III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 16 NOVEMBRE 2010

Article 62

Mme la présidente. « Art. 62. - I. - Au chapitre II du titre III du livre III de la quatrième partie du code général des collectivités territoriales, la section 4 devient la section 5 et il est rétabli une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4
« Péréquation des recettes fiscales

« Art. L. 4332-9 . - I. - Il est créé un fonds national de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises des régions et de la collectivité territoriale de Corse.

« II. - 1° Pour chaque région et pour la collectivité territoriale de Corse, est calculée chaque année la différence entre :

« a) Le produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises reçu en application de l'article 1599 bis du code général des impôts l'année précédente ;

« b) Le produit de cette même cotisation reçu en 2011 ;

« 2° Les ressources fiscales de la région ou de la collectivité territoriale de Corse sont diminuées d'un prélèvement au profit du fonds lorsque celle-ci répond aux deux conditions suivantes :

« a) La différence définie au 1° est positive ;

« b) La différence entre son potentiel fiscal par habitant et le potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des régions et de la collectivité territoriale de Corse est positive ;

« 3° Ce prélèvement est égal à la moitié de la différence définie au 1°, dans la limite du produit du nombre d'habitants de la région ou de la collectivité territoriale de Corse par la différence définie au b du 2°.

« Ce prélèvement est effectué sur les douzièmes prévus par l'article L. 4331-2-1.

« III. - Sont éligibles à un reversement des ressources du fonds les régions ou la collectivité territoriale de Corse dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à 0,85 fois le potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des régions et de la collectivité territoriale de Corse.

« Les ressources du fonds sont réparties entre les collectivités éligibles :

« 1° Pour un sixième, au prorata de leur population ;

« 2° Pour un sixième, au prorata de l'effectif des élèves scolarisés dans les lycées publics et privés et de celui des stagiaires de la formation professionnelle de la collectivité concernée, inscrits dans les établissements de leur ressort ;

« 3° Pour un sixième, au prorata de leur superficie, retenue dans la limite du double du rapport entre, d'une part, leur population et, d'autre part, la densité de population moyenne de l'ensemble des régions et de la collectivité territoriale de Corse ;

« 4° Pour la moitié, au prorata de l'écart relatif entre leur potentiel fiscal par habitant et le potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des régions et de la collectivité territoriale de Corse.

« Les versements sont effectués par douzièmes.

« IV. - Pour l'application du présent article, la population à prendre en compte est celle calculée en application de l'article L. 4332-4-1.

« V. - Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »

II. - Au titre III du livre III de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, le chapitre V devient le chapitre VI, l'article L. 3335-1 devenant l'article L. 3336-1 et il est rétabli un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V
« Péréquation Des Recettes Fiscales

« Art. L. 3335-1 . - I. - Il est créé un fonds national de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises des départements.

« II. - 1° Pour chaque département est calculée chaque année la différence entre :

« a) Le produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises reçu en application de l'article 1586 du code général des impôts l'année précédente ;

« b) Le produit de cette même cotisation reçu en 2011.

« 2° Les ressources fiscales du département sont diminuées d'un prélèvement au profit du fonds lorsque ce département répond aux deux conditions suivantes :

« a) La différence définie au 1° est positive ;

« b) La différence entre son potentiel fiscal par habitant et le potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des départements est positive.

« 3° Ce prélèvement est égal à la moitié de la différence définie au 1°, dans la limite du produit du nombre d'habitants du département par la différence définie au b du 2°.

« Ce prélèvement est effectué sur les douzièmes prévus par l'article L. 3332-1-1.

« III. - Sont éligibles à un reversement des ressources du fonds les départements dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur au potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des départements.

