Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Alain Lambert, président, puis de M. Jacques Oudin, vice-président

PJLF pour 2002 - Audition de M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur

La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, sur les crédits de son département ministériel, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2002.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a souligné que cette audition venait au lendemain du vote des crédits de son ministère par l'Assemblée nationale. Il a affirmé que le Gouvernement entendait améliorer les moyens et l'efficacité de la police nationale en recourant à des instruments législatifs, politiques et budgétaires. Sur le plan législatif, il a rappelé la récente adoption de la loi sur la sécurité quotidienne. Sur le plan politique, il a annoncé que le Premier ministre avait demandé l'élaboration d'une « démarche stratégique pour la police nationale » avec, notamment, des travaux visant à tracer les perspectives sur cinq ans en matière de sécurité et d'évolution de la police nationale. Il a indiqué que, sans attendre l'achèvement de ces travaux, qui devrait intervenir pour la fin de l'année 2001, il avait proposé au Premier ministre un plan d'action renforcée contre la violence, qui poursuivait quatre objectifs : le renforcement de la présence policière sur le terrain, le renforcement de la protection des personnels de police - notamment par l'équipement de tous les policiers affectés sur la voie publique d'un gilet pare-balles individuel -, la compensation des charges de travail et des risques encourus par les personnels de police, et le renforcement des mesures de lutte contre la délinquance. Sur le plan budgétaire, il a annoncé que les dispositions concernées figureraient dans le projet de loi de finances pour 2002 et dans la loi de finances rectificative pour 2001, soumise prochainement à l'examen du Sénat.

Il a considéré que le budget du ministère de l'intérieur pour l'année 2002 augmentait fortement par rapport à ceux des années antérieures. Il a indiqué que la partie strictement régalienne du budget de l'intérieur, c'est-à-dire l'ensemble des crédits hormis les dotations aux collectivités locales et les crédits pour les élections, atteignait pour la première fois 60 milliards de francs (9,16 milliards d'euros), soit une hausse de 3,5 %, contre 2,4 % pour l'année 2001. Il a précisé que si l'on ajoutait les crédits nécessaires pour les élections, on obtenait une hausse de 4,4 %. Il a affirmé qu'en 2002, le ministère de l'intérieur bénéficierait ainsi de capacités nouvelles d'engagement financier d'un montant de plus de 472 millions d'euros (3 milliards de francs) par rapport à l'année 2001. Il a ajouté que l'année 2002 permettrait d'engager un recrutement massif de policiers et de rompre avec un long mouvement de baisse des emplois de l'administration centrale et des préfectures. Il a précisé qu'en 2002, le ministère compterait au total près de 190.000 emplois.

M. Daniel Vaillant a ensuite estimé que le budget du ministère de l'intérieur pour l'année 2002 accordait la priorité à la police nationale et à la sécurité de proximité. Il a indiqué que les crédits accordés à la police nationale dépasseraient, pour la première fois, 33 milliards de francs (5 milliards d'euros), soit une capacité d'engagement financier en hausse de 4,5 % par rapport à l'année 2001, et que 3.000 nouveaux emplois seraient créés, dont 2.700 concernant les personnels actifs et 300 concernant les personnels administratifs et techniques. Il a affirmé que ces créations d'emplois étaient sans équivalent depuis le budget pour l'année 1983. Il a indiqué que depuis 1997, 5.200 emplois supplémentaires de gardiens de la paix auraient été créés, auxquels il fallait ajouter 20.000 postes d'adjoints de sécurité, pérennisés en 2001, et 1.100 emplois administratifs. Il a déclaré qu'en 2002, 361 millions de francs de mesures catégorielles étaient également prévus pour reconnaître la spécificité du métier de policier et poursuivre la réforme du régime indemnitaire des gardiens de la paix, portant le coût total de cette réforme à 180 millions de francs sur deux ans. Il a annoncé que le rôle des officiers de police, dans le cadre notamment de la police de proximité, serait valorisé, que le déroulement de carrière des commissaires de police serait facilité et que les personnels administratifs et techniques de police bénéficieraient d'une mesure catégorielle significative. Il a indiqué que les mesures catégorielles avaient également été évaluées pour permettre la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans la police.

Le ministre a annoncé que les crédits de fonctionnement de la police nationale seraient également accrus, avec une mesure nouvelle de 150 millions de francs pour la police de proximité, et que depuis 1997, les moyens de fonctionnement de la police nationale, qui avaient dépassé en 2001 le seuil de 4 milliards de francs, avaient progressé de plus de 15 %. Il a ajouté que les capacités d'investissement pour l'informatique et les transmissions comme pour l'immobilier de la police seraient maintenues, avec plus de 1,4 milliard de francs supplémentaires en 2002. Il a affirmé que l'effort de rénovation du parc immobilier s'amplifiait également, tout comme le développement des antennes de proximité. Enfin, il a souligné que les crédits pour le logement social des policiers augmenteraient de 60 %, avec 80 millions de francs inscrits en 2002.

Il a considéré qu'au total, ce projet de budget de la police nationale n'était comparable qu'au « Plan Joxe » lancé en 1985 et exécuté les années suivantes.

S'agissant de la politique du personnel, il a indiqué que le Gouvernement avait décidé de stabiliser les emplois des préfectures et de l'administration centrale en 2002, et d'engager une gestion plus active du personnel des préfectures. Il a annoncé qu'un accord devait être signé le 14 novembre 2001 avec les personnels sur ce sujet.

Il a indiqué que le projet de loi de finances prévoyait près de 125 millions de francs de mesures catégorielles pour les personnels placés sous l'autorité du directeur général de l'administration. Il a précisé que les personnels des préfectures bénéficieraient à eux seuls de plus de 100 millions de francs de mesures catégorielles, soit trois fois plus qu'en 2001, et presque sept fois plus qu'en 2000.

Au sujet de la modernisation des procédures de gestion, le ministre a mentionné que ce projet de loi de finances permettait de poursuivre l'expérience de globalisation des crédits des préfectures, lancée pour trois ans en 2000 et dont l'évaluation serait conduite au cours de l'année 2002. Il a annoncé qu'en 2002, le champ de la globalisation s'étendrait à quatre nouvelles préfectures : le Calvados, l'Oise, la Haute-Vienne et l'Yonne. Il a estimé que la loi de finances pour 2002 crédibilisait de façon décisive la démarche de simplification des tâches et de renforcement des moyens d'intervention des préfectures qu'il avait annoncée le 23 novembre 2000 à Lyon devant les représentants des préfectures.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a ensuite souligné que ce projet de budget visait également à renforcer les moyens de la sécurité civile, dont les crédits de fonctionnement devaient augmenter en 2002 pour atteindre 3,2 millions d'euros (209 millions de francs). Il a indiqué que ces nouveaux moyens concernaient, notamment, le service de déminage, le plan de traitement des munitions anciennes et la brigade des sapeurs pompiers de Paris. Il a précisé que le renforcement du rôle de la sécurité civile dans le cadre du dispositif mis en place par le Gouvernement à la suite des attentats du 11 septembre 2001 ferait l'objet de dispositions de la loi de finances rectificative de décembre 2001.

Abordant ensuite la question des relations financières de l'Etat avec les collectivités territoriales, le ministre de l'intérieur a affirmé l'engagement constant du Gouvernement d'établir entre l'État et les collectivités des relations financières permettant à ces dernières de bénéficier des fruits de la croissance et de la garantie d'une évolution régulière de leurs ressources. Il a estimé que cet engagement s'exprimait aujourd'hui dans la demande que lui avait faite le Premier ministre, ainsi qu'à M. Laurent Fabius, de lui remettre un rapport sur la réforme des ressources des collectivités locales, ainsi que dans le projet de loi de finances pour 2002.

Il a considéré que trois traits principaux caractérisaient ce projet de budget. Il a jugé qu'il confirmait l'engagement pris par le Premier ministre de prolonger en 2002 le contrat de croissance et de solidarité. Il a indiqué que, tout comme en 2001, le produit intérieur brut serait pris en compte dans l'indice d'évolution à hauteur de 33 %. Il a ajouté que les concours financiers de l'Etat aux collectivités locales dits « actifs » connaîtraient une augmentation théorique de 2,26 %, mais que, du fait des différents abondements de l'Etat, le taux de croissance réel de l'enveloppe normée serait de 2,9 %. Il a précisé que le montant total de ces crédits s'établirait ainsi à 28,7 milliards d'euros (188,3 milliards de francs), c'est-à-dire 5,3 milliards de francs de plus qu'en 2001.

Il a considéré que les collectivités locales avaient disposé au total de plus de 6,7 milliards de francs supplémentaires sur la durée de ce contrat, en comparaison des sommes qu'elles auraient perçues en application des règles de l'ancien pacte de stabilité, adopté en 1996. Il a ajouté que la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation spéciale instituteurs, la dotation élu local et la dotation générale de décentralisation connaîtraient une croissance de 4,07 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002. Il a précisé qu'il s'agissait, dans le cas de la DGF, du taux de progression le plus important depuis 1993. Il a considéré que toutes les communes percevraient ainsi une dotation forfaitaire en progression d'au moins 2 % par rapport à l'année 2001.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a ensuite affirmé que le deuxième objectif du Gouvernement était la pérennisation du financement de l'intercommunalité. Il a indiqué que, du fait de l'extinction du dispositif d'alimentation légale de la dotation des communautés d'agglomération, et de la baisse de la DCTP qui avait pu en résulter pour certaines collectivités, le Gouvernement avait souhaité pérenniser et simplifier ce financement en intégrant la dotation des communautés d'agglomération au sein de la dotation globale de fonctionnement. Il a précisé que la dotation d'aménagement ferait l'objet d'un versement d'un peu plus de 309 millions d'euros, correspondant au montant réservé en 2001 pour assurer le financement de la DGF des communautés d'agglomération.

Abordant le troisième objectif du Gouvernement, le ministre a affirmé que le Gouvernement souhaitait l'accroissement de la péréquation. Il a souligné que les dotations de solidarité communales, dotation de solidarité rurale (DSR) et dotation de solidarité urbaine (DSU) bénéficieraient de majorations exceptionnelles, respectivement de 22,6 millions d'euros (150 millions de francs) et de 122 millions d'euros (800 millions de francs). Il a ajouté que la DSR et la DSU progresseraient ainsi de l'ordre de 5 % , sous réserve des choix du comité des finances locales de janvier 2002, et que ces deux dotations auraient donc connu des progressions respectives de plus de 60 % et de plus de 80 % depuis 1997. Il a indiqué que la dotation de compensation de taxe professionnelle n'évoluerait en 2002 qu'en fonction de son rôle de variable d'ajustement du contrat de croissance et de solidarité, et connaîtrait ainsi une diminution de 6,9 %, ramenée à 2,43 %, du fait d'un abondement spécifique lié au règlement du contentieux après l'arrêt « Commune de Pantin ». Il a ajouté que les dotations globales d'équipement (DGE) connaîtraient une croissance de 1,7 % en fonction de l'évolution attendue de la formation brute de capital fixe, de même que la dotation régionale d'équipement scolaire et la dotation départementale d'équipement des collèges.

A l'issue de cet exposé, M. Michel Mercier, rapporteur spécial des crédits de la décentralisation, a relevé que le ministre de l'intérieur était très satisfait de son budget pour 2002, et s'est demandé si les collectivités locales le seraient autant lorsqu'elles élaboreraient le leur. Il a estimé que l'évolution des collectivités locales devait être examinée au regard de celle des dépenses nouvelles qui leur sont imposées par l'Etat. Il a demandé au ministre quel serait le coût pour les budgets locaux des mesures intervenues depuis 1998 en matière de traitement des agents de la fonction publique, de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie et de la réforme de la filière des sapeurs-pompiers professionnels.

Après avoir détaillé le contenu des mesures intervenues depuis 1998 en matière de revalorisation des traitements des agents de la fonction publique, M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a indiqué que le coût, en année pleine, du protocole du 10 février 1998 s'élevait à 8,91 milliards de francs, dont 2,19 milliards de francs pour l'année 1998, 3,72 milliards de francs pour l'année 1999 et 3 milliards de francs pour l'année 2000.

S'agissant des mesures intervenues entre 2000 et 2002, il a évalué leur incidence en année pleine à 5,96 milliards de francs, dont 0,09 milliard de francs pour l'année 2000, 2,97 milliards de francs pour l'année 2001 et 2,89 milliards de francs pour l'année 2002. Au total, il a chiffré à 14,8 milliards de francs l'augmentation en cinq ans du coût pour les collectivités locales des traitements des agents de la fonction publique territoriale résultant des mesures intervenues au cours de cette période.

M. Daniel Vaillant a rappelé que le Gouvernement estimait le coût total de l'allocation personnalisée d'autonomie à 16,4 milliards de francs pour ses deux premières années d'application et à 23 milliards de francs en régime de croisière. Il a indiqué que les départements prendraient en charge 10,7 milliards de francs et que le surcoût par rapport aux dépenses liées à la prestation spécifique dépendance s'établirait à 5,2 milliards de francs. Il a noté que ce surcoût serait en partie compensé par des économies en matière d'aide sociale à l'hébergement. Il a rappelé que le Gouvernement s'était engagé à réaliser un bilan d'étape de la mise en oeuvre de l'allocation personnalisée d'autonomie à la fin de l'année 2002, un an avant le bilan prévu par la loi, qui doit intervenir à la fin de l'année 2003.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a indiqué que le coût de la réforme statutaire de la filière des sapeurs-pompiers volontaires était évalué à 300 millions de francs en cinq ans.

M. Alain Lambert, président, a alors souligné que les citoyens pouvaient s'interroger sur la logique en vertu de laquelle le coût de politiques décidées par le Gouvernement pouvait avoir des incidences sur l'évolution de leurs impôts locaux.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a fait part de son sentiment selon lequel les dépenses nouvelles imposées par le Gouvernement étaient supérieures à l'augmentation des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales, ce qui ne manquerait pas de se traduire par un accroissement de la pression fiscale locale.

