III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 17 NOVEMBRE 2010

Article 57

(précédemment réservé)

M. le président. « Art. 57. - I. - L'article 6 du code général des impôts est ainsi modifié :

A. Le 5 est remplacé par les dispositions suivantes :

« 5. Les personnes mariées et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont soumis à une imposition commune pour les revenus dont ils ont disposé pendant l'année du mariage ou de la conclusion du pacte.

« Les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité peuvent toutefois opter pour l'imposition distincte des revenus dont chacun a personnellement disposé pendant l'année du mariage ou de la conclusion du pacte, ainsi que de la quote-part justifiée des revenus communs. À défaut de justification, ces revenus communs sont également partagés entre les époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité. Cette option est exercée de manière irrévocable dans les délais prévus pour le dépôt de la déclaration initiale des revenus mentionnée à l'article 170. Elle n'est pas applicable lorsque les partenaires liés par un pacte civil de solidarité se marient entre eux.

« Les époux sont soumis à une imposition commune pour les revenus dont ils ont disposé pendant l'année au titre de laquelle l'une des conditions d'application du 4 cesse d'être remplie. »

B. Le 6 est remplacé par les dispositions suivantes :

« 6. Chacun des époux, partenaires, anciens époux ou anciens partenaires liés par un pacte civil de solidarité, est personnellement imposable pour les revenus dont il a disposé pendant l'année de la réalisation de l'une des conditions du 4, du divorce ou de la dissolution du pacte, ainsi que pour la quote-part justifiée des revenus communs. À défaut de justification, ces revenus communs sont également partagés entre les époux, partenaires, anciens époux ou anciens partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

« Les revenus communs sont, sauf preuve contraire, réputés également partagés entre les époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité. »

C. Le 7 est remplacé par les dispositions suivantes :

« 7. Lorsque plusieurs changements de situation, mentionnés aux 4 à 6, se produisent au cours de la même année, il n'est tenu compte pour chaque contribuable que de la situation résultant du dernier changement le concernant. »

D. Le 8 est remplacé par les dispositions suivantes :

« 8. En cas de décès de l'un des conjoints ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité, l'impôt afférent aux bénéfices et revenus non encore taxés est établi au nom des époux ou partenaires. Le conjoint ou le partenaire survivant est personnellement imposable pour la période postérieure au décès. »

II. - À l'article 7 du même code, les mots : « sous réserve des dispositions du 8 de l'article 6 » sont supprimés.

III. - L'article 196 bis du même code est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 196 bis. - La situation dont il doit être tenu compte est celle existant au 1 er janvier de l'année de l'imposition. Toutefois, l'année de réalisation de l'un des événements ou conditions mentionnés aux 4 à 6 de l'article 6, il est tenu compte de la situation au 31 décembre.

« Les charges de famille dont il doit être tenu compte sont celles existant au 1 er janvier de l'année de l'imposition. Toutefois, en cas d'augmentation des charges de famille en cours d'année, il est fait état de ces charges au 31 décembre ou à la date du décès s'il s'agit d'imposition établie en vertu de l'article 204. »

IV. - Un décret fixe les conditions d'application du présent article.

V. - Les dispositions des I à III sont applicables à compter de l'imposition des revenus de 2011.

La parole est à M. Jacques Remiller, inscrit sur l'article 57.

M. Jacques Remiller. Mon intervention sera brève, mais le sujet est important. Monsieur le secrétaire d'État, s'il faut que l'on s'attaque aux niches fiscales, vous conviendrez qu'il serait regrettable, pour tous les jeunes mariés de notre pays, que soit supprimé l'avantage fiscal dont ils bénéficient.

Vous connaissez ma vision de la famille, qui est d'ailleurs partagée par d'autres collègues. La famille étant le fondement de notre société, ceux qui s'engagent doivent recevoir une sorte de « coup de pouce » de la nation. D'un point de vue plus pragmatique, un mariage coûtant souvent cher, l'avantage fiscal permet de ne pas trop grever le budget des nouveaux mariés, souvent jeunes.

