs, un chargé de mission a été désigné pour assurer une meilleure prise en compte, par le ministère, des difficultés rencontrées par les PME liées à l'industrie de défense.

Il a conclu que l'engagement pris pour assurer la priorité donnée à la professionnalisation et aux capacités opérationnelles a été tenu. Les armées sont en mesure de faire face à leurs missions extérieures (protection de la paix et évacuation de nos ressortissants) et intérieures (telles que Vigipirate, sécurité de la coupe du monde de football,...). La programmation entre maintenant dans sa troisième année, la professionnalisation se déroule correctement et l'adaptation de notre outil de défense est conforme aux prévisions.

Il a indiqué que le rapport sur l'exécution de la loi de programmation militaire a été publié et remis prioritairement aux parlementaires.

M. Alain Lambert, président, a précisé que ce rapport venait d'être distribué aux membres de la commission.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est interrogé sur la situation de GIAT-Industries dont le chiffre d'affaires de 6 milliards de francs est à mettre en relation avec une perte de 3 ou de 3,5 milliards de francs.

M. Alain Richard a répondu que GIAT-Industries, anciennement constitué d'un ensemble d'arsenaux employant des ouvriers d'Etat, est en train de devenir une véritable entreprise. Sur ce chemin, il a pu y avoir des hésitations ou des imprécisions, mais cette opération a été conduite alors que le marché de l'armement terrestre diminuait de façon drastique (diminution de moitié depuis 1992). Ces restructurations sont une lourde charge pour l'entreprise. Aujourd'hui, en exploitation, la situation de GIAT-Industries est proche de l'équilibre et une grande partie du travail d'adaptation a été réalisée. Il reste cependant à absorber une charge de 5 à 6 milliards de francs due pour moitié au solde du contrat avec les Émirats Arabes Unis et pour moitié à l'application du plan industriel et social décidé au mois de juillet.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial des crédits de la défense (dépenses en capital), a indiqué qu'il se réjouissait du rétablissement des crédits du titre V même si le niveau prévu par la loi de programmation n'était pas retrouvé. Toutefois, il s'est inquiété du déséquilibre entre le titre III et le titre V et il a fait part de sa crainte que le titre V soit à nouveau utilisé comme " variable d'ajustement " en cas de difficultés financières de l'Etat.

Il a demandé à M. Alain Richard de préciser le nombre d'avions Rafale qui sera commandé en 1999, les documents dont il dispose lui paraissant contradictoires sur ce point. Il a souhaité aussi savoir ce qu'il en était du programme avion de transport futur (ATF). M. Maurice Blin a exprimé son inquiétude sur la situation des principales entreprises d'armement françaises qui paraissent continuer à agir en ordre dispersé, notamment dans les domaines des missiles et de l'électronique, alors que la situation de leurs homologues européens semble stabilisée. Il a exprimé le souhait d'être éclairé sur la consistance du projet de fusion entre les entreprises BAE et DASA.

M. François Trucy, rapporteur spécial des dépenses ordinaires, s'est interrogé sur les besoins en matière de personnels civils dans les armées engendrés par la professionnalisation, soulignant que de tels personnels étaient particulièrement difficiles à recruter dans la marine. Il a noté, pour s'en inquiéter, qu'un service de santé des armées optimal devait bénéficier de quatre médecins par régiment, alors que la situation actuelle est de deux médecins par régiment, et il a relevé que, depuis la suppression des quotas, les femmes étaient plus nombreuses que les hommes à entrer au service de santé. Il a fait part des difficultés de gestion qui ne manqueraient pas d'apparaître du fait du statut des volontaires, recrutés sur des contrats renouvelables chaque année à leur initiative.

M. François Trucy, rapporteur spécial des dépenses ordinaires, s'est inquiété de ce que la réduction des crédits du titre III allait probablement réduire la fréquence des exercices d'entraînement ainsi que celle des opérations bilatérales. Il a voulu connaître l'appréciation du ministre sur les libres propos tenus par le chef d'Etat-major des armées devant la commission de la défense de l'Assemblée nationale. Enfin, il s'est inquiété de ce que, dans un contexte de réduction des dépenses de fonctionnement, le titre V serve de variable d'ajustement du budget de la défense.

M. Paul Masson, rapporteur pour avis des crédits de la gendarmerie nationale, a abordé la question de la redistribution des responsabilités respectives de la police et de la gendarmerie. Il a rappelé que cette réforme faisait actuellement l'objet d'une concertation entre le ministère de la défense et celui de l'intérieur, et que le préfet Fougier avait la charge de coordonner sa réalisation. Il a cependant relevé que le président de la commission de la défense de l'Assemblée nationale avait émis un jugement négatif sur son bien-fondé. Il a voulu connaître les modalités de concertation engagées sur le terrain, cette réforme engendrant des réticences, tant chez les policiers que chez les gendarmes.

M. Alain Richard, ministre de la défense, en réponse à M. Maurice Blin, rapporteur spécial des crédits d'équipement, a rappelé que la France restait le pays européen qui investissait le plus dans le domaine de la défense, deux fois plus que l'Allemagne et trois fois et demie plus que l'Italie. Par conséquent, il a jugé "un peu irréel" le débat sur l'insuffisance des crédits d'investissement dans la défense. Il a noté que les crédits de rémunérations connaissaient une hausse importante dans le projet de budget pour 1999, en particulier du fait de la nécessité de rattraper les retards accumulés les années précédentes en matière de rémunérations ; ainsi, l'année 1999 ne peut être considérée comme représentative d'une évolution budgétaire de long terme.

Il a expliqué qu'aucun pays pauvre ou en situation économique délicate ne parvenait à maintenir son budget militaire au niveau souhaité ; à l'inverse, les pays ayant connu une croissance économique soutenue ont vu leur budget consacré à la défense croître. Il a ainsi assuré que le budget 1999 serait exécuté comme il avait été voté si la croissance économique prévue se réalise.

Il a noté que des crédits étaient prévus au budget 1999 pour passer une commande d'avions Rafale, cette commande n'ayant pas encore eu lieu ; en effet, elle doit être négociée avec les principaux groupes industriels concernés, à savoir Dassault, SNECMA et Thomson. Un accord devrait être conclu au début de l'année prochaine, qui intégrera le coût de la décision prise en 1996 d'interrompre le programme Rafale. Il a informé la commission de ce que la commande devrait consister en 28 appareils en commande ferme et que 20 autres seraient en option.

S'agissant de l'ATF, il a rappelé que les besoins des huit pays acheteurs avaient été confirmés, et il a estimé qu'Airbus devait réaliser les investissements nécessaires au développement de cet appareil. Faute de quoi, la France pourrait se procurer un tel avion auprès du constructeur Antonov, ou sur le marché américain à partir de modèles existants. Il a affirmé que des accords industriels seront conclus, normalement à la fin du mois de novembre de cette année, afin de mettre en oeuvre les dispositions de l'accord devant aboutir à la fusion d'Aérospatiale et de Matra Hautes Technologies. Aérospatiale détiendra alors les 46 % d'actions que l'Etat possède dans le groupe Dassault.

En réponse à M. François Trucy, rapporteur spécial des dépenses ordinaires, M. Alain Richard a reconnu l'existence de réelles difficultés, non pas tant pour créer que pour pourvoir les postes des personnels civils au sein des armées. Il a estimé que ces postes devaient être pourvus en priorité par des personnels provenant du secteur industriel de la direction générale de l'armement, dans le cadre de la reconversion de l'industrie militaire, même si les réticences étaient multiples. Pour autant, il a jugé indispensable une telle orientation, soulignant le paradoxe qui consisterait à recruter des personnels nouveaux d'un côté, et à payer un sureffectif de salariés dans les activités industrielles de l'autre. Il a toutefois noté que la marine avait connu une situation satisfaisante en 1998 puisqu'elle présentait, parmi les armées, le nombre de postes civils non pourvus le plus faible. A la mi-août 1998, 500 recrutements extérieurs étaient en cours, ces postes étant offerts prioritairement à des personnels non ouvriers de l'Etat de GIAT Industries et de la sous-traitance de la direction des constructions navales (DCN) et à d'anciens personnels civils employés par les forces françaises stationnées en Allemagne.

Il a reconnu que la professionnalisation entraînait des conséquences importantes sur la gestion du service de santé des armées. Actuellement, en effet, le tiers des médecins militaires provient des appelés. Dès lors, il n'a pas caché la nécessité d'un recours temporaire, pour les remplacer, à des médecins contractuels. Il a également estimé que les femmes seraient plus nombreuses encore au sein du service de santé des armées, constatant que les femmes médecins avaient toute conscience des aspects militaires de leur fonction.

Le ministre a signalé que les propos du Chef d'Etat major des armées, avaient été amplifiés et déformés par la presse, certaines phrases étant retirées de leur contexte.

Toutefois, il a estimé qu'un général était tout à fait dans son rôle lorsqu'il faisait part à la représentation nationale des problèmes de gestion des moyens des armées, d'autant que c'est effectivement sur les crédits de fonctionnement que doit se porter l'attention. Mais les décisions de 1999 sont globalement conformes à la loi de programmation.

M. Alain Richard, en réponse à M. Paul Masson, rapporteur pour avis des crédits de la gendarmerie, a reconnu que la répartition nouvelle des rôles de la gendarmerie et de la police était une action difficile à mener, mais il a rappelé que la loi de février 1995 avait prévu que les villes de moins de 20.000 habitants passeraient sous la responsabilité de la gendarmerie, estimant toutefois que la fermeture du commissariat des petites villes posait de réels problèmes. Cependant, la loi de février 1995 a pris, selon lui, une bonne orientation, l'emploi des policiers étant plus cohérent dans les grands centres urbains.

Il a expliqué que la gendarmerie avait vocation à assurer la sécurité publique sur environ 90 % du territoire national, pour plus de 50 % des Français, mais que cette tâche était rendue plus difficile par l'existence, d'une part, de zones rurales peu peuplées et, d'autre part, par la diffusion de comportements urbains de délinquance dans les zones péri-urbaines, qui connaissent actuellement la croissance la plus vive de la population française. Ainsi la gendarmerie doit-elle se redéployer afin de faire face à la répartition territoriale très inégale des délits.

M. Yvon Collin s'est interrogé sur la possibilité d'un transfert des actions à vote double de l'Etat vers l'Aérospatiale, puis sur les risques de marginalisation de cette société.

Mme Maryse Bergé-Lavigne a souhaité savoir si la fusion d'Aérospatiale et de Matra ne risquait pas d'engendrer une redondance pour la construction de missiles par ces deux groupes industriels.

M. René Ballayer a noté que le porte-avions Foch serait remplacé à la fin de l'année 1999 par le porte-avions Charles-de-Gaulle, puis il a souhaité connaître le devenir d'un porte-avions désarmé ainsi que le nombre de porte-avions français.

M. Claude Belot s'est enquis du devenir, dans le cadre de la professionnalisation des armées, des formes de service national effectuées en entreprises ou à l'étranger durant 16 mois. Il s'est ensuite interrogé sur la nécessité de transférer le centre école de l'aéronautique navale (CEAN) et l'école des fourriers de Rochefort à Cherbourg.

M. Hubert Haenel a déploré la polémique apparue à l'occasion du débat relatif au redéploiement entre les forces de police et la gendarmerie. Il a interrogé le ministre sur l'existence d'un projet de directive européenne empêchant les forces armées d'exercer des fonctions de police administrative et de police judiciaire. Il a souhaité obtenir quelques éclaircissements concernant le contenu du calendrier mis en oeuvre et le financement du projet de loi relatif aux réserves.

M. Gérard Miquel a estimé comprendre la nécessité de la réorganisation de la gendarmerie, mais il s'est inquiété de voir disparaître la gendarmerie d'un canton de zone rurale.

M. Michel Charasse a noté que le sentiment d'insécurité était parfois accru par les dysfonctionnements existant dans le système des permanences de gendarmerie. Il a estimé que chaque gendarmerie devait assurer une permanence 24 heures sur 24, puis qu'elle devait continuer à être locataire des locaux qu'elle occupe.

En réponse aux différents intervenants, M. Alain Richard a apporté les éléments d'information suivants :

- l'Etat n'a pas de mandat politique pour procéder à une renationalisation de Dassault ; de même les droits de vote double n'engendrent pas un droit à des doubles dividendes ;

- la fusion d'Aérospatiale et de Matra n'aura pas d'effets redondants à court terme en matière de missiles, compte tenu de la spécialisation déjà engagée de Matra dans les missiles air-air et air-sol et d'Aérospatiale dans le sol-air ; à terme, la dynamique de la fusion devrait permettre une croissance globale de l'activité "missiles" ;

- la France possède un porte-avions, mais surtout est le seul pays européen à en posséder ; le porte-avions Foch commencera à être désarmé à partir de la fin de l'année 1999, la coque sera démolie ;

- la réforme du service militaire ne mettra pas un terme aux formes de service reposant sur le volontariat, un dispositif devant prendre le relais des services effectués en entreprise ou à l'étranger : un texte de loi dans ce sens devrait d'ailleurs être voté au cours de l'année 1999 ;

- les restructurations affectant les centres de formation militaires comptent parmi les 530 mesures de restructuration engendrées par la professionnalisation des armées ; à l'issue d'un processus de regroupement, subsisteront une douzaine d'écoles, au lieu de 40 il y a quinze ans ;

- les débats relatifs au redéploiement des forces de police et de gendarmerie ont été assortis d'une polémique malheureuse sur la façon dont les gendarmes exercent leurs fonctions ; en dépit de cette polémique malencontreuse ou de la rumeur relative à des directives européennes, le Gouvernement s'engage à ne pas modifier le statut de la gendarmerie ;

- l'objectif est que le projet de loi sur les réserves soit adopté en Conseil des ministres avant la fin du mois de décembre ; une phase de concertation a été engagée avec des organisations patronales et avec les associations de réservistes afin d'élaborer un statut professionnel adéquat pour les réservistes ; le maintien total des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 1999 pour les réserves représente une dotation de 308 millions de francs ;

- la réorganisation des brigades de gendarmerie se fera dans la souplesse, le principal critère étant celui du temps d'accès des gendarmes sur le lieu d'appel ; la coopération entre les brigades est un facteur de rationalisation, permettant notamment une meilleure connaissance du terrain ;

- la question de la réutilisation des locaux de gendarmerie appartenant aux collectivités territoriales et pris à bail par l'Etat est en cours d'examen ;

- l'organisation des permanences de nuit est une nécessité, mais elle engendre notamment des problèmes de gestion des ressources humaines, les personnes affectés aux permanences ne connaissant pas toujours le cadre territorial du département ; dans les zones rurales, des progrès restent donc à accomplir pour assurer les permanences, afin d'accueillir les citoyens qui sollicitent le service public de sécurité.

Mercredi 21 octobre 1998

- Présidence de M. Roland du Luart, vice-président, puis de M. Jacques Oudin, vice-président. Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen des crédits du budget annexe de l'Ordre de la Légion d'honneur et de l'Ordre de la Libération pour 1999, sur le rapport de M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget annexe de l'Ordre de la Légion d'honneur et de l'Ordre de la Libération

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a d'abord présenté les crédits du budget annexe de la Légion d'honneur. Il a noté que le montant des recettes et des dépenses du budget annexe s'élevait, en 1999, à 113,24 millions de francs, soit une progression de 2,82 % par rapport à 1998.

Abordant les recettes, il a rappelé qu'elles provenaient d'une double origine : les ressources propres, d'une part, la subvention de l'Etat, d'autre part. Les ressources propres sont liées à l'activité de la Grande Chancellerie et des maisons d'éducation : en 1999, elles progresseront de 2,24 % pour atteindre 7,76 millions de francs. Elles comprennent les droits de chancellerie perçus lors de la remise de la Légion d'honneur, de l'ordre national du Mérite et de l'autorisation de port des décorations étrangères, puis les pensions et trousseaux des élèves des maisons d'éducation, qui augmentent de 2,8 % en 1999, ainsi que les produits accessoires. La subvention de l'Etat versée par le budget de la justice augmente quant à elle de 2,86 % et s'établit à 105,48 millions de francs.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a ensuite présenté les dépenses du budget annexe de la Légion d'honneur, qui sont de trois ordres. Les crédits de fonctionnement de l'administration centrale de la Grande Chancellerie de la Légion d'honneur et des maisons d'éducation s'élèvent à 97,81 millions de francs, soit une progression de 2,19 %. Au paiement des traitements des membres de la Légion d'honneur et des médaillés militaires sont alloués, comme en 1998, 8,16 millions de francs. Enfin, la dotation consacrée aux secours accordés par la Grande Chancellerie aux légionnaires et médaillés militaires connaissant une situation difficile est maintenue à son niveau antérieur, soit 345.884 francs.

Le rapporteur spécial a relevé une augmentation de 17,02 % des crédits de paiement, qui s'établissent à 6,93 millions de francs : en effet, le financement de la restauration de la maison d'éducation de Saint-Denis se poursuit, et des crédits s'élevant à 750.000 francs seront consacrés à financer la première tranche significative de la réfection des toitures du palais de Salm.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a ensuite fait part de ses observations relatives au budget annexe de la Légion d'honneur. Il a noté avec satisfaction l'effort consenti en matière de travaux, espérant que l'ensemble des travaux prévus puisse être terminé avant 2002, année du bicentenaire de l'Ordre. Il a également fait part du jugement positif qu'il portait sur la manière dont le budget annexe était géré, le nombre d'emplois restant stable, ce qui n'empêchait pas les élèves d'obtenir d'excellents résultats scolaires, largement supérieurs à la moyenne nationale.

