VI. DÉBATS SÉNAT PREMIÈRE LECTURE DU 1ER DÉCEMBRE 2010

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-35 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.

L'amendement n° II-176 est présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° II-35.

M. Jean Desessard. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement tend à supprimer le dispositif prévu par l'article 74.

Ce dispositif se traduit notamment par la suppression de l'exonération de taxe de renouvellement dont bénéficient les réfugiés et les bénéficiaires de la protection subsidiaire, soit l'instauration d'une pénalité dénommée « droit de visa de régularisation », d'un montant de 220 euros.

L'objet affiché de cet article est de rééquilibrer les recettes de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, l'OFII.

Il est vrai que le budget de l'OFII dégage depuis deux ans une perte nette importante. Cette perte est d'ailleurs évaluée pour l'année 2010 à 18,4 millions d'euros.

Toutefois, ce rééquilibrage aurait pu être financé de maintes manières, par exemple en augmentant les taxes dues par les employeurs de travailleurs étrangers. Nous aurions pu également augmenter la subvention pour charges de service public versée par l'État.

Or que prévoit cet article ? Il supprime ou allège les taxes dues par les employeurs et en fait peser de nouvelles sur les épaules des étrangers ! Dans une logique qui ressemble à s'y méprendre à celle du bouclier fiscal, on fait payer les plus pauvres au profit des plus riches !

La solution retenue d'accroissement des tarifs des taxes aurait pu être satisfaisante si elle ne pénalisait pas toujours les mêmes personnes, à savoir les étrangers.

Quel est le véritable objectif du Gouvernement ? D'un côté, il prône l'intégration des étrangers, crée des stages de citoyenneté et des contrats d'accueil ; de l'autre, il refuse d'y consacrer les moyens nécessaires et fait peser l'effort financier sur les réfugiés ou sur les demandeurs de visa, y compris les conjoints de Français.

Monsieur le ministre, il faut se donner les moyens de sa politique. Or le Gouvernement a fait le choix du renoncement.

L'arbitrage proposé est inique, car il vise essentiellement les étrangers en situation irrégulière. En effet, la principale ressource supplémentaire créée par cet article est, comme je l'ai déjà indiqué, un droit de visa de régularisation propre aux étrangers en situation irrégulière d'un montant de 220 euros, ceux-là même à qui l'on reproche d'utiliser l'aide médicale d'État pour faire des cures thermales ou de la chirurgie esthétique !

Que dire de la suppression de l'exonération dont bénéficiaient les réfugiés sur les renouvellements de titres de séjour ? On demande désormais à des personnes en situation de précarité de mettre la main à la poche pour compenser le renoncement de l'État !

Pendant ce temps, la politique de l'immigration choisie bat son plein : on consent un cadeau de plus de 5 millions d'euros aux employeurs d'étrangers !

Parce que nous refusons ces arbitrages budgétaires iniques et choquants, nous vous proposons de supprimer cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° II-176.

M. Richard Yung. Cet amendement est identique à celui que vient de présenter notre collègue Jean Desessard.

Sous prétexte de rééquilibrer les recettes de l'OFII, l'article 74 tend à augmenter le montant des taxes que doivent acquitter les étrangers, les personnes les hébergeant, ainsi que les employeurs embauchant des travailleurs étrangers. Avec cette politique, il est prévu de récupérer plus de 10 millions d'euros.

L'article 74 prévoit également de créer un droit de timbre sur les demandes de naturalisation, de réintégration dans la nationalité française et de déclaration d'acquisition de la nationalité à raison du mariage.

Compte tenu des délais de traitement des dossiers et des réponses qui sont données - cela ne concerne pas le ministère de l'intérieur, il est vrai - par le greffe du tribunal du Château des rentiers, responsable de la délivrance des certificats de nationalité française, cette proposition ne manque pas d'humour !

Nous considérons que ces dispositions ne sont pas acceptables, car elles sont sans commune mesure avec celles qui sont appliquées aux citoyens français sollicitant la délivrance d'une pièce d'identité ou d'un document administratif. Nous pensons qu'il devrait y avoir un parallélisme de forme, au moins du point de vue fiscal.

Ces taxes servent surtout à pénaliser les étrangers, qu'ils soient ou non d'ailleurs en situation régulière.