Je me réjouis donc de l'adoption en commission de l'amendement de notre collègue Hervé Mariton, qui rétablit la triple déclaration de revenus l'année du mariage.

Certains voudraient l'élargir au PACS, mais à engagement différent doit correspondre un avantage différent. Le mariage, en dépit des divorces constatés de nos jours, apporte une stabilité non négligeable à notre société, et à la famille en particulier (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Oui, mes chers collègues, je me permets d'insister sur la famille, et sur les familles de notre nation française. C'est le fondement essentiel de notre société et il convient de l'encourager.

Rappelons qu'en 2009, selon l'INSEE, seuls 256 000 mariages ont été célébrés dans notre pays, soit 3,5 % de moins qu'en 2008. Et ces statistiques vont s'aggraver - pardonnez-moi d'évoquer les mariages en ces termes.

Monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais avoir votre point de vue et savoir si vous compter encourager la création de nouveaux foyers fiscaux. (« Très bien ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

J'ai fait au plus court, monsieur le président.

M. le président. Vous avez néanmoins dépassé vos deux minutes... (Sourires.)

L'amendement n° 244 présenté par M. Sandrier, M. Brard, Mme Amiable, M. Asensi, Mme Billard, M. Bocquet, M. Braouezec, Mme Buffet, M. Candelier, M. Chassaigne, M. Desallangre, M. Dolez, Mme Fraysse, M. Gerin, M. Gosnat, M. Gremetz, M. Lecoq, M. Muzeau, M. Daniel Paul et M. Vaxès, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour défendre l'amendement n° 244.

Mme Marie-Hélène Amiable. Pour des raisons différentes de celles invoquées par l'orateur précédent, nous proposons la suppression de cet article. Notre amendement présente un avantage indéniable : contrairement à celui de mon collègue Mariton, il n'établit aucune hiérarchie entre le PACS et le mariage. Nous pensons que la morale et la fiscalité sont deux domaines bien distincts.

Les avantages fiscaux sont néanmoins porteurs d'un fort potentiel incitatif. Il est indéniable que deux êtres auraient moins tendance à entrer dans le carcan juridique que constitue cet acte civil s'il ne leur permettait pas de bénéficier d'avantages fiscaux.

Or les chiffres de l'INSEE sont sans équivoque : il existe une corrélation entre le taux de natalité et le taux de nuptialité ; dans chaque pays d'Europe occidentale et pour chacune des dix dernières années, le taux de natalité a été constamment égal à la moitié du taux de nuptialité.

Dès lors, supprimer les incitations au mariage aura nécessairement un impact sur le taux de natalité. Cet article alourdirait la pression fiscale pesant sur les couples qui se séparent ou qui se constituent. À l'heure où nous adoptons des réformes de plus en plus antisociales, nous pensons que sa suppression s'impose.

(L'amendement n° 244, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 573 présenté par M. de Courson, M. Perruchot et M. Vigier, est ainsi libellé :

Supprimer les alinéas 2 à 5.

L'amendement n° 452 présenté par M. Carrez, rapporteur général au nom de la

La parole est à M. Nicolas Perruchot, pour soutenir l'amendement n°573.

M. Nicolas Perruchot. Mes chers collègues, l'article 57 traite des modalités d'imposition sur le revenu des couples qui se constituent ou se séparent.

Le système existant est très critiquable, puisqu'il donne un avantage à la séparation des couples. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) La société n'a pas à intervenir dans la séparation d'un couple - événement privé -, mais récompenser celle-ci fiscalement nous paraît être une aberration totale, qui va à l'encontre des principes que nous défendons, les uns et les autres, depuis très longtemps.

En revanche, tant que le droit fiscal français retiendra le concept de foyer fiscal entendu comme les personnes mariées ou pacsées, il conviendra de maintenir l'avantage fiscal destiné à la constitution des couples.

Tel est l'objet du présent amendement, qui tend à supprimer les alinéas 2 à 5 de l'article.

M. Roland Muzeau. Quel réac !

(L'amendement n° 573, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 452 de la commission des finances, qui fait l'objet d'un sous-amendement n° 812.

