Table des matières




- Présidence de M. Alain Lambert, président.

Passage à l'euro fiduciaire - Audition de MM. Jean Laurent, président, et Gilles Guitton, directeur de la fédération des banques françaises

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de MM. Jean Laurent, président, et Gilles Guitton, directeur de la fédération des banques françaises.

M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises,
a détaillé les cinq défis auxquels avait été confrontée la profession bancaire à l'occasion de l'introduction de l'euro. Il a tout d'abord développé le défi technologique que le basculement d'une monnaie dans une autre avait représenté pour l'ensemble des systèmes informatiques bancaires. Il a estimé que la très forte anticipation de ces modifications techniques, indolores pour le public, mais lourdes pour les banques, avait constitué un facteur essentiel de la réussite du passage à l'euro. Il a ensuite évoqué le défi logistique d'acheminement des pièces et des billets en euros dans les agences, à l'origine de fortes préoccupations en termes de sécurité. Le troisième défi, social, a consisté à mobiliser l'ensemble des collaborateurs bancaires autour de ce projet d'intérêt national, grâce à une intense formation et à la négociation d'accords sociaux équilibrés. Il a également rappelé que la forte affluence dans les agences bancaires au début du mois de janvier 2002, d'environ 10 % supérieure à la normale, avait conduit les banques à recruter du personnel supplémentaire et à mobiliser des collaborateurs habituellement affectés aux sièges. S'agissant du défi de la communication à l'égard de la clientèle, il s'est dit très agréablement surpris par la très bonne acceptation du changement de monnaie par l'ensemble des Français. Enfin, le défi de la sécurité, comme tous les autres, a pu être maîtrisé.

Il a rappelé que le passage à l'euro avait également constitué un véritable défi économique pour le secteur bancaire qui, sur trois ans, a supporté 4,6 milliards d'euros de dépenses d'intérêt national. Il s'est félicité, à cet égard, de l'attitude responsable des banques et de leurs dirigeants. Il a également rappelé le rôle économique irremplaçable que joue dans toute société le circuit bancaire et appelé les décideurs politiques à clarifier les règles du jeu auxquelles est soumise la profession.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est dit, en qualité de maire, frappé par l'actuelle montée des périls. Il s'est également inquiété des investissements colossaux nécessités par les exigences de sécurité autour des agences en centre-ville. Il a enfin interrogé les intervenants sur la question du blanchiment dans le secteur bancaire, et a rappelé qu'elle avait déjà été évoquée dans de récents travaux de la commission des finances.

En réponse, M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a estimé que la question de la sécurité n'était pas un phénomène nouveau pour les banques, mais qu'elle avait incontestablement gagné en intensité au cours des dernières années. Il a estimé en particulier que les banques étaient démunies face à un problème de société tel que le développement de la délinquance et qu'un débat était engagé avec les pouvoirs publics pour renforcer la sécurité et, le cas échéant, adopter de nouvelles méthodes de travail. S'agissant du blanchiment, il a estimé que ce sujet était très préoccupant pour la profession bancaire en raison, d'une part, de l'extension des incriminations et, d'autre part, de l'imprécision de l'étendue de la responsabilité des banques. Il a estimé, en particulier, s'agissant du contrôle de l'endossement des chèques, que la stricte application de la réglementation de 1935 pourrait, à l'extrême, conduire les banques à contrôler, un à un, les 4 milliards de chèques émis annuellement en France, une exigence légale manifestement disproportionnée et inapplicable. Il a enfin rappelé l'engagement des banques dans la lutte contre la grande délinquance financière et leur excellente coopération avec TRACFIN.

M. Denis Badré s'est demandé si les 4,6 milliards d'euros consacrés par les banques au passage à l'euro n'étaient pas, au moins partiellement, amortis par d'éventuelles économies. Il a insisté sur l'importance d'une poursuite de l'effort de communication dans trois directions : d'une part, pour valoriser le travail des collaborateurs des banques, d'autre part, pour mettre en valeur cette opération européenne réussie, et enfin, pour améliorer l'image des banques dans l'opinion publique. Il a également souhaité savoir qui, des banques ou des pouvoirs publics, avaient pris en charge le surcoût des escortes de transports de fonds liés au passage à l'euro.

En réponse, M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a estimé que les banques ne parviendraient vraisemblablement pas à réaliser d'économies à l'occasion du passage à l'euro, en raison de la trop faible harmonisation fiscale et réglementaire du secteur en Europe. Il a, en revanche, rejoint le souhait de M. Denis Badré de poursuivre la valorisation médiatique de l'introduction réussie de l'euro fiduciaire. S'agissant des dépenses de sécurité, il a précisé que celles-ci avaient été assumées tant par les pouvoirs publics, s'agissant des forces de l'ordre, que par les banques, s'agissant des convoyeurs de fonds.

M. Gilles Guitton, directeur de la fédération des banques françaises, a tenu à préciser que les vols à main armée étaient revenus de 80 en décembre 2000 à 62 en décembre 2001. Il a estimé que ce recul, paradoxal si l'on sait que les transferts de décembre 2001 ont été cinq fois supérieurs à ce qu'ils sont habituellement, était largement imputable à la présence des forces de l'ordre dans le cadre du « plan vigipirate ».

