ARTICLE 86 BIS : PANIER DE SOINS DES BÉNÉFICIAIRES DE L'AME

I. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 2 NOVEMBRE 2010

M. le président. L'amendement n° 9 a déjà été défendu.

Il est ainsi rédigé :

APRÈS L'ARTICLE 86, insérer l'article suivant :

Santé

Les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« 1° Les frais définis aux 1° et 2° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale. Toutefois, ces frais peuvent être exclus de la prise en charge, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État, et à l'exclusion des mineurs, pour les actes, les produits et les prestations dont le service médical rendu n'a pas été qualifié de moyen ou d'important ou lorsqu'ils ne sont pas destinés directement au traitement ou à la prévention d'une maladie ;

« 2° Les frais définis aux 4° et 6° de l'article L. 321-1 du même code ;

« 3° Les frais définis à l'article L. 331-2 du même code ;

« 4° Le forfait journalier institué par l'article L. 174-4 du même code pour les mineurs et, pour les autres bénéficiaires, dans les conditions fixées au huitième alinéa du présent article. »

La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. J'ai dit que j'étais favorable à l'amendement car je ne suis pas opposée à une refonte du mode de facturation des établissements de santé, mais sous réserve qu'elle soit abordée de façon plus large que dans l'amendement. C'est l'objet de la mission conjointe que François Baroin et moi-même avons confié à l'IGAS et à l'IGF, et dont les conclusions vont nous être remises à la fin du mois de novembre. C'est la raison pour laquelle je demande la suppression du dernier alinéa : « La prise en charge des soins au titre des 1°, 2° et 3° ci-dessus est effectuée par application des tarifs servant de base au calcul des prestations de l'assurance maladie. »

M. le président. Monsieur Tian, êtes-vous d'accord pour rectifier ainsi votre amendement ?

M. Dominique Tian. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Mme la ministre a fait une longue intervention, mais sans donner aucun élément tangible, sérieux et concret qui puisse étayer les raisonnements et les affirmations de nos collègues de la majorité, notamment de M. Goasguen et de M. Tian. Quand ils disent que le coût de l'AME aurait explosé, évoquant une croissance exponentielle, une multiplication par dix des dépenses, ce sont des affirmations totalement erronées. Dans les chiffres que vous nous avez fournis, madame la ministre, il apparaît que le nombre de personnes couvertes par l'AME était de 154 000 en 2002, et de 215 000 en 2009 ; c'est une augmentation de 30 %, certes, mais pas une multiplication par dix, loin de là !

Quant à ce que vous et les collègues de la majorité appelez « la fraude », il faudrait clarifier ce point. Ce matin, M. Goasguen parlait de 50 % de fraudes, alors que de tels chiffres sont totalement inventés !

M. Claude Goasguen. Ce sont les conclusions du travail de la RGPP !

M. Jean Mallot. Madame la ministre, c'est à vous de nous donner les chiffres de ce que pourrait recouvrir la fraude, qui est évidemment, dans ce domaine comme dans d'autres, parfaitement marginale.

Pour terminer, je note que si l'amendement n° 9 vise à restreindre le panier de soins, on voit bien que vous vous donnez le beau rôle puisque les soins qui en sont exclus sont marginaux. Vous faites de l'affichage pour aller chasser sur les terres de Le Pen (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP) , en laissant entendre que ces étrangers viendraient en France en situation irrégulière pour bénéficier de soins, notamment de cures thermales. On voit tout de suite la scène : cela parle aux gens. Mais c'est totalement fantaisiste.

M. le président. Sur le vote de l'amendement n° 9 rectifié, je suis saisi par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

M. Jean-Pierre Soisson. Monsieur le président, trois observations.

La première, c'est que j'accepte mal la caricature à laquelle se livrent notamment Jean Mallot et ses collègues socialistes au cours de ce débat ; c'est inadmissible ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Luc Préel. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Soisson. Il n'est pas question de supprimer l'aide médicale d'État. Il s'agit seulement de « l'encadrer », selon l'expression de Jean Leonetti. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Mallot. Ce que vous dites est complètement erroné, monsieur Soisson !