L'amendement n° 452 présenté par M. Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances et M. Mariton, est ainsi libellé :

I. - Rédiger ainsi l'alinéa 2 :

«A. Après le 5, est inséré un 5 bis ainsi rédigé : ».

II. - En conséquence, rédiger ainsi le début de l'alinéa 3 :

« 5 bis . Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont soumis... (le reste sans changement) ».

III. - En conséquence, à la première phrase de l'alinéa 4, supprimer les mots :

« les époux et ».

IV. - En conséquence, à la deuxième phrase du même alinéa, supprimer les mots :

« époux ou ».

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Je laisse à M. Mariton le soin de le défendre.

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Mariton.

M. Hervé Mariton. Cet amendement a été adopté par la commission des finances et a reçu le soutien de plus d'une centaine de députés du groupe UMP.

Il part du constat qu'il ne s'agit pas là d'une niche fiscale, mais bien d'une modalité du calcul de l'impôt qui a sa cohérence : puisque se crée, avec le foyer, une personne fiscale nouvelle, il est normal qu'il y ait trois déclarations fiscales pour l'année du mariage.

Réserver ce dispositif au mariage correspond à l'affirmation d'une politique familiale reposant sur l'idée que le mariage contribue à la constitution d'une famille durable.

Mme Marie-Hélène Amiable. Ce n'est pas ce que montrent les statistiques !

M. Hervé Mariton. D'ailleurs notre collègue Balligand, en commission des finances, a bien souligné qu'il était au fond légitime de distinguer le mariage et d'autres liens : « Le mariage est avant tout d'un lien social tandis que le PACS est un engagement entre deux êtres », disait-il. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Pierre Balligand. Fait personnel !

M. Hervé Mariton. Les deux liens sont parfaitement légitimes ; ils entraînent des effets sociaux différents. D'ailleurs, dans une décision du 6 octobre dernier, le Conseil constitutionnel a bien souligné la légitimité du législateur à décider différemment selon l'un ou l'autre lien, compte tenu de leurs effets différents dans la société.

M. le président. Il faut conclure, monsieur Mariton.

M. Roland Muzeau. C'est déjà trop long !

M. Henri Emmanuelli. C'est un combat d'arrière-garde !

M. Hervé Mariton. En commission, notre collègue Dieffenbacher a d'ailleurs très bien souligné à quel point le mariage permettait de mieux protéger le partenaire le plus faible.

M. François Pupponi. C'est faux ! Dans quel siècle vivez-vous ?

M. Hervé Mariton. C'est dans cet esprit que je vous propose cet amendement.

M. le président. Je voudrais rappeler un constat établi tout à l'heure et partagé par tous : nous devons terminer ce matin, il reste environ deux cents amendements à examiner, et si nous refaisons tous les débats qui ont eu lieu en commission des finances, nous ne finirons pas dans les temps.

Je vais donc, veuillez m'en excuser, me montrer ferme en ce qui concerne le temps de parole, que je vous invite d'ailleurs à respecter de vous-mêmes.

Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . M. Mariton a présenté l'amendement de la commission, auquel j'étais personnellement tout à fait opposé pour toute une série de raisons.

M. Patrick Bloche. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Premièrement, cher Hervé Mariton, le monde a changé. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. Roland Muzeau. Sarkozy l'a dit hier soir, Mariton ne l'a pas écouté !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Pratiquement tous les couples qui se marient ou qui se pacsent ont déjà vécu ensemble plusieurs années. La société a changé.

Il y a dix ou vingt ans encore, cette disposition pouvait être considérée comme un coup de pouce, un soutien de la collectivité au moment où l'on se mettait en ménage et où l'on se mariait, ce qui occasionnait des dépenses nouvelles. Elle n'a plus lieu d'être de nos jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jacque Remiller. Mais si, bien sûr !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Deuxièmement, elle ne produit plus qu'un pur effet d'aubaine fiscale,...

M. Patrice Camejane. Pour les pacsés !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . ...et je sais, monsieur Mariton, que vous êtes très attaché à la justice fiscale.

