Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

LOLF - Mission sécurité - Audition de MM. Michel Gaudin, directeur général de la police nationale et Guy Parayre, directeur général de la gendarmerie nationale

La commission a procédé à l'audition de MM. Michel Gaudin, directeur général de la police nationale et Guy Parayre, directeur général de la gendarmerie nationale, responsables de programmes pour la mission interministérielle sécurité.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé le cadre dans lequel se situait cette audition qui, en conséquence, avait été ouverte aux membres des commissions concernées.

Après avoir remercié M. Jean Arthuis, président, pour son invitation, M. Michel Gaudin a souligné que l'objectif principal assigné à la police nationale avait été défini par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure n° 2002-1094 du 29 août 2002 (LOPSI), à savoir une baisse de la délinquance, significative et durable. Il a indiqué que cette baisse était effective depuis trois ans avec une diminution des chiffres de la délinquance de 7,25 % en trois ans s'agissant de la police nationale. Il a insisté sur la nécessité de tenir compte de l'évolution des faits constatés afin d'analyser la baisse de la délinquance. Puis il a estimé que l'indicateur de synthèse le plus complet s'agissant de l'efficacité de l'action de la police nationale était le taux d'élucidation des affaires. A cet égard, il a fait remarquer que ce taux s'était élevé à 29,14 % en 2004, soit un taux historiquement élevé pour la police nationale.

S'agissant de la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), M. Michel Gaudin a rappelé que la maquette budgétaire actuelle était issue des conclusions d'un groupe de travail réunissant l'inspection générale de l'administration, l'inspection générale des finances ainsi que le contrôle général des armées. Il a indiqué que la police nationale faisait l'objet d'un programme composé de six actions au sein de la mission interministérielle « sécurité », dont cinq actions opérationnelles et une action de soutien. Il a rappelé que l'analyse effectuée par le Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP) avait été favorable à cette proposition, tandis que la Cour des comptes avait émis une critique sur cette proposition, en raison de l'absence d'indicateur socio-économique de synthèse pour l'ensemble des actions de la police nationale.

Puis M. Michel Gaudin a indiqué que les objectifs de ce programme avaient été validés pour chaque action et que des indicateurs avaient été définis pour chaque objectif. Enfin, il a rappelé que l'ensemble du programme « police nationale » de la mission sécurité représentait 7,9 milliards d'euros, y compris les charges de pensions des personnels.

Ensuite, M. Guy Parayre a noté que l'audition conjointe du directeur général de la police nationale et du directeur général de la gendarmerie nationale par la commission des finances au sujet de la LOLF était un sujet de satisfaction, d'une part parce qu'elle marquait l'intérêt de la commission pour la sécurité intérieure, d'autre part parce qu'elle constituait, pour lui, une occasion de s'exprimer sur un sujet auquel la gendarmerie avait consacré des efforts importants et qui procédait de la recherche de la performance.

Il a rappelé que la police et la gendarmerie nationales poursuivaient un même but, la sécurité, mais qu'il s'agissait de deux institutions différentes, dans la mesure où la police nationale était adaptée aux grandes concentrations urbaines, tandis que la gendarmerie était adaptée à l'espace, à la surveillance des voies de communication et aux situations de crise.

Il a souhaité développer deux idées.

Il a d'abord noté que la gendarmerie nationale avait intégré la culture de performance, en se fixant deux objectifs principaux, d'une part la baisse de la délinquance avec un bilan pour l'année 2004 satisfaisant, d'autre part le renforcement de la sécurité routière. En outre, il a fait savoir que l'action conduite à l'étranger par la gendarmerie nationale portait également ses fruits.

Puis M. Guy Parayre a souhaité évoquer la question de l'application de la LOLF en gendarmerie nationale. A cet égard, il a précisé que les gains de productivité pourraient résulter, d'une part, de la poursuite de l'effort consenti dans le cadre de l'application de la loi précitée d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, d'autre part, d'améliorations structurelles, enfin d'un pilotage plus adapté à la menace qu'affrontent les citoyens français.

Il a indiqué que, sur le plan structurel, la gendarmerie nationale allait supprimer un échelon hiérarchique entre la direction générale et les groupements, le 1er juillet 2005, en créant vingt-deux régions de gendarmerie dotées d'une compétence complète, aussi bien sur le plan opérationnel que logistique.

S'agissant du dispositif de pilotage propre à la gendarmerie nationale, il a précisé que ce dernier était structuré dans l'esprit de la LOLF et qu'il comprenait à la fois des outils fonctionnels, une chaîne de contrôle de gestion complète et les systèmes d'information permettant de mesurer l'activité opérationnelle de la gendarmerie, notamment le logiciel BB 2000, permettant aux unités d'enregistrer en temps réel leur activité et leurs procédures, et le logiciel national Infocentre, permettant de centraliser les données et de les mettre à la disposition des décideurs sur leurs postes de travail. En outre, il a précisé que, depuis le 11 février 2004, la mise en place d'un outil de comptabilité budgétaire, de comptabilité générale et de comptabilité analytique, appelé système d'information Gesfi, permettait à la gendarmerie nationale d'affecter les coûts à une mesure de l'activité.

A propos de la mise en oeuvre de la LOLF, M. Guy Parayre a également précisé que la gendarmerie nationale travaillait à faire converger son projet annuel de performance avec celui de la police nationale. A cet égard, il a souligné que les deux programmes, celui de la police nationale et celui de la gendarmerie nationale, étaient globalement convergents, notamment s'agissant de l'ensemble des actions correspondant à des missions de sécurité intérieure. Il a précisé que la gendarmerie nationale avait arrêté une stratégie définie à travers cinq actions assorties d'objectifs de performance et suivies grâce à des indicateurs. En outre, il a rappelé que la gendarmerie nationale avait anticipé la mise en place de la LOLF, dès 2003, en décidant d'un plan d'expérimentation de la globalisation des crédits. A cet égard, il a précisé qu'après l'école de Montluçon en 2004, une nouvelle expérimentation serait menée en 2005 sur une formation opérationnelle, la légion de gendarmerie départementale de Franche-Comté.

Puis M. Guy Parayre a évoqué les différences subsistant entre la grille de la police nationale et celle de la gendarmerie nationale. Il a justifié ces différences par le fait que certaines des missions relevant respectivement des deux institutions différaient par nature. Ainsi il a souligné que la gendarmerie accomplissait des missions de défense et partageait avec les armées une structure centrale d'administration et de gestion. Il a également rappelé que l'organisation de la gendarmerie nationale n'était pas la même que celle de la police nationale. Il a fait valoir que la gendarmerie était organisée pour contrôler l'espace avec un modèle polyvalent et modulable selon les différentes zones d'implantation grâce à son statut militaire, tandis que la police était plutôt adaptée aux zones de forte urbanisation. Il a indiqué que cette différence de statut expliquait une grande partie des différences entre les objectifs et les indicateurs des deux programmes.

M. Guy Parayre a également précisé que, pour répondre au souci de convergence d'objectifs entre les deux programmes, il était nécessaire d'effectuer des calculs d'une relative complexité, hors outils informatiques, pour ventiler, a posteriori, l'activité des gendarmes dans la grille des actions actuelles. A cet égard, il s'est interrogé sur la compatibilité de cette démarche avec le développement des systèmes d'information interministériels.

Puis un large débat s'est instauré.

M. Jean Arthuis, président, a d'abord souhaité interroger le directeur général de la gendarmerie nationale sur le caractère « artificiel » de certains calculs liés à la polyvalence de l'activité des gendarmes et sur la difficulté liée à la reconstitution en « équivalents temps plein » des heures travaillées par les gendarmes.

En réponse, M. Guy Parayre a précisé que certaines des actions du programme « gendarmerie nationale » ne permettaient pas de refléter la réalité de l'activité de cette institution. Il a toutefois souligné qu'actuellement les systèmes d'information disponibles permettaient de recomposer l'activité du personnel de la gendarmerie. S'agissant de la nécessaire convergence avec l'activité de la police nationale, il a fait valoir que les services de la gendarmerie nationale étaient polyvalents et qu'il était donc difficile d'isoler une action par service.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a souhaité, dans un premier temps, souligner l'utilité d'une audition conjointe des responsables de deux programmes de la mission interministérielle « sécurité ». Il a également indiqué que, si ces responsables avaient fait part des éventuelles difficultés liées à l'application de la LOLF, ces difficultés seraient partagées par la représentation nationale pour qui la LOLF impliquait, également, une transformation radicale, propos auxquels M. Jean Arthuis, président, a entièrement adhéré.

Après avoir évoqué les difficultés d'interprétation liées à certains indicateurs du programme « police nationale » en citant comme exemple l'indicateur intitulé « corrélation entre le taux de présence sur la voie publique et la délinquance constatée par tranche horaire », M. Yves Fréville, rapporteur spécial, a souhaité revenir sur la remarque de M. Guy Parayre selon laquelle il était difficile de ventiler le budget de la gendarmerie nationale suivant les actions du programme budgétaire en raison de la polyvalence des agents de la gendarmerie.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité connaître la raison de la différence sémantique existant entre le libellé de l'action n° 5 du programme police nationale « police judiciaire et concours à la justice » et celui de l'action n° 5 du programme gendarmerie nationale « contribution à la justice ».

En réponse, M. Michel Gaudin a précisé que chaque direction générale avait préparé son programme « de son côté ». S'agissant de la police nationale, il a rappelé que la police judiciaire ne dépendait pas de la chancellerie et qu'elle avait vocation à être une police d'investigation et d'initiative. En outre, il a précisé que la montée en puissance de la police de proximité avait porté à des excès qui avaient nui au développement de la police d'investigation.

S'agissant de la question de l'évaluation de l'activité des personnels de la police nationale, M. Michel Gaudin a précisé que les critères choisis avaient été des critères immédiatement applicables et que, dans un premier temps, le principe de la non-fongibilité entre les emplois et les crédits de fonctionnement au sein du programme « police nationale » avait été retenu.

S'agissant de la réorganisation du temps de travail au sein de la police nationale, il a souhaité que le débat sur les effectifs dans la police puisse un jour être clos. Il a affirmé que la question qui devait se poser était celle de l'utilisation réelle du temps travaillé. A cet égard, il a indiqué que la mise en place de la « main courante » informatisée permettrait de savoir avec précision à quelle tâche étaient affectés les fonctionnaires de la police nationale.

M. Jean Arthuis, président, est alors intervenu pour indiquer que des progrès en termes de connaissance du temps de travail des fonctionnaires de la police nationale étaient indispensables et qu'il était donc nécessaire de construire des indicateurs fiables en la matière pour parvenir à plus de transparence.

M. Michel Gaudin a précisé qu'il tenait à la disposition de la commission des finances l'ensemble des régimes horaires de la police nationale. Il a également souligné que, désormais, 93 % des fonctionnaires de la sécurité publique remplissaient la « main courante » informatisée. En outre, il a plaidé pour une nécessaire adaptation du temps de travail des fonctionnaires de la police nationale aux horaires parfois décalés de la délinquance et de la criminalité.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a constaté qu'il n'existait pas de définition commune ou comparable des objectifs et indicateurs entre ces deux programmes. Il a souhaité savoir quelles en étaient les raisons et si certains rapprochements étaient envisageables.

S'agissant de la définition des objectifs et des indicateurs des deux programmes, M. Guy Parayre a indiqué que 60 % des objectifs étaient communs aux deux programmes, et que si seulement 30 % des indicateurs convergeaient, le travail d'harmonisation se poursuivait.

