Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF POUR 2000 - AUDITION DE M. JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT, MINISTRE DE L'INTÉRIEUR

La commission a procédé à l'audition de M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, sur les conditions de son budget pour 1999 et sur les crédits de son département ministériel pour 2000.

M. Jean-Pierre Chevènement a tout d'abord indiqué que la dotation, constituée de deux composantes relatives, respectivement, aux collectivités locales et aux services de l'Etat, augmentait, d'un exercice à l'autre, pour la deuxième année consécutive, de 3 % en 2000, pour atteindre 54,2 milliards de francs. Cette progression, bien supérieure à celle des dépenses de l'Etat dans leur ensemble (+ 0,9 %) traduit, a-t-il souligné, la priorité accordée par le Gouvernement à la sécurité et est d'autant plus appréciable que la limitation spontanée de l'augmentation des traitements et des retraites libère 600 millions de francs en 2000 (au lieu de 400 millions de francs en 1999), pour le financement des mesures nouvelles.

Le ministre a rappelé les domaines privilégiés de son action : mise en oeuvre de la police de proximité, professionnalisation de la sécurité civile et réforme de l'administration territoriale.

S'agissant des problèmes de sécurité qui, avec le chômage, correspondent à l'une des préoccupations majeures des Français, il a détaillé tout d'abord les mesures prévues pour le renforcement des effectifs : recrutements de 20.000 adjoints de sécurité, d'agents locaux de médiation sociale, création de 100 emplois de personnels scientifiques, maintien de 2.075 policiers auxiliaires en 2000, création de 469 emplois de gardiens de la paix et de 36 attachés de police, "fidélisation" d'unités mobiles de CRS dans les zones sensibles.

M. Jean-Pierre Chevènement a insisté sur les recrutements exceptionnels qui doivent permettre de faire face aux très nombreux départs en retraite (un quart des effectifs) des cinq prochaines années (1999-2004) : 6.131 gardiens, dont un surnombre transitoire de 1.664 agents, ont été engagés à ce titre en 1999.

Le ministre a précisé les trois dispositions indemnitaires principales prévues en faveur des agents du corps de maîtrise et d'application concernant les primes de fidélisation en zone sensible et les améliorations des fins de carrière des agents, ainsi que la rémunération des repos compensateurs pour améliorer la disponibilité, sur le terrain, des forces de police.

Il a ensuite examiné les mesures relatives à l'action sociale en faveur des personnels : mise aux normes des locaux de police, montée de la médecine de prévention et location aux fonctionnaires de logements à des conditions préférentielles.

La progression de 5 % (183 millions de francs) des dépenses de fonctionnement permettra, notamment, d'assurer le renouvellement du parc automobile, l'externalisation de certaines charges de maintenance et la résorption, grâce à la vidéosurveillance, des gardes statiques.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur et de la décentralisation, a insisté sur la généralisation, à compter de l'an 2000, de la réforme de la police de proximité après l'évaluation, prévue au mois de mars, des expérimentations menées dans un certain nombre de circonscriptions de sécurité publique.

Il a rappelé qu'il s'agissait, en relation avec les mesures décidées en concertation, dans le cadre des contrats locaux de sécurité, de traiter plus efficacement la montée de la petite et moyenne délinquance et des incivilités.

En matière d'équipement de la police, le déploiement du très important réseau de télécommunications numériques cryptées ACROPOL sera poursuivi, de façon à assurer la couverture, en 2002, des zones qui concentrent 80 % de la délinquance et celle, en 2007, de tout le territoire. Le niveau des dépenses est de 400 millions de francs par an en autorisations de programme et en crédits de paiement. Le budget 2000 permettra également - a précisé le ministre - de maintenir le rythme de réalisation des travaux immobiliers en cours, de financer la mise en chantier de nouveaux hôtels de police, à Bordeaux, Montpellier et Lille, et de procéder aux réorganisations immobilières que nécessite la police de proximité, notamment en ce qui concerne les casernements des unités "fidélisées".

Puis M. Jean-Pierre Chevènement a évoqué, en ce qui concerne la sécurité civile, la mise en oeuvre de la loi du 3 mai 1996 qui prévoit la départementalisation des services d'incendie et de secours (SDIS).

Il a rappelé les mesures, récentes ou à venir, tendant à améliorer la situation des sapeurs-pompiers, tant professionnels que volontaires, et a reconnu que les conséquences, sur les finances locales, de l'application de la loi précitée n'avaient pas été suffisamment évaluées. Cependant - a-t-il fait valoir - l'Etat prend à sa charge une coûteuse professionnalisation des unités d'intervention de la sécurité civile et une modernisation de ses équipements, notamment de la flotte aérienne, et réfléchit en outre à des mesures tendant à faciliter le financement de la réforme des SDIS.

Après avoir évoqué le plan de revalorisation indemnitaire des pilotes d'avions et d'hélicoptères, il a traité de la modernisation du déminage, précisant que le dépôt de Laon-Couvron serait étendu l'an prochain et de nouvelles installations ouvertes pour le stockage et la destruction des munitions classiques et chimiques.

Concernant l'administration centrale et territoriale, il a indiqué que la réforme de la gestion des crédits des préfectures serait poursuivie sous deux aspects :

- contractualisation, d'une part, de l'évolution des dotations ;

- expérimentation, d'autre part, d'une globalisation de ces dernières dans les préfectures du Doubs, du Finistère, de l'Isère et de la Seine-Maritime.

Les crédits de l'informatique, globalisés, eux aussi, permettront d'activer le câblage de toutes les préfectures et leur mise en réseau avec l'administration centrale et les autres services déconcentrés de l'Etat.

Enfin, les priorités du ministère en matière immobilière concernent l'amélioration de l'accueil du public et de la sécurité des locaux, la "désimbrication" des services préfectoraux et départementaux, et l'adaptation du réseau d'Ile-de-France aux évolutions démographiques.

Abordant, in fine, le thème des dotations aux collectivités locales, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a rappelé que l'augmentation de celles-ci bénéficiaient en partie désormais des effets de la croissance, à travers le "contrat de croissance et de solidarité" pour qui 2,4 milliards de francs supplémentaires seraient accordés en 2000.

L'intégration des résultats du recensement général de la population dans la dotation globale de fonctionnement a été étalée sur trois ans afin d'en rendre l'impact moins coûteux et de ne pas pénaliser les collectivités dont la population diminue.

Afin de maintenir le niveau de la péréquation, la dotation d'aménagement sera augmentée de 200 millions de francs en 1999.

La dotation de solidarité urbaine (DSU) croîtra, pour sa part, à nouveau, de 500 millions de francs en 2000.

Le ministre a ensuite évoqué les mesures prises par le Gouvernement pour remédier à la dégradation des comptes de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Celles-ci respectent les capacités contributives des collectivités, et pour la première fois -a-t-il souligné - ne recourent pas à une augmentation du taux de la surcompensation effectuée au profit des caisses structurellement déficitaires. Après avoir rappelé, enfin, le geste accompli par le Gouvernement en faveur des bourgs-centre (augmentation de plus de 100 millions de francs de leur dotation de solidarité rurale), ainsi que la modification de l'indexation de la compensation de la part salaire de la taxe professionnelle, le ministre a estimé à près de 4 milliards de francs, le coût de l'ensemble des mesures consenties par l'Etat aux collectivités locales.

Le débat s'est alors engagé.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a interrogé le ministre sur les renforcements d'effectifs des forces de l'ordre prévus par les contrats locaux de sécurité, les divergences constatées, au sein même de l'exécutif, au sujet de la reconduite aux frontières des étrangers en situation irrégulière, enfin sur les communautés d'agglomération créées en application de la loi du 12 juillet 1999 sur la coopération intercommunale.

M. Jean-Pierre Chevènement lui a répondu qu'il était impossible au Gouvernement de prendre des engagements en matière d'évolution d'effectifs au sein des territoires concernés par les contrats locaux de sécurité, mais qu'il serait fait en sorte, globalement, que 80 % des adjoints de sécurité soient affectés dans les zones où 80 % de la délinquance était concentrée.

S'agissant de la circulaire aux préfets du 11 octobre sur "l'éloignement des étrangers en situation irrégulière", le ministre a estimé que l'émoi qu'elle avait suscité n'était pas fondé.

La loi du 11 mai 1998 sur l'entrée et le séjour des étrangers en France et le droit d'asile s'est montrée généreuse - a-t-il fait valoir - (la situation de 80.000 personnes ayant été régularisée). Elle doit donc être appliquée. Il n'y aura pas - a-t-il assuré - de "chasse à l'immigré", rappelant les mesures prises en faveur de l'accès à la citoyenneté des jeunes Français issus de l'immigration.

Il a rappelé qu'il était très difficile d'évaluer le nombre d'étrangers en situation irrégulière et le flux de leur entrée (100.000 par an ?) sur notre territoire. Il a évoqué les instructions données aux consulats pour prévenir ce phénomène et aux préfets pour l'exécution des arrêtés de reconduction. M. Jean-Pierre Chevènement a déclaré avoir souhaité une harmonisation des décisions des juges relatives au maintien en rétention administrative des étrangers en cours de reconduite ou d'expulsion. Il lui avait semblé possible que des instructions soient données, à cette fin, aux parquets, concurremment à la possibilité de faire appel des décisions, ce qui constitue une deuxième façon de rechercher l'harmonisation nécessaire.

M. André Vallet, rapporteur spécial des crédits de la sécurité, a alors questionné le ministre en ce qui concerne l'évolution des effectifs des forces de police du fait de la vague des départs en retraite des cinq prochaines années, le déficit d'emplois administratifs dans la police, la délinquance des mineurs, la fiabilité des statistiques relatives aux infractions commises et les relations police-gendarmerie, notamment en Corse.

Evoquant, lui aussi, ce dernier sujet, M. François Trucy a interrogé par ailleurs M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, sur les moyens aériens de lutte contre les incendies de forêt.

M. Roland du Luart, à propos de la rémunération des repos compensateurs, s'est enquis des horaires de travail réels de la police urbaine. Il s'est étonné de l'impossibilité de rémunérer l'activité des présidents de services départementaux d'incendie et de secours, et s'est indigné de l'utilisation d'engins publics, financés par les contribuables, à l'occasion de manifestations sur la voie publique.

M. Auguste Cazalet a déclaré partager ce sentiment.

M. Michel Charasse a suggéré qu'une ligne spéciale figurant sur les avis d'imposition fasse prendre conscience aux contribuables du coût du fonctionnement des services d'incendie et de la rémunération des pompiers professionnels. Il s'est étonné de ce que des magistrats de l'ordre judiciaire présentent des demandes d'indemnités non prévues par la loi, en contrepartie, par exemple, de leur participation aux activités des commissions de remembrement.

En réponse aux différents intervenants, M. Jean-Pierre Chevènement a souligné les difficultés que soulevait le fonctionnement des SDIS (services départementaux d'incendie et de secours). La suggestion de M. Michel Charasse d'indiquer aux contribuables ce que leur coûte le fonctionnement de ces services aurait le mérite de la clarté. La professionnalisation des UIISC (Unités d'instruction et d'intervention de la sécurité civile) nécessite la prise en charge, par l'Etat, de la construction de nouveaux casernements.

Répondant à M. André Vallet, le ministre a reconnu l'existence d'un défaut de prévision concernant l'évolution des effectifs de police et le remplacement des départs à la retraite, tenant, notamment, à une insuffisante prise en compte des délais de formation.

Il a évoqué les mesures prévues l'an prochain pour freiner les départs anticipés.

Concernant la délinquance des mineurs, M. Jean-Pierre Chevènement a rappelé qu'il s'était inquiété de ce problème, il y a un an déjà, prévoyant la création de centres de placement immédiats, dont le nombre devrait passer de 15 d'ici en 2000 à 50 en 2001.

S'agissant des statistiques relatives à la délinquance, il a distingué ce qui relève de la simple contravention (menaces, injures...) ou du sentiment d'insécurité des infractions constituant des délits.