M. Auguste Cazalet a souligné que les personnes âgées s'étaient parfaitement accoutumées à la nouvelle monnaie. Il a cependant déploré que certaines pièces deviennent rapidement illisibles.

M. François Trucy a souhaité connaître l'estimation du montant des pièces et billets en francs qui ne reviendraient pas à la Banque de France et qui constitueraient ainsi un bénéfice pour l'Etat. Il a également souhaité savoir si le passage à l'euro avait modifié les comportements des Français dans l'utilisation des moyens de paiement.

En réponse, M. Gilles Guitton, directeur de la fédération des banques françaises, a confirmé qu'il résulterait du non-retour de billets et de pièces libellés en francs un bénéfice pour l'Etat, partiellement prévu dans le budget pour 2002. Il a regretté que la règle, imposée par la Banque de France dans un souci de lutte contre le faux-monnayage, de n'approvisionner les distributeurs automatiques qu'avec des billets neufs, conduise à des transferts de fonds accrus entre la banque centrale et les agences.

M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a indiqué qu'aucune modification dans l'utilisation des différents moyens de paiement n'était perceptible depuis le 1er janvier 2002. Il a également rappelé que la carte bancaire à puce, utilisée en France, présentait de bien meilleures garanties de sécurité que la carte bancaire à piste, d'usage courant dans d'autres pays.

M. Michel Moreigne a souhaité savoir quelles avaient été les revendications des banques auprès des pouvoirs publics pour compenser leur prise en charge de dépenses d'intérêt général, à l'occasion du passage à l'euro.

M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a précisé que la profession bancaire aurait apprécié que le gouvernement prenne, à l'occasion de l'euro, des mesures fiscales attendues depuis longtemps, s'agissant notamment de la contribution des institutions financières et de la taxe sur les salaires. Il a rappelé que dans d'autres pays, les pouvoirs publics avaient fait des gestes, en prenant, par exemple, des frais de transport à leur charge.

M. Jacques Baudot a souhaité connaître la répartition des 4,6 milliards d'euros de dépenses engagées par les banques. Il s'est étonné que la France annonce moins d'économies liées à l'euro que les autres pays européens.

M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a indiqué que les 4,6 milliards d'euros se répartissaient entre 3 milliards d'euros de dépenses de communication et d'information et 1,6 milliard d'euros de dépenses de sécurité et de formation des personnels.

M. Yann Gaillard s'est étonné que les distributeurs automatiques ne délivrent le plus souvent que des coupures de 20 ou 50 euros.

M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a précisé que les distributeurs disposaient en règle générale de deux cassettes de billets et que le choix des coupures correspondait le plus souvent au profil sociologique de la population utilisatrice du distributeur.

M. Roland du Luart a souhaité savoir pourquoi la France n'avait pas opté pour un système de neutralisation des billets en cas d'attaque à main armée, comme cela existe déjà dans d'autres pays, en Belgique par exemple. Il a également soumis l'idée d'un regroupement des agences notamment en centre-ville, compte tenu des risques liés à la sécurité.

M. Jean Laurent, président de la fédération des banques françaises, a indiqué que les banques étaient favorables aux systèmes dits alternatifs, qui détruisent par exemple les billets en cas d'attaque, mais que leur généralisation se heurtait à l'hostilité des convoyeurs de fonds. Il a, à ce sujet, rappelé que le décret relatif au transport de fonds de décembre 2001 ne lui paraissait pas suffisamment précis. Il a indiqué que la réflexion s'orientait principalement vers le concept d'« agences sans argent ».

Passage à l'euro fiduciaire - Audition de MM. Francis Cordelette, président du conseil de surveillance du groupe Auchan, et François Guermonpré, responsable Euro du groupe Auchan

La commission a ensuite procédé à l'audition de MM. Francis Cordelette, président du conseil de surveillance du groupe Auchan, et François Guermonpré, responsable Euro du groupe Auchan.

M. Francis Cordelette, président du conseil de surveillance,
a tout d'abord indiqué que le groupe Auchan réalisait un chiffre d'affaires de 100 milliards de francs, possédait 118 hypermarchés, employait 51.000 personnes et avait pour clients 7 millions de ménages.

Il a affirmé que l'entreprise s'était préparée au passage à l'euro dès l'année 1997, se dotant alors d'une structure consacrée exclusivement à cette tâche, employant 500 personnes et dirigée par M. Guermonpré.

Il a ensuite indiqué que 110 chantiers avaient été identifiés, concernant quatre grands domaines : l'informatique, la technique (notamment le recours au double étiquetage), la formation et la politique de prix. Il a en particulier affirmé que le groupe Auchan avait effectué une conversion stricte sans rechercher des arrondis, et estimait nécessaire de maintenir le double étiquetage tant que les clients le souhaiteraient et que la législation le permettrait. Il a précisé que le groupe avait obtenu de la part de ses industriels fournisseurs l'engagement de ne pas modifier leurs prix entre le 1er novembre 2001 et le 31 mars 2002.

