ARTICLE 92 : ALIGNEMENT DU DISPOSITIF D'INTÉRESSEMENT DE L'ALLOCATION DE SOLIDARITÉ SPÉCIFIQUE (ASS) SUR CELUI DU REVENU DE SOLIDARITÉ ACTIVE (RSA)

I. TEXTE DU PROJET DE LOI

I. - Le code du travail est ainsi modifié :

1° Les articles L. 5133-1 à L. 5133-7 sont abrogés ;

2° Le 1° de l'article L. 5423-24 est abrogé.

II. - Le présent article entre en vigueur à compter du 1 er janvier 2011.

II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 TOME III (2010-2011) ANNEXE 44

Observations et décision de la Commission :

Le présent article supprime le dispositif spécifique d'intéressement de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) afin de lui substituer celui du revenu de solidarité active (RSA) devenu le régime de droit commun.

I.- L'INTÉRESSEMENT EST UNE FORME DÉJÀ ANCIENNE D'INCITATION AU RETOUR À L'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE

L'intéressement à la reprise d'activité ouvre la possibilité de cumuler, de façon temporaire et dans la limite d'un plafond, des revenus du travail et une allocation sociale. Libre d'emploi, cette prime a pour vocation de permettre aux bénéficiaires de minima sociaux de faire face aux frais pouvant survenir lors de la reprise d'une activité professionnelle (habillement, transport, frais de garde des enfants...).

Ce type de mécanisme avait été prévu dès la création du revenu minimum d'insertion (RMI) en 1988. Dans le même esprit, la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions avait institué un dispositif d'intéressement, inspiré de celui applicable aux bénéficiaires du RMI, au profit des bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) et de l'allocation de parent isolé (API).

Afin de favoriser davantage cette insertion professionnelle, le Gouvernement a organisé à partir de 2005 la pérennisation de la prime de retour à l'emploi. Dans un premier temps, le décret n° 2005-1054 du 29 août 2005 a créé une prime exceptionnelle de retour à l'emploi, d'un montant de 1 000 euros, en faveur des bénéficiaires du RMI, de l'ASS, de l'API et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), chômeurs de longue durée qui reprennent une activité professionnelle. Il s'agissait, alors, d'une prime temporaire et exceptionnelle, valable jusqu'au 31 décembre 2006.

L'article 1 er de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux a donné par la suite une base législative à la prime de retour à l'emploi, tout en modifiant légèrement son dispositif (suppression de la condition de l'ancienneté de l'inscription à l'ANPE, « recentrage » de la prime sur les bénéficiaires des minima sociaux proprement dits).

La prime de retour à l'emploi était versée par l'organisme chargé du versement de l'allocation sociale correspondante. Cette prime est financée :

- pour les bénéficiaires de l'ASS : par le Fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi ;

- pour les bénéficiaires du RMI et de l'API : par l'État.

II.- LE TRANSFERT DE COMPÉTENCES AINSI ENVISAGÉ DOIT PERMETTRE, À UN MEILLEUR COÛT, D'OFFRIR UN INTERLOCUTEUR UNIQUE AUX TRAVAILLEURS HANDICAPÉS COMME À LEURS EMPLOYEURS

Le dispositif actuel de prime de retour à l'emploi suscite plusieurs difficultés. D'une part, les bénéficiaires du RSA ne sont pas éligibles à la prime de retour à l'emploi puisque l'accès à celle-ci, à laquelle avaient droit les bénéficiaires du RMI et de l'API, a été supprimé par la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

L'ACCÈS DES BÉNÉFICIAIRES DES MINIMA SOCIAUX À L'INTÉRESSEMENT

(en %)

API
(2004)

API
(2007)

RMI
(12/2003)

RMI
(12/2006)

ASS
(12/2003)

ASS
(2007)

% d'allocataires en intéressement

5,4

10,2

11,9

13,5

13,3

20,7

Sources : rapports annuels de performances 2006 et 2007 des missions « Travail et emploi » et « Solidarité et intégration

Par ailleurs, l'efficacité de la prime de retour à l'emploi paraît limitée puisqu'elle présente un faible effet incitatif pour les bénéficiaires de l'ASS, comme l'atteste le taux de retour à l'emploi (1,9 % en 2008), qui n'est pas supérieur à celui constaté pour les bénéficiaires du RMI et de l'API avant la mise en place du RSA.

La Rapporteure rappelle en outre que, en l'état actuel du droit, l'allocataire de l'ASS peut déjà prétendre, en cas de reprise d'activité, au bénéfice du mécanisme d'intéressement du RSA, s'il lui est plus favorable que celui de l'ASS. Dans ces conditions, la suppression de ce dispositif d'intéressement paraît opportune.

C'est pourquoi les alinéas 1 et 2 (1° du I) du présent article abrogent les articles L. 5133-1 à L. 5133-7 du code du travail afin de mettre un terme à la prime de retour à l'emploi. L'alinéa 3 (2° du I) supprime, par coordination, l'article L. 5423-24 du même code qui réglait les modalités de financement de cette prime. En complément, l'alinéa 4 (II) repousse, par souci de sécurité juridique, au 1 er janvier 2011 l'entrée en vigueur du présent article.

La Rapporteure souligne enfin que la prime pour l'emploi est gérée par le fonds de solidarité, qui est financé par la contribution exceptionnelle de solidarité ainsi que par un concours de l'État destiné à assurer l'équilibre du fonds en recettes et en dépenses.

Par conséquent, la suppression de la prime pour l'emploi se traduirait par une économie pour l'État, qui est évaluée à 48 millions d'euros dès 2011.

*

* *

M. le Président Jérôme Cahuzac. Je suis saisi de l'amendement de suppression n° II-CF-146 du groupe SRC.

M. Henri Nayrou. L'article 92 procède à l'alignement de la prime de retour à l'emploi des bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique sur les modalités du revenu de solidarité active.

Suivant l'avis de la Rapporteure spéciale, la Commission rejette l'amendement n° II-CF-146, puis elle adopte l'article 92 sans modification .