ARTICLE 11 TER : APPLICATION DU TAUX RÉDUIT DE TVA À LA LOCATION D'AIRES D'ACCUEIL ET DE TERRAINS DE PASSAGE DES GENS DU VOYAGE

I. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 22 OCTOBRE 2010

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général pour soutenir l'amendement n° 41 de la commission ainsi rédigé .

I. - Le a. de l'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À la location d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage ; ».

II. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Cet excellent amendement, cosigné par M. Perruchot et M. Vigier, vise à appliquer le taux réduit de la TVA aux aires d'accueil et terrains de passage des gens du voyage.

Visiblement, lorsque l'on a étendu la TVA à taux réduit au logement social, on a oublié les aires d'accueil. Il est tout à fait légitime de leur appliquer le taux réduit.

M. Patrice Martin-Lalande. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre du budget . Sagesse.

M. le président. Monsieur le ministre, levez-vous le gage ?

M. François Baroin, ministre du budget . Oui, monsieur le président.

(L'amendement n° 41, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Voir les débats sur l'ensemble des amendements après l'article 11 .

II. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Article 11 ter (nouveau)

Le a de l'article 279 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À la location d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage ; ».

III. RAPPORT SENAT N° 111 (2010-2011)

Commentaire : le présent article, introduit à l'Assemblée nationale à l'initiative de nos collègues Nicolas Perruchot et Philippe Vigier, vise à appliquer le taux réduit de TVA à 5,5 % à la location d'aires d'accueil et de terrains de passage des gens du voyage.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES OBLIGATIONS À LA CHARGE DES COMMUNES

En application de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage , les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage, dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles.

Dans chaque département, un schéma départemental est établi au vu d'une évaluation préalable des besoins et de l'offre existante, notamment de la fréquence et de la durée des séjours des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux soins et d'exercice des activités économiques.

Ce schéma prévoit les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes où celles-ci doivent être réalisées . Il précise la destination des aires permanentes d'accueil et leur capacité. En outre, il définit la nature des actions à caractère social destinées aux gens du voyage qui les fréquentent. Enfin, il détermine les emplacements susceptibles d'être occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et définit les conditions dans lesquelles l'Etat intervient pour assurer le bon déroulement de ces rassemblements.

Les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma départemental.

B. UN DÉVELOPPEMENT DIFFICILE DES AIRES D'ACCUEIL

Les aires d'accueil et les terrains de passage destinés au séjour des familles sont soumises à des normes techniques d'aménagement et de gestion , définies par le décret n° 2001-569 du 29 juin 2001.

Afin de déterminer si ces normes encadrant la conception et l'aménagement de ces espaces expliquent les difficultés rencontrées par les communes pour développer la réalisation de ces aires , le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ainsi que le secrétariat d'Etat au logement et à l'urbanisme ont confié une mission au conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) pour faire des propositions d'allègement de ces normes.

Le CGEDD vient de rendre son rapport, dont la principale conclusion est la suivante : les lenteurs constatées dans la réalisation des aires d'accueil ne s'expliquent pas par un problème de normes qui engendreraient des surcoûts. Bien souvent, les aires existantes vont au-delà du strict minimum imposé par ces normes techniques. Les surcoûts proviennent surtout du fait que les aires sont souvent installées à l'écart des zones urbanisées et que leur réalisation implique des coûts de « voirie-réseaux-distribution » (VRD).

Le CGEDD fait donc des propositions pour stimuler le développement des aires d'accueil :

- transférer la compétence en matière d'installation des aires d'accueil à l'échelon intercommunal, alors qu'elle relève actuellement du maire ;

- modifier la composition de la commission départementale des schémas d'accueil des gens du voyage afin d'entendre les maires ou les présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) intéressés ;

- aménager le pouvoir de substitution du préfet au maire pour mettre en place des aires d'accueil ;

- sur les aires de grand passage, accepter la mise en place d'aires « tournantes » si et seulement si une aire fixe existe par département ;

- fixer par décret en Conseil d'Etat les normes minimales des aires de grand passage ;

- prévoir l'agrément des gestionnaires des aires pour viser leur professionnalisation ;

- harmoniser les droits d'usage des aires en instituant au besoin dans la réglementation une fourchette de tarif minimal et maximal ;

- prévoir une durée de stationnement limité sur les aires ;

- prévoir la création de groupements d'intérêt public (GIP) départementaux pour l'accompagnement des gens du voyage (avec l'adoption d'une convention-type de gestion des aires, des abus et clauses illégales étant souvent constatés en la matière).