M. François Guermonpré, responsable Euro du groupe, a considéré que le passage à l'euro avait amené celui-ci à remplir de nouvelles fonctions : celles de bureau de change, de coffre-fort de stockage, de collecteur de francs et de professeur et promoteur de l'euro.

Il a ensuite estimé que le succès du passage à l'euro du groupe Auchan s'expliquait par plusieurs facteurs : une préparation de cinq ans, 600.000 heures de formation, une forte mobilisation autour des enjeux, la décentralisation de la gestion du projet et le professionnalisme des salariés.

Il a indiqué que l'alimentation en euros, qui devait être achevée le 30 novembre 2001, ne l'avait été que le 31 décembre. Il a ajouté que les commandes d'euros avaient été honorées à 80 %, et que quelques ruptures d'approvisionnement locales avaient pu être constatées, concernant des pièces de cinquante centimes et deux euros, dans la région parisienne et dans l'est de la France. Il a déclaré qu'aucun problème technique n'avait été observé lors du passage à l'euro des caisses le 1er janvier 2002 et lors de l'ouverture du 2 janvier 2002. Il a précisé que quelques dépannages urgents avaient pu être effectués lors de la première semaine, grâce au concours de la Banque de France, et qu'aucun magasin n'avait dû repasser aux francs du fait d'une rupture d'approvisionnement.

Il a estimé que trois dates avaient revêtu une importance particulière : le 2 janvier avec la mise en circulation de l'euro, le 5 janvier avec le premier samedi depuis le passage à l'euro, et le 9 janvier avec les premiers soldes en euros.

Il a considéré que le passage à l'euro s'était bien passé au niveau des caisses. Il a indiqué que les effectifs des caisses avaient été accrus de 30 % la première semaine de l'année 2002, et que 2.500 personnes avaient été embauchées pour assister les clients et les hôtesses de caisse. Il a estimé que les paiements par coupures de 200 ou 500 francs avaient été deux à huit fois plus importants que d'habitude, selon les magasins. Il a précisé que la modification des moyens de paiement était faible, se limitant à une légère augmentation de la proportion des paiements par carte bancaire, au détriment de celle des paiements par chèque. Il a ajouté que 92,5 % des paiements étaient effectués en euros, et considéré que les paiements en francs se poursuivraient jusqu'au 17 février.

M. François Guermonpré a ensuite estimé que les clients avaient fait preuve d'enthousiasme à l'occasion du passage à l'euro, et considéré que leurs relations avec les hôtesses de caisse s'étaient améliorées. Il a indiqué que 75 % des clients déclaraient lire les prix dans les deux monnaies, et que 67 % pensaient que les prix avaient augmenté. Il a ajouté que bien que 18 % disent acheter moins de produits, le groupe Auchan n'avait constaté aucune diminution de la consommation.

Il a enfin indiqué que le groupe Auchan avait pris deux engagements : une conversion stricte des prix et le recours au double affichage tant que les clients le jugeraient nécessaire. Il a par ailleurs estimé qu'une disparition prématurée du double affichage pourrait déstabiliser certains consommateurs, et susciter une moindre consommation.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a demandé pendant combien de temps le double affichage devrait être maintenu.

En réponse, M. François Guermonpré a indiqué qu'au 15 janvier 2002 30 % des consommateurs déclaraient commencer à penser en euros. Il a estimé que le double affichage devrait être maintenu au moins jusqu'au 30 juin 2002, voire jusqu'au début de l'année 2003.

M. Francis Cordelette, président du conseil de surveillance, a précisé que les achats dits d'impulsion, comme les achats de vêtements, pourraient être réduits par une suppression prématurée du double affichage.

M. Jacques Baudot a demandé combien avait coûté le passage à l'euro, et si les consommateurs ou les fournisseurs payaient ce coût.

En réponse, M. Francis Cordelette a déclaré que ce coût avait été de 300 millions de francs, soit 0,30 % du chiffre d'affaires du groupe Auchan. Il a ajouté que ce coût n'avait été répercuté ni sur les clients ni sur les fournisseurs. Il a par ailleurs considéré que, les fournisseurs n'ayant pas augmenté leurs prix au 1er janvier de l'année 2002, des hausses plus importantes que d'habitude au mois d'avril ou au mois de mai étaient envisageables.

M. Maurice Blin a souhaité savoir quelles difficultés le groupe Auchan avait connues lors du passage à l'euro, comment le personnel s'était comporté, quelle formation il avait reçue à cette occasion, et comment s'était effectué le passage aux trente-cinq heures, en particulier en ce qui concernait une éventuelle répercussion de son coût sur les fournisseurs.

En réponse, M. Francis Cordelette, président du conseil de surveillance, a indiqué que le seul problème, minime, rencontré lors du passage à l'euro, avait été un retard de pré-alimentation en pièces pour certains magasins.

Il a estimé que la qualité des opérateurs français dans le domaine des grandes surfaces s'expliquait par la présence initiale de nombreux petits magasins associant commerce alimentaire et commerce non-alimentaire, par la faible variété des produits proposés par ces magasins, par le passage de la recherche d'une rentabilité du chiffre d'affaires à celle d'une rentabilité des capitaux, par les faibles prix de la propriété foncière par rapport à ceux pratiqués dans les autres pays, et par la coexistence de plusieurs opérateurs, permettant la concurrence.

