Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Alain Lambert, président.

Audition de M. François Roussely, président d'Electricité de France (EDF)

La commission a procédé à l'audition de M. François Roussely, président d'Electricité de France (EDF).

M. François Roussely a constaté que la période actuelle était particulièrement "vivante" pour le secteur de l'énergie électrique, qui connaît des transformations importantes se traduisant notamment, en termes législatifs, par le projet de loi, en cours d'examen, transposant en droit français certaines dispositions d'une directive européenne.

Il a estimé que ce texte marquait la fin d'une époque commencée en 1946, où EDF avait été un peu considérée comme le " ministère de l'énergie ", et ouvrait une nouvelle période, où EDF devra être considérée comme une entreprise industrielle jouant pleinement son rôle dans un environnement concurrentiel.

Le président d'EDF a considéré que le projet de loi, et la directive dont il assure la transposition, tiraient les conséquences des évolutions du mode de fonctionnement des entreprises du secteur du marché de l'énergie, marqué par la stagnation de la demande d'électricité, la baisse du prix des matières premières et par des innovations technologiques, ainsi que par l'attente des clients d'une offre plus globale. A cet égard, il a relevé que certaines entreprises clientes d'EDF en France étaient également présentes dans d'autres pays européens, et souhaiteraient qu'EDF soit en mesure d'assurer l'approvisionnement en électricité de l'ensemble de leurs implantations.

Evoquant les point forts de l'entreprise EDF, M. François Roussely a mis en avant la légitimité de son action de service public, reconnue depuis cinquante ans. Il a insisté sur la forte position concurrentielle de l'entreprise, dont 16 % de la production est exportée, contribuant ainsi (à hauteur de 15 milliards de francs) à l'excédent de la balance commerciale de la France.

Le président d'EDF a également souligné que son entreprise était en mesure de pratiquer les prix parmi les plus bas en Europe, en raison du programme nucléaire, en voie d'achèvement aujourd'hui. Il a signalé que la France était le seul pays du monde à posséder cinquante-huit tranches de même nature.

Il a ajouté que le programme nucléaire avait été financé par un accroissement de 10 % des tarifs entre 1973 et 1986 mais que, depuis lors, les prix avaient diminué de 20 %. A ce sujet, il a précisé que la récente baisse de 30 % des tarifs de l'électricité en Allemagne s'expliquait par leur niveau de départ élevé, supérieur de deux fois, parfois, aux prix français. Il a ajouté que l'ouverture à la concurrence du marché français est jugée peu intéressante pour les entreprises étrangères en raison précisément du niveau peu élevé des tarifs français. A l'inverse, il a signalé que certains observateurs ont pronostiqué la réduction de 900 à 100 du nombre de producteurs d'électricité en Allemagne, au terme d'une probable "guerre des prix".

M. François Roussely a précisé que l'Etat n'avait pas versé de subvention à son entreprise depuis quinze ans, que son capital était rémunéré à hauteur de 4 % et que 60 % du bénéfice après impôt était reversé à l'Etat actionnaire. Il a fait valoir que son entreprise menait une politique de désendettement et que ses tarifs auront baissé de 14 % au terme de la période s'étalant de 1997 à 1999. Il a indiqué que les comptes de l'année 1998 seraient meilleurs que prévu.

Abordant les faiblesses de son entreprise, M. François Roussely a fait état de l'existence de surcapacités en Europe, qui sont potentiellement source de déstabilisation des marchés qui se constituent actuellement. Il a ajouté qu'EDF était une entreprise industrielle encore trop tournée vers l'amont, la production, et pas assez vers l'aval, les marchés et les clients. Il a concédé que l'évolution serait difficile car amorcée avec retard, en raison du refus des différents gouvernements, depuis dix ans, de se résoudre à l'ouverture à la concurrence. Il a illustré son propos en indiquant qu'EDF consacrait 7 % de ses investissements à ses activités hors énergie, contre 31 % pour Electrabel et 55 % pour Scottish Power.