La confusion entre les deux a conduit - a-t-il estimé - à une interprétation erronée d'une enquête de l'institut des hautes études de sécurité intérieure, accréditant une sous-estimation de facteur cinq des actes de délinquance réellement commis par rapport à ceux enregistrés.

Il faut également séparer -a-t-il fait valoir - les signalements en provenance des forces de police de ceux consécutifs à des dépôts de plainte de particuliers.

Le nombre des crimes les plus graves a tendance à diminuer : de plus de 1.300 par an, il est revenu à moins de 900. C'est davantage, selon le ministre, le développement de la petite criminalité qui préoccupe les Français, bien que la délinquance paraisse aujourd'hui, globalement, à peu près contenue.

M. Jean-Pierre Chevènement a ensuite brièvement rappelé les conséquences dramatiques de la rivalité entre police et gendarmerie, en Corse, dans le cadre des investigations consécutives à l'assassinat du préfet Claude Erignac, la police ne disposant pas, à la fin de 1998, d'éléments suffisants pour procéder à l'arrestation des coupables.

Revenant à la difficulté d'estimer le nombre des étrangers en situation irrégulière, il a indiqué que les données tirées des inscriptions dans les écoles, après avoir fait apparaître un flux de " primo-arrivants " supérieur au double des prévisions, reflétaient un ralentissement de ce mouvement. Bien qu'il soit, encore une fois, très difficile de donner un chiffre, on pouvait néanmoins estimer, - le journal " Le Monde " ayant fait état, avant les régularisations (au nombre de 80.000), de 300.000 étrangers en situation irrégulière sur notre territoire - qu'il en restait, actuellement, environ 200.000. Le non-respect, par les immigrés, de leurs obligations entraîne des conséquences pénales.

En réponse à M. François Trucy, M. Jean-Pierre Chevènement a rappelé que la majorité des incendies de forêt en 1999 avait concerné la Corse, de nombreux départs de feu ayant été signalés avec un retard auquel la situation particulière de l'île, à cette époque, n'était peut-être pas étrangère.

Il a souhaité une collaboration active entre la gendarmerie, les gardes forestiers et la population, dans ce domaine, face à certains comportements inciviques.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a indiqué à M. Jacques Pelletier que 80.000 immigrés avaient été régularisés depuis l'accès aux responsabilités du Gouvernement actuel. Il a observé que les conclusions du conseil des ministres de l'intérieur de l'Union européenne, réuni à Tempere, s'inspiraient de la philosophie du Gouvernement et préconisaient l'amélioration des relations avec les pays d'origine, le développement des dispositifs en faveur de l'insertion des immigrés et la maîtrise des flux migratoires. Il a insisté sur la difficulté d'harmoniser les législations nationales en cette matière.

En réponse à M. Auguste Cazalet, le ministre de l'intérieur a indiqué que le Gouvernement excluait totalement une correction de la carte administrative de la France, et la création d'un département basque en particulier. Il a considéré qu'il serait dangereux de faire coïncider les limites administratives de notre pays avec sa carte ethnico-culturelle et a lancé un appel au courage civique des élus.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a indiqué à M. Michel Charasse que des " paillotes " avaient également été détruites sur le continent.

M. Michel Charasse a demandé au ministre une note sur l'application des décisions de justice dans ce domaine sur l'ensemble du territoire.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité avoir des informations sur le rythme de création des communautés d'agglomération, la nouvelle catégorie d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) créés par la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale. Rappelant que cette loi prévoyait la création d'un prélèvement sur les recettes de l'Etat de 500 millions de francs destiné à financer la dotation globale de fonctionnement (DGF) de ces EPCI, il a demandé à combien s'élèveraient les sommes consacrées à la DGF de ces structures en 2000.

M. Jean-Pierre Chevènement a rappelé que la loi du 12 juillet 1999 prévoyait que les communautés d'agglomération pourraient bénéficier d'une DGF moyenne de 250 francs par habitant, tandis que les communautés de communes à taxe professionnelle unique pourraient percevoir une DGF moyenne par habitant de 175 francs. Il a estimé qu'une quinzaine de communautés d'agglomération verraient le jour avant la fin de l'année 1999, et que 25 seraient vraisemblablement créées avant le 1er juillet 2000. Il s'est félicité du rythme des créations de ces structures, qu'il a comparé aux cinq communautés de villes ayant vu le jour depuis la création de cette formule en 1992. Il a considéré que les incitations financières prévues par la loi devraient pousser les districts existants à se transformer en communautés d'agglomération.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial des crédits de la décentralisation, s'est félicité des améliorations apportées au montant des concours de l'Etat aux collectivités locales lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2000 à l'Assemblée nationale. Il a cependant rappelé que les crédits supplémentaires obtenus à cette occasion s'élevaient seulement à 750 millions de francs, 500 millions de francs bénéficiant à la DSU et 250 à l'amélioration de l'indexation de la compensation de la suppression de la part " salaires " de la taxe professionnelle. Il a observé que les chiffres annoncés par le Gouvernement prenaient en compte la consolidation de décisions prises l'année dernière, ainsi que des transferts au sein des concours de l'Etat aux collectivités locales. Il a constaté que ces augmentations ne permettaient pas de compenser la baisse de la DCTP entre 1999 et 2000, qui s'élève à 422 millions de francs, et la régularisation négative de la DGF pour 2000, qui s'établit à 680 millions de francs.

En outre, le rapporteur spécial a considéré que l'augmentation des ressources des collectivités locales devait être examinée à l'aune de l'augmentation de leurs charges. Il a rappelé que l'augmentation en 2000 des traitements des agents de la fonction publique territoriale due à l'accord salarial dans la fonction publique de février 1998 était supérieure à la progression de la DGF entre 1999 et 2000. Il a rappelé que le Gouvernement avait décidé d'augmenter le taux des cotisations des collectivités locales à la CNRACL. A ce titre, il a regretté que le Gouvernement n'ait pas suivi les recommandations du comité des finances locales, consistant à répartir l'augmentation des cotisations entre les collectivités et leurs agents.

S'agissant de la départementalisation des services d'incendie et de secours, il a considéré que le déroulement des conflits sociaux aboutissait à des violations de la règle de neutralité du service public. Il a approuvé la décision du ministre de constituer une commission de suivi de la mise en oeuvre de cette réforme dont les fondements ne sont pas mauvais, mais dont les coûts ne sont pas maîtrisés et ne font l'objet d'aucune estimation. Il a demandé au ministre de préciser le contenu de la dotation globale d'équipement qu'il envisageait de mettre en oeuvre en faveur des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS).

Evoquant la réforme de la taxe professionnelle, il a souhaité savoir si la revalorisation de l'indexation de la compensation en 2000 avait vocation à être reconduite en 2001. S'agissant de la compensation de la baisse des droits de mutation perçus par les départements, il a noté que le code général des collectivités territoriales précisait qu'elle devait être " intégrale ". Il a demandé au ministre quels étaient les critères d'une compensation intégrale, et si l'évolution des bases entre 1998 et 1999 serait prise en compte pour le calcul de la compensation versée en 2001.

Enfin, M. Michel Mercier a rappelé que, lors de son audition par la mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation, le ministre de l'intérieur avait déclaré que l'existence d'une fiscalité directe locale n'était pas une condition nécessaire du principe de libre administration des collectivités locales. Il a souhaité connaître le sentiment du ministre sur la proposition consistant à remplacer la fiscalité directe locale par un partage du produit de certains impôts entre l'Etat et les collectivités locales.

M. Roland du Luart a souligné que, dans le département de la Sarthe, la départementalisation des services d'incendie et de secours avait entraîné une augmentation de 1 % de la fiscalité locale. Il a regretté que les présidents de SDIS ne puissent pas bénéficier d'une indemnisation. Il a également déploré que les pompiers en grève soient autorisés à circuler avec des véhicules publics.

M. Jacques Oudin a pris acte de la décision du Gouvernement de ne pas prendre intégralement en compte les résultats du recensement général de 1999 pour le calcul des dotations de l'Etat aux collectivités locales. Il a, en revanche, fortement regretté que le Gouvernement ne tienne pas compte des résultats du recensement pour le découpage cantonal.

Il a annoncé qu'il allait déposer une proposition de loi relative aux chambres régionales des comptes, dont le texte reprend les préconisations du groupe de travail sénatorial constitué sur ce sujet. Il a relevé que les magistrats des chambres régionales des comptes avaient tendance à considérer que " tout ce qui n'est pas autorisé est interdit ". Par conséquent, et pour améliorer la sécurité juridique des élus, il a jugé indispensable de clarifier le régime des avantages en nature accordés à des fonctionnaires territoriaux.

M. Jacques Oudin a souhaité connaître le sentiment du ministre sur les " pays ", dont les dispositions de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999 encouragent fortement la création.

M. Auguste Cazalet a vivement regretté que le projet de loi relatif à la prise en compte des résultats du recensement sur les dotations de l'Etat aux collectivités locales ne prenne pas en compte la totalité des augmentations de population. Il a estimé que ce choix conduisait à pénaliser les petites communes qui font des efforts et des investissements importants pour attirer les habitants et pour enrayer le déclin démographique du monde rural.

M. Michel Charasse a indiqué que les magistrats de l'ordre judiciaire qui participent aux commissions de remembrement demandaient, de plus en plus souvent, des indemnités. Il a relevé qu'aucun texte ne prévoyait la possibilité de verser des indemnités à des fonctionnaires en cas de participation aux travaux de ces commissions et a incité les élus locaux à ne pas céder aux demandes en ce sens, de manière à ce que la loi s'applique de la même manière aux magistrats et aux autres agents publics.

M. Alain Lambert, président, a constaté que le système de financement des collectivités locales atteignait ses limites. Il a observé que la DGF ne répondait plus à son objet puisqu'il fallait procéder, chaque année, à des abondements de son montant. Il a estimé que ce phénomène allait s'amplifier à mesure que l'intercommunalité à fiscalité propre se développerait. En outre, il a observé que le montant de la variable d'ajustement du contrat de croissance, la DCTP, diminuait d'année en année et que, lorsque cette dotation aurait totalement disparu, il faudrait trouver une nouvelle variable d'ajustement. Il a demandé au ministre de l'intérieur pendant combien d'années un tel système pouvait perdurer.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a considéré que l'effort supplémentaire de l'Etat en faveur des collectivités locales s'élevait à 1.875 millions de francs. Il a expliqué que, grâce au jeu de l' " enveloppe normée ", la faible progression de la DGF en 2000 était compensée par une moindre diminution du montant de la DCTP.

S'agissant de la réforme des services d'incendie et de secours, il a rappelé que les sapeurs-pompiers se montraient exigeants sur la définition de leur régime de travail, qui ne relève pas de la compétence de l'Etat. Il a informé la commission qu'il avait, néanmoins, demandé un rapport à ce sujet, de manière à définir les grandes lignes d'un régime harmonisé sur l'ensemble du territoire. Il a pris acte du rejet des conclusions de ce rapport par le conseil supérieur de la fonction publique territoriale, mais a déclaré qu'il restait à la disposition des différents acteurs pour tenter de trouver un accord entre les SDIS, les syndicats et les élus locaux. Il a considéré qu'une fiscalisation du coût des SDIS aurait le mérite de la clarté mais conduirait à la mise en place d'un cinquième niveau de prélèvement. Il a rappelé que le coût total de la réforme était estimé à environ 15 milliards de francs.

S'agissant de son projet de dotation globale d'équipement spécifique aux SDIS, il a indiqué que celle-ci pourrait recycler une partie de la DGE des communes et des départements, et qu'un effort supplémentaire de l'Etat ne lui paraissait pas illégitime. Il a estimé que des dispositions pourraient être inscrites dans le projet de loi de finances rectificative pour 1999.