En outre, la création et l'augmentation de ces taxes sont contradictoires, me semble-t-il, avec les objectifs affichés par le Gouvernement. Elles n'encourageront ni l'immigration professionnelle, ni le développement des échanges universitaires, ni l'intégration des étrangers, bien au contraire.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l'article 74.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Ces amendements identiques visent à supprimer l'article 74. Or, comme je l'ai indiqué dans mon rapport écrit, la commission des finances a jugé que les modifications proposées par le présent article étaient tout à fait justifiées au regard de l'accroissement de l'activité de l'OFII.

En effet, avec le contrat d'accueil et d'intégration, la préparation à l'intégration du migrant familial dans le pays d'origine et le bilan de compétences professionnelles, l'OFII a vu ses missions considérablement élargies au fil des mois et des années. Il faut bien les financer. Or, dans le contexte budgétaire actuel, ce financement ne pouvait se faire par une augmentation des dépenses de l'État.

Enfin, les hausses sont tout de même très ciblées et s'accompagnent de diminutions de tarifs bienvenues, par exemple pour les attestations d'accueil, pour l'emploi de jeunes professionnels et pour l'embauche de salariés étrangers.

Certes, la commission n'a pu examiner ces amendements, mais elle a adopté l'article 74. En conséquence, j'émets un avis défavorable sur les amendements identiques n os II-35 et II-176.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. S'ils étaient adoptés, ces deux amendements aboutiraient à une situation très précise, très concrète et bien connue : la réduction des recettes de l'État. À ce titre, très honnêtement, ils ne sont pas acceptables.

Pour aller plus loin, je rappelle que nous procédons à des ajustements aussi bien à la hausse qu'à la baisse afin de tenir compte des spécificités de chaque titre. Nous n'appliquons pas une politique uniforme de hausse !

Par exemple, l'exonération de taxe de renouvellement pour les réfugiés n'avait pas de justification dix ans après l'obtention du statut. En revanche, l'exonération de taxe de primo-demande, qui était plus justifiée, demeure inchangée.

La mise en place d'un droit de timbre pour les demandes de naturalisation, les demandes de réintégration dans la nationalité française et les déclarations d'acquisition de la nationalité à raison du mariage me paraît tout à fait justifiée.

Le coût des mesures d'intégration à la charge de l'OFII, dont, je le répète, peuvent bénéficier tous les candidats à l'acquisition de la nationalité française, a fortement augmenté depuis la suppression en 2000 des droits de sceau. Je précise d'ailleurs que le tarif reste très raisonnable, puisque le montant de la taxe sur l'acquisition de la nationalité est quatre à dix fois plus élevé en Italie, en Allemagne et au Royaume-Uni qu'en France.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques n os II-35 et II-176.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-177, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

L'article L. 211-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est abrogé.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. L'article 74 prévoit de réduire de 45 euros à 30 euros le montant de la taxe perçue lors de la demande de validation d'une attestation d'accueil. Le produit de cette taxe est versé à l'OFII.

On nous explique que, à l'heure actuelle, le montant de cette taxe est relativement élevé - on ne sait d'ailleurs pas très bien pourquoi - eu égard à la nature de la démarche. Il est en effet surprenant d'imposer une taxe aux personnes déclarant qu'elles vont héberger un migrant !

Depuis l'entrée en vigueur de la loi de 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, les personnes qui se proposent d'accueillir des étrangers désireux de venir en France doivent acquitter une taxe dès le dépôt de la demande de validation de l'attestation d'accueil. Rappelons que cette taxe est due même si la validation est refusée in fine .

Le montant de la taxe était initialement de 15 euros. Il a été relevé à 30 euros dans la loi de finances pour 2007, puis porté à 45 euros en 2008 - ce montant ne cesse de croître, et ce rapidement - afin de financer la création du contrat d'accueil et d'intégration et la mise en place de l'évaluation dans le pays d'origine de la maîtrise de la langue française, l'examen de français que fait passer l'OFII.