Il a indiqué que le groupe Auchan consacrait 4 % de la masse salariale à la formation du personnel, et disposait de son propre organe de formation, dénommé « institut de formation et d'excellence ».

Il a estimé que la motivation du personnel provenait en partie d'une politique salariale avantageuse, et du fait que la quasi-totalité des salariés du groupe en étaient actionnaires. Il a précisé que le fonds commun de placement des salariés était le plus gros actionnaire du groupe.

Concernant la réduction du temps de travail, il a indiqué que le groupe était passé aux trente-cinq heures dès le mois d'octobre de l'année 1999, que 1.500 embauches supplémentaires avaient été réalisées et qu'en 2001 la masse salariale avait augmenté plus rapidement que le chiffre d'affaires.

Enfin, il a déclaré que les relations avec les fournisseurs étaient loyales, et que de nombreux industriels souhaiteraient travailler avec Auchan. Il a par ailleurs précisé que 42 fournisseurs représentant 50 % des achats, les acheteurs du groupe avaient intérêt au développement des petites et moyennes entreprises.

M. Alain Lambert, président, a demandé si le groupe Auchan avait été amené à se substituer aux banques pour les opérations de change, s'il avait rencontré des problèmes de sécurité non prévus, et ce qu'il attendait de l'euro pour son développement.

En réponse, M. François Guermonpré, responsable Euro du groupe Auchan, a estimé que ce dernier avait joué un rôle important de bureau de change, de nombreux clients ayant effectué des paiements avec des liasses de billets de deux cents ou cinq cents francs. Il a indiqué qu'aucun incident ne s'était produit concernant la sécurité. Il a par ailleurs estimé que le passage à l'euro pourrait susciter une présentation plus aisée des informations financières du groupe, une plus grande centralisation de sa trésorerie, une plus forte mise en concurrence de ses fournisseurs et une augmentation de la fréquentation de ses magasins des zones frontalières.

Passage à l'euro fiduciaire - Audition de Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'Institut national de la consommation

La commission a ensuite procédé à l'audition de Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'Institut national de la consommation (INC).

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a déclaré que cet institut s'était inquiété du passage à l'euro dès 1997, avec le lancement d'une campagne d'information dans son mensuel « Soixante millions de consommateurs ». Elle a indiqué qu'en 1998 il avait entamé une étude des pratiques de dix grandes surfaces concernant les prix, le conditionnement et l'étiquetage. Elle a ajouté que l'institut avait réalisé, en 1997 et en juin 2001, deux enquêtes auprès des lecteurs de « Soixante millions de consommateurs », la seconde indiquant que 65 % des Français ne souhaitaient alors pas anticiper le passage à l'euro. Enfin, elle a déclaré qu'il avait publié divers ouvrages : une recension d'outils pédagogiques concernant le passage à l'euro, et deux brochures destinées à favoriser la préparation des consommateurs et des associations.

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a exposé les enseignements relatifs à la préparation à l'euro qu'a notamment tirés l'institut de sa participation aux travaux du conseil national de la concurrence. Elle a relevé la grande diversité d'initiatives visant à préparer le public à l'euro, qu'elles viennent de municipalités, d'associations de commerçants ou de consommateurs, ou de ministères. Elle a indiqué que le mensuel « Soixante millions de consommateurs » avait publié « quatorze coups de chapeau » à des « héros anonymes » de l'euro. Elle a mis en cause en revanche des « mauvais élèves », au premier rang desquels figurent les banques, dont la participation à la préparation du public à l'euro s'est révélée inégale. Elle a souligné que dans certains cas, des établissements avaient pénalisé les transactions en amont de l'euro, ou facturé les chèques « mutés », chèques établis par erreur en franc ou en euro sur un chéquier prévu pour l'autre monnaie. Elle a également déploré que les banques n'aient pas renoncé à facturer les paiements transfrontaliers et les paiements par chèque ou par carte bancaire hors des frontières nationales. Elle a enfin cité parmi les « mauvais élèves » les fabricants ou distributeurs de produits de grande consommation, constatant, selon une enquête réalisée par son institut entre juin 2000 et juin 2001, que les prix de soixante références sur deux cent cinquante étudiées avaient dérapé, sans qu'il puisse être établi que ce dérapage soit entièrement imputable à l'euro. Elle n'a pas exclu que certains fabricants ou distributeurs aient anticipé le blocage des prix auxquels ils s'étaient engagés lors du passage à l'euro ou qu'ils aient procédé à des arrondis pour obtenir des « prix psychologiques ».

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a ensuite indiqué que l'institut avait lancé un appel à témoignages à l'occasion du passage à l'euro et que les témoignages recueillis portaient essentiellement sur des dérapages de prix, d'inégale importance, dans le petit commerce et les services, confirmés par une enquête de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes dans trente-sept secteurs. Elle a mentionné pour exemple les dérapages de prix suscités par les parcmètres ou les laveries automatiques et remarqué que les consommateurs avaient été particulièrement choqués par les hausses de prix dans les services publics. Elle a observé que certains consommateurs, à l'occasion de l'émission radiodiffusée organisée par France Info avec l'institut, avait exprimé un sentiment de confusion, croyant qu'il existait des textes réglementaires bloquant les prix lors du passage à l'euro, et s'interrogeant sur la régularité des hausses de prix.