S'agissant du taux de dépistages positifs d'alcoolémie, M. François Trucy, rapporteur spécial, a fait remarquer que l'avant-projet annuel de performance (PAP) fixait comme cible, pour la police, une progression et, pour la gendarmerie, une baisse. Il a souhaité connaître la raison de cette divergence.

M. Guy Parayre a expliqué que la différence existant entre les indicateurs relatifs aux taux de dépistages d'alcoolémie résultait d'une divergence de conception, puisque l'augmentation de ce taux pour la police correspondait à une intensification de leur travail, alors qu'une baisse de ce taux signifiait pour la gendarmerie l'atteinte de l'objectif, à savoir une diminution des personnes prenant le volant après avoir consommé de l'alcool.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a également souhaité connaître les raisons qui avaient guidé le choix de maintenir les crédits relatifs au logement des gendarmes au sein de la mission défense, et non dans la mission sécurité, comme c'était le cas pour la police. En réponse, M. Guy Parayre a expliqué que cette situation résultait de la décision du ministère de la défense de disposer, pour des raisons d'économie, d'un système informatique global, ce qui impliquait d'intégrer l'immobilier.

Puis M. François Trucy, rapporteur spécial, a souhaité savoir si la LOLF allait entraîner des réorganisations administratives au sein des directions générales respectives de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Il a également interrogé les deux directeurs généraux sur leur conception de la coordination entre leur direction générale respective, ainsi que sur la possibilité de nouveaux progrès dans la coordination, sur le terrain, entre police et gendarmerie.

S'agissant de la coordination entre la police nationale et la gendarmerie nationale, M. Guy Parayre a décrit les différents niveaux existants, notamment des réunions quotidiennes entre le directeur général de la police nationale, le préfet de police et lui-même, ou des réunions thématiques semestrielles, voire trimestrielles, entre ses services, la direction générale de la police nationale, la direction générale des douanes et la direction des affaires criminelles. Il a également fait référence à la coordination mise en place au niveau international. Il a, enfin, indiqué, qu'au niveau territorial, la coordination était assurée par les préfets, aux termes de la loi précitée d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI).

M. Michel Gaudin a souhaité souligner que la coordination entre la gendarmerie nationale et la police nationale était quotidienne, comme pouvait l'illustrer le travail des offices, tels que l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, placé sous la direction de la gendarmerie nationale et auquel pouvaient être associés les services actifs de la police nationale, ou l'Office central chargé des personnes recherchées ou en fuite, placé sous la direction de la police nationale et auquel pouvaient être intégrés des représentants de la gendarmerie nationale. Il a également cité l'exemple du conseil de la logistique, récemment réactivé, qui permettait à la police nationale et à la gendarmerie nationale de programmer, ensemble, certains achats de matériels à des prix avantageux. Il a enfin évoqué le rapprochement des systèmes de communication RUBIS et ACROPOL, ainsi que le partage police/gendarmerie, prévu par la LOPSI, qui avait concerné 65 départements, 1,7 million d'habitants et 40 fermetures de commissariats.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a ensuite évoqué la question du lien entre les objectifs des lois de programmation et ceux prévus dans l'avant-projet annuel de performance.

En réponse, M. Guy Parayre a déclaré que la loi de programmation fixait les grandes orientations à long terme, notamment quant aux moyens nécessaires, alors que l'avant-projet annuel de performance définissait des objectifs plus ponctuels.

M. François Trucy, rapporteur spécial, a souhaité savoir pourquoi les frais de justice ne faisaient pas l'objet d'une évaluation dans la mission sécurité, alors même que leur évolution préoccupante (+ 40 % en deux ans) ne concernait pas que la justice.

M. Guy Parayre a confirmé que les frais de justice n'avaient pas de ligne budgétaire particulière, avant d'expliquer que leur augmentation résultait de l'importance croissante de la preuve scientifique et des moyens financiers nécessaires à l'établissement de cette preuve. Cependant, il a souligné que ces frais de justice étaient engagés à la demande des procureurs et des magistrats du siège, et qu'à ce titre, il préfèrerait que le principe selon lequel le « donneur d'ordre paie » soit appliqué.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur la possibilité de facturer ces services de collecte de preuve, tout comme, par exemple, le transfert des prévenus, au ministère de la justice, afin de mieux appréhender le coût de la justice.

S'agissant de la répartition des frais de justice, M. Michel Gaudin a estimé que la police nationale ne pouvait pas être dans une situation de dépendance. Il a ainsi donné l'exemple de la création et de la mise en oeuvre du fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), qui a été financé sur les crédits de la police nationale à hauteur de 8 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2004, puis à hauteur de 4 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2004 et qui devrait encore l'être à hauteur de 7 millions d'euros cette année. Il a insisté sur le passage du régime de l'aveu au régime de la preuve et a fait état de la réactivation récente du fichier automatisé des empreintes digitales (FAED), qui comptait, à la fin de l'année 2004, plus de 2 millions de traces. Il a précisé, enfin, que l'augmentation des frais de justice était notamment liée au changement de nature des crédits afférents aux interceptions téléphoniques, puisqu'il s'agissait dorénavant de crédits limitatifs, et non plus évaluatifs, et qu'il était nécessaire qu'une réflexion soit donc engagée sur la répartition de cette nouvelle charge financière.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial, s'est interrogé sur la question de la frontière entre la mission « sécurité » et la mission « défense », s'agissant notamment du financement des opérations extérieures, les OPEX.

M. Guy Parayre a répondu que, en l'état, les crédits relatifs aux opérations extérieures avaient vocation à figurer dans le programme 2 « préparation et emploi des forces » de la mission « défense ». Il a indiqué qu'on ne pouvait préjuger des modalités de prise en compte financière des OPEX dans le cadre de la LOLF. Il a ensuite précisé qu'un certain nombre de militaires de la gendarmerie nationale participaient à des opérations extérieures, comme, par exemple, les trois escadrons actuellement stationnés en Côte d'Ivoire.

M. Jean Arthuis, président, s'est inquiété de la manière dont étaient attribués des crédits relatifs à ces interventions. En réponse, M. Guy Parayre a indiqué que des réflexions à ce sujet étaient conduites au niveau ministériel.

M. Jean Arthuis, président, ainsi que M. Yves Fréville, rapporteur spécial, ont exprimé leur attachement à ce que l'ensemble des crédits relatifs aux OPEX relève de la mission « défense ».

M. Michel Moreigne a souhaité savoir dans quelle mesure le secrétariat général de la défense nationale (SGDN) assurait, encore, une coordination au niveau de la sécurité et du renseignement.

M. Guy Parayre a constaté que la coordination opérée entre la police nationale et la gendarmerie nationale ne préjugeait pas de la coordination effectuée par le SGDN, et qu'il n'y avait pas de contradiction entre l'action de celui-ci et l'action des directions générales de la police et de la gendarmerie.

M. Michel Gaudin a précisé que l'action du SGDN, en matière de renseignement, n'était nullement superfétatoire, mais qu'il était nécessaire que les services de la police nationale, notamment par le biais de la direction centrale des renseignements généraux et de la direction de la surveillance du territoire, soient compétents en matière de renseignement. Après avoir signalé la création du conseil du renseignement intérieur par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, il a observé que le SGDN réalisait également, de son côté, un travail d'information, notamment en tant que secrétariat permanent du comité interministériel du renseignement (CIR), destiné à informer le Premier ministre et le gouvernement.

Il a expliqué, ensuite, que le SGDN gardait notamment toute son utilité en tant que coordonnateur au niveau de la lutte anti-terroriste, et, notamment, par rapport au comité interministériel de lutte anti-terroriste (CILAT), récemment réactivé par le ministre de l'intérieur, et regroupant plusieurs services de renseignements relevant du ministère de l'intérieur et du ministère de la défense.

M. Guy Parayre a tenu à souligner que sa réponse relative à la coordination entre la police nationale et la gendarmerie nationale avait été faite dans le cadre de la présentation des missions, et qu'il n'avait pas abordé, à ce titre, la question de la coordination au niveau global. Il a ainsi relevé que le SGDN menait une action plus générale et qu'il était, en particulier, le lieu de convergence de la surveillance des menaces intérieures et extérieures.

S'agissant des systèmes de communication de la police nationale et de la gendarmerie nationale, respectivement dénommés ACROPOL et RUBIS, M. Jean Arthuis, président, a souligné le caractère onéreux de ces équipements et a souhaité savoir dans quelle mesure ces deux systèmes pouvaient être rapprochés.

M. Guy Parayre a fait remarquer que, si ces deux systèmes étaient incompatibles, il était toutefois possible d'aménager des passerelles entre eux, afin que la gendarmerie nationale puisse communiquer avec la police nationale. D'un point de vue opérationnel, il a estimé important qu'un dialogue soit possible et a indiqué que, dans le futur, il serait certainement mis en place un système commun à la police et à la gendarmerie, voire à d'autres services, tout en précisant que cela serait très coûteux.

M. Jean Arthuis, président, a souhaité savoir si ces systèmes étaient encore les « victimes » de régulation budgétaire. En réponse, M. Michel Gaudin a expliqué que la mise en oeuvre de partenariats public/privé avait permis le développement du dispositif ACROPOL, et que celui-ci serait bientôt finalisé.

En conclusion, M. Jean Arthuis, président, s'est déclaré attaché à la réussite des missions de la police nationale et de la gendarmerie nationale, missions caractéristiques de l'Etat régalien, et a souhaité que la transparence et la sincérité des documents budgétaires soient au service de ceux qui avaient la charge de ces missions. Il a enfin rappelé que la mise en oeuvre de la LOLF était une co-production entre les assemblées et les ministères.

Mercredi 16 février 2005

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Convention fiscales - Examen des rapports

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen des rapports de M. Adrien Gouteyron :

- sur le projet de loi n° 109 (2003-2004) autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République azerbaïdjanaise en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) ;

- sur le projet de loi n° 110 (2003-2004) autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République d'Albanie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) ;

- sur le projet de loi n° 234 rectifié bis (2003-2004) autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Croatie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) ;

- sur le projet de loi n° 259 (2003-2004) autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Québec en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) ;

- sur le projet de loi n° 260 (2003-2004) autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République Tchèque en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) ;

- sur le projet de loi n° 261 (2003-2004) autorisant l'approbation de la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale ;

- sur le projet de loi n° 84 (2004-2005) autorisant l'approbation de l'avenant à la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de son altesse sérénissime le prince de Monaco, signée à Paris le 18 mai 1963 et modifiée par l'avenant du 25 juin 1969 ;

- sur le projet de loi n° 156 (2003-2004) autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du royaume des Pays-Bas tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole).

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a indiqué au préalable que les huit projets de loi soumis à la commission avaient tous pour but, en application de l'article 53 de la Constitution, d'autoriser l'approbation de conventions fiscales signées par le gouvernement français. Il a noté que quatre de ces projets de loi proposaient d'autoriser l'approbation de conventions fiscales nouvelles, permettant ainsi de compléter un réseau de conventions bilatérales déjà dense. Il a précisé que ces accords, selon la formule consacrée, visaient à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et qu'il s'agissait de :

- l'accord signé avec la République d'Albanie le 24 décembre 2002, qui avait fait l'objet d'une approbation du Parlement albanais en mai 2003 ;

- l'accord signé avec la République d'Azerbaïdjan le 20 décembre 2001 et ratifié par le Parlement azerbaïdjanais le 19 février 2002 ;

- l'accord signé avec la République de Croatie le 19 juin 2003 ;

- et enfin, l'accord avec la République Tchèque, signé le 28 avril 2003, approuvé par le Parlement tchèque en mars 2004.