Notre amendement vise à supprimer cette taxe. Nous considérons qu'il n'est pas acceptable de faire supporter par les personnes hébergeant des étrangers le coût engendré par la mise en oeuvre de ces dispositifs d'intégration. C'est une sorte de pénalisation. Il n'appartient pas non plus à ces personnes de compenser la réduction de 4 % de la subvention pour charges de service public que l'État verse chaque année à l'OFII.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons de supprimer cette augmentation.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Comme vient de le rappeler M. Yung, cet amendement vise à supprimer la taxe acquittée lors de la demande de validation d'une attestation d'accueil.

Je ne reviendrai pas sur le fait que la commission des finances soutient le dispositif de l'article 74. Je l'ai déjà dit lorsque j'ai donné mon avis sur les précédents amendements. Je me contenterai de relever que le tarif de la taxe qu'il est proposé de supprimer est diminué par le présent article, puisqu'il passe de 45 euros à 30 euros. Ce niveau est raisonnable.

Dans ces conditions, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Le Gouvernement partage l'avis de la commission. Supprimer totalement cette taxe serait particulièrement excessif.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-177.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-178, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. L'alinéa 3 vise à augmenter la taxe de primo-délivrance de titre de séjour. Le montant de cette taxe, fixé par décret, serait compris entre 200 euros et 385 euros, au lieu de 340 euros actuellement.

En quatre ans, cette taxe aura connu une croissance de près de 75 %. Cette dernière se situe dans un contexte d'augmentation constante des taxes pesant sur les étrangers dans un objectif de financement quasi intégral de la politique d'intégration par les étrangers eux-mêmes, c'est-à-dire par ceux qui ont le moins de ressources.

Pour ces raisons, nous vous proposons d'adopter le présent amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. La hausse du taux de la taxe de primo-délivrance de titre de séjour, prévue à l'alinéa 3, est indispensable et justifiée, puisque nous avons atteint le plafond de la fourchette de tarif, qui est de 340 euros.

En conséquence, j'émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Ce n'est pas la taxe de primo-délivrance elle-même qui est en cause, mais le plafond des tarifs possibles qui sont fixés par décret.

Par ailleurs, je vous précise, monsieur Yung, que le tarif plafond qui est proposé, malgré son augmentation, reste en réalité très inférieur au montant des taxes acquittées par les étrangers dans la plupart des pays européens. Si l'on établit une comparaison, nous nous situons non pas au-dessus de nos voisins, mais globalement, pour ne pas dire systématiquement, en-deçà.

Pour les mêmes raisons que la commission, l'avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-178.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-179, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Le présent amendement tend à supprimer l'augmentation de la taxe devant être acquittée par un ressortissant étranger lors du renouvellement de son titre de séjour ou lors de la fourniture d'un duplicata.

Si l'article 74 était adopté en l'état, cette taxe, dont le montant est fixé par décret, pourrait s'élever à 220 euros au lieu de 110 euros, ce qui représente un doublement par rapport au tarif actuel

Pour les raisons que j'ai déjà évoquées, nous considérons que c'est une charge extrêmement lourde et indue imposée à des étrangers dont le niveau de vie est faible.

Nous vous invitons donc à voter cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. L'idée de moduler le tarif de la taxe selon la durée du titre de séjour me paraît, au contraire, très intéressante.

En effet, il paraît logique de ne pas faire payer autant la personne qui renouvelle un titre tous les ans que celle qui ne doit le faire que tous les dix ans.

Par conséquent, à titre personnel, puisque la commission ne s'est pas réunie, je suis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. L'augmentation de marge proposée permettra de moduler le tarif en fonction, notamment, de la durée du titre détenu.

Autrement dit, le titre d'une durée de dix ans donnera lieu à une taxe plus élevée que celui dont la durée est d'un an. Le tarif de ce dernier sera diminué par rapport au tarif actuel.

Pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-179.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-180, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Le présent amendement vise à supprimer la disposition restreignant la réduction actuellement prévue de la taxe acquittée par l'étranger titulaire d'un visa étudiant, lors du renouvellement de son titre de séjour ou lors de la fourniture d'un duplicata, comme c'était le cas dans l'exemple précédent.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. La disposition de l'alinéa 6 que cet amendement tend à supprimer procède, comme pour l'alinéa précédent, de l'idée de moduler le tarif de la taxe en fonction de la durée du titre de séjour.

Il est logique qu'un étudiant étranger séjournant quatre mois sur le territoire français ne paie pas le même tarif que celui qui y reste trois ans ou plus.