Dans un second temps, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a présenté les crédits relatifs au budget annexe de l'ordre de la Libération. Il a rappelé qu'au 25 août 1998, l'Ordre comptait 179 compagnons de la Libération encore en vie, ainsi que 6.500 médaillés de la Résistance. Il a expliqué que la subvention du budget général, qui est la seule ressource du budget annexe, s'élevait en 1999 à 5,1 millions de francs, en augmentation de 21,90 % par rapport à 1998. Il a noté que les dépenses de fonctionnement, qui s'établiront à 4,16 millions de francs, augmentaient de 1,24 %. Les crédits en capital s'élèveront à 850.000 francs en 1999, ce qui correspond à la première tranche de la réfection totale de l'installation électrique dans les locaux de la Chancellerie, dont le coût global devrait s'élever à 2,5 millions de francs.

M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, s'est ensuite félicité de la réalisation de travaux en 1999. Surtout, il a formé le voeu que le projet de loi destiné à assurer l'avenir de l'Ordre de la Libération, actuellement déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, soit rapidement inscrit à l'ordre du jour, la mémoire incarnée par l'Ordre devant en effet être entretenue au-delà de la disparition des titulaires de la Croix de la Libération.

M. François Trucy a souhaité connaître le nombre d'emplois affectés à la Grande Chancellerie de la Légion d'honneur, puis le montant des traitements des membres de l'Ordre.

M. Michel Charasse a rappelé, du fait d'un coût de mandatement des traitements probablement supérieur aux crédits qui leur sont affectés, sa proposition antérieure d'attribuer ces sommes à la caisse de secours de la Légion d'honneur, proposition à laquelle un refus assez net lui avait été opposé. Il a ensuite proposé d'organiser une visite de la maison d'éducation de Saint-Denis.

M. Jacques Pelletier a souhaité connaître le nombre de maisons d'éducation.

M. Roland du Luart, président, a demandé au rapporteur spécial de faire le point sur l'attribution de la Légion d'honneur aux anciens combattants de la Première Guerre mondiale, puis il a repris à son compte la proposition de M. Michel Charasse.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial, a apporté les éléments d'information suivants :

- la Grande chancellerie de la Légion d'honneur emploie 94 personnes ;

- le montant du traitement des chevaliers est de 40 francs par an ;

- il existe deux maisons d'éducation, l'une située à Saint-Denis, l'autre à Saint-Germain -en- Laye ;

- un contingent exceptionnel a permis à tous les anciens combattants survivants de la guerre 1914-1918 d'être décorés de la Légion d'honneur.

Puis, la commission a adopté à l'unanimité les crédits des budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
La commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Claude Haut, rapporteur spécial, à l'examen des crédits des services du Premier ministre : IV-. Plan pour 1999.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget du Plan

M. Claude Haut, rapporteur spécial, a indiqué que les crédits du Plan étaient en légère progression, de 0,13 % par rapport à 1998, avec un budget de 153,1 millions de francs prévu pour 1999, contre 152,2 millions de francs votés en 1998.

Evoquant les dépenses ordinaires, qui sont quasi stables à 148,295 millions de francs en 1999 (+ 0,02 % par rapport à 1998), il a précisé que les crédits affectés à la recherche étaient en légère progression (53,210 millions de francs en 1999, soit 340.000 francs de plus qu'en 1998), alors que ceux affectés au Plan régressaient de 335.950 francs (95,321 millions de francs en 1998 contre 94,985 millions de francs en 1999).

Il a rappelé que les dépenses ordinaires étaient réparties en deux Titres : le Titre III, détaillant les moyens des services, qui s'accroît de 584.050 francs de 1998 à 1999 (+ 0,62 %), et le Titre IV, consacré aux interventions publiques, qui régresse de 580.000 francs (- 1,04 %).

Passant aux dépenses en capital, il a précisé que seuls les crédits du Titre VI, destinés à la recherche en socio-économie, figuraient au budget du plan ; les autorisations de programme régressent de moitié, en revenant de 4 millions de francs en 1998 à 2 millions de francs en 1999, mais les crédits de paiement croissent de 330.000 francs, passant de 4,5 à 4,830 millions de francs.

Il a conclu cette analyse des crédits en rappelant que le Commissariat général du plan, administration de mission, avait plus souffert, ces dernières années, d'incertitudes majeures sur les objectifs que lui assignait le Gouvernement, que d'évolutions financières, qui restent modestes.

Puis il a évoqué la nomination, le 5 janvier 1998, d'un nouveau commissaire général au plan, M. Jean-Michel Charpin, et a rappelé que le Premier ministre lui avait adressé, dès le 9 janvier, une lettre de mission contenant un programme de travail s'orientant autour de trois grands axes : le développement de l'économie française dans le cadre européen et mondial, le renforcement de la cohésion sociale et la modernisation des instruments de l'action publique.

Il a conclu en estimant que cette nouvelle impulsion dissipait les interrogations qui planaient sur les missions assignées au plan.

Au terme de cet exposé, M. Michel Charasse a suggéré que le Commissariat général du plan effectue, à la demande du rapporteur spécial, une synthèse de l'impact des différents rapports d'évaluation qu'il avait effectués depuis une dizaine d'années.

M. Yann Gaillard a évoqué son scepticisme sur l'efficacité réelle d'actions si dispersées entre objectifs divers, entraînant le risque d'incohérence.

M. Roland du Luart, président, a rappelé que la commission des finances du Sénat, le Commissariat général du plan et les organismes de recherche qu'il regroupe entretenaient d'excellents rapports, qui s'étaient traduits par la rédaction, à la demande de la commission, de documents de travail de grande qualité sur le secteur bancaire et sur le secteur des assurances.

La commission a alors adopté les crédits du Plan pour 1999.
Ensuite, la commission a procédé à l'examen des crédits du commerce extérieur pour 1999, sur le rapport de M. Marc Massion, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget du commerce extérieur

En introduction,M. Marc Massion, rapporteur spécial, à déclaré que les crédits consacrés à l'intervention directe de l'Etat dans le domaine du commerce extérieur s'élèveraient en 1999 à 4,71 milliards de francs en autorisations de programme et à 2,89 milliards en crédits de paiement, en diminution respectivement de 10,63 et 47,32 % par rapport aux 5,27 et 5,48 milliards de francs figurant dans le budget initial de 1998.

Il a cependant précisé que cette baisse était essentiellement d'ordre technique et ne signifiait pas qu'une diminution drastique touchait les moyens alloués à l'appui au commerce extérieur.

Il a estimé que trois éléments caractérisaient ce budget : la poursuite de l'adaptation du réseau des postes d'expansion économique à l'évolution de la carte économique mondiale et aux nouvelles technologies de l'information ; un infléchissement de la restructuration des organismes d'appui au commerce extérieur et, enfin, la poursuite de la réforme des procédures financières de soutien à l'exportation.

Avant de présenter l'évolution des crédits, M. Marc Massion rapporteur spécial, a tenu à rappeler que les crédits du budget du commerce extérieur sont répartis dans trois fascicules budgétaires, à savoir celui des services financiers, celui des charges communes et celui des comptes spéciaux du Trésor.

Il a fait remarquer qu'un tel éparpillement ne facilitait pas une lecture aisée de ce budget et de son évolution.

Ensuite, M. Marc Massion, rapporteur spécial, a déclaré que lapremière caractéristique du projet de budget pour 1999 était la poursuite de la réforme du service de l'expansion économique à l'étranger. Il a rappelé que les crédits destinés au service de l'expansion économique s'élevaient à 1,28 milliard de francs, en hausse de 5,47 % par rapport aux données de la loi de finances initiale pour 1998.

Il a noté que ces crédits recouvraient, d'une part, les structures du service de l'expansion économique dirigé par la direction des relations économiques extérieures -DREE- (les postes d'expansion économique et les directions régionales du commerce extérieur) et, d'autre part, les organismes parapublics (Centre français du commerce extérieur -CFCE- et Agence pour la promotion internationale des technologies et des entreprises françaises CFME -ACTIM).

Il a constaté que la rationalisation et le redéploiement des moyens des services extérieurs de la direction des relations économiques extérieures se confirmaient.

Pour autant, il a fait remarquer que le budget de l'expansion économique (titres III et V) pour 1999 voyait ses crédits augmenter de 7,49 % pour atteindre 1,03 milliard de francs. Il a ajouté que cette hausse recouvrait une situation contrastée : alors que les dépenses en personnel s'accroissent en raison des différentes revalorisations des rémunérations publiques, les crédits affectés au matériel diminuent tandis que les dépenses en informatique augmentent.

Ensuite, M. Marc Massion, rapporteur spécial, a observé que le budget pour 1999 apportait des infléchissements à la restructuration des organismes d'appui au commerce extérieur.

Il a fait remarquer que le montant global des dotations aux organismes d'appui au commerce extérieur, pour 1999, s'élevait à 270 millions de francs contre 245,6 millions de francs en 1998, soit une progression de 9,93 %. Il a toutefois souligné que cette hausse devait être nuancée puisqu'elle est en grande partie liée à la dotation de 25 millions de francs inscrite au chapitre 42-80 (expositions internationales) destinée à financer le pavillon français à l'exposition universelle de Hanovre en l'an 2000. Le coût total de cette opération devrait s'élever à 150 millions de francs.

Ainsi, il a calculé que si l'on ne prenait pas en compte cette dotation, les crédits affectés aux organismes d'appui au commerce extérieur se révélaient stables par rapport à l'année dernière (245 millions de francs en 1999 contre 245,61 millions de francs en 1998).

Il a ajouté qu'une redistribution des crédits entre le Centre français du commerce extérieur et l'Agence pour la promotion internationale des technologies et des entreprises françaises s'opérait. Ainsi, les moyens destinés au Centre français du commerce extérieur (CFCE) augmentent, en 1999, de 6,67% (+8 millions de francs) pour s'élever à 128 millions de francs. Cette hausse met fin à une diminution constante des crédits destinés au CFCE qui ont chuté de 18,42 % entre 1993 et 1999.

En revanche, les crédits attribués à l'Agence pour la promotion internationale des technologies et des entreprises françaises diminuent de 6,9 % en 1999 pour s'établir à 116,39 millions de francs. Il a regretté que cette diminution n'ait d'autre justification qu'un arbitrage budgétaire défavorable à cet organisme.

M. Marc Massion, rapporteur spécial, a ensuite constaté que la réorganisation des moyens en faveur des PME s'accentuait pour 1999.

Il a insisté sur le fait que le projet de budget pour 1999 modifiait sensiblement la structure des aides aux PME. Ainsi, le Comité de développement extérieur (CODEX) disparaît pour être remplacé par un nouveau volet du Fonds d'études au secteur privé (FASEP) nommé " Appui au secteur privé ". Il a ajouté que, pour 1999, les quatre principaux dispositifs d'appui aux entreprises mobilisaient 422 millions de francs, soit une baisse de 35,6 % par rapport à 1998, à budget constant.

Toutefois, il a tenu à relativiser cette diminution dans la mesure où les crédits inscrits en loi de finances initiale pour 1999 doivent être appréciés au regard des reports systématiques observés les années précédentes.

Il a également noté la diminution de 83 % des crédits du comité de développement extérieur (CODEX) liée à l'incorporation de ce dernier dans le Fonds d'études et d'aide au secteur privé (FASEP) depuis juillet 1998. Ainsi, les 10 millions de francs de crédits de paiement inscrits dans la loi de finances initiale doivent-ils uniquement servir à couvrir les besoins financiers des dossiers CODEX ouverts avant sa suppression.

Par ailleurs, il a souligné que les crédits prévus au titre du volet"commerceextérieur" des contrats de plan s'élevaient à 32 millions de francs pour 1999, soit une stagnation par rapport à l'année passée. En effet, la part Etat du volet commerce extérieur des contrats de plan était initialement fixée à 238,6 millions de francs, soit une moyenne annuelle de 47,7 millions de francs sur cinq ans (1994-1998). Toutefois, les annulations budgétaires effectuées en 1995 et 1996 et la décision d'étaler les contrats de plan sur une sixième année ont réduit le montant annuel des autorisations de programme disponibles à 32 millions de francs à compter de 1997.

Puis, M. Marc Massion, rapporteur spécial, a présenté le troisième axe du projet de budget pour 1999, à savoir la réduction du coût budgétaire des procédures financières de soutien à l'exportation.

Il a estimé que, pour 1999, ces diverses procédures ne devraient entraîner qu'une charge budgétaire de 2,7 milliards en autorisations de programme contre 3,1 milliards de francs prévus en loi de finances initiale pour 1998, soit une diminution de 12,8 %.

Il a cependant de nouveau tenu à relativiser ces chiffres et il les a jugés peu révélateurs de l'effort réel de la France en matière de commerce extérieur. En effet, la plupart des baisses constatées sont essentiellement liées à des reports de crédits qui n'ont pas été utilisés en 1998.

Il a toutefois regretté ce manque de transparence qui empêche d'avoir une connaissance approfondie et précise des procédures financières de soutien à l'exportation.

M. Marc Massion, rapporteur spécial, a observé que les procédures gérées par Natexis Banque pour le compte de l'Etat (chapitre 44-98 bonification d'intérêt) voyaient leur crédits diminuer de 150 millions pour 1998 et s'élever à 550 millions de francs. En outre, il a ajouté que le régime d'assurance-crédit géré par la COFACE (chapitre 14-01 article 71) pour le compte de l'Etat devrait de nouveau dégager un excédent en 1999.

Il a également fait remarquer que le coût de la garantie de risque économique diminuait de 11,1 % par rapport à 1998 pour s'établir à 400 millions de francs tandis que la dotation du FASEP (chapitre 68-00 article 10) baissait, en crédits de paiement, de 51,14  %.

Il a noté que la charge nette du compte spécial du Trésor n° 903-07 ("prêts du Trésor à des Etats étrangers et à l'Agence française de développement")était négative pour l'année 1999 : alors que ce compte devait entraîner pour 1998 une charge pour l'Etat évaluée à 628 millions de francs, il devrait dégager pour l'année 1999 une recette de 1.635 millions de francs.

En ce qui concerne les crédits relatifs aux études, M. Marc Massion, rapporteur spécial, a fait remarquer que les évolutions de crédits variaient en fonction de la nature des études.

Le rapporteur spécial a ensuite présenté ses observations.

D'une part, il a reconnu que ce budget n'était guère transparent. En effet, les crédits du commerce extérieur sont répartis dans trois fascicules budgétaires : les services financiers, les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor. Or, cet éparpillement ne rend pas la lecture de ce budget aisée. Il a regretté que l'analyse purement budgétaire des crédits inscrits aux charges communes et aux comptes spéciaux du Trésor ne permette pas d'appréhender la réalité des aides fournies par l'Etat aux entreprises ou aux Etats étrangers pour encourager l'essor du commerce extérieur français. Ainsi, le budget du commerce extérieur diminue de plus de 10 % en autorisations de programme et de 47 % en crédits de paiement. Or, cette baisse s'avère être essentiellement d'ordre technique et ne pas être susceptible de remettre en cause les moyens d'action alloués à l'appui du commerce extérieur.

En revanche, il s'est félicité de la politique engagée en faveur d'une plus grande efficacité des aides au commerce extérieur.

Il a précisé que ce projet de budget témoignait du souci du secrétariat d'Etat au commerce extérieur d'une meilleure articulation et d'une plus grande rationalisation du dispositif d'aides aux entreprises françaises exportatrices. Il s'est par ailleurs réjoui que le Gouvernement ait abandonné le projet de suppression du CFCE et qu'il ait reconnu la qualité de ses travaux, appréciés depuis longtemps par le Sénat. Il a également encouragé les réflexions engagées sur une meilleure coordination des aides au commerce extérieur aussi bien au niveau national (grâce à la convention de rapprochement entre le CFCE et le CFME-ACTIM) qu'au niveau régional (avec le développement des conventions régionales à l'export) et au niveau international (avec le rapprochement des postes d'expansion économique avec les chambres de commerce à l'étranger).

Puis, M. Marc Massion, rapporteur spécial, a souligné lanécessité d'augmenter les moyens budgétaires affectés au volet international des contrats de plan Etat-régions.

Il a rappelé que les aides au commerce extérieur des contrats de plan Etat-régions avaient fait la preuve de leur efficacité et qu'elles constituaient un échelon indispensable dans le dispositif d'aide au commerce extérieur. Evoquant le début des négociations pour l'élaboration des prochains contrats de plan (2000-2006), il a souhaité que l'engagement budgétaire de l'Etat soit à la hauteur de ces priorités et de la demande exprimée par les partenaires régionaux, de plus en plus sensibilisés au développement des échanges extérieurs de leur région.

Par ailleurs, il a fait part des incertitudes pesant sur l'évolution des échanges mondiaux et des conséquences pour le commerce extérieur français.

Après avoir souligné la progression de la production et du commerce mondial à un rythme très soutenu en 1997 malgré les effets de la crise financière asiatique, il a estimé qu'en 1998 et 1999, le rythme de croissance des échanges mondiaux devrait fléchir en raison du ralentissement de certaines zones émergentes -Asie, Amérique latine et pays de l'OPEP- ainsi que du tassement de la demande en Amérique du Nord et au Royaume-Uni.