Il a demandé au ministre de l'intérieur son sentiment sur les conséquences de la conjonction de la réduction de l'assiette de la taxe professionnelle du fait de la disparition de la fraction de celle-ci reposant sur les salaires et des règles en matière de liaison des taux. Il a indiqué que, dans son département, une augmentation de 10 % du produit de la fiscalité directe locale, rendue nécessaire par la nécessité de financer l'allocation personnalisée d'autonomie, se traduisait par une augmentation de 20 % du taux de la taxe d'habitation et de 3,4 % du taux de la taxe professionnelle. Il a regretté qu'une réforme voulue par le Gouvernement conduise à accroître la pression fiscale sur les ménages.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a indiqué que la suppression de la part « salaires » de l'assiette de la taxe professionnelle avait été instaurée dans le cadre d'une politique d'aide fiscale aux entreprises et qu'il serait contradictoire d'envisager une « déliaison » des taux qui pourrait conduire à permettre d' augmenter les taux de la taxe professionnelle sans accroître autant que ne le prévoit le droit actuel ceux des autres impôts directs locaux.

M. Michel Mercier, rapporteur spécial, a relevé que les dotations de l'Etat aux collectivités locales connaissaient dans le projet de loi de finances pour 2002 une progression satisfaisante aux yeux du ministre, mais que l'une d'entre elles diminuait, la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Il a noté que, si le contrat de croissance et de solidarité n'existait pas, cette dotation progresserait elle aussi. Il a regretté que ce contrat soit reconduit en 2002 en retenant la même indexation qu'en 2001, alors qu'au cours des trois dernières années, l'indexation au titre d'une année avait toujours été plus favorable que celle de l'année précédente. Il a conclu que le seul objet du contrat de croissance et de solidarité était de réduire le montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle.

Le rapporteur spécial a déploré que le projet de loi de finances pour 2002 gèle le montant du prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle à son niveau de 2001, alors que la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale avait limité, aux seules années 2000 et 2001, la possibilité de recourir à la DCTP pour financer les communautés d'agglomération.

M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur, a considéré que personne n'éprouvait de la nostalgie vis-à-vis du pacte de stabilité de la période 1996-1998. Il s'est félicité que le contrat de croissance ait pu permettre de distribuer 5,3 milliards de francs supplémentaires aux collectivités locales et a signalé que les concours financiers de l'Etat aux collectivités locales étaient « cogérés » par le ministère de l'intérieur et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Alain Lambert, président, a qualifié d'exigence démocratique le respect du principe selon lequel celui qui décide d'une dépense doit en assumer la charge financière. Il a constaté que cette exigence n'était pas respectée aujourd'hui.

M. Roland du Luart a interrogé le ministre sur deux points :

- il existe 150 000 policiers en France ; le passage aux 35 heures revient à une diminution du temps de travail de 10 % ; est-ce que cela signifie qu'il y aura 15 000 policiers en moins sur le terrain à partir du 1er janvier 2002 ?

- dans le cadre de la réduction du temps de travail dans les collectivités locales, le ministre compte-t-il donner aux préfets des consignes de strict respect du forfait des 1 600 heures par an ?

M. Daniel Vaillant a indiqué, s'agissant du passage aux 35 heures dans la police nationale, que des négociations étaient engagées avec les syndicats depuis le 22 octobre dernier, le début tardif de ces pourparlers s'expliquant par le souci de chacun des partenaires de ne les ouvrir qu'après les élections professionnelles. Il a expliqué que le principe était que chaque policier devait bénéficier de la réduction du temps de travail et que cette dernière ne devait pas remettre en cause les acquis dont jouissent les policiers. Toutefois, il a exposé qu'il n'était pas non plus question d'altérer en quoi que ce soit la capacité opérationnelle de la police nationale pour cause de réduction du temps de travail. Il a énuméré les mesures prises dans le cadre du projet de loi de finances pour 2002, qui permettront, d'après lui, de faire en sorte qu'il y ait plus de policiers sur le terrain et que chacun d'entre eux travaille moins : 265 millions de francs de crédits indemnitaires et 3 000 créations d'emplois, sans compter les mesures nouvelles qui seront décidées dans le collectif budgétaire.

S'agissant de l'application des 35 heures dans les collectivités locales, le ministre de l'intérieur a répondu à M. Roland du Luart que des consignes très strictes avaient déjà été données aux préfets pour faire respecter la règle des 1 600 heures.

M. Yvon Collin s'est interrogé sur les mesures prises par le Gouvernement en matière de sécurité aérienne. Après avoir rappelé le traumatisme subi le 11 septembre dernier, et évoqué les mesures nouvelles contenues dans le projet de budget annexe de l'aviation civile pour 2002, il a demandé au ministre ce qu'il pensait faire pour améliorer le contrôle des personnes circulant autour des avions.

M. Daniel Vaillant a rappelé que le plan vigipirate renforcé qui comprend un certain nombre de mesures contre les risques d'attentats, avait été activé dès le 11 septembre. Il a indiqué qu'un programme très important de surveillance aérienne avait d'ores et déjà été engagé. S'agissant des contrôles systématiques des autorisations d'accès dans les aéroports, il a pris l'engagement de prendre des mesures immédiates dès la promulgation de la loi relative à la sécurité quotidienne. Il a fait observer que, déjà, il y avait 100 000 contrôles par an dans les aéroports, dont 50 000 pour les aéroports de Paris et que 4 500 policiers supplémentaires, ainsi que 1 000 militaires, ont été mobilisés depuis le 11 septembre. Il a toutefois tenu à remarquer que cette charge de travail venait s'ajouter à celle liée au passage à l'euro.

M. Jacques Chaumont a indiqué que plusieurs millions de personnes stationnant actuellement en Ukraine étaient susceptibles d'entrer dans l'Union européenne, compte tenu de la porosité des frontières de ce pays avec les pays candidats à l'adhésion, dont les ressortissants n'ont plus d'obligation de visa pour entrer dans l'Union. Compte tenu de la situation actuelle, il a souhaité connaître les mesures envisagées afin de renforcer le contrôle des personnes en provenance de ces pays.

En réponse à M. Jacques Chaumont, M. Daniel Vaillant a souligné que la dimension sécuritaire occupait une place de plus en plus importante dans le cadre de l'Union européenne, et a rappelé que la France utilisait la clause du traité de Schengen permettant d'effectuer des contrôles aléatoires à l'intérieur de ses frontières. S'agissant de l'élargissement de l'Union européenne à de nouveaux pays, il a considéré qu'il était indispensable que l'Union contribue à la formation des policiers des pays d'Europe centrale et orientale et à l'équipement de ses futures frontières extérieures. Enfin, il a estimé que le concept de police européenne, défendu notamment par le Premier ministre Lionel Jospin, était une nécessité afin d'assurer la sécurisation d'une Union européenne élargie.

En réponse à M. Eric Doligé, qui considérait que la croissance des dotations de l'Etat aux collectivités locales en 2002 était largement inférieure à celle des dépenses à leur charge, M. Daniel Vaillant a rappelé que les crédits du ministère de l'intérieur étaient en forte progression, de même que les dotations destinées aux collectivités locales. Il a indiqué que le contrat de croissance et de solidarité avait permis aux collectivités locales de se désendetter et de stabiliser leur pression fiscale, et que la dotation globale de fonctionnement (DGF) augmenterait de 4,07 % en 2002. Enfin, il a estimé que le transfert de nouvelles charges aux départements, comme les services d'incendie et de secours (SDIS) ou l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) permettrait aux citoyens de mieux lire la répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités locales, estimant que, conjointement avec une fiscalité renouvelée, cette politique était la bonne voie pour poursuivre le processus de décentralisation souhaité par tous.

M. Philippe Adnot a souhaité connaître la part des créations d'emplois liée à la mise en oeuvre des 35 heures, et obtenir des précisions sur les modalités de mise en oeuvre de cette mesure. Il a également voulu connaître l'évolution de la prise en charge des dépenses de l'APA par l'Etat lors de la croissance de celles-ci. Enfin, s'agissant des SDIS, il a souhaité que l'Etat cesse de prendre des mesures inflationnistes sans réelle consultation des départements, alors que ces mesures sont à leur charge. Il a cité en exemple le décret visant à réévaluer les grades des sapeurs pompiers, soulignant que son application représentait une augmentation d'environ 5 % de la masse salariale des SDIS.

En réponse à M. Philippe Adnot, M. Daniel Vaillant a indiqué que près de 2.000 créations d'emplois étaient liées à la mise en place des 35 heures au ministère de l'intérieur, et que le temps de travail des fonctionnaires du ministère devrait être de 1.600 heures. Il a rappelé que la mise en oeuvre de l'APA ferait l'objet d'un premier bilan à la fin de l'année 2002, et d'une nouvelle évaluation en 2003. Il a également souligné que le décret portant réévaluation des grades des sapeurs-pompiers avait fait l'objet d'une large concertation et avait été approuvé par le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Il a indiqué que le coût de la mise en oeuvre des 35 heures dans les SDIS était évalué à 4 % de leur budget de fonctionnement, et que les modalités d'application prévues étaient assez souples.

Mme Marie-Claude Beaudeau s'est inquiétée de la diminution des dépenses d'équipement au profit des dépenses de fonctionnement. Elle a souhaité obtenir des précisions sur l'efficacité et la formation des adjoints de sécurité, et sur les mesures prises afin d'améliorer la situation des centres de rétention. Enfin, elle s'est inquiétée du retard important pris dans la construction de la sous-préfecture de Sarcelles, dans le Val d'Oise.

En réponse, M. Daniel Vaillant a souligné que les capacité d'engagement des dépenses d'investissement étaient maintenues dans le projet de budget pour 2002. Il a rappelé que 26.000 adjoints de sécurité avaient été recrutés, 6.000 d'entre eux ayant ensuite réussi le concours de gardien de la paix. Il a noté que les dispositions du projet de loi sur la sécurité quotidienne impliquaient un renforcement de leur formation, dont la durée passerait de trois mois à trois mois et demi. Il s'est félicité de la pérennisation de ce système, qu'il a considéré très utile pour la police nationale.

M. Daniel Vaillant a souligné que le nouveau centre de rétention de Roissy, d'une capacité de 180 places, avait coûté 80 millions de francs, et qu'un plan triennal de réhabilitation des centres de rétention était mis en oeuvre afin de mettre fin à la situation inacceptable de certains de ces centres. Il a indiqué que le retard pris dans la construction de la sous-préfecture de Sarcelles était lié à une enveloppe de crédits initiale insuffisante, mais que cette construction devait commencer au cours du premier semestre 2002 pour un achèvement prévu lors du second semestre de l'année 2003.

M. Michel Moreigne a indiqué que certains départements, bénéficiaires de la dotation de fonctionnement minimale (DFM), comportent une proportion importante d'habitants âgés. Compte tenu du coût de l'APA, il a souhaité savoir s'il était envisageable d'introduire ce critère supplémentaire pour l'attribution de la DFM.

En réponse, M. Daniel Vaillant a considéré que cette proposition, qui reprend un amendement présenté à l'Assemblée nationale, lui semblait juste dans son principe, mais qu'il souhaitait que cette préoccupation soit étudiée dans le cadre d'une réforme d'ensemble des dotations de l'Etat aux collectivités locales.

En réponse à M. Claude Belot qui rappelait que les charges liées à l'APA, aux SDIS et à la mise en oeuvre des 35 heures dans le département de la Charente-Maritime représentaient une croissance des dépenses de 17 % pour l'année 2002, M. Daniel Vaillant a rappelé que les collectivités locales bénéficiaient du taux de croissance de la DGF le plus élevé depuis 1995, et que la croissance des dotations de l'Etat aux collectivités locales rendait possible le financement des compétences nouvelles dont elles ont la charge. Il a ajouté que si la mise en oeuvre de l'APA représentait une charge différente selon les départements, il était normal que le traitement des personnes âgées soit équitable sur l'ensemble du territoire national. Il a rappelé à nouveau que la mise en oeuvre de l'APA ferait l'objet d'une évaluation dès la fin de l'année 2002.

PJLF pour 2002 - Communication audiovisuelle et article 47 - Examen du rapport spécial

Puis la commission a examiné les crédits de la communication audiovisuelle, ainsi que l'article 47 et les lignes 38 et 39 de l'état E annexé à l'article 43, sur le rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial.

Après avoir évoqué l'évolution des grandes masses financières qui caractérisent le budget des organismes constituant l'audiovisuel public, le rapporteur spécial a évoqué une série de questions d'actualité.

Il a exposé, en tout premier lieu, les termes de la controverse ouverte par le lancement de la télévision numérique de terre décidée dans les conditions fixées par la loi du 1er août 2000, pour indiquer qu'on assistait à un conflit d'intérêt évident entre les opérateurs déjà présents sur le satellite ou le câble, et tous les groupes qui aspirent à se faire une place dans le paysage audiovisuel français. Il a estimé qu'il fallait tenir compte des réalités commerciales, et en particulier, du coût réel des décodeurs qui pourrait se révéler bien supérieur à ce qui est annoncé, et rester prudent, étant donné l'échec des expériences scandinaves et britanniques, signalant à ce sujet que le bouquet numérique terrestre anglais On Digital devenu ITV Digital, avait perdu près de 9 milliards de francs en trois ans.

En ce qui concerne la situation de l'audiovisuel public, il a fait savoir que la dotation en capital d'1 milliard de francs promise par le gouvernement et qui devrait être versée par tranche à compter de la signature du contrat d'objectifs et de moyens entre l'État et France Télévision, ne donnerait pas au groupe, en dépit du talent des équipes qu'il mobilise, les moyens de développer de nouvelles chaînes dans de bonnes conditions.

