Table des matières




- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Economie - Audition de M. Jean-Paul Fitoussi, président de l'Observatoire français des conjonctures économiques, et de M. Marc Touati, chef économiste de Natexis Banques populaires, sur la conjoncture économique et l'évolution de l'euro



La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean-Paul Fitoussi, président de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), et de M. Marc Touati, chef économiste de Natexis Banques populaires, sur la conjoncture économique et l'évolution de l'euro.

M. Jean Arthuis, président, a indiqué que cette audition répondait à un souhait exprimé par le Bureau de la commission d'analyser les conditions d'un retour durable de la croissance en France. Il a rappelé que les prévisions de croissance du PIB de la France pour l'année 2004 de l'OFCE et de Natexis Banques populaires étaient de respectivement 1,5 % et 1,8 %, soit proches du consensus des conjoncturistes, qui s'établissait à 1,6 %.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Marc Touati a estimé que la croissance du PIB des Etats-Unis serait de 4 % en 2004. Il a considéré que la reprise actuelle était, en effet, solide comme en témoignaient notamment l'importance des investissements informatiques et l'indice composite des directeurs d'achat dans l'industrie manufacturière. Il a ajouté que les « déficits jumeaux » se réduiraient, le déficit public grâce à la reprise, et le déficit extérieur grâce à la dépréciation du dollar.

Il a estimé que la situation économique de la zone euro était moins favorable que celle des Etats-Unis, aucun de ses principaux pays n'ayant eu en 2003 une croissance du PIB supérieure à 0,4 % (à l'exception de l'Espagne), son taux de chômage étant élevé, et sa dette publique « s'auto-entretenant » du fait de taux d'intérêts réels à long terme supérieurs à la croissance économique. Il a ajouté que, sur le long terme, la zone euro pourrait d'autant moins faire face à la concurrence des pays émergents que l'investissement y était peu important, en particulier en recherche et développement. Il a estimé que, en 2003, l'appréciation de l'euro avait réduit la croissance du PIB français de 0,7 point. Il a jugé que l'appréciation de l'euro, ne provenant ni d'une croissance du PIB plus élevée dans la zone euro qu'aux Etats-Unis, ni d'un rapprochement de sa valeur d'équilibre de long terme, s'expliquait essentiellement par le niveau élevé des taux d'intérêt à court terme de la zone euro. Il a estimé que, si en 2004 le taux de change de l'euro était de 1,25 dollar au lieu de 1,15 dollar, la croissance du PIB de l'économie française serait de 1,2 %, et non de 1,8 %. Il a souligné que les entreprises françaises tendaient à investir à l'étranger plutôt qu'en France, en particulier aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.

M. Jean Arthuis, président, a souligné l'importance de l'aléa constitué par le taux de change de l'euro.

M. Jean-Paul Fitoussi a rappelé les erreurs de prévisions pour les années 2002 et 2003 : en 2002, alors que les conjoncturistes prévoyaient une croissance du PIB de la zone euro supérieure à celle du PIB des Etats-Unis, c'était le contraire qui s'était produit, et en 2003 la prévision d'une croissance du PIB de l'ordre de 3 % pour les deux zones ne s'était pas vérifiée, la croissance ayant été d'environ 3 % aux Etats-Unis et 0,5 % dans la zone euro. Il a indiqué que ces prévisions reposaient sur l'idée que l'économie américaine avait été plus touchée que celle de la zone euro par le surinvestissement dans les nouvelles technologies de l'information et de la communication et par le manque de sincérité des comptes des entreprises. Il a considéré que le caractère erroné de ces prévisions venait du fait que, si le gouvernement américain avait reconnu l'exceptionnalité des circonstances, et adapté sa politique monétaire et budgétaire à cette situation, tel n'avait pas été le cas des autorités en charge de la politique économique dans la zone euro. Il a cependant estimé, contrairement à M. Marc Touati, que le déficit budgétaire des Etats-Unis risquait d'être durable. Il a ajouté que les Etats-Unis ne voyaient pas leur solvabilité remise en cause par leur déficit extérieur, du fait en particulier d'une croissance annuelle de la productivité du travail de l'ordre de 3 %, contre 0 % en Europe. Il a évalué les perspectives de croissance du PIB des Etats-Unis en 2004 à 5-6 % selon un scénario optimiste, et 4 % selon un scénario qualifié de « pessimiste ». Il a indiqué que les conditions monétaires, c'est-à-dire les taux d'intérêt et de change, étaient aux Etats-Unis particulièrement favorables à la croissance.

