M. Yvon COLLIN et Mme Fabienne KELLER

II. DES CRÉDITS ET ACTIONS EN BAISSE EN 2012

A. UN NET RECUL (- 6,6 %) DES CRÉDITS EN 2012 (28 MILLIONS D'EUROS EN AE ET CP)

Les crédits du programme 301 « Développement solidaire et migrations » sont inscrits dans le présent PLF à hauteur de 28 millions d'euros en AE et CP , en baisse de 6,6 % par rapport à la LFI pour 2011.

Ces crédits sont exclusivement consacrés à des dépenses d'intervention (titre 6). L'action n° 3 « Autres actions bilatérales de développement solidaire » en concentre la majeure part (91,1 % des AE et des CP).

Crédits du programme « Développement solidaire et migrations »

(en millions d'euros)

Actions

AE

CP

Evolution des CP (2011/2012)

Part des CP (PLF 2012)

LFI 2011

PLF 2012

LFI 2011

PLF 2012

1 « Aides multilatérales de développement solidaire »

0

0

2,0

0

- 100 %

0 %

2 « Aides à la réinstallation des migrants dans leur pays d'origine »

2,5

2,5

2,5

2,5

0 %

8,9 %

3 « Autres actions bilatérales de développement solidaire »

27,5

25,5

25,5

25,5

0 %

91,1 %

Total

30,0

28,0

30,0

28,0

- 6,7 %

100,0 %

Source : PAP de la mission « Aide publique au développement » annexé au PLF pour 2012

Il n'est pas escompté de fonds de concours en faveur du programme, pour 2012.

La prévision du solde des engagements non couverts par des CP s'élève à 23,0 millions d'euros pour la fin 2012. Les CP mobilisés pour couvrir ces engagements seraient de 11,7 millions d'euros en 2013 et de 5,6 millions en 2013, de sorte que le montant maximal de CP encore nécessaires après 2014 sur des engagements non couverts au 31 décembre 2012 est estimé à 5,7 millions d'euros, ce qui traduit des délais dans la mise en oeuvre des actions du programme, et donc la consommation des crédits .

B. LES TROIS ACTIONS DU PROGRAMME

1. Les « aides multilatérales de développement solidaire » (pas de dotations en 2012)

L'action n° 1 « Aides multilatérales de développement solidaire » est conduite par l'intermédiaire d'un fonds fiduciaire mis en oeuvre par le ministère chargé de l'immigration, en association avec la direction générale du Trésor, et la Banque africaine de développement (BAfD), qui le gère selon ses procédures. Ce fonds prend la forme d'un accord « multi-donateurs » de dons à la BAfD et au Fonds africain de développement pour l'initiative « Migration et développement ».

Le plan d'investissement stratégique retenu porte sur les objectifs suivants : l' amélioration des connaissances disponibles et la mise à niveau des opérateurs intervenant dans le champ des transferts de fonds (mobilisant au maximum 10 % des ressources du fonds) ; l'appui aux réformes des cadres réglementaires nécessaires à l'amélioration des transferts (au maximum 15 %) ; le développement de nouveaux produits financiers (au minimum 25 %) ; l'appui à l' investissement productif (au minimum 15 %) et l'appui au développement local (au minimum 15 %) dans les pays d'origine des migrants.

Le fonds est ouvert à tous les contributeurs qui souhaiteraient soutenir cette initiative. Ses deux contributeurs actuels sont le Fonds international pour le développement de l'agriculture (FIDA), à hauteur de 200 000 dollars , et la France , qui s'est engagée pour 6 millions d'euros sur trois ans : conformément au cadre d'entente conclu avec la BAfD en novembre 2008, 0,5 million d'euros ont été payés sur le budget 2008, un versement de 2,6 millions a été effectué en 2009 ; 2,1 millions d'euros de crédits de paiement ont été versés en décembre 2010, et les restes à payer (0,8 million d'euros) devraient être soldés d'ici le 31 décembre 2011.

S'il y a lieu de se féliciter que la première opération soit en voie d'être conduite à terme, la non-dotation de cette action dans le cadre de la programmation triennale 2011-2013 traduit un manque d'ambition de la politique française de développement solidaire .

Vos rapporteurs spéciaux attendent du Gouvernement des justifications, au vu du bilan de l'action menée avec le FIDA, quant au choix de renoncer à ce dispositif dans le cadre de la maîtrise des finances publiques.

2. Les « aides à la réinstallation des migrants dans leur pays d'origine » (2,5 millions d'euros en AE et CP)

L'action n° 2 « Aides à la réinstallation de migrants dans leur pays d'origine » est conduite par l' Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), opérateur créé en 2009 et qui a succédé à l'ANAEM (Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations). Elle vise à soutenir la réalisation de projets économiques portés par des migrants désirant retourner vivre dans leur pays d'origine après un séjour en France , en renforçant les autres aides existantes (aide au retour volontaire et aide humanitaire).

L'OFII mobilise des opérateurs , en France comme à l'étranger, qui, en apportant leur expertise (étude, suivi et formation) pour garantir la réussite des microprojets, amplifient son accompagnement des migrants candidats à la réinstallation dans les pays d'origine. L'intervention de l'Office lui-même couvre les dépenses d' « aide au projet » individuel. Cette aide vise à soutenir le migrant, de retour dans son pays d'origine après un séjour en France, en l'accompagnant dans la création d'activités économiques génératrices de revenus, sous la forme d'appui à la conception et au suivi de projets ou d'aide financière.