Comment justifier que les personnes qui se marient ou se pacsent en milieu d'année aient un avantage fiscal très supérieur à celui qu'ils auraient s'ils se mariaient ou se pacsaient en décembre ?

Comment justifier que le couple dans lequel l'un des conjoints gagne très bien sa vie et l'autre pas du tout ait un avantage fiscal très supérieur, quel que soit le moment de l'année où a lieu le mariage, à celui du couple dans lequel les revenus des deux conjoints sont à peu près identiques ?

M. Roland Muzeau. Très bien !

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Comment expliquer que les personnes qui, après s'être mariées, divorcent une, deux, trois, quatre fois, puissent cumuler, au terme de leur vie sentimentale et fiscale, des avantages fiscaux très supérieurs à ceux des personnes qui sont restées fidèles ? (Exclamations sur divers bancs.)

J'aborderai, enfin, la question de l'égalité entre le mariage et le PACS. Savez-vous, cher collègue Mariton, que l'on se « dépacse » aujourd'hui beaucoup moins que l'on ne divorce...

M. Marc Le Fur. Sophisme !

M. Gilles Carrez, rapporteur général ...et que le PACS, après maintenant bientôt dix ans d'expérience, démontre paradoxalement une stabilité plus grande que le mariage ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Saisi d'une question de droit fiscal, le Conseil constitutionnel a estimé, en 1999, que le PACS organisait une véritable solidarité entre les partenaires et qu'il était, dès lors, légitime qu'il bénéficie du même traitement fiscal que le mariage.

M. Hervé Mariton. Il en juge autrement dans sa décision du 6 octobre 2010 !

M. Marc Le Fur. Mariton au Vatican !

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Ce sont là des réalités. Je souhaite donc que l'on s'en tienne à la proposition du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État . Le Gouvernement partage à 100 % l'analyse du rapporteur général. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Roland Muzeau. On est d'accord avec le Gouvernement, ça nous change !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État . Il considère effectivement qu'il n'y a pas lieu de distinguer, sur le plan fiscal, entre pacsés et mariés.

Nous souhaitons donc en rester à la position du Gouvernement, c'est-à-dire à la rédaction initiale du projet de loi de finances.

Oui, la famille a changé. Oui, notre regard sur la société doit évoluer. Oui, il doit y avoir une égalité fiscale entre mariés et pacsés.

M. Christian Vanneste. Non !

M. Roland Muzeau. Voilà Vanneste ! Il ne manquait plus que lui !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État . En décider autrement serait, d'ailleurs, probablement remis en cause par le Conseil constitutionnel. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. Hervé Mariton. Sa décision d'octobre montre que non. C'est de la mauvaise foi !

M. le président. Le sous-amendement n° 812 présenté par M. Le Fur, est ainsi libellé :

Compléter cet amendement par les six alinéas suivants :

« V. - À la première phrase de l'alinéa 12, supprimer les mots :

« ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité ».

« VI. - En conséquence, à la fin de la première phrase du même alinéa, supprimer les mots :

« ou partenaires ».

« VII. - En conséquence, à la dernière phrase du même alinéa, supprimer les mots :

« ou le partenaire ».

La parole est à M. Marc Le Fur, pour défendre le sous-amendement n° 812.

M. Marc Le Fur. Ce sous-amendement s'inscrit tout à fait dans la logique de l'amendement défendu par notre collègue Mariton, auquel je souscris, bien évidemment, à 100 %.

M. Roland Muzeau. Ça ne m'étonne pas ! Vous êtes aussi réacs l'un que l'autre !

M. Marc Le Fur. Je vous ferai observer, monsieur le rapporteur général, que vous avez utilisé un sophisme lorsque vous avez comparé les ruptures de PACS et les divorces. Le PACS existant depuis bien moins longtemps que le mariage, le taux de rotation (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR)...

M. François Pupponi. Quelle jolie formule !

M. Marc Le Fur. ...est, par définition, moindre à ce stade, et l'on ne peut donc pas comparer.

M. le président. Vous n'avez la parole, monsieur Le Fur, que pour soutenir votre sous-amendement.

. J'y viens, monsieur le président.