Il a considéré que la zone euro verrait sa croissance réduite en 2004 par un rythme de la croissance mondiale moins soutenu qu'en 2003 et par l'appréciation de l'euro. Il a estimé qu'une appréciation de l'euro de 10 % réduisait la croissance du PIB de la zone euro d'environ 0,5 point. Il a cependant précisé que cet effet pouvait être compensé par une diminution de 0,5 point des taux d'intérêt à court terme, de sorte que le problème n'était, selon lui, pas tant celui de la force de la monnaie que celui des conditions monétaires. Il a souligné que depuis 1990, l'évolution du taux de change des monnaies européennes, puis de l'euro, n'avait jamais correspondu aux exigences de la conjoncture économique, contrairement à ce qui avait été le cas pour les Etats-Unis. Il a jugé que cette situation venait du fait que, si le Conseil des ministres de l'Union européenne avait juridiquement la possibilité de décider d'une politique de change, il n'avait jamais usé de cette faculté. Il a en outre considéré que si les réformes structurelles, comme celles des retraites ou de l'assurance-maladie, étaient bénéfiques sur le long terme à la croissance, elles lui étaient néfastes à court terme.

M. Jean-Paul Fitoussi a souligné les aléas des perspectives de croissance de l'économie française pour l'année 2004. Il a indiqué que, si les prévisions actuelles reposaient en grande partie sur celles de l'Institut national de la statistique et des études économiques pour les premier et deuxième trimestres de l'année 2004, d'autres éléments, comme les enquêtes mensuelles de la Banque de France, le taux d'autofinancement des entreprises, la confiance des ménages ou la stagnation de la productivité, incitaient à la prudence. Il a jugé que l'initiative européenne pour la croissance, prévoyant sur la période 2004-2010 d'importants investissements dans les transports terrestres, les réseaux de transport d'énergie et la recherche et développement, pourrait être bénéfique à la croissance de long terme de la zone euro. Il a néanmoins indiqué que ces investissements ne correspondraient, chaque année, qu'à 0,14 % du PIB de la zone euro.

M. Jean Arthuis, président, a souligné la divergence d'analyse de MM. Marc Touati et Jean-Paul Fitoussi quant à la durabilité du déficit budgétaire des Etats-Unis.

En réponse, M. Marc Touati a précisé qu'il ne prévoyait pas la résorption à moyen terme de ce déficit, qui selon lui serait de 2,5 % du PIB en 2007, mais que la forte croissance du PIB des Etats-Unis favorisait sa diminution.

Il a, en outre, considéré, contrairement à M. Jean-Paul Fitoussi, que les réformes structurelles pouvaient être à court terme bénéfiques à la croissance, car le fait de différer les réformes a été facteur d'attentisme.

En réponse, M. Jean-Paul Fitoussi a indiqué ne pas voir comment l'obligation des ménages de payer davantage pour les retraites ou l'assurance-maladie pouvait être à court terme bénéfique à la croissance.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a mis en garde contre certaines interprétations qui pourraient être faites des exposés des intervenants. D'une part, il a souligné que la politique économique américaine, combinant un interventionnisme politique extérieur et des politiques monétaires et budgétaires accommodantes, n'était pas transposable à la France. D'autre part, il a exprimé son désaccord sur l'impact économique négatif des réformes et le choix de ne les conduire qu'à la condition d'obtenir préalablement un consensus.