Il a observé que trois autres projets de loi proposaient, par ailleurs, l'approbation d'avenants, le premier à l'entente fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, le deuxième à la convention fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de son altesse sérénissime le prince de Monaco, signée à Paris le 18 mai 1963 et modifiée par l'avenant du 25 juin 1969, et le troisième enfin, très spécifique, rendu nécessaire par la fusion entre Air France et KLM, avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune.

Il a indiqué, enfin, qu'un projet de loi autorisait l'approbation d'une convention fiscale multilatérale, en l'occurrence la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, élaborée conjointement par le Conseil de l'Europe et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a présenté succinctement les conventions fiscales nouvelles faisant l'objet des quatre premiers projets de loi, ainsi que le projet de loi relatif à l'avenant à l'entente fiscale France-Québec, précisant que ces textes appelaient peu de commentaires sur un plan technique. Il a souligné que les conventions conclues avec l'Albanie, l'Azerbaïdjan, la Croatie et la République Tchèque s'inspiraient très largement du modèle de la convention OCDE et comportaient les aménagements habituellement conclus par la France, des précisions ayant été introduites concernant les revenus mobiliers, les plus-values de cession de parts, d'actions ou autres droits dans des sociétés à prépondérance immobilière, la non-discrimination afin que les conventions ne fassent pas obstacle à l'application de la législation fiscale en la matière. Il a fait remarquer, en outre, que les textes des conventions conclues avec l'Albanie et la Croatie étaient assez proches des conventions fiscales conclues par la France avec les autres pays de la région, tels que la Macédoine ou la Slovénie. Il a montré que si la convention avec l'Albanie venait combler un réel vide juridique, puisqu'aucune convention fiscale n'avait jamais été conclue avec ce pays, les autres venaient tirer les conséquences de la disparition de la Tchécoslovaquie, de l'URSS et de la Yougoslavie, l'Azerbaïdjan, la Croatie et la République Tchèque ayant marqué, en effet, leur préférence pour une nouvelle convention fiscale, en quelque sorte « au goût du jour », plutôt que pour le maintien des conventions établies par des Etats aujourd'hui disparus.

S'agissant plus particulièrement de la République Tchèque, M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a indiqué que les autorités tchèques avaient souhaité obtenir un rééquilibrage du texte de 1973, qui leur apparaissait exagérément favorable aux intérêts français. Il a noté, néanmoins, que, selon le ministère des affaires étrangères, certaines nouvelles stipulations étaient plus favorables aux investissements français que celles contenues dans le traité précédent, citant par exemple la suppression de la retenue à la source, prévue par l'article 10 en ce qui concernait les dividendes provenant de participations supérieures à 25 %, qui aurait pour effet de ne plus conduire la France à imputer sur l'impôt sur les sociétés l'impôt prélevé à ce titre par la République tchèque, comme tel était le cas auparavant dans le cadre de la convention franco-tchécoslovaque.

En ce qui concernait l'avenant signé, à Paris, le 3 septembre 2002, à l'entente fiscale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, datant du 1er septembre 1987, M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a fait remarquer, au préalable, la particularité de cet accord, qui était le seul accord fiscal conclu par la France avec une subdivision politique d'un Etat, la convention fiscale franco-canadienne tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 2 mai 1975, stipulant en effet, dans son article 29, que « la France et les provinces du Canada pourront conclure des ententes portant sur toute législation fiscale relevant de la compétence provinciale, pour autant que ces ententes ne soient pas contraires aux dispositions de la présente Convention ». La convention fiscale franco-canadienne ayant fait l'objet d'un avenant, en date du 30 novembre 1995, il a indiqué que l'avenant à l'entente fiscale entre la France et le Québec reprenait, dans un souci d'harmonisation, les modifications apportées à la convention franco-canadienne.

Il a noté que ces modifications étaient multiples, conformes pour l'essentiel au modèle de l'OCDE, la principale d'entre elles consistant à étendre les impôts couverts par l'entente fiscale, en ce qui concernait la France, à la taxe sur les salaires, à l'impôt de solidarité sur la fortune et, pour l'application de certains articles, aux droits de mutation à titre gratuit, ce dernier ajout permettant de prévoir un dispositif d'élimination de la double imposition des successions, suite à la suppression, par le Canada et ses provinces, des droits de mutation à titre gratuit et de leur remplacement par une taxation sur les plus-values latentes au jour du décès.

Présentant l'avenant à la convention fiscale du 18 mai 1963 avec Monaco, il a montré que le texte s'inscrivait dans un cadre plus large de modernisation des relations entre la France et la Principauté, un nouveau traité d'amitié et de coopération ayant été en effet signé le 24 octobre 2002 à la demande des autorités monégasques. En ce qui concernait le dispositif, il a précisé que l'article premier de l'avenant visait à corriger les évolutions anormales dans la déduction des rémunérations des dirigeants de l'assiette de l'impôt monégasque sur les bénéfices, l'article 2permettant d'assujettir à l'impôt de solidarité sur la fortune les résidents français installés à Monaco depuis 1989. Il a fait observer que cette imposition s'appliquait depuis le 1er janvier 2002 et concernait environ deux cents contribuables, soit une base taxable de plus de 800 millions d'euros. Il a donc considéré que, s'agissant des personnes physiques, l'avenant poursuivait la logique initiale, visant à assimiler les citoyens français résidant à Monaco à des contribuables français classiques, ceci expliquant peut-être la décroissance du nombre de Français résidant à Monaco, revenus de 15.222 à 9.454 immatriculés de 1984 à 2002.

Il a ajouté que l'avenant était, par ailleurs, complété par un échange de lettres, qui contenait des dispositions, très attendues par la France, en matière de partage des recettes de taxe sur la valeur ajoutée. Il a expliqué que la convention fiscale du 18 mai 1963 prévoyait, en effet, un partage du produit total des perceptions opérées sur le territoire des deux Etats dans un sens peu favorable à la France, d'où la nécessité d'un rééquilibrage.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a indiqué en ce qui concernait l'avenant à la convention fiscale avec les Pays-Bas du 7 avril 2004 que celui-ci tendait à prendre en compte l'accord intervenu entre Air France et KLM, les négociations sur la fusion entre les deux compagnies aériennes nationales, afin de constituer le premier opérateur européen ayant, en effet, inclus un volet fiscal. Il a précisé que le Gouvernement néerlandais tenait à obtenir la garantie que les opérations de restructuration auxquelles donnerait lieu la constitution d'un groupe combiné ne remettraient pas en cause leur droit d'imposer les résultats actuels et futurs de KLM, même si cette société devait être absorbée, à terme, par Air France. Il a expliqué que la France avait accepté, dès lors, de modifier les règles conventionnelles en ce sens et que tel était précisément l'objet de l'avenant précité, qui ne modifiait pas la convention elle-même, mais insérait dans le protocole annexé une stipulation destinée à régler le cas particulier du rapprochement Air France - KLM. Il a montré que le paragraphe 1 de l'avenant posait ainsi le principe du droit exclusif des Pays-Bas d'imposer les revenus, gains en capital et fortune rattachables à l'activité de transport aérien de l'actuelle société KLM, quel que soit le lieu où se trouvait le siège de direction effective de celle-ci.

Enfin, en ce qui concernait la convention concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, ouverte à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe et des pays membres de l'OCDE, signée par la France le 17 septembre 2003, M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a signalé que ce nouvel instrument juridique et fiscal était utile du point de vue français pour trois raisons majeures. Il a noté premièrement que la convention compléterait le réseau de conventions fiscales bilatérales conclues par la France, permettant par exemple d'élargir l'échange de renseignements à d'autres impôts que ceux couverts par les conventions fiscales ou les directives européennes, impôts locaux, droits d'enregistrement, contributions indirectes, TVA et taxes diverses perçues au profit de l'Etat, et d'uniformiser la pratique des pays signataires en matière d'échange de renseignements. Il a fait valoir, deuxièmement, que cette convention organisait l'assistance au recouvrement, rarement visée par les conventions fiscales bilatérales, la convention prévoyant que l'Etat requis devait procéder au recouvrement de la créance fiscale de l'Etat requérant de la même manière que s'il recouvrait ses propres créances, permettant ainsi de lutter contre l'organisation par les contribuables de leur insolvabilité dans l'Etat qui avait établi les impositions. Il a montré, troisièmement, que la convention, en proposant un ensemble de règles en vue de la notification de documents à l'étranger, venait « mettre de l'ordre » dans une pratique administrative internationale aux frontières mal définies. Il a ajouté que onze pays, y compris la France, avaient à ce jour signé la convention qui constituait un complément utile aux conventions bilatérales.

A l'issue de cette présentation, M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a proposé de demander au Sénat d'adopter les huit projets de loi précités.

Un débat s'est alors engagé.

M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur pour la qualité de sa présentation et la précision de sa description des enjeux liés à la fusion entre Air France et KLM et ses conséquences sur la convention fiscale avec les Pays-Bas.

M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est félicité de l'existence d'un accord direct entre la France et le Québec. Il s'est interrogé, par ailleurs, sur la compatibilité avec le droit communautaire de l'avenant à la convention fiscale entre la France et les Pays-Bas concernant KLM, l'imposition des bénéfices devant, en principe, être établie dans le pays du siège de l'entreprise.

M. Jean Arthuis, président, a souligné que cet accord visait à répondre à une préoccupation politique du Gouvernement des Pays-Bas, mais que sa portée pratique était vraisemblablement plus limitée.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur, a confirmé cette analyse, donnant lecture de l'exposé des motifs du projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre la France et les Pays-Bas, indiquant qu'afin de tenir compte de la difficulté pratique à déterminer les bénéfices et gains en capital concernés, le texte renvoyait à une consultation ultérieure des parties pour la fixation des modalités de mise en oeuvre du principe de répartition du droit d'imposer prévu en cas de disparition ou de transfert de l'essentiel de l'activité de KLM.

A l'issue de cet échange, la commission a décidé de demander au Sénat d'adopter les huit projets de loi précités.

LOLF - Mission transports - Audition de MM. Patrice Parisé, directeur des routes, Rémy Heitz, directeur de la sécurité et de la circulation routière, Patrice Raulin, directeur des transports terrestres et de Mme Hélène Jacquot-Guimbal, conseillère technique au cabinet du ministre des transports

Au cours d'une deuxième séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de MM. Patrice Parisé, directeur des routes, Rémy Heitz, directeur de la sécurité et de la circulation routière, Patrice Raulin, directeur des transports terrestres, responsables de programmes pour la mission transports, et de Mme Hélène Jacquot-Guimbal, conseillère technique au cabinet du ministre des transports.

Après avoir salué la présence de M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques et du plan, et de M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis du budget des transports terrestres au nom de cette commission, M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord rappelé le contexte dans lequel intervenait cette audition des responsables de quatre programmes de la mission ministérielle relative aux transports. Il a précisé que M. Patrice Raulin était responsable de deux programmes :

- d'une part, le programme « transports terrestres et maritimes » qui représentait environ 3,9 milliards d'euros et comportait six actions, consacrées respectivement aux infrastructures de transports collectifs et ferroviaires, à la régulation et au contrôle des services de transports terrestres, à la sûreté dans les transports terrestres, aux infrastructures fluviales et portuaires, à la régulation des services de transports fluviaux et maritimes et, enfin, à l'inspection du travail des transports ;

- d'autre part, le programme « passifs financiers ferroviaires », dont les crédits s'élevaient à environ 1,5 milliard d'euros répartis en deux actions qui concernaient respectivement le désendettement de la SNCF et le désendettement de Réseau ferré de France (RFF).