En conséquence, j'émets également un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Le Gouvernement est du même avis que la commission. De surcroît, l'amendement n'est pas financé.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-180.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-181, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Le présent amendement vise à supprimer l'exonération de taxe dont bénéficient les réfugiés et les étrangers qui se sont vu accorder le statut de la protection subsidiaire, lorsqu'ils sollicitent le renouvellement de leur titre de séjour ou la fourniture de duplicata.

Le deuxième alinéa de l'article 29 de la convention de Genève de 1951 prévoit, certes, la possibilité d'appliquer aux réfugiés les dispositions des lois et règlements concernant les taxes afférentes à la délivrance de documents administratifs, pièces d'identité comprises, mais ce n'est pas une obligation.

L'alinéa 7 de l'article 74 est contraire aux principes de générosité de notre pays, mis en avant d'ailleurs par le Gouvernement pour promouvoir sa politique d'asile.

Par conséquent, nous proposons la suppression de cet alinéa.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. L'article 74 tend en effet à supprimer l'exonération de la taxe appliquée au renouvellement des titres de séjour délivrés aux réfugiés. Comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer dans mon rapport écrit, cette suppression se justifie par le fait que les réfugiés bénéficient d'une carte de résident valable dix ans.

Par conséquent, au moment du renouvellement de ce titre, ils sont installés en France depuis dix années au cours desquelles ils se sont donc intégrés à la population française, comme l'ensemble des étrangers. Il n'y a donc pas lieu de leur appliquer un régime spécifique.

J'émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-181.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-182, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 8

Après le mot :

par

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

les mots : « 20 euros pour le mineur de moins de quinze ans et de 45 euros pour un mineur de quinze ans et plus ».

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Cette fois-ci, c'est une argumentation un peu différente.

Dans l'exposé des motifs de l'article 74, le Gouvernement justifie l'augmentation du montant de la taxe applicable au titre d'identité républicain et au document de circulation pour étranger mineur par l'alignement de ce montant sur celui qui est applicable au tarif du passeport français pour mineur.

C'est une bonne politique : on aligne la taxe imposée aux étrangers sur celle qui est applicable aux Français.

Cependant, sachant que le droit de timbre pour la délivrance d'un passeport s'élève à 20 euros seulement pour un mineur de moins de quinze ans et à 45 euros pour ceux qui sont âgés de quinze ans et plus, le présent amendement tend à tenir compte de la volonté du Gouvernement en alignant - vous voyez, monsieur le ministre, nous vous aidons ! - le montant de la taxe strictement sur celui du droit de timbre pour la délivrance d'un passeport, en reprenant la modulation du tarif selon l'âge du mineur français.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Pour des raisons déjà évoquées à de multiples reprises, la commission des finances est favorable aux augmentations de tarif qui sont prévues à l'article 74.

Elles sont, en effet, nécessaires au financement des actions utiles d'intégration menées par l'OFII. Il faut donner à ce dernier les moyens de sa politique.

Aussi, je suis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. En premier lieu, tout en comprenant l'idée qui sous-tend cet amendement, il me semble très difficile d'opérer une distinction selon l'âge des mineurs, car il s'agit d'une donnée extrêmement imprécise. On aboutirait certainement à des injustices.

En second lieu, je partage les raisons évoquées par M. le rapporteur spécial. Il ne faut pas chercher à diminuer les moyens de l'OFII qui est un instrument important en matière d'intégration. Les mesures votées ne doivent donc pas entraîner une diminution des crédits de cet organisme.

Pour ces deux raisons, et j'insiste tout particulièrement sur la première, monsieur Yung, j'émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-182.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-183, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 11

Remplacer les mots :

à 220 €

par les mots :

au double du droit qui lui aurait été appliqué normalement

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. En l'état actuel de la législation, tout ressortissant étranger qui souhaite régulariser sa situation au regard du droit d'entrée et de séjour des étrangers doit acquitter une taxe dont le montant est égal au double du droit qui lui aurait été appliqué s'il avait sollicité un visa de court ou long séjour.

L'alinéa 11 de l'article 74 tend à remplacer ce double droit de chancellerie par une pénalité dénommée « droit de visa de régularisation » d'un montant forfaitaire de 220 euros.