Ensuite, évoquant la pauvreté du paysage audiovisuel français, le rapporteur spécial a fait le point sur la situation des télévisons de proximité qui ne parviennent pas, en dépit de la multiplication des initiatives émanant notamment de la presse locale, à se développer, faute de pouvoir évoluer dans un cadre clair en ce qui concerne la nature des ressources publicitaires auxquelles elles peuvent avoir accès, et les possibilités d'intervention des collectivités territoriales.

Puis il a rappelé la triste histoire de la Société française de production qui, après avoir perdu, en 25 ans, 80% de ses effectifs et englouti plus de 4,5 milliards de francs de dotations publiques, vient d'être cédée à un opérateur associé au groupe Bolloré pour 30 millions de francs, une somme quasi-symbolique compte tenu de la valeur des actifs transférés et du savoir-faire de la société.

En dernier lieu, il a insisté sur la situation de l'audiovisuel public extérieur, qui, autant qu'il avait pu en juger à l'occasion de déplacements à l'étranger, ne parvenait pas à développer une stratégie cohérente associant tous les acteurs publics et à mettre en place une vraie dynamique tirant parti du capital de compétence et de dévouement -comme en témoigne une actualité dramatique- qui caractérise les sociétés concernées.

Répondant ensuite aux questions de MM. Gérard Braun et Michel Sergent, M. Claude Belot, rapporteur spécial, a notamment indiqué que la négociation de la retransmission du championnat du monde de football de 2002 faisait l'objet d'une partie de bras de fer entre le groupe Kirch détenteur des droits et les télévisions françaises, et rappelé qu'il voyait difficilement comment, au vu de l'ampleur des besoins, on pourrait éviter une augmentation de la redevance, rappelant à cet égard son attachement à l'existence d'une recette affectée.

A l'issue de ce débat, sur proposition du rapporteur spécial qui a rappelé que beaucoup de sujets étaient traités dans l'ambiguïté, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la communication, ainsi que l'article 47 et les lignes 38 et 39 de l'état E annexé à l'article 43.

Présidence de M. Jacques Oudin, vice-président

PJLF pour 2002 - Crédits de la presse - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite examiné les crédits de la presse, sur le rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial.

Après avoir rappelé les principaux chiffres qui caractérisent les crédits d'aide à la presse, le rapporteur spécial a insisté sur les questions qui n'étaient pas, selon lui, vraiment réglées dans le projet de loi de finances pour 2002 :

- le fonctionnement du Fonds de modernisation de la presse, dont les crédits se montent à 28,993 millions d'euros, soit 190,2  millions de francs, doit être suivi avec attention, à la fois parce que son champ d'intervention a été étendu dans des conditions contestées à l'aide à la distribution et parce que les reports en début d'exercice ont atteint 397 millions de francs, ce qui traduit la difficulté des gestionnaires à faire coïncider l'aide aux attentes des journaux, qui souhaitent une proportion plus forte de subventions par rapport aux avances ;

- la situation de l'Agence France Presse - AFP - continue d'être précaire en raison de l'absence de réforme de son statut et d'un mode de fonctionnement où les gains issus du travail accompli sur le terrain, par une poignée d'agents, étaient absorbés par des coûts de structures trop élevés.

Il a également insisté sur la façon dont étaient traités les services publics postal et ferroviaire, pour lesquels il lui semblait qu'on ne compensait pas convenablement les tarifs préférentiels accordés à la presse.

Enfin, en ce qui concerne le problème de la distribution et la situation des Nouvelles messageries de la presse parisienne, le rapporteur spécial a signalé toute la difficulté que le secteur rencontrait pour préserver les principes d'égalité qui fondent la loi Bichet de 1947, et pour mettre en place un système satisfaisant pour toutes les catégories de presse, en raison des différences de contraintes selon la périodicité et de la volonté de certains titres de décentraliser leur impression. En tout état de cause, il a rappelé qu'il était souhaitable de poursuivre l'encouragement au portage qui, seul, assurait la distribution de la presse dans des conditions de fiabilité et de précocité favorable à la fidélisation du lectorat.

En réponse aux questions de MM. Michel Sergent et Yvon Collin, M. Claude Belot, rapporteur spécial, a, d'une part, reconnu la situation de monopole où se trouvaient nombre de titres de la presse quotidienne régionale et, d'autre part, précisé que la presse avait plutôt développé ses ventes à la suite des événements dramatiques du 11 septembre, mais qu'en revanche elle subissait un recul préoccupant de ses recettes publicitaires.

A l'issue de cette présentation, le président Alain Lambert a rappelé que la commission avait déjà décidé de proposer au Sénat le rejet des crédits des services généraux du Premier ministre auxquels les crédits d'aide à la presse sont rattachés.

PJLF pour 2002 - Crédits de la justice - Examen du rapport

La commission a procédé ensuite à l'examen descrédits de la justice, sur le rapport de M. Hubert Haenel, rapporteur spécial.

M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a tout d'abord présenté brièvement les crédits du ministère de la justice.

Il a ainsi constaté que les crédits demandés pour la justice pour 2002 progressaient de 5,68 % (+ 252 millions d'euros) et atteignaient 4,687 milliards d'euros (soit 30,7 milliards de francs).

Il a ajouté que la part du budget de la justice dans le budget de l'Etat progressait et passait de 1,68 % en 2001 à 1,74 % pour le projet de budget de 2002.

Il a fait remarquer que tous les agrégats étaient concernés par la hausse des crédits, puisque l'administration générale voyait ses crédits augmenter de 6,18 % par rapport à 2001, les services judiciaires de 4,23 %, le Conseil d'État et les juridictions administratives de 4,74 %, les services pénitentiaires de 9,70 % et les services de la protection judiciaire de la jeunesse de 0,99 %.

Il a précisé que, comme les années précédentes, le budget de la justice voyait ses effectifs budgétaires augmenter de 2.788 emplois.

Puis M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a présenté les articles rattachés au budget de la justice. Il a indiqué que l'article 74 visait à financer l'intervention de l'avocat pour l'assistance aux détenus au cours des procédures disciplinaires.

Il a expliqué que l'article 75 modifiait les modalités d'avance des frais de justice par le Trésor public dans le cadre de procédures collectives. Il a souligné que cet article tirait les conséquences des dérives dénoncées par un rapport de 1998 de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des services judiciaires.

Il a ensuite annoncé que l'article 76 visait à consacrer la participation des barreaux au financement de la formation professionnelle des avocats. Il a constaté que dans un arrêt du 19 juin 2001, la Cour de cassation avait estimé que la loi du 31 décembre 1971, modifiée par une réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, n'autorisait pas les centres régionaux de formation professionnelle à imposer aux ordres d'avocats le paiement de cotisations destinées au financement de la formation professionnelle. Cet article vise donc à donner unebase légale aux modalités de financement des centres régionaux de formation professionnelle. Le rapporteurspécial a indiqué que l'Assemblée nationale avait apporté certaines modifications en première lecture, en étroite collaboration avec les professions d'avocat.

Puis M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a présenté ses observations.

Il a souligné que chaque année, il dénonçait le manque de transparence qui affecte la gestion des personnels du ministère de la justice, et particulièrement ceux de l'administration centrale. En effet, celle-ci ne dispose pas des effectifs nécessaires à l'exercice de ses missions. En conséquence, elle est obligée de « puiser » dans les effectifs des services déconcentrés par le biais de mises à disposition. Il a jugé ce système critiquable car il ne permet pas d'avoir un aperçu correct des effectifs des différents services du ministère de la justice, puisqu'il entraîne un décalage entre les effectifs budgétaires et les effectifs réels.

C'est la raison pour laquelle il s'est félicité de l'effort engagé cette année par la Chancellerie pour limiter le nombre des mises à disposition par le transfert de 59 emplois des services déconcentrés vers l'administration centrale. Il a cependant insisté sur la nécessité de poursuivre cet effort.

Puis M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a annoncé qu'un décret du 31 août 2001 avait créé l'agence pour la maîtrise d'ouvrage et de travaux d'équipement. Il s'agit d'un établissement public administratif qui doit se substituer à la délégation générale au programme pluriannuel d'équipement et qui a vocation à gérer unimportant programme de travaux concernant aussi bien les services judiciaires que l'administration pénitentiaire.

Il s'est félicité de la création de cet établissement public et a rappelé qu'elle s'inspirait de la solution proposée par la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les maisons d'arrêt.

Puis M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a regretté une nouvelle fois que le Gouvernement refuse d'encadrer ces programmes de construction et de rénovation dans une loi de programme. Il a estimé que le Parlement de disposait pas d'une vue d'ensemble des travaux engagés ou programmés. L'important décalage entre l'annonce d'une construction et sa réalisation renforce encore l'opacité des décisions prises au niveau gouvernemental.

Il a constaté que chaque année, des milliards de francs de crédits étaient annoncés pour réhabiliter le parc pénitentiaire français, mais l'absence de loi de programme définissant le montant total des opérations et un calendrier prévisionnel ne permet pas de suivre l'utilisation de ces crédits.

Il a ensuite regretté les contraintes pesant sur le budget 2002 en raison de l'entrée en vigueur de la loi sur l'aménagement et la réduction du temps de travail.

Il a ainsi déclaré que 34,15 millions d'euros de crédits nouveaux (soit 224 millions de francs) étaient consacrés au paiement d'heures supplémentaires et à la compensation financière des astreintes dans le cadre de la loi sur l'aménagement et la réduction du temps de travail.

De même, il a insisté sur le fait qu'une partie non négligeable des emplois créés cette année servirait en réalité à compenser la diminution de la durée du temps de travail.

Par ailleurs, il s'est interrogé sur les conditions d'application des « 35 heures ». Il a jugé que la fixation du nombre annuel d'heures de travail était essentiellement le résultat du rapport de force entre la Chancellerie et les organisations syndicales. Il a alors rappelé les propos de la ministre, entendue le 25 octobre dernier par la commission des finances, qui avait admis que les personnels de la justice travailleraient moins que les 1.600 heures prévues et que les négociations portaient sur un nombre d'heures compris entre 1.470 et 1.600. Elle avait estimé qu'elle devait tenir compte des avantages acquis par les personnels.

Enfin M. Hubert Haenel, rapporteur spécial,a plaidé pour une analyse plus poussée des conséquences des grandes réformes dans le fonctionnement au quotidien de la justice.

Il a souhaité que les études d'impact ne soient plus réalisées par la Chancellerie, mais par une instance indépendante.

Par ailleurs, il a défendu l'idée que, lors de l'examen d'un projet de loi par le Parlement, la commission des finances soit appelée à analyser l'étude d'impact fournie et à donner un avis sur les conditions financières d'application des dispositions législatives contenues dans ledit projet de loi.

Enfin il a estimé indispensable que tout texte ayant des répercussions importantes sur le fonctionnement des services de la justice fasse l'objet d'une étude d'impact postérieure à son entrée en application.

Puis M. Jacques Oudin, président, a demandé si la Chancellerie avait tenu compte des critiques formulées par la Cour des comptes sur la gestion des effectifs. Il s'est également interrogé sur le nombre de mises à disposition existant actuellement au ministère de la justice.

En réponse, M. Hubert Haenel, rapporteur spécial, a estimé à environ 450 les mises à disposition de personnels à l'administration centrale provenant des services déconcentrés. Puis il s'est inquiété des modalités d'application de la loi sur l'aménagement et la réduction du temps de travail dans les services de la Chancellerie, alors qu'il n'existe aucune étude approfondie sur le temps de travail réel des magistrats et des fonctionnaires du ministère de la justice.

A l'issue de cette présentation, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la justice et d'adopter sans modification les articles 74 et 76 rattachés.

Ratification d'ordonnance en matière de droit communautaire et en matière économique - Demande de saisine pour avis et nomination d'un rapporteur pour avis

Enfin, la commission a demandé à être saisie pour avis et a nommé M. Philippe Marini, rapporteur pour avis sur le projet de loi n° 45 (2001-2002) de ratification de l'ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de directives communautaires en matière de droit de la consommation et de l'ordonnance n° 2001-766 du 29 août 2001 portant transposition de directives communautaires en matière économique et financière.

Mercredi 14 novembre 2001

- Présidence de M. Alain Lambert, président.

PJLF 2002 - Examen des articles de la première partie

Au cours d'une séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2002, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général.

La commission a adopté, sans modification, l'article premier, autorisant la perception des impôts existants, l'article 2, relatif au barème de l'impôt sur le revenu et l'article 2 bis (nouveau), étendant l'exonération des chèques-vacances au titre de l'impôt sur le revenu.

A l'article 3, concernant le doublement du montant de la prime pour l'emploi, la commission, après les interventions de MM. Bernard Angels, Philippe Adnot et Philippe Marini, rapporteur général, a adopté un amendement qui vise, d'une part, à actualiser les limites et seuils de la prime en fonction de l'évolution constatée du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) au 1er juillet 2001, soit + 4,05 %, et, d'autre part, à augmenter les majorations forfaitaires pour personnes à charge.

M. Philippe Marini, rapporteur général, est intervenu sur l'article 4, comportant des mesures relatives aux organismes sans but lucratif. Il s'est interrogé sur la confusion entre les principes du bénévolat et ceux du salariat que pouvaient entraîner les dispositions de cet article concernant le statut fiscal des dirigeants des associations. M. Maurice Blin a estimé que la professionnalisation des associations induite par cet article serait contraire à l'esprit de la loi de 1901. M. Jacques Oudin, quant à lui, s'est interrogé sur la possibilité d'étendre ces dispositions aux syndicats et aux partis politiques. MM. Michel Mercier, Adrien Gouteyron et Alain Lambert, président, ont considéré, eux aussi, qu'il convenait de conserver la distinction entre les salariés, d'une part, et les dirigeants, d'autre part, d'une association. La commission a alors adopté l'article 4 sans modification.

Puis elle a adopté, sans modification, l'article 4 bis (nouveau), relatif à l'aménagement du régime des dons aux organismes d'aide aux personnes en difficulté, et l'article 4 ter (nouveau), qui augmente le seuil d'exonération des impôts commerciaux en faveur des associations exerçant des activités lucratives accessoires.