S'agissant de l'indexation de la compensation de la réforme de la taxe professionnelle, il a considéré que l'amélioration du taux d'indexation en 2000 n'avait pas vocation à être reconduite en 2001 car la mesure adoptée à l'Assemblée nationale visait à ne pas faire supporter à la compensation versée en 2000 les conséquences de la régularisation négative de la DGF au titre de 1998, soit l'année précédant la décision de réformer la taxe professionnelle. En conséquence, il a jugé légitime de prendre en compte les régularisations négatives de la DGF au titre de l'année 1999 et des années suivantes dans le calcul du taux d'indexation de la compensation de la réforme de la taxe professionnelle.

Evoquant les perspectives d'évolution de la fiscalité locale, le ministre de l'intérieur a considéré que " tout est envisageable ". Il a assuré que la commission récemment mise en place par le Premier ministre, et présidée par M. Pierre Mauroy, ferait des propositions à ce sujet.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a considéré que les présidents de SDIS méritaient une indemnité et a rappelé que le Sénat s'était opposé, au cours de la précédente session, à une tentative en ce sens. Il a souhaité qu'une nouvelle initiative permette de faire évoluer, le plus rapidement possible, la situation actuelle.

Il a indiqué qu'il n'était pas apparu indispensable de procéder à un nouveau découpage cantonal prenant en compte les résultats du recensement général de 1999, mais que la carte des cantons serait revue après 2001.

S'agissant des pays, M. Jean-Pierre Chevènement a rappelé qu'ils devaient être des espaces de projets fédérant des communautés de communes. Il a observé que la DATAR encourageait la création de telles structures, mais que celles-ci n'avaient pas vocation à la pérennité. Ainsi, une fois mené à bien le projet ayant motivé leur création, il a estimé que les pays étaient voués à disparaître, à la différence des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Le ministre de l'intérieur a considéré qu'il entrait dans le champ de la mission présidée par M. Pierre Mauroy de faire des propositions relatives au régime des avantages en nature accordés à des fonctionnaires territoriaux.

S'agissant des indemnités demandées par les magistrats de l'ordre judiciaire au titre de leur participation aux commissions de recensement, le ministre de l'intérieur a déclaré qu'il allait se concerter sur ce point avec la ministre de la justice.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a constaté que le système actuel de financement des collectivités locales était parvenu à résister à de nombreuses difficultés. Il a considéré que ce système procédait d'une philosophie coupable, qu'il a qualifiée de " religion des acquis ". Il a reconnu que l'empilement des dispositifs nuisait à la lisibilité d'ensemble, mais a considéré que, tant que le montant total des crédits augmentait grâce à la croissance économique, le système restait viable.

MERCREDI 3 NOVEMBRE 1999

- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF POUR 2000 - EQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT : I. - SERVICES COMMUNS - EXAMEN DU RAPPORT

La commission a procédé, sur le rapport de M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et du logement consacrés aux services communs dans le projet de loi de finances pour 2000.

M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a tout d'abord observé que les crédits du fascicule "services communs" du ministère de l'équipement, des transports et du logement, s'élevaient à 24,5 milliards de francs pour 2000, en progression de 5,6 % par rapport à 1999.

Il a considéré comme trompeuse cette importante variation, puisqu'elle était en grande partie le résultat de la réintégration des recettes des missions d'ingénierie publique au budget général de l'Etat et de l'ouverture des crédits correspondant au budget des services communs, pour un montant total de 948 millions de francs.

Il a relevé qu'une présentation des crédits à structure constante montrait que le budget des services communs progressait en réalité de 1,4 % en crédits de paiement pour 2000.

Avant de résumer les principales évolutions du budget, il a rappelé que les dépenses ordinaires, c'est-à-dire les crédits de personnel et de fonctionnement du ministère de l'équipement, représentaient 99,3 % du budget des services communs. Les personnels relèvent à 96 %, des services déconcentrés du ministère de l'équipement, des transports et du logement.

Il a indiqué que les dépenses de personnel, qui représentaient à elles seules 89 % de l'ensemble du budget "services communs", progressaient de 1,6 % pour 2000, à structure constante, pour s'établir à 21,8 milliards de francs. Les rémunérations progresseront de 2,1 % et la participation aux charges de pensions augmentera de 1,2 %.

Il a noté que les moyens de fonctionnement courant et d'investissement de l'administration centrale et des services déconcentrés apparaissaient stables à 1,97 milliard de francs, mais traduisaient toutefois un nouvel effort de contraction des coûts, puisque de nouvelles charges apparaissaient, en raison du paiement du crédit-bail de l'Arche de la Défense.

Il a relevé que les moyens accordés à l'Ecole nationale des ponts et chaussées et à l'Institut géographique national étaient stables, dans l'attente de la renégociation du contrat d'objectif et des conclusions du rapport du député M. Guy Lengagne, qui s'est vu confier, par le Premier ministre au printemps 1999, une mission de réflexion sur les perspectives d'évolution de l'information géographique et ses conséquences sur l'activité de l'IGN.

Enfin, il a observé que le budget "services communs" comprenait désormais un nouvel agrégat "autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires". Il a indiqué qu'il s'agissait de mettre en oeuvre la loi du 12 juillet 1999 portant création d'une autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires. La dotation de 5 millions de francs pour 2000 permettra de couvrir la rémunération du président de l'autorité, l'indemnisation des membres et experts et les dépenses de fonctionnement.

Puis il a fait part de ses observations.

Il a tout d'abord constaté que le ministère de l'équipement, des transports et du logement réalisait un effort de réduction de ses effectifs et des crédits de fonctionnement pour 2000. En 1999, le ministère de l'équipement, des transports et du logement avait procédé à la suppression de 490 postes. Pour 2000, il a relevé que l'effort de compression des effectifs serait moins important, puisqu'il porterait sur 385 emplois dont 115 adjoints administratifs des services déconcentrés, 130 agents d'exploitation des travaux publics de l'Etat et 65 ouvriers des parcs et ateliers. Il a expliqué cette évolution par le souci du ministère de ne pas trop affecter les personnels qui concourent à l'entretien et à l'exploitation des routes et des voies navigables, afin de maintenir les effectifs dans les départements qui connaissent des contraintes particulières, notamment pendant la période hivernale.

Il a ajouté que les emplois du budget des services communs diminueraient par ailleurs de 10 unités, par transfert, si bien qu'au total, les effectifs inscrits sur le budget des services communs baisseront de 395 unités, pour atteindre 98.341 emplois.

M. Jacques Pelletier a observé que les mesures statutaires concernant les personnels auraient un impact budgétaire, puisque les rémunérations progresseront de 2,1 % pour 2000. Il a cité les nombreuses transformations d'emplois, et notamment le repyramidage du corps des techniciens supérieurs des travaux publics de l'Etat, du corps des adjoints administratifs et des dessinateurs, de la filière technique et de la filière administrative. Il a expliqué ces mesures par l'application de l'accord salarial de la fonction publique pour les corps de catégorie C et par un phénomène de "rattrapage" pour l'application du protocole "Durafour", en ce qui concerne les personnels de catégorie B.

Il a noté que le budget des services communs ne comportait pas de créations nettes de postes, mais uniquement des redéploiements, notamment en matière de sécurité routière, et dans le domaine du contrôle des transports routiers.

Concernant les dépenses de fonctionnement, M. Jacques Pelletier a observé que le budget du ministère de l'équipement enregistrait pour 2000 une stabilité, après une diminution régulière de 2 % sur les chapitres de fonctionnement des services, conforme à l'application du contrat triennal (1997-1999) conclu avec le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Toutefois, en termes réels, en excluant les nouvelles charges résultant du crédit-bail de l'Arche de la Défense, il a considéré que les crédits de fonctionnement seraient réduits, de l'ordre de 3 %.

En conclusion de cette première observation, M. Jacques Pelletier a constaté que les efforts d'économie du ministère de l'équipement, des transports et du logement, tant en ce qui concerne les dépenses de personnel que les dépenses de fonctionnement, s'inscrivaient dans la politique générale appliquée à la fonction publique de l'Etat, à savoir un traitement de la masse salariale plus favorable que celui des autres dépenses.

Il a particulièrement noté que le coût des rémunérations progresserait plus rapidement que les crédits du budget de l'Etat (+ 2,1 % contre + 0,9 %), si bien que l'effort budgétaire portait non pas sur le personnel, mais sur les moyens d'action du ministère.

Puis, M. Jacques Pelletier a estimé, à l'examen de la gestion des années précédentes et du projet de loi de finances pour 2000, qu'il était devenu impératif de clarifier la présentation budgétaire du budget des services communs.

Il a noté que le projet de loi de finances pour 2000 était marqué par une clarification importante, puisqu'il proposait l'intégration des recettes des missions d'ingénierie publique au budget des services communs.

Ainsi, l'opération de rebudgétisation de ces recettes portera sur 948,16 millions de francs dont 910,56 millions de francs pour les indemnités versées à 25.000 agents, soit un quart des agents du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Il a observé que la réintégration de ces sommes s'accompagnerait d'un dispositif destiné à maintenir aux agents des droits constants. Les critères de répartition des recettes d'ingénierie publique étaient fonction du grade, mais aussi de la situation géographique des agents et de leur service. Ces critères devraient être maintenus.

M. Jacques Pelletier s'est félicité de cette clarification budgétaire, qui parachève le mouvement de rapatriement au sein du budget de l'Etat de dépenses permanentes.

Il a toutefois estimé que de nouvelles clarifications budgétaires seraient bienvenues.

D'une part, il a observé que les très nombreux transferts internes de crédits et transferts entre sections nuisaient à l'analyse du budget : le budget des services communs compte cette année pas moins de 10 transferts internes et 18 transferts entre sections, sans qu'il soit possible de connaître précisément les articles budgétaires affectés par ces transferts. Dans ces conditions, il a estimé qu'une analyse détaillée des crédits était impossible, et que l'information du Parlement pouvait être considérée comme insuffisante.

D'autre part, il a remarqué, à l'appui du rapport du contrôleur financier, que d'importants transferts d'emplois et de crédits avaient lieu en cours de gestion.

Il s'est félicité du choix de faire gérer l'ensemble des agents par la direction du personnel du ministère de l'équipement, des transports et du logement, en permettant certaines économies d'échelle et une plus grande cohérence dans la gestion des carrières. Toutefois, il a souhaité, autant que possible, que les crédits de rémunération des personnels gérés par l'administration centrale du ministère de l'équipement figurent au budget des services communs, lorsque ces personnels font partie du ministère. Il n'a pas trouvé de raison objective pour que les personnels de la direction de l'aviation civile et ceux des transports terrestres soient inscrits au budget "services communs", mais pas ceux de la section "mer". La logique voudrait que ce transfert soit réalisé à moyen terme, afin de faciliter la lisibilité des documents budgétaires et la gestion du personnel.

En conclusion, il a rappelé combien le budget des "services communs", correspondant pour l'essentiel à la rémunération des personnels du ministère de l'équipement, des transports et du logement, était, du fait de sa structure même, un budget d'une grande rigidité. Au total, ce budget progressera de 1,4 % pour 2000, soit 0,5 point de plus que le budget général, principalement en raison de l'incidence en année pleine des mesures de revalorisation du point fonction publique et des mesures statutaires. Il a conclu que cette progression mécanique laissait malheureusement peu de place à une action déterminée de réforme des moyens de l'Etat.

PJLF POUR 2000 - ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT : II. - URBANISME ET LOGEMENT - EXAMEN DU RAPPORT SPÉCIAL

Puis, M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a présenté le budget de l'urbanisme et du logement pour 2000.

Il a indiqué que pour 2000, le budget de l'urbanisme et du logement progressait de 6 % pour s'établir à 48,2 milliards de francs. Toutefois, il a fait observer que la clôture de deux comptes d'affectation spéciale, le "fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France" et le "fonds pour le financement de l'accession à la propriété", entraînait la réintégration d'importantes masses de crédits, respectivement 635 millions de francs et 3,1 milliards de francs, si bien qu'à structure constante, le budget de l'urbanisme et du logement était en réalité en baisse de 2,3 %, avec une réduction nettement plus accentuée pour les dépenses en capital (- 7,0 %) que pour les dépenses ordinaires (- 0,5 %).