M. Jean-Pierre Soisson. Deuxième observation : lorsque nous avons eu entre nous, députés UMP, une discussion sur ce sujet, il nous est apparu qu'il n'était pas possible que les étrangers en situation irrégulière soient mieux traités que les étrangers en situation régulière ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Jacqueline Fraysse, rapporteure pour avis et M. Christophe Sirugue. Ils ne le sont pas !

M. Jean-Pierre Soisson. Ce n'est pas possible d'admettre cela car on ouvrirait toutes grandes les portes du pays !

Troisièmement, il est clair que sur les problèmes de santé, l'espace à prendre en considération est l'Europe et non plus l'espace national.

M. Claude Goasguen. Très bien !

M. Jean-Pierre Soisson. Nous devons donc être attentifs à chercher des solutions qui seraient communes à l'ensemble des pays de l'Union européenne. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Le rapporteur spécial.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial . Cet amendement n'a, lui non plus, pas été soumis à la commission des finances, mais je souhaite intervenir sur le plan financier. Monsieur Goasguen, vous évoquez le chiffre de 50 % de fraudes, tiré d'un document que personne ici ne connaît (Exclamations sur divers bancs) ; ni la ministre, ni les fonctionnaires des commissions ne connaissent votre chiffre.

M. Claude Goasguen. C'est la RGPP !

M. Jean Mallot. Monsieur Goasguen, c'est vous le fraudeur !

M. Claude Goasguen. Je demande à répondre, monsieur le président !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial . En revanche, j'aurais aimé que M. Leonetti, président de la fédération hospitalière de France, donne les siens.

Les dépenses d'AME, pour 70 % d'entre elles, correspondent à des frais d'hospitalisation. Peut-il y avoir de la fraude sur de telles dépenses ? Je pose la question à M. le président de la fédération hospitalière de France. Plus de 50 % des dépenses d'AME sont concentrés sur moins de 10 % des bénéficiaires, et 25 % relèvent de frais d'obstétrique, en majorité en Guyane, où beaucoup d'étrangères viennent accoucher. Dès lors comment peut-on avancer un tel chiffre concernant la fraude alors que les dépenses sont si concentrées sur l'hospitalisation et sur une faible proportion d'ayants droit ?

En outre, je rappelle que le rapport d'une mission IGF-IGAS est attendue pour la fin de ce mois. M. Pinte disait, à juste titre, qu'il ne faudrait pas voter des dispositions susceptibles d'entrer en contradiction avec les conclusions de cette mission conjointe.

M. Jean Mallot. Eh oui !

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial . Enfin, je renvoie à la page 49 de mon rapport, où j'indique les recommandations qu'avait formulées, en 2007, la précédente mission IGF-IGAS. Mesdames, messieurs de la majorité, vous les avez suivies.

M. le président. Il faut conclure.

M. Gérard Bapt, rapporteur spécial . C'est un point important, monsieur le président. Cette mission, disais-je, avait proposé un renforcement du contrôle des droits avec la mise en place de procédures nationales d'admission à l'AME, expérimentée par le biais de la création d'un titre d'admission sécurisé, dont le modèle a été définitivement fixé par un arrêté du 10 juillet 2009. Ce modèle commence à être mis en place depuis le deuxième trimestre 2010. Voilà la première proposition, et vous l'avez suivie. La deuxième proposition était l'extension du contrôle médical aux bénéficiaires de l'AME ; et vous l'avez également suivie. La troisième, c'était que la délivrance des médicaments soit désormais subordonnée à l'acceptation des génériques lorsqu'une telle substitution était possible ; et vous l'avez appliquée.

Il y a donc des recommandations qui ont été suivies, qui commencent à être mises en oeuvre, et sans attendre les conclusions de la nouvelle mission, vous voulez tout bouleverser. Il s'agit là d'une précipitation suspecte.

M. Claude Goasguen. Rappel au règlement !

M. le président. Je vous donnerai la parole après la mise aux voix, monsieur Goasguen.

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 9 rectifié.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 118

Nombre de suffrages exprimés 116

Majorité absolue 59

Pour l'adoption 87

Contre 29

(L'amendement n° 9 rectifié est adopté.)

Voir les débats sur l'ensemble des crédits de la mission « Santé »

- mardi 2 novembre 2010 ;

- mardi 2 novembre 2010 (suite) .