Il a ajouté que le commerce extérieur de la France devrait être sérieusement affecté par ce ralentissement, même si les effets semblent être limités pour l'année 1998.

En outre, il a fait état d'incertitudes pour l'année 1999 du fait des dérèglements observés en Amérique latine et en Russie, de l'effondrement général des bourses ainsi que du ralentissement économique observé au Royaume-Uni. Certes, la mise en place de l'euro devrait stimuler les échanges entre la France et les autres pays membres de l'Union économique et monétaire, en raison de la baisse des coûts de transaction liés aux conversions entre monnaies et à la disparition du risque de change. Toutefois, les bénéfices attendus du passage à la monnaie unique ne pourraient pas compenser les effets d'un environnement économique international très dégradé.

Enfin, il s'est félicité du projet du secrétariat au commerce extérieur qui souhaite remplacer rapidement le système des VSNE/CSNE, qui permettait à de nombreux jeunes diplômés une première expérience dans un pays étranger et qui offrait aux entreprises une main d'oeuvre qualifiée et motivée. Il a évoqué l'avant-projet de loi du secrétariat d'Etat portant création du volontariat et qui vise à préserver et adapter un outil existant et utile aux acteurs économiques tout en conservant un pouvoir d'attraction auprès des jeunes, malgré son caractère volontaire et non plus obligatoire. Puis il a plaidé pour un dépôt rapide de ce projet.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. François Trucy a estimé que, face à un budget d'une telle complexité, la note de présentation produite par le rapporteur spécial constituait un outil de travail indispensable.

Face à l'opacité des aides d'appui au commerce extérieur, il a prôné une plus grande transparence et un examen attentif du dispositif afin de rechercher une efficacité encore plus grande. Il a également plaidé en faveur du CFCE et il a rappelé la qualité de ses travaux. Il a ajouté que le CFCE constituait un outil très utile pour les groupes d'amitié sénatoriaux, notamment pour l'organisation de colloques.

Mme Marie-Claude Beaudeau a demandé des renseignements complémentaires sur la part du tourisme dans l'excédent du commerce extérieur français.

M. Michel Moreigne s'est interrogé sur le rôle des conseillers du commerce extérieur.

M. Michel Charasse s'est interrogé sur les raisons de la fermeture des postes d'expansion économique à Khartoum et à Gaborone.

En outre, il a souhaité obtenir des renseignements supplémentaires sur les opérations de rapprochement des postes d'expansion économique avec les autres réseaux publics à l'étranger. Il a enfin conseillé au rapporteur spécial d'axer ses contrôles sur le réseau d'aide français à l'étranger.

En réponse, M. Marc Massion, rapporteur spécial, a sollicité l'indulgence de ses collègues et, rappelant qu'il rapportait ce budget pour la première fois, s'est engagé à réunir tous les éléments d'information demandés et à répondre ensuite à chacun par écrit.

La commission a alors adopté les crédits du budget du commerce extérieur.
Puis, la commission a procédé à l'examen des crédits des services du Premier ministre : I-. services généraux pour 1999, sur le rapport de M. Roland du Luart, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget des services généraux du Premier ministre

Avant de présenter les crédits demandés pour 1999 au titre des services généraux du Premier ministre, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé que ce budget regroupait des crédits aux destinations très diverses : les dotations de trois cabinets ministériels, les fonds spéciaux, les crédits destinés au Secrétariat général du gouvernement et aux organismes rattachés au Premier ministre, ainsi que les dotations de trois autorités administratives indépendantes.

M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a indiqué que les crédits demandés pour le budget 1999 des services généraux s'élevaient à 4,038 milliards de francs, en quasi-stabilité (- 0,81 %) par rapport aux crédits votés pour 1998. Il a précisé que le montant global de ce budget semblait a priori très stable depuis trois ans, autour de 4 milliards de francs, mais que cette stabilité était trompeuse car la structure du budget connaissait de notables modifications.

Le rapporteur spécial a indiqué que les principales caractéristiques de ce budget pour 1999 étaient : des dépenses ordinaires en baisse de - 9,62 %, et des dépenses de capital en forte hausse puisque leur montant est multiplié par plus de 8. Au sujet des dépenses ordinaires, il a expliqué leur diminution par la baisse des deux titres concernés : une diminution de plus de 6 % des moyens des services ainsi qu'une diminution de plus de 30 % des interventions publiques. Il a indiqué que les évolutions constatées s'expliquaient le plus souvent par des modifications de périmètre des différents titres.

A l'issue de la présentation générale des crédits de ce budget, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a tenu à présenter quelques observations.

Il a rappelé que les organismes gravitant autour du Premier ministre étaient nombreux (42 en 1998) et qu'ils formaient un groupe très hétérogène. Soulignant qu'en 1998, leur nombre avait encore augmenté, entraînant une complexité et des risques de redondance accrus, il a reconnu que des efforts ponctuels de rationalisation avaient été entrepris mais il a toutefois estimé qu'un nouvel audit de ces organismes demeurait indispensable.

Concernant les fonds spéciaux, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, s'est félicité de la stabilisation de leur montant (394 millions de francs).

Ensuite, il a tenu à souligner qu'aucun crédit n'était inscrit en 1999 pour faciliter les délocalisations d'administrations et que la poursuite de l'activité du fonds de délocalisation en 1999 était donc dépendante de son abondement ultérieur.

Enfin, le rapporteur spécial a indiqué qu'il serait particulièrement attentif à ce que la subvention de 9 millions de francs dont devrait être doté l'Institut français des relations internationales (IFRI) en 1999, ne soit pas amputée en cours d'exercice budgétaire.

A l'issue de ces observations, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a présenté un amendement de réduction des crédits d'action sociale interministérielle du chapitre 57-06, transférés pour 1999 en provenance d'un chapitre de fonctionnement qui avait déjà fait l'objet d'un amendement de réduction de crédits de la commission des finances l'an dernier.

Après l'intervention du rapporteur spécial, M. François Trucy s'est inquiété du nombre et l'hétérogénéité des organismes gravitant autour du Premier ministre et il a demandé au rapporteur spécial quelles actions il envisageait.

M. Jacques Pelletier, en sa qualité d'ancien Médiateur de la République, a indiqué que la commission aurait, à l'avenir, à étudier un budget du Médiateur de la République vraisemblablement en hausse, en raison de la raréfaction prévisible des mises à disposition qui permettent aujourd'hui de limiter les dépenses de personnel de cette autorité administrative indépendante.

Au sujet de l'amendement présenté par le rapporteur spécial, M. Jean-Philippe Lachenaud a souhaité connaître les justification avancées par les services du Premier ministre concernant le transfert de crédits d'un chapitre de fonctionnement à un chapitre d'investissement.

M. Jacques Oudin, président, a rejoint les préoccupations de M. François Trucy au sujet de la prolifération des organismes rattachés au Premier ministre.

M. Marc Massion a souhaité avoir plus d'explications au sujet des crédits dont l'annulation était proposée.

A son tour, Mme Marie-Claude Beaudeau a également souhaité des précisions sur cet amendement.

En réponse à MM. François Trucy et Jacques Oudin, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, rappelant qu'une mission de contrôle avait été entamée par le commissaire Henri Torre, précédent rapporteur spécial de ces crédits, a indiqué qu'il pourrait poursuivre ce travail.

Concernant les crédits du Médiateur de la République évoqués par M. Jacques Pelletier, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a précisé qu'ils étaient en augmentation cette année, s'établissant à 25 millions de francs, cette hausse devant permettre le recrutement de deux agents contractuels et la mise en place d'un nouvel outil informatique.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau et à MM. Jean-Philippe Lachenaud et Jacques Oudin, M. Roland du Luart, rapporteur spécial, a indiqué que les services du Premier ministre reconnaissaient bien l'existence d'un " transfert " de crédits d'un titre à l'autre. Il a précisé que des explications complémentaires avaient été demandées aux services compétents. Il a enfin rappelé que l'amendement qu'il proposait était en parfaite cohérence avec la stratégie budgétaire suivie l'an dernier : des crédits de même objet ayant été annulés, pour les mêmes raisons, par la commission dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 1998.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a rappelé que cet amendement s'inscrivait dans le cadre plus vaste d'une stratégie de réduction des crédits.

Sur la proposition de M. Yann Gaillard, la commission a décidé de réserver son vote jusqu'au lendemain.

Ensuite, la commission a procédé à l'examen des crédits de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie : II-. Enseignement supérieur pour 1999, sur le rapport de M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget de l'enseignement supérieur

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a expliqué que cette année l'analyse du budget de l'enseignement supérieur était rendue délicate en raison du retard avec lequel les services du ministère avaient répondu au questionnaire budgétaire.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a noté que le projet de budget de l'enseignement supérieur pour 1999 s'élevait à 51,11 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une progression de 5,48 % par rapport à 1998. Il a rappelé que ce projet de budget s'inscrivait dans un contexte très différent de celui des années précédentes, en raison de la réduction plus importante que prévue des effectifs étudiants. Les universités, notamment, devraient recevoir 1,7 % d'étudiants en moins.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a noté que l'agrégat consacré à l'action sociale connaissait une nette progression, passant de 8,23 milliards de francs à 8,90 milliards de francs, soit une progression de 8,21 %. La hausse de ces crédits s'explique essentiellement par la mise en place du plan social étudiant, 833 millions de francs lui étant consacrés en 1999. Le plan social étudiant devrait, sur une période de quatre années, s'élever à 7 milliards de francs.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a relevé que le plan social étudiant constituait la première priorité pour le budget de l'enseignement supérieur en 1999. Les mesures nouvelles lui étant affectées permettront un élargissement des allocations d'études, l'objectif étant à terme de parvenir à un taux de 30 % d'étudiants aidés.

Il a ensuite relevé que le projet de budget pour 1999 prévoyait une dotation de 1 milliard de francs en autorisations de programme pour la mise en oeuvre du programme "Université pour le troisième millénaire" (U3M). Ce dernier s'inscrira dans les futurs contrats de plan Etat-régions sur une période allant de 2000 à 2006. Il a ajouté que U3M devrait à terme nécessiter des crédits équivalents à ceux d'Université 2000, soit 40 milliards de francs. Il a également noté que 560 millions de francs sont prévus pour les travaux de désamiantage du campus de Jussieu.

Il a, enfin, constaté que les 823 emplois créés concernaient uniquement des personnels non enseignants, ce qui constitue une rupture par rapport aux tendances passées en matière de recrutements, mais qui est conforme aux évolutions démographiques de l'enseignement supérieur.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a ensuite présenté ses observations sur le projet de budget de l'enseignement supérieur.

Il a estimé que la maîtrise globale de la croissance des dépenses de fonctionnement était un impératif majeur s'imposant à tous les budgets, y compris à celui de l'enseignement supérieur. Il a dès lors regretté l'augmentation de 4,80 % des dépenses ordinaires, les dépenses de personnel notamment augmentant trop fortement. Il a déploré l'absence de redéploiement de certaines catégories de dépenses, ainsi que la renonciation à réaliser des économies sur les dotations allouées à la rémunération des heures complémentaires.

Il s'est félicité de ce que l'enseignement supérieur fasse l'objet de réflexions prospectives comme l'a montré, par exemple, le rapport de la commission présidée par M. Jacques Attali. Il a cependant regretté que le ministère n'ait encore affiché aucune volonté réformatrice à l'université : ni les premiers cycles, ni les relations entre les universités et les grandes écoles, ni l'architecture des cursus ne font encore l'objet de réformes. Il a toutefois jugé positive l'atténuation des réserves émises sur les stages des étudiants en entreprise, au regard du succès grandissant des unités d'expérience professionnelle (UEP) créées par l'arrêté du 19 avril 1997.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a jugé positive l'orientation prise par le plan social étudiant, appréciant notamment qu'un statut de l'étudiant, avec ce qu'il comporterait de rigidités, n'ait pas été institué. S'agissant du programme U3M, il a rappelé que ses aspects qualitatifs devraient largement dépasser ses aspects quantitatifs, contrairement au plan Université 2000 qui avait pour objectif de combler un retard en locaux. Ainsi, la mise aux normes de sécurité et de restructuration, les lieux de vie universitaires, notamment le logement et les restaurants, ainsi que les bibliothèques devraient constituer les priorités d'U3M. Ne jugeant pas anormale la priorité accordée aux universités parisiennes, dont la situation est souvent critique, il a cependant estimé que les réalisations en province ne devaient pas leur être sacrifiées. Enfin, il a contesté la thèse consistant à affirmer que le "tout virtuel" allait rendre accessoires les locaux universitaires.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité connaître les effets de la décroissance des effectifs à l'université sur le taux d'encadrement des étudiants par les personnels enseignants, puis il a demandé des précisions sur le financement du désamiantage du campus de Jussieu.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a expliqué que l'effet conjugué de la baisse du nombre des inscrits dans l'enseignement supérieur - toutefois très variable en fonction des filières, des niveaux d'études et des établissements - et des créations d'emplois réalisées au cours des dernières années, avaient permis une nette amélioration du taux d'encadrement des étudiants. Ce dernier était de 22,7 étudiants en 1995-1996, et devrait être de 19,80 lors de l'actuelle rentrée universitaire, ce taux devant encore diminuer à la rentrée prochaine, et s'établir à 19,25 étudiants par enseignant. Il a ajouté que l'encadrement des étudiants serait également amélioré par la présence de moniteurs et de tuteurs, puis d'emplois - jeunes dont le recrutement dans l'enseignement supérieur était autorisé depuis l'été dernier.

Il a ensuite estimé qu'il était préférable de parler de restructuration plutôt que d'un simple désamiantage du campus de Jussieu, le risque incendie étant finalement plus important que la présence d'amiante. En outre, la nécessité de maintenir l'unité des enseignements scientifiques sur le campus, les pertes de surfaces consécutives aux opérations de restructurations, ainsi que certains déménagements à Tolbiac, entraînaient des coûts supérieurs à la première estimation établie en 1996, soit 1,2 milliard de francs. Les travaux de mise en sécurité étant trois fois plus élevés que les opérations de désamiantage elles-mêmes, le coût total des travaux serait évalué à près de 4 milliards de francs.

M. Jean Clouet a voulu connaître l'évolution budgétaire de l'enseignement supérieur privé.

M. Jean-Pierre Demerliat a noté, pour le regretter, l'absence de recrutement de personnels affectés à la médecine universitaire, ainsi que la faiblesse des installations sportives sur les campus.

M. Michel Mercier s'est interrogé sur les crédits de déconcentration prévus dans le projet de budget.

M. Alain Lambert, président, a souhaité connaître l'état de la réflexion sur l'établissement de passerelles entre l'université et les grandes écoles, puis il s'est interrogé sur les projections démographiques à moyen terme dans l'enseignement supérieur.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a apporté les éléments d'information suivants :

- une mesure nouvelle de 2,3 millions de francs est prévue dans la dotation de fonctionnement versée à l'enseignement supérieur privé ;

- la médecine universitaire, comme les équipements sportifs sur les campus, sont effectivement peu développés, mais constituent deux des axes du futur plan social étudiant ;

- l'établissement de passerelles entre universités et grandes écoles constitue l'une des propositions du rapport de M. Jacques Attali, mais le ministère n'a pas encore fait connaître sa position sur ce sujet ;

- à l'horizon 2007, les effectifs universitaires devraient décroître pour s'établir à environ 1,23 million contre 1,33 million à la rentrée 1997, même si cette décrue des effectifs sera variable selon les filières, les instituts universitaires de technologie (IUT) ainsi que les sections de techniciens supérieurs (STS) devant se stabiliser à un niveau légèrement supérieur au niveau actuel.

La commission a décidé de réserver son vote sur le budget de l'enseignement supérieur jusqu'à l'audition du ministre.

Organismes extraparlementaires - Nominations

Enfin, la commission a désigné :

- M. Joël Bourdin pour siéger au sein du comité consultatif pour la gestion du Fonds national pour le développement des adductions d'eau dans les communes rurales ;

- M. Alain Joyandet et Mme Maryse Bergé-Lavigne pour siéger en qualité de suppléants au sein du Comité central d'enquête sur le coût et le rendement des services publics ;

- M. Yann Gaillard pour siéger au sein du Conseil d'orientation du Centre national d'art et de culture Georges Pompidou ;

- MM. René Trégouët et François Trucy pour siéger au sein de la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications ;

- M. Joël Bourdin pour siéger au sein du Conseil de surveillance du Centre national des caisses d'épargne et de prévoyance ;

- M. Alain Lambert, président, pour siéger au sein de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations ;

- M. Jean-Philippe Lachenaud pour siéger au sein du Conseil d'administration de l'Etablissement public de financement et de restructuration ;

- M. Maurice Blin pour siéger au sein du Haut conseil du secteur public.

Au cours d'une seconde séance, tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Alain Lambert, président, puis de M. Jacques Oudin, vice-président, et de M. Bernard Angels, vice-président, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du prélèvement sur recettes au profit du budget européen, évalué par l'article 42 du projet de loi de finances pour 1999.