Sont éligibles à ces aides les migrants, porteurs d'un projet de réinstallation, ayant bénéficié d'un dispositif d'aide au retour géré par l'OFII et les migrants, en situation régulière ou irrégulière, porteurs d'un projet de réinstallation, revenus par leurs propres moyens depuis moins de 6 mois, après un séjour d'au moins 2 ans en France. Les aides incluent :

- une aide d'un opérateur technique pour le montage, la réalisation et le suivi d'un projet économique, financé à hauteur d'un coût moyen de 1 200 euros ;

- une aide financière au démarrage du projet, à hauteur de 7 000 euros au maximum en principe . Toutefois, depuis avril 2010, ce montant peut être porté jusqu'à 20 000 euros pour les ressortissants des pays signataires d'un accord de gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire, porteurs d'un projet créateur d'au moins cinq emplois et apportant un financement, sous la forme d'un apport personnel ou de financements extérieurs. Cette aide bonifiée vise en particulier les titulaires d'une carte « Compétence et talent », jeunes professionnels, salariés et étudiants. Vos rapporteurs spéciaux saluent cette initiative, qui met en oeuvre les préconisations répétées de leur prédécesseur, notre ancien collègue Michel Charasse 52 ( * ) , le plafond de 7 000 euros pouvant se révéler insuffisant dans certains cas de création d'entreprise.

Selon les pays, cet appui peut être complété par un accompagnement social et une formation professionnelle.

A ce jour, le dispositif concerne trente-et-un pays , dont quatorze avaient choisi, en avril 2009, le cadre d'une convention pour la mise en oeuvre d'aides à la réinsertion signée entre l'OFII et l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) 53 ( * ) .

D'après le PAP annexé au présent PLF, en 2010 , 1 338 projets ont été ainsi été financés par l'OFII , en augmentation constante et rapide (347 projets en 2007, 561 projets en 2009).

En 2009, l' agriculture et l' élevage ont été les secteurs d'activité les plus représentés dans les pays d'Europe de l'Est, du Caucase et des Balkans, notamment en Roumanie (86 % des projets), en Bosnie (80 %), en Moldavie (43 %) et en Arménie (35 %). En ce qui concerne les pays d'Afrique subsaharienne, les principaux secteurs d'activité sont les transports (37 % des projets au Mali) et les services (40 % au Sénégal, où l'on assiste à un développement important de bureaux de conseils). Selon les données que l'OFII a pu recueillir, le nombre moyen d'emplois créés par projet (hors pays couverts par la convention OIM/OFII) s'est élevé en 2009 à 2,24 personnes hors promoteur .

La prévision de crédits prévus par le présent PLF pour l'action ( 2,5 millions d'euros en AE et CP ) est médiocrement justifiée par le PAP « compte tenu des actions engagées rappelées ci-dessus », et en décalage avec l'essor rapide des projets menés .

3. Les « autres actions bilatérales de développement solidaire » (25,5 millions d'euros en AE et en CP)

L'action n° 3 « Autres actions bilatérales de développement solidaire » vise à soutenir, d'une part, les projets participant dans les pays d'origine des migrants à une meilleure maîtrise des flux migratoires , d'autre part, ceux portés par des migrants en faveur du développement économique et social de leur pays d'origine , quelles que soient les modalités de leur contribution.

A ce titre, sont soutenus des projets liés à des politiques sectorielles (santé, formation professionnelle, etc.) identifiées avec les Etats partenaires et tendant à favoriser le maintien des populations dans les zones concernées, ainsi qu'aux objectifs du co-développement présentés ci-dessus. Ces projets, le plus souvent, s'inscrivent dans le cadre d'accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire.

Pour la mise en oeuvre, le ministère chargé de l'immigration s'appuie notamment sur l' Agence française de développement .

Les crédits demandés pour 2012 (25,5 millions d'euros en AE et en CP) visent à couvrir :

- d'une part, à hauteur de 3 millions d'euros en AE et en CP , le soutien aux projets de la coopération décentralisée , des ONG et des organisations issues des migrations . On notera que les préfectures sont mobilisées pour identifier des projets impliquant les associations de migrants ; ces crédits , qui ont conduit à la mise en oeuvre de projets au Mali, au Maroc, en Haïti et dans les Comores, sont en baisse par rapport à la LFI pour 2011 (de 0,5 million d'euros en AE et de 0,2 million d'euros en CP), dans un contexte de limitation des dotations ;

- d'autre part, pour 22,5 millions d'euros en AE et en CP , les projets financés dans le cadre du volet « développement solidaire » des actuels et futurs accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire .


* 52 Cf . en dernier lieu le rapport précité n° 101 (2008-2009), tome III, annexe 4.

* 53 Afghanistan, Arménie, Bangladesh, Bénin, Bosnie-Herzégovine, Burkina-Faso, Cameroun, République du Congo, République démocratique du Congo, Côte-d'Ivoire, Djibouti, Ethiopie, Géorgie, Guinée Conakry, Haïti, Inde, Irak (trois gouvernorats kurdes du Nord), Iran, Kenya, Kosovo, Mali, Moldavie, Pakistan, Roumanie, Sénégal, Serbie, Soudan, Sri Lanka, Togo, Tunisie et Ukraine.