M. François Roussely a mis en avant deux axes pour le développement de son entreprise. Le premier consiste en un élargissement du principe de spécialité auquel est soumise EDF du fait de son statut d'établissement public. Cet élargissement fait l'objet du projet de loi actuellement examiné au Parlement.

Il a estimé que, compte tenu de la stagnation du niveau de la demande, depuis le début des années 90, l'activité d'une entreprise de près de 200 milliards de francs de chiffre d'affaires ne pouvait pas reposer que sur la vente d'électricité. Il a signalé que les industriels mettaient au point des dispositifs de plus en plus économes en énergie. En conséquence, il a jugé nécessaire de ne pas limiter l'activité de son entreprise à la seule production d'électricité et de l'étendre à l'ensemble du secteur de l'énergie. Il a considéré qu'EDF devrait être en mesure d'assurer l'entretien des systèmes électriques des entreprises fortement consommatrices.

M. François Roussely a prôné une plus forte implication d'EDF dans la production d'énergie à partir du gaz. Il a souligné que ses concurrents répartissaient leurs activités entre le gaz et l'électricité. Il s'est déclaré favorable à un rapprochement avec Gaz de France, en raison des liens qui unissent les deux entreprises, mais n'a pas exclu d'autres types de partenariats.

En tout état de cause, le président d'EDF a érigé en règle absolue l'interdiction de subventions croisées entre les activités de service public de son entreprise et ses activités concurrentielles.

Le deuxième axe pour le développement d'EDF mis en avant par M. François Roussely est l'élargissement de son champ d'action géographique. Le président d'EDF a rappelé que, avant même l'entrée en vigueur de la directive, son entreprise était déjà présente dans vingt-six pays et qu'il fallait ajouter quinze millions de clients étrangers aux trente millions de clients français d'EDF.

Il a estimé que le développement d'EDF à l'étranger, et notamment dans l'Union européenne, allait entraîner la nécessité de bâtir une politique de groupe sur le plan social et sur le plan commercial.

S'agissant de la production d'électricité, M. François Roussely a rappelé que le nucléaire restait une priorité, mais n'a pas exclu une diversification. En matière d'énergie nucléaire, qui constitue 80 % de la production, il a déclaré que la France avait le temps de prendre les décisions appropriées, puisque la plus vieille centrale en activité datait d'une vingtaine d'années, pour une durée de vie d'environ quarante ans.

Le président d'EDF a insisté sur le fait que la France était le premier pays européen en matière d'énergie renouvelable. Il a souligné que l'énergie hydroélectrique représentait 15 % de la production totale d'électricité en France, contre 6 % au Danemark et en Allemagne.

M. François Roussely a mis en évidence deux conditions pour la réussite de son entreprise dans le contexte concurrentiel. En premier lieu, il a cité la nécessité d'accroître la transparence et la régulation. Il a estimé que dans un pays où le parc nucléaire était aussi important qu'en France, l'adhésion de la population à la politique suivie était nécessaire et que, pour la recueillir, il était important de mieux montrer au public le fonctionnement des installations et les conditions de sécurité qu'elles présentent.

Le président d'EDF a jugé que la création d'une commission de régulation était l'occasion pour l'administration de passer d'une culture de tutelle à une culture de régulation fondée sur la médiation.

En second lieu, M. François Roussely a estimé que l'émergence d'une dynamique sociale était également nécessaire à la réussite de l'entreprise. Il a affirmé que l'accord sur la réduction du temps de travail intervenu récemment n'était en aucune manière subventionné, et qu'EDF ne bénéficierait pas des aides publiques prévues par la " première loi " de réduction du temps de travail. Il s'est déclaré prêt à accepter les aides structurelles qui devraient être prévues par la " loi-balai ", dans l'hypothèse où son entreprise répondrait aux critères. Il a toutefois assuré que ces aides n'étaient pas nécessaires à l'équilibre de l'accord.