Il a souhaité connaître les modalités d'une diffusion de la croissance américaine à la zone euro. Il s'est interrogé sur la nécessité d'une gouvernance européenne, dans la mesure où la politique européenne relevait désormais de la Banque centrale européenne (BCE) alors que la politique de change demeurait de la compétence des Etats. Il a demandé comment ils avaient pris en compte la volatilité des marchés financiers pour établir leurs prévisions économiques, ainsi que leur analyse macro-économique relative aux zones offshore.

M. Jean-Paul Fitoussi a observé que les difficultés en partie analogues des Etats-Unis et de l'Europe n'induisaient pas des réactions de même nature. En particulier, l'Europe avait choisi de diminuer les niveaux des dépenses d'investissement, pourtant les plus utiles. Il a noté que les réformes structurelles étaient indispensables mais que leur impact économique à court terme attestait de la nécessité de les conduire dans le contexte d'une politique de croissance, afin que leur acceptabilité sociale soit plus élevée.

Il a déploré que la croissance économique en Europe soit dépendante de celle enregistrée aux Etats-Unis, en observant que cette situation témoignait de l'éclatement du pouvoir de décision économique en Europe entre le président de la BCE, dont la politique déterminait les niveaux d'activité en l'absence de responsabilité devant les instances politiques, le commissaire européen en charge de la concurrence et les Etats exerçant un rôle de surveillance budgétaire. Il a ajouté que le pacte de stabilité et de croissance prévoyait seulement une possibilité de sanctions si le déficit budgétaire d'un Etat dépassait le seuil des 3 %. Il a enfin indiqué qu'il lui semblait nécessaire de mener une étude de fond sur les zones offshore.

M. Marc Touati a relevé que les réformes économiques avaient donné lieu à un consensus politique en Allemagne, rendu impossible en France par la portée des idées anti-mondialisation. La situation française attestait, selon lui, d'un besoin de formation des citoyens aux questions économiques. Il a mis en avant l'intérêt d'un audit des missions de l'Etat, parallèlement à des réformes structurelles qui permettraient une diminution de l'impôt afin que les entreprises restent localisées en France, et estimé qu'un référendum pourrait être organisé sur le sujet.

Il a regretté que les missions de la BCE se soient concentrées sur l'objectif de maîtrise de l'évolution des prix, en occultant la recherche d'une croissance saine et durable. Il a par ailleurs observé que toutes les tentatives historiques d'union monétaire avaient échoué si elles n'avaient pas été réalisées dans le cadre d'une union politique. Il s'est félicité de la mise en place de dispositifs d'épargne retraite en France afin de répondre aux besoins de financement à long terme de l'économie, tout en déplorant la trop grande prudence des établissements bancaires dans leurs choix d'investissement.

M. Paul Loridant a estimé que la modification du statut de la BCE posait la question du traité de Maastricht et il s'est déclaré partisan de confier aux banques centrales la double mission de veiller au respect d'un certain taux d'inflation et d'atteindre un objectif de change. Il a noté que les prévisions des experts confortaient ses propres analyses quant à la nécessité de changer le statut de la BCE, tout en mettant en exergue le handicap que constituait selon lui une politique d'euro fort. Il a insisté sur la nécessité de préciser le contenu de l'initiative européenne de croissance face aux risques de délocalisation des entreprises.

