III. DÉBATS ASSEMBLÉE NATIONALE DU 16 NOVEMBRE 2010

Mme la présidente. Je suis saisie d'un amendement n° 321.

La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. L'amendement n° 321 vise à supprimer l'article 97 du projet de loi de finances pour 2011, qui a pour objet de programmer de nouveaux transferts de charges de l'État - 60 millions d'euros sur deux ans - vers l'association nationale qui soutient financièrement l'insertion professionnelle des personnes handicapées, l'AGEFIPH. Or, le taux de chômage des travailleurs handicapés atteint près de 20 %, soit plus du double du taux de chômage au plan national.

Comme nous l'avons dit en commission, cet article est un nouveau coup dur porté à l'une des avancées majeures de ces dernières années. Je veux à nouveau attirer l'attention de nos collègues et du Gouvernement sur la gravité de cette mesure. Le nouveau prélèvement va s'ajouter aux 50 millions d'euros déjà ponctionnés en 2008, là encore sans aucune concertation avec le conseil d'administration de l'AGEFIPH, qui, aujourd'hui, nous alerte sur la situation.

Cette nouvelle mesure confirme le désengagement de l'État des politiques d'emploi menées en faveur des personnes handicapées. Alors que nous inaugurons aujourd'hui la semaine pour l'emploi des personnes handicapées - une action loin d'être superflue lorsqu'on connaît la situation dans notre pays, il n'est qu'à parcourir les articles parus ces derniers jours dans la presse pour s'en convaincre -, nous nous apprêtons à adresser, si nous adoptons cet article, un bien mauvais signal à l'intention des personnes bénéficiant de ce fonds.

Je rappelle qu'il y a en France près de 95 000 demandeurs d'emploi handicapés ayant suivi une formation, dont 50 000 avec l'AGEFIPH. Il est extrêmement important de ne pas déposséder ce fonds qui va, de surcroît, se voir confier des charges supplémentaires.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Chantal Brunel, rapporteure spéciale. La commission des finances a émis un avis défavorable à cet amendement. Si nous sommes tous attachés à la formation des personnes handicapées, je veux tout de même souligner que l'AGEFIPH dispose d'importantes ressources provenant des entreprises et qu'elle pourra donc supporter ce prélèvement de 60 millions d'euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Je suis étonnée, monsieur le ministre et madame la rapporteure, que vous n'entendiez pas les arguments que j'ai exposés. S'il a fallu attendre que les choses se mettent en place, en 2009, grâce aux fonds de l'AGEFIPH, 37 % des demandeurs d'emploi handicapés ont pu suivre une formation, contre 19 % en 2005. Aujourd'hui, alors que l'AGEFIPH a fait ses preuves et fonctionne à sa vitesse de croisière, nous allons lui porter un coup qui ne lui permettra plus d'assurer dans de bonnes conditions, comme elle l'a fait jusqu'à présent, la formation et l'accompagnement des personnes handicapées.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

M. Jean-Patrick Gille. Alors que notre débat touche à sa fin, je veux souligner la malignité du Gouvernement, qui s'emploie habilement à faire basculer les financements sur les partenaires sociaux. Durant le quart d'heure qui vient de s'écouler, une partie de l'ASS a basculé vers l'UNEDIC - certes, il ne s'agit, pour le moment, que de la prime, mais la renégociation de la convention sera certainement l'occasion d'aller beaucoup plus loin - ; de même, le CTP a basculé vers l'UNEDIC, et l'on ponctionne 300 millions d'euros sur l'autre fonds paritaire qui vient à peine d'être créé.

En ce qui concerne l'article 97, c'est encore plus subtil : si vous relisez attentivement l'alinéa 11 de cet article, vous constaterez que l'État procède à une subrogation. Partant du principe qu'il a délégué, par contractualisation, le financement des travailleurs handicapés à l'AFPA, il propose tout simplement de remplacer, dans le contrat, l'État par l'AGEFIPH - qui, dès lors, se voit transférer une charge de 70 millions d'euros ! Cela illustre bien la méthode appliquée par le Gouvernement depuis le début des débats relatifs aux crédits du travail et de l'emploi : une baisse des crédits de l'État assortie d'une série de transferts de financements, mis à la charge des partenaires sociaux.

(L'amendement n° 321, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements rédactionnels, n os 424 et 421, présentés par Mme Brunel.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Favorable.

(Les amendements n os 424 et 421, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L'article 97, amendé, est adopté.)

Voir les débats sur l'ensemble de la mission « Travail et emploi » :

- 15 novembre 2010 ;

- 16 novembre 2010 ;

- 16 novembre 2010 (suite) .