Projet de loi de finances pour 1999 - Prélèvement " budget européen "

M. Denis Badré, rapporteur spécial, ayant indiqué que ce prélèvement était estimé par le projet de loi de finances pour 1999 à 95 milliards de francs, soit 1,1 point de produit intérieur brut et un peu moins du tiers des recettes tirées de l'impôt sur le revenu, a rappelé qu'il servait à financer 17,2 % des ressources d'un budget européen dont il a alors exposé les principaux éléments.

Il a précisé que le projet de budget pour 1999 s'élevait à 85,9 milliards d'euros, progressant ainsi de 2,8 % en crédits de paiement, tandis que la croissance des crédits d'engagement était, avec 6 %, nettement supérieure.

Ayant observé que le budget européen même s'il restait avant tout un budget agricole était devenu, au cours du temps, de plus en plus un budget au service d'autres interventions, il a remarqué que le projet de budget pour 1999 illustrait parfaitement ces tendances de long terme avec :

- des crédits agricoles stabilisés, soit une programmation peut-être irréaliste du fait de la perspective d'un creusement de l'écart entre les prix mondiaux des produits agricoles et les prix européens ;

- la masse des autres crédits en augmentation de 5,4 % pour faire face à l'explosion des crédits de paiement consacrés aux actions structurelles (+ 9 %) tandis que les trois autres rubriques, les politiques internes, les actions extérieures, et les dépenses administratives enregistraient une progression globalement plus modérée.

Il a alors détaillé les crédits des politiques internes, rappelant que 62 % d'entre eux étaient absorbés par la politique de recherche-développement, le reste revenant pour environ 10 % aux réseaux transeuropéens et, pour le solde, à diverses initiatives éclatées en plus de douze catégories d'intervention.

S'agissant de la politique de recherche, il a souhaité que le cinquième programme cadre en cours de négociation soit enfin orienté vers une véritable politique européenne de la recherche.

Abordant les actions extérieures, il a indiqué que la part du lion revenait comme les années précédentes aux programmes à destination de l'Est du continent européen, puis aux actions en direction des pays méditerranéens et enfin à l'aide humanitaire et alimentaire.

En ce qui concerne les dépenses administratives, apparemment maîtrisées dans le projet de budget présenté par le Conseil, il a souhaité relativiser la signification de la rubrique budgétaire censée les retracer en indiquant que bon nombre de dépenses d'administration des politiques communautaires étaient en fait inscrites à d'autres rubriques. Il s'est alors engagé à entreprendre un recensement exhaustif de ces dépenses.

Evoquant les ressources du budget européen, il a observé que l'effritement des ressources propres traditionnelles (prélèvements agricoles et droits de douane) et la montée en charge des contributions nationales au titre de la ressource PIB se poursuivaient.

Il a alors précisé que, si la France devait apporter en 1999 95 milliards de francs au budget européen, un calcul arithmétique conduirait à une contribution de 97,7 milliards de francs. Toutefois, selon un usage peut-être imprudent, l'évaluation de la loi de finances tenait compte d'une hypothèse de report d'un solde excédentaire venant atténuer le poids effectif de notre contribution en 1999.

Il a rappelé que cette contribution trouvait pour contreparties des versements à notre pays en provenance du budget européen qui, en 1996, avaient couvert 96 % de notre contribution.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a alors formulé ses principales observations.

Il a tout d'abord considéré que la progression des crédits du projet de budget était excessive et qu'elle traduisait une incapacité du système à s'autodiscipliner, incapacité d'autant plus choquante que le budget européen en tant que budget d'intervention peut être aisément contenu.

Il a relevé que cette progression était, pour l'essentiel, due à des programmations financières héritées d'un passé budgétairement insouciant. Il a, en particulier, insisté sur les effets de l'engagement pris à Edimbourg d'inscrire la totalité des crédits d'actions structurelles alors programmés pour la période 1993-1999. Il en a conclu que, plus que jamais, s'imposait un suivi attentif des négociations en cours pour définir la nouvelle programmation financière des communautés européennes pour la période 2000 à 2006.

Passant alors aux questions posées par les crédits d'actions structurelles, il a jugé que leur progression excessive était symptomatique d'un système mal adapté et à l'efficacité douteuse.

Il a observé que l'explosion des crédits d'engagement nécessitée par l'obligation de solder la programmation d'Edimbourg et la progression considérable des crédits de paiements pour accompagner celle des crédits d'engagement et pour liquider les engagements passés, témoignaient que les moyens de la politique de cohésion avaient été surdimensionnés.

Il a dénoncé l'inscription de la totalité des crédits restant à engager comme de mauvaise méthode, indiquant que les exigences du cofinancement national la rendait peu réaliste et s'inquiétant des conditions dans lesquelles serait engagée une telle masse de crédits.

Il a alors rappelé les doutes récurrents sur l'efficacité du dispositif en soulignant d'abord une ambiguïté fondamentale entre un objectif de cohésion entre États et la réalité d'une intervention vouée à promouvoir une politique européenne d'aménagement du territoire. Puis, il a dénoncé le saupoudrage des interventions au terme duquel plus de la moitié de la population européenne se trouve concernée par des actions structurelles, qui devraient exprimer davantage le souci d'une certaine solidarité entre les Etats.

Abordant les problèmes posés par le financement du budget européen, il a reconnu que le système actuel satisfaisait globalement aux exigences d'équité horizontale, car la hiérarchie des contributions des Etats était, sauf pour le Royaume-Uni, à peu près conforme à celle des capacités contributives. Mais il a rappelé que deux impasses avaient été faites jusqu'à présent, la première portant sur le consentement démocratique au prélèvement européen, la seconde, sur la nature du financement du budget européen. Sur ce dernier sujet, il a souhaité que s'ouvre un débat sur le point de savoir si un système de simples contributions des Etats pouvait perdurer ou si l'instauration d'un prélèvement réellement européen devait être mise en oeuvre.

Il a en particulier mis en évidence les inconvénients des contributions nationales, estimant qu'elles nourrissaient, comme le démontrait l'offensive menée par l'Allemagne, les Pays-Bas, la Suède et l'Autriche, des revendications afin de limiter l'ampleur des soldes budgétaires des Etats.

Il a conclu son propos en invitant la commission à adopter, malgré de fortes réserves, l'article 42 du projet de loi de finances pour 1999.

M. Joël Bourdin a souhaité que le rapporteur spécial insiste sur les difficultés concrètes rencontrées par les régions pour mobiliser les moyens des fonds structurels.

M. Jean-Pierre Demerliat, ayant demandé le sentiment du rapporteur spécial sur les présomptions de fraude au budget européen, s'est inquiété de l'avenir de l'allocation française au titre des fonds structurels.

M. Bernard Angels s'est demandé si les fonds structurels non utilisés au titre de la programmation 1993-1999 ne pourraient pas être consacrés à d'autres initiatives, et en particulier, si on ne pourrait envisager de les affecter au financement des réseaux transeuropéens.

M. Jacques Oudin, ayant rappelé l'existence de "mini-budgets" propices à une utilisation incontrôlée des crédits européens, a souhaité que des simplifications interviennent pour améliorer la gestion budgétaire des dits crédits.

En réponse aux intervenants M. Denis Badré, rapporteur spécial, a reconnu que la dépense européenne, du fait de la complexité des procédures de gestion, s'exécutait mal. Mais il a tout particulièrement insisté sur les responsabilités d'une mauvaise programmation financière dont il a jugé qu'elle expliquait l'essentiel de la sous-exécution des crédits des différentes rubriques du budget européen. Il a souligné que les augmentations excessives des crédits européens se traduisaient non seulement par le fardeau des contributions imposées aux Etats membres mais aussi par celui des financements additionnels supportés soit par le budget des Etats, soit par celui des collectivités locales.

Evoquant les présomptions de fraude, il a expliqué que bien souvent elles étaient associées au recours par la commission à des intermédiaires extérieurs, recours certes nécessaire pour gérer les interventions communautaires sans accroître inconsidérément la fonction publique européenne, mais recours qui expose à la multiplication d'incidents et suppose par conséquent un contrôle sans faille.

Abordant la question de l'utilisation des crédits non consommés, il a souhaité rappeler que ceux-ci n'en étaient pas moins des crédits engagés et que dans le système actuel, ils n'étaient ainsi pas disponibles pour d'autres usages. Il a alors insisté sur l'utilité dans le cadre de la nouvelle programmation financière non seulement de revenir sur l'engagement d'inscription de la totalité des crédits d'actions structurelles mais encore d'introduire une clause de caducité des engagements non consommés au-delà d'un délai raisonnable.

Il a enfin confirmé que, selon toute vraisemblance, la dotation structurelle réservée à la France dans la future programmation serait en diminution.

La commission a alors adopté le rapport ainsi que l'article 42 du projet de loi de finances pour 1999.

Ensuite, la commission a entendu une communication de M. Jacques Oudin, rapporteur spécial des crédits de la santé et de la solidarité, sur la mission d'information relative au financement et à l'organisation de la politique de lutte contre le cancer.

Mission d'information " lutte contre le cancer " - rapport d'information

Après avoir rappelé que le Parlement est invité, depuis trois ans, à s'intéresser plus précisément à l'évolution et à l'utilisation des dépenses d'assurance maladie dans le cadre nouveau des lois de financement de la sécurité sociale, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a indiqué que l'idée d'examiner plus particulièrement le financement de la politique de lutte contre le cancer lui était venue en constatant que personne n'était capable de lui indiquer le montant des sommes qui y sont consacrées chaque année.

Il a souligné que, lorsqu'une politique publique ne peut pas même être chiffrée, c'est l'indice d'un défaut d'organisation plus profond, ce principe étant parfaitement confirmé pour la politique de lutte contre le cancer.

Il a tout d'abord relevé que, alors que toutes les autres grandes causes de mortalité ont diminué depuis 30 ans, la mortalité par cancer a continué de progresser jusqu'à aujourd'hui. Le cancer est désormais la première cause de mortalité des Français, devant les maladies cardio-vasculaires.

Certes, il a admis que cette augmentation de la part du cancer dans les causes de décès s'expliquait par l'allongement de la durée de vie, s'agissant d'une maladie dégénérative qui ne peut que progresser à mesure du vieillissement de la population et de la diminution de l'incidence des autres pathologies. Le rapporteur spécial a toutefois souligné l'importance du cancer dans la mortalité prématurée, avant 65 ans, et notamment des cancers liés à l'alcool et au tabac.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a considéré que les succès de la lutte contre le cancer restaient limités même si les progrès thérapeutiques sont réels pour certains types de cancers. Ainsi, 70 % des cancers de l'enfant et près de 90 % des leucémies sont désormais guéris ; environ 50 % des cancers de la femme sont également guéris, à la condition d'un diagnostic précoce.

Toutefois, il a estimé que les succès rencontrés dans le traitement de certains cancers spécifiques ne suffisaient pas à contrebalancer l'échec thérapeutique persistant pour les cancers les plus fréquents, tels ceux du poumon ou du colon, qui demeurent incurables.

Evoquant l'organisation de la politique de lutte contre le cancer, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a constaté des insuffisances à chacun de ses niveaux.

S'agissant du premier niveau, celui de la prévention et du dépistage, il a estimé qu'il constituait le maillon faible du dispositif.

Il a relevé que, bien qu'il soit difficile d'isoler la part consacrée au cancer dans la masse des dépenses de prévention, celles-ci, prises dans leur globalité, restaient très modestes dans le système de soins français. Ainsi, elles se sont élevées en 1995 à 18,3 milliards de francs, soit 315 francs par habitant. A titre de comparaison, la consommation totale de soins et biens médicaux s'est élevée cette même année à 692,8 milliards de francs, soit 11.735 francs par personne.

Le rapporteur spécial a souligné que la prévention de l'alcoolisme et du tabagisme était un enjeu essentiel de la lutte contre le cancer, mais que les crédits budgétaires consacrés à l'alcoolisme et au tabagisme étaient limités : ils se sont élevés à 185 millions de francs en 1998. Ces dotations sont complétées par le Fonds national de prévention de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), qui a financé, en 1997, les campagnes d'information du Comité français d'éducation sanitaire à hauteur de 26,7 millions de francs.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a observé que l'action publique de prévention de la consommation de tabac et d'alcool repose principalement sur l'effet dissuasif de la fiscalité : le produit de l'ensemble des droits sur les alcools attendu pour 1998 s'élève à 16 milliards de francs, et celui du droit de consommation sur les tabacs à 43 milliards de francs. Il a rappelé que le partage des rôles entre l'assurance maladie, qui supporte les coûts médicaux du tabagisme et de l'alcoolisme, et l'Etat, qui engrange les recettes fiscales générées par ces deux fléaux, a souvent été critiqué. Il a indiqué qu'un effort de cohérence a été fait en 1997, avec l'affectation à la branche maladie d'une fraction des droits sur les alcools et d'une fraction des droits sur les tabacs.

S'agissant des dépistages, le rapporteur spécial a regretté que les programmes de dépistage organisés restent trop rares.

Rappelant que les lois de décentralisation ont confié une compétence aux départements pour le dépistage du cancer qui semble contradictoire avec la nécessaire centralisation de toute campagne de dépistage, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a observé que l'implication effective des départements était très variable : estimée à 40 millions de francs en 1995, elle se concentrait sur une douzaine de départements seulement.

Il a relevé que, depuis 1994, il existe un programme national de dépistage du cancer du sein, auquel le fonds de prévention de la CNAMTS a consacré 96 millions de francs en 1997, tandis que le dépistage du cancer du col de l'utérus n'existe pour l'instant que sur quelques sites expérimentaux, auxquels le fonds de prévention a consacré 3,3 millions de francs en 1997.

Le rapporteur spécial a relevé qu'à côté de ces rares programmes de dépistage organisés, les dépistages individuels réalisés sur une base spontanée se multiplient, le coût annuel des examens de dépistage du cancer du col de l'utérus étant ainsi estimé à 500 millions de francs. Or, il a souligné que ces dépenses non contrôlées aboutissaient à des gaspillages, les examens étant pratiqués plus fréquemment que nécessaire sur une fraction de la population qui en a le moins besoin.

Evoquant le second niveau de la politique de lutte contre le cancer, celui des soins, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a estimé que ce niveau laissait apparaître un manque de coordination préoccupant.

Il a tout d'abord observé que l'interdisciplinarité restait trop faible, alors que le cancer, en tant que pathologie complexe nécessitant des traitements combinés, était par essence pluridisciplinaire. Il a souligné que ce cloisonnement du système de soins était de nature à compromettre les chances des patients.

Le rapporteur spécial a regretté qu'une évaluation exhaustive et précise des coûts de traitement du cancer soit actuellement impossible, faute d'un système d'information adéquat. Il a indiqué que, par extrapolation du budget des Centres de lutte contre le cancer (CLCC), qui était d'environ 6 milliards de francs en 1997, on pouvait estimer entre 20 et 30 milliards de francs le coût annuel du traitement des cancers dans le secteur hospitalier.

Il a ajouté que le montant annuel des dépenses de médicaments anticancéreux était évalué, pour 1995, à 2,5 milliards de francs, les dépenses de soins ambulatoires restant les plus mal connues.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a estimé que, compte tenu de la hausse globale de l'incidence des pathologies tumorales et de l'apparition de nouveaux médicaments particulièrement onéreux, la probabilité d'une explosion des dépenses de soins consacrées au cancer dans les prochaines années était forte.

Il a relevé que le système de soins était affecté d'effets pervers liés aux systèmes de tarification, et que les déterminants implicites de l'orientation des malades étaient souvent plus financiers que médicaux.

Le rapporteur a enfin évoqué le troisième et dernier niveau de la politique de lutte contre le cancer, celui de la recherche.

Il a remarqué que les financements publics de la recherche ne sont pas très bien identifiés, la part consacrée au cancer n'étant pas isolée dans les budgets des instituts de recherche.

Il a indiqué que si les dépenses de recherche médicale sont évaluées à 6,7 milliards de francs, les moyens consacrés à la recherche sur le cancer sur ce total étaient estimés à 1,2 milliard de francs.

Le rapporteur a relevé que la recherche réalisée dans les CLCC et les centres hospitaliers universitaires (CHU) est mal prise en compte par le budget global, tandis que la recherche clinique reste rare dans les établissements privés lucratifs. Il a souligné que sur 9.000 protocoles de recherche clinique en cours, les deux tiers procèdent d'une initiative des laboratoires pharmaceutiques.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a considéré que la prédominance de l'industrie pharmaceutique dans les choix de recherche clinique pouvait présenter certains inconvénients, car elle se traduit par la préférence donnée au test de molécules nouvelles, dans une approche marketing, plutôt qu'à l'évaluation de nouvelles combinaisons thérapeutiques à partir de l'existant, ainsi que par un manque de coordination et une certaine redondance des essais.

Le rapporteur a rappelé que le financement de la recherche sur le cancer repose pour une part sur un appel à la générosité publique, qui n'est pas dépourvu non plus d'inconvénients.

Après avoir évoqué les errements passés de l'Association pour la Recherche sur le Cancer (ARC), qui consacrait une fraction disproportionnée de ses ressources à des frais de communication et de représentation, il a indiqué que le budget de l'ARC est tombé de 400 millions de francs en 1994, avant l'éclatement du scandale, à 200 millions de francs en 1996, pour remonter à 250 millions de francs en 1997. Il a indiqué que le budget de la Ligue nationale contre le cancer s'est élevé à 266 millions de francs en 1997.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a estimé que les frais de structure des associations apparaissent non négligeables, et que la contribution des associations au financement de la recherche s'effectuait sur des critères de sélection qui n'ont pas toujours été transparents, même si les comités scientifiques apportent désormais certaines garanties. Il a regretté que cet apport de fonds apparaisse parfois comme une aubaine pour les services concernés, qui ne se sentent pas toujours responsables de leur bonne utilisation.