M. Jacques Oudin a déclaré partager les analyses relatives au double objectif de maîtrise des prix et d'élévation du taux de croissance. Il a jugé nécessaire la conduite de réformes structurelles pour diminuer les charges de fonctionnement et redonner des marges d'action aux pouvoirs publics en réduisant durablement les niveaux des déficits publics. Il s'est enfin félicité de la concrétisation des propositions qu'il avait formulées concernant une initiative européenne de croissance, en relevant qu'il fallait distinguer trois types d'investissements : l'investissement privé des entreprises, les investissements industriels en Europe occidentale tendant à diminuer au profit du reste du monde, comme le prouvaient les déclarations récentes de M. Louis Schweitzer, président-directeur-général de Renault, sur la répartition par zones géographiques des prévisions d'investissement en 2004 du constructeur automobile  ; l'investissement public, pour lequel les collectivités locales disposaient de marges de manoeuvre plus importantes ; enfin, l'investissement des ménages, une relance de leur consommation étant corrélée à la diminution de leur taux d'épargne.

M. René Trégouët a observé que l'Europe traversait sa première crise monétaire depuis la mise en place de l'euro et s'est interrogé sur les moyens de faire face aux conséquences de l'appréciation de la monnaie unique européenne.

M. Roland du Luart a salué le pragmatisme de la politique économique américaine, en estimant qu'un gouvernement devait conduire des réformes courageuses dans les six mois suivant sa nomination. Il a souhaité que soit conduite une politique de diminution des taux d'intérêt alors que le niveau d'inflation hors tabac apparaissait pleinement maîtrisé.

M. Maurice Blin a insisté sur l'intérêt d'une concertation dans la perspective d'une union européenne élargie, en rappelant l'adage selon lequel « quand il n'y a plus de foin au râtelier, les chevaux se battent ».

M. Eric Doligé a regretté que les secteurs retenus pour conduire une initiative européenne de croissance ne permettent pas d'envisager des gains de croissance à court terme. Il a par ailleurs observé que la croissance ne franchissait plus l'océan Atlantique mais, désormais, l'océan Pacifique.

M. Jean Arthuis, président, a souligné que le défi que constituait le pacte de stabilité et de croissance avait été relevé, en évitant que certains Etats membres ne recourent à une politique budgétaire accommodante. L'actuelle crise européenne montrait, selon lui, la nécessité d'une volonté politique européenne. A cet égard, il a rappelé que, au nom du gouvernement français, il avait obtenu, lorsqu'il était ministre de l'économie et des finances, que le principe de sanctions en cas de dépassement du déficit budgétaire ne soit pas automatique, ce qui attestait du primat du politique.

Il a ajouté que toutes ces observations devaient s'inscrire dans le cadre d'une réflexion nécessaire sur la gouvernance européenne et les risques de délocalisation des activités économiques.

M. Jean-Paul Fitoussi a relevé que l'ensemble des interventions portaient, d'une part, sur les institutions européennes et, d'autre part, sur l'absence de pragmatisme dans la conduite des politiques économiques, les Etats-Unis apparaissant ainsi comme le « premier producteur de doctrine », mais à usage externe, notamment par les Européens. A cet égard, il a observé que la politique de la Réserve Fédérale ne s'avérait ni indépendante, ni déterminée par la poursuite d'un objectif unique.

Il a formulé trois propositions. Tout d'abord, il a souhaité que le pouvoir politique - le Parlement européen ou le Conseil européen - définisse un objectif d'inflation pour la BCE. Il a, ensuite, préconisé que des dépenses d'investissement soient exclues de l'objectif de solde budgétaire, conformément au principe de la « règle d'or » des finances publiques. Il a enfin proposé que le Conseil européen définisse la politique industrielle et de concurrence, en vue d'établir un gouvernement économique de l'Union européenne.

S'agissant des dissensions entre Etats membres, il a pointé les différences structurelles entre les grands et les petits Etats européens.

M. Marc Touati a mis en évidence l'intérêt d'objectifs évolutifs de politique économique, en observant que l'euro avait évité des dévaluations compétitives. Il a formulé le souhait que la crise politique de l'euro ait un caractère « rédempteur ».