Il est une situation, monsieur le rapporteur général, qui doit être prise en considération de manière très particulière : celle des veufs et des veuves. Aujourd'hui, en cas de veuvage, il y a bien évidemment deux déclarations. Chacun admettra que le veuvage n'est pas une situation choisie.

M. Henri Emmanuelli. Ça dépend ! (Rires.)

M. Marc Le Fur. Donc, il faut à l'évidence maintenir la double déclaration, qui atténue au moins la progressivité de l'impôt.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . C'est le cas. Ce point est satisfait.

M. Marc Le Fur. Actuellement, non. Il sera satisfait si l'on adopte mon sous-amendement.

Un certain nombre de militants de la famille ont constaté, à la lecture de la composition du Gouvernement, que le mot « famille » n'apparaissait pas. C'est sans doute une erreur vénielle de mot.

M. Christian Vanneste. Il n'y a plus de ministre de la famille non plus !

M. Marc Le Fur. Mais, si nos amendement et sous-amendement n'étaient pas adoptés, ce serait une confirmation du fait que la famille ne figure pas dans les objectifs gouvernementaux, et je considérerais cela comme relativement grave.

M. le président. Comme le sujet est d'importance et qu'il y a un amendement et un sous-amendement, je vais - à titre exceptionnel - donner la parole à quatre orateurs avant de les mettre aux voix.

M. Henri Emmanuelli. Nous demandons un scrutin public !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.

M. Jean-Pierre Balligand. Je ne demande pas la parole pour un fait personnel, mais je tiens à rappeler la position que Pierre-Alain Muet et moi-même avons prise après l'adoption en commission des finances de l'amendement de M. Mariton, qui a posé de graves problèmes.

Notre position, que j'estime claire et nette, a été de dire qu'il était inadmissible d'établir une hiérarchie entre PACS et mariage, et nous avons même écrit dans un communiqué que l'ordre moral était en train de rentrer dans la politique fiscale à la suite de l'initiative de M. Mariton. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC - Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. Christian Vanneste. Vous, vous êtes pour le désordre moral !

M. Jean-Pierre Balligand. Pour être très honnête, M. Charles-Amédée de Courson a traité à égalité les pacsés et les mariés dans son amendement concernant l'entrée des couples dans le dispositif fiscal abordé à l'article 57. Même lui n'a pas fait de différenciation entre le PACS et le mariage.

M. Patrick Lemasle. Ce qui est normal !

Mme Isabelle Vasseur. Pourquoi dites-vous : « Même lui » ?

M. Jean-Pierre Balligand. Nous avons eu une discussion en commission, car les avis étaient partagés : les différentes sensibilités de gauche se sont opposées à une grande partie de l'UMP, mais il y avait également une partie de la droite qui n'était pas d'accord avec M. Mariton.

L'entrée de l'ordre moral dans la politique fiscale est sous-jacente à l'amendement de M. Mariton. C'est pourquoi il faut être très clair et faire très attention.

M. Christian Vanneste. Pas du tout ! Il s'agit d'une question sociale !

M. Jean-Pierre Balligand. Je conclus en rappelant le chiffre qui a été donné en commission : alors que cela commence à faire un bail que le PACS existe, seulement 10 % des pacsés se « dépacsent », et l'on est bien au-delà de ce pourcentage pour le mariage ! (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Il faut faire preuve de lucidité : le PACS est un engagement moral très significatif et cela doit se traduire sur le plan juridique. (Même mouvement.)

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 452, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

............................................................................

M. le président. La parole est à M. Patrice Calméjane.

M. Patrice Calméjane. N'étant pas membre de la commission des finances, permettez-moi d'intervenir sur l'amendement qu'elle a adopté à l'initiative de M. Mariton, pour le défendre. Je rappellerai à cet effet quelques articles du code civil.

L'article 214, l'un des cinq articles lus au moment de la célébration du mariage, dispose que : « Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives. » Il est donc bien prévu une répartition des charges dans le cadre du mariage dans le code civil.

