III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 16 NOVEMBRE 2010

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 320, tendant à supprimer l'article 96.

La parole est à Mme Monique Iborra.

Mme Monique Iborra. La loi de 2009 relative à la formation professionnelle est assez pauvre : on peine à identifier les changements qu'elle a induits. En revanche, elle a créé le Fonds de sécurisation des parcours professionnels, qui est un élément positif. Ce fonds est alimenté à la fois par l'État et les partenaires sociaux. Or, l'État a décidé, de manière unilatérale, sans en discuter avec les partenaires sociaux, de ponctionner - c'est l'objet de l'article 96 - 300 millions d'euros sur ce fonds. Plus on parle du dialogue social, moins on le respecte et plus on parle du paritarisme, moins on comprend ce que l'État en attend !

Un certain nombre d'actions, qui devraient être financées par l'État, le seront ainsi par le Fonds de sécurisation des parcours professionnels. Il s'agit d'un véritable racket, qui n'est du reste même pas légal et qui pourrait faire l'objet d'un recours des partenaires sociaux. Par respect pour ces derniers et parce que les actions dont il s'agit relèvent de la compétence de l'État, nous demandons la suppression de l'article 96.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur spécial . La commission a rejeté cet amendement, mais je souhaiterais insister sur certains aspects de cette question. Tout d'abord, un amendement sénatorial à la loi de 2009 avait prévu que les excédents du fonds seraient mis à la disposition de celui-ci l'année suivante. Certes, ce qu'une loi a fait, une autre loi peut le défaire, mais c'est tout de même un peu curieux. Ensuite, monsieur le ministre, ce type de dispositif est un fusil à un coup. Vous prévoyez d'affecter 124 millions à Pôle Emploi, mais vous ne pourrez siphonner le fonds qu'une fois : l'année prochaine, il vous faudra trouver à nouveau 124 millions, sauf à réduire une fois de plus les moyens mis à disposition de Pôle Emploi.

Néanmoins, je dois dire que la commission a rejeté cet amendement de suppression de l'article 96.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

M. Jean-Patrick Gille. Il s'agit d'un sujet très sérieux. Il se trouve qu'actuellement, avec mon collègue Cherpion, nous rédigeons un rapport sur l'application de la loi sur la formation professionnelle, qui a créé ce fonds paritaire - qui ne l'est plus tellement puisque l'État pioche dedans. La loi étant issue d'un accord interprofessionnel, nous avons rencontré les partenaires sociaux, qui sont tous fort en colère contre ce hold-up du Gouvernement.

Le rapporteur a rappelé que le sénateur Carle avait proposé un amendement prévoyant le report des excédents du fonds sur l'année suivante. Remettre en cause cette avancée qui avait accompagné le passage du FUP au FPSPP, sans même en aviser les partenaires sociaux, constitue une déloyauté, une trahison à leur égard.

Au-delà, la ponction effectuée sur le fonds va le mettre en difficulté, puisqu'il vient à peine de démarrer et n'a donc pas d'excédents en réserve. Le fonds, alimenté par 13 % des contributions perçues auprès des entreprises par les OPCA, a engagé toute une série d'actions. Par mesure de rétorsion, les partenaires sociaux, fort mécontents, ont fait savoir que le prélèvement ne serait que de 10 % l'année prochaine.

Il ne s'agit donc pas seulement d'un geste déloyal accompli à l'égard de la démocratie sociale, mais également de la mise en péril d'un fonds qui vient à peine d'être créé. Cette manière de procéder est conforme à ce que nous avons dénoncé tout au long de ce débat : comme nous l'avons vu tout à l'heure avec le CTP, le Gouvernement s'apprête à faire les poches des partenaires sociaux. C'est d'autant plus scandaleux qu'à l'origine, l'État ne devait pas ponctionner ce fonds, mais au contraire l'alimenter !

(L'amendement n° 320, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements rédactionnels, n os 398, 399 et 400, présentés par M. Eckert.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Favorable.

(Les amendements n os 398, 399 et 400, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L'article 96, amendé, est adopté.)

Voir les débats sur l'ensemble de la mission « Travail et emploi » :

- 15 novembre 2010 ;

- 16 novembre 2010 ;

- 16 novembre 2010 (suite) .