M. Jean Arthuis, président, a noté que la monnaie unique avait diminué le risque d'exposition de l'économie française aux fluctuations monétaires de ses partenaires. Il a souligné qu'il convenait en matière économique de contribuer à un travail pédagogique à destination de l'opinion publique.

Loi de finances 2004 et loi de finances rectificative pour 2003 - Décisions du Conseil constitutionnel

M. Jean Arthuis, président, a ensuite présenté le contenu des décisions rendues par le Conseil constitutionnel sur la loi de finances pour 2004 et la loi de finances rectificative pour 2003.

Il a d'abord relevé que le Conseil constitutionnel n'avait pas remis en cause la sincérité de la loi de finances pour 2004. Concernant la loi de finances rectificative pour 2003, il a observé que le Conseil constitutionnel avait regretté que le gouvernement n'ait pas déposé un projet de loi de finances rectificative en temps utile mais qu'il avait estimé que la loi ne comportait « ni d'erreur manifeste d'appréciation ni de volonté de fausser les grandes lignes d'équilibre ». Cette décision attestait des efforts de sincérité du gouvernement et soulignait la vigilance du Conseil constitutionnel dans la mise en oeuvre du principe de sincérité inscrit dans la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Par ailleurs, il s'est félicité que l'article 36 de la loi de finances rectificative pour 2003, prévoyant une diminution d'impôt de 10 euros pour les contribuables procédant à la télédéclaration de leurs revenus, ait été reconnu conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel.

M. Jean Arthuis, président, a développé les raisons de la censure par le Conseil constitutionnel de deux dispositions introduites à l'initiative de la commission des finances et tendant à préciser le contenu de deux annexes à la loi de finances prévues par la LOLF : les paragraphes I et III de l'article 81 de la loi de finances pour 2004, relatifs à la nouvelle présentation des dépenses fiscales, et le paragraphe B du III de l'article 80 de la loi de finances rectificative pour 2003 disposant que, à compter de 2006, une annexe récapitulant certaines informations relatives à chaque garantie de l'Etat serait jointe au rapport de présentation du « compte général de l'Etat ».

Il a souligné le caractère « inattendu » de ces décisions, dans la mesure où la LOLF avait étendu l'information et le contrôle du Parlement sur les finances publiques et que le Conseil constitutionnel avait invoqué ladite LOLF pour censurer les dispositions précitées des lois de finances visant le même objectif. Il a précisé que la censure portait sur des motifs de forme et non de fond : des mesures identiques aux articles censurés qui n'auraient pas mentionné les dispositions organiques auraient donc, selon lui, « passé le cap » du Conseil constitutionnel.

S'agissant de la décentralisation, il a évoqué la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel quant à la compensation financière prévue en contrepartie du transfert aux départements de la compétence relative à l'allocation du revenu minimum d'insertion (RMI), figurant à l'article 59 de la loi de finances pour 2004. Si le Conseil constitutionnel avait estimé qu'aucune exigence constitutionnelle n'imposait une compensation intégrale et permanente des charges transférées, mais seulement « l'équivalence entre les charges constatées à la date du transfert et les ressources transférées », il avait émis une réserve concernant l'évolution de la dotation initiale versée par l'Etat aux collectivités ; il avait ainsi précisé que « si les recettes départementales provenant de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers venaient à diminuer, il appartiendrait à l'Etat de maintenir un niveau de ressources équivalent à celui qu'il consacrait à l'exercice de cette compétence avant son transfert ».

M. Jean Arthuis, président, a relevé que cette jurisprudence nouvelle s'avérait protectrice pour les collectivités territoriales en garantissant un minimum de ressources, mais qu'un gouvernement serait faiblement contraint à la mettre en oeuvre. Il a enfin noté que le Conseil constitutionnel avait demandé que les règles relatives aux ressources propres des collectivités territoriales soient « fixées avec précision » à l'occasion de la prochaine discussion du projet de loi organique sur l'autonomie financière des collectivités territoriales, s'agissant notamment de la définition de la « part déterminante » des ressources propres des collectivités dans l'ensemble de leurs recettes.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est interrogé sur l'opportunité d'envisager le dépôt d'une proposition de loi organique visant à rétablir les dispositions censurées concernant l'information du Parlement. Il a estimé que les observations relatives à la compensation financière des compétences transférées aux collectivités locales devaient être saluées, mais qu'elles nécessiteraient une formalisation en vue de la discussion à venir du projet de loi organique sur l'autonomie financière des collectivités territoriales.