Le rapporteur a enfin formulé un certain nombre de propositions tendant à améliorer la politique de lutte contre le cancer.

Il a souligné que la problématique est d'abord qualitative, et non pas quantitative : en l'absence de corrélation mécanique entre les sommes dépensées et les résultats obtenus, il importe de s'attacher surtout aux aspects organisationnels, qui permettront de parvenir à une plus grande efficacité tout en dégageant les marges financières nécessaires pour couvrir certaines dépenses inévitablement croissantes.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a d'abord formulé quatre propositions tendant à une meilleure connaissance :

- Premièrement, il a proposé de recenser systématiquement l'ensemble des fonds publics consacrés à la lutte contre le cancer, le rapporteur a estimé que l'absence de chiffres précis et exhaustifs sur les sommes consacrées à cette politique était en soi révélatrice de son défaut d'organisation ;

- Deuxièmement, il a proposé de pérenniser le Conseil national du Cancer. Le rapporteur a rappelé que ce Conseil, créé en 1995, avait produit de nombreux avis qui n'avaient pas été suivis de beaucoup d'effets, et que son mandat, arrivé à échéance en 1998, n'a pas été renouvelé ;

- Troisièmement, il a proposé d'adapter les systèmes d'information médicaux aux spécificités du cancer ; le rapporteur a indiqué qu'il s'agit d'affiner le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), afin qu'il prenne mieux en compte les coûts de la concertation pluridisciplinaire.

- Quatrièmement, il a proposé d'approfondir l'étude des disparités régionales.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a ensuite formulé cinq propositions tendant à une meilleure coordination :

- Premièrement, il a proposé d'harmoniser les systèmes de tarification ; il a estimé que le plus urgent était la tarification des chimiothérapies et la mise à jour de la nomenclature des actes, et qu'il fallait viser à terme une parfaite neutralité des modes de financement entre établissements sous budget global et établissements à prix de journée, ainsi qu'entre établissements et soins ambulatoires.

- Deuxièmement, il a proposé de mettre en place une politique nationale de dépistage ; le rapporteur a indiqué que les programmes de dépistage organisés méritaient de prendre de l'ampleur, à condition que les précautions méthodologiques soient respectées ; il a précisé qu'un dispositif est prévu en ce sens dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999.

- Troisièmement, il a proposé d'encourager le développement des réseaux en cancérologie ; le rapporteur a souligné que, par nature, la cancérologie relève tout particulièrement d'une logique d'organisation en réseau pour une prise en charge globale et cordonnées des patients, afin d'offrir à ceux-ci l'égalité des chances, la qualité et la continuité des soins ; il a estimé qu'il convenait donc, dans le cadre expérimental posé par les ordonnances d'avril 1996, de privilégier les réseaux en cancérologie.

- Quatrièmement, il a proposé de rendre obligatoire l'interdisciplinarité ; le rapporteur a admis que le développement des pratiques interdisciplinaires pouvait passer par leur valorisation financière, dans le cadre de procédures de tarification nouvelle ; il a néanmoins estimé nécessaire d'aller plus loin et d'imposer l'interdisciplinarité en cancérologie, en rendant obligatoire la participation à une structure fonctionnelle de concertation.

- Cinquièmement, il a proposé de mettre en place un pilotage de la recherche ; le rapporteur a affirmé que les contributions des associations au financement de la recherche devaient demeurer compatibles avec les objectifs de santé publique du Gouvernement, ce qui implique une coordination entre financements publics et privés.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a ensuite formulé quatre propositions tendant à une meilleure information :

- Premièrement, il a proposé d'amplifier les campagnes contre le tabac et l'alcool ; le rapporteur a estimé nécessaire une application stricte de la loi Evin, ainsi qu'une augmentation modérée des dotations budgétaires à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme ; il a affirmé qu'il ne fallait pas hésiter à porter la fiscalité sur le tabac à des niveaux réellement dissuasifs, surtout pour les jeunes fumeurs, l'Etat devant définitivement choisir entre ses préoccupations de rendement budgétaire et celles de santé publique.

- Deuxièmement, il a proposé d'inscrire la prévention dans l'éducation. Le rapporteur a indiqué que l'éducation sur la santé devait être globalisée, car tout ce qui est bon pour prévenir le cancer est également bon pour prévenir les maladies cardio-vasculaires, tandis que l'éducation sanitaire devait également porter sur le dépistage, dont la population a besoin de connaître les principes et les pratiques.

- Troisièmement, il a proposé d'adapter la formation initiale des médecins ; le rapporteur spécial a relevé que l'enseignement de la cancérologie était encore trop éclaté entre les diverses disciplines d'organes et qu'une coordination s'avérait indispensable.

Le rapporteur spécial a enfin formulé quatre propositions tendant à un meilleur contrôle :

- Premièrement, il a proposé d'instaurer une assurance qualité pour tous les actes ; le rapporteur spécial a indiqué que la préoccupation de qualité s'était, pour l'instant, traduite surtout par des initiatives spontanées des professionnels de la cancérologie, mais que cet effort louable ne saurait se substituer à une certification par les autorités publiques.

- Deuxièmement, il a proposé de mettre en oeuvre les procédures d'accréditation ; le rapporteur spécial a regretté la lenteur de la montée en charge de l'Agence nationale d'évaluation en santé créée en 1996, et il a estimé que la cancérologie devait être désignée comme prioritaire pour la mise en oeuvre des procédures d'accréditation.

- Troisièmement, il a proposé de réviser l'admission au remboursement des médicaments anticancéreux ; le rapporteur spécial a admis que la découverte de nouveaux médicaments efficaces pouvait justifier des coûts croissants, mais que la progression de l'enveloppe des médicaments remboursés devait néanmoins être contenue dans des limites soutenables, et qu'il importait donc de contrôler les dépenses de médicaments inutiles ou redondantes.

- Quatrièmement, il a proposé de contrôler l'emploi des fonds provenant de la générosité publique ; le rapporteur spécial a estimé que le contrôle de premier niveau, sur les associations qui collectent des fonds pour la lutte contre le cancer, semble désormais convenablement assuré, mais qu'il importait de renforcer le contrôle de second niveau, sur l'utilisation qui en était faite par les centres de recherche bénéficiaires.

En conclusion, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a estimé que les lacunes et faiblesses de la politique de lutte contre le cancer étaient illustratives des insuffisances de notre système de santé, et du manque de volonté de l'Etat pour le réformer.

Les membres de la commission ont alors donné acte à M. Jacques Oudin de sa communication et ils ont autorisé sa publication sous la forme d'un rapport d'information.

Jeudi 22 octobre 1998

- Présidence de M. Alain Lambert, président. Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Pierre Joxe, Premier Président de la Cour des Comptes, accompagné de M. François Logerot, président de la première chambre, et de M. Bernard Cieutat, rapporteur général des lois de règlement, sur les projets de loi  527 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1995 et  528 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1996 et sur le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour l'année 1997.

Loi de règlement - Budgets 1995 et 1996 - Audition de M. Pierre Joxe, Premier Président de la Cour des Comptes et de MM. François Logerot, président de la première chambre et Bernard Cieutat, rapporteur général

En réponse à M. Alain Lambert, président, qui l'interrogeait sur la contribution française au budget européen, M. Pierre Joxe a évoqué les crédits dont disposent les institutions de l'Union européenne, dont l'utilisation fait actuellement l'objet de critiques.

Il a tout d'abord fait valoir que la disparité des traitements entre les membres du Parlement européen se traduisait par des rémunérations allant du simple au quadruple, ce qui expliquait le recours à des frais de mission excessifs, et parfois fictifs, que des magistrats français de la Cour des Comptes et de Chambre régionale des comptes avaient critiqués.

Il a ensuite jugé indispensable de procéder à une harmonisation des contrôles sur l'utilisation des fonds européens. S'agissant notamment du fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), M. Pierre Joxe a indiqué que les pays de l'Union européenne avaient fait des choix différents en matière de contrôle de l'utilisation de ce fonds, confiant parfois cette tâche à leur Cour des comptes, parfois au ministère de l'agriculture ou même, comme c'est le cas en Grande-Bretagne, à un cabinet d'audit. Il a expliqué que, malgré leur progression très lente, les fonds européens représenteraient l'équivalent d'un grand ministère français d'ici cinq à dix ans, ce qui justifiait de prévoir, dès à présent, des contrôles adaptés.

Le Premier Président de la Cour des Comptes a ensuite abordé la question de l'exécution du budget en France.

Il a indiqué que les comptes de l'Etat étaient désormais arrêtés plus tôt, la période complémentaire, qui s'achevait auparavant au 7 février, ayant été ramenée au 31 janvier. A terme, il a souhaité que cette période complémentaire soit supprimée comme elle l'est déjà, par exemple, à Singapour.

M. Pierre Joxe a ajouté que le rapport préliminaire de la Cour des Comptes sur l'exécution des lois de finances était un élément important pour accroître le contrôle du Parlement sur l'exécution budgétaire, mais que ce contrôle avait plus d'impact quand le projet de loi de règlement était inscrit rapidement à l'ordre du jour des Assemblées.

M. Pierre Joxe a ensuite abordé deux points : l'amélioration de la situation budgétaire en 1995 et 1996 et la nécessité d'une transparence accrue des procédures comptables.

S'agissant du premier point, il a fait remarquer que le montant des déficits et des pertes de l'Etat avait diminué, pour revenir à 299 milliards de francs en 1996. Cette amélioration a été rendue possible par l'accroissement des recettes fiscales et par une moindre progression de la charge de la dette, grâce à une diminution des taux d'intérêt. Toutefois, les dépenses de personnel n'ont pas cessé d'augmenter sur cette période.

S'agissant du second point, M. Pierre Joxe a indiqué que des améliorations avaient été constatées en matière de transparence et de rigueur comptable. Il a pris comme exemple le nouveau mode de comptabilisation des recettes fiscales perçues par voie de rôles et la disposition du projet de loi de règlement pour 1995 concernant l'écart d'intégration des comptes chèques postaux. Il a ajouté que des progrès devaient toutefois être réalisés en matière de prélèvements sur recettes, et que l'ensemble des rémunérations accessoires devraient être réintégrées au budget de l'Etat.

En réponse à M. Alain Lambert, président, le Premier Président de la Cour des Comptes a ensuite évoqué l'enquête menée par la Cour depuis trois ans sur les effectifs et les rémunérations dans la fonction publique. Il a estimé légitime que l'Etat choisisse de rémunérer certains de ses agents au-delà de leur salaire déterminé par la grille indiciaire, mais il a souhaité que cette rémunération soit publique. Il a pris l'exemple des Pays-Bas, pays où les fonctionnaires sont rémunérés de manière transparente, suivant une échelle allant de 1 à 27. Il a ajouté que cette enquête permettrait de décrire la réalité des rémunérations dans la fonction publique, seul moyen d'effectuer des comparaisons utiles entre les agents publics.

Le Premier Président de la Cour des Comptes a ensuite répondu aux questions de M. Philippe Marini, rapporteur général.

M. Pierre Joxe a indiqué que, s'agissant de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, un groupe de travail avait été mis en place à l'Assemblée nationale. Il a souhaité que les parlementaires s'impliquent dans cette réforme, dans la mesure où les administrations publiques étaient très réticentes au changement.

M. François Logerot, président de la première chambre de la Cour des Comptes, a précisé que la Cour n'avait pas procédé à un travail d'ensemble sur l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Il a cependant évoqué l'éventuelle révision de l'article 13 de l'ordonnance, qui autorise le ministre des finances à annuler par arrêté tout crédit devenu sans objet. Il a déclaré que, les hypothèses de croissance des recettes fiscales étant arrêtées au milieu de l'année, au plus tard au mois d'août ou septembre, la régulation budgétaire était en réalité devenue un outil d'ajustement aux évolutions de la croissance économique. Il a ajouté que la Cour des Comptes s'était exprimée à plusieurs reprises sur l'utilisation faite des dispositions de l'article 13 de l'ordonnance organique de 1959, et qu'elle souhaitait toujours que d'autres techniques budgétaires puissent être mises en place.

Le président de la première chambre de la Cour des Comptes a ensuite constaté que la comptabilité publique française restait rudimentaire. Il a indiqué qu'elle n'appliquait pas le principe des droits constatés, à la différence des autres pays européens, alors que l'application de ce principe permettrait de commencer l'élaboration d'une comptabilité patrimoniale de l'Etat. Il a ajouté que la Cour des Comptes avait noté que certaines pratiques traduisaient un changement de méthode d'un exercice budgétaire à l'autre. Il a regretté que certaines charges de structure ne soient pas correctement décrites dans les comptes de l'Etat, de même que les charges futures des opérations de défaisance. Il en a conclu que des réformes sur ces sujets permettraient d'apporter des clarifications dans les comptes publics et de donner une meilleure information au Parlement.

M. Bernard Cieutat, rapporteur général des lois de règlement, a évoqué la question de l'écart d'intégration entre le montant des avoirs des comptes chèques postaux et la somme déposée par la Poste au Trésor public.

Il a tout d'abord rappelé que la Cour avait soulevé ce problème il y a de nombreuses années. Le rapport public pour 1988 décrivait déjà la confusion existant entre la trésorerie de la Poste et la trésorerie de l'Etat. La Cour avait noté qu'il existait des discordances entre ce que la Poste déposait au titre des avoirs des comptes chèques postaux et ses engagements vis-à-vis des titulaires de ces mêmes comptes. M. Bernard Cieutat a fait observer que, sous le régime du budget annexe, la Poste était obligée de déposer les avoirs des comptes chèques postaux au Trésor public, mais que l'Etat, ne voulant pas la subventionner à hauteur de ses charges d'exploitation, l'avait autorisée à conserver une partie de ces avoirs. Si la Poste a effectivement puisé dans ces avoirs, il a estimé que l'Etat avait une part de responsabilité importante dans cette opération, d'autant qu'il avait effectué des prélèvements au détriment de la Poste de l'ordre de 4 milliards de francs par an pendant cette période.

M. Bernard Cieutat a ajouté qu'une commission avait été constituée, présidée par un magistrat de la Cour des Comptes, pour établir le bilan d'ouverture de la Poste. C'est à ce moment que l'écart entre les comptes de la Poste et ceux de l'Etat est ouvertement apparu. En 1992, le Gouvernement a pris la décision de ne pas faire apparaître cette dette dans les comptes de la Poste, pour que l'établissement public ne soit pas créé avec une situation nette négative.

M. Bernard Cieutat a conclu que l'article 15 du projet de loi de règlement pour 1995 apportait une solution comptable au problème évoqué, en inscrivant en pertes de trésorerie pour l'Etat l'écart de 18 milliards de francs constaté lors de l'établissement du bilan de la Poste. Il a estimé que, si l'autonomie de la Poste s'accroissait à l'égard de l'Etat, c'est-à-dire si elle était dispensée de déposer les avoirs des comptes postaux au Trésor, ou encore si tous les titulaires de ces comptes souhaitaient retirer leur argent, l'Etat s'engagerait à honorer ces 18 milliards de francs.

En matière de pensions, M. Bernard Cieutat a indiqué que l'étude menée par la Cour des Comptes était loin d'être achevée, mais que la Cour avait présenté des observations dans ses derniers rapports publics. Il a indiqué que les rémunérations principales, les indemnités, et surtout les pensions augmentaient à un rythme très rapide, puisqu'elles étaient passées de 139 milliards de francs en 1993 à 166 milliards de francs en 1997, soit une progression de 18 % sur 4 ans et de 4,2 % par an. Il a ajouté que cette moyenne était toutefois erratique, puisqu'en 1997 la progression n'avait été que de 3,6 %, en raison de l'absence du relèvement du point de la fonction publique. Il a estimé toutefois que l'hypothèse d'un accroissement de la charge des retraites de 12 milliards de francs par an à partir de l'an 2000 était sans doute excessive.

M. Bernard Cieutat a ajouté que la dégradation du rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités dans la fonction publique était très inquiétante pour l'avenir, car ce rapport devrait passer de 2,5 en 1995 à 1,4 en 2015. Ce chiffre est toutefois plus favorable que celui retenu pour le secteur privé, qui s'élèvera à 1,2. Quelle que soit l'hypothèse choisie, sur les 15 années à venir, la moitié des fonctionnaires partira en retraite, si bien que le nombre de pensionnés progressera de 10 % tous les deux ans et sera doublé en 2015.

M. Bernard Cieutat a expliqué que les mesures catégorielles accordées aux actifs étaient étendues aux retraités, notamment la progression des indices de la fonction publique, en application de l'article L 16 du code des pensions. De surcroît, le renforcement des emplois d'encadrement fera progresser la charge des pensions, alors qu'en sens inverse l'entrée plus tardive dans la fonction publique minorera cette charge.

M. Bernard Cieutat a conclu en indiquant que le commissariat général du Plan était désormais chargé d'une mission de prospection sur l'avenir des retraites et leur financement, ce qui permettra d'actualiser le rapport sur les retraites de 1995.