Cet alinéa pose cependant un problème dans la mesure où le montant forfaitaire visé est largement supérieur au double du droit actuel. Ainsi, l'augmentation envisagée serait de 83 % pour les visas de courte durée, puisque le montant s'élèverait à 220 euros au lieu de 120 euros.

Le présent amendement tend à maintenir le double droit de chancellerie, conformément à la politique en place jusqu'à présent. Les étrangers qui souhaitent régulariser leur situation continueront ainsi de verser 120 euros, soit deux fois 60 euros, pour un visa de court séjour et 198 euros pour un visa de long séjour, soit deux fois 99 euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Cette taxe de 220 euros se substitue à un dispositif complexe du double droit de chancellerie.

Par ailleurs, il s'applique aux étrangers qui auraient dû demander un visa pour entrer et s'établir régulièrement en France, mais qui ne l'ont pas fait.

Dans ce cas précis, acquitter un droit de 220 euros ne paraît pas excessif, c'est le moins que l'on puisse dire !

En conséquence, je suis défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Le système actuel est devenu illisible, incompréhensible, inéquitable et il fonctionne très mal sur le terrain.

C'est la raison pour laquelle nous proposons un système visant à créer une pénalité simple, générale, forfaitaire et, donc, certainement plus juste, notamment sur le plan pédagogique.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-183.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-184, présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 16

Remplacer les montants :

50 et 300 €

par les montants :

25 et 150 €

II. - En conséquence, alinéas 17 et 18

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

8° Au cinquième alinéa du même article, le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;

9° À la fin du sixième alinéa du même article, les montants : « 50 euros et 300 euros » sont remplacés par les montants : « 25 euros et 150 euros » ;

10° À la première phrase du septième alinéa du même article, le montant : « 50 euros » est remplacé par le montant : « 25 euros ».

III. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Je n'ai décidemment pas de chance ce soir avec mes amendements !

Le présent amendement, relatif aux alinéas 15 à 18, vise à réduire de moitié le montant des taxes pesant sur les employeurs qui embauchent un travailleur étranger.

Nous pensons, en effet, que les employeurs déclarant officiellement employer des travailleurs étrangers sont, en quelque sorte, vertueux et qu'au contraire, il faudrait pénaliser financièrement ceux qui ne le font pas.

L'augmentation considérable de ces taxes constitue un frein à l'embauche des travailleurs étrangers.

M. Jean-Louis Carrère. C'est un frein à la vertu !

M. Richard Yung. Cela conduirait à décourager les employeurs à cet égard et nous ne pensons pas que ce soit une bonne chose.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Comme je l'ai dit à de nombreuses reprises à l'occasion des différents amendements de M. Yung, l'article 74 va déjà dans le sens d'une réduction des taxes dues par les employeurs de salariés étrangers. Une telle démarche est conforme à la volonté de renforcer l'immigration économique et il convient de s'en satisfaire.

Il faut se garder de réduire excessivement ces taxes alors même que l'OFII a un besoin croissant de ressources financières, ainsi que je l'ai rappelé.

J'émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. L'amendement coûterait près de 15 millions d'euros à l'OFII.

Pour toutes les raisons que j'ai déjà évoquées tout à l'heure, je ne peux émettre qu'un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-184.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° II-224, présenté par M. Bernard-Reymond, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Alinéas 19 et 20

Rédiger ainsi ces alinéas :

III. - 1. À la fin de l'avant-dernière phrase du deuxième alinéa de l'article L. 311-9 du même code, les mots : « ou par l'établissement public appelé à lui succéder », et à la fin du premier alinéa de l'article L. 311-15 dudit code, les mots : « ou de l'établissement public appelé à lui succéder » sont supprimés.

2. À la première phrase du premier alinéa des A et B et au C de l'article L. 311-13 du même code, les mots : « l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations ou de l'établissement public appelé à lui succéder » et au D du même article, les mots : « l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations ou à l'établissement public appelé à lui succéder » sont remplacés par les mots : « l'Office français de l'immigration et de l'intégration ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui devrait faire l'unanimité au sein de notre Haute Assemblée.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. Avis favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° II-224.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-36 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.