Fiscalité - Taxe professionnelle - Echange de vues

Puis un large débat s'est alors engagé sur l'opportunité de la constitution d'un groupe de travail interne à la commission sur la taxe professionnelle et son devenir.

M. Jean Arthuis, président,
après avoir rappelé le contenu de l'amendement déposé par M. Roland du Luart, lors de la discussion budgétaire, visant à suspendre le versement de la taxe professionnelle pour les investissements réalisés durant les deux prochaines années, a relevé que le chef de l'Etat, M. Jacques Chirac, avait proposé une mesure d'inspiration similaire pour les investissements réalisés sur le territoire national au cours des dix-huit prochains mois. Il a noté que l'impact de cette mesure interviendrait en 2006 pour les collectivités locales.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité de l'impact favorable de cette mesure sur l'attractivité du territoire national, en se référant notamment au débat intervenu lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2004 sur les relations entre les donneurs d'ordre et les sous-traitants à propos de la taxe professionnelle. Il a souligné que cette mesure s'inscrivait dans le cadre de « l'acte II » de la décentralisation et annonçait ainsi la « disparition » de la taxe professionnelle.

Il a indiqué qu'il entendait soumettre aux membres du Bureau de la commission des finances, qui se réunirait mercredi 21 janvier, le principe de la constitution d'un groupe de travail qui procèderait notamment à une étude comparative avec les autres pays européens, et étudierait le maintien d'un lien entre l'imposition des entreprises et leur localisation. Il a observé qu'il convenait d'envisager une nouvelle ressource, dont les taux d'imposition seraient modulables, mais ne consistant pas en un rétablissement d'une taxe professionnelle assise sur la valeur ajoutée.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a mis en avant le fait que la crédibilité de la politique de décentralisation requérait un besoin de visibilité et de pérennité financière pour les collectivités locales et leurs établissements publics. Il s'est interrogé sur le maintien d'un lien entre les implantations des entreprises et les recettes des collectivités territoriales, dans la perspective d'une réforme plus large du paysage fiscal.

M. Jacques Oudin a affirmé sa conviction que chaque citoyen et chaque entreprise devaient être imposables afin de contribuer ainsi au financement des charges communes, mais qu'il fallait éviter que la nouvelle contribution ne soit assise sur les résultats des entreprises.

Faisant part de son intérêt pour les travaux de ce groupe de travail, M. René Trégouët a ajouté qu'il convenait de ne pas adopter de dispositif engendrant des recettes incertaines et qu'il convenait, selon lui, de continuer à « récompenser le dynamisme des élus locaux » en les incitant à l'implantation de nouvelles entreprises sur le territoire de leur collectivité.

M. Jean Arthuis, président, a exprimé le souhait que puissent être étudiées les conséquences des différentes hypothèses de réforme en termes de localisation des entreprises.

M. Eric Doligé a estimé qu'il fallait « mobiliser l'économie sans démobiliser les élus », en rappelant que la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle avait pu inciter les élus à favoriser l'implantation d'entreprises dont l'assiette d'imposition comportait une part plus importante d'éléments de patrimoine foncier.

Nomination d'un rapporteur



La commission a ensuite nommé M. Michel Mercier rapporteur sur la proposition de loi n° 111 (2003-2004), présentée par M. Jean-Marc Pastor et plusieurs de ses collègues, relative au financement du service d'élimination des déchets ménagers.