M. François Logerot a ensuite abordé la question des rebudgétisations. Il a fait observer qu'un certain nombre d'opérations de clarification introduites dans le projet de loi de finances pour 1999 avaient pour origine des observations de la Cour des Comptes, ou des études particulières menées par elle pour répondre aux questions des commissions des finances, et particulièrement à celle du Sénat. Concernant le problème des "crédits d'article" au budget des services financiers, il a indiqué qu'il s'agissait d'une incohérence de la présentation budgétaire dans la mesure où des dépenses n'étaient pas retracées dans le budget de l'Etat, alors que les recettes les finançant y figuraient. Il a ajouté que la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 1998 avait définitivement convaincu le Gouvernement de modifier sa présentation budgétaire. Il a par ailleurs indiqué que les opérations faites par voie de comptes de classe 4 (comptes de tiers) étaient réintégrées dans le budget pour 1999 pour 138 millions de francs.

M. François Logerot a estimé qu'il restait toutefois d'autres opérations extra-budgétaires qu'il convenait de réintégrer dans le budget de l'Etat. Il a cité les fonds d'honoraires du ministère de l'équipement pour 900 millions de francs, les fonds d'honoraires du génie rural pour 400 millions de francs, et les comptes de classe 4 du ministère des finances, tels les frais de service des comptables du Trésor, pour lesquels il n'existe aucune centralisation comptable nationale.

M. François Logerot a déclaré que les opérations de remboursement de la taxe à la valeur ajoutée aux entreprises, consécutives à la suppression du décalage d'un mois, sont traitées en opérations de trésorerie, alors qu'il s'agit d'opérations de caractère budgétaire. Il a également regretté que le remboursement à l'Etat de la dette de la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) soit intégralement retracé au budget général, alors que la partie en capital correspondant à 5,8 milliards de francs avait été intégralement traitée en opération de trésorerie. Concernant les opérations de défaisance, il a indiqué que les sommes versées à l'établissement public de financement et de réalisation (EPFR) ne lui avaient pas permis d'honorer les charges de l'emprunt contracté auprès du Crédit lyonnais, ce qui avait entraîné des pénalités de retard de 1 milliard de francs. Il a alors mis en évidence le paradoxe aux termes duquel l'établissement public de défaisance du Comptoir des Entrepreneurs avait, quant à lui, reçu une dotation supérieure à ses besoins réels. Enfin, il a regretté que des dépenses de fonctionnement des administrations de l'Etat, notamment du ministère de l'équipement, soient imputées sur les dépenses de certains comptes spéciaux du Trésor, en contravention avec les dispositions de l'ordonnance organique.

S'agissant des recettes attendues de la privatisation du Crédit lyonnais en 1999, il a fait observer que les recettes prévues au titre des privatisations s'élevaient à 17 milliards de francs dans le projet de loi de finances pour 1999. Cette somme correspond au complément de recettes dégagé par la privatisation du groupement des assurances nationales (GAN) et à l'extension de la mise sur le marché des actions de France Télécom. Il a convenu qu'aucune recette n'était inscrite pour la privatisation du Crédit lyonnais ou pour celle du Crédit foncier de France. Il a toutefois indiqué que l'affichage de prévision de recettes se révélait très difficile dans la mesure où la capitalisation boursière était fluctuante et surtout parce qu'il était dangereux d'afficher des prévisions trop excessives, qui pouvaient décourager des repreneurs ou, au contraire, des prévisions trop faibles qui pouvaient constituer un signe négatif pour les négociations à venir. Il a fait observer que les dotations inscrites sur la ligne correspondante n'avaient jamais été conformes aux réalisations : en 1995, 55 milliards de francs étaient prévus mais seulement 21 milliards de francs ont été réalisés, en 1996, 22 milliards de francs étaient inscrits mais seulement 13 milliards de francs ont pu être réalisés, en 1997, 27 milliards de francs étaient inscrits mais 59 milliards de francs ont finalement été réalisés. En 1998, l'objectif inscrit en loi de finances ne devrait pas être atteint.

M. Michel Charasse s'est félicité de l'étude menée par la Cour des Comptes sur la fonction publique, ses effectifs, ses rémunérations.

S'agissant du régime indemnitaire, il a tenu à préciser que les fonds de concours du ministère des finances, qui viennent d'être réintégrés dans le projet de loi de finances pour 1999, étaient clairement identifiés, à la différence de structures similaires existant au sein d'autres ministères. Il a également distingué les régimes indemnitaires correspondant à l'exercice effectif de responsabilités et à la prise de risques de ceux relevant de stratifications historiques. De même il s'est interrogé sur les modalités de gestion des effectifs de la fonction publique, et notamment sur l'utilisation de la mobilité dans l'intérêt du service. Il a enfin souhaité que l'étude de la Cour des Comptes soit étendue aux entreprises publiques.

S'agissant de la réforme de l'ordonnance du 2 janvier 1959, il a rappelé la nécessité de l'autorisation préalable du Parlement en matière des dépenses, l'importance de l'article d'équilibre et l'intérêt que présente le mécanisme dit de la " régulation budgétaire ", ainsi que la nécessaire distinction entre l'autorisation et l'obligation de dépense.

Enfin, évoquant, en sa qualité de rapporteur spécial des crédits de la Coopération, sa récente mission en Afrique, il a fait état de deux affaires, notamment en matière de livraison d'aide alimentaire à caractère humanitaire, qui pouvaient relever de la compétence de la Cour des Comptes.

M. Roland du Luart, après s'être félicité de la qualité des travaux de la Cour, s'est interrogé sur les suites effectivement données à ses conclusions. S'agissant de l'étude menée sur la fonction publique et ses rémunérations, il a souhaité en connaître la date de parution afin que celle-ci puisse clarifier le débat en la matière, trop souvent polémique et excessif.

Il a enfin souhaité obtenir des informations quant au niveau réel des primes versées à certains corps techniques de l'Etat.

Partant de la situation de l'EPFR et des modalités de sa mise en place,M. Yann Gaillard a souhaité que soient examinées les conditions dans lesquelles cette structure avait travaillé, ainsi que son coût financier. Il s'est par ailleurs interrogé sur la nature précise et l'évolution à venir des relations existant entre l'EPFR et le CDR (comptoir de réalisation) et il a souhaité, que la Cour des Comptes puisse apporter son éclairage en ce domaine.

M. Pierre Joxe, Premier Président de la Cour des Comptes, s'agissant du travail actuellement effectué par la Cour des Comptes en matière de rémunérations au sein de la fonction publique en a reconnu la difficulté technique, notamment en raison du nécessaire respect du caractère contradictoire de la procédure. Il a par ailleurs souhaité obtenir des précisions quant aux faits évoqués par M. Michel Charasse en sa qualité de rapporteur spécial pour mieux orienter l'action de contrôle de la Cour des Comptes.

Répondant à M. Roland du Luart, il lui a indiqué que, lorsque les pressions, qu'elles émanent du Parlement, du Gouvernement ou de l'opinion publique étaient fortes, les rapports et études de la Cour connaissaient des suites rapides, mais qu'en tout état de cause, la Cour ne disposait pas en principe de pouvoir de sanction propre. A ce titre, évoquant les auditions publiques menées en ces matières par le Parlement britannique, il a estimé qu'elles pouvaient constituer un exemple transposable en France, si le Parlement français le jugeait opportun.

S'agissant des rémunérations des ministres, il a rappelé que celles-ci étaient réglementées et prévues de façon très précise. De façon plus générale, il a indiqué que les travaux de la Cour permettraient de tracer un panorama clair et complet de la situation de l'ensemble des rémunérations publiques.

En réponse à M. Yann Gaillard, il a convenu de l'intérêt et de la nécessité, pour la Cour des Comptes, d'étudier la situation de l'EPFR, tout en soulignant la diversité, voire la complexité, des intérêts, notamment financiers, en cause.

Il a enfin souligné l'utilité, notamment pour apprécier l'effectivité des politiques publiques, des synergies pouvant exister entre le développement de la fonction de contrôle du Parlement et les travaux menés en ce domaine par la Cour des Comptes.

M. François Logerot, président de la première chambre de la Cour des Comptes, a apporté des précisions à M.  Roland du Luart sur les montants respectifs des indemnités perçues par les fonctionnaires du génie rural et ceux des ponts et chaussées.

S'agissant de la situation de l'EPFR, il a convenu de la justesse du propos de M. Yann Gaillard et souhaité, à ce titre, de façon plus générale, qu'une étude de synthèse soit menée par la Cour sur les opérations de défaisance.

M. Alain Lambert, président, a tenu à remercier M. Pierre Joxe pour l'intérêt et les perspectives ouvertes par son audition en matière de développement de la fonction de contrôle du Parlement.

Puis, la commission a procédé à l'examen des projets de loi n° 527 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1995 et n° 528 (1997-1998) portant règlement définitif du budget de 1996, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général.

Loi de règlement - Budgets 1995 et 1996 - Examen des rapports

M. Philippe Marini, rapporteur général, a souligné que l'examen de ces projets de loi était riche d'enseignements sur l'art de piloter les finances publiques dans un environnement de plus en plus incertain. A ce titre, il a souligné que, dans des conditions très difficiles, la France avait poursuivi son chemin vers la monnaie unique en 1995 et 1996.

Il a tout d'abord fait observer, s'agissant du cadrage macro-économique, que des écarts importants existaient entre prévisions et réalisations.

Il a indiqué qu'en 1995 le Gouvernement avait prévu une croissance de 3,1 % et qu'elle fut de 2 %, tandis qu'en 1996 la prévision fut encore davantage déjouée : 1,2 % réalisé pour 2,8 % prévu.

De même il a souligné qu'au cours de chacune des deux années, la demande intérieure n'avait pas atteint le niveau que l'on attendait, les ménages préférant épargner et les entreprises continuer à se désendetter.

Il a également fait remarquer que la croissance, qui avait repris vivement en 1994, avait marqué le pas en 1995 et 1996 dans la plupart des grandes économies de l'OCDE, notamment en raison de la crise financière mexicaine de la fin de 1994.

En conséquence, il est apparu nécessaire, pour la plupart des pays européens, d'adopter des politiques budgétaires rigoureuses pour entrer dans l'épure des critères du traité sur l'Union européenne, ce qui avait probablement accentué le ralentissement économique.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a ainsi rappelé que la politique rigoureuse et responsable menée avait alors permis à la France de faire ensuite partie des premiers accédants à l'euro.

Il a ensuite détaillé les principaux éléments de la gestion des finances publiques pour 1995 et 1996.

Il a tout d'abord rappelé que les recettes avaient été marquées en 1995 et 1996 par un phénomène que les gouvernements de l'époque avaient appelé " déflation ". Non seulement la croissance économique était plus faible que prévu, mais encore les recettes ne suivaient pas cette croissance. Ainsi, en 1995, les recettes n'avaient progressé spontanément que de 1,4 % alors que la croissance nominale s'établissait à 3,4 %. La loi de finances rectificative d'août 1995 a donc permis de redresser la courbe des recettes, au prix d'un relèvement des prélèvements obligatoires, surtout sur la TVA (+ 17 milliards de francs) et l'impôt sur les sociétés (+ 11 milliards de francs), soit au total 30 milliards de francs.

Le relèvement des impôts a ensuite été beaucoup critiqué, mais s'il en avait été autrement, l'euro n'aurait pas pu être mis en place le 1er janvier 1999.

Il a cependant souligné qu'en 1996, le phénomène n'avait pas été aussi accentué même si les recettes fiscales nettes avaient enregistré une moins-value de 1,6 % (- 22,8 milliards de francs) essentiellement concentrée sur la TVA (- 22,1 milliards de francs) et que le maintien du niveau des recettes n'avait été obtenu que grâce à une augmentation des recettes non fiscales : + 21,6 milliards de francs.

Néanmoins, il a relevé que, malgré le souhait des gouvernements successifs, les dépenses avaient été mal contenues en 1995 et 1996, essentiellement du fait de la forte progression des charges de la dette publique, mais aussi de certaines dépenses de transfert liées aux difficultés économiques et sociales, comme les aides personnelles au logement ou le revenu minimum d'insertion.

Ainsi, en exécution, les dépenses ont progressé en 1995 de 3,2 % par rapport à 1994, et encore de 4,6 % en 1996 par rapport à 1995.

Il a rappelé que ces deux exercices avaient également subi le vif emballement des charges de la dette publique : + 12,6 % en 1995 (235,4 milliards de francs) et que, même si la progression s'était ralentie en 1996  (+ 1,6 %), la charge brute de la dette publique qui représentait 240 milliards de francs était devenue l'un des postes essentiels du budget de l'Etat avec les crédits militaires et l'éducation nationale.

Par ailleurs, certaines dépenses d'intervention avaient également exercé une très forte pression au cours de ces deux années : le revenu minimum d'insertion (RMI) a augmenté de 13,6 % en 1995 pour représenter 21,8 milliards de francs, les aides au logement de 7,3 %, soit 29,9 milliards de francs et les aides à l'emploi, de 7,2 % en 1995 et 15,2 % en 1996, pour atteindre le chiffre record de 148,8 milliards de francs.

Néanmoins, M. Philippe Marini, rapporteur général, a souligné que, malgré un effet de ciseaux (déflation des recettes et pression des dépenses liées aux difficultés économiques), les gouvernements de 1995 et 1996 avaient maintenu la France sur les rails de la monnaie unique. Le déficit 1995 avait ainsi été maintenu au niveau prévu initialement : 323 milliards de francs en exécution pour 322,1 milliards de francs en loi de finances initiale.

Il a également indiqué que, si en 1996 le dérapage avait été moins bien contrôlé : 295,4 milliards de francs pour 287,8 milliards de francs prévus, les déficits avaient cependant continué de se réduire en proportion du produit intérieur brut (PIB) (4,2 % en 1995 et 3,8 % en 1996), et que le déficit global des administrations publiques avait atteint respectivement 4,9 %, puis 4,1 % du PIB, grâce à l'amélioration spectaculaire des comptes sociaux en 1996. De ce fait, si la monnaie unique n'était pas accessible pour 1997, la France était en bonne voie pour 1999.

En conclusion, il a tenu à souligner que les difficultés de l'exécution des lois de finances pour 1995 et 1996 permettaient de tirer deux leçons pour l'avenir, dont devraient s'inspirer les gouvernements dans la construction de la loi de finances, et qui seraient utiles pour l'analyse du projet de budget 1999.

D'une part, il lui apparaissait que la situation économique, sensible au moindre choc externe, était devenue d'une incroyable imprévisibilité. Cette donnée imposait donc de construire avec prudence des budgets ne prévoyant pas de dépenser, surtout sous forme de charges de structure, toutes les recettes que la prévision économique du moment pouvait laisser espérer. L'élaboration d'un budget sur la base d'une croissance nominale inférieure d'un point au consensus des prévisionnistes permettrait ainsi de garantir sans trop de dommages l'objectif initial de déficit budgétaire.

Par ailleurs, il a rappelé que le niveau des taux d'intérêt à court et long termes, qui était une donnée échappant totalement à la volonté des gouvernements, constituait une variable déterminante pour les charges de la dette publique. En conséquence, si l'on souhaitait que l'idée même de politique budgétaire puisse continuer à exister, il était impératif de réduire le fardeau de la dette publique, même si cela n'était pas toujours possible puisqu'il fallait, en effet, que la conjoncture économique s'y prête.

Néanmoins, lorsque c'était possible, il fallait le faire avec la plus extrême détermination, car le fait de dépenser les fruits de la croissance lorsque l'Etat est endetté constituait un gaspillage.

M. Bernard Angels, après avoir reconnu que la loi de règlement ne faisait que constater l'exécution d'une loi de finances, a regretté les retards pris dans leur examen.

Il a cependant contesté, s'agissant de la loi de règlement 1995, le qualificatif de "rigoureuse et réaliste" appliqué à la gestion gouvernementale. Ainsi le déficit fixé initialement à 275 milliards a été exécuté à un niveau de 323 milliards, soit 4,2 % du PIB. De même, il a souligné qu'en 1996, le budget s'inscrivait dans le cadre d'une "gestion calamiteuse des finances publiques", même si la dérive avait cependant été limitée de 288 à 295 milliards de francs.

S'agissant de l'objectif de réduction des dépenses publiques, il a relevé que celles-ci avaient évolué en 1995 au même niveau que le PIB et tenu à indiquer qu'elles diminueraient d'un point de PIB en 1999.

De même, il a tenu à souligner que le déficit budgétaire avait été peu réduit malgré des recettes fiscales supplémentaires et les ressources tirées des opérations de privatisation.

A titre liminaire, Mme Marie-Claude Beaudeau a tenu à rappeler que la majoration de TVA, en 1995, avait été accompagnée d'une diminution de l'impôt sur les sociétés. Elle a souligné l'importance pour l'exécution du budget de 1995 des effets du collectif budgétaire, ainsi que l'accroissement du niveau du déficit budgétaire. S'agissant du relèvement du taux de la TVA elle a tenu à indiquer que les craintes qu'elle avait alors exprimées s'étaient révélées justes, et ainsi démontré l'intérêt de diminuer le taux de celle-ci.