A l'article 4 quater (nouveau), concernant l'exonération de certains locaux administratifs de taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, perçue dans la région Île-de-France, la commission a adopté un amendement alignant le tarif de taxation des parcs d'expositions et locaux à usage de congrès sur le tarif applicable aux locaux de stockage, après que M. Michel Mercier eut indiqué qu'il n'était pas favorable à cette disposition.

A l'article 5, relatif à des mesures en faveur du logement social, la commission a adopté trois amendements : le premier est rédactionnel, le deuxième a pour objet d'ouvrir le « dispositif Besson » aux ascendants et descendants, le troisième propose de relever le taux de la déduction forfaitaire de 25 % à 40 %.

A l'article 5 bis (nouveau), relatif à l'extension du régime simplifié d'imposition des revenus fonciers, la commission a adopté, après une intervention de M. Michel Charasse, un amendement visant à assouplir ledit régime afin de réduire de 5 à 3 ans la période « irrévocable » d'option pour le régime réel, et à permettre à tout propriétaire, l'année où son locataire part ou l'année suivante, d'opter pour un an pour le régime réel afin de l'encourager à réaliser des travaux dans son logement.

A l'article 6, relatif aux mesures favorisant la protection de l'environnement et la maîtrise de l'énergie, la commission a adopté un amendement exonérant totalement de taxe sur les véhicules de sociétés les véhicules roulant au gaz de pétrole liquéfié (GPL) en bicarburation.

Après une intervention de M. Michel Charasse, la commission a adopté trois amendements à l'article 7, concernant l'amortissement exceptionnel des installations consacrées à la recherche sur les maladies qui touchent gravement les pays en développement. Le premier amendement précise que la recherche contre le SIDA et la rougeole est éligible au dispositif ; le deuxième étend le dispositif à la recherche contre les maladies rares ; le troisième amendement étend ce dispositif à la recherche et au développement de traitements contre les pathologies susceptibles de résulter de l'utilisation d'armes biologiques telles que la variole, la peste ou la maladie du charbon.

La commission a ensuite adopté un amendement portant article additionnel après l'article 7, qui supprime la baisse des taux d'amortissement dégressifs instituée par la loi de finances initiale pour 2001 afin d'apporter un soutien pérenne à l'investissement.

Puis elle a adopté, sans modification, l'article 7 bis (nouveau) prorogeant le régime de la provision spéciale des entreprises de presse.

Après l'intervention de M. Michel Charasse, la commission a adopté quatre amendements à l'article 8, relatif à l'aménagement des régimes d'exonérations applicables en zone franche urbaine (ZFU) et en zone de redynamisation urbaine (ZRU). Le premier amendement a pour objectif d'améliorer le mode de compensation des exonérations de taxe professionnelle ; le deuxième amendement vise à améliorer l'information du Parlement sur les ZFU et les ZRU en complétant le rapport élaboré sur celles-ci, le troisième est rédactionnel ; le quatrième amendement a pour objectif de rendre moins brutale la dégressivité des exonérations prévue par cet article.

Après une intervention de MM. Jacques Oudin, Michel Charasse et Philippe Marini, rapporteur général, la commission a adopté un amendement rétablissant l'article 9, relatif à l'actualisation du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Puis la commission a adopté cinq amendements tendant à insérer autant d'articles additionnels après l'article 9. Le premier, recevant l'agrément de M. Michel Charasse, vise à rétablir le mécanisme du plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune en fonction du revenu disponible. Les trois suivants, directement inspirés des propositions du rapport établi par M. Michel Charzat sur la compétitivité fiscale de la France, concernent le crédit d'impôt-recherche, et visent à assouplir l'entrée dans le dispositif, à porter le taux de prise en charge des dépenses de fonctionnement de 75 % à 100 % et à doubler le montant des frais de prise et de maintenance des brevets ouvrant droit au crédit d'impôt. Le cinquième amendement propose de réduire le taux de base du barème de la taxe sur les salaires.

A l'article 10, relatif à l'ouverture d'un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée pour les dépenses de gazole utilisé dans les véhicules exclus du droit à déduction, elle a adopté un amendement supprimant le mécanisme de modulation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers.

A l'article 11, relatif aux compensations allouées aux collectivités locales au titre des rôles supplémentaires de taxe professionnelle, la commission a adopté un amendement visant à améliorer la compensation de la non prise en compte des rôles supplémentaires pour le calcul de la réduction pour embauche et investissement.

Puis la commission a adopté, sans modification, l'article 11 bis (nouveau), simplifiant le régime réel normal de la taxe sur la valeur ajoutée, l'article 11 ter (nouveau), relatif à l'extension du champ de l'abattement de 20 % dans le cadre de l'évaluation de la résidence principale, et l'article 11 quater (nouveau), exonérant les établissements de santé du paiement des salaires aux conservateurs des hypothèques.

A l'article 11 quinquies (nouveau), qui étend des dispositifs d'exonération de la vignette, la commission a adopté deux amendements proposant la suppression de la vignette.

A l'article 11 sexies (nouveau), relatif à la taxe complémentaire à la taxe exceptionnelle sur les entreprises pétrolières instituée par la loi de finances initiale pour 2001, elle a adopté un amendement visant, d'une part, à éviter que la taxe complémentaire ne porte sur des provisions ayant déjà été réintégrées, d'autre part, à prévenir une iniquité en permettant que cette taxe complémentaire soit non seulement imputable mais aussi, le cas échéant, remboursable.

Puis elle a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 11 sexies (nouveau), dont l'objet est la diminution de l'assiette de taxe professionnelle pour les titulaires de bénéfices non commerciaux. Ce dispositif vise également à instaurer un système simple d'allégement progressif de la taxe professionnelle des titulaires des bénéfices non commerciaux employant moins de cinq salariés.

Elle a adopté un amendement visant à la suppression de l'article 12, relatif aux taux et conditions de versement de la contribution due par les organismes collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction.

Elle a fait de même à l'article 13, concernant le prélèvement exceptionnel sur les fonds constitués par la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, déposés par l'Organisation autonome nationale de l'industrie et du commerce (ORGANIC) auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

Elle a adopté l'article 14 sans modification.

Elle a ensuite proposé la suppression de l'article 15 concernant la détermination du montant du prélèvement de solidarité pour l'eau, affecté au compte spécial n° 902-00 « fonds national de l'eau », ainsi que de l'article 15 bis (nouveau) visant à aménager le régime de la redevance audiovisuelle.

Elle a adopté sans modification l'article 16 modifiant des quotités de répartition de la taxe d'aviation civile entre le budget annexe de l'aviation civile et le compte spécial n° 902-25 « fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien ».

Elle a adopté un amendement suppression de l'article 17 concernant l'affectation, en 2002, des ressources du compte d'affectation spéciale n° 902-33 « fonds de provisionnement des charges de retraite et de désendettement de l'Etat » au fonds de réserve des retraites.

Elle a ensuite proposé la suppression de l'article 17 bis (nouveau) concernant le versement du produit de la privatisation partielle d'Autoroutes du sud de la France au compte d'affectation spéciale des produits de cession de titres, parts et droits de sociétés n° 902-24 et affectation d'une partie des recettes au fonds des réserves des retraites.

Elle a adopté l'article 17 ter (nouveau) sans modification.

Puis elle a adopté un amendement à l'article 18, qui fixe pour 2002 le montant de la contribution sociale de solidarité affectée au régime des exploitants agricoles, visant à relever le taux de la cotisation incluse dans les taux de taxe sur la valeur ajoutée au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA).

Elle a adopté un amendement visant la suppression de l'article 19 relatif à l'affectation du produit de la taxe sur les conventions d'assurances.

Elle a également proposé la suppression de l'article 20 modifiant les versements de la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) au budget de l'Etat.

A l'article 21 relatif à la reconduction en 2002 du contrat de croissance et de solidarité, elle a adopté un amendement permettant la prise en compte de 50 % du taux de croissance du produit intérieur brut.

A l'article 21 bis (nouveau) majorant la dotation de l'Etat au fonds national de péréquation, elle a adopté deux amendements visant à majorer de 45,73 millions d'euros (300 millions de francs) le montant du prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.

A l'article 21 ter (nouveau) relatif à la compensation des baisses de la dotation de compensation de la taxe professionnelle enregistrées en 1999, 2000 et 2001, elle a adopté un amendement visant à une compensation intégrale et à la majoration des ressources du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.

A l'article 22 relatif à l'intégration au sein de la dotation d'aménagement, de la totalité du financement des communautés d'agglomération, elle a adopté trois amendements, dont deux de conséquence, visant, d'une part, à conserver le principe d'un financement hors dotation globale de fonctionnement des communautés d'agglomération et, d'autre part, à fixer le plafond du prélèvement sur les recettes de l'Etat destinées à financer les communautés d'agglomération à un niveau plus élevé.

Elle a adopté sans modification l'article 23 relatif à l'intégration de la totalité du coût de la garantie des communautés urbaines au sein de la dotation par habitant fixée par le comité des finances locales.

A l'article 24 relatif à la dotation de solidarité urbaine, elle a adopté un amendement majorant celle-ci.

A l'article 25 relatif également à la dotation de solidarité urbaine, elle a adopté un amendement supprimant le transfert aux communes des frais d'état-civil et d'abonnement au Journal officiel.

Elle a adopté sans modification l'article 25 bis (nouveau) allégeant la taxe foncière pour les redevables âgés de plus de 65 ans.

A l'article 25 ter (nouveau) concernant les attributions du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) au titre des dépenses résultant des intempéries de 1999, elle a adopté un amendement rédactionnel.

Elle a réservé sa position sur l'article 26 évaluant le prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des communautés européennes sans modification jusqu'à l'examen du rapport de M. Denis Badré, rapporteur spécial.

Enfin, elle a adopté l'article 27 établissant l'équilibre général du budget dans la rédaction résultant des votes émis sur les articles de la première partie.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2002 ainsi modifiée.

Présidence de M. Alain Lambert, président, puis de M. Roland du Luart, vice- président, et de M. Claude Belot, vice-président

PJLF 2002 - Crédits de l'équipement, des transports et du logement : III.- Transports et sécurité routière : . Aviation et aéronautique civiles - et budget annexe de l'aviation civile - Examen des rapports spéciaux


Au cours d'une deuxième séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'examen du rapport des crédits de l'équipement, des transports et du logement : III.- Transports et sécurité routière : . Aviation et aéronautique civiles, et du budget annexe de l'aviation civile, sur le rapport de M. Yvon Collin, rapporteur spécial.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a souligné qu'il devait se livrer à un exercice un peu paradoxal en présentant les crédits destinés aux transports aériens, compte tenu de la situation complexe et incertaine de ce secteur, et du fait du changement radical de l'environnement du projet de budget depuis les attentats du 11 septembre, le Gouvernement ayant annoncé, depuis cette date, que des modifications substantielles seraient nécessaires.

Il a indiqué que, du point de vue des recettes, le projet était caractérisé essentiellement par une stabilisation des taux de la taxe de l'aviation civile et par la suppression de la subvention versée par le budget général, l'aviation civile devenant ainsi le seul moyen de transport financé exclusivement par ses usagers, et, plus marginalement, par le contribuable local. Par ailleurs, il a noté que l'endettement du budget annexe était stabilisé, les emprunts nouveaux correspondant à peu près au remboursement des emprunts passés.

Du côté des dépenses, il a souligné que les dépenses de personnel augmentaient de 8,4 %, sous l'effet du protocole d'accord de la direction générale de l'aviation civile signé pour trois ans le 7 décembre 2000. Ce protocole prévoit des mesures catégorielles de revalorisation des rémunérations, fixe les modalités de mise en oeuvre des 35 heures, et prévoit surtout la création de 446 emplois nouveaux par an pendant trois ans, dont 210 contrôleurs aériens, afin d'absorber la croissance du trafic. Il a considéré que les protocoles triennaux conduisaient à une croissance trop importante des rémunérations des personnels, alors même que la durée du temps de travail sera réduite, rappelant que cette augmentation des coûts était à la charge des compagnies aériennes.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a indiqué que l'augmentation des ressources du budget annexe était complètement absorbée par la croissance des charges de personnel, et que les dépenses d'investissement diminuaient de près de 10 %, après une baisse de 2,8 % en 2001.

Il a rappelé que les attentats du 11 septembre avaient des conséquences négatives considérables pour le transport aérien, dont certaines appelaient des mesures immédiates, comme la mise en oeuvre du plan vigipirate renforcé dans les aéroports ou la compensation des compagnies aériennes pour le préjudice subi lors de la fermeture du ciel américain. Il a indiqué que ces éléments, de même que la prise en charge des mesures de sûreté mises en oeuvre par les compagnies aériennes elles-mêmes, seraient exceptionnellement financées par l'Etat en 2002.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a souligné que le renforcement des mesures de sûreté constituait une nécessité pour l'avenir et que les dépenses correspondantes devraient augmenter de manière importante au cours des prochaines années, notamment en matière de personnel, afin d'assurer le contrôle des passagers et des bagages en soute. Il a indiqué que ces mesures seraient financées par les passagers, par l'intermédiaire de la taxe d'aéroport, dont les plafonds seraient relevés, et par le Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien (FIATA), dont les ressources proviennent de la taxe d'aviation civile.

S'agissant du budget annexe, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a noté que ses recettes seraient moins importantes que prévues en 2002, dans l'hypothèse où le trafic ne progresserait que de 2,6 %, comme le prévoit l'agence européenne Eurocontrol. Il a indiqué que la diminution de la croissance du trafic affecterait le produit des redevances, mais surtout celui de la taxe d'aviation civile, qui est assise sur le nombre de passagers et le volume de fret transportés.