Il a ensuite indiqué que M. Patrice Parisé était, quant à lui, responsable du programme « réseau routier national », qui représentait 2,4 milliards d'euros et était composé de trois actions, consacrées respectivement au développement des infrastructures routières, à l'entretien et à l'exploitation et à la politique technique nationale et internationale.

Il a ensuite précisé que M. Rémy Heitz exerçait, pour sa part, la fonction de responsable du programme « sécurité routière », qui représentait environ 247 millions d'euros et comportait quatre actions relatives à l'observation, la prospective et la réglementation, aux démarches interministérielles et de communication, à l'éducation routière et, enfin, à la gestion du trafic et l'information des usagers ; par ailleurs, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la dimension interministérielle de la sécurité routière serait traitée à travers un document de politique transversale (DPT), dont le chef de file serait également M. Rémy Heitz.

Enfin, il a ajouté que cette audition serait également l'occasion d'entendre Mme Hélène Jacquot-Guimbal, conseillère technique au cabinet du ministre des transports, qui souhaitait présenter à la commission certaines difficultés d'application, d'ordre transversal, de la nouvelle maquette budgétaire.

Après avoir indiqué qu'il serait également responsable du programme « régime sociaux et de retraite des transports terrestres », qui prenait place au sein d'une autre mission, M. Patrice Raulin a tout d'abord présenté les principaux enjeux du programme « transports terrestres et maritimes ». Il a indiqué que ce programme concernait l'infrastructure, la régulation et les contrôles de sécurité, s'agissant de plusieurs modes de transports. Il a souligné, ensuite, que la mise en oeuvre de ce programme serait essentiellement assurée, non pas directement par l'Etat, mais par les opérateurs d'infrastructure et de transport, ce qui constituait une caractéristique notable de ce programme. Il a précisé que cette configuration impliquait que des progrès soient réalisés dans la contractualisation des relations de l'Etat avec les opérateurs, citant en exemple le nouveau contrat d'objectifs et de moyens signé avec Voies navigables de France (VNF). Relevant qu'il était très difficile de définir des indicateurs portant strictement sur les masses budgétaires, il a jugé que les contrats signés avec les opérateurs devaient permettre la mise en oeuvre concrète des objectifs du programme, et assurer également un compte rendu des performances.

M. Patrice Raulin a ensuite mentionné le rapport d'audit, récemment rendu par le Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP), qui comportait des observations sur la structuration du programme en actions et sur sa décomposition par objectifs et indicateurs. Il a précisé que ce rapport allait permettre de progresser sur ces points et que des modifications seraient, sans doute, proposées d'ici le projet de loi de finances pour 2006. Il a ainsi jugé, notamment, que l'action consacrée à la sûreté était mal définie.

S'agissant du programme « passifs financiers ferroviaires », M. Patrice Raulin a expliqué qu'il s'agissait de subventions budgétaires en faveur du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD) de la SNCF et en faveur de RFF. Répondant à M. Jean Arthuis, président, qui suggérait l'ajout d'indicateurs portant sur les taux d'intérêt de ces dettes, M. Patrice Raulin a jugé, qu'en effet, des indicateurs portant sur le coût de ces dettes seraient sans doute préférables à des indicateurs portant sur leurs montants.

M. Patrice Parisé a ensuite présenté les principaux enjeux du programme « réseau routier national ». Il a indiqué que le premier objectif de ce programme était de doter notre pays d'un réseau structurant permettant de soutenir un développement durable, associant développement économique, satisfaction des attentes de la société et préservation de l'environnement. Il a ajouté que le programme avait également pour objectifs la préservation du patrimoine et le développement d'une doctrine technique routière et sa promotion. Il a ensuite présenté les trois actions du programme, leurs objectifs et leurs indicateurs. S'agissant de l'accroissement de la sécurité des déplacements, il a indiqué que les indicateurs choisis étaient des ratios théoriques, et non des statistiques réelles, ce qui devrait permettre d'isoler l'effet du programme par rapport aux autres composantes de la politique de sécurité routière. Enfin, il a souligné que l'une des difficultés de ce programme tenait à la longueur de la durée du cycle de production des investissements routiers, alors que les indicateurs étaient, pour leur part, annuels.

M. Rémy Heitz a ensuite évoqué les enjeux du programme « sécurité routière », rappelant que cette politique ne faisait finalement pas l'objet d'une mission interministérielle, mais d'un programme auquel était adjoint un document de politique transversale (DPT). De façon générale, il a jugé que la politique de sécurité routière était imprégnée de l'esprit de la LOLF depuis plusieurs années, dans la mesure où cette politique reposait sur une culture de résultats et de performance.

M. Rémy Heitz a ensuite rappelé que le programme « sécurité routière » représentait environ 250 millions d'euros et 3.000 agents, ajoutant qu'une cinquième action était récemment venue le compléter. Il a précisé que cette nouvelle action serait consacrée au contrôle automatique (radars) dont les crédits, antérieurement rattachés au ministère de l'intérieur, relevaient désormais du budget de la sécurité routière. Enfin, il a présenté les différents indicateurs du programme et a précisé le cadre du DPT, indiquant que celui-ci devrait assurer la coordination du programme « sécurité routière » avec, d'une part, des programmes qu'il a qualifiés de « partenaires », comportant eux-mêmes une action consacrée à la sécurité routière (« police nationale », « gendarmerie nationale »), et, d'autre part, des programmes qu'il a qualifiés d' « associés », dans les domaines de l'éducation nationale, de la santé et de la justice.

Mme Hélène Jacquot-Guimbal a ensuite fait état de difficultés, s'agissant de la gestion des salaires dans le nouveau cadre budgétaire, avec des conséquences possibles sur le climat social au sein du ministère de l'équipement. Elle a indiqué qu'il s'en était « fallu de peu » que le ministère ne puisse payer les traitements, dans une partie du pays, à la fin de l'année 2004. En effet, la déconcentration induisait un cloisonnement de la dépense que la répartition des crédits par programmes, dans le cadre de la LOLF, venait aggraver, d'autant que le ministère de l'équipement avait opté, au départ, pour une ventilation extrêmement fine des crédits de personnel par programmes. Elle a ajouté que les expérimentations menées en 2004 avaient montré que beaucoup de budgets opérationnels de programme n'atteignaient pas la masse salariale critique permettant d'éviter des absurdités en termes de gestion. Elle a donc indiqué que le ministère souhaitait aujourd'hui réduire ce cloisonnement de la gestion des salaires, tout en conservant la volonté d'informer le Parlement sur les coûts réels, tant en prévision qu'en réalisation, de chaque programme.

Un large débat s'est ensuite instauré.

M. Jean Arthuis, président, s'est demandé comment seraient évalués précisément les frais de personnel et les compensations à verser aux collectivités dans le cadre de la décentralisation, si l'on ne disposait pas d'une comptabilité fine des dépenses de personnel.

M. Patrice Parisé a indiqué qu'une gestion globalisée n'empêchait pas une parfaite connaissance des coûts. Il a précisé que le montant des compensations à verser aux collectivités territoriales serait retiré du programme « réseau routier national », à l'issue de la décentralisation, pour être transféré vers le budget du ministère de l'intérieur (dotation générale de décentralisation).

M. Alain Lambert, rapporteur spécial des crédits des transports terrestre et de l'intermodalité, a regretté les positions parfois dogmatiques de la direction de la réforme budgétaire, qui prônait une gestion des crédits de personnel par programmes, alors qu'elle n'était pas toujours adaptée aux contraintes rencontrées par les gestionnaires.

M. Jean Arthuis, président, a suggéré un système de « facturation » de la dépense de personnel par les responsables locaux au responsable de programme.

M. Patrice Parisé a précisé que, s'il était souhaitable que les personnels ne soient pas répartis par programmes, il était en revanche indispensable que le responsable de programme rende compte, tant en prévision qu'en exécution, de l'utilisation de la masse salariale. Il a jugé, qu'en tout état de cause, le responsable de programme n'avait pas vocation à gérer la paye.

M. Patrice Raulin s'est livré à un constat similaire, s'agissant du programme « transports terrestres et maritimes », indiquant que les budgets opérationnels de programme déconcentrés ne permettaient souvent pas d'atteindre un seuil critique en termes de masse salariale.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, a demandé à M. Patrice Parisé si ses fonctions, en tant que responsable du programme « réseau routier national », l'obligeraient à rendre compte des dépenses consenties en faveur des routes par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Il a ensuite interrogé M. Rémy Heitz au sujet du premier objectif du programme « sécurité routière », consacré à la réduction du nombre d'accidentés et de tués sur les routes, se demandant si les indicateurs ne pourraient pas donner lieu à une déclinaison plus fine, fondée par exemple sur une approche par grandes catégories d'usagers (passagers de véhicule, piétons, cyclistes, jeunes conducteurs), dès lors qu'il était établi que certaines populations étaient particulièrement exposées.

En réponse, M. Patrice Parisé a indiqué que le programme « réseau routier national » avait bien vocation à rendre compte des dépenses de l'AFITF, dans la mesure où cette dernière constituait un opérateur au sens de la LOLF, doté de ressources publiques et devant apporter, à l'avenir, une contribution importante au développement du réseau. Répondant à une interrogation de M. Jean Arthuis, président, il a précisé que la dette de l'AFITF serait bien considérée comme une dette publique au sens de Maastricht.

M. Rémy Heitz a, pour sa part, indiqué que, dans le cadre du dialogue de gestion, les objectifs du programme « sécurité routière » seraient déclinés par grandes catégories d'usagers. Il a précisé que, par exemple, le nombre de tués et d'accidentés âgés de moins de vingt-cinq ans ferait l'objet d'un suivi et de mesures particulières.

M. Jean Arthuis, président, a jugé que la masse critique de dépenses préconisée par Bercy était peut-être élevée. Il s'est demandé si la technologie informatique actuelle ne permettait pas de descendre à un niveau plus fin.

M. Alain Lambert, rapporteur spécial, a jugé, qu'en tout état de cause, il convenait de faire preuve de détermination, afin qu'une solution acceptable pour les gestionnaires puisse être trouvée. S'agissant du programme « transports terrestres et maritimes », il a rappelé que le CIAP avait rendu un avis assez mitigé sur le découpage du programme en actions, suggérant un redécoupage par modes, tout en réservant une action à l'intermodalité. Il s'est demandé si ce souci d' « esthétique budgétaire » était conforme à l'objectif de performance et d'analyse des coûts. Enfin, il a jugé que de nombreux indicateurs des programmes « transports terrestres et maritimes » et « passifs financiers ferroviaires » n'étaient pas très convaincants, car ils constituaient le simple reflet des moyens budgétaires mis en oeuvre par le ministère. S'agissant plus précisément des dettes ferroviaires, il a jugé indispensable de pouvoir disposer d'indicateurs portant sur le coût de ces dettes et les performances atteintes en matière de gestion.

M. Jean Arthuis, président, s'est demandé si les passifs financiers ferroviaires avaient vraiment vocation à être gérés en liaison avec le programme « transports terrestres et maritimes », dans la mesure où ces passifs représentaient l'héritage du passé et correspondaient à une problématique d'endettement plutôt que de transport.