En réponse à M. Bernard Angels, M. Philippe Marini, rapporteur général, a fait état des graves aléas de conjoncture extérieure qu'avait connus la France en 1995, notamment du fait de la crise du Mexique en 1994 et de la baisse du cours du dollar, et de ses effets négatifs sur la progression des recettes. Dans ce contexte, après avoir rappelé le choix fait par le Gouvernement d'agir sur les recettes et non de diminuer les dépenses, il en a souligné l'intérêt et l'utilité pour limiter la progression du déficit et protéger l'avenir de la croissance en France dans un contexte économique très différent de celui qui avait été prévu initialement.

La commission a ensuite procédé à l'examen du projet de loi de règlement définitif du budget de 1995. Elle a adopté sans modification les quatorze premiers articles.

M. Philippe Marini, rapporteur général, après avoir présenté l'article 15 et l'écart d'intégration de 18 milliards de francs des dépôts des comptes chèques postaux que cet article visait à apurer, a souhaité, dans l'attente d'informations complémentaires et satisfaisantes de la part du Gouvernement, présenter un amendement "d'appel" visant à supprimer cet article. Cet amendement a été adopté par la commission.

A l'article 16, il a présenté un amendement de coordination consécutif à l'adoption de l'amendement de suppression de l'article 15.

Puis, l'ensemble du projet de loi de règlement définitif du budget de 1995 ainsi amendé a été adopté.

La commission a ensuite adopté sans modification l'ensemble du projet de loi de règlement définitif du budget de 1996.
Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu une communication du rapporteur général sur la façon dont il lui paraissait souhaitable d'aborder l'examen du projet de loi de finances.

Projet de loi de finances pour 1999 - Communication du rapporteur général

M. Alain Lambert, président, a justifié cette démarche par le calendrier d'examen du budget, la commission étant amenée à statuer une première fois sur de nombreux fascicules budgétaires avant de débattre des principaux éléments de l'équilibre d'ensemble du projet de loi de finances.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a tout d'abord rappelé que des éléments substantiels du projet de loi de finances avaient été définis par le Gouvernement dès le mois d'avril (notamment le cadrage macro-économique et les priorités en matière de dépenses) et qu'ils avaient été peu révisés ensuite. Or l'environnement économique international a évolué depuis cette date.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a constaté que les prévisions macro-économiques pour 1999, en matière de croissance, de changes, ou d'emploi, étaient affectées d'une forte dispersion selon les prévisionnistes. Il en a déduit que l'incertitude qui en résultait commandait une certaine prudence dans l'élaboration du budget, prudence qui devrait se traduire par certains ajustements permettant de tenir l'objectif de déficit du Gouvernement si d'aventure la croissance nominale était inférieure à ce qu'il a prévu. En revanche si, comme chacun le souhaite, l'objectif de croissance est atteint, le gain résultant de cette attitude de prudence pourrait être affecté à la réduction de la dette publique. Selon la Commission européenne, la France est en effet l'un des rares Etats membres à ne pas avoir prévu de stabiliser sa dette en pourcentage du PIB l'année prochaine.

Le rapporteur général a alors proposé à la commission deux méthodes, déjà retenues pour l'examen du projet de loi de finances pour 1998 : des économies "ciblées", et des économies forfaitaires. Les économies ciblées correspondraient au refus par le Sénat du financement de certaines mesures particulières, les économies forfaitaires étant appliquées au "train de vie de l'Etat" (parties 4 à 7 du titre III) et aux autres parties du titre III et le titre IV. Sauf exceptions identifiées, les titres d'investissement (V et VI) ne seraient pas concernés, l'objectif étant de commencer à réduire les charges de structure dans le cadre d'une réflexion plus large sur la réforme de l'Etat.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a conclu sa communication en qualifiant sa proposition de "budget alternatif de prudence et de responsabilité".

Ensuite, la commission a procédé à l'examen des crédits des affaires étrangères et de la coopération : I-. Affaires étrangères pour 1999, sur le rapport de M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget des affaires étrangères

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a tout d'abord souligné que le budget des affaires étrangères pour 1999 intégrait les crédits de la coopération, en conséquence de la réforme annoncée en février 1998 par le Gouvernement. Il a toutefois précisé que le budget de la coopération continuerait de faire l'objet du rapport spécial distinct de M. Michel Charasse.

Il a rappelé que le budget des affaires étrangères ne constituait qu'une partie des crédits consacrés à l'action extérieure de la France, qui se sont élevés en 1998 à 50,4 milliards de francs, dont 18,7 milliards de francs gérés par le ministère de l'économie et des finances.

Le rapporteur spécial a indiqué que le budget des affaires étrangères pour 1999 s'élevait à 20,77 milliards de francs, dont 14,8 milliards provenant des affaires étrangères et 5,9 milliards provenant de la coopération. Il a indiqué que ces crédits étaient en diminution de 0,7 % par rapport à 1998, cette baisse globale recouvrant une hausse de 2,6 % des crédits provenant des affaires étrangères et une diminution de 7 % des crédits provenant de la coopération. Il a précisé que cette diminution sensible des crédits de la coopération s'expliquait par la baisse des crédits d'ajustements structurels en faveur des pays africains.

Renvoyant à son rapport écrit pour une présentation plus détaillée des crédits, M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a formulé cinq observations sur le budget des affaires étrangères pour 1999.

Première observation : il a estimé que l'intégration du secrétariat d'état à la coopération au ministère des affaires étrangères n'était que la conséquence logique de l'élargissement du champ de la coopération au cours des années antérieures. Il a précisé que cette intégration posait la question délicate de l'intégration des agents de la coopération dans les corps homologues des affaires étrangères, et s'était traduite dans un premier temps par un ajustement des régimes indemnitaires. Il a observé que cette intégration se doublait d'une réforme du fonctionnement du ministère des affaires étrangères, qui est revenu à une organisation transversale "par métier", et non plus géographique. Le rapporteur spécial a souligné que, si une diminution des coûts était attendue à terme de l'intégration des services de la coopération, celle-ci se traduisait dans un premier temps par des dépenses supplémentaires, les crédits du titre III augmentant de 4,5 %. Il a précisé que cette augmentation recouvrait notamment une mesure nouvelle de 23,6 millions de francs pour une remise à niveau des salaires des agents résidant dans les services à l'étranger, dont il avait lui-même dénoncé la sous-rémunération.

Deuxième observation : le rapporteur spécial s'est félicité du coup d'arrêt à l'érosion des contributions internationales volontaires. Il a rappelé que ces contributions volontaires s'élevaient à près de 700 millions de francs en 1993 et avaient été réduites à 228 millions de francs en 1998, faisant ainsi fonction de variable d'ajustement du budget des affaires étrangères. Il a estimé que cette diminution des contributions volontaires avait porté atteinte au crédit international de la France, alors même que l'on peut en attendre des retours économiques importants. Il a indiqué qu'une mesure nouvelle de 50 millions de francs leur permettrait de retrouver un niveau de 278 millions de francs en 1999.

Troisième observation : le rapporteur spécial a indiqué que le ministère des affaires étrangères avait donné une priorité à sa politique audiovisuelle extérieure, dont les crédits augmenteraient de 7,4 % en 1999, pour dépasser 1 milliard de francs. Il a rappelé que la situation confuse de concurrence entre Canal France International, banque de programmes, et TV5, chaîne de diffusion directe, avait été clarifiée. Il a souligné qu'une amélioration de la qualité des programmes de TV5 restait nécessaire. Il a précisé que l'expérience du journal télévisé international produit par France 2 à la demande de TV5 avait été un échec. Il a indiqué que Radio France International économiserait 80 millions de francs en 1999 grâce à l'abandon partiel de ses diffusions en ondes courtes, cette technique de diffusion étant désormais obsolète.

Quatrième observation : le rapporteur spécial a évoqué la situation de l'enseignement français à l'étranger. Il a indiqué que le redéploiement des réseaux des établissements vers les pays d'Europe centrale et orientale et d'Asie du sud-est nécessitait des investissements considérables. Il a considéré que l'augmentation continue des droits d'écolage, qui atteignent 47.000 francs pour le lycée de Singapour, posait un problème pour ceux des parents qui ne sont pas des salariés expatriés de grands groupes. Il a indiqué que ces problèmes trouvaient une solution partielle dans l'augmentation des bourses, pour lesquelles une mesure nouvelle de 20 millions de francs est prévue en 1999. Le rapporteur spécial a indiqué qu'il avait appelé l'attention du ministre sur la situation du lycée de Bangkok qui se trouve dans un état de délabrement tel que la sécurité des enfants n'y est plus assurée. Il a considéré que cette situation était caractéristique de la difficulté du mode de gestion des établissements conventionnés avec l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, qui aboutit à faire décider des décisions d'investissement lourdes par les communautés français locales.

Cinquième observation : le rapporteur spécial a évoqué la politique immobilière du ministère des affaires étrangères. Après avoir rappelé que la France dispose du deuxième réseau d'ambassades dans le monde, qui s'était récemment étendu à la suite des bouleversements intervenus en Europe centrale et orientale, il a estimé que ce réseau ne devait plus nécessiter désormais, sauf exception, que des travaux d'entretien et de maintenance. Il a estimé que la décision de reconstruire, à grands frais, l'ambassade de France à Berlin sur son emplacement historique relevait d'une décision sentimentale plus que rationnelle. Il a souligné la nécessité de maîtriser les coûts de cette opération somptuaire, afin qu'elle reste dans les limites de son enveloppe initiale de 325 millions de francs. Le rapporteur spécial a fait état de la création d'une mission du patrimoine, chargée de la mise en valeur de la quinzaine d'ambassades d'une valeur patrimoniale exceptionnelle. Il a estimé urgent que soit fixée une doctrine officielle pour la mise à disposition des ambassades, dont les locaux sont de plus en plus souvent sollicités par les industriels français à l'étranger. Il a enfin rappelé avoir effectué en début d'année un contrôle sur pièces et sur place de la cellule décoration du ministère, à l'occasion duquel il avait pu constater le caractère dispendieux des pratiques de ce service, qui prenait certaines libertés avec les règles des marchés publics. Il a précisé que la cellule décoration avait été depuis supprimée et que des changements de personnes étaient intervenus à la tête de la direction du service des affaires immobilières.

M. Philippe Marini, rapporteur général, après avoir rappelé que l'effort de diminution des crédits qu'il préconisait ne s'appliquerait pas aux ministères régaliens tel que celui des affaires étrangères, a relevé que 143 suppressions d'emplois étaient prévues pour 1999, et a souhaité savoir s'il existait au ministère des affaires étrangères des marges de manoeuvre pour une réduction supplémentaire des effectifs à l'avenir.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a estimé qu'une marge de manoeuvre existait sur les consulats, dont beaucoup ont déjà été fermés en Europe, mais qu'il n'y aurait guère de sureffectifs dans les services à l'étranger avec la suppression des coopérants du service national (CSN), dont la disparition programmée poserait des difficultés, notamment pour les Alliances françaises.

Mme Marie-Claude Beaudeau a souhaité connaître les raisons de la diminution des contributions internationales obligatoires et l'affectation des contributions internationales volontaires.

M. François Trucy a souhaité connaître la part des différents pays dans les contributions à l'Organisation des nations unies (ONU).

M. Denis Badré, relevant le coût considérable du projet d'ambassade à Berlin, a souhaité connaître le montant des économies qui résulteraient de l'abandon des installations à Bonn. Il a également souhaité savoir si le ministère des affaires étrangères développait une politique de mise en commun de ses moyens à l'étranger avec les autres Etats membres de l'Union européenne.

M. Maurice Blin a souhaité savoir si l'on constatait un assouplissement de la politique d'attribution des visas.

M. Jean-Pierre Demerliat s'est déclaré également inquiet de la disparition des CSN.

En réponse aux intervenants, M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que la diminution de 102 millions de francs des contributions internationales obligatoires résultait de la réduction des opérations de maintien de la paix. Il a indiqué que les 50 millions de francs supplémentaires consacrés aux contributions internationales volontaires seraient principalement destinés au Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

Il a indiqué que le ministère des affaires étrangères avait développé depuis quelques années des projets d'ambassades communes avec d'autres Etats membres de l'Union européenne. Il ainsi cité le projet d'ambassade à Abouja, nouvelle capitale administrative du Nigéria, qui souffre néanmoins du désistement successif des candidats initiaux, la France restant seule engagée avec les pays du Benelux, après la défection récente de l'Allemagne.

Il a précisé que les parts respectives des principaux contributeurs au budget de l'ONU s'élèvent à 25 % pour les Etats-Unis, 15,7 % pour le Japon, 9 % pour l'Allemagne, 6,4 % pour la France et 5,3 % pour le Royaume-Uni. Il a précisé que la question de la modification de la répartition des contributions était liée à celle de la modification de la composition du Conseil permanent. Il a souligné que les Etats-Unis ne paient pas leurs contributions obligatoires, ce qui leur permet de consentir d'importantes contributions volontaires. Il a indiqué que la France se situait à un niveau modeste pour ses contributions volontaires qui la classent, en 1997, au douzième rang pour le programme alimentaire mondial (PAM), au treizième rang pour l'UNICEF, et au quatorzième rang pour le Haut commissariat aux réfugiés (HCR).

Il a enfin indiqué qu'une amélioration sensible du service des visas avait été réalisée en Tunisie ou au Maroc, où une procédure simplifiée a été mise en place pour les catégories de personnes qui ont des liens fréquents avec la France.

La commission a alors adopté les crédits du budget des affaires étrangères pour 1999.

Projet de loi pour 1999 - Budget des services généraux du Premier ministe - vote

La commission a ensuite adopté un amendement de réduction des crédits et l'ensemble des crédits ainsi modifiés inscrits au budget des services généraux du Premier Ministre. Ces votes avaient été précédemment réservés après l'examen du fascicule correspondant, sur le rapport de M. Roland du Luart, rapporteur spécial.

Puis, la commission a entendu une communication de M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial des crédits des affaires étrangères, sur la mission de contrôle sur pièces et sur place qu'il a effectuée du 17 au 26 juin 1998 en Thaïlande, en Malaisie, à Singapour et en Indonésie.

Contrôle Budgétaire - Thaïlande, Malaisie, Singapour et Indonésie (17 au 26 juin 1998

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que la crise économique actuelle présente des traits communs aux quatre pays visités au cours de sa mission. Il a rappelé que ces pays se caractérisaient antérieurement par le rôle essentiel des communautés chinoises dans leur économie, par la liaison entre leurs monnaies et le dollar, ainsi que par de forts taux de croissance favorisés par une grande stabilité politique. Il a aussi rappelé que cet ensemble de conditions avait favorisé un afflux de capitaux, qui n'avaient pas trouvé suffisamment d'investissements rentables sur place, et qui avaient alimenté une bulle spéculative sur le marché immobilier, animée par des réseaux bancaires familiaux contrôlés par la communauté chinoise. Il a rappelé que les premières réactions à la crise, guidées par le Fonds monétaire international (FMI), s'était traduites par la dilapidation de sommes considérables pour la défense de la parité des monnaies asiatiques avec le dollar, qui n'avait toutefois pas suffi à éviter leur dévaluation finale. Il a considéré que les conditions de la reprise économique dans ces pays reposaient sur le retour de la croissance au Japon et sur le maintien de la parité du yuan chinois.

Evoquant la situation en Thaïlande, M. Jacques Chaumont a indiqué que le crédit commercial s'y trouvait complètement tari mais que, grâce aux facilités accordées par la Banque mondiale et à une ouverture nouvelle aux investissements étrangers, les chances de reprise y semblaient plus fortes que dans les autres pays visités. Il a notamment souligné que la base agricole de l'économie restait solide, que les réserves de change avaient été reconstituées au niveau de 24 milliards de dollars, que deux banques et cinq compagnies financières en difficulté avaient été nationalisées, et que les faillites avaient été rendues légalement possibles. Il a indiqué que les groupes industriels français maintenaient leur présence en Thaïlande, et y accroissaient même leurs investissements.

Evoquant la situation en Malaisie, le rapporteur a souligné que la situation politique y est devenue particulièrement délicate à la suite de la destitution du vice-premier ministre et dauphin présumé, qui s'était traduite par des manifestations locales et par des réactions internationales. Il a estimé que ce pays de 20 millions d'habitants, doté d'une communauté chinoise très dynamique, avait moins souffert de la crise que l'Indonésie.

Evoquant la situation en Indonésie, M. Jacques Chaumont a rappelé que la chute de Suharto s'était accompagnée d'émeutes à l'encontre de la communauté chinoise, qui avait quitté le pays avec tous ses avoirs. Il a souligné que le système bancaire ne fonctionnait plus, et que même le réseau de distribution du riz, qui reposait sur les commerçants chinois, avait disparu. Il a indiqué que l'économie de ce pays, antérieurement très dynamique, et le quatrième du monde par sa population, n'avait pas encore fait l'objet des restructurations nécessaires après le départ du pouvoir de Suharto et de sa famille. Il a indiqué que les entreprises françaises présentes en Indonésie se trouvaient avantagées par la crise, dans la mesure où elles travaillaient à l'exportation et cherchaient à réaliser des investissements directs.

Evoquant la situation de Singapour, M. Jacques Chaumont a indiqué que cette cité Etat, relativement épargnée par la crise, avait recueilli les fonds des communautés chinoises des autres pays, et que ses autorités se déclaraient prêtes à participer au sauvetage économique de la région.

M. Jacques Chaumont s'est déclaré confiant dans l'avenir à long terme des quatre pays visités, en raison de leur richesse humaine. Il a estimé nécessaire d'aider les entreprises françaises à maintenir leur présence dans la région, au-delà de la crise.