Il a souligné que l'équilibre financier du budget annexe de l'aviation civile serait vraisemblablement remis en cause si la crise du transport aérien devait durer. Dans cette hypothèse, il a estimé que des sources de financement nouvelles devraient être trouvées, soit par un nouvel accroissement du taux de la taxe d'aviation civile, qui devra cependant tenir compte de la situation concurrentielle des compagnies aériennes françaises, soit par un accroissement des emprunts, qui devra tenir compte du niveau d'endettement élevé du budget annexe, soit par une subvention du budget général.

Le budget annexe serait en tout état de cause fragilisé, comme les compagnies aériennes, qui constituent sa principale source de financement. M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a considéré qu'une réduction des coûts fixes serait alors indispensable, pour le budget annexe comme pour les compagnies aériennes. La question de la dénonciation du protocole d'accord de la direction générale de l'aviation civile prévoyant la création de 1.339 emplois sur trois ans, devrait alors être posée. Celui-ci reposait en effet sur une hypothèse de croissance du trafic aérien de près de 6 % par an.

Enfin, il a estimé que la question du réengagement financier et opérationnel des pouvoirs publics dans le domaine du transport aérien, notamment en matière de sûreté, était plus que jamais posée. Il a remarqué que les Etats-Unis, pionniers de la libéralisation du secteur, étaient intervenus massivement en faveur de leurs compagnies aériennes, alors que les Etats membres de l'Union européenne s'étaient montrés davantage soucieux de prévenir les distorsions de concurrence et d'engager une restructuration du secteur à l'échelle européenne.

Abordant les crédits du transport aérien, il a indiqué que les crédits de recherche étaient en légère diminution, tandis que les avances remboursables progressaient de manière importante, afin de financer le développement de l'Airbus A380. Il s'est félicité de la progression du montant de ces avances, destinées à permettre le développement d'un projet ambitieux. En revanche, il a regretté la réduction des crédits de recherche, alors que les besoins de renforcement des dispositifs de sécurité dans les appareils sont importants.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a rappelé que les incertitudes pesant sur le transport aérien fragilisaient les entreprises françaises de ce secteur d'activité. Il a craint que des incertitudes ne persistent en matière de sûreté, en dépit des mesures prises par de nombreux pays, considérant que seule une coopération internationale renforcée et permettant de contrôler le respect des normes par les différents Etats permettrait de s'assurer d'un niveau minimal de sûreté.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Alain Lambert, président, a souhaité savoir si les aides versées par les Etats-Unis aux compagnies aériennes américaines ne risquaient pas de provoquer des distorsions de concurrence vis-à-vis de leurs rivales, et s'est interrogé sur les mesures prises afin de renforcer la prise en compte de l'environnement dans le développement des infrastructures aéroportuaires.

M. Maurice Blin a souligné que les aides financières versées aux compagnies américaines étaient beaucoup plus importantes que celles décidées dans le cadre de l'Union européenne. Il a noté qu'il en allait de même des aides aux constructeurs. Il s'est inquiété de l'importance des dépenses de fonctionnement au sein du budget de l'aviation civile, compte tenu de la diminution du trafic attendu suite aux attentats du 11 septembre 2001. Enfin, il a souhaité obtenir des précisions sur le coût du renforcement des mesures de sûreté décidées par le Gouvernement.

M. Denis Badré a souhaité obtenir des précisions quant à la coordination des investissements de contrôles aériens au sein de l'Union européenne. Compte tenu des menaces actuelles, il s'est interrogé sur l'opportunité de modifier sensiblement les couloirs aériens et d'élargir l'interdiction de survol de Paris à la « petite couronne ».

Il s'est également demandé si le projet de construction d'un troisième aéroport dans la région parisienne n'était pas remis en cause par les événements récents.

M. Roland du Luart s'est inquiété du nombre de badges d'accès aux zones réservées d'Aéroports de Paris en circulation et a souhaité connaître les mesures prises afin de maîtriser les risques liés à cette situation. Il a également souhaité connaître le coût de la future liaison routière entre Toulouse et Bordeaux, destinée à transporter les éléments de fuselage de l'Airbus A380.

M. Jacques Oudin a souligné que la saturation de l'espace aérien entraînait des retards de plus en plus importants. Il a considéré que le développement des liaisons ferroviaires à grande vitesse permettait de détourner une partie du trafic aérien vers le rail, en souhaitant cependant que les connexions avec les aéroports de province soient développées à l'avenir.

En réponse à M. Alain Lambert, président, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a rappelé que les compagnies aériennes américaines étaient globalement fragiles financièrement avant les événements du 11 septembre, ce qui explique en partie l'importance des aides consenties par le Gouvernement. Il a souligné que l'Union européenne avait décidé de limiter considérablement le montant des aides attribuées aux compagnies aériennes, craignant une distorsion de concurrence sur le marché européen, et estimant nécessaire d'engager une restructuration du secteur des transports aériens en Europe. Il a indiqué que les nuisances environnementales liées au développement des structures aéroportuaires étaient mieux prises en compte que par le passé, citant notamment l'existence de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires ainsi que la mise en oeuvre de chartes environnementales par les gestionnaires d'aéroports.

En réponse à M. Maurice Blin, il a reconnu que les aides versées par le gouvernement américain étaient beaucoup plus élevées qu'en Europe, s'agissant des compagnies aériennes, mais également des entreprises de construction aéronautique. Il a rappelé que ces entreprises bénéficiaient des financements accordés par les agences gouvernementales américaines dans le cadre des programmes militaires, tandis que la France, tenue par ses engagements internationaux, ne versait que des avances remboursables.

M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a considéré que l'importance des dépenses de fonctionnement risquait de mettre à mal l'équilibre financier du budget annexe de l'aviation civile si la reprise du trafic aérien attendue par le Gouvernement n'était pas au rendez-vous.

Il a précisé que le renforcement des mesures de sûreté représentait un coût d'environ 1,1 milliard de francs à la charge des compagnies aériennes, l'État prenant à sa charge les mesures exceptionnelles prises dans le cadre du plan vigipirate renforcé.

En réponse à M. Denis Badré, il a indiqué que la coordination des investissements en matière de contrôle aérien au sein de l'Union européenne se développait considérablement. S'agissant du survol des villes et de la proche banlieue parisienne, il a rappelé que l'importance du trafic aérien et l'existence de zones militaires limitaient les marges de décision en la matière. Il a ajouté qu'il avait toujours été opposé à la construction d'un troisième aéroport en région parisienne, considérant qu'il était préférable de développer le site de Roissy et d'augmenter les capacités de trafic des principaux aéroports de province.

En réponse à M. Roland du Luart, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a rappelé que près de 40.000 badges d'accès aux zones réservées d'Aéroports de Paris étaient « dans la nature », en sus des 50.000 badges appartenant aux personnels habilités à travailler dans ces zones. Il a indiqué que des mesures immédiates avaient été prises afin de mieux contrôler l'accès à ces zones, mais a considéré qu'il serait indispensable, à l'avenir, d'accroître la vigilance s'agissant des personnels travaillant dans les aéroports.

Il a souligné que l'itinéraire de la route destinée à transporter les éléments du futur Airbus A380 n'avait toujours pas été décidé et qu'il n'était par conséquent pas possible d'en connaître le coût.

En réponse à M. Jacques Oudin, il a observé que les retards dans le transport aérien seraient susceptibles de s'accroître à l'avenir, compte tenu du renforcement des mesures de sûreté.

Il a estimé qu'il convenait de développer les connexions entre le réseau ferroviaire et le réseau aérien, afin de favoriser un développement équilibré des transports sur le territoire.

M. Alain Lambert, président, a alors demandé à la commission de se prononcer sur les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement.

M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial pour les services communs et le logement, a souligné que le budget des services communs n'était pas satisfaisant et que celui du logement était marqué par une réduction regrettable des crédits pour dépenses d'investissement. Enfin, il a considéré que le faible taux de réponse à son questionnaire budgétaire était inadmissible.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est exprimé en faveur d'un rejet du projet de budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement. Il a considéré que les dépenses d'investissement étaient sacrifiées au profit des dépenses de fonctionnement et de personnel, soulignant la diminution des subventions d'investissement pour l'Agence nationale de l'amélioration de l'habitat, l'absence de financement des investissements en matière de transport ferroviaire, les retards pris dans l'exécution des contrats de plan Etat-régions en matière de routes et l'insuffisance des moyens consacrés au tourisme, secteur fortement touché par la conjoncture actuelle.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement.

M. Alain Lambert, président, a alors demandé à la commission de se prononcer sur les crédits du budget annexe de l'aviation civile.

M. Yvon Collin s'en est remis à la sagesse de la commission, considérant que ce projet de budget avait été préparé bien avant les attentats du 11 septembre et ne pouvait pas prendre en compte les mesures annoncées par le Gouvernement depuis cette date.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits du budget annexe de l'aviation civile.

PJLF 2002 - Crédits des affaires européennes - Examen du rapport spécial


La commission a ensuite examiné les crédits des affaires européennes (article 26), sur le rapport de M. Denis Badré, rapporteur spécial.

M. Denis Badré, rapporteur spécial,
a annoncé que le prélèvement sur recettes prévu en 2002 au profit du budget européen s'élevait à 16,87 milliards d'euros, soit une augmentation de 11,2 % et de 1,7 milliard d'euros par rapport à la prévision pour 2001.

Il a expliqué que cette progression de la contribution française résultait d'abord de la forte croissance que connaît le budget communautaire : après un doublement au cours de la dernière décennie, les perspectives financières définies en 1999 à Berlin prévoient une hausse de 16 %, en termes réels, du plafond des crédits de paiement sur la période 2002-2006.

Il a ajouté que la forte hausse pour 2002 était également liée à l'entrée en vigueur de la nouvelle décision « ressources propres » adoptée par le Conseil le 29 septembre 2000 conformément aux accords de Berlin.

Il a alors estimé que l'augmentation continue de la contribution française, alors même que la France est engagée dans un programme de stabilité et que la conjoncture économique risque de malmener les équilibres budgétaires, renforçait la nécessité d'un contrôle approfondi des dépenses engagées à travers le budget des Communautés européennes et une vérification de leur efficacité. Or, si les Parlements votent les ressources, ils ne disposent pas de moyens de contrôle sur les dépenses.

Puis M. Denis Badré, rapporteur spécial, a constaté que le projet de budget européen pour 2002, arrêté par le Conseil, enregistrait une progression de 2,5 % de ses crédits de paiement et s'élevait à 95,6 milliards d'euros.

Il a rappelé que le budget agricole et celui des actions structurelles représentaient plus de 80 % du budget européen. Il a ensuite cité les autres rubriques : les politiques internes (6,3 % du budget), les actions extérieures (4,3 % du budget), les dépenses de pré-adhésion (2,7 % du budget) et les dépenses administratives (5,4 % du budget).

A propos des ressources du budget européen, M. Denis Badré, rapporteur spécial, a estimé qu'elles se caractérisaient par la stagnation des ressources propres traditionnelles (prélèvements agricoles et droits de douane), qui représentent moins de 14 % du total, la diminution de la part de la ressource TVA et l'augmentation du prélèvement sur le produit intérieur brut (PIB).

Puis M. Denis Badré, rapporteur spécial, a présenté ses observations.

Il a tout d'abord regretté que la procédure budgétaire interdise toute maîtrise des dépenses. En effet, les ressources du budget des Communautés européennes sont déterminées par les Etats membres, mais ces derniers n'ont aucun pouvoir d'influence sur la fixation des dépenses, dont le montant résulte d'un compromis entre le Conseil et le Parlement européen, à partir de l'avant-projet de budget proposé par la Commission européenne.

Il a ajouté que l'encadrement du budget européen par l'accord institutionnel du 6 mai 1999 apparaissait en réalité moins porteur de disciplines que créateur de facilités de dépenses : certains crédits prévus par la précédente programmation sont stabilisés à un niveau élevé (un montant de 230 milliards d'euros est prévu pour les fonds structurels entre 2000 et 2006), tandis qu'il est prévu d'augmenter les crédits de nombreux postes budgétaires. Ainsi, les politiques internes bénéficieront de 46 milliards d'euros entre 2000 et 2006, soit une progression en termes réels de 30 % par rapport au « paquet » précédent.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a par ailleurs jugé déraisonnable la programmation de certains crédits.

Il a rappelé que le conseil d'Edimbourg de décembre 1993 avait décidé d'allouer près de 177 milliards d'euros (valeur 1999), soit un tiers du budget communautaire, à la politique de cohésion. Or, le bilan d'exécution de la programmation des fonds structurels sur la période 1994-1999 est mitigé. Certes, la quasi-totalité des crédits prévus initialement a pu être engagée, mais elle ne s'est pas accompagnée de la consommation correspondante desdits crédits. En conséquence, le montant de l'écart entre les engagements contractés et lespaiements effectifs correspondants (qualifié de « reste à liquider ») est passé de 15,4 à 41,6 milliards d'euros entre fin 1993 et fin 1999, soit une progression de 270 % en 5 ans.

M. Denis Badré, rapporteur spécial, a cependant admis que les règles de la programmation 2000-2006 devraient permettre un meilleur respect du profil des engagements pluriannuels décidés le 9 mai 1999 à Berlin. En effet, les engagements qui n'auront pas fait l'objet d'une demande de paiement recevable auprès de la Commission européenne à l'issue de la deuxième année suivant celle de l'engagement seront dégagés d'office.

Il s'est ensuite interrogé sur la pertinence du montant des fonds structurels fixé à 213 milliards d'euros sur sept ans. Il a douté de la capacité des Etats à mettre en oeuvre des programmes d'action permettant d'absorber en temps voulu la totalité de ces crédits.

Il a alors cité l'exemple des aides de préadhésion pour illustrer les programmations de crédits irréalistes du budget communautaire. Conçues pour favoriser la convergence des économies des pays candidats, leur montant annuel total a été fixé à 3,1 milliards d'euros sur la période 2000-2006. Toutefois, la mise en oeuvre des programmes d'instrument structurel de pré-adhésion (ISPA) et de soutien agricole de pré-adhésion au développement rural (SAPARD) rencontre des difficultés. A titre d'exemple, seules la Bulgarie et l'Estonie ont obtenu jusqu'à présent l'accréditation de leurs Agences de gestion SAPARD, étape préalable à tout paiement.