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a par ailleurs noté que les autres témoignages, certes en moins grand nombre, concernaient l'attitude des établissements bancaires à l'occasion du passage à l'euro, citant le refus d'échanger des francs contre des euros pour les non-clients, les commissions perçues pour effectuer des échanges, les limites aux échanges avec les devises étrangères, le traitement particulièrement long des chèques en cas d'erreur d'écriture. Elle a indiqué que l'attitude des commerçants lors des échanges et des rendus de monnaie avait été peu stigmatisée, relevant seulement un certain désordre dans l'affichage des prix à l'occasion des soldes, une enquête à paraître du mensuel « Soixante millions de consommateurs » portant sur vingt-cinq surfaces spécialisées soulignant qu'en matière d'étiquettes toutes les pratiques -affichage de un à quatre prix- avaient été observées.

En conclusion, Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a énuméré les points qui vont bénéficier de l'attention de son institut au cours des prochains mois : en premier lieu, le double affichage des prix en francs et en euros qui, s'il ne fait l'objet d'aucun cadre réglementaire, est souhaité au moins jusqu'au 30 juin 2002 par 44 % des lecteurs du mensuel « Soixante millions de consommateurs » dans une enquête réalisée en novembre 2001 et qui s'avère nécessaire pour que les consommateurs, surtout les plus modestes, puissent acquérir des repères personnels. Elle a également évoqué une sensibilisation accrue des consommateurs aux faces nationales des pièces des différents pays de la zone euro, une campagne en faveur des centimes d'euro, la surveillance des prix, notamment des commissions bancaires, et les comparaisons de prix, désormais rendues possibles par l'euro, entre les différents Etats européens. Elle a conclu en soulignant que les consommateurs n'étaient pas hostiles à l'euro et qu'il fallait éviter qu'ils le deviennent.

Un large débat s'est ensuite instauré.

A une question de M. Yann Gaillard relative aux centimes d'euro, Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a répondu qu'elle souhaitait leur maintien.

M. Yann Gaillard a souligné le contraste entre la sévérité du constat formulé par l'institut national de la consommation sur les banques et les propos tenus, lors de son audition devant la commission, par la fédération des banques françaises, qui s'est félicitée de leur rôle dans le passage à l'euro. Il a souhaité savoir si les observations de l'institut convergeaient avec celles des associations de consommateurs et connaître le sentiment global de l'institut sur le passage à l'euro.

Mme Patricia Foucher, juriste à l'INC, a indiqué que les constats formulés par les associations de consommateurs sur le passage à l'euro, aussi bien lors du dernier groupe de travail « euro » du conseil national de la consommation qu'à l'occasion de l'émission réalisée avec France Info, étaient similaires à ceux de l'institut national de la consommation.

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a observé que l'opération de passage à l'euro s'était globalement bien passée, en raison notamment de la période de double circulation du franc et de l'euro et de la distribution de kits « euro » avant le 1er janvier 2002.

M. François Trucy a souhaité savoir si le système scolaire avait fait l'objet d'une sensibilisation spécifique et si on avait évité un syndrome identique à celui provoqué par le passage de l'ancien au nouveau franc. Il s'est demandé si plusieurs vagues d'arrondis n'allaient pas survenir, engendrées notamment par les commerçants ayant converti leur prix de manière vertueuse au 31 janvier 2002. Il a regretté que sur les claviers de certains ordinateurs ne soit pas prévu le symbole € spécifique à l'euro.

Mme Patricia Foucher a indiqué que l'éducation nationale avait fourni aux enseignants des collèges des kits pédagogiques et que l'institut national de la consommation avait mis en ligne sur son site internet à destination des enseignants des outils pédagogiques variés. En ce qui concerne les claviers d'ordinateur anciens, elle a déclaré qu'il convenait de s'adresser à chaque fabricant concerné mais qu'en l'absence du symbole de l'euro, l'équivalent international EUR pouvait être employé.

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a remarqué s'agissant d'un éventuel syndrome lié à l'euro que l'apprentissage de la nouvelle monnaie était loin d'être fait, que tout le système de repérage n'était pas encore en place, mais que l'enthousiasme actuel et l'adhésion des consommateurs étaient de bon augure. S'agissant des arrondis, elle a noté que la surveillance des prix devait se maintenir et que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ferait fonctionner son observatoire de l'euro encore quelque temps.

M. Jacques Baudot a observé que les Français ne souhaitaient pas véritablement les centimes d'euro. Il a constaté qu'il était désormais possible de visualiser aisément les différences de prix entre pays, surtout dans les zones frontalières.

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a remarqué que s'agissant de l'avenir des centimes d'euro, les habitudes des consommateurs seraient déterminantes, mais qu'il serait malvenu de les retirer des échanges, au moins pour l'instant. En ce qui concerne les comparaisons de prix entre les différents pays européens, l'institut national de la consommation n'a pas les moyens d'être un des principaux acteurs dans le domaine, mais il a noué des contacts avec différents correspondants.