« Les ressources du fonds sont réparties entre les départements éligibles :

« 1° Pour un sixième, au prorata de leur population ;

« 2° Pour un sixième, au prorata de l'effectif du nombre de bénéficiaires de minima sociaux au cours de l'année précédant celle du prélèvement et de la population âgée de plus de soixante-quinze ans ;

« 3° Pour un sixième, au prorata de la longueur de la voirie départementale rapportée au nombre d'habitants de chaque département ;

« 4° Pour la moitié, au prorata de l'écart relatif entre leur potentiel fiscal par habitant et le potentiel fiscal par habitant moyen de l'ensemble des départements.

« Les versements sont effectués par douzièmes.

« IV. - Pour l'application du présent article, la population à prendre en compte est celle calculée en application de l'article L. 3334-2.

« V. - Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »

III. - L'article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa du 2° du 1 du II du 1.2, les mots : « diminué du prélèvement opéré en 2011 en application du A du II de l'article 1648 AB du même code et augmenté du reversement opéré en 2011 en application du B du même II » sont supprimés ;

2° Au deuxième alinéa du 2° du 1 du II du 1.3, les mots : « diminué du prélèvement opéré en 2011 en application du A du I de l'article 1648 AB du même code et augmenté du reversement opéré en 2011 en application du B du même I » sont supprimés.

IV. - Les articles 1648 AA et 1648 AB du code général des impôts sont abrogés.

L'amendement n° 550 présenté par M. Carrez et M. Michel Bouvard.

I. - Après l'alinéa 3, insérer l'alinéa suivant :

« I bis . - À compter de 2012, il est calculé, chaque année, le rapport entre le produit total de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de l'exercice précédent et celui de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de 2010. »

II. - En conséquence, procéder à la même insertion après l'alinéa 23.

III. - En conséquence, compléter les alinéas 6 et 26 par les mots :

« , multiplié par le rapport défini au I bis ».

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Michel Bouvard nous a proposé un amendement qui faisait évoluer la péréquation à partir non plus du fonds des DMTO mais du fonds alimenté par la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprise, en se fondant sur la moyenne. En d'autres termes, si un département voit sa CVAE augmenter plus vite que la moyenne de tous les autres départements, la péréquation commence à jouer. Mais la CVAE est également perçue par les régions, à hauteur de 25 %. Cet amendement coordonne donc la péréquation entre les régions et les départements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Éric Besson, ministre. L'option proposée ne paraît pas la plus adaptée en termes de péréquation, et elle peut conduire à avoir un fonds dont le produit serait très marginal, puisque seule la hausse au-delà de la moyenne nationale ferait l'objet de cette péréquation.

Imaginons d'ailleurs que la hausse de la CVAE soit très homogène entre les départements avec une très faible dispersion des hausses autour de la moyenne : même si l'augmentation moyenne est vive, le fonds sera mince. Cela peut sembler protecteur pour les contributeurs, mais c'est aussi courir le risque de très faibles reversements aux départements les plus défavorisés par leur niveau de ressources et de charges.

Nous sommes parfaitement conscients que les simulations qui ont été faites jusqu'à présent sont insuffisantes pour comparer les différentes hypothèses, dont celle que vous venez de faire. Toutefois, le rapport des inspections, comme celui des parlementaires en mission, semble à ce stade la base de travail la plus documentée. Il semble préférable de regarder l'impact de nouvelles propositions courant 2011, quitte, si nécessaire, à améliorer ensuite le dispositif de l'article 62.

Je vous invite donc à retirer votre amendement. À défaut et pour les raisons que je viens d'expliquer, compte tenu également des incertitudes qui pèsent sur les conséquences de cet amendement, j'émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général . Notre premier objectif, qui ne fait pas débat, est que la péréquation fonctionne, qu'il y ait donc du grain à moudre. Mais notre second objectif est qu'il y ait toujours une incitation locale à accueillir des entreprises.

Nous avons donc estimé dans un premier temps que, dès que la CVAE augmentait dans un département ou dans une région, la péréquation devait jouer dès le premier euro, à hauteur de la moitié. Mais avec ce système, un département connaissant une augmentation même inférieure à l'inflation, s'en voyait ponctionner la moitié, ce qui n'est pas très incitatif.