L'amendement n° II-185 est présenté par M. Yung, Mmes Cerisier-ben Guiga, Lepage, Blondin et Printz, M. Sueur, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Raoul, Frimat, Marc, Rebsamen et Lagauche, Mme Tasca, MM. Assouline, Mermaz et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 21 à 23

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° II-36.

M. Jean Desessard. Par cet amendement, nous nous opposons à la mise en place d'un droit de timbre sur la demande de naturalisation, la demande de réintégration et la déclaration d'acquisition de nationalité par mariage.

Nous souhaitons revenir sur l'établissement d'un droit de timbre pour les demandes de naturalisation prévues par les alinéas 21 à 23 de cet article.

L'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances nous rappelle que la naturalisation coûte 214 euros en Italie, 255 euros en Allemagne et 882 euros au Royaume-Uni.

Mme Nathalie Goulet. Et aux États-Unis ?

M. Jean Desessard. Soit, ma chère collègue, mais on a oublié de dire que la naturalisation ne coûte rien dans nombre d'autres États européens.

L'argument comparatif est d'ailleurs très audacieux, voire dangereux, de la part du Gouvernement, quand on sait que ces taxes ont avant tout un effet dissuasif. Si leur montant est élevé, ce n'est pas pour éviter les renouvellements abusifs de demandes ; c'est surtout pour éviter toute demande. L'objectif du Gouvernement est-il de stopper net des naturalisations en fixant un prix rédhibitoire pour le dépôt d'un dossier de naturalisation ?

Nous refusons que la naturalisation soit monnayée. Elle est un acte fort, un acte symbolique qui coûte à l'histoire et au parcours des étrangers. Il ne doit pas s'agir d'un guichet, et l'étranger ne doit pas être le payeur !

La naturalisation doit être envisagée comme un cadeau que la France offre à ses nouveaux ressortissants, un cadeau d'accueil (Mme Nathalie Goulet et Catherine Procaccia s'exclament) , dans la pure tradition française, que votre Gouvernement tente de mettre à mal.

Nous refusons que la citoyenneté française ait un coût pécuniaire. Elle ne se monnaye pas. C'est pourquoi nous vous proposons de supprimer les alinéas 21 à 23 de cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° II-185.

M. Richard Yung. Cet amendement est identique à l'amendement n° II-36, et je n'aurai pas la même éloquence que M. Desessard pour le présenter.

M. Jean Desessard. Merci, mon cher collègue !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial. Au regard des tarifs qui sont appliqués par nos voisins européens - ils viennent d'être rappelés à l'instant par M. Desessard -, la création d'un droit de timbre pour les demandes de naturalisation à hauteur de 55 euros me paraît très raisonnable.

En outre, une telle création est nécessaire pour assumer financièrement la montée en puissance des missions de l'OFII, que nous avons également eu l'occasion d'évoquer voilà quelques instants, en faveur de l'intégration des étrangers.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les deux amendements n os II-36 et II-185.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Brice Hortefeux, ministre. L'adoption de ces amendements identiques aboutirait, comme les amendements précédents, à une diminution des recettes de l'État. À ce titre, ils ne sont pas acceptables.

Par ailleurs, et je rejoins en cela M. le rapporteur spécial, j'estime que la création d'un tel droit de timbre se justifie et que le tarif est des plus raisonnables. Je vous ai donné des éléments de comparaison voilà quelques instants.

Je vous rappelle que la carte nationale d'identité est délivrée gratuitement en France et que le coût du passeport n'est pas spécifique aux naturalisés.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Ces deux amendements identiques sont très intéressants, mais je souhaite préciser un élément.

Aux États-Unis, il faut un avocat pour une simple démarche d'obtention d'une carte de séjour ou d'un permis de travail, de même que pour une procédure de mariage ! Cela coûte 5 000 dollars. Et une personne en situation irrégulière qui se fait prendre n'a aucune possibilité de régularisation !

Certes, la France n'est pas les États-Unis, mais les tarifs prévus dans le présent projet de loi de finances me semblent tout à fait raisonnables et accessibles. (Mme Catherine Procaccia acquiesce.)

C'est la raison pour laquelle je ne voterai pas ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques n os II-36 et II-185.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 74, modifié.

(L'article 74 est adopté.)