M. François Trucy a observé que les consommateurs auraient réclamé les centimes d'euro s'ils n'avaient pas été frappés.

M. Maurice Blin a exprimé son scepticisme sur l'utilité des centimes d'euro. Il a également remarqué les réticences françaises à la circulation des grosses coupures. Il s'est interrogé enfin sur les raisons pour lesquelles l'institut national de la consommation n'avait pas pu prévoir, comme aucun des autres acteurs d'ailleurs, non seulement la facilité avec laquelle se produisait le passage à l'euro mais aussi le sentiment de nouveauté, voire d'allégresse, que ressentent les Français face à leur nouvelle monnaie.

Mme Maïté Errecart, directrice générale de l'institut national de la consommation, a indiqué que, si son institut n'avait pas été pessimiste quant au passage à l'euro, notamment en raison de sa participation à la phase de préparation, il lui avait été difficile d'anticiper réellement le comportement des consommateurs, notant par exemple que 24 % des lecteurs du mensuel « Soixante millions de consommateurs » avaient prévu que l'euro aurait comme principal effet de réduire leur consommation. Elle a indiqué qu'elle ne disposait pas de véritables informations sur les grosses coupures.

M. Jacques Baudot a souligné que le directeur du Trésor lui-même, interrogé par la commission des finances, n'avait jamais vu de billet de cinq cents euros.

Passage à l'euro fiduciaire - Audition de M. Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque de France

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Claude Trichet, gouverneur de la Banque de France.

M. Jean-Claude Trichet a tout d'abord tenu à remercier la commission pour son soutien permanent à la Banque de France dans sa stratégie monétaire, qui a permis de conduire à la monnaie unique. Evoquant le souvenir de sa première audition devant la commission, juste après l'entrée en vigueur de l'indépendance de la Banque en matière de politique monétaire le 27 janvier 1994, le gouverneur a rappelé qu'à l'époque, la question du passage à la monnaie unique était axée sur la satisfaction des critères de convergence fixés par le traité de Maastricht qui, selon certains, paraissaient extrêmement difficiles à atteindre. Quatre ans après, en termes d'inflation, la France se situait en deuxième position au sein de l'Union européenne et en première position ex æquo avec les Pays-Bas en ce qui concerne les bas taux d'intérêt à long terme : ainsi, en 1998, les résultats monétaires et financiers français faisaient partie de l'étalon de référence à partir duquel on mesurait la performance des Etats membres admis à adopter la monnaie unique. Le gouverneur a également rappelé les efforts entrepris pour que les marchés monétaires et financiers puissent passer à l'euro dès le 1er janvier 1999. En dépit des nombreuses critiques adressées à la Banque de France, l'analyse de celle-ci s'est donc révélée réaliste et a permis le passage à la monnaie unique.

M. Jean-Claude Trichet a estimé que la situation était globalement la même pour le passage à l'euro fiduciaire au 1er janvier 2002, insistant sur le bon déroulement des opérations malgré l'expression de nombreux doutes. Il a en effet rappelé que la période de trois ans retenue entre l'introduction de l'euro scriptural et celle de l'euro fiduciaire avait parfois été jugée trop longue, alors qu'en réalité, elle a permis une très bonne préparation des opérations. Il a rappelé qu'avant même le 1er janvier 2002, avait été retenu l'objectif, dans un but pédagogique, de réaliser 70 % des transactions par écritures en euros. Il a ajouté que le traitement informatique du passage à la monnaie unique avait constitué une opération extrêmement complexe et longue et, à cette occasion, a tenu à rendre hommage au rôle joué par les banques commerciales qui, selon lui, sont trop souvent critiquées en France. Il a ainsi indiqué que, au dernier jour ouvrable de l'année 2001, c'est-à-dire avant même l'introduction de la monnaie unique auprès du grand public, 75 % de la valeur des transactions scripturales étaient réalisés en euro.

Le gouverneur a ensuite présenté les trois principes retenus par la Banque de France pour assurer le passage à l'euro fiduciaire dans de bonnes conditions : une très large pré-alimentation en billets et en pièces, un objectif de 90 % des transactions en euro fiduciaire à l'issue des trois premières semaines suivant son introduction, et l'étalement des échanges correspondant aux économies des Français.

Il a indiqué que, en matière de pré-alimentation, la demande, initialement estimée par les intéressés eux-mêmes à 3,5 milliards de pièces, avait atteint 7 milliards de pièces, des demandes supplémentaires s'étant généralisées dans l'ensemble des compartiments de l'économie. Ce phénomène a suscité des interrogations au sein de la Banque de France, qui a néanmoins estimé qu'il était avant tout indispensable d'éviter l'apparition de rumeurs de pénurie de la monnaie unique, ces rumeurs étant avant tout un phénomène d'ordre psychologique. Dès lors, la Banque de France a honoré toutes les demandes très rapidement. Il a expliqué que les opérations logistiques concernant les pièces avaient été extraordinaires puisque 30.000 tonnes de pièces en euros devaient être injectées dans l'économie, tandis que 30.000 tonnes de pièces en francs devaient en être retirées. A cette occasion, il a également souhaité rendre hommage au ministère de l'intérieur et à celui de la défense, l'organisation matérielle du passage à l'euro ayant nécessité une protection policière et militaire, ainsi qu'à la Société nationale des chemins de fer français (SNCF). Il a également salué la forte implication des 80 directeurs de succursales de la Banque de France qui ont joué un rôle éminent, notamment en présidant les comités techniques de place, dans le succès du passage à l'euro.