Le rapporteur spécial a ensuite fait part de ses principales observations.

Il a tout d'abord observé que le budget du logement pour 2000 prenait en compte, pour la première fois, l'amélioration de la situation économique.

Ainsi, il a noté que les crédits destinés aux aides personnelles seraient réduits de 283,9 millions de francs pour 2000. Il a considéré comme indispensable cet ajustement, dans la mesure où le maintien d'une dotation élevée s'était accompagnée en 1998 et 1999 de fortes annulations : l'arrêté du 18 novembre 1998 avait ainsi annulé 846 millions de francs, et l'arrêté du 2 septembre 1999 avait annulé 600 millions de francs. Il a souligné que cette mesure d'annulation renforçait la position du Sénat, qui avait adopté une réduction de crédits "ciblée" de 500 millions de francs lors du vote de la loi de finances pour 1999, contre l'avis du Gouvernement.

Il a toutefois jugé que même si l'extension en année pleine de la mesure de revalorisation des aides décidée au 1er juillet 1999 devait être prise en compte, pour un coût de 500 millions de francs, la mesure d'ajustement pourrait s'accompagner, si la croissance économique anticipée pour l'année prochaine par le Gouvernement se confirmait, de nouvelles annulations au cours de l'année 2000.

M. Jacques Pelletier a noté que l'amélioration de la situation économique s'accompagnait également, pour un montant plus modique, de réductions de crédits sur le chapitre de la participation de l'Etat aux fonds de solidarité logement (FSL) et au fonds d'aide aux accédants en difficulté, sans toutefois affecter directement les dotations des FSL. Il a estimé que la progression des dotations des FSL l'an dernier avait permis d'atteindre un montant de crédits de nature à satisfaire les besoins des personnes en difficulté.

Il a noté que le budget de l'urbanisme et du logement bénéficierait également de la diminution du coût du crédit et donc de la diminution du coût du prêt sans intérêt, qui passera de 6,16 milliards de francs en 1999 à 5,8 milliards de francs en 2000, pour financer un nombre de prêts équivalent, soit environ 110.000 prêts.

S'agissant de crédits d'investissement, destinés à aider les ménages modestes à accéder à la propriété, le rapporteur spécial a souhaité que le Gouvernement profite de la réduction du coût moyen du prêt à taux zéro pour 2000 pour en élargir le champ : l'expérience de 1996, année au cours de laquelle le prêt à taux zéro avait été ouvert aux logements nécessitant au moins 20 % de travaux, au lieu des 35 % habituellement requis, sur l'initiative du Sénat, avait permis de faire bénéficier 30.000 ménages supplémentaires de ce dispositif d'accession à la propriété.

Il a estimé cette mesure d'autant plus utile que le projet de budget du logement pour 2000 enregistrait, du fait notamment de la réduction du coût du prêt à taux zéro, une diminution importante des aides à la pierre, qui atteindraient 13,4 milliards de francs, soit 1 milliard de francs de moins qu'en 1999 (- 6,7 %). Il lui est apparu dès lors nécessaire de rééquilibrer les aides à la pierre par rapport aux aides à la personne.

M. Jacques Pelletier a noté, en deuxième observation, que le budget du logement pour 2000 était un budget de continuité.

Il a rappelé que le secteur du logement, dans son ensemble, se portait bien, l'activité liée à la construction neuve et à l'entretien du bâtiment ayant crû en 1998 de 1,6 % en francs constants, essentiellement sous l'impulsion de la construction neuve (+ 2,8 %). Pour 1999, les prévisions se situent dans une fourchette de 4,3 % à 5,9 % de croissance de l'activité du bâtiment.

Dans ce contexte, il a noté que le budget de l'urbanisme et du logement ne présentait pas de nouvelles actions significatives.

Il a observé que des dotations nouvelles concerneraient toutefois la lutte contre le saturnisme pour 75 millions de francs, afin de permettre la première mise en oeuvre de la loi contre les exclusions, sous forme d'études et de diagnostics, et que les crédits au fonds national de l'aide au logement seraient abondés de 40 millions de francs dans le cadre du financement des aides à la gestion des aires de nomades.

Il a noté que la plupart des autres lignes budgétaires ne faisaient l'objet que de mesures d'ajustement.

M. Jacques Pelletier s'est ensuite félicité des "opérations vérité" menées sur les lignes budgétaires qui ont connu ces dernières années d'importantes annulations de crédits, et notamment le chapitre 46-40 pour les aides personnelles et le chapitre 65-48 pour la construction sociale et l'amélioration de l'habitat, qui avaient enregistré d'importantes annulations en 1999, pour respectivement 600 millions de francs en dépenses ordinaires et 146,5 millions de francs en crédits de paiement.

Il a toutefois observé que certaines réformes étaient retardées, concernant notamment l'accession à la propriété, l'aide à la rénovation du logement privé et les aides au logement.

En matière de sécurisation de l'accession à la propriété, malgré le faible taux de sinistres des prêts à l'accession sociale, il a noté que la dotation de l'Etat au fonds de garantie de l'accession sociale (FGAS) était revalorisée de 125 millions de francs. Il a relevé qu'il s'agissait d'une augmentation "mécanique" prenant en compte l'augmentation attendue des prêts à l'accession sociale, mais qui ne reflétait en rien les risques couverts.

En matière d'aide au logement privé, il a observé que les lignes budgétaires consacrées à la subvention de fonctionnement à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) ou à la prime à l'amélioration de l'habitat (PAH) étaient en légère hausse.

Il a relevé que cette augmentation sensible des dotations traduisait un certain attentisme, notamment quant à l'impact sur la subvention de l'ANAH de la baisse de la TVA sur les travaux dans les logements privés. Il a également noté que le futur projet de loi "Urbanisme, habitat et déplacement" constituerait le cadre de la mise en oeuvre d'une réforme tendant à l'unification des interventions financières sur le parc privé. Dans ses réponses au questionnaire budgétaire, le secrétariat d'Etat au logement relevait en effet les insuffisances des actuelles procédures comptables de gestion de l'ANAH et de la prime à l'amélioration de l'habitat (PAH), notamment au regard des observations de la Cour des comptes. Il a indiqué que la réforme viserait, selon les termes du secrétariat d'Etat au logement, à "regrouper auprès d'un seul organisme public dont la vocation serait élargie à l'ensemble du parc privé les outils et moyens financiers existants".

M. Jacques Pelletier a regretté qu'en matière d'aides personnelles au logement, il ne soit pas entrepris de réforme d'envergure. Il a constaté que l'année 2000 verrait la poursuite des mesures d'harmonisation des aides au logement, mais que de nombreux sujets n'étaient pas encore traités. Il a souhaité, d'une manière générale, que soit tiré profit de l'amélioration de la situation économique pour engager une réforme substantielle des aides au logement, dans un souci de plus grande neutralité des aides.

Dans une troisième observation, M. Jacques Pelletier a expliqué que des mesures très importantes concernant le secteur du logement n'étaient pas directement visibles dans le budget, ce qui expliquait que celui-ci ne contienne pas de réformes majeures.

Concernant le logement social, il a rappelé que la principale mesure avait consisté en l'allégement de la dette du secteur HLM en vertu de la décision ministérielle du 23 avril 1999, qui portait sur 114 milliards de francs d'encours, et conduirait à terme à un allégement de 20 milliards de francs pour le secteur HLM.

Il a indiqué que l'encours de la dette supportait désormais un taux de 3,8 % contre 4,3 % initialement, la diminution de 0,75 % du taux du livret A, qui s'établit à 2,25 % à compter du 1er août 1999 ayant permis d'abaisser le coût de l'ensemble des opérations des organismes sociaux. Il s'est félicité de cet abaissement du coût de la ressource, de nature à améliorer la construction de logements sociaux, qui était préconisé par la commission des finances du Sénat depuis de nombreux mois.

Toutefois, il a noté que des efforts restaient encore à faire, et que des négociations devraient être engagées sur le coût de rémunération de la collecte.

Enfin, il a indiqué qu'un décret du 14 septembre 1999 avait substitué un prêt locatif à usage social (PLUS) au prêt locatif aidé (PLA) ordinaire et au prêt locatif aidé à loyer minoré (PLA-LM).

Il a indiqué qu'il bénéficierait d'une subvention de 5 % dans le neuf et 10 % dans l'ancien et d'un prêt de la Caisse des dépôts à 3,45 %.

Il a noté que la mise en place du PLUS répondait à la fois au souhait de développer la mixité sociale et à la nécessité de faire baisser les loyers des opérations neuves et des opérations d'acquisition amélioration. Ainsi, le loyer maximum des logements PLUS serait réduit à 90 % du plafond des actuels logements PLA, soit généralement au loyer plafond servant de calcul à l'aide personnalisée au logement (APL).

Concernant le logement privé, il a rappelé que la réduction de la TVA sur les travaux d'amélioration et d'entretien dans les logements devrait présenter un coût fiscal de près de 20 milliards de francs pour 2000 (environ 12 milliards de francs en régime de "croisière") et favoriser le développement du secteur de la réhabilitation, tout en luttant contre le travail au noir. Le logement social, qui bénéficiait déjà d'un dispositif de récupération de la TVA s'apparentant à une TVA à taux réduit, le mécanisme de la livraison à soi-même, bénéficiera d'une extension aux travaux d'entretien. Enfin, la réduction des droits de mutation sur les logements d'habitation permettra un allégement de la fiscalité de 4,6 milliards de francs.

En définitive, M. Jacques Pelletier a estimé que ces mesures auraient un impact significatif sur les aides au logement pour 2000. Les aides à la pierre ne représenteront plus que 7 % du total des dépenses en faveur du logement en 2000, contre 8,8 % en 1999 et les aides à la personne diminueront de 21,5 % à 18,2 %. L'essentiel du rééquilibrage se fera au profit des aides fiscales qui devraient représenter 32 % des aides au logement en 2000 contre 24 % auparavant.

En conclusion, le rapporteur spécial a indiqué que le budget du logement présentait pour 2000 certains aspects positifs, au premier rang desquels des opérations "vérité" sur les crédits de chapitres budgétaires traditionnellement surdotés. Il a toutefois souhaité que les priorités soient mieux affichées, alors même que la conjoncture économique est excellente.

Il a regretté que les économies soient plus visibles sur la partie "investissement" du budget de l'urbanisme et du logement que sur les chapitres de "fonctionnement". Enfin, il a noté que la principale mesure concernant la construction sociale, à savoir la mise en place d'un produit unique, le "PLUS", traduisait un changement d'orientation par rapport aux réformes introduites en 1997 à l'arrivée du Gouvernement, réformes qui consistaient précisément à différencier les produits offerts aux organismes HLM. Il s'est déclaré confiant dans le succès de ce nouveau produit, tout en notant qu'il devait encore faire ses preuves.

M. Jean-Pierre Plancade, rapporteur pour avis des crédits du logement de la commission des affaires économiques, a félicité le rapporteur spécial pour sa présentation. Il a estimé que le budget du logement était un bon budget. Il s'est toutefois interrogé sur la mise en place du prêt locatif à usage social (PLUS), et notamment sur le fait qu'il pourrait être réservé aux seuls organismes HLM, à l'exclusion des collectivités locales. Il s'est également inquiété de la complexité des dispositions fiscales, contenues dans le projet de loi de finances, et relatives au droit de bail. Il a partagé le souhait du rapporteur spécial d'élargir le dispositif du prêt à taux zéro.

M. Jacques Bellanger, rapporteur pour avis des crédits de l'urbanisme de la commission des affaires économiques, a considéré que les crédits de l'urbanisme pour 2000 étaient acceptables, tout en notant la diminution des crédits de fonctionnement du budget. Il a déploré que la modification incessante du périmètre du budget de l'urbanisme rende la lecture de l'évolution des crédits presque impossible, même si les modifications étaient présentées comme des opérations de clarification budgétaire.