Pourtant, dans son avant-projet de budget, la Commission européenne avait proposé une augmentation de 20 % des crédits de paiement.

Puis M. Denis Badré, rapporteur spécial, a regretté l'éparpillement des crédits finançant les politiques internes.

Il a déclaré que dans le projet de budget 2002, 26,5 % des crédits des politiques internes (6,6 milliards d'euros) assurent le financement de mesures multiples dans une vingtaine de domaines distincts (éducation et formation, marché de l'emploi, marché intérieur, environnement, industrie, protection des consommateurs, culture et audiovisuel, énergie, justice, etc.).

De même, il a mentionné les crédits des actions extérieures (4,8 milliards d'euros en 2002) qui financent 16 types d'actions différentes (aide humanitaire et alimentaire, actions de coopération, politique étrangère et sécurité commune etc.).

Il s'est déclaré en faveur d'un recentrage de l'intervention communautaire sur des projets où la « plus-value communautaire » est vérifiée, comme en matière de réseaux transeuropéens.

Il a alors fait remarquer que ce saupoudrage témoignait de la difficulté pour l'Union européenne à définir des objectifs clairs et hiérarchisés pour les politiques mises en oeuvre.

En conclusion, M. Denis Badré, rapporteur spécial, a évoqué le débat sur l'impôt européen.

Il a noté que la présidence belge avait relancé ce débat. Il a jugé que ce dernier n'était pas pertinent tant qu'il ne serait pas envisagé, parallèlement, de transférer à l'Union européenne des compétences appartenant actuellement aux Etats membres. Dans le cas contraire, l'impôt européen risque de se superposer aux impôts nationaux, alors qu'il devrait être instauré à taux de prélèvement constant.

Un large débat s'est alors engagé.

M. Maurice Blin a regretté le décalage entre le souci de la part des Etats membres de contrôler leurs dépenses d'une part et, d'autre part, l'augmentation inexorable du budget des Communautés européennes. Par ailleurs, il s'est interrogé sur les moyens à la disposition des Etats pour contrôler l'efficacité des dépenses communautaires.

M. Jacques Oudin a rappelé que la Cour de justice des Communautés européennes avait condamné le conseil en 1985 pour son inactivité en matière de politique des transports. Il a précisé qu'un Livre blanc sur ce sujet avait été publié récemment, mais que les initiatives européennes dans ce domaine étaient insuffisantes. De même, il a regretté les atermoiements communautaires sur la politique de la pêche.

M. Paul Loridant s'est interrogé sur la position très rigoureuse de la Commission européenne en matière de respect des règles de concurrence, alors que les Etats-Unis ont accordé des subventions aux compagnies aériennes après les attentats du 11 septembre. Il a également demandé des informations supplémentaires sur la lutte au niveau communautaire contre les centres off-shore.

M. François Marc a souhaité obtenir des précisions sur l'évolution de la politique agricole commune et la gestion des crises animales.

En réponse, M. Denis Badré, rapporteur spécial, a estimé inacceptable le fait que l'Union européenne s'exonère des règles de rigueur budgétaire qu'elle impose aux Etats membres. Après avoir rappelé que les plus fortes progressions étaient constatées au niveau des politiques internes, il a tenu à relativiser le coût de « l'Europe » pour la France au regard du poids du budget de l'Etat. En outre, il a fait remarquer que si la France se désengageait de la politique des fonds structurels et « renationalisait » les dépenses agricoles, il s'agirait d'un jeu à somme nulle.

A propos du développement des réseaux transeuropéens, M. Denis Badré, rapporteur spécial, a considéré qu'il correspondait au type même de dépenses qui doivent être financées au niveau communautaire et a prôné une association plus étroite de la Suisse à l'essor de l'Europe ferroviaire.

En ce qui concerne la pêche, il a estimé que si ce secteur disposait d'un budget, il fallait parallèlement que soit développée une politique.

Puis M. Denis Badré, rapporteur spécial, a évoqué la politique agricole commune. Il a rappelé l'originalité du système communautaire qui fait porter sur le consommateur le coût lié à la différence de prix entre les cours mondiaux et les cours fixés au niveau européen. Il a cependant estimé que cette logique ne pouvait pas s'appliquer lorsque les producteurs de l'Union européenne exportent.

Enfin, il a insisté sur la nécessité de s'appuyer sur le changement de mentalité observé à l'égard des paradis fiscaux depuis les attentats du 11 septembre dernier pour engager une lutte efficace au niveau mondial contre ces derniers.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 26 du projet de loi de finances pour 2002 sans modification.

Présidence de M. Roland du Luart, vice-président

PJLF 2002 - Crédits des monnaies et médailles - Examen du rapport spécial


La commission a ensuite procédé à l'examen du projet de budget annexe des monnaies et médailles pour 2002 sur le rapport de M. Bertrand Auban, rapporteur spécial.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, après avoir rappelé les activités essentielles de la direction des monnaies et médailles, s'est tout d'abord réjoui de constater que la subvention de l'Etat, d'un montant de 19 millions de francs, qui avait été votée l'an dernier, ne sera en fait pas nécessaire, l'activité ayant été plus soutenue que prévu.

Il a indiqué que les crédits demandés pour 2002 (183 millions d'euros soit 1,2 milliard de francs) étaient stables par rapport à l'an dernier, dans un contexte de nette décélération du programme de frappe de l'euro, puisqu'il n'est plus demandé qu'1,8 milliard de pièces courantes françaises, soit une baisse de 18 %.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a noté que le budget voté 2001 n'était pas une base de comparaison très pertinente parce que le poste des achats, qui représente la moitié des dépenses d'exploitation, y était minoré. Il a constaté une rigidité à la baisse du budget, puisque par rapport aux résultats de 2000, les dépenses d'exploitation diminuaient de 4,2 % pour une activité principale en chute de 34 %.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a expliqué que cette rigidité était en grande partie liée aux fortes augmentations des cours des métaux, à une proportion plus importante de coupures coûteuses en métaux et à la part non négligeable des achats effectués pour les activités commerciales qui, elles, sont prévues en hausse. Par ailleurs, après avoir indiqué que le conditionnement en sachets et le stockage des pièces d'euros avait été sous-traités, il a précisé que seuls les départs à la retraite, dont l'effet sera plus perceptible entre 2005 et 2010, diminuaient les frais de personnel, de 2 %. Enfin, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a rappelé que la direction des monnaies et médailles assurait des activités patrimoniales et de contrôle, dont les coûts étaient relativement incompressibles.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a souligné qu'en revanche, après les investissements lourds de ces dernières années, les autorisations de programme pour 2002 diminuaient de 33 % et revenaient à 3,5 millions d'euros (23 millions de francs).

Il a ensuite analysé les recettes en commençant par le produit de la cession des pièces françaises au Trésor, qui en représente les deux tiers. Il a rappelé que cette cession entraînait un jeu d'écritures avec un compte spécial du Trésor, lequel avait fait l'objet d'un examen approfondi par M. Paul Loridant, et précisé que les prix unitaires de cession pour 2002 étaient ceux de l'année 2000, année riche en économies d'échelle et gains de productivité. Il a ajouté que ces prix concurrentiels donnaient le maximum de chances à la Monnaie de Paris de remporter des appels d'offre internationaux et que cette stratégie avait été payante en 2001, avec la Grèce.

S'agissant des recettes commerciales, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a regretté un manque de sincérité de l'objectif. Il a en effet jugé excessif le chiffrage qui porterait les recettes commerciales à 39 % au-dessus des recettes enregistrées en 2000.

Au-delà de ces commentaires directement liés au budget, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a fait part des observations que lui inspirait la situation des monnaies et médailles.

Il a tout d'abord déclaré qu'il y avait lieu d'être pleinement satisfait de la manière dont celle-ci s'acquittait, depuis 1998, de sa mission de frappe de l'euro. Fin 2001, les 8 milliards 100 millions de pièces demandées seront disponibles. Il a fait savoir qu'il avait été rapidement remédié à la perturbation momentanée de la chaîne de confection des sachets d'euros et a considéré que cet incident, qui pourrait être dû à un acte de sabotage, n'a en aucun cas remis en question la qualité des services rendus.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, s'est ensuite inquiété de l'avenir de la Monnaie de Paris. Il a jugé l'équilibre budgétaire pour 2002 fragile, voire peu probable, en expliquant que les bénéfices d'exploitation de l'établissement de Pessac ne pourraient pas nécessairement combler le déficit structurel de l'établissement parisien, étant donné l'inéluctable diminution du programme de frappe. Il a déduit de ce contexte que des économies s'imposaient, notamment sur les achats qui devraient faire l'objet de mesures urgentes et concrètes de rationalisation, inspirées d'un audit externe réalisé fin 2000.

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a insisté sur la nécessité, pour la Monnaie de Paris, de s'ouvrir pour rentabiliser au mieux ses capacités de production devenues excédentaires en affrontant une concurrence toujours plus vive.

Il a estimé que l'établissement de Pessac, doté d'installations modernes, pouvait espérer augmenter ses parts de marché dans le secteur des monnaies courantes étrangères. M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, s'est en revanche déclaré plus pessimiste sur l'avenir de l'établissement parisien, dont les médailles, décorations, fontes d'art et autres bijoux, autant de produits concurrencés par les entreprises privées, se vendent difficilement.

Il a jugé louable l'intention de la direction des monnaies et médailles de se donner les moyens d'une politique commerciale plus offensive, permettant la conservation d'un vrai savoir-faire et participant au rayonnement de la France. Il a cependant estimé que son financement devait rester raisonnable, l'administration des monnaies et médailles ne pouvant trop s'éloigner de ses missions d'intérêt public.

En fin de propos, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, s'est demandé quel était l'avenir de l'euro fiduciaire et a considéré que, seule, une anticipation sereine du possible avènement du porte-monnaie électronique, qui ne relève plus aujourd'hui de la science fiction, permettra à la Monnaie de Paris de s'adapter sans trop de douleur.

Sous réserve de ces observations, M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, a proposé l'adoption du budget annexe des monnaies et médailles.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter le budget annexe des monnaies et médailles.
Présidence de M. Claude Belot, vice-président

PJLF 2002 - Crédits de l'emploi et de la solidarité : III.-Ville et articles 71 et 72 rattachés - Examen du rapport spécial


Enfin la commission a examiné les crédits de l'emploi et de la solidarité : III.-Ville et articles 71 et 72 rattachés, sur le rapport de M. Éric Doligé, rapporteur spécial.

M. Éric Doligé, rapporteur spécial,
a indiqué que les crédits du budget de la ville s'élevaient à 372 millions d'euros. Il a précisé que, selon le « jaune », l'ensemble des dépenses de l'Etat relatives à la politique de la ville était supérieur à 4 milliards d'euros, et celui des dépenses publiques relatives à la politique de la ville, de l'ordre de 7 milliards d'euros. Il a ajouté que le budget de la ville ne correspondait donc qu'à environ 5 % des dépenses consacrées à la ville.

Il a constaté que ce budget était nettement moins dynamique que l'année dernière (+ 1,3 %, au lieu de + 70 %). Il a précisé que ce ralentissement s'expliquait par la croissance exceptionnelle constatée en 2001, provenant du fait que ce budget intégrait pour la première fois en année pleine certains dispositifs, en particulier les grands projets de ville, les opérations de renouvellement urbain et le fonds pour la revitalisation économique.

Il a indiqué que deux articles du projet de loi de finances pour 2002 étaient rattachés au budget de la ville : l'article 71, relatif à la sortie progressive du régime des zones franches urbaines (ZFU) dans le cas des exonérations de cotisations sociales, et l'article 72, relatif à l'extension aux personnes publiques du dispositif dit des « adultes-relais ».

Il a rappelé que les zones franches urbaines faisaient partie des zones de redynamisation urbaine (ZRU), l'ensemble de ces zones bénéficiant d'exonérations fiscales et sociales, plus favorables dans le cas des zones franches urbaines que dans celui des autres ZRU. Il a indiqué que le gouvernement proposait de mettre fin au dispositif des zones franches urbaines, pour remplacer les régimes ZFU et ZRU actuels par un régime unique, correspondant à celui des zones de redynamisation urbaine, légèrement renforcé. Il a précisé que cette réforme serait mise en oeuvre par diverses dispositions, dont l'article 71 du projet de loi de finances pour 2002. Il a souligné l'insuffisance de l'évaluation du dispositif de zones franches urbaines. Il a indiqué que l'emploi y avait doublé depuis 1997, pour un coût annuel de 300 millions d'euros. Observant que le gouvernement n'avait pas publié d'estimation du nombre d'emplois créés grâce à ce dispositif, il s'est interrogé sur le bien-fondé de la réforme proposée par le gouvernement.

Il a rappelé que l'autre article rattaché au budget de la ville était l'article 72, relatif aux adultes-relais. Il a indiqué que les adultes-relais étaient d'anciens chômeurs, recrutés pour améliorer, dans les zones urbaines sensibles et les autres territoires prioritaires des contrats de ville, les relations entre les habitants de ces quartiers et les services publics, ainsi que les rapports sociaux dans les espaces publics ou collectifs. Il a souligné l'ambiguïté du dispositif, qui visait à la fois à satisfaire des besoins en matière de médiation et à réduire le taux de chômage, et s'est interrogé sur lacompatibilité de ces deux objectifs. Il s'est également demandé ce qu'il allait advenir de ces personnes quand elles sortiraient du dispositif, ces contrats n'étant prévus que pour une durée de trois ans. Il a indiqué que l'article 72 du projet de loi de finances pour 2002 avait pour objet de permettre l'embauche d'adultes-relais par des personnes publiques. Il a précisé que cela correspondait, d'ores et déjà, à une pratique, par le recours au système des contrats emploi consolidé. Il a ajouté que si les contrats emploi consolidé présentaient, notamment, l'inconvénient de pouvoir être conclus pour une durée indéterminée, ceci n'était, sauf exception, pas possible dans le cas des adultes-relais.