M. Patrice Raulin a estimé, en revanche, qu'il existait des liens entre les programmes « transports terrestres et maritimes » et « passifs financiers ferroviaires », dans la mesure où, par exemple, la capacité d'auto-financement du gestionnaire d'infrastructures dépendait du montant de la subvention versée par l'Etat pour son désendettement. Il a ajouté que le CIAP avait d'ailleurs proposé de réintégrer les passifs financiers ferroviaires au sein du programme « transports terrestres et maritimes », mais que cette modification n'était pas envisagée pour le moment.

Après que M. Jean Arthuis, président, eut indiqué qu'il était souhaitable que RFF rende mieux compte de la réalisation de son patrimoine, M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis des crédits des transports terrestres, a ajouté que cette question était, en effet, cruciale pour les collectivités territoriales qui attendaient que des terrains soient mis à leur disposition.

M. Gérard Miquel, rapporteur spécial du budget des routes et de la sécurité routière, a jugé que la question de la ventilation des effectifs et moyens de fonctionnement comportait une dimension particulière, s'agissant du programme « réseau routier national », puisque celui-ci subirait les effets de la décentralisation, qui devait entraîner le transfert d'environ 30.000 emplois. Il s'est demandé comment seraient gérés les transferts résultant de la décentralisation, dans le cadre de la LOLF. A propos du programme « sécurité routière », il a interrogé M. Rémy Heitz sur son rôle de « chef de file » de cette politique transversale. Il s'est demandé comment serait assurée la coordination entre objectifs et indicateurs des différents programmes concourant à cette politique et quel serait le contenu du « document de politique transversale ».

M. Patrice Parisé a indiqué que les effectifs de l'Etat affectés aux routes nationales et départementales reviendraient d'environ 50.000 aujourd'hui à environ 15.000 à l'issue de la décentralisation. Il a précisé que le projet de loi de finances pour 2006 intégrerait encore la totalité de la masse salariale, puisque les transferts débuteraient, au plus tôt, au cours de l'année 2006. Il a ajouté, qu'après cette date, les moyens seraient progressivement transférés au ministère de l'intérieur, dans le cadre de la dotation générale de décentralisation.

M. Rémy Heitz a considéré que la politique transversale de sécurité routière devait consister à élaborer des stratégies communes, ce qui relevait du comité interministériel de sécurité routière (CISR), et que ces stratégies seraient, ensuite, déclinées dans chacun des programmes concernés, afin que ceux-ci puissent progresser sur des thématiques communes.

M. Jean Arthuis, président, a relevé une incohérence entre deux indicateurs figurant respectivement dans les actions consacrées à la sécurité routière des programmes « police nationale » et « gendarmerie nationale ». Précisant que cette incohérence portait sur le pourcentage de dépistages positifs d'alcoolémie par rapport au nombre total de dépistages, il a indiqué que si la police jugeait, elle, souhaitable une augmentation de cet indicateur, la gendarmerie visait, au contraire, à sa diminution.

M. Rémy Heitz a approuvé l'interprétation de la police, qui permettait d'envisager des progrès dans le ciblage des opérations de dépistage d'alcoolémie. Il a souhaité que les indicateurs des deux programmes soient, à l'avenir, interprétés de façon identique.

M. Maurice Blin s'est demandé quel serait le rôle exact des parlementaires dans le processus de définition des objectifs et indicateurs de performance. Il a regretté que les propositions d'indicateurs, actuellement soumises par les ministères, ne soient accompagnées d'aucun chiffrage. S'agissant du permis de conduire, il a jugé que sa délivrance était soumise à des conditions de plus en plus rigoureuses, ce qui accroissait le risque de voir des individus conduire sans permis.

M. Rémy Heitz a indiqué que cet aspect était pris en compte au sein de l'objectif d'amélioration du service du permis de conduire, avec un indicateur portant sur le taux de réussite en première présentation à l'examen, mais il a également rappelé que cette question était soumise à des exigences contradictoires, dans la mesure où le permis de conduire devait également être une garantie de qualité. Tout en observant que le coût moyen de cet examen en France devait être relativisé, au regard de comparaisons internationales, il a rappelé que le gouvernement avait récemment lancé une action tendant à diminuer le coût et à faciliter le financement du permis de conduire. Répondant à une question de M. Jean Arthuis, président, il a indiqué que le gouvernement comptait agir, d'une part dans le cadre de l'apprentissage et, d'autre part, grâce à un prêt bonifié, dont les intérêts seraient pris en charge par l'Etat. Il a précisé que l'imputation budgétaire de cette mesure n'avait pas encore été définie.

M. Yves Fréville s'est félicité de la présence, au sein de la mission « transports », d'indicateurs du type « coût / avantage ». Il a souhaité la généralisation de ce type d'indicateurs.

M. Michel Charasse a regretté que la politique de sécurité routière soit répartie au sein de plusieurs missions, jugeant ce schéma contraire à l'esprit de la LOLF. Il a également considéré qu'il existait des contradictions internes aux missions, citant notamment, en exemple, les objectifs, qu'il a jugés concurrents, d'amélioration de la fluidité du trafic routier d'une part, et de développement de l'usage des transports publics, d'autre part.

Mme Marie-France Beaufils a approuvé ce point de vue, estimant que l'indicateur portant sur la part du transport ferroviaire dans le transport de voyageurs grandes lignes était contradictoire avec l'objectif de désenclavement des territoires par une desserte aérienne, qui figurait dans le programme « transports aériens ». Elle a estimé que la structuration de la mission « transports » ne permettait pas d'évaluer les choix effectués entre modes de transports. S'agissant du désendettement ferroviaire, elle a regretté qu'aucun indicateur ne permette de juger des capacités financières de chacun des deux opérateurs, SNCF et RFF.

M. Patrice Raulin a reconnu que le libellé de l'objectif n° 5 du programme « transports terrestres et maritimes » mériterait d'être amélioré, dans la mesure où il fallait distinguer, d'une part, la question de la part du rail dans le transport de fret et, d'autre part, la question de la pertinence du mode ferroviaire (TGV) par rapport au mode aérien pour le transport de voyageurs.

Rappelant qu'en matière de transports, la politique nationale était aujourd'hui complétée par l'action décentralisée des régions, M. Gérard Longuet a regretté que les indicateurs mis en place dans le cadre de la LOLF ne donnent pas une vision d'ensemble de l'effort national en matière de transports. Il s'est, par ailleurs, demandé si, au sein de l'objectif n° 4 du programme « transports terrestres et maritimes », il ne serait pas possible de faire apparaître la part de fret réalisée par des transporteurs de l'Union européenne non nationaux. Enfin, s'agissant de l'Agence de financement des infrastructures de transport, il a rappelé que ses recettes provenaient du secteur routier, tandis que ses dépenses seraient consacrées à 70 % au mode ferroviaire, ce qui était significatif des choix intermodaux effectués par le gouvernement.

M. Patrice Raulin a estimé qu'il était difficile d'avoir une vision d'ensemble de la politique des transports, y compris dans le cadre de la LOLF, dans la mesure où, d'une part, il n'existait pas toujours de levier budgétaire, notamment en dehors de la région Ile-de-France puisque les transports en commun en site propre n'y étaient plus subventionnés par l'Etat et dans la mesure où, d'autre part, les compensations accordées aux régions suite à la décentralisation du transport régional de voyageurs relevaient, non pas du programme « transports terrestres et maritimes », mais de la ligne « dotation générale de décentralisation ». Par ailleurs, il a rappelé que l'objectif n° 4 du programme « transports terrestres et maritimes » (« veiller à une concurrence loyale et harmonisée dans chaque mode de transport dans un cadre européen ») s'inscrivait dans le cadre de la fonction régulatrice de l'Etat, consistant à garantir le respect des règles européennes.

En conclusion, M. Jean Arthuis, président, a remercié l'ensemble des intervenants, jugeant que cette audition avait opportunément permis de mettre en lumière un certain nombre de progrès et de difficultés liés à l'application de la LOLF.

Contrôle budgétaire - Aide humanitaire en Indonésie - Communication de MM. Michel Charasse et Adrien Gouteyron

La commission a tout d'abord entendu une communication de MM. Michel Charasse et Adrien Gouteyron, rapporteurs spéciaux, sur l'organisation de l'aide humanitaire en Indonésie.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a rappelé, en premier lieu, que l'objet de cette mission avait consisté en application de l'article 57 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) à vérifier l'affectation des fonds octroyés par la France, à étudier la coordination de multiples intervenants sur place et le rôle des organisations non gouvernementales (ONG), à tracer le bilan des moyens civils et militaires français déployés, et à tirer des enseignements pour que la France joue efficacement son rôle dans une situation d'urgence humanitaire inédite par son ampleur. Il a indiqué que le choix du pays s'était porté sur l'Indonésie, pays le plus touché sur le plan humain, puisque le dernier bilan faisait état de près de 234.000 morts et disparus dans la province d'Aceh. Il a précisé que ce bilan demeurait provisoire, dans la mesure où des dizaines de corps étaient encore susceptibles d'être découverts chaque jour, ainsi que l'avait révélé l'équipe de Pompiers sans frontières, rencontrée lors de la mission.

Développant le contexte politique local, il a observé que l'Indonésie était une démocratie fragilisée par la corruption et l'influence des autorités militaires sur le gouvernement civil, et que la province d'Aceh, où la pratique de l'islam était fervente, mais plus tolérante qu'on ne pouvait le supposer, était troublée, depuis 1976, par des tensions séparatistes menées par le GAM (Gerakan Aceh Merdeka), qui avaient jusqu'à présent fait plus de dix mille morts. La région avait été placée sous loi martiale en mai 2003 et l'armée indonésienne, très marquée par le précédent du Timor où elle avait établi une de ses principales bases, avait affirmé sa tutelle sur une province dont elle entendait garder le contrôle, et dont elle tirait une large part de ses ressources. Il a observé que l'armée avait renforcé ses effectifs sur place dans les semaines qui avaient suivi la catastrophe, avait procédé à environ deux cents exécutions de combattants du GAM durant le mois de janvier et exerçait un contrôle strict des déplacements des acteurs de l'urgence humanitaire. Il a indiqué que des négociations avaient toutefois été amorcées entre le gouvernement et le GAM, fin janvier à Helsinki, selon des modalités nouvelles par rapport à celles qui avaient échoué fin 2002, et que leur reprise était prévue fin février.