M. Jean-Pierre Demerliat a félicité le rapporteur spécial pour la clarté de son exposé. Il a demandé si les crédits affectés au prêt locatif à usage social pourraient servir à des opérations de rénovation, très demandées par les organismes HLM dont le parc est vieillissant et inoccupé.

M. René Ballayer a souhaité avoir des explications sur les crédits accordés en faveur de la lutte contre le saturnisme.

M. Jacques Oudin a fait observer la remarquable amélioration de l'économie du logement et la progression sans précédent des permis de construire. S'agissant des travaux réalisés dans les logements, il s'est toutefois demandé si le Gouvernement présenterait une comparaison entre l'ancien système des crédits et réductions d'impôts et le nouveau mécanisme de taux réduit de TVA. Il a indiqué que la Commission européenne avait adopté une directive sur le taux de plomb dans l'eau, et s'est demandé si la dotation en faveur de la lutte contre le saturnisme en tenait compte. Il a cité le cas des zones de patrimoine architectural et urbain en se demandant si les crédits de l'ANAH ne pourraient pas être redéployés en faveur de ces zones. Il a enfin évoqué la difficulté de construire des logements sociaux dans les zones à forte pression foncière spéculative, notamment les zones littorales.

Mme Marie-Claude Beaudeau a demandé si l'amélioration de la situation économique avait permis de diminuer le nombre de bénéficiaires des aides au logement, et quel en était le nombre. Elle a également demandé quel montant de crédits serait affecté à la réalisation des aires de nomades. Elle a enfin interrogé le rapporteur spécial sur l'ampleur des opérations de démolition-reconstruction.

M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a répondu à M. Jean-Pierre Plancade qu'il pensait également que le budget du logement était satisfaisant, dans un contexte très favorable pour l'économie de l'immobilier. S'agissant de la réglementation du PLUS, il a indiqué que ce serait une erreur de réserver le nouveau produit aux seuls organismes HLM, et qu'il convenait d'avoir des réponses précises du Gouvernement sur cette question. Concernant le droit de bail, il a confirmé la nécessité de réformer le dispositif, afin de proposer une réforme simple et compréhensible pour les contribuables.

En réponse à M. Jacques Bellanger, il a expliqué que la diminution des crédits de fonctionnement du budget de l'urbanisme et du logement était permise par l'amélioration de la situation économique, et qu'il se félicitait des opérations de vérité permettant de mettre à niveau les crédits budgétaires.

En réponse à M. Jean-Pierre Demerliat, il a rappelé l'existence d'une ligne fongible, qui permettait d'accroître les crédits de la rénovation lorsque ceux destinés à la construction n'étaient pas utilisés. Il a rappelé l'extension du dispositif de la livraison à soi-même, assimilable à un taux réduit de TVA pour les travaux d'entretien réalisés dans les logements sociaux.

En réponse à MM. René Ballayer et Jacques Oudin, il a indiqué que les crédits nouveaux accordés au titre de la lutte contre le saturnisme, à savoir 75 millions de francs, ne permettraient que les premiers diagnostics et non la réalisation des travaux. Il en a conclu que les sommes consacrées à la lutte contre le saturnisme devraient être beaucoup plus importantes dans les années à venir. Il a ajouté qu'il était évidemment nécessaire de préciser aux contribuables les avantages relatifs du nouveau mécanisme de TVA à taux réduit pour les travaux dans les logements, par rapport à l'ancien système des réductions et crédits d'impôts. Il a reconnu que le prix élevé des terrains créait, dans certaines zones particulières, des tensions, qui rendaient difficiles des programmes de construction de logements sociaux.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jacques Pelletier a répondu que les chiffres concernant les bénéficiaires d'aides personnelles au logement pour 1999 n'étaient pas encore connus, mais que la révision des dotations budgétaires résultait simplement d'une adaptation des crédits à la réalité des prestations. Il a rappelé que 40 millions de francs de crédits seraient consacrés aux aires de nomades, le projet de loi sur ce thème, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, devant d'ailleurs être discuté prochainement au Sénat. En matière d'opérations de démolition-reconstruction, il a indiqué que les crédits budgétaires étaient satisfaisants, mais que les opérations n'étaient pas réalisées, faute de volonté des acteurs concernés.

A la suite de ce débat, et sur proposition de M. Jacques Pelletier , la commission a décidé de réserver la position de la commission sur les fascicules I. Services communs et II. Urbanisme et logement du budget de l'équipement, des transports et du logement, jusqu'à l'audition du ministre de l'Équipement, des transports et du logement.

PJLF POUR 2000 - EDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE : III. - RECHERCHE ET TECHNOLOGIE - EXAMEN DU RAPPORT

Puis la commission a procédé à l'examen des crédits de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie - III. Recherche et technologie, sur le rapport de M. René Trégouët, rapporteur spécial.

M. René Trégouët, rapporteur spécial, a d'emblée exposé les raisons de son insatisfaction face à ce budget :

- l'évolution globale des crédits, tout d'abord, ne lui semble pas refléter la priorité nationale dont la recherche devrait faire l'objet ;

- la dotation néglige, d'autre part, des investissements essentiels pour l'avenir de la science et de la technologie française ;

- la dotation laisse douter, enfin, de ce fait, de la pertinence des processus de décision relatifs aux arbitrages budgétaires et au pilotage de la recherche française.

Les dépenses du budget civil de recherche et de développement technologique (BCRD) doivent passer, en 2000, -a indiqué le rapporteur spécial- de 53,9 à 54,6 milliards de francs, soit une progression de 1,3 %, inférieure à celle de l'ensemble des dépenses de l'Etat qui est de 0,9 %.

Dans cet ensemble, la dotation du ministère chargé de la recherche et de la technologie, recule de 0,4 % (de 40 à 39,86 milliards de francs). Elle progresse toutefois, à structure constante, c'est-à-dire en ne tenant pas compte d'un transfert de 600 millions de francs de certaines dépenses spatiales au ministère de la défense, mais seulement de 1,1 %, soit moins que la moyenne des budgets civils.

M. René Trégouët, rapporteur spécial, a estimé que cette évolution était en contradiction avec les déclarations du Comité interministériel scientifique et technologique, de juillet 1998, pour qui la recherche constituait l'une des clés essentielles de l'avenir de notre pays et pour qui la France devait se donner les moyens d'adapter son dispositif public de recherche pour relever les défis du siècle prochain.

Les statistiques disponibles montrent, en effet, -selon le rapporteur spécial- que le moment de relâcher notre effort n'est pas encore venu, malgré la progression de plus de 4 % en 1998 des dépenses de recherche des entreprises.

La part du produit intérieur brut (PIB) réservée à la dépense nationalede recherche développement (DNRD) est revenue de 2,50 % en 1993 à 2,22 % en 1998, celle de la dépense intérieure de recherche développement (DIRD), de 2,45 % à 2,21 % durant la même période. L'OCDE classe la France en queue du peloton des grands pays industriels, derrière les Etats-Unis, le Japon et l'Allemagne, en ce qui concerne la DIRD par habitant et le ratio chercheur/population active. Enfin, la proportion des brevets déposés, en Europe et aux Etats-Unis, par les laboratoires français, recule continuellement depuis 10 ans.

S'agissant des investissements importants pour l'avenir de la science et de la technologie française que ce budget lui semble négliger, M. René Trégouët, rapporteur spécial, a évoqué le projet de " Synchrotron Soleil ".

Il a développé à son sujet les points suivants :

- il convient de s'interroger sur l'avenir de l'installation actuelle d'Orsay ;

- d'autres pays conservent des équipements nationaux, tout en participant à l'exploitation de machines européennes ;

- il existe une tendance à la saturation de ce type d'équipements, du fait de leur très grand intérêt scientifique et de la variété de leurs utilisations ;

- leurs caractéristiques étant très diverses, ils peuvent être réalisés, selon leur dimension et leur coût, au niveau soit européen, soit national ;

- leur usage, enfin, est, par essence, coopératif, c'est-à-dire international, d'une part, interdisciplinaire, d'autre part.

M. René Trégouët, rapporteur spécial, a également évoqué l'abandon, au nom de la réduction du poids des grands équipements scientifiques dans ce budget, de projets tels que le satellite astronomique Corot ou le nouveau navire océanographique que l'IFREMER (Institut français pour l'exploitation de la mer) devait construire, en partenariat avec la marine nationale.

Il a déclaré approuver pourtant plusieurs des priorités annoncées par le ministre, notamment celles en faveur des sciences du vivant et des nouvelles technologies dans la communication et l'information, domaines où la France se trouve en retard et où la valorisation des résultats de la recherche peut être particulièrement forte et rapide.

Il s'est déclaré satisfait des encouragements à la mobilité des chercheurs et à la création d'entreprises et de la facilitation, par la loi sur l'innovation et la recherche, de la valorisation des travaux des organismes publics de recherche.

Mais, trop souvent -a estimé le rapporteur spécial-, les orientations de la politique de la recherche semblent dictées par des oppositions sommaires, entre laboratoires et très grands équipements, par exemple, Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et universités, recherche fondamentale et recherches finalisées, disciplines traditionnelles et disciplines nouvelles...

Or, les arbitrages de ce budget ont semblé à M. René Trégouët témoigner d'une stratégie de contournement des grands organismes de recherche, et d'une certaine défiance à leur égard.

La faible progression de leur dotation - il est vrai, a-t-il concédé, souvent importante en valeur absolue- contraste, en effet, avec la très grande augmentation des capacités d'intervention du ministère : + 35 %, par exemple, pour les autorisations de programme du fonds de la recherche technologique (FRT) et + 130 % pour les crédits de paiement du fonds national de la science (FNS).

Certes -a admis le rapporteur spécial- ce peut être un moyen de favoriser les jeunes chercheurs et les disciplines nouvelles, mais, sous prétexte de limiter l'influence des grands organismes, ne risque-t-on pas -s'est-il interrogé- une centralisation excessive de la politique de la recherche ?

Le problème de la façon dont sont instruites les décisions relevant du budget et de la politique de la recherche se trouve, ainsi, à ses yeux, posé.

La coexistence de plusieurs instances consultatives ou chargées d'évaluation -a poursuivi M. René Trégouët- sème la confusion :

- le Conseil national d'évaluation de la recherche (CNER) est réellement indépendant, mais doté de faibles moyens et intervient a posteriori ;

- le Conseil des très grands équipements, créé en 1988, a cessé d'exister en 1995 ;

- les membres du Conseil national de la science sont tous nommés par le Gouvernement.

Concernant les fonds d'intervention, FNS et FRT, dont l'affectation n'est pas déterminée à l'avance, le ministre a reconnu, lors de son audition par la commission le 19 octobre dernier, que leur contrôle, par le Parlement, était délicat et s'est engagé à tenir les commissaires informés de leur utilisation.

M. René Trégouët, rapporteur spécial, n'en a pas moins estimé nécessaire de se pencher sur le processus de prise des décisions de la politique de la recherche. Il a jugé anormal, notamment, qu'une décision aussi importante que l'abandon, malgré le soutien du Président de la République, du " projet Soleil ", soit présentée, au Parlement, comme irréversible.

En conclusion, M. René Trégouët, rapporteur spécial, a préconisé le rejet des crédits de la recherche et de la technologie.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est dit impressionné par la cohérence et la fermeté de l'intervention du rapporteur spécial et a approuvé, à titre personnel, sa proposition de rejet.

M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, a déclaré partager les appréciations du rapporteur spécial sur les insuffisances, les redondances, et l'opacité des mécanismes de l'évaluation de la recherche.

Il a affirmé déplorer lui aussi, l'insuffisance de crédits. Il s'est inquiété particulièrement du financement de la recherche sur les nouvelles technologies de l'information et de la communication, en raison du désengagement de France-Télécom depuis l'ouverture de ses activités à la concurrence.

Il s'est réjoui de l'augmentation du FNS et du FRT, de la création de postes d'accueil pour les étrangers et a vanté la politique menée par l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) en matière de créations d'entreprises et de mobilité des chercheurs.

Il a avoué comprendre la défiance du ministre à l'égard des grands organismes, sans approuver, pour autant, le manque de transparence des décisions les concernant.