Le rapporteur spécial a ensuite considéré que la lisibilité et le suivi des crédits consacrés à la politique de la ville n'étaient pas satisfaisants. Il a estimé que le « jaune » fournissait des indications purement formelles. Il a en particulier indiqué qu'on ne connaissait pas le détail des chapitres budgétaires concernés ; on ignorait s'ils concernaient exclusivement, ou non, le champ de la politique de la ville ; on ne disposait pas de l'état de leur consommation au cours des exercices précédents. Ainsi, il a considéré que l'annonce d'un montant de 7 milliards d'euros d'effort public au bénéfice de la politique de la ville constituait un affichage politique dont il était impossible de vérifier la réalité sur le terrain.

Il a déploré les lacunes de l'évaluation de la politique de la ville. Il a souligné que si le ministère de la ville imposait aux collectivités la réalisation de nombreuses études, il ne remplissait pas les obligations qui devraient être les siennes concernant l'évaluation des actions qu'il engageait. Il a cité pour exemple le cas des zones franches urbaines, que le gouvernement avait décidé de supprimer, sans véritablement savoir quel avait été leur impact. Il a jugé nécessaire de mettre en oeuvre, d'une part, un suivi de la consommation des crédits et, d'autre part, une évaluation qualitative des résultats obtenus par les différentes politiques menées. Il a estimé que l'absence de mise en relation des moyens avec les objectifs poursuivis et les résultats obtenus conduisait à une gestion erratique de l'argent des contribuables.

Pour conclure, M. Eric Doligé, rapporteur spécial, a souligné les difficultés résultant de la complexité des modalités de financement de la politique de la ville. Il a considéré qu'en dépit des réformes introduites au cours des deux dernières années, comme la création du fonds d'intervention pour la ville, celles-ci demeuraient insatisfaisantes, à cause de la lenteur des procédures de demande de subvention, et de la complexité du financement des opérations importantes, résultant de la dispersion des sources de financement. Il a exprimé le souhait que des réformes soient étudiées afin de poursuivre la simplification du financement de la politique de la ville.

La commission, suivant la proposition de son rapporteur spécial, a alors décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits du budget de la ville pour 2002, et d'adopter sans modification les articles 71 et 72 rattachés.

Jeudi 15 novembre 2001

- Présidence de M. Alain Lambert, président, puis de M. Roland du Luart, vice-président.

PJLF 2002 - Crédits de l'aide au développement - Examen du rapport spécial


La commission a tout d'abord examiné les crédits de l'aide au développement, sur le rapport de M. Michel Charasse, rapporteur spécial.
En préambule, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a souhaité s'interroger sur les leçons qui pouvaient être tirées des événements du 11 septembre dernier, s'agissant de l'aide publique au développement.

Il a estimé que ceux-ci avaient au moins, d'une certaine façon, contribué à rappeler l'ampleur de la fracture qui s'élargit chaque jour entre pays riches et pays pauvres. Les quatre cinquièmes de la population du monde vivent aujourd'hui dans les pays en développement et un cinquième (1,3 milliard de personnes) vit dans une situation d'extrême pauvreté, avec moins d'un dollar par jour. Leur nombre va croissant. Les 20 % des habitants de la planète les plus pauvres se partagent à peine plus de 1 % du revenu mondial en 2000, contre 2,3 % en 1960.

Cette situation est évidemment porteuse de risques majeurs. La mondialisation aujourd'hui si médiatisée est un redoutable révélateur des diversités et des disparités du monde actuel et la « globalisation » soulève des questions transversales : développement durable, risques sanitaires, préservation de l'environnement, sécurité physique, juridique et financière.

Une mobilisation renforcée de la communauté internationale en faveur de l'aide au développement apparaît donc indispensable et urgente si l'on veut éviter que la mondialisation ne se traduise par la marginalisation accrue d'une population qui tend à dominer la planète par son nombre, avec les risques qui en découlent.

Dans ce contexte général, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a estimé qu'on ne pouvait que déplorer la régression constante, continue et quasi-systématique de l'effort français en matière d'aide publique au développement. En cinq ans, de 1996 à 2001, l'aide publique française aura diminué de plus de 3 milliards de francs, soit 10 % de moins en cinq ans en francs courants.

M. Michel Charasse a de fait souligné que ces chiffres étaient désormais en totale contradiction avec la volonté affichée par la France de se poser en chantre -voire en champion- de l'aide au développement. Au huitième rang des pays de l'OCDE, la France conserve désormais difficilement le premier rang au sein du G7 en termes d'effort d'aide rapporté au PNB. Elle y est en effet désormais talonnée par le Royaume-Uni, qui la dépasse en termes de montant absolu d'aide.

Entre 1999 et 2000, l'aide française aura encore régressé de près de 14 %, alors que l'évolution, pour la moyenne des pays de l'OCDE, s'est limitée à moins 2 % et que le Royaume-Uni a progressé de près de 40 %.

De fait, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a considéré que la priorité politique donnée par le Royaume-Uni à l'aide au développement devait être méditée. Il a précisé que le Gouvernement britannique avait majoré de 5,5 % en termes réels le budget du Department for International Development qui, contrairement à la France, était désormais autonome vis-à-vis du Foreign Office, qu'il s'était engagé à porter son effort à 0,33 % du PNB en 2003, soit plus que la France aujourd'hui, qu'il préparait déjà un nouveau Livre Blanc sur le développement, expressément articulé autour des changements induits par la mondialisation et qu'il avait jugé utile d'adresser à ses fonctionnaires présents à Bruxelles dans ce secteur -une cinquantaine- une note intitulée « Comment influencer l'aide européenne».

M. Michel Charasse a ensuite constaté que l'aide française ne bénéficiait pas en priorité aux pays pauvres. Les pays les moins avancés perçoivent en effet aujourd'hui moins du quart de l'aide française, soit exactement autant que les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure et les pays à revenu élevé qui comprennent, il est vrai, la Nouvelle Calédonie et la Polynésie. Les pays les plus pauvres de la planète (pays les moins avancés et pays à faible revenu) en recueillent à peine la moitié. Au cours des dix dernières années, les pays les moins avancés sont également ceux qui ont le plus souffert de la redistribution sous contrainte budgétaire d'une enveloppe réduite : de 1989 à 1999, leur part dans une aide publique en forte baisse est passée de près du tiers à peine plus du cinquième du total.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a rappelé ensuite que la baisse globale de l'aide publique française résultait exclusivement de la chute de l'aide bilatérale, amputée de près de 7 milliards de francs entre 1996 et 2001, soit plus du quart du montant atteint en 1996, soulignant qu'au sein même de l'aide bilatérale, la plus lisible pour les Etats partenaires , il revenait à l'aide-projet, la plus lisible pour les populations concernées de diminuer le plus.

De fait, il a déploré que soient demeurés impavides, en définitive, dans ce naufrage de l'aide bilatérale, les frais administratifs, leur part dans le total de l'aide étant passée de moins de 6 % en 1995 à près de 8 % en 1999.

Précisant que la chute de l'aide bilatérale s'était accompagnée en parallèle d'une progression considérable en valeur absolue de l'aide multilatérale, essentiellement liée au poids croissant de l'aide européenne, M. Michel Charasse a précisé que la contribution française (contribution au budget européen plus contribution au Fonds européen de développement) était passée de 8,6 milliards de francs en 1996 à près de 12 milliards de francs en 2001, pour représenter désormais près du quart de l'aide publique française, contre moins de 13 % en 1996.

Il a estimé qu'une telle évolution comportait au moins deux risques : le premier relatif à la lisibilité de l'effort français et le second lié au gaspillage des fonds ainsi engagés. M. Michel Charasse a en effet considéré que la régression de l'aide bilatérale au profit d'une aide multilatérale « apatride » servait manifestement la volonté politique de certains de nos partenaires, estimant que la position des « elit donnors » européens (britannique et nordiques) était à cet égard révélatrice. Il s'est d'ailleurs interrogé sur les conséquences, à terme, de la double évolution qui conduisait la France à retirer massivement ses assistants techniques présents sur le terrain, tandis que, dans le même temps, la Communauté prévoyait d'envoyer 400 coopérants supplémentaires sur place.

M. Michel Charasse a ensuite indiqué, pour s'en indigner vivement, que, s'agissant seulement des crédits du Fonds européen de développement (FED) gérés par Bruxelles, le solde de l'enveloppe non engagée des FED antérieurs au 9e FED s'élevait, fin 2000 (dernier chiffre transmis), à 40 milliards de francs, soit le double de l'aide bilatérale française, tandis que le solde des engagements non décaissés s'élevait à 57 milliards de francs et que la trésorerie du FED atteignait 1,7 milliard de francs.

Abordant ensuite l'analyse des crédits inscrits pour 2002 au titre de l'aide au développement au budget des affaires étrangères, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a considéré que la réponse apportée n'était pas satisfaisante.

Rappelant que le budget des affaires étrangères pour 2002 montrait que l'action extérieure ne figurait pas au rang des priorités gouvernementales, il a souligné qu'au sein même du budget des affaires étrangères, la coopération et l'aide au développement étaient de plus en plus sacrifiées.

Evoquant rapidement les principales évolutions constatées, M. Michel Charasse a ainsi souligné qu'aucune augmentation n'était prévue pour les concours financiers et l'aide budgétaire, pour le transport de l'aide alimentaire, pour l'aide humanitaire et l'aide d'urgence, pour l'aide aux sorties de crise, pour les contributions à des dépenses internationales hors recherche, que les crédits de coopération militaire diminuaient de 5,6 % et que les crédits affectés à la seule coopération technique et au développement étaient vraisemblablement amputés de 20 % au sein d'une enveloppe devenue illisible, dès lors qu'elle englobait désormais l'ensemble des crédits de coopération, y compris culturelle, éducative et linguistique.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a particulièrement déploré la baisse des crédits de la coopération militaire. Dans un contexte qui nécessite à l'évidence un effort accru en matière de sécurité intérieure et extérieure des États, de surveillance du territoire et de renseignement, il a estimé que le recul constant de ces moyens allait en sens inverse de la politique qu'il faudrait mener, ce que la France aurait été en mesure de faire, précisément parce qu'elle avait, en ce domaine, patiemment forgé des habitudes et ancré des positions.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a souligné que d'une manière générale, la part dévolue aux actions de coopération, dans les dépenses de fonctionnement comme dans les dépenses d'intervention du ministère, régressait. Il a indiqué que cette évolution était particulièrement sensible pour les moyens d'intervention, dont la part dédiée à la coopération et à l'aide au développement passait de 52,2 % du total en 2000 à 49,4 % en 2001, et qui diminuaient au total de 171 millions de francs.

M. Michel Charasse a estimé qu'une telle évolution confirmait les craintes exprimées l'an dernier, estimant qu'au terme de la réforme du dispositif français d'aide au développement, on pouvait considérer que l'ancien ministère de la coopération, les moyens dont il disposait et son champ d'intervention privilégié, s'étaient totalement dissous au sein du ministère des affaires étrangères.

Il a déploré par ailleurs que « la grande réforme » de l'aide publique française se soit arrêtée à celle de son seul dispositif administratif - d'une lourdeur effrayante - sans déboucher sur la définition claire d'une nouvelle et crédible politique française du développement, rappelant que les querelles, nombreuses, furent, en définitive, essentiellement « de boutique », et jamais de doctrine.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a ensuite souhaité souligner, en matière d'aide publique au développement, les lacunes de l'analyse budgétaire et donc celles du contrôle exercé. Il a indiqué en effet que treize milliards de francs d'aide publique au développement échappaient à une inscription budgétaire identifiable, et donc au contrôle parlementaire susceptible d'être exercé. Cette somme considérable recouvre pour moitié ce qui correspond au financement par la France des dépenses d'aide financées sur le budget de la Commission européenne par le biais d'un prélèvement sur recettes du budget général. Elle correspond ensuite à des annulations de dettes, traitées sous forme d'un transfert au compte de découvert du Trésor, et à la partie des prêts faisant l'objet d'un financement partiel sur le marché. Elle recouvre enfin le coût des études supérieures d'étudiants étrangers en France, en provenance de pays en développement, évalué à 2,2 milliards de francs en 1999, et en constante progression.

M. Michel Charasse a ensuite précisé que près de 3 milliards de francs d' « aide au développement » transitaient par différents ministères techniques autres que le ministère des affaires étrangères et celui de l'économie et des finances, soit plus du quart du total des moyens affectés à la Direction générale de la coopération internationale au développement (DGCID), sans qu'il soit réellement possible d'avoir une vision claire de leur utilisation.

Ainsi, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a relevé qu'une part importante de ces moyens était affectée à certains grands organismes de recherche, bénéficiant également de crédits sur le budget des affaires étrangères, pour estimer que leur efficacité en matière d'aide au développement gagnerait parfois à être mieux démontrée. Il s'est également interrogé sur l'objet de l'action menée par le ministère de l'emploi et de la solidarité par le biais d'un coûteux « GIP-Inter » et sur le bien-fondé des actions financées par le ministère de la culture, compte tenu de l'importance relative des moyens par ailleurs mis en oeuvre sur ce secteur par la DGCID.

Déplorant vivement de n'avoir, à ce jour, reçu aucune réponse aux questions posées à ces ministères, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a estimé que dans un contexte de baisse aussi forte de l'aide publique française, il lui paraissait indispensable de mesurer l'efficacité des quelques 3 milliards de francs gérés par les ministères « techniques », dont 210 millions de francs en seuls coûts de fonctionnement.