Le président d'EDF a alors détaillé le contenu de cet accord, expliquant qu'il se traduirait par une diminution de 700 millions de francs de la masse salariale, une réduction de 3 % du volume d'heures travaillées et la création de 1.000 emplois par an. Il a déclaré que l'avantage principal de l'accord était le départ de 15.000 agents âgés et leur remplacement par 18.000 jeunes, âgés de vingt à trente ans, qui permettront de faire évoluer les mentalités dans l'entreprise.

M. François Roussely a conclu son propos en souhaitant que la future loi ouvre le champ des possibles et qu'il permette à EDF d'affirmer son identité d'établissement industriel international profitable.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Jacques Oudin a tout d'abord estimé que la compétitivité d'EDF résultait de la stratégie suivie depuis vingt-cinq ans. Il a rappelé que la France était le premier pays du monde en matière d'énergie nucléaire et a considéré qu'il fallait dès aujourd'hui réfléchir à la stratégie la meilleure pour conserver cet atout essentiel.

Il a salué les performances d'EDF en matière de recherche, puis a constaté que l'entreprise ne négligeait pas la protection de l'environnement puisque ni le parc hydroélectrique, ni les centrales nucléaires n'émettent de gaz à effet de serre. Il a toutefois encouragé EDF à améliorer sa gestion des déchets et sa politique d'enfouissement des lignes. Enfin, M. Jacques Oudin s'est interrogé sur la manière dont EDF parvenait à développer sa mission de service public dans le respect d'une concurrence loyale avec les entreprises privées.

M. Michel Sergent s'est demandé si l'ouverture à la concurrence ne risquait pas, d'une part, de remettre en cause les mécanismes de péréquation tarifaire entre les usagers et les clients éligibles et, d'autre part, de conduire à une révision des cahiers des charges auxquels EDF est soumise en tant qu'entreprise concessionnaire. Evoquant la diversification des activités d'EDF, M. Michel Sergent s'est interrogé sur l'avenir de sa filiale dans le secteur du câble, Videopole.

M. Jacques Baudot s'est demandé si EDF serait capable de continuer à dégager un bénéfice de l'ordre de 7 milliards de francs dans un contexte d'ouverture à la concurrence, de stagnation de la demande et de mise en oeuvre des dispositions de la loi sur la réduction de la durée du travail.

Mme Marie-Claude Beaudeau a estimé que l'ouverture à la concurrence, comme la transformation de la Compagnie nationale du Rhône, étaient contraires aux intérêts des particuliers. Elle s'est demandé si l'ouverture à la concurrence n'était pas un prétexte pour contraindre EDF à s'effacer devant des producteurs privés plus chers.

Mme Marie-Claude Beaudeau a souhaité que le président d'EDF précise les modalités selon lesquelles EDF était contrainte d'acheter la production des entreprises de cogénération. Elle s'est également interrogée sur le caractère suffisant du dispositif de maintien de fourniture d'énergie proposé par EDF aux personnes en difficulté financière.

M. François Trucy s'est interrogé sur la nature des services qu'EDF était susceptible d'exporter. Il a souhaité savoir quel sort l'ouverture à la concurrence allait réserver aux 2.800 communes, rassemblant 3,8 millions d'habitants, qui organisent elles-mêmes leur distribution d'électricité.

M. Jean-Pierre Demerliat a demandé au président d'EDF comment les pays du nord de l'Europe ayant choisi d'abandonner l'énergie nucléaire allaient procéder à leur approvisionnement en énergie.

M. Yann Gaillard a déclaré que, du fait de l'ouverture à la concurrence, l'éventualité qu'EDF ne s'éloigne de ses anciens partenaires, notamment les communes concédantes propriétaires des lignes à basse tension, suscitait des craintes. Il a également souhaité qu'EDF participe à leur effort d'enfouissement des lignes.

M. Jacques Pelletier a souhaité savoir quelle proportion du chiffre d'affaires d'EDF était réalisée à l'étranger, en distinguant l'Union européenne du reste du monde. Il a souhaité savoir si EDF mettait en oeuvre des partenariats avec les pays en développement, notamment en Afrique, et si elle faisait profiter les centrales nucléaires des pays de l'Est de son expertise.