Il a ajouté que l'arrivée soudaine de plus de cinq mille étrangers dans une région qui leur était auparavant fermée avait de facto provoqué l'ouverture de cette dernière, créant des effets perturbateurs pour les autorités locales, qui concevaient néanmoins la nécessité de l'aide internationale. Il en était résulté des déclarations parfois contradictoires quant à la volonté du gouvernement de voir la présence étrangère prendre fin dans un délai de trois mois après le tsunami. Il a également précisé que le gouvernement avait envisagé de créer une autorité civile unique pour assurer la reconstruction de la région. Cette solution avait été finalement abandonnée début février et illustrait les rapports difficiles entre l'armée et le gouvernement, malgré les aspirations démocratiques du nouveau président, élu en septembre 2004.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a ensuite évoqué la très grande ampleur des dégâts humains et matériels et la « désolation totale » qui régnait sur la bande côtière entre les villes de Banda Aceh et Meulaboh, dont la route de jonction avait été détruite, en grande partie, et où de nombreux villages, composés d'habitations sommaires, avaient été « rasés ». Il a relevé que le tsunami avait, en réalité, fait relativement peu de blessés par rapport au nombre très élevé de victimes, d'où il résultait une certaine « surmédicalisation » des équipements affrétés. Il a souligné que le peuple acehnais apparaissait comme « courageux », en ce qu'il ne s'en remettait pas exclusivement à l'assistance humanitaire et que les conséquences épidémiologiques s'étaient également révélées réduites, seuls 90 cas de tétanos ayant été relevés.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a ajouté que l'administration locale avait été totalement désorganisée par la disparition de près des deux tiers des fonctionnaires civils et militaires de la région, et que le nombre d'orphelins était estimé à environ 8.000, au lieu des 50.000 initialement annoncés.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a indiqué que les conséquences économiques du tsunami devraient se révéler plus réduites qu'escomptées, en dépit de la destruction de nombreux navires de pêche et de cultures vivrières, envahies par l'eau saumâtre. Il a relevé que les installations de gaz et de pétrole, situées sur la côte est et qui contribuaient à renforcer les revendications indépendantistes, avaient été épargnées, et que la région, isolée par l'occupation militaire, se trouvait déjà dans un état de relatif sous-développement par rapport au reste du pays. Le coût de la reconstruction était estimé à 4,5 milliards de dollars, mais au total, l'impact sur le taux de croissance de l'Indonésie ne serait que de quelques dixièmes de points.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a ensuite fait état des moyens budgétaires consacrés par la France à l'ensemble des pays touchés par le tsunami, sans qu'il soit toujours possible, compte tenu de la nature des dépenses, d'identifier les fonds affectés à l'Indonésie. Le montant global des crédits budgétaires, encore susceptible d'évoluer, était proche de 60 millions d'euros. Il a précisé que sur ce montant, 17,6 millions d'euros avaient été versés dès le 31 décembre 2004 aux agences des Nations unies les plus impliquées dans l'aide d'urgence ; 3,1 millions d'euros avaient été imputés sur le Fonds d'urgence humanitaire et des crédits d'administration centrale du ministère de la défense et du ministère des affaires étrangères, et consacrés au fret humanitaire, aux rapatriements et à l'envoi d'experts pour identification, ainsi qu'à la mission de la Sécurité civile ; environ 18,4 millions d'euros correspondaient au surcoût lié à l'opération militaire « Beryx », qui s'était traduite par l'envoi de plus de 1.300 militaires, dont 1.096 en Indonésie, et d'importants moyens maritimes et aériens ; enfin 20 millions d'euros étaient prévus pour des projets de coopération dans quatre secteurs jugés prioritaires.

Il a relevé que les crédits publics, outre les dépenses strictement budgétaires, comportaient, en outre, la quote-part de 17 % de la France dans l'effort communautaire, soit 80 millions d'euros ; un montant de 3 millions d'euros consacrés par les six agences de l'eau à des projets d'assistance ; l'incidence des mesures de traitement de la dette par le Club de Paris ; une proposition de prêt concessionnel de 300 millions d'euros, qui serait géré par l'Agence française de développement ; et les dons réalisés par les collectivités territoriales, d'un montant supérieur à 10 millions d'euros, et dont une part transitait par le fonds de concours du ministère des affaires étrangères. Il a estimé que dans un contexte d'offre très concurrentielle des banques multilatérales de développement, et de la Banque mondiale en particulier, le prêt concessionnel proposé par la France serait plus compétitif s'il comportait un élément de don.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a ensuite détaillé les moyens humains que la France avait consacrés à l'assistance humanitaire en Indonésie. Il a indiqué qu'une mission de la sécurité civile avait été envoyée dès le 31 décembre 2004 et avait compté jusqu'à 70 personnes. L'hôpital de campagne qu'elle avait installé s'était cependant révélé quelque peu surdimensionné, puisqu'une douzaine d'opérations chirurgicales, seulement, avait été pratiquée, mais de nombreuses consultations, pas nécessairement liées à la catastrophe, avaient été réalisées. Il a ajouté que le financement des frais de fonctionnement et d'hébergement de la mission avait dû être assuré par l'ambassade de France en Indonésie, à laquelle le ministère des affaires étrangères avait délégué une somme de 30.000 euros.

Il a considéré que les forces armées françaises avaient joué un rôle déterminant dans le cadre de l'opération Beryx, en particulier grâce au déploiement de 11 hélicoptères, en assurant trois types d'actions : le transport de fret et de personnes au profit des ONG et des agences des Nations unies, la réhabilitation d'écoles par la Légion étrangère, et une campagne de vaccination contre la rougeole par le service de santé des armées. Cette présence visible et efficace avait été, selon lui, très appréciée de la population, des responsables locaux de l'ONU et des autorités indonésiennes. Il a jugé que les militaires français avaient fait preuve d'humilité et d'un grand sens de l'organisation, tout en respectant la volonté et les instructions des autorités locales. Les élèves officiers du porte-hélicoptères « Jeanne d'Arc » avaient également participé à l'organisation des secours, ce qui constituait une expérience inédite et enrichissante pour cette promotion. Il a indiqué que le désengagement des forces françaises devrait être complet début mars, le ravitailleur « La Marne » ayant pris le relais du bâtiment « Jeanne d'Arc » le 10 février. Les hélicoptères, qui avaient été laissés sur place à la demande des autorités indonésiennes, devraient néanmoins être rapatriés par des moyens aériens.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a relevé que les rapports entre l'armée et les ONG françaises étaient empreints d'une certaine « défiance », et que si la Légion étrangère n'avait disposé que de 5.000 euros pour ses travaux de réhabilitation d'écoles, l'UNICEF avait néanmoins fourni le matériel de peinture. Il a ajouté que l'efficacité des militaires français contrastait avec l'insistance dont avait preuve certains médias sur l'arrivée supposément tardive des unités françaises à Sumatra. Cette appréciation était, selon lui, excessive, car elle ne tenait pas compte de la mobilisation rapide des forces positionnées à Djibouti, de la vitesse de croisière relativement limitée du porte-hélicoptères « Jeanne d'Arc », et de la présence permanente de la marine américaine dans l'Ocean indien.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a précisé qu'un délégué interministériel avait été nommé par le Premier ministre le 18 janvier 2005, afin de coordonner l'action interministérielle de la France et d'assurer sa cohérence avec celle des autres partenaires nationaux et multilatéraux. Ce délégué disposait d'une équipe de huit personnes et était notamment codécisionnaire de l'affectation des 20 millions d'euros consacrés aux actions de coopération. Il a considéré que cette structure innovante devrait également faire oeuvre de pédagogie pour garantir la pérennité de l'aide française publique et privée sur le moyen terme.

Il a ensuite indiqué que les ONG françaises et étrangères étaient très nombreuses sur place, avec environ 400 organismes, et jouaient un rôle inégal dans un contexte de désorganisation et de manque de coordination manifestes durant les premières semaines. Les plus grandes ONG, selon lui, s'étaient positionnées très rapidement, disposaient de compétences variées et se révélaient parfois surfinancées par l'abondance de dons dont elles devaient respecter l'affectation, alors que d'autres organisations plus réduites éprouvaient davantage de difficultés à se rendre utiles. Il a estimé que le rôle des ONG dans la première urgence était irremplaçable et constituait leur « coeur de métier », par des actions telles que la distribution de vivres, de matériel médical et de tentes, ou l'assainissement de l'eau, mais que la plupart entendaient néanmoins participer à la reconstruction et obtenir un agrément à Jakarta pour se maintenir sur une période de deux à cinq ans. Il a considéré que toutes les ONG n'en avaient pas nécessairement les moyens ni la compétence. Il a estimé qu'il était probable que les autorités procèderaient dans les semaines à venir à une sélection de celles qui seraient habilitées à participer aux opérations de reconstruction, position que l'ONU tendait, selon lui, à approuver. Il a également rappelé que les personnes travaillant pour ces organisations étaient placées sous des statuts divers, en tant que salariés, volontaires ou bénévoles, ces derniers étant particulièrement représentés au sein de l'association Pompiers sans Frontières.

Abordant le rôle de coordination et de maître d'oeuvre joué par les agences des Nations unies, qui avaient bénéficié de montants élevés de dons de la part des Etats, il a précisé que l'ONU prêtait une attention prononcée à la bonne utilisation et au suivi comptable des fonds, et que sa crédibilité serait tributaire de la gestion rigoureuse de ses ressources, considérant les graves manquements constatés en Irak dans la mise en oeuvre du programme « Pétrole contre nourriture ».

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a ajouté que la coordination des intervenants était assurée, tant à Jakarta que dans la province d'Aceh, par le Bureau de coordination de l'aide humanitaire (BCAH) de l'ONU, selon un dispositif assez lourd et dans lequel l'armée indonésienne était impliquée.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a ensuite expliqué que les autres instances multilatérales participaient également à l'urgence et à la reconstruction, que ce soient la Commission européenne, qui avait prévu de consacrer 473 millions d'euros à l'ensemble des pays affectés, ou les banques de développement. Il a ainsi mentionné la Banque mondiale, qui avait proposé un financement de 855 millions de dollars pour la reconstruction en Indonésie, dont 300 millions de dollars via un prêt aux conditions très favorables.

Il a également souligné l'important apport technique et financier des entreprises françaises, qui s'étaient particulièrement mobilisées pour l'assistance aux victimes, le cas échéant par l'intermédiaire de leur filiale locale. Il a, à cet égard, cité les sociétés Carrefour, Danone, Total ou L'Air Liquide. Les opérateurs français devaient, selon lui, se positionner rapidement sur des chantiers stratégiques, tels que la reconstruction de la route entre Banda Aceh et Meulaboh et pouvaient légitimement escompter un retour sur investissements ne s'inscrivant plus dans le cadre de l'urgence humanitaire.

Evoquant les principales difficultés et incertitudes de la situation à Aceh, M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a souligné le manque de coordination en amont des ONG et la question du relogement des sans abris. Ce dernier enjeu, qu'il jugeait déterminant, illustrait, selon lui, le manque de lisibilité des décisions du gouvernement indonésien. Il a indiqué qu'avait débuté, avec l'assentiment marqué de l'armée indonésienne, la construction de centres de regroupement offrant un espace de vie restreint, y compris dans les zones non touchées par le tsunami. Il a relevé que les Acehnais tendaient cependant à revenir sur les lieux de leurs anciennes habitations pour y effectuer des travaux et y installer les tentes remises par l'UNICEF et Médecins sans Frontières. Il a également insisté sur la nécessité, pour les postes diplomatiques des différents pays concernés, de disposer d'une réserve de crédit mobilisable pour des actions d'urgence, à l'instar des ambassades américaines. Il a exprimé sa satisfaction, à ce titre, que le ministère des affaires étrangères ait délégué, début février, à chaque poste, une somme de 200.000 euros. Il a enfin souligné que le bureau de Jakarta du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) avait, d'ores et déjà, élaboré plusieurs projets de coopération, destinés à contribuer à la reconstitution de l'économie agricole de la province d'Aceh.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a conclu en rappelant que cette mission s'était déroulée dans une certaine discrétion et sans contact avec les médias français. Il a précisé qu'aucune irrégularité comptable n'avait été constatée et que le gouvernement français avait honoré ses engagements financiers en versant effectivement les fonds annoncés.

Cet exposé a été suivi d'un large débat.

M. Jean Arthuis, président, a félicité les deux rapporteurs spéciaux pour la réactivité dont ils avaient fait preuve dans la mise en place de cette mission, qui participait d'un contrôle budgétaire « en temps réel », et a suggéré que leur rapport fasse l'objet d'une publication. Il s'est également demandé si le coût de l'opération Beryx serait imputé sur les crédits d'opérations extérieures (OPEX) du ministère de la défense.