Concluant, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a estimé qu'à ce rythme, la France risquait de ruiner des décennies d'efforts et de rentrer peu à peu dans le rang des pays banalisés et sans influence.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Alain Lambert, président, a tout d'abord déploré que, par un effet de « myopie », sans doute lié aux contraintes budgétaires, la France risque de se trouver rapidement dans l'incapacité de maintenir sa place et son influence dans le monde. Il s'est par ailleurs interrogé sur l'inefficacité provoquée par l'abondance et la complexité des procédures, et des canaux divers, mis en place en matière d'aide publique au développement.

S'interrogeant de manière générale sur l'absence de résultat des montants d'aide au développement pourtant considérables consentis au cours des dernières décennies, M. Maurice Blin a souhaité savoir s'il fallait invoquer le comportement des pays riches, l'incapacité des pays pauvres à tirer partie de l'aide qui leur était apportée ou la dérive des coûts de gestion de cette aide au développement. Il a évoqué en particulier les cas des pays riches du Moyen-Orient disposant de 60 % des ressources pétrolières, sans pour autant que la situation des pays musulmans voisins ait été sensiblement améliorée. Il a par ailleurs déploré à son tour la baisse des crédits de coopération militaire.

M. François Trucy a relevé l'importance de la mauvaise gestion des crédits concernés. Il a à son tour regretté la baisse de la présence des coopérants militaires sur le terrain, considérant qu'il s'agissait d'une politique à courte vue, fondée à tort sur des considérations strictement budgétaires. Il a souhaité savoir si la montée en puissance de l'aide communautaire pouvait constituer un risque d'éviction pour l'aide bilatérale française.

M. Claude Belot a souhaité insister sur l'importance de la présence audiovisuelle extérieure et sur l'apport que constituait la coopération décentralisée. Il a par ailleurs souhaité saluer la qualité de la contribution apportée par les universités françaises aux travaux de recherche menés sur les pays en voie de développement.

Evoquant les travaux tenus à l'Assemblée générale des Nations unies auxquels il avait récemment assisté en tant que membre de la délégation française, M. Jacques Chaumont a souligné que la question du financement du développement revêtait désormais, y compris pour les Américains, un caractère prioritaire dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il a donc déploré que, au vu des chiffres examinés, le Gouvernement français paraisse conduire une politique exactement inverse en ce domaine. Il a par ailleurs regretté que la France, membre permanent du Conseil de sécurité, ne figure qu'au 11e ou 12e rang des contributeurs volontaires aux organismes et fonds onusiens, loin derrière la plupart des petits pays européens, estimant qu'une telle politique n'était pas sans risque à un moment où la réforme du Conseil de sécurité, et notamment de sa composition, était à nouveau évoquée. Il s'est enfin interrogé sur la signification réelle de la « zone de solidarité prioritaire » (ZSP).

M. Aymeri de Montesquiou a considéré que le renforcement du multilatéralisme européen pouvait au contraire constituer une opportunité pour la France. Il a également évoqué l'apport de la coopération décentralisée en matière d'aide publique au développement. Il s'est interrogé sur les moyens d'améliorer l'efficacité de cette aide en général. Il a enfin estimé que, dans le cadre du renforcement de l'accueil des étudiants étrangers, la France devrait davantage favoriser les étudiants originaires de pays émergents.

Répondant aux différents intervenants, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a souligné que, dans le cadre des contraintes budgétaires et des priorités gouvernementales qui étaient les nôtres, et qui pouvaient peser sur le montant global de l'effort consenti en matière d'aide au développement, la répartition de cet effort et ses conditions de mise en oeuvre restaient contestables : il a de nouveau vivement fustigé l'importance des crédits non utilisés sur le Fonds européen de développement, ainsi que les exigences parfois excessives, ou dérisoires, des fonctionnaires européens en matière d'achèvement démocratique.

Par ailleurs, il a considéré que la progression constante de l'aide accordée aux Balkans, au détriment des pays membres de la zone de solidarité prioritaire, correspondait plus à la nécessité de renforcer le processus démocratique et de permettre la « mise à niveau » de ces pays, en vue d'une éventuelle adhésion à l'Union européenne, qu'à de véritables considérations d'aide au développement.

Répondant plus particulièrement à M. Maurice Blin, il a estimé que la pauvreté était une résultante complexe de tous les facteurs évoqués : égocentrisme des pays riches, ainsi qu'en attestent à nouveau les difficultés des négociations en cours à Doha, turpitudes des dirigeants riches des pays pauvres, incapacité des pays pauvres à utiliser à meilleur escient l'aide qui leur était consentie. Il a toutefois souligné l'ampleur des progrès franchis en matière de démocratie par des dirigeants désormais considérés comme exemplaires, tels Alpha Konaré ou Blaise Compaoré.

Répondant à M. François Trucy, il a considéré que, dans un contexte de réduction globale de l'aide, le renforcement du canal multilatéral entraînait nécessairement un effet d'éviction de l'aide bilatérale, ajoutant que la politique actuelle visant à inclure des financements bilatéraux dans des projets multilatéraux se traduisait par une dilution supplémentaire.

Il a par ailleurs estimé que la contractualisation des crédits de coopération décentralisée, désormais inclus en majorité dans les contrats de plan, n'était pas une bonne chose. Il a estimé enfin que la Zone de solidarité prioritaire (ZSP), qui comportait désormais de plus en plus de bénéficiaires, appelés à se répartir de moins en moins de moyens, n'avait plus guère de sens, d'autant que, par voie réglementaire, le décret du 11 septembre 2000, permettant à des pays hors zone, de bénéficier, « à titre exceptionnel », des moyens du Fonds de solidarité prioritaire, l'avait vraisemblablement totalement vidée de sa substance.

Concluant, pour déplorer à nouveau l'écart grandissant entre le discours tenu par la France et les moyens concrets qu'elle consacrait à l'aide au développement, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a estimé que le budget de la coopération pouvait être assimilé à « l'argent de poche » de la politique internationale.

A l'issue de cette présentation, la commission a décidé de réserver son vote jusqu'à l'examen des crédits des affaires étrangères.

Présidence de M. Roland du Luart, vice-président

PJLF 2002 - Crédits de l'aménagement du territoire et de l'environnement - I.- Aménagement du territoire - Examen du rapport spécial

La commission a ensuite examiné les crédits de l'aménagement du territoire et de l'environnement - I. Aménagement du territoire, sur le rapport de M. Roger Besse, rapporteur spécial.

M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué que le budget de l'aménagement du territoire s'élevait à un peu moins de 300 millions d'euros. Il a précisé que, selon le « jaune », l'ensemble des dépenses de l'Etat relatives à la politique d'aménagement du territoire atteignait près de 8 milliards d'euros, dont plus de la moitié correspondant à des dépenses du ministère de l'équipement. Il a ajouté que le budget de l'aménagement du territoire ne correspondait donc qu'à environ 3,5 % des dépenses consacrées à l'aménagement du territoire.

Il a indiqué qu'au mois de juillet de l'année 2001, il avait adressé au délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, ainsi qu'aux préfets de région, un questionnaire relatif à l'utilisation des crédits du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Si le premier lui avait rapidement et complètement répondu, il a déploré attendre encore la réponse de près de la moitié des préfets.

Il a indiqué que le budget de l'aménagement du territoire rassemblait les crédits gérés par la délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR), c'est-à-dire le budget de fonctionnement de la DATAR, la prime d'aménagement du territoire (PAT) et le FNADT. Il a constaté que le projet de loi de finances pour 2002 montrait un budget plus dynamique que celui pour l'année 2001 (+ 6,8 %, au lieu d'une diminution de 9,8 %), et qu'il s'élevait à 285 millions d'euros. Il a précisé que cette augmentation était due essentiellement aux mouvements affectant les crédits de la prime d'aménagement du territoire, sans conséquence sur le montant des crédits disponibles, les crédits de la PAT donnant lieu à des reports importants d'année en année.

Exprimant ses principales observations, il a tout d'abord abordé la question de la réforme de la prime d'aménagement du territoire (PAT). Il a rappelé que, le 24 février 1998, la Commission européenne avait indiqué à la France qu'elle devait mettre sa carte et ses dispositifs d'aide en conformité avec les nouvelles règles communautaires relatives aux aides à finalité régionale avant le 31 décembre 1999. Il a observé que la France n'avait pas satisfait à temps à cette obligation, la nouvelle carte de la PAT n'ayant été approuvée par la Commission qu'au mois de mars de l'année 2000 et le décret relatif au régime des aides étant seulement paru au mois d'avril de l'année 2001. Il a indiqué que, depuis la réforme, la PAT ne concernait plus que 34 % de la population (contre 40 % auparavant). Il a précisé qu'elle prévoyait trois catégories d'aides : celles relatives aux projets industriels, celles relatives aux entreprises de services à l'industrie et celles concernant les projets de recherche-développement. Il a souligné que le Gouvernement n'avait pas été totalement transparent à l'occasion de cette réforme, puisqu'il savait déjà, lors du vote des crédits de la PAT en 1999, que celle-ci ne pourrait pas être attribuée en l'an 2000 aux nouveaux dossiers.

Il a considéré que la politique d'aménagement du territoire donnait une impression de flou. Il a constaté que les dates annoncées étaient souvent repoussées. Il a observé que la réforme des zonages, annoncée il y a deux ans par la ministre pour la loi de finances pour 2001, n'avait pas dépassé le stade des rapports, le dernier en date étant celui remis au Premier ministre par Mme Geneviève Perrin-Gaillard et M. Philippe Duron le 27 mai 2001. Il a déploré que les schémas de services, prévus pour une publication avant le 31 décembre 1999 par la loi « Voynet » de manière à servir de base aux contrats de plan, puis arbitrés lors du CIADT du 9 juillet 2001, étaient encore au Conseil d'Etat, ainsi que le décret d'approbation auquel ils étaient annexés. Il a affirmé que les fonds créés par la loi « Pasqua » du 4 février 1995 étaient soit supprimés, soit vidés de leur contenu. Il a souligné que si le fonds de gestion de l'espace rural existait encore juridiquement, il n'était pas prévu de le doter en 2002. Il a considéré que le fonds national de développement des entreprises n'avait jamais existé concrètement et que le sigle FNDE servait de label à diverses mesures d'aide aux entreprises. Il a rappelé que le projet de loi de finances pour 2001 avait supprimé le fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN). Il a estimé que, si le fonds d'intervention pour les aéroports et les transports aériens (FIATA) était doté dans le projet de loi de finances pour 2002 (contrairement à ce qui avait été le cas l'année précédente), on pouvait se demander si ses crédits étaient suffisants, alors que l'avenir du transport aérien semblait soumis à de fortes incertitudes, en particulier depuis le 11 septembre 2001, et que l'aide aux lignes aériennes non rentables constituait un élément essentiel de la politique de désenclavement.

Enfin, il a insisté sur l'enjeu essentiel que constituait la création d'entreprise en zone défavorisée. Il a rappelé que, depuis plusieurs années, il soulignait l'intérêt des plates-formes d'initiative locale dans le soutien à la création d'entreprise dans les parties les plus fragiles du territoire. Il a indiqué que ces associations, qui rassemblaient des acteurs publics et privés, ainsi que des fonds publics et privés, attribuaient des prêts d'honneur aux créateurs d'entreprise, et suivaient la mise en place des projets par le biais de parrainages. Il a estimé que les plates-formes connaissaient un réel succès. Il a indiqué que leur nombre était passé de 87 en 1996 à 228 en 2001, et qu'en 2000, elles avaient financé 4.600 entreprises, accordé 212 millions de francs de prêts d'honneur et permis la création de 11.000 emplois. Il s'est félicité de la réforme, par la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000, de l'article 238 bis du code général des impôts, qui limitait jusqu'alors le bénéfice de l'agrément du ministère des finances aux seules associations qui aidaient à la création d'entreprise, et rappelé qu'il avait déposé à plusieurs reprises un amendement en ce sens.

Il a déploré que les nouvelles dispositions de la loi d'orientation sur l'aménagement du territoire ne se soient pas traduites par des changements notables. Il a estimé que les inégalités régionales s'accroissaient. Il a considéré que les dispositifs de péréquation et de rééquilibrage du territoire n'étaient pas à la hauteur des enjeux. Il a jugé que les zonages relatifs à la PAT et les zonages européens étaient déterminés de façon arbitraire. Il a déploré que, du fait de leur caractère tardif, les neuf schémas de services collectifs aient été sans effet sur le contenu des contrats de plan État-régions. Il a regretté la poursuite du recul des services publics en zone défavorisée. Il a néanmoins souligné l'apparition de nouveaux concepts, comme celui de maison des services publics, lui semblant aller dans le bon sens. Il a déploré que l'essentiel des moyens de l'aménagement du territoire soit consacré aux zones urbaines, et en particulier que le réseau TGV et le réseau de télécommunications à haut débit laissent à l'écart un tiers du territoire.

M. Aymeri de Montesquiou a demandé à M. Roger Besse, rapporteur spécial, si le Gouvernement menait des actions soutenant le développement des réseaux de télécommunication à haut débit dans les régions les plus défavorisées, comme il s'y était engagé à l'occasion du comité interministériel d'aménagement du territoire de Limoges.

En réponse, M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué que, selon les informations qui lui avaient été communiquées, de telles actions étaient effectivement prévues, bien qu'aucun crédit ne leur ait encore été affecté, et que les régions concernées n'aient pas encore été déterminées.

M. Roland du Luart, président, a demandé à M. Roger Besse, rapporteur spécial, ce qu'était l'agence française pour les investissements internationaux.

En réponse, M. Roger Besse, rapporteur spécial, a indiqué que cette agence regroupait les divers organismes chargés jusqu'alors de favoriser les investissements étrangers en France. Il a déploré qu'elle ait été créée, un peu à la sauvette, par un amendement du Gouvernement à l'occasion de la discussion de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques. Il a néanmoins estimé que sa création était justifiée.

La commission, suivant la proposition de son rapporteur spécial, a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits du budget de l'aménagement du territoire pour 2002.