M. André Vallet s'est demandé si la décision d'EDF de ne pas limiter son activité à la vente d'énergie n'allait pas susciter des protestations de la part des petites et moyennes entreprises qui assurent les installations électriques, et qui pourraient craindre l'intervention d'EDF dans ce domaine.

M. René Trégouët a demandé si EDF explorait la voie des nouvelles technologies, et notamment la possibilité de transmettre des signaux par les câbles électriques.

M. Philippe Adnot a demandé des précisions sur une opération originale menée par EDF en Chine.

M. Maurice Blin a demandé s'il était exact que le texte du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale prévoyait que l'ensemble des concurrents d'EDF devrait automatiquement présenter la même réglementation sociale que l'entreprise publique. Il a souhaité savoir si les réductions tarifaires pratiquées par EDF depuis plusieurs années étaient destinées à dissuader ses concurrents d'essayer de contester sa prééminence sur le marché français.

En réponse à M. Jacques Oudin, M. François Roussely a indiqué que la mission d'EDF était de distribuer de l'énergie, mais pas seulement de l'énergie nucléaire. Il a cependant estimé qu'il fallait maintenir l'option nucléaire ouverte en prenant, au cours des dix-huit prochains mois, la décision de construire une tête de série pour les centrales à renouveler à partir de 2020. Il a ajouté que la poursuite d'un programme nucléaire de qualité était impensable sans une industrie électro-nucléaire conséquente. A ce titre, il a préconisé des rapprochements entre Siemens, Framatome, BNFL et la Cogema. Il a ajouté qu'une action européenne en ce domaine était nécessaire pour éviter un isolement de la France.

Il a souligné que la France avait l'avantage de disposer d'installations standardisées, à la différence des Etats-Unis où aucune centrale n'est identique aux autres. Il a indiqué que des équipes d'EDF étaient présentes à Tchernobyl, où elles travaillent dans des conditions très difficiles. Il a estimé que la coopération avec les pays de l'Est était nécessaire, car un nouvel incident ôterait tout crédit sur le discours sur la sécurité des installations nucléaires en France.

Abordant la question de la protection de l'environnement, M. François Roussely s'est demandé comment, en arrêtant son programme nucléaire au profit du développement du charbon, l'Allemagne allait parvenir à respecter les engagements pris à Kyoto par les pays industrialisés en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

S'agissant des déchets, le président d'EDF a tenu à rappeler que sur 150 millions de tonnes de déchets industriels produites par an, seulement un kilogramme par habitant, dont 100 grammes de déchets à vie longue, correspondait à des déchets nucléaires.

M. François Roussely a compris les inquiétudes relatives à l'enfouissement des lignes, à la lumière de l'expérience de France Télécom qui a délaissé cet objectif après l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications. Il a précisé qu'EDF y consacrait déjà 1,5 milliard de francs par an, soit trois fois le budget d'investissement du ministère de l'intérieur. Il a estimé que cet effort était important, compte tenu du fait qu'une ligne à haute tension enfouie coûte dix fois plus cher qu'une ligne classique, et une ligne à moyenne tension cinq fois plus cher. Il a précisé qu'en matière d'enfouissement, EDF n'était que l'opérateur et qu'il appartenait aux collectivités locales de déterminer les priorités géographiques.

A M. Michel Sergent, M. François Roussely a répondu que la péréquation tarifaire était le fondement d'EDF en tant qu'entreprise nationale. Mais il a relevé qu'il avait toujours existé des tarifs différents pour les clients industriels et les particuliers.

Il a réaffirmé que, à la différence de France Télécom, EDF n'allait jamais délaisser son action d'enfouissement des lignes. Il a ajouté qu'EDF avait vendu, au mois de janvier 1999, sa filiale Vidéopole.

En réponse à M. Jacques Baudot, il s'est déclaré incapable de formuler un pronostic sur l'évolution des bénéfices dans les années à venir. Il a cependant constaté que le résultat de 1998 serait profitable. Il a ajouté que la concurrence était une réalité pour son entreprise bien avant l'entrée en vigueur de la directive et que les clients perdus en raison de la libéralisation devraient être compensés par des gains de parts de marché à l'étranger.