À l'inverse, l'article 515-5-2 du même code civil rappelle la séparation des recettes d'un membre pacsé. Il est donc fait une différence entre le mariage et le PACS dans le code civil.

De plus, l'article 515-7 rappelle qu'un PACS se dissout par la mort de l'un des partenaires ou par le mariage des partenaires ou de l'un d'eux. C'est la preuve qu'il y a bien une hiérarchie supérieure du mariage vis-à-vis du PACS.

M. Roland Muzeau. C'est la dernière encyclique que vous lisez ? On n'est pas à l'église !

M. Patrice Calméjane. Il est donc normal qu'il y ait une différence fiscale entre le PACS et le mariage.

M. Patrick Bloche. C'est scandaleux !

M. Patrice Calméjane. Concernant les mesures d'économie demandées, et adoptées dans un certain nombre de secteurs, je rappelle que, dans le domaine des transports, nous avons reculé sur la remise en cause des avantages des personnels de la SNCF et d'Air France parce qu'il y avait une menace de grève. Les futurs mariés ne peuvent pas se mettre en grève, mais ils restent des électeurs. Je suis donc favorable à l'amendement n° 452. Le mariage a deux cents ans ; le PACS n'en a que onze. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Le long débat que nous avons eu en commission et qui resurgit ici montre bien que notre fiscalité du revenu est un héritage d'un autre âge : celle-ci doit être neutre par rapport aux choix familiaux et personnels.

M. Christian Vanneste. Non !

M. Alain Gest. Le mariage est un élément essentiel de la famille !

M. Pierre-Alain Muet. Ce sont, bien sûr, des choix fondamentaux, mais ils n'ont pas à interférer avec des considérations fiscales.

Quand notre collègue Mariton propose de différencier le PACS du mariage, il est complètement en dehors de la réalité d'aujourd'hui, qu'a rappelée le rapporteur général. Aujourd'hui, on se pacse ou on se marie souvent après avoir vécu ensemble, parfois même après avoir eu des enfants. C'est de cette réalité qu'il faut tenir compte.

La fiscalité doit être neutre : elle ne doit pas introduire de considérations morales, mais tenir compte simplement du revenu et de critères objectifs. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Les chiffres indiqués par le rapporteur général dans son rapport - 175 000 PACS et 256 000 mariages en 2009 - montrent que le PACS est devenu une modalité de la vie en couple. Le fait, souligné par le rapporteur général, qu'on se « dépacse » moins qu'on ne divorce montre qu'il est faux d'affirmer, comme le fait M. Mariton, que le mariage est plus durable. (Protestations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Nous devons moderniser notre fiscalité des revenus, qui remonte à l'entre-deux-guerres, et tenir compte de l'évolution qui s'est produite depuis soixante-dix ans. Pour cela, il faut naturellement rejeter l'amendement de notre collègue Mariton.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Patrick Bloche. Ouvrez le mariage aux homosexuels si vous voulez être cohérent ! (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. Hervé Mariton. Ce n'est pas le débat !

Je ferai trois observations.

Premièrement, cet amendement a été voté par la commission des finances.

Deuxièmement, le Conseil constitutionnel, monsieur le secrétaire d'État, a souligné dans sa décision du 6 octobre la différence existant entre les liens du mariage et le PACS, et rappelé la légitimité du législateur à en tirer les conséquences.

M. Jean-Pierre Balligand. Ce n'était pas sur ce texte !

M. Hervé Mariton. Je propose simplement de respecter la logique de la décision du Conseil constitutionnel du 6 octobre dernier.

M. Patrick Lemasle. Évoluez donc !

M. Hervé Mariton. Troisièmement, je suis parfaitement conscient, monsieur le rapporteur général, que le monde a changé. Je suis conscient aussi de la légitimité du PACS. Je dis simplement que, puisqu'il y a aujourd'hui deux liens possibles - le PACS et le mariage -, il est normal de concevoir une différence entre l'un et l'autre.