M. Jacques-Richard Delong a regretté le confinement de la recherche scientifique à un cercle restreint de savants, et s'est interrogé sur les conditions d'une meilleure vulgarisation de ce qui touche le nucléaire.

M. Paul Loridant a déclaré partager entièrement les analyses du rapporteur spécial en ce qui concerne l'abandon du " projet Soleil " et a souligné son impact négatif sur le pôle scientifique et technologique d'Orsay. Il a évoqué les difficultés rencontrées par les jeunes docteurs pour trouver un emploi ainsi que les effets néfastes des restrictions apportées à l'accueil de chercheurs et étudiants étrangers par la loi  du 11 mai 1998 sur l'entrée et le séjour des étrangers en France et le droit d'asile.

En réponse aux différents intervenants, M. René Trégoüet, rapporteur spécial a tout d'abord manifesté son accord avec les observations du rapporteur pour avis. Il a observé que le parc scientifique de Palo Alto, en Californie, déposait à lui seul, plus de brevets que la totalité de la recherche publique française dont l'évolution devait être effectuée selon ce critère plus que d'après le nombre de publications scientifiques. Il a rappelé à M. Jacques-Richard Delong le rôle joué par l'OPECST (office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques) en matière d'information sur l'utilisation et la sécurité des installations nucléaires. Il s'est interrogé, à propos du synchrotron Diamond qui doit être implanté en Grande-Bretagne sur la nature juridique de l'accord liant les gouvernements français et britannique à une fondation scientifique anglaise de droit privé dépendant du groupe pharmaceutique " Wellcome ".

M. René Trégoüet, rapporteur spécial, s'est engagé vis-à-vis de M. Paul Loridant à interroger le ministre de la recherche sur la nocivité des effets sur les échanges de chercheurs, de la loi du 11 mai 1998.

Il a souligné, à ce propos, l'importance capitale de l'ouverture aux échanges internationaux de notre communauté scientifique, citant en exemple l'effet d'attraction exercé par les universités américaines sur les chercheurs du monde entier.

Enfin, il a observé que l'évolution démographique des effectifs de la recherche française offrait une occasion unique de rénover cette dernière.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la recherche et de la technologie.

Présidence de M. Roland du Luart, vice-président, puis de M. Alain Lambert, président.

PJLF POUR 2000 - BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE - EXAMEN DU RAPPORT

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Yvon Collin, rapporteur spécial sur les crédits consacrés, dans le projet de loi de finances pour 2000, au budget annexe de l'aviation civile.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial,
a indiqué que les crédits du budget annexe de l'aviation civile (BAAC) atteindraient 8.717,7 millions de francs, marquant une quasi-stabilisation par rapport à 1999 et que l'une des particularités du BAAC était d'être financé, pour une partie importante, par des redevances de navigation aérienne, mais aussi par l'affectation d'éléments de fiscalité et par l'emprunt, et de moins en moins par des subventions du budget général.

Il a alors observé que si le projet de BAAC pour 2000 faisait apparaître une certaine maîtrise des dépenses, en contraste avec des progressions annuelles de l'ordre de 5 % habituellement, cette maîtrise était pour une grande part apparente et s'expliquait pour beaucoup par une modification de la structure du budget annexe.

Il a précisé que le transfert réalisé, l'an dernier, d'un certain nombre des dépenses traditionnellement assurées par le BAAC à un compte d'affectation spéciale nouvellement créé, conformément aux recommandations traditionnelles de la commission des finances du Sénat, le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA), se poursuivait et s'amplifiait cette année.

Il a ajouté qu'un autre transfert de charges impliquait les aéroports eux-mêmes, l'instauration de la taxe d'aéroport, dont les modalités restent critiquables, allégeant les besoins du budget annexe de 79 millions de francs.

Il a alors expliqué que l'augmentation des crédits du BAAC, de 3 % hors événements exceptionnels, était principalement due au dynamisme des crédits de rémunération des personnels, dont l'augmentation, de 3,9 % cette année, est une constante du budget annexe.

Evoquant les dépenses en capital, il a estimé que leur réduction, de 2,1 %, était également apparente puisqu'elle venait du transfert au FIATA de charges d'équipement auparavant supportées par le BAAC et de la terminaison d'une opération immobilière exceptionnelle concernant le siège de la DGAC. Il a souligné la dérive des charges liées au remboursement de la dette du BAAC et leur progression de 21,4 %, après 33,8 % l'an dernier, estimant que cette situation correspondait à la dégradation passée de la situation financière du BAAC.

Il a rappelé que cette situation très préoccupante avait pu, l'an dernier, être contrebalancée par la baisse des investissements, mais que, comme il l'avait indiqué, cet équilibre n'avait pu être préservé, étant donné l'ampleur des programmes dans ce domaine.

Le rapporteur spécial s'est alors inquiété de la permanence des problèmes de financement que doit affronter le BAAC. Soulignant la fragilité du financement par redevances qui avait conduit les différents gouvernements à présenter plusieurs projets de validations législatives, il a indiqué combien les réserves formulées par la commission des finances, saisie pour avis, sur la dernière validation présentée l'année dernière, apparaissaient rétrospectivement justifiées. Rappelant que la commission n'avait accepté qu'avec beaucoup de réticence de donner son accord à cette validation, et qu'elle s'était refusée à souscrire à une extension du dispositif proposé au Sénat avec l'assentiment du Gouvernement, il a jugé que cette attitude était totalement légitimée par un fait nouveau important, au terme duquel le Président de la section du Rapport et des Etudes du Conseil d'Etat avait pu estimer la loi de validation en cause incompatible avec les stipulations de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Estimant qu'il fallait attendre la jurisprudence des tribunaux administratifs pour apprécier les conséquences de cette décision, il a indiqué qu'elle portait une sérieuse menace sur les finances du BAAC, que le projet de budget pour 2000 ne prenait toutefois pas en compte.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, s'est en revanche félicité que le transfert de certaines charges du BAAC au FIATA apporte une certaine sécurité juridique au budget annexe en prévenant l'imputation de charges régaliennes dans l'assiette des redevances et en desserrant la contrainte issue de la décision du Conseil Constitutionnel sur la loi de finances pour 1998, par laquelle celui-ci avait rappelé que le niveau des taxes affectées au budget annexe de l'aviation civile ne devait pas dépasser une certaine limite. Il a rappelé qu'au terme de cette jurisprudence, les responsables du BAAC avaient été contraints, faute de pouvoir financer des charges régaliennes en expansion à travers les redevances, à recourir de plus en plus à l'emprunt et que le transfert d'une partie des charges du BAAC au FIATA ou aux aéroports permettait maintenant de recourir à un financement par l'impôt, que le budget annexe n'autorisait pas.

Mais il s'est demandé si cette nouveauté serait de nature à purger entièrement les redevances de leurs vices cachés et a exprimé sa crainte, qu'à l'avenir, continue à se poser le problème de la conformité des redevances de navigation aérienne aux principes de droit qui en régissent l'usage.

Il a également regretté que les modalités du financement public des infrastructures du transport aérien soient devenues si complexes que leur opacité, déjà grande, s'en soit trouvé accrue.

Il a tout particulièrement critiqué les modalités de la taxe d'aéroport.

Puis, il a estimé que l'opacité pouvait être source d'abus, d'autant plus inquiétants que la fiscalité prélevée sur le transport aérien avait déjà augmenté de 47 % en trois ans entre 1995 et 1998. A ce propos, il a souligné que cette année, le transfert du BAAC, vers le FIATA et les aéroports, de charges importantes (256 millions de francs) aurait dû être l'occasion d'une réduction à due concurrence de la fiscalité affectée au budget annexe et a regretté qu'il n'en soit rien puisque le produit de la taxe d'aviation civile ne diminuait que de 21,1 millions de francs.

PJLF POUR 2000 - EQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT : III. - TRANSPORTS : 4. TRANSPORTS AÉRIENS ET MÉTÉOROLOGIE - EXAMEN DU RAPPORT

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a alors présenté ses conclusions sur les crédits de transport aérien et de météorologie, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.

S'agissant des crédits de transport aérien qui s'élèveraient, hors subventions versées au BAAC, à quelque 1,4 milliard de francs et seraient donc stabilisés, il a rappelé qu'il s'agissait du dispositif par lequel la France manifeste son soutien financier à son industrie aéronautique civile. Ayant indiqué que l'essentiel de ce soutien prenait la forme d'avances remboursables, pour 916 millions de francs, le reste, 504 millions de francs, étant constitué de crédits consacrés à des programmes de recherche, il a souligné deux faits notables : le provisionnement de moyens consacrés au développement de l'avion A3XX et le bilan très négatif ces dernières années du mécanisme d'avances remboursables pour l'industrie française, qui lui coûte plus qu'il ne lui apporte. Sur ce point, il a rappelé que les conclusions du rapport de la commission des finances du Sénat sur les soutiens publics à l'industrie aéronautique civile avait dénoncé cette faiblesse de notre système, remarqué que nos concurrents étaient beaucoup mieux traités et appelé à une réforme. Jugeant qu'on pouvait sans doute attendre de l'amélioration de la rentabilité d'exploitation du principal avionneur français, une réelle amélioration de sa compétitivité, il a estimé qu'il faudrait aussi veiller à ce que les impératifs financiers ne nuisent pas à son développement industriel, facteur évident de compétitivité. Il a alors noté que le Gouvernement qui, l'an dernier, avait justifié l'absence de crédits pour l'A3XX par l'absence d'un lancement de ce programme par Airbus n'avait plus ce scrupule cette année, jugeant qu'il fallait peut-être y voir la volonté d'adresser un message clair à un opérateur désormais privatisé. Il a estimé qu'il restait à vérifier que les crédits provisionnés pour l'A3XX soient effectivement utilisés et que l'on dépasse, en la matière, le simple effet d'annonce.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a alors demandé au rapporteur spécial quel était le sort réservé aux crédits d'avances remboursables lorsque les projets qui en justifiaient le provisionnement budgétaire ne voyaient pas le jour, se référant notamment à l'avion de 100 places sino-européen.

Puis, ayant souligné la permanence des problèmes posés par le BAAC, il s'est interrogé sur les moyens de sortir d'une situation où les redevances de navigation aérienne sont périodiquement annulées, et où l'endettement du budget annexe dépasse les standards financiers usuellement admis.

Il s'est félicité de l'attitude d'extrême réserve démontrée par la commission à l'occasion du dernier projet de loi de validation.

En réponse, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a précisé que sous réserve d'une vérification par cas d'espèce, l'abandon d'un projet soutenu par avances remboursables se traduisait par la perte des crédits consommés et par l'annulation des crédits figurant au budget à ce titre, des transferts pouvant par ailleurs intervenir.

Evoquant l'endettement du BAAC, il a ajouté que celui-ci s'expliquait largement par les contraintes de la formule du budget annexe qui pouvait avoir pour autre inconvénient connexe de forcer à des arbitrages sacrifiant l'investissement de capacités pour assumer les charges de remboursement de la dette.

M. René Ballayer a demandé des précisions sur les conditions du rapport de forces à l'occasion des négociations des protocoles sociaux triennaux.

M. Roland du Luart s'est inquiété de l'avenir du troisième aéroport de la région parisienne.

Mme Marie-Claude Beaudeau, ayant rappelé les nuisances sonores suscitées par le trafic aérien de l'aéroport Roissy Charles-de-Gaulle, a souhaité savoir si des crédits de recherche étaient prévus pour diminuer le bruit des moteurs.

M. Maurice Blin s'étant inquiété de la dégradation de la ponctualité et des tensions engendrées par la croissance du trafic, a souhaité connaître l'évolution des effectifs du contrôle aérien et les conditions de la coordination de la navigation aérienne en Europe.