A Mme Marie-Claude Beaudeau, le président d'EDF a rappelé que, juridiquement, la Compagnie nationale du Rhône était indépendante et qu'EDF ne souhaitait pas subventionner ses concurrents. Il a estimé que la réalité de la concurrence n'avait rien à voir avec le régime de propriété des entreprises. Il a considéré que ce qui était important n'était pas qu'EDF ait le plus de parts de clients possible, mais qu'elle parvienne à offrir des prestations d'aussi bonne qualité, voire meilleures, que celles de ses concurrents privés.

Evoquant la cogénération, il lui a semblé juste qu'EDF encourage des technologies émergentes. Il a toutefois relevé que ces installations de cogénération étaient aujourd'hui souvent profitables et n'a pas souhaité continuer à subventionner des concurrents. Il a précisé que son propos ne concernait pas les petits cogénérateurs et les réseaux de chauffage urbain. Il a rappelé que l'obligation d'achat coûtait 4 milliards de francs par an à EDF.

S'agissant du dispositif de maintien d'énergie aux familles en difficulté, il a indiqué qu'il consistait en un forfait de 3 kilowatts, et qu'il appartenait aux bénéficiaires de s'organiser pour maintenir le niveau de leur consommation dans cette limite. Il a ajouté qu'EDF disposait d'un médiateur, dont le rôle était de trouver des solutions en cas de difficultés financières des usagers.

A M. François Trucy, M. François Roussely a indiqué qu'EDF réalisait 60 % de ses investissements à l'étranger en Europe, et 30 % en Amérique latine, principalement en Argentine et au Brésil. Il a fait valoir que, dans ces deux pays, EDF et ses partenaires locaux desservaient des quartiers très défavorisés et parvenaient à concilier des investissements profitables avec une logique de service public.

S'agissant des services qu'EDF est susceptible d'exporter, M. François Roussely a considéré que son entreprise devait être capable de répondre aux demandes globales d'électricité des grands industriels. Il a précisé, répondant ainsi à M. André Vallet, que cette orientation ne modifiait en rien ses relations avec les électriciens réalisant les installations chez les particuliers. Il a signalé que ces derniers bénéficiaient largement du fruit des recherches menées au sein de l'entreprise EDF pour le développement des usages de l'électricité.

S'agissant des régies municipales, M. François Roussely a observé que le mouvement à la baisse des prix contribuait à un " pincement " de leurs marges. Il a déclaré que certaines d'entre elles n'avaient pas la taille critique à l'heure de la mondialisation et qu'il était indéniable que des changements allaient intervenir.

En réponse à M. Jean-Pierre Demerliat, le président d'EDF a indiqué que, contrairement aux idées reçues, les pays scandinaves, et notamment la Suède, n'avaient pas abandonné la production d'énergie nucléaire. Il a émis des réserves quant au système de commercialisation de droits à polluer instauré lors de la conférence de Kyoto. Il a également rappelé le clivage existant entre les pays industrialisés, soucieux de réduire les émissions de gaz à effet de serre, et les pays en développement qui souhaitent développer la production d'énergie à partir du charbon.

A M. Jacques Pelletier, M. François Roussely a répondu qu'EDF ne réalisait en Europe qu'un tiers de son chiffre d'affaires à l'étranger, mais que cette proportion était appelée à croître en raison des investissements réalisés récemment, en Grande-Bretagne notamment. Il a indiqué qu'EDF, par l'intermédiaire de sa filiale commune avec le groupe Bouygues, était présente dans les pays d'Afrique francophone. Par ailleurs, il a signalé que le groupe E7, rassemblant les plus grandes entreprises mondiales de production d'électricité, subventionnait des projets innovants dans les pays en développement. Il a cité l'exemple de l'exploitation d'énergies renouvelables au Zimbabwe. Il a confirmé qu'EDF était très présente dans les pays de l'Est mais que, faute d'une augmentation de l'aide publique multilatérale, des centrales nucléaires vétustes continueraient d'y fonctionner.