M. Roland du Luart a relevé que l'analyse du rapporteur était plus critique et pessimiste que celle du directeur général du FMI, M. Michel Camdessus, qui avait estimé, lors de son audition de la veille, la crise désormais maîtrisée en Asie du Sud-Est.

M. Jacques Chaumont a précisé que sa mission était intervenue au mois de juin, et qu'il ne prétendait pas contredire M. Michel Camdessus dans son analyse des derniers développements de la crise. Il a néanmoins souligné l'importance des situations politiques locales, et souligné que le FMI ne pouvait pas se substituer aux gouvernements pour prendre les décisions économiques attendues.

Ensuite, la commission a examiné les crédits de la jeunesse et des sports pour 1999, sur le rapport de M. Michel Sergent, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget de la jeunesse et des sports

M. Michel Sergent a indiqué que les crédits budgétaires de la jeunesse et des sports pour 1999 s'élevaient à 3 milliards de francs, retrouvant ainsi le montant symbolique atteint en 1993. Ce budget progresse donc de 3,4%, alors qu'il avait diminué de 2,1% en 1998. Compte tenu des moyens apportés par les deux comptes spéciaux du Trésor, le Fonds national de développement du sport (FNDS) et le Fonds national de développement de la vie associative (FNDVA), qui seront stables en 1999, les moyens dont disposera le ministère de la Jeunesse et des Sports s'élèveront donc à 4 milliards de francs en projet de loi de finances pour 1999, contre 3,9 milliards de francs en loi de finances initiale pour 1998, soit une progression globale de 2,5 %.

Le rapporteur spécial du budget de la jeunesse et des sports a relevé une majoration des dépenses de personnel, essentiellement en raison de l'extension en année pleine de mesures de transformations d'emplois et de revalorisations des rémunérations, et de mesures d'ajustement comportant l'application de l'accord salarial dans la fonction publique, ainsi qu'une reprise de la progression des crédits de fonctionnement.

Il a observé que les crédits d'intervention, en forte diminution en 1998, principalement en raison de l'impact de la diminution de la charge du financement de la Coupe du Monde, étaient également en augmentation sensible pour 1999.

Il a noté que les dépenses en capital enregistraient une diminution de 6,9 %, à 108 millions de francs, les investissements exécutés par l'Etat progressant, mais les subventions d'équipement diminuant de 13,6 millions de francs.

S'agissant du FNDS, le rapporteur spécial des crédits de la jeunesse et des sports a noté que les crédits dégagés par la fin de la rénovation des stades de province dans le cadre de la Coupe du Monde de Football, pour 91,5 millions de francs, n'étaient pas entièrement réaffectés à des dépenses d'investissement. Il a toutefois fait observer que cette diminution serait entièrement compensée par une augmentation des dépenses de fonctionnement du FNDS, qui portera intégralement sur l'aide au sport de masse.

Concernant le FNDVA, il a rappelé ses observations de l'an passé, à savoir un meilleur affichage de ses priorités, une clarification du dispositif institutionnel, une gestion plus lisible et une stabilisation de ses ressources. Il s'est réjoui de voir ce dossier évoluer puisque la circulaire du Premier ministre en date du 14 septembre 1998, relative au développement de la vie associative, indique que le ministre chargée de la jeunesse et des sports présidera elle-même le conseil de gestion du FNDVA.

M. Michel Sergent a ensuite fait quelques observations.

Il a observé que le budget de la jeunesse et des sports marquait un soutien affirmé à la création de nouveaux emplois.

Le ministère a en effet signé 23 accords-cadres avec de nombreuses fédérations et associations, correspondant à la création attendue de 15.000 "emplois-jeunes", en fin d'année 1998, soit un large dépassement de l'objectif initial. Si ces emplois sont financés sur le budget du ministère de l'emploi et de la solidarité, le ministère devrait toutefois soutenir ce dispositif par des mesures de formation et de professionnalisation, pour un coût total de 26,5 millions de francs.

Pour 1999, le plan "sport-emploi" devrait bénéficier d'une mesure nouvelle de 20 millions de francs pour permettre la création de 300 emplois. M. Michel Sergent a rappelé que l'année passée, il avait souhaité qu'une réflexion s'engage afin d'instaurer une cohérence entre ce dispositif et celui des "emplois-jeunes", dans la mesure où le public et les associations visés par le plan "sport-emploi" pouvaient entrer dans le cadre plus favorable du plan d'emploi des jeunes. Il a relevé qu'en 1998, la mise en application des dispositions "nouvelles activités pour l'emploi des jeunes" avait effectivement conduit le ministère de la jeunesse et des sports à revaloriser le régime d'intervention du plan "sport-emploi" en augmentant la montant et la durée du financement avec effet sur les contrats déjà conclus. Il a donc estimé indispensable de réserver le dispositif "sport-emploi" aux personnes de plus de 26 ans et, au-delà, de réfléchir sur la nécessité de ce dispositif.

M. Michel Sergent a ensuite estimé que le ministère de la jeunesse et des sports menait une politique volontariste pour l'insertion des jeunes.

Il a fait référence aux dispositif "ticket sport" qui devrait permettre à des jeunes de découvrir des activités sportives pendant les vacances scolaires, au dispositif "coupon-sport", délivré par les directions départementales de la jeunesse, qui servira à abaisser les coûts d'adhésion aux clubs sportifs et, sur le même modèle, au "coupon-loisirs" destiné aux jeunes de 14 à 18 ans, sous condition de ressources, qui devrait permettre de leur faciliter l'accès aux activités sportives ou culturelles.

Il a indiqué qu'une nouvelle impulsion avait été donnée à la politique de la jeunesse avec les rencontres nationales de la jeunesse à Marly-le-Roi en novembre 1997. Un conseil permanent de la jeunesse (CPJ) et des conseils départementaux ont été créés par arrêté ministériel début 1998 pour suivre la mise en oeuvre des mesures annoncées et faire de nouvelles propositions.

Par ailleurs, il a évoqué la modernisation du réseau d'information jeunesse et la diffusion d'un guide des droits des jeunes, qui correspond à une décision prise lors des rencontres nationales de la jeunesse.

Il s'est félicité de toutes ces initiatives ayant pour objet de faire connaître à la jeunesse ses droits et de favoriser son intégration dans la société.

M. Michel Sergent a ensuite abordé la réorganisation des rythmes de vie et les contrats locaux.

Il a indiqué que pour 1999, le ministère proposait de fondre l'ensemble des contrats locaux existants en créant des contrats éducatifs locaux (CLES) pour les jeunes jusqu'à 25 ans.

Il a estimé que la fusion de l'ensemble des contrats locaux en un seul dispositif aurait l'avantage de rendre plus lisible la politique de contractualisation du ministère de la jeunesse et des sports avec les collectivités locales et d'optimiser les moyens de l'Etat.

Au sein du CLES, il a mentionné le contrat éducatif local (CEL), défini par l'instruction interministérielle du 9 juillet 1998, et qui concerne l'aménagement des rythmes de vie de l'enfant.

Il a indiqué que les nouveaux contrats devraient permettre d'adapter la participation financière du ministère de la jeunesse et des sports selon les projets et de ne prendre en charge que les temps péri et extra-scolaire. Il a toutefois ajouté que l'implication des autres ministères devait être décisive, et notamment celle du ministère de l'éducation nationale.

M. Michel Sergent s'est ensuite réjoui de la poursuite de la moralisation de la pratique sportive par l'intensification de la lutte contre le dopage

Au total, 14,5 millions de francs supplémentaires seront consacrés à cet objectif, soit une augmentation des crédits de 58%.

Il a évoqué le vote, en première lecture, au Sénat, du projet de loi sur la santé des sportifs et la lutte contre le dopage et son prochain examen à l'Assemblée nationale.

Il a noté que, contrairement à 1998, les moyens du laboratoire national de lutte contre le dopage n'étaient pas relevés en 1999. Il a rappelé qu'il avait mené une mission de contrôle sur les crédits de ce laboratoire, et qu'il en avait conclu que l'agrandissement du laboratoire ne devait remédier que partiellement au problème de l'exiguïté des locaux. Il a souhaité que l'effort en matière de lutte contre le dopage puisse se prolonger dans les années à venir.

M. Michel Sergent a ensuite dressé un bref bilan de la coupe du monde de football.

Il a indiqué qu'au total, l'organisation de la Coupe du monde de football aura coûté 9,4 milliards de francs dont 5,4 milliards de francs de financements publics, 3,1 milliards de francs étant à la charge de l'Etat. Il a ajouté que les dépenses d'investissement associées à cette organisation avaient permis de rénover le patrimoine sportif de la France.

Cependant, il a indiqué que l'Etat devra encore assumer un coût budgétaire en 1999 provenant de l'absence de club résident au Stade de France. En effet, en application du contrat de concession conclu le 29 avril 1995 entre l'Etat et la société Consortium Stade de France, le concédant garantit la présence au Stade de France d'un ou plusieurs clubs résidents de football et le montant de l'indemnité compensatrice de préjudice est égal à 50 millions de francs jusqu'en 2000 et 68 millions de francs les années suivantes. La loi de finances pour 1998 prévoyait 25 millions de francs pour faire face aux premiers versements, le projet de budget pour 1999 inscrit 52 millions de francs supplémentaires.

Le rapporteur du budget de la jeunesse et des sports a estimé qu'il était urgent de trouver une solution afin que l'Etat n'ait pas à prendre en charge le coût du fonctionnement de l'ouvrage pour les années à venir.

En conclusion, M. Michel Sergent a estimé les moyens accordés à la jeunesse et aux sports pour 1999 globalement satisfaisants, puisqu'ils atteindront, au total, 4 milliards de francs. Il a déclaré que ce budget témoignait d'une volonté de faire du ministère de la jeunesse et des sports un instrument d'action au service de la jeunesse mais aussi le fer de lance de la moralisation du sport, et de la promotion du sport pour tous.

Il a toutefois regretté que l'effort d'investissement réalisé à l'occasion de l'organisation de la Coupe du monde de football ne soit pas complètement poursuivi en 1999, tant le patrimoine sportif nécessite des efforts importants d'entretien et de rénovation. Il a cité à ce titre une étude menée en 1997 par le centre national de la fonction publique territoriale estimant que la seule mise à niveau sur le plan de la sécurité des équipements sportifs, hors modernisation, coûterait 40 milliards de francs.

M. Michel Sergent a conclu sa présentation en demandant l'adoption du budget de la jeunesse et des sports.

En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, il a indiqué que la liquidation du Comité français d'organisation (CFO) devrait permettre de trouver des moyens financiers qui compenseront la charge de l'indemnité compensatrice pour l'absence de club résident du Stade de France. En matière d'aménagement des rythmes de vie, il a confirmé que les nouveaux contrats permettraient d'adapter la participation financière du ministère de la jeunesse et des sports, mais il a ajouté qu'il était nécessaire de vaincre certaines réticences du ministère de l'éducation nationale.

En réponse à M. René Ballayer, il a déclaré que le plan sport-emploi devrait être réservé aux personnes de plus de 26 ans, dans la mesure où les "emplois-jeunes", plus intéressants financièrement, étaient spécialement conçus pour les moins de 26 ans.

M. Michel Sergent a ensuite approuvé les déclarations de M. Jean-Pierre Demerliat, concernant la nécessité de lutte de manière très ferme contre le dopage, ajoutant que ce problème ne se posait pas uniquement pour les sportifs professionnels mais aussi pour les sportifs amateurs. Il a regretté qu'aucune solution ne se dessine pour l'avenir du Stade de France, depuis le choix du Paris-Saint-Germain de rester au Parc des Princes et l'échec de l'implantation du Red Star.

En réponse à M. François Trucy, il s'est déclaré très favorable à ce que le Stade de France accueille dans l'avenir des jeux olympiques.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, il a confirmé que des dépenses nouvelles étaient prévues pour la formation sur le titre III du budget de la jeunesse et des sports, pour un montant d'environ 10 millions de francs.

En réponse à M. Michel Charasse, le rapporteur spécial des crédits de la jeunesse et des sports a déclaré qu'il envisageait de réaliser, avec le rapporteur spécial des comptes spéciaux du Trésor, une évaluation de la gestion du Fonds national de développement du sport, ce type de contrôle faisant pleinement partie de la mission assignée aux rapporteurs spéciaux des commissions des finances du Parlement.

Puis, sur proposition de M. Philippe Marini, rapporteur général, et après les observations de M. Michel Charasse, la commission a adopté deux amendements de réduction des crédits portant sur les titres III et IV du budget de la jeunesse et des sports. Elle a ensuite adopté le budget de la jeunesse et des sports ainsi amendé.

Enfin, la commission a examiné les crédits de l'économie, des finances et de l'industrie : III-. Industrie pour 1999, sur le rapport de M. Jean Clouet, rapporteur spécial.

Projet de loi de finances pour 1999 - Budget de l'industrie

M. Jean Clouet a tout d'abord salué la mémoire de M. Bernard Barbier, ancien rapporteur spécial des crédits de l'industrie. Les membres de la commission se sont associés à cet hommage.

Après avoir évoqué la légère progression des crédits de l'industrie, qui s'élèvent à 15.282 millions de francs à périmètre constant (soit une hausse de 1,56 %), M. Jean Clouet s'est appuyé sur deux arguments pour estimer que le budget de l'industrie n'était pas la transcription d'une ambition industrielle pour la France : d'une part, il a estimé que le budget de l'industrie était le réceptacle de crédits divers (subventions à des organismes publics, participation du ministère de l'industrie à des actions interministérielles...), qui ne montrent pas de réelle cohérence entre eux ; d'autre part, il a rappelé que les crédits du budget de l'industrie représentaient désormais moins de 1 % du budget de l'Etat.

Puis, indiquant que la plus grande partie des crédits de personnel, de fonctionnement, d'informatique et d'équipements administratifs de la section " industrie " avaient été transférés vers la nouvelle section " services communs et finances " du budget de l'économie, des finances et de l'industrie, il s'est élevé contre cette " dilution " du ministère de l'industrie au sein du ministère de l'économie et des finances.

Observant par ailleurs que le budget de l'industrie intégrait désormais les crédits du Fonds de soutien aux hydrocarbures (FSH), qui faisaient auparavant l'objet d'un compte d'affectation spéciale, M. Jean Clouet a estimé que les modifications incessantes du périmètre du budget de l'industrie rendaient les comparaisons extrêmement ardues d'une année sur l'autre. Il a rappelé à cet égard que le budget de l'industrie pour 1998 avait vu le rattachement des crédits de La Poste et des Télécommunications et la rebudgétisation des crédits affectés au Fonds d'industrialisation des bassins miniers (FIBM) et des crédits recherche du CEA.

Enfin, après avoir relevé la grande différence qui existait entre le montant des crédits votés, le montant des crédits disponibles et le montant des crédits finalement consommés, M. Jean Clouet a considéré que le budget de l'industrie se distinguait par son caractère peu fiable, ce qui rendait symbolique l'autorisation du Parlement. Il a ainsi expliqué que la différence entre le montant des crédits votés et le montant des crédits disponibles s'expliquait par les nombreux reports, transferts et rattachements de fonds de concours qui intervenaient en cours d'exécution. Il a évoqué à cet égard les décrets d'avance ayant servi dans le passé à financer les primes automobiles et le transfert traditionnel de la subvention militaire du CEA en provenance du budget de la défense.

La différence entre le montant des crédits disponibles et le montant des crédits finalement consommés est, quant à elle, imputable au faible taux de consommation des crédits de certains chapitres budgétaires. Il a ainsi relevé qu'en 1997, les crédits de paiement du chapitre 62-01 (Reconversion des zones minières et Fonds d'industrialisation de la Lorraine) n'avaient été consommés que pour 44,7 % de leur montant, tandis que ceux du chapitre 64-96 (Reconversion et restructurations industrielles) ne l'avaient été qu'à hauteur de 52 %. Il a précisé que ces chapitres faisaient d'ailleurs traditionnellement l'objet d'arrêtés d'annulations en cours d'année, puis de reports en fin d'année.

Dans ces conditions, M. Jean Clouet a estimé que les deux amendements de réduction forfaitaire des crédits portant sur les titres III et IV du budget de l'industrie, pour des montants respectifs de 48.320.364 et 89.576.840 francs, qu'il présentait ne porteraient pas à conséquence.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a alors souhaité que le rapporteur spécial des crédits de l'industrie s'enquière auprès du Secrétariat d'Etat à l'industrie sur l'évolution de la question des dividendes versés par CEA-Industrie à sa maison mère, le CEA. Il a rappelé à cet égard que les dividendes versés par CEA-Industrie excédaient autrefois son résultat disponible, au point de peser sur ses fonds propres.

M. François Trucy a souhaité que soient approfondies dans le rapport sur les crédits de l'industrie, les conséquences potentielles pour le secteur nucléaire français, de l'accord signé entre les sociaux-démocrates et les verts allemands d'inscrire dans la loi la fermeture des 19 centrales nucléaires allemandes.

La commission a alors adopté les deux amendements de réduction forfaitaire des crédits présentés par M. Jean Clouet, rapporteur spécial, puis l'ensemble des crédits du budget de l'industrie, ainsi modifiés, inscrits dans leprojet deloi de finances pour 1999.