L'an dernier nous avions eu ici même un long débat sur le fait de savoir si la CVAE devait être nationalisée ou territorialisée. Dans le premier cas, elle fonctionnait comme une dotation, du type de la DGF ; dans le second cas, on estimait que, chaque fois qu'une commune, un département ou une région se battait pour accueillir une entreprise, il était normal qu'elle en tire bénéfice en retour.

Marc Laffineur estimait au départ que l'objectif majeur était d'alimenter la péréquation et qu'il fallait donc partir du premier euro. Mais au bout du compte nous avons préféré ne prendre en compte que ce qui dépassait la moyenne. J'étais moi-même partagé, mais il me semble que la position que nous avons adoptée est assez sage. Comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, aucun d'entre nous ne détient la vérité, et il faut attendre les premiers bilans en 2011. Et comme ce fonds, contrairement à celui des DMTO, ne jouera qu'à partir de 2012, attendons d'avoir les bonnes simulations pour procéder à des adaptations.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Je suis sur le fond tout à fait d'accord avec le rapporteur général. Il est important en effet de soutenir le dynamisme des collectivités territoriales. Mais j'en reviens malgré tout au système allemand, car il ne me paraît pas anormal, lorsque le potentiel financier par habitant est supérieur à la moyenne, d'être contributeur pour moitié de la valeur de l'augmentation. En effet, si le calcul ne prend en compte que ce qui excède la moyenne, le fonds sera nul et, dans trente ou quarante ans, nous n'aurons toujours pas commencé à pratiquer la péréquation.

Je sous-amenderais donc volontiers l'amendement du rapporteur général pour préciser que, lorsque le potentiel fiscal par habitant est de 10 % ou 20 % supérieur à la moyenne, le calcul se fait à partir du premier euro d'augmentation.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. J'entends bien ce que dit Marc Laffineur, mais il ne faut pas tuer la territorialisation acquise l'an dernier. Avant le retour de fiscalité, n'oublions pas qu'il y a des investissements à porter, coûteux et risqués, qu'il s'agisse du développement d'entreprises ou de la création de zones d'activité. Et si, sous prétexte qu'un département a un potentiel financier supérieur à la moyenne, on menace de tout lui reprendre...

M. Marc Laffineur. Mais non, juste la moitié de l'augmentation !

M. Charles de Courson. On n'est pas des socialistes !

M. Michel Bouvard. Le retour sur investissement, en matière de développement économique, est toujours très long. Il me paraît donc souhaitable de s'en tenir à la proposition faite par le rapporteur général. C'est une proposition équilibrée, qui permet d'alimenter la péréquation sans tuer le dynamisme que nous avons obtenu grâce à la territorialisation.

Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances.

M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances. Nous sommes arrivés, avec cet amendement, à un équilibre auquel je ne doute pas que la commission des finances se rallierait dans sa majorité, voire à l'unanimité. Pour autant, je suis, à titre personnel très sensible aux arguments développés par Marc Laffineur, qui s'est inspiré de l'exemple allemand. Certes, le système n'est pas le même et la péréquation s'opère après remontée au niveau national d'un certain nombre de ressources, mais souvenons-nous malgré tout que, si avaient prévalu en Allemagne notre fiscalité locale et notre système de péréquation, jamais l'Allemagne de l'est n'aurait rattrapé les territoires de l'ouest.

Le système que propose Marc Laffineur est un système auquel nous finirons sans doute par aboutir, mais dans un premier temps la solution proposée par cet amendement me paraît satisfaisante.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il faut soutenir Marc Laffineur ! Nous avons inscrit dans la Constitution le principe de la péréquation, que nous mettons en oeuvre pour la première fois. Rappelons quand même que, sur les cent milliards de dotation de compensation de l'État, la proportion de péréquation - le rapporteur général ose à peine l'avouer - est inférieure à 10 % ! Le système permettra donc, au bout de dix ans, une montée en charge raisonnable et efficace, et au moins nous appliquerons la Constitution.