En réponse à M. René Trégouët, M. François Roussely a indiqué que les scientifiques étaient partagés quant à la possibilité d'utiliser les lignes électriques pour le réseau Internet.

Le président d'EDF a précisé à M. Philippe Adnot que, pour la première fois, EDF allait construire une centrale thermique classique en Chine et l'exploiter pendant quinze ans. Il a considéré que cette expérience pourrait être renouvelée car la Chine dispose d'importantes réserves de charbon. Il a fait valoir qu'il était important d'investir dans des techniques de production d'énergie non polluantes à partir de charbon, car les pays en développement étaient plus susceptibles de recourir à l'énergie thermique qu'à l'énergie nucléaire.

M. François Roussely a expliqué à M. Maurice Blin que l'application du statut d'EDF à l'ensemble des producteurs d'énergie existait depuis 1946 et que le projet de loi actuellement soumis à l'examen du Parlement ne présentait pas de nouvelles exigences. Il a en revanche insisté sur la nécessité de mettre en place une politique sociale européenne et d'évoluer progressivement vers une convention collective de branche.

Résolutions européennes - Nouvelles perspectives financières pour la période 2000-2006 (E.1049) et accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire (E.1128) - Examen des amendements

Puis la commission a procédé à l'examen des amendements à la proposition de résolution de la commission des finances présentée sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l'établissement des nouvelles perspectives financières pour la période 2000-2006, et sur le document de travail de la Commission concernant un accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire.

M. Denis Badré, rapporteur, a précisé que la commission était saisie de neuf amendements, dont aucun n'était d'initiative gouvernementale. Il a insisté sur le fait que ces amendements traduisaient une certaine convergence d'idées autour de l'importance de la construction européenne mais également autour de l'exigence d'une meilleure adaptation aux contraintes du moment. Il s'est félicité que ces amendements expriment tous le souhait d'un renforcement de l'efficacité de l'intervention européenne et d'une plus grande capacité à préparer l'avenir, à savoir l'élargissement géographique de l'Union qui sera accompagné d'une extension de ses compétences.

Il a précisé que, pour la plupart des amendements présentés, il suggérerait des avis défavorables, cette position n'étant toutefois pas motivée par leur opposition radicale à l'idée européenne mais par des nuances d'appréciation qui, sans être entièrement marginales, relèvent plutôt de subtilités intrinsèques à la construction européenne. Il a également indiqué qu'il proposerait des rectifications tenant compte des suggestions contenues dans les amendements qui lui ont paru pertinentes, afin de les insérer dans la proposition de résolution de la commission.

Il a enfin expliqué que la rigueur budgétaire transparaissant du texte qu'il a initialement présenté était justifiée par son adhésion à la construction européenne, le laxisme budgétaire imputable à l'Europe ne pouvant que nuire à l'idée européenne elle-même.

Mme Marie-Claude Beaudeau a souligné que le déroulement des négociations européennes en cours mettait en évidence les problèmes sous-jacents au fonctionnement de l'Union européenne. Ainsi, l'élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale conduira-t-il à accroître le montant du budget communautaire. La réforme de la politique agricole commune (PAC), actuellement en cours, tend à rapprocher les prix européens des prix du marché mondial, ce qui devrait avoir, selon elle, des conséquences néfastes sur le revenu des agriculteurs. Enfin, elle a souligné l'insuffisance des procédés de contrôle démocratique du budget communautaire, et a estimé que l'amendement présenté par le groupe communiste républicain et citoyen contenait un certain nombre de propositions tendant à orienter la construction européenne.

La commission a ensuite examiné les amendements.

Elle a estimé satisfait l'amendement n° 1 présenté par Mme Marie-Claude Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposant une nouvelle rédaction de la proposition de résolution.