C. LES MODES DE GESTION DES AIRES ET DES TERRAINS

Deux possibilités s'offrent en matière de gestion de ces aires et de ces terrains : la gestion directe (en régie) ou la gestion déléguée.

1. La gestion directe en régie

Il s'agit, dans ce cas, du mode d'exploitation direct du service par la commune ou l'EPCI . Le service en régie n'a ni personnalité morale, ni autonomie financière. Il est placé sous la dépendance directe de la collectivité dont il relève. Celle-ci utilise, pour l'accomplissement de sa mission, son propre patrimoine et ses agents.

La gestion en régie permet une maîtrise des orientations par la commune ou l'EPCI, ainsi qu'un lien direct entre la politique définie et son application par le service, puisque la collectivité concentre les compétences politiques et techniques. Par ailleurs, ce mode de gestion permet une évolution plus rapide en cas de changement d'orientation et un meilleur recouvrement des recettes.

2. La gestion déléguée

Il s'agit, dans ce cas, d'un contrat par lequel la gestion de l'aire est confiée à un gérant distinct de la collectivité ou de l'établissement public responsable . Cette gestion est soumise à un régime contractuel : la délégation de service public.

Ce mode de gestion permet de faire appel à des compétences déjà éprouvées en matière de gestion des aires d'accueil et de connaissance des voyageurs, lorsque ces compétences n'existent pas déjà en régie.

Selon les informations recueillies par votre commission, il semblerait que la gestion déléguée soit le mode privilégié en matière d'aires d'accueil et de terrains de passage .

II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Adopté par l'Assemblée nationale avec un avis de sagesse du Gouvernement , le présent article résulte d'une initiative de nos collègues Nicolas Perruchot et Philippe Vigier, approuvée par la commission des finances.

Cet article vise à appliquer le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 5,5 % à la location d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN DISPOSITIF CONFORME AU DROIT COMMUNAUTAIRE

L'annexe III de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA autorise l'application du taux réduit à « la location d'emplacements de camping et d'emplacements pour caravane ».

Le droit communautaire ne s'oppose donc pas à l'application du taux réduit de TVA à 5,5 % dans le cas de la location d'aires d'accueil ou de terrains de passage aux gens du voyage.

Le a ter de l'article 279 du code général des impôts (CGI) ouvre déjà le bénéfice du taux réduit de TVA à 5,5 % à la location d'emplacements sur les terrains de campings classés , à condition que soit délivrée à tout client une note agréée par l'administration indiquant les dates de séjour et le montant de la somme due.

B. LA RECHERCHE D'UN MEILLEUR ÉQUILIBRE FINANCIER EN FAVEUR DU DÉLÉGATAIRE

Aujourd'hui, on dénombre en moyenne quinze aires d'accueil et terrains de passage par département .

Afin d'appliquer les schémas départementaux d'accueil des gens du voyage, les communes et les EPCI font souvent appel à un délégataire de droit privé pour assurer la gestion des aires d'accueil et des terrains de passage. Pour ce délégataire, la rentabilité d'un tel équipement est moindre que celle tirée d'un camping classé , notamment du fait de l'application d'un taux de TVA différent selon les cas : 19,6 % pour les aires et les terrains contre 5,5 % pour les campings classés.

Le passage à un taux de TVA réduit de 5,5 % pour les aires d'accueil et les terrains de passage rendrait financièrement plus attractif ce type de délégation de service public . La baisse du taux de TVA permettrait en effet au délégataire de capter une partie de ce surplus de recettes et d'augmenter sa marge.

De ce fait, les communes et les EPCI pourraient voir un plus grand nombre de candidats concourir dans le cadre de ces délégations de service public. Les communes et les EPCI pourraient ainsi remplir plus aisément leurs obligations en matière d'ouvertures d'aires d'accueil et de terrains de passage au regard de la loi précitée du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

C. UN EFFET INCITATIF EN VUE DE LUTTER CONTRE LE « CAMPING SAUVAGE » ?

Le passage à un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les aires d'accueil et les terrains de passage peut également déboucher sur un effet incitatif en faveur de la fréquentation de ces espaces spécialement destinés aux gens du voyage.

Si le surplus de marge lié à l'abaissement de la TVA n'est pas entièrement capté par le délégataire de service public , mais qu'une part en est répercutée sur le prix, celui-ci enregistrera une baisse. Cette baisse pourrait orienter le choix d'un l'emplacement, pour les gens du voyage, en faveur des aires qui leur sont réservées, plutôt que sur des espaces où leur installation est irrégulière.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.