En réponse, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a d'abord rappelé qu'une grève du contrôle aérien engendrait un coût si considérable pour les compagnies aériennes que, traditionnellement, les gouvernements étaient plus enclins à la conciliation qu'au conflit. Puis, il a précisé que l'extension des capacités aéroportuaires à Roissy avait reporté la question du troisième aéroport " sine die ". Il a confirmé qu'un des axes majeurs de la recherche effectuée par les motoristes était de réduire le bruit des propulseurs et que des crédits publics étaient prévus pour soutenir cet objectif. Enfin, ayant indiqué que le dernier protocole se traduisait par une augmentation des effectifs du contrôle aérien et regretté que le ciel européen reste mal unifié, il a annoncé son intention de mener, l'an prochain, une étude sur l'ensemble des questions posées par le contrôle aérien en France et en Europe.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de réserver sa position sur le budget annexe de l'aviation civile et sur les crédits du transport aérien et de la météorologie jusqu'à l'audition du ministre de l'équipement, des transports et du logement.

PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE - NOMINATION D'UN RAPPORTEUR POUR AVIS

Enfin, la commission a demandé à être saisie pour avis sur le projet de loi n° 40 (1999-2000) adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Elle a ensuite nommé M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de ce projet de loi.

JEUDI 4 NOVEMBRE 1999

- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF POUR 2000 - DÉFENSE : EXPOSÉ D'ENSEMBLE ET DÉPENSES EN CAPITAL ET ARTICLE 41 - EXAMEN DU RAPPORT

La commission a tout d'abord procédé à l'examen des crédits de la défense : exposé d'ensemble et dépenses en capital et article 41, sur le rapport de M. Maurice Blin, rapporteur spécial.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial,
a rappelé que depuis dix ans, date de la chute du mur de Berlin, les armées subissaient un profond bouleversement profond. Elles se préparaient alors à un conflit massif avec l'Union soviétique alors que la géostratégie leur impose maintenant de mener des opérations, ponctuelles et lointaines, où la technologie et le professionnalisme prennent une part majeure. Les armées françaises se sont depuis professionnalisées, celles de nos voisins ont suivi ou s'engagent sur la même voie.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a indiqué que le projet de budget de la défense pour 2000 s'élève à 241,8 milliards de francs et, hors pensions, à 187,4 milliards de francs. En francs courants, il est en réduction de 1,4 %, et en francs constants, de 2,2 %. Cette évolution est singulière au sein de l'ensemble des dépenses publiques, par ailleurs stables en francs constants.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a précisé que le déséquilibre entre le titre III et les titres V et VI continue de s'accroître. En effet, en francs courants, le titre III s'accroît de 0,5 % alors que les titres V et VI régressent de 3,6 %.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a précisé la mesure dans laquelle le ministère de la défense ne consomme pas les crédits de paiement des titres V et VI. En 1997, pour une loi de finances initiale de 88,7 milliards de francs, 76 milliards de francs seulement ont été consommés soit une sous-consommation de 12,7 milliards de francs. En 1998, par l'effet de " l'encoche ", la loi de finances initiale a été ramenée à 81 milliards de francs mais 69 milliards de francs seulement ont été consommés, soit une sous-consommation de 12 milliards de francs. En 1999, la loi de finances initiale se montait à 86 milliards de francs et il semble que la consommation des crédits ne dépassera guère 75 milliards de francs. La sous-consommation sera donc proche de 11 milliards de francs.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a alors présenté les titres V et VI du projet de budget pour 2000. Il a regretté que les crédits de paiement soient ramenés à 82,9 milliards de francs et exprimé la crainte que d'éventuels reports de crédits de 1999 sur l'année 2000 ne puissent atténuer les effets d'une telle réduction.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a fait part des leçons qu'il tirait de cette situation :

la sous-consommation de 10 % des crédits aboutit à une perte moyenne de 8 milliards de francs par an ;

- la loi de programmation militaire n'est pas respectée puisque 82,9 milliards de francs sont substitués à 86,7 milliards de francs, soit une perte de 4 % ;

- le décret d'avance du 2 septembre 1999 a opéré une ponction de 4 milliards de francs au profit du titre III.

M. Maurice Blin a rappelé qu'il avait souvent été dit par le passé que le titre V du budget du ministère de la défense constituait " une variable d'ajustement " du budget général. Il a regretté que cette situation perdure dans un contexte économique plus propice à la réduction spontanée des déficits publics.

Il a précisé que, à l'exception de la gendarmerie, les crédits des titres V et VI de toutes les composantes du ministère de la défense étaient en réduction, en moyenne de 4,9 %. Il a ajouté en outre, qu'en infraction formelle à la règle posée par la loi de programmation militaire, des crédits continuaient à être versés au " budget civil de recherche et de développement " (BCRD) : en 1997, 2 milliards de francs ; en 1998, 0,5 milliard de francs ; en 1999, 0,9 milliard de francs et, en 2000, 1,5 milliard de francs.

Le rapporteur spécial a regretté de ne pouvoir mesurer précisément l'évolution des crédits de recherche du ministère de la défense.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a présenté les principaux programmes d'équipement des armées. Il a indiqué que les crédits du secteur nucléaire diminuaient dans la même proportion que les crédits du titre V et que la moitié d'entre eux était destinée à la composante océanique. Il a rappelé que l'objectif était de constituer une flotte de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération (SNLE-NG), le troisième devant être admis au service actif en 2004 et le quatrième en 2008. En outre, le missile M 45 sera remplacé par le missile M 51. Enfin, pour le programme de simulation qui doit remplacer les essais nucléaires, il a noté que les crédits étaient en régression de 3,5 %.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a regretté la situation dans laquelle se trouve le domaine spatial dont les crédits sont en repli de 15,25 %. L'abandon du programme de satellite Horus, à la suite de la défection de la partie allemande, et celui du programme Trimilsatcom, à la suite de l'abandon de la partie britannique, expliquent cette chute regrettable des crédits. Il semble que les pays européens n'aient pas tiré la leçon de leurs difficultés en matière de renseignement lors des opérations du Kosovo.

M. Maurice Blin a rappelé que la cible de 406 chars Leclerc était maintenue et que les livraisons de ce blindé seront de 22 en 2000, et les commandes de 44. L'hélicoptère de combat Tigre, construit par la société Eurocopter, a fait l'objet d'une première commande en 1999 partagée avec l'Allemagne (80 hélicoptères pour chaque pays). La situation de l'hélicoptère de transport et de lutte anti-sous-marine NH 90 est moins satisfaisante. Des doutes existent sur le financement de cet appareil qui doit équiper les armées française, allemande, italienne et néerlandaise. Pour la marine, il a noté le nouveau retard de la mise en service du porte-avions Charles de Gaulle en raison, notamment, des difficultés liées à la durée de sa construction. Trois avions Rafale de série équiperont la marine en 2000. La construction d'un second porte-avions ne figure pas dans l'actuelle loi de programmation militaire et il faudra attendre 2003, première année de la future loi de programmation militaire, pour connaître la décision portant sur la construction d'un second porte-avions. Pourra-t-on construire en même temps des frégates et un second porte-avions ? Ce bâtiment peut-il être réalisé en coopération avec les Britanniques ? Une première frégate Horizon sera commandée en 2000. Elle aurait dû l'être en 1998 mais la défection britannique l'a retardée. En revanche, le système d'arme principal sera construit en commun avec la Grande-Bretagne et l'Italie. L'armée de l'air ne bénéficiera d'aucune commande d'avion en 2000 et le premier escadron de Rafale ne sera constitué qu'en 2005 alors que la conception de cet avion remonte à une vingtaine d'années et que des réductions de coût sont imposées à l'industriel. Les avions de transport Transall français sont usés. Leur coût d'entretien augmente chaque année de 10 %. La loi de programmation militaire indique que " l'avion de transport futur " (ATF) fera l'objet d'une première commande en 2002, dernière année de la loi de programmation militaire actuelle. Une dotation de 614 millions de francs figure pour ce programme dans le projet de budget pour 2000. Les offres déposées en janvier 1999 par Boeing-Lockheed, Airbus et Antonov n'ont pas encore été dépouillées. Airbus a fait savoir que ce programme ne pouvait être lancé que si la commande était supérieure à 280 avions. En raison des divergences qui existent entre les sept pays associés à ce programme, sa réussite n'est en rien assurée. Le général Kelche, chef d'état-major des armées, a rappelé devant la commission de la défense de l'Assemblée nationale que le projet de budget 2000 ne prévoyait aucun financement pour quatre programmes majeurs : le missile M 51, l'hélicoptère NH 90, l'avion de transport futur et le véhicule blindé de combat de l'infanterie. Un financement intervenant au cours de l'année 2000 pour l'un ou plusieurs de ces programmes paraît très aléatoire.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a ensuite exprimé son avis sur la situation de l'industrie française d'armement. Elle emploie 250.000 salariés et 40 % de son chiffre d'affaires viennent des exportations. Elle est en mutation : les équipements lourds sont remplacés progressivement par ceux qui sont nécessaires à l'acquisition du renseignement et à la projection des forces. Les industriels français livrent du matériel sophistiqué, de haute qualité, mais coûteux. Or, l'exigence de réduire les coûts s'impose partout. Le prix d'acquisition des armes devient dorénavant un critère de choix déterminant. Les Etats-Unis ont indiqué qu'il en serait ainsi pour le choix de leur futur avion de combat le Joint Strike fighter (JSF) qui doit être produit à 3.000 exemplaires pour les seuls besoins américains.

M. Maurice Blin a exprimé son inquiétude pour GIAT-Industries et la direction des constructions navales. Depuis 1996, GIAT-Industries a bénéficié de recapitalisations d'un montant de 17,4 milliards de francs. Mais dans quelles conditions la société pourra-t-elle exporter le char Leclerc en Arabie Saoudite ? La production d'armes légères et de munitions est soumise à une concurrence redoutable. Il semble, par ailleurs, que la société ne soit pas véritablement associée au projet de fabrication du " véhicule blindé de combat de l'infanterie " (VBCI) qui devrait pourtant représenter un chiffre d'affaires, en Europe, de 90 milliards de francs. L'entente avec la société britannique Vickers paraît sans lendemain, celle-ci étant sur le point de se rapprocher d'entreprises sud-africaine et suisse. Le char Leclerc est soumis à la concurrence du char britannique Challenger et surtout à celle du char allemand Léopard II. Ainsi, la société GIAT-Industries est non seulement en situation difficile mais risque d'être bientôt isolée.

En ce qui concerne la direction des constructions navales, ni la qualité de son personnel, ni ses compétences ne sont discutables, mais le coût de ses fournitures est trop élevé. Le ministre de la défense s'est engagé dans une réforme de cette direction, mais il n'est pas certain que sa transformation en " service à compétence nationale " puisse conduire à une véritable amélioration. Un rapport de M. Jean-Yves Le Drian, député de Lorient, met en relief les insuffisances de cette réforme. La constitution d'un " établissement public à caractère industriel et commercial " qui aurait noué des liens avec Thomson-CSF semble préférable à ce parlementaire.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a déclaré que le choix des industriels britanniques serait déterminant pour l'avenir de l'industrie d'armement européenne. En effet, ceux-ci ont des intérêts à la fois aux Etats-Unis et en Europe.

A l'issue de cet exposé, et en raison des insuffisances et des incertitudes touchant le projet de budget de la défense pour 2000, M. Maurice Blin a recommandé, avec regret, le rejet des titres V et VI.

M. François Trucy, rapporteur spécial des crédits du titre III, s'est interrogé sur la proposition d'un député de renoncer à la construction du quatrième sous-marin nucléaire lanceur d'engins au profit d'un second porte-avions. Il s'est demandé si le titre V n'était pas devenu purement et simplement la " variable d'ajustement " du budget de la défense pour permettre notamment de financer le coût des opérations extérieures. Il en veut pour preuve les gels et les annulations de crédits, qui ne portent que sur le titre V.