M. Yves Fréville a souligné que les forces armées françaises, en dépit des critiques de certains représentants d'ONG, s'étaient en réalité montrées les plus présentes des Etats membres de l'Union européenne, et n'auraient sans doute pas pu agir plus tôt si des unités n'avaient pas été pré-positionnées à Djibouti. Il a également estimé que l'Union européenne était fondée à participer à la reconstitution de la flottille de pêche.

M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a rappelé que les autorités indonésiennes avaient tardé à prendre conscience de la gravité réelle de la situation.

M. Eric Doligé s'est interrogé sur les enseignements qu'apportait cette mission sur le financement des ONG, sur les moyens de paiement et devises utilisées sur place, ainsi que sur la nature des relations entre les militaires français et l'armée indonésienne.

En réponse, M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a indiqué que ces relations étaient bonnes, et a souligné les rapports cordiaux que la Légion étrangère avait entretenus avec les militaires indonésiens chargés d'assurer le suivi de leurs activités. Il a ajouté que les ONG aux moyens d'intervention les plus importants et les plus réactifs étaient généralement celles dont les frais de fonctionnement et de communication étaient les plus élevés. Il a enfin précisé que les acteurs de l'urgence humanitaire avaient effectué leurs dépenses en argent liquide durant les premières semaines et que le dollar américain était couramment utilisé.

M. Maurice Blin a relevé que de nombreux étrangers revenaient dans les régions touristiques affectées par le tsunami, après avoir tissé des liens forts avec la population locale lors de la catastrophe.

M. Philippe Adnot a salué la qualité du travail accompli par les rapporteurs spéciaux et a fait état de ses contacts avec la chambre de commerce franco-indonésienne, qui lui avait recommandé d'attendre quelques semaines avant d'effectuer un don au profit des opérateurs en Indonésie.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a confirmé cette appréciation de la chambre de commerce, qui avait identifié des projets, mais les réservait à la phase de reconstruction. Il a ajouté que les collectivités territoriales pouvaient également attribuer leurs dons au fonds de concours du ministère des affaires étrangères, mais que l'affectation géographique ou thématique des dons n'était, selon lui, pas garantie.

M. Roger Besse s'est demandé quelle utilisation l'organisation Médecins sans Frontières comptait faire des dons qu'elle avait reçus, après avoir annoncé qu'elle disposait de suffisamment de fonds pour les pays d'Asie, et s'il était envisageable qu'elle rende les sommes aux donateurs ou en modifie l'affectation avec leur accord.

M. Jean Arthuis, président, a rappelé que les médias avaient contribué à alimenter la « surenchère » de la générosité, et ce faisant, le « surfinancement » de certaines ONG.

M. Jean-Jacques Jégou faisant référence à sa propre expérience d'élu local, a indiqué qu'il souhaitait privilégier une aide durable en faveur des orphelins des pays touchés par le tsunami. Il a constaté, au vu du nombre de navires de pêche laissés à l'abandon en Bretagne, qu'il serait dès lors peut-être plus opportun d'en faire don aux pays d'Asie.

M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a précisé que l'Union européenne avait proposé de remettre aux pays touchés par le tsunami des navires de pêche réformés, mais que leurs caractéristiques n'étaient guère adaptées aux usages locaux des pécheurs indonésiens.

M. Jean Arthuis, président, rapportant certains propos que lui avait tenu un des membres de l'équipe de Pompiers sans frontières présente à Sumatra, a indiqué que leur mission, dans un camp d'environ 2.000 réfugiés, avait été rendue plus complexe en raison de l'armée indonésienne, et que les membres de cette organisation avaient eu une impression de « désordre général » durant les premières semaines de l'assistance humanitaire.

La commission a alors donné acte de leur communication à MM. Michel Charasse et Adrien Gouteyron, rapporteurs spéciaux, et décidé que les conclusions de leur mission feraient l'objet d'une publication sous la forme d'un rapport d'information.

Contrôle budgétaire - Communication de M. Jean Arthuis

La commission a, enfin, entendu une communication de M. Jean Arthuis, président, sur le programme de contrôle des rapporteurs spéciaux pour 2005.

M. Jean Arthuis, président, a tout d'abord rappelé pour, s'en féliciter, qu'en 2004, année liée à la mise en oeuvre de la LOLF, les différents rapporteurs spéciaux avaient engagé 26 contrôles sectoriels, soit un niveau historiquement élevé, dont quatre enquêtes demandées à la Cour des comptes sur la base de l'article 58-2 de la LOLF et une mission d'assistance sur la base de l'article 58-1.

Il a déclaré que la commission avait affiné ses méthodes de contrôle budgétaire par la tenue d'auditions de méthode au printemps dernier, et qu'à ce titre, la commission s'était ouverte aux expériences de la Cour des comptes, avait entendu les principaux corps d'inspection ainsi que des cabinets privés d'audit ou de conseil et recueilli leurs points de vue afin d'améliorer l'efficacité de ses missions de contrôle.

Il a indiqué que les contrôles engagés par les rapporteurs spéciaux avaient donné lieu à la rédaction de onze rapports d'information, dont quatre avaient été réalisés suite à une enquête demandée en 2003 à la Cour des comptes. Il a précisé qu'il s'agissait des contrôles portant sur le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA), le Fonds national de solidarité sur l'eau (FNSE), la gestion des personnels des ministères de la recherche et ceux de la culture.

Il a indiqué que quatre communications en commission avaient été faites, portant sur les Forces françaises en Bosnie, les comptes de la SNCF, le contrôle budgétaire en Afrique et, tout dernièrement, l'organisation et le fonctionnement des centres de formation de la Légion étrangère.

Enfin, il a déclaré que cinq contrôles avaient été intégrés dans le rapport budgétaire présenté lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2005.

Il a précisé que quatre enquêtes de la Cour des comptes demandées en 2004 restaient en cours et que l'une d'entre elles, consacrée à l'établissement public Météo France, venait juste de faire l'objet d'un rapport qui devait déboucher, le 22 mars prochain, sur une audition contradictoire, suivant la formule retenue par la commission, depuis déjà plus de deux ans.

Il a indiqué que le contrôle sectoriel portant sur l'agence nationale des chèques vacances restait également en instance, et ferait l'objet d'une communication en commission en juin 2005, et que le contrôle sur les fonds publics versés aux fédérations sportives était reconduit en 2005.

Il a précisé que dix contrôles avaient été déclarés caducs, neuf suite à un changement de rapporteur spécial consécutif au renouvellement de septembre 2004, le dixième, portant sur les dégrèvements de taxe professionnelle, en raison de la création d'un groupe de travail interne à la commission sur le sujet.

Au total, il a précisé que 40 % des contrôles engagés n'avaient donc pu être menés à terme.

Il a indiqué que le programme de travail de la commission pour l'année 2005 s'exerçait dans un contexte essentiellement tourné vers la première année d'application de la LOLF, et a donné lecture des différents contrôles sectoriels programmés par les rapporteurs spéciaux, dont quatre reposaient sur des enquêtes demandées à la Cour des comptes :

- Affaires étrangères, M. Adrien Gouteyron, appareil diplomatique à l'étranger ;

- Agriculture, M. Joël Bourdin, sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage ;

- Agriculture-Commerce extérieur, MM. Joël Bourdin et Marc Massion, sur les suites données au contrôle budgétaire réalisé en 2004 sur la SOPEXA ;

- Aide au développement, M. Michel Charasse, sur les crédits d'aide aux TOM du Pacifique (Polynésie, Nouvelle-Calédonie) et au Vanuatu ;

- Aménagement du territoire, M. Roger Besse, sur les plates-formes d'initiatives locales ;

- Charges communes, M. Paul Girod, sur les modalités de la gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat dans les pays de l'Union européenne ;

- Commerce et artisanat, M. Auguste Cazalet sur la situation du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) ;

- Communication audiovisuelle, M. Claude Belot sur le financement des télévisions locales et le Fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER) ;

- Défense, M. François Trucy sur les instituts scientifiques de la gendarmerie ;

- Défense, M. Yves Fréville, sur la logistique dans la marine ;

- Enseignement supérieur, M. Philippe Adnot sur la valorisation de la recherche universitaire ;

- Fonction publique, M. Henri de Raincourt sur les perspectives d'évolution du statut de la fonction publique, notamment au vu de l'expérience suédoise ;

- Justice, M. Roland du Luart sur la justice à Roissy-aéroport et à Bobigny, sur les frais de justice et moyens envisageables pour contenir leur évolution préoccupante, sur les contrats d'objectifs entre chancellerie et cour d'appel ;

- Logement-ville, MM. Roger Karoutchi et Philippe Dallier sur la mise en place de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) ;

- Outre-mer, M. Henri Torre sur le nickel en Nouvelle-Calédonie ;

- Santé, M. Jean-Jacques Jégou sur l'informatisation dans le secteur de la santé, notamment par référence à la situation des régimes de sécurité sociale à l'étranger ;

- Services communs et urbanisme, M. Jean-Pierre Masseret sur la gestion immobilière du ministère de l'équipement ;

- Services généraux du premier ministre, M. François Marc sur la direction générale de l'administration et de la fonction publique ;

- Sport, M. Michel Sergent sur le contrôle des fonds publics versés aux fédérations ;

- Transports terrestres, M. Alain Lambert sur le TGV Est.

En conclusion, il a rappelé qu'un élément déterminant du contrôle résidait dans la volonté politique de chaque rapporteur spécial.

Plusieurs intervenants ont alors souhaité prendre la parole.

Mme Marie-France Beaufils a fait état de son voeu de mener, en sa qualité de rapporteur spécial, de concert avec M. Michel Sergent, un contrôle sur l'organisme ayant vocation à remplacer le FNDS.

M. Yves Fréville s'est dit intéressé par le contrôle envisagé par M. Roger Besse portant sur les plates-formes d'initiatives locales.

M. Eric Doligé a indiqué qu'il souhaitait travailler sur le thème de la délégation de service public dans le secteur des télécommunications.

Quant à M. Jean-Jacques Jégou, il a déclaré vouloir étudier le mode de fonctionnement des services de sécurité sociale, notamment au vu des exemples en Europe.

A l'initiative de M. Jean Arthuis, président, la commission a pris acte, à l'unanimité, de ces projets de contrôles. Elle a également souhaité que soit encore amélioré pour 2005 le pourcentage de contrôles engagés et menés à terme.

Jeudi 17 février 2005

- Présidence de M. Jean Arthuis, président, puis de M. Marc Massion, vice-président, puis à nouveau de M. Jean Arthuis, président et enfin de M. Maurice Blin.

LOLF - Mission travail - Audition de responsables de programmes

La commission a entendu M. Stephan Clément, délégué adjoint à l'emploi et à la formation professionnelle en remplacement de Mme Catherine Barbaroux, empêchée, déléguée générale à l'emploi et à la formation professionnelle, responsable de programmes pour la mission travail, dans le cadre d'une audition ouverte, compte tenu de son objet, aux membres de la commission des affaires sociales.