M. Patrick Bloche. Pour quelles raisons ?

M. Hervé Mariton. Je ne sais pas exactement ce que signifie le concept de neutralité de l'impôt. Pour moi, ce dernier a aussi pour vocation d'encourager des choix utiles à la stabilité de la société. Quelle que soit l'imperfection des institutions, il me paraît utile de consolider celle du mariage, y compris, comme c'est fréquent, lorsque le PACS évolue en mariage.

M. Patrick Lemasle. Mariton, le moraliste !

M. Hervé Mariton. Dès lors, le respect de la modalité de perception de l'impôt impose de constater qu'un couple marié devient une nouvelle personne fiscale. Cela a son sens. C'est pourquoi il faut voter l'amendement de la commission des finances.

M. Jacques Domergue. Je demande la parole, monsieur le président.

M. Roland Muzeau. Je ne l'ai pas eue, il n'y a pas de raison que vous l'ayez !

M. le président. J'ai dit que, parce qu'il y avait un amendement et un sous-amendement, je donnerais exceptionnellement la parole à quatre personnes. Nous allons maintenant passer au vote.

(Le sous-amendement n° 812 n'est pas adopté.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Les plots n'ont pas fonctionné, monsieur le président.

M. le président. Le scrutin public n'a pas été demandé sur le sous-amendement, mais uniquement sur l'amendement.

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 452.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 96

Nombre de suffrages exprimés 96

Majorité absolue 49

Pour l'adoption 48

Contre 48

(L'amendement n° 452 n'est pas adopté.)

(Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. L'amendement n° 703 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

I. - Après le mot :

« quote-part »,

rédiger ainsi la fin de la première phrase de l'alinéa 4 :

« des revenus communs lui revenant ».

II. - En conséquence, à la deuxième phrase du même alinéa, après le mot :

« justification »,

insérer les mots :

« de cette quote-part ».

III. - En conséquence, après le mot :

« quote-part »,

rédiger ainsi la fin de la première phrase de l'alinéa 7 :

« des revenus communs lui revenant ».

IV. - En conséquence, à la dernière phrase du même alinéa, après le mot :

« justification »,

insérer les mots :

« de cette quote-part ».

L'amendement n° 702 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

I. - À la deuxième phrase de l'alinéa 4, substituer aux mots :

« également partagés »,

les mots :

« partagés en deux parts égales ».

II. - En conséquence, procéder à la même substitution à la dernière phrase de l'alinéa 7 et à l'alinéa 8.

L'amendement n° 700 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

À la dernière phrase de l'alinéa 4, après le mot :

« solidarité »,

insérer les mots :

«, conclu au titre d'une année antérieure, ».

L'amendement n° 704 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

I. - Supprimer l'alinéa 5.

II. - En conséquence, substituer aux alinéas 9 et 10 l'alinéa suivant :

« C. Le 7 est supprimé. ».

III. - En conséquence, rédiger ainsi la dernière phrase de l'alinéa 15 :

« Toutefois, l'année de la réalisation ou de la cessation de l'un ou de plusieurs des évènements ou des conditions mentionnés au 4 à 6 de l'article 6, il est tenu compte de la situation au 31 décembre de l'année d'imposition. ».

L'amendement n° 701 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

À la dernière phrase de l'alinéa 16, après le mot :

« décembre »,

insérer les mots :

« de l'année d'imposition ».

Les amendements n os 703, 702, 700, 704 et 701 de M. le rapporteur général sont rédactionnels.

(Les amendements n os 703, 702, 700, 704 et 701, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 57. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Contre !

M. Marc Le Fur. Rappel au règlement !

(L'article 57, amendé, est adopté.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est scandaleux !

M. Etienne Pinte. Nous avons voté contre !

M. Jacques Remiller. Monsieur le président, vous n'avez pas compté nos voix !

M. le président. L'article 57 a été voté. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Christian Vanneste. C'est scandaleux !

M. Henri Emmanuelli. Ne mettez pas la présidence en cause ! (Sourires.)

M. Nicolas Perruchot. Nous représentons le peuple ! Nous sommes là pour voter ! Respectez-nous !

M. Jacques Remiller. Suspension de séance !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Vous n'avez pas compté nos voix !