M. Denis Badré a indiqué qu'il partageait les conclusions de M. Maurice Blin, rapporteur spécial. Il s'est demandé s'il était possible d'établir une relation entre un sous-marin nucléaire lanceur d'engins et un porte-avions. Il a estimé qu'il était nécessaire d'approfondir la question du second porte-avions. Il a regretté que pour appliquer une loi de programmation qui donne priorité à la mission de projection, c'est-à-dire au renseignement et aux transports, aucun financement véritable de ces deux domaines ne figure dans la loi de finances. Il a également fait observer que la diminution des crédits de recherche militaire ne serait pas sans conséquences sur les progrès scientifiques à venir. Il s'est interrogé sur la possibilité de préparer une véritable Europe de défense alors que les programmes aussi importants que Horus, Trimilsatcom et Horizon n'ont pu être conduits à terme. Il a enfin demandé quel était le coût des opérations du Kosovo.

M. André Vallet a fait part de ses observations sur une " journée d'appel à la préparation de défense " à laquelle il a participé. Il y a rencontré des jeunes gens pour qui une telle journée ne paraissait présenter aucun intérêt et des officiers, requis un samedi, qui paraissaient très désabusés par l'auditoire auquel ils s'adressaient. Il lui est apparu que cette journée était un gâchis et a demandé à en connaître le coût.

Mme Marie-Claude Beaudeau a souhaité connaître les conséquences de la réduction de plus de trois milliards de francs des crédits d'équipement des armées. Elle a demandé également quel était le degré de réalisation du programme d'élimination des mines antipersonnel : quel est notamment le nombre de mines antipersonnel qui restent à éliminer, quels crédits sont consacrés à cette opération, ces crédits incluent-ils l'aide qui doit être apportée aux pays devant mener des actions de déminage ?

En réponse à M. François Trucy, M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a indiqué qu'il n'y avait guère de points de comparaison entre le sous-marin nucléaire lanceur d'engins et un porte-avions si ce n'est, approximativement, un coût comparable. Il a confirmé que le titre V était effectivement devenu la " variable d'ajustement " du budget de la défense et, donc, du budget général.

En réponse à Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Maurice Blin a précisé que les réductions de crédits avaient pour conséquence des retards dans la conduite des programmes, ou même des abandons de programmes. Dans ces conditions, elles ne sont pas sans conséquences sur l'emploi dans l'industrie d'armement.

En réponse à M. Denis Badré, M. Maurice Blin a confirmé que la mission de projection ne pouvait être correctement remplie sans moyens de renseignement ni de transports adaptés. Il a également précisé que les crédits de défense des Etats-Unis étaient deux fois supérieurs à l'ensemble des crédits de défense européens. Or, aux Etats-Unis, les crédits de recherche sont proportionnellement plus importants qu'en Europe. Le risque est donc très important que ne se creuse un véritable fossé dans l'évolution des forces entre les deux rives de l'Atlantique.

En réponse à M. André Vallet, le rapporteur spécial a indiqué qu'il était effectivement nécessaire de dresser un premier bilan des journées d'appel de préparation à la défense. Il lui a semblé difficile de retenir l'intérêt des jeunes gens pendant toute une journée s'ils n'ont pas reçu préalablement une longue préparation à l'école dans ce domaine.

A Mme Marie-Claude Beaudeau, il a indiqué qu'il rassemblerait les données relatives à la destruction des mines antipersonnel.

PJLF POUR 2000 - DÉFENSE : DÉPENSES ORDINAIRES ET ARTICLE 40 - EXAMEN DU RAPPORT

La commission a ensuite procédé à l'examen des crédits de la défense : dépenses ordinaires (titre III), sur le rapport de M. François Trucy, rapporteur spécial.

M. François Trucy, rapporteur spécial,
a tout d'abord indiqué que le projet de budget pour le titre III s'élevait à 104,5 milliards de francs soit 55,7 % du budget de la défense. En francs courants, l'augmentation est de 0,5 %, mais, en francs constants, la réduction est de 0,4 %. Les crédits de rémunérations et de charges sociales continuent à progresser à l'intérieur du titre III puisqu'ils en représentent 80,1 %.

Les réductions d'effectifs portent essentiellement sur les appelés. L'apport au ministère de la défense du personnel civil du secrétariat d'Etat aux anciens combattants masque la suppression de 377 emplois pour le personnel civil.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a précisé que l'ensemble des aides au départ et à la mobilité du personnel représentait près de 2 milliards de francs dont 830 millions de francs consacrés aux pécules. Le montant des crédits de fonctionnement, 20,8 milliards de francs, est en diminution de 1,4 %. Malgré les économies dues aux restructurations le montant de ces crédits ne permet pas aux armées de retrouver des taux d'activité et d'entraînement satisfaisants.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a souligné que la loi de programmation militaire avait pour objectif de professionnaliser les armées. Or, elles sont en sous-effectif de personnel civil et d'appelés et des militaires soustraits aux unités combattantes doivent être affectés à ces emplois vacants. Certains engagés expriment dès maintenant leur mécontentement sur ce point à l'occasion de tables rondes. Cette situation nuit à la professionnalisation et à la qualité de l'outil militaire.

En conclusion, M. François Trucy, rapporteur spécial, a déclaré que les armées ne bénéficiaient pas de l'amélioration des finances de l'Etat et qu'il recommandait également le rejet du titre III du projet de budget du ministère de la défense pour 2000.

M. Maurice Blin, rapporteur spécial, a fait mention d'informations récentes sur l'évolution du prochain budget de la défense des Etats-Unis : son montant augmente globalement de 7 %, celui des commandes de l'armée de terre, de 8 %, et celui des commandes de la marine, de 12 %. Il s'est en outre interrogé sur la coordination qui pouvait exister entre armées européennes en matière de professionnalisation et sur les causes du déficit en appelés.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a indiqué qu'il ne paraissait pas exister de concertation entre armées européennes pour la professionnalisation. Il semble qu'en Belgique l'opération se soit déroulée dans des délais trop brefs pour ne pas donner lieu à quelques difficultés et, qu'en Espagne, elle ne fasse que commencer. En ce qui concerne le nombre d'appelés, le sous-effectif paraît résulter des reports d'incorporation qui sont accordés, sous certaines conditions, aux jeunes gens titulaires de contrats de travail à durée indéterminée ou déterminée.

A l'issue de ces examens, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la Défense (articles 40 et 41 du projet de loi de finances pour 2000).

PJLF POUR 2000 - INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION : - SÉCURITÉ - EXAMEN DU RAPPORT

Puis la commission a procédé sur le rapport de M. André Vallet, rapporteur spécial, à l'examen des crédits de la sécurité inscrits au budget du ministère de l'intérieur pour 2000.

M. André Vallet, rapporteur spécial, a tout d'abord brièvement rappelé les principales données chiffrées qui caractérisent ce budget consacré, pour plus de la moitié de ses dépenses, au financement des actions de la police et de la sécurité civile et, pour le restant, à celui des services de l'administration centrale et territoriale.

Les crédits augmentent globalement de 1,5 milliard de francs soit environ 3 %, passant de 53,2 à 54,7 milliards de francs. Ce budget connaît deux évolutions particulières dont les conséquences s'annulent à peu de choses près. Il s'agit d'une part d'une diminution de crédits de 529,7 millions de francs, au chapitre 37-61, du fait de l'absence d'échéances électorales nationales en l'an 2000, d'autre part, d'une augmentation presque équivalente de 526,5 millions de francs liée à la création d'un nouveau chapitre 41-61, destiné au financement des partis politiques et alimenté par un transfert en provenance des charges communes.

Trente milliards de francs en l'an 2000 iront à la police, 17 milliards à l'administration générale, dont 13,9 milliards pour les pensions et allocations servies à l'ensemble des personnels du ministère, 6,5 milliards à l'administration territoriale, 1,3 milliard enfin à la sécurité civile.

Les dépenses de personnel -a rappelé le rapporteur spécial- représentent 80 % de ce budget et les dépenses ordinaires, y compris le fonctionnement, sa presque totalité, soit 96,9 %.

Néanmoins, les dépenses en capital, en valeur absolue, dépassent les 1,5 milliard de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement. La sécurité civile fait figure d'exception, puisque la part des dépenses de personnel y est inférieure à 30 %, l'équipement et la maintenance des moyens aériens de lutte contre les incendies y occupant une place importante.

Le taux d'augmentation de ce budget est trois fois supérieur à celui du budget général et il permet, grâce à une bonne maîtrise de ses dépenses de reconduction, de consacrer 600 millions de francs au financement de mesures nouvelles.

La police -a rappelé M. André Vallet- va subir, dans les cinq prochaines années, une véritable hémorragie de ses effectifs, dont le quart (soit 24.400 personnes), doit partir en retraite.

Diverses mesures ont été prévues pour faire face à cette situation : augmentation des recrutements dans les écoles de police, " repyramidage " des corps (déflation au sommet au profit d'un étoffement à la base), redéploiements et fixation d'unités mobiles dans les zones sensibles, suppression de tâches indues et aménagements horaires tendant à améliorer la disponibilité des forces de l'ordre sur le terrain, embauche, enfin, de 20.000 adjoints de sécurité (qui compensera la disparition, par suite de la professionnalisation des armées, des auxiliaires de police appelés du contingent).

M. André Vallet, rapporteur spécial, a alors fait part à la commission de ses observations concernant non seulement l'évolution des crédits, mais aussi le fonctionnement des services de police et de sécurité civile.

Concernant les départs anticipés à la retraite, il a observé que leur nombre important était lié à la facilité de trouver un emploi pour d'anciens policiers à l'âge de 51 ans, ainsi qu'à la crainte d'une évolution ultérieure défavorable des régimes de retraite pour des raisons démographiques.

Il a ensuite évoqué les problèmes de la délinquance informatique, d'autant plus difficile à combattre que les rémunérations proposées, par la police, aux spécialistes sollicités, sont insuffisantes pour empêcher les meilleurs d'entre eux de rechercher une situation plus rémunératrice dans le secteur privé, au terme de leur contrat. A l'étranger, des systèmes différents permettent de retenir les experts les plus compétents.

Concernant la sécurité civile, M. André Vallet, rapporteur spécial, a mentionné les problèmes posés par les disparités entre différents corps d'origine des pompiers professionnels, les exigences de ces derniers et le coût de la départementalisation des services d'incendie et de secours. Il s'est également inquiété des difficultés rencontrées dans l'utilisation des nouveaux Canadairs, dont le manque de fiabilité provoque des protestations de la part des pilotes et constitue une source permanente de contentieux.

Concernant les catastrophes naturelles, il a souligné les dangers liés à l'urbanisation considérable des zones à risques. Des mesures de prévention au niveau de la délivrance des permis de construire n'ont commencé à être prises que depuis une dizaine d'années.

L'augmentation de la délinquance des mineurs lui a semblé un problème à la fois très préoccupant et mal traité, du fait, notamment, de divergences entre la police et la justice.

L'impunité dont semblent jouir les mineurs auteurs d'infractions, parfois graves, trouble profondément la police et la population.

Il importe également, pour le rapporteur spécial, d'améliorer l'accueil du public dans les locaux de la police, ainsi que les relations entre les commissaires et les élus en vue d'une meilleure information et d'une collaboration plus fructueuse entre eux.

Enfin, le déploiement du réseau numérique crypté de communication de la police dénommé ACROPOL dont l'achèvement n'est prévu qu'en 2008, lui a semblé beaucoup trop lent. M. André Vallet, rapporteur spécial, a cité l'exemple de la Corse où il est très aisé d'écouter les conversations des membres des forces de l'ordre.

Au terme de l'exposé du rapporteur spécial, M. Alain Lambert, président, a demandé à ce dernier de préciser, dans son rapport écrit, s'il pouvait être procédé à une planification précise des besoins en effectifs de policiers et de leurs conséquences financières en vue d'anticiper les mesures nécessaires plutôt que d'être contraints à l'improvisation sous la pression du court terme.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de réserver son vote sur l'ensemble formé des crédits de la sécurité et de la décentralisation jusqu'à une réunion ultérieure.

NOMINATION DE RAPPORTEUR

La commission a ensuite désigné M. Jacques Chaumont rapporteur duprojet de loi n° 26 (1999-2000), autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Arménie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).