Le gouverneur a précisé que ces opérations n'étaient toutefois pas encore terminées, les 30.000 tonnes de pièces en francs n'étant pas complètement remontées. C'est pourquoi les deux sous-gouverneurs de la Banque de France ainsi que les responsables des banques commerciales et de La Poste, des transporteurs de fonds et du grand commerce, ont continué à se réunir très régulièrement afin de se tenir prêts à faire face à toute éventualité. Il a également estimé que l'introduction des billets en euros n'avait pas suscité d'incident particulier, les échanges ayant eu lieu dans les proportions prévues, plus de 90 % des transactions en espèces ayant aujourd'hui lieu en euros. Ainsi, au 29 janvier 2002 au soir, 22,9 milliards d'euros en billets étaient en circulation, de même que 14,9 milliards de billets en francs. Enfin, il a souligné la grande qualité technique de la fabrication des billets, précisant que la Banque de France fournissait des billets à quatre banques centrales nationales de la zone euro, ce qui permet d'ailleurs aux usines de production, celle de Chamalières notamment, de poursuivre leurs activités.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. Gérard Braun a voulu savoir quels risques pouvaient encore affecter le passage à l'euro. Il s'est interrogé sur l'existence d'études relatives à la valeur des pièces en francs qui ne seraient jamais échangées. Enfin, il a souhaité connaître l'analyse du gouverneur quant à la faiblesse de l'euro par rapport au dollar.

M. Jean-Claude Trichet a estimé que les opérations de passage à l'euro devaient se poursuivre, et a rappelé que la priorité avait été donnée aux euros injectés dans l'économie, et qu'il est dès lors normal que la remontée des francs s'effectue à un rythme plus lent, ce qui nécessite d'ailleurs de poursuivre, après la fin du mois de février, le fonctionnement des centres secondaires. Il a considéré qu'existaient de fortes probabilités qu'un grand nombre de pièces en francs ne soient pas échangées, évoquant par exemple l'évaporation monétaire engendrée par le tourisme. Selon lui, ce problème se posera également pour les billets en francs, mais dans une moindre mesure. Il a indiqué que la Banque de France continuait à verser des acomptes au budget de l'Etat au titre des francs qui ne seraient pas restitués, et a rappelé que, dans sa mémoire, 240 millions d'euros avaient été prévus dans la loi de finances pour 2002 à cette fin.

M. François Trucy a voulu savoir s'il avait été possible de réaliser des économies sur la fabrication des billets en euros. Puis il a interrogé le gouverneur sur le niveau de sécurisation des cartes bancaires françaises.

M. Jean-Claude Trichet a rappelé que la Banque de France était très attentive à donner à notre pays les meilleurs services au meilleur coût. Des progrès de productivité indispensables ont conduit à réduire de 2.500 emplois les effectifs à la Banque de France au cours des huit dernières années, sans licenciement naturellement. Il a souligné les efforts réalisés en matière de réorganisation de la fabrication des billets pour hisser la production à un niveau de compétitivité supérieur. Il a reconnu que des progrès restaient à faire, la concurrence au sein de l'Europe portant sur un ensemble d'aspects, la qualité, le coût, la livraison, la fiabilité des billets... Evoquant la question de la sécurisation des cartes bancaires, il a indiqué que, si l'ingéniosité des faussaires était grande, celle des pouvoirs publics s'efforçait d'être plus grande encore pour les empêcher de nuire, et a rappelé que le Parlement avait récemment accru la responsabilité de la Banque de France en matière de sécurisation.

M. Yves Fréville a fait observer que la France utilisait beaucoup moins de billets que les autres pays européens, et s'est demandé si les Français n'utilisaient pas trop leurs cartes et chéquiers. Puis il a exprimé son inquiétude sur la question de « l'argent sale ». Enfin il a voulu connaître la position du gouverneur sur le fait que l'euro était désormais utilisé dans plusieurs pays d'Europe centrale et orientale.

M. Jean-Claude Trichet a indiqué que la Banque de France souffrait dans son compte d'exploitation de la faible circulation fiduciaire en France, et que celle-ci s'expliquait à la fois par une législation plus sévère pour les paiements en espèces que dans le reste de l'Europe, par l'existence de cartes interbancaires rendant de nombreux services, ainsi que par la généralisation de l'usage des chèques dans notre pays. Il a indiqué que l'introduction de l'euro fiduciaire avait effectivement entraîné une substitution des euros aux monnaies nationales qui pouvaient circuler dans certains pays d'Europe centrale et orientale, le deutschemark en particulier. Il en va naturellement de même s'agissant des francs qui circulaient en Afrique du nord et dans l'Afrique subsaharienne.