M. Jean Arthuis, président, a préalablement présenté les trois programmes relevant de la mission travail, dont le délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle avait la responsabilité :

- le programme « développement de l'emploi », premier de la mission ministérielle « travail » qui, représentant 18,4 milliards d'euros, était composé de deux actions, respectivement intitulées « allègements de cotisations sociales » et « promotion de l'emploi » ;

- le programme « accès et retour à l'emploi », deuxième de la mission ministérielle « travail » qui, représentant 8,3 milliards d'euros, était composé de six actions respectivement intitulées « mise en relation entre offre et demande d'emploi », « indemnisation des personnes au chômage et contrôle de la recherche d'emploi », « contrats aidés dans les secteurs marchands et non marchands », « activation des minima sociaux », « parcours individualisés vers l'emploi » et « insertion des publics fragiles » ;

- le programme « accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques », troisième de la mission ministérielle « travail » qui, représentant 4,8 milliards d'euros, était composé de trois actions respectivement intitulées : « soutien à la professionnalisation des actifs », « amélioration de la qualification des actifs et développement de la validation des acquis de l'expérience (VAE) », et « anticipation et accompagnement des mutations économiques ».

M. Jean Arthuis, président, a ensuite souligné l'existence de difficultés inhérentes à la construction d'indicateurs de performance dans un domaine où le contexte économique ne pouvait qu'inférer largement sur la réalisation des divers objectifs, et remarqué que les avant-projets annuels de performances paraissaient, heureusement, embrasser l'ensemble des grandes problématiques et des enjeux de la politique de l'emploi. Puis il a invité M. Stephan Clémentà préciser le contenu de ses responsabilités, ainsi que les difficultés qu'il pouvait rencontrer dans la mission qui lui était impartie.

M. Stephan Clément a tenu à préciser que l'exercice auquel la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) s'était livré était encore perfectible ; en particulier, les indicateurs étaient encore nombreux et reflétaient, dans une proportion excessive, le contexte socio-économique. Il a rappelé que le Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP) avait formulé des observations utiles à l'amélioration du programme « accès et retour à l'emploi », dont il conviendrait de s'inspirer, ainsi que des travaux d'évaluation auxquels se livrait actuellement la Cour des comptes. Au total, les projets annuels de performances (PAP) annexés au projet de loi de finances pour 2006 devaient être sensiblement différents des avant-PAP qui avaient été diffusés en annexe du projet de loi de finances pour 2005.

Il a indiqué que, d'une façon générale, le choix a été maintenu de ne pas mettre en place un indicateur général de baisse du chômage, car son niveau ne dépendait pas du montant des crédits mis en oeuvre. Il a rappelé que la réflexion sur les indicateurs avait été orientée par le plan national d'action pour l'emploi (PNAE) élaboré dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, qui se déclinait en actions dont certaines trouvaient une traduction directe dans les PAP, comme en témoignait la construction d'un indicateur de taux d'activité des « seniors», ainsi que par les directives nationales d'orientation (DNO) qui, en orientant les services déconcentrés dans une démarche de mesure de la performance, avaient également constitué un élément structurant de la réflexion sur les indicateurs. Puis il a précisé que, dans la perspective d'une baisse ciblée du taux de chômage, les indicateurs devaient indiquer les évolutions différenciées de l'emploi entre hommes et femmes, ainsi que la situation dans les métiers « en tension », et ajouté que les objectifs du plan de cohésion sociale constituaient une source d'inspiration majeure.

Enfin, évoquant le programme « développement de l'emploi », qui comprenait 18 milliards d'euros de compensation d'allégements de charges sociales, M. Stephan Clément a insisté sur la difficulté d'identifier les leviers d'action ministériels sur ce qu'il convenait de qualifier de « politique de guichet ».

M. Jean-Jacques Jégou s'est alors interrogé sur le rapport entre l'efficacité et les moyens mis en oeuvre dans le domaine de la formation professionnelle, ce qui posait le problème de l'articulation de la politique du travail avec celle de l'enseignement et celui, plus directement identifiable, des gains de productivité que pouvait réaliser l'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), malgré les indéniables améliorations déjà enregistrées. Il s'est aussi demandé quelles seraient, au terme de la démarche de performances, les modifications subséquentes de la politique menée en faveur des jeunes et des plus de 50 ans.

En réponse, M. Stephan Clément, après avoir insisté sur la nécessité de promouvoir le critère d'« employabilité », a rappelé qu'à l'horizon de 2008, en raison de l'achèvement de la décentralisation de la formation professionnelle, l'AFPA allait se trouver dans une situation de concurrence face aux conseils généraux pour l'achat des prestations qu'elle fournissait, situation de nature à favoriser la réalisation de gains de productivité ; en tout état de cause, dans le cadre du dernier contrat de progrès, il était prévu que l'AFPA devait supprimer 600 emplois de soutien d'ici à la fin de 2008. Enfin, il a noté que le nouveau contrat de professionnalisation constituait un instrument prometteur pour l'employabilité des plus de 50 ans, en cohérence avec la mise en extinction des mesures favorisant le départ anticipé des salariés, l'encouragement fait aux entreprises de développer une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC), ainsi que les perspectives ouvertes par les négociations sur la pénibilité et l'emploi des « seniors ».

Il a ensuite précisé à M. Jean-Jacques Jégou que la question de la nocivité de la contribution Delalande était posée, et a indiqué à M. Jean Arthuis, président, que le « toilettage » en cours du code du travail était de nature à permettre de répertorier l'ensemble des dispositifs susceptible de décourager l'activité des plus de 50 ans.

M. Jean Arthuis, président, s'est ensuite interrogé sur l'appétence des partenaires sociaux pour la LOLF. M. Stephan Clément lui a indiqué ne pas avoir relevé d'opposition frontale, le plus grand reproche portant plutôt sur le manque de clarté des politiques suivies.

Puis M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a souligné que la plupart des aides ne faisaient que maintenir l'emploi existant et que, seule, une plus grande flexibilité permettait d'embaucher. Il a insisté sur les problèmes de seuils, notamment celui de 10 salariés pour les artisans et de 50 salariés pour les PME, dont les effets étaient nuisibles aux créations d'emplois, et relevé qu'aucun indicateur ne permettait de dénombrer les créations d'emplois suscitées par les différentes aides existantes.

Ensuite, à l'invitation de M. Jean Arthuis, président, Mme Béatrice Sedillot, sous-directrice de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), a présenté l'activité de cette structure en soulignant son rôle dans la construction des indicateurs, en lien avec la DGEFP. Elle a indiqué que ses effectifs relevaient du programme « gestion et évaluation des politiques de l'emploi et de travail », qui était le « programme support » de la mission « travail ». Enfin, elle a précisé que pour l'ensemble du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, les effectifs étaient évalués à 10.500 agents, dont 9.000 dans les services déconcentrés et 1.500 dans les services centraux.

Puis M. Jean Arthuis, président, a invité M. Jacques Rapoport, secrétaire général des ministères des affaires sociales, à préciser son rôle. Après avoir donné le détail des champs ministériels le concernant, et relevé que l'existence de huit ministères dans la sphère sociale justifiait sa fonction, M. Jacques Rapoport a déploré que les périmètres ministériels soient modifiés à chaque changement de gouvernement.

Après que MM. Jean Arthuis, président, et Jean-Jacques Jégou eussent exprimé des doutes quant à l'adéquation d'une telle nébuleuse ministérielle aux impératifs d'efficience véhiculés par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), M. Jacques Rapoport a précisé qu'une des forces de la LOLF était justement de donner des indications neutres par rapport aux structures administratives, l'administration étant contrainte d'évoluer spontanément en obéissant à une logique d'objectifs.

Alors, M. Yves Fréville a alors rappelé que le problème fondamental demeurait celui de la différenciation des effets économiques et des effets administratifs, afin de construire des indicateurs permettant de mesurer ces derniers. Il a ensuite souligné l'existence de dégrèvements et de la prime pour l'emploi (PPE), dont l'efficacité devait être quantifiée afin de la comparer à celle des mesures relevant de la mission « travail ». Enfin, il a regretté que ne figure pas d'indicateur concernant les emplois très qualifiés.

Après que M. Jean Arthuis, président, eut encore relevé que des mécanismes fiscaux, tels que la réduction de la TVA dans le bâtiment, devaient faire l'objet d'un calcul d'efficience en termes de créations d'emploi, M. Stephan Clément a jugé nécessaire, en effet, la mise en perspective de mesures qui ne relevaient pas toutes de la mission « travail », exercice auquel pourrait se livrer le Conseil d'analyse de l'emploi, dont la création venait d'être annoncée, et rappelé que, pour sa part, la DGEFP était favorable au rattachement de la PPE à cette mission. Par ailleurs, répondant à une interrogation de M. Jean Arthuis, président, il a précisé que la logique de la LOLF trouverait aussi à s'appliquer à l'ANPE au travers d'un contrat de progrès qui devait mesurer l'efficience de sa gestion. Enfin, d'une façon générale, il a convenu que les indicateurs du projet de PAP étant trop nombreux, des regroupements devaient s'imposer.

M. Serge Dassault a cependant déploré qu'on s'attarde sur l'ensemble des mécanismes d'aides, dont le montant devait encore s'accroître de 1,5 milliard d'euros en 2006, au lieu de favoriser d'abord l'investissement préalable nécessaire à la création d'emplois. Pour sa part, M. François Marc s'est interrogé sur le caractère novateur des différents indicateurs, ainsi que sur leur suivi dans le temps, prenant l'exemple de l'indicateur intitulé « Taux de survie ou de pérennité à cinq ans des entreprises créées grâce aux mesures « emploi » ».

En réponse, M. Stephan Clément a indiqué que certains indicateurs avaient pu constituer en la reprise de statistiques déjà disponibles, tandis que les autres avaient été créés ad hoc. Mme Béatrice Sedillot a souligné que les indicateurs constituaient le fruit d'arbitrages complexes entre des contraintes parfois difficilement compatibles, ce qui expliquait que certains s'inscrivent dans une certaine durée, quoiqu'ils puissent « poser problème » au regard de l'objectif de disponibilité. Par ailleurs, elle a reconnu que les indicateurs d'efficience, trop peu nombreux, devaient être renforcés.

M. Maurice Blin a considéré qu'un consensus s'était dégagé pour estimer que les avant-PAP constituaient un exercice préparatoire. Il a rappelé que, selon lui, la LOLF avait le mérite d'avoir permis de mieux identifier la politique menée en faveur des « seniors ». Il lui a semblé que la France s'était enferrée dans l'idée de sauver l'emploi dans les secteurs déclinant au lieu de laisser plus libre cours au processus de « destruction créatrice » qu'avait décrit Schumpeter ; dès lors, les politiques d'assistance au profit des seniors n'avaient constitué qu'un expédient, seules la recherche et les inventions permettant de remédier véritablement au chômage en créant de nouveaux secteurs d'activité.M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a alors ajouté que la fiscalité française poussait aujourd'hui les entreprises à s'expatrier, dénonçant les travers de l'impôt sur la fortune, ainsi que de l'impôt sur les successions, dont le niveau était, selon lui, excessif.

Enfin, M. Maurice Blin a souhaité que les propos qui avaient été tenus incitent les hauts fonctionnaires auditionnés à remettre en cause les structures et à faire apparaître certains phénomènes masqués, tels que le lien entre le nombre trop élevé des chômeurs et le nombre insuffisant des créations d'emplois. En réponse, M. Stephan Clément a indiqué que les pôles de compétitivité devaient apporter une réponse partielle aux préoccupations manifestées en matière de recherche, et que l'articulation entre chômage et créations d'emplois constituait, au niveau européen, une problématique prévalente. En tout état de cause, il convenait de faire en sorte que les trajectoires individuelles d'emploi deviennent flexibles, mais sécurisées, afin que les périodes de chômage soient non plus redoutées, mais constituent de réelles opportunités au cours d'une vie professionnelle. Par ailleurs, M. Yves Fréville a souligné qu'il importait de mettre en place des indicateurs d'alerte.