M. Bernard Angels, présentant l'amendement n° 2, a estimé qu'il était nécessaire de réaffirmer les principes de la construction européenne, et a jugé que la rédaction proposée par le rapporteur pouvait apparaître sur certains points trop restrictive, ajoutant qu'il ne lui semblait pas judicieux de recourir trop fréquemment au principe de subsidiarité.

M. Denis Badré, rapporteur, a affirmé la nécessité d'adopter une conception " intelligente " du principe de subsidiarité, citant, par exemple, la politique de la recherche qui ne saurait être financée à la fois au niveau national et au niveau communautaire.

Après ces interventions, la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 2 qui supprime la mention dans le texte de la proposition de résolution des articles ou parties d'articles du Traité renvoyant au principe de subsidiarité.

Puis, la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 3, présenté par M. Bernard Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés, qui a pour objet, selon ses auteurs, de mieux expliciter le lien entre les perspectives financières sur la période 2000-2006 et les objectifs assignés à l'Union européenne. Elle a également donné un avis défavorable à l'amendement n° 4 présenté par les mêmes auteurs.

M. Bernard Angels, après avoir présenté l'amendement n° 5 qui tend à approuver la proposition du Gouvernement français d'une stabilisation des dépenses en volume du budget communautaire, a estimé qu'il trouvait son origine dans la conférence de presse commune du Président de la République et du Premier ministre du 26 février dernier. M. Jean-Philippe Lachenaud a estimé que cet amendement était intéressant à condition que l'existence de la déclaration concernée puisse être confirmée. M. Denis Badré, rapporteur, a estimé que l'adoption de cet amendement risquait de mettre en exergue l'incohérence entre la proposition qui est ainsi faite et l'acceptation par le Gouvernement du maintien du plafond des ressources propres à 1,27 % du PIB, ajoutant qu'il aurait été logique d'en réclamer l'abaissement.

M. Jean-Philippe Lachenaud n'a pas partagé cette analyse, considérant que l'adjonction de cet amendement après le vingtième alinéa de la proposition de résolution de la commission constituait un enchaînement logique et non une incohérence. Après que M. Denis Badré, rapporteur, se fut rallié à cet argument, la commission a adopté l'amendement n° 5 ainsi rectifié.

La commission, après une intervention de M. Bernard Angels, a donné un avis défavorable à l'amendement n° 6, présenté par les membres du groupe socialiste et apparentés, sa rédaction lui apparaissant peu satisfaisante. Elle a également donné un avis défavorable à l'amendement n° 7, présenté par M. Bernard Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés, qui vise à ne retenir du vingt-deuxième alinéa que ce qui touche à la PAC et donc à exclure de la proposition de résolution la mention des autres rubriques du budget européen, ces dernières concernant pourtant la majorité des dépenses.

A propos de l'amendement n° 8, présenté par M. Bernard Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés, tendant à supprimer la mention du respect du principe de subsidiarité et du réalisme budgétaire dans le cadre de la programmation des actions structurelles, M. Denis Badré, rapporteur, a estimé qu'il était indispensable de rappeler de telles exigences et de faire référence à l'enveloppe d'Edimbourg. Il s'est en revanche montré favorable à la reprise de la partie de l'amendement relative aux réseaux transeuropéens, et en a proposé une nouvelle rédaction. La commission a alors adopté cet amendement ainsi rectifié.

M. Denis Badré, rapporteur, a suggéré une nouvelle rédaction de l'amendement n° 9 présenté par M. Bernard Angels et les membres du groupe socialiste et apparentés tendant à insérer un alinéa demandant la disparition progressive de la ressource engendrée par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au profit de la ressource fondée sur le produit national brut (PNB), considérant que le texte de l'amendement laisse supposer -à tort- que l'aspect le plus critiquable du système actuel est son éloignement du principe d'équité contributive entre Etats-membres, la principale entorse à ce principe provenant de la correction accordée au Royaume-Uni en 1984. La commission a adopté cet amendement ainsi rectifié.

Puis, la commission a adopté la résolution, tenant compte des modifications apportées par les amendements adoptés sur sa proposition de résolution.