M. René Trégouët a voulu savoir quelles banques centrales nationales de la zone euro étaient plus compétitives que la Banque de France pour la fabrication des billets. Il s'est également interrogé sur la façon dont les billets en francs restitués étaient rendus inutilisables.

M. Jean-Claude Trichet a rappelé que certaines banques centrales nationales, à l'instar de la Banque de France, fabriquaient elles-mêmes les billets, notamment en Italie, en Belgique et en Autriche, tandis que d'autres recouraient aux services d'entreprises privées.

M. Roland du Luart s'est interrogé sur la compétitivité de l'établissement de Pessac en matière de fabrication des pièces. Puis il s'est enquis des conséquences de l'introduction de l'euro sur le faux-monnayage. Enfin, il a interrogé le gouverneur sur les réticences françaises à l'égard des « grosses coupures ».

M. Jean-Claude Trichet a indiqué que la fabrication des pièces relevait de l'administration des Monnaies et Médailles, elle-même placée sous l'autorité du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il a précisé que les billets en euros étaient encore plus difficiles à falsifier que la dernière gamme des billets en francs, en particulier grâce au recours aux meilleures techniques de fabrication de l'ensemble des pays de la zone euro. S'agissant des « grosses coupures », il a indiqué que le souci du respect des différents usages dans les pays de la zone euro avait conduit à fabriquer des billets d'une valeur importante, et a observé que ces derniers, notamment ceux de 200 et 500 euros, étaient plus demandés que prévu en France.

M. Jean Clouet a voulu savoir quelle était la durée de vie moyenne des billets.

M. Jean-Claude Trichet a précisé qu'aucune décision n'avait encore été prise afin d'introduire une nouvelle génération de billets en euros, un premier renouvellement d'une partie de ceux-ci n'allant probablement pas intervenir avant 2007 ou 2008. Il a toutefois noté que la durée de vie d'un billet était variable en fonction de sa valeur, qui elle-même détermine son rythme de circulation.

M. Jacques Oudin a voulu savoir si, selon le gouverneur, la récente faiblesse de l'euro constituait un accident temporaire ou était le signe d'une baisse prolongée.

M. Jean-Claude Trichet a réaffirmé qu'un euro fort était dans l'intérêt de l'économie européenne.

Passage à l'euro fiduciaire - Audition de M. Guy Coste, président de la commission du commerce intérieur à la chambre de commerce et d'industrie de Paris

La commission a enfin procédé à l'audition de M. Guy Coste, président de la commission du commerce intérieur à la chambre de commerce et d'industrie de Paris.

M. Guy Coste a tout d'abord rappelé que les entreprises du commerce s'étaient impliquées de longue date dans le passage à l'euro. Celles-ci, a-t-il indiqué, se sont très tôt exprimées, conformément à la mission consultative dévolue aux chambres de commerce et d'industrie. Les travaux d'ordre juridique ont démarré très tôt, permettant à la Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) d'exprimer sa position sur les modalités concrètes du passage à l'euro. Il a indiqué à titre d'exemple que l'idée du « kit euro » était venue des commerçants.

Evoquant les derniers ajustements annoncés ou votés ces dernières semaines, il s'est dit partiellement satisfait.

Il s'est félicité du vote d'un article dans la loi portant « mesures urgentes à caractère économique et financier » du 11 décembre 2001, permettant un amortissement exceptionnel sur douze mois des matériels acquis en 2000 et 2001 dans le but d'encaisser les divers paiements en euros. Toutefois, il a regretté que la mesure ne vise que les petites et moyennes entreprises (PME), réalisant moins de cinquante millions de francs de chiffre d'affaires.

Par ailleurs, il a déploré que l'intégration des balances pour transactions commerciales en euros, introduite par le Sénat dans ce dispositif, ait disparu en lecture définitive.

Il a ensuite évoqué la création par la CCI de « CAP EURO », observatoire du passage à la monnaie unique des PME et commerces de détail de la région parisienne. Cet observatoire, a-t-il indiqué, a effectué onze enquêtes, dont la dernière sera rendue publique le 19 février prochain.

Il s'est félicité des nombreuses actions sur le terrain menées par la CCI et a cité entre autres exemples le concept de la boutique euro, la réalisation d'un guide pratique de l'euro, la mise en place d'un numéro vert euro ainsi que la création de CD-Rom d'aide au passage à l'euro.

En guise de conclusion, il s'est félicité des conditions dans lesquelles s'était effectué le passage à l'euro en France, citant à l'appui un sondage de la Société française de sondages et d'études de marché (SOFRES) d'après lequel 95 % des français interrogés considèrent que l'arrivée de la nouvelle monnaie se fait dans de bonnes conditions.

Se prononçant en faveur d'un dédommagement des petites entreprises, proposant comme somme maximale 915 euros (6.000 francs), il a également souhaité le développement des porte-monnaies électroniques.

Un court débat s'est alors engagé, auquel ont participé MM. François Trucy et Auguste Cazalet. MM. François Trucy et Guy Coste se sont faits les avocats du porte-monnaie électronique, M. Auguste Cazalet soulignant pour sa part l'attachement des Français à la monnaie métallique et fiduciaire pour certains types d'opérations, citant le cas des marchés.