(L'amendement n° 550 est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 614 présenté par M. Bartolone, M. Muet, M. Sapin, M. Emmanuelli, Mme Filippetti, M. Eckert, M. Balligand, M. Baert, M. Launay, M. Nayrou, M. Carcenac, M. Bapt, M. Goua, M. Lefait, M. Idiart, M. Claeys, M. Jean-Louis Dumont, M. Bourguignon, M. Hollande, M. Moscovici, M. Lurel, M. Habib, M. Vergnier, M. Lemasle, M. Rodet, Mme Girardin et les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, est ainsi libellé :

I. - À l'alinéa 7, substituer au mot :

« deux »,

le mot :

« trois ».

II. - En conséquence, après l'alinéa 9, insérer l'alinéa suivant :

« c) Les dépenses sociales nettes obligatoires par habitant sont inférieures à 125 % de la moyenne nationale. »

La parole est à M. Dominique Baert.

M. Dominique Baert . Il est défendu.

(L'amendement n° 614, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 726 présenté par M. Carrez, est ainsi libellé :

À l'alinéa 21, substituer aux mots :

« , l'article L. 3335-1 devenant »,

les mots :

« et comprend l'article L. 3335-1 qui devient ».

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. C'est un amendement rédactionnel.

(L'amendement n° 726, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

L'amendement n° 477 est présenté par M. Carrez, rapporteur général au nom de la commission des finances et M. Michel Bouvard.

Et l'amendement n° 592 est présenté par M. Michel Bouvard.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

Compléter l'alinéa 26 par les mots :

« multiplié par le taux de progression moyen de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises perçue par les départements. »

(Les amendements identiques n os 477 et 592 sont retirés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de plusieurs amendements, n os 591, 593, 589, 594, 590 et 601, qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

L'amendement n° 591 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

I. - À l'alinéa 29, substituer par deux fois au mot :

« fiscal »

le mot :

« financier ».

II. - En conséquence, procéder aux mêmes substitutions à l'alinéa 32.

III. - En conséquence, procéder aux mêmes substitutions à l'alinéa 37.

L'amendement n° 593 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 29, insérer l'alinéa suivant :

« c) La différence entre son potentiel financier par mètre carré et le potentiel financier par mètre carré moyen de l'ensemble des départements est positive. »

Amendement n° 589 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi l'alinéa 30 :

« 3° L'assiette du prélèvement est égale à 50 % de l'excédent constaté au 1°. Le prélèvement s'effectue sur cette assiette proportionnellement à l'écart entre l'excédent constaté au 1° de chaque département et la somme des excédents constatés au 1° de l'ensemble des départements. ».

L'amendement n° 594 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

Après la première occurrence du mot :

« potentiel »,

rédiger ainsi la fin de l'alinéa 32 :

« financier par habitant ou le potentiel financier par mètre carré est inférieur au potentiel financier moyen par habitant ou par mètre carré de l'ensemble des départements. »

L'amendement n° 590 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

I. - À l'alinéa 36, après le mot :

« départementale »,

insérer les mots :

« avec doublement des kilomètres pour la voirie de montagne ».

L'amendement n° 601 présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

À l'alinéa 37, substituer par deux fois au mot :

« fiscal »

le mot :

« financier ».

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Compte tenu de l'heure tardive et puisque nous avons adopté l'amendement n° 550, je retire ces amendements, proposés dans le même esprit que celui sur les DMTO, c'est-à-dire avec le souci d'introduire des critères complémentaires s'agissant de la péréquation de la CVAE. Nous évoquerons le sujet une autre fois.

Mme la présidente. Je vous en remercie au nom de l'ensemble de nos collègues.

(Les amendements n os 591, 593, 589, 594, 590 et 601 sont retirés.)

(L'article 62, amendé, est adopté.)