M. Francis Delattre, rapporteur spécial

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

• Les crédits inscrits dans la mission « Régimes sociaux et de retraite » s'élèvent pour 2012 à 6,6 milliards d'euros en AE et en CP, soit une augmentation de 9,8 % par rapport à 2011.

• Cette hausse s'explique globalement par deux facteurs : d'une part, la baisse régulière du taux de couverture des prestations servies par les cotisations collectées par ces régimes et, d'autre part, la disparition en 2012 du dispositif de surcompensation dont certains régimes spéciaux de la mission étaient bénéficiaires .

• Pour la troisième année consécutive, les crédits demandés pour l'année à venir dépassent les plafonds de crédits fixés par la loi de programmation des finances publiques pour 2011 à 2014. Si votre rapporteur prend acte des difficultés liées à la prévision des montants des subventions d'équilibre retracées dans la présente mission, en raison, en particulier, du caractère encore non stabilisé des comportements de départ à la retraite après les réformes intervenues en 2008 et 2010, il souhaite à terme une évaluation plus fine des crédits demandés.

• Les dépenses du compte d'affectation spéciale « Pensions » (CAS Pensions) s'élèveront à 54,6 milliards d'euros , contre 52,6 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2011 (40,32 milliards d'euros étant notamment consacrés aux pensions civiles et 9,89 milliards d'euros aux pensions militaires).

• Afin d'assurer l'équilibre du programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité », le projet de loi de finances pour 2012 prévoit des augmentations des taux de contribution employeur de l'Etat de 65,39 % à 68,59 % (soit + 4,9 % ) pour les pensions de retraite des civils , et de 114,14 % à 121,55 % (soit + 6,5 % ) pour les pensions militaires .

• Sur quatre ans (2010-2013), le Gouvernement envisage une diminution globale de 3 % du nombre total de nouveaux ayants droit aux régimes de pensions des fonctionnaires civils et militaires par rapport aux prévisions effectuées avant l'adoption de la réforme des retraites. Cette révision à la baisse est la conséquence du recul de l'âge d'ouverture des droits à la retraite.

• La subvention d'équilibre de l'Etat au régime de pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat s'élève à 1,183 milliard d'euros en 2012 , en hausse de 4,3 % par rapport à 2011. La gestion des ouvriers de l'Etat du ministère de la défense appelle une consolidation juridique de leur statut, une meilleure politique de gestion des ressources humaines et une plus grande maîtrise de l'évolution du coût de leurs pensions, dans la continuité des observations formulées par un référé de la Cour des comptes d'août 2011 : en particulier, il importe de disposer d'un meilleur suivi du paiement des heures supplémentaires, incluses dans le calcul des droits à pension.

Votre rapporteur spécial souligne que les taux de réponses des ministères à son questionnaire budgétaire au 10 octobre 2011, date-limite fixée par l'article 49 de la LOLF, s'établissaient à 100 % pour la mission « Régimes sociaux et de retraite » ainsi que pour le compte d'affectation spéciale « Pensions ».

I. LA MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE »

La mission « Régimes sociaux et de retraite » retrace les subventions d'équilibre versées par l'Etat à certains régimes spéciaux. Elle est composée de trois programmes :

- le programme 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres » , qui reçoit principalement les crédits destinés à assurer l'équilibre des caisses autonomes de retraite de la SNCF et de la RATP ;

- le programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins » , qui vise à financer, via l'établissement national des invalides de la marine (ENIM), le régime spécial de sécurité sociale des marins (pensions de retraite et mesures d'action sociale et sanitaire) ;

- le programme 195 « Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers » , qui regroupe plusieurs régimes en rapide déclin démographique (caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, régimes de retraite de la SEITA, de l'Imprimerie nationale, des régies ferroviaires d'outre-mer et de l 'Office de radiodiffusion et télévision française ).

A. UN MONTANT TOTAL DE SUBVENTIONS D'ÉQUILIBRE EN FORTE AUGMENTATION POUR 2012

Le montant global des crédits inscrits dans la présente mission pour 2012, soit 6,6 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), est en forte augmentation (+ 9,8 %) par rapport à 2011 ce qui s'explique globalement par deux facteurs :

- d'une part, la baisse régulière du taux de couverture des prestations servies par les cotisations collectées par ces régimes ;

- d'autre part, la disparition en 2012 du dispositif de surcompensation dont certains régimes spéciaux de la mission étaient bénéficiaires.

1. Des régimes structurellement déficitaires

Comme le rappelle le projet annuel de performances, les régimes spéciaux dont il est question dans la présente mission, sont pour la plupart très anciens.

Ils se caractérisent tous par un fort déséquilibre entre, d'une part, le nombre de cotisants et, d'autre part, le nombre de pensionnés . Ce déséquilibre est maximal pour les régimes dits « fermés » 1 ( * ) , comme celui des mines ou de la SEITA, et est très important pour les régimes des marins, de la SNCF et de la RATP.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des ratios démographiques de ces principaux régimes.

Ratios cotisants/retraités des principaux régimes

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

SNCF

0,68

0,67

0,67

0,67

0,68

0,68

0,67

RATP

1

1

1,01

1

0,98

0,99

0,96

Marins

-

-

-

-

-

0,29

0,28

Mines

-

-

-

-

-

0,02

0,02

SEITA

-

-

-

-

-

-

0,04

Source : d'après les données du PAP 2012 relatif à la présente mission

S'agissant des régimes de retraite de l'Imprimerie nationale, de la caisse de retraites des régies ferroviaires d'outre-mer et de l'Office de radiodiffusion et télévision française (ORTF), ils sont, quant à eux, considérés comme quasiment « éteints » puisqu'ils n'enregistrent que quelques centaines, voire quelques dizaines, de bénéficiaires (on compterait ainsi, en 2012, 3 affiliés au régime de l'Imprimerie nationale, 214 bénéficiaires de la caisse des retraites des régies ferroviaires d'outre-mer et 236 bénéficiaires du régime de l'ORTF).

2. Des dépenses globalement en augmentation et des « recettes » peu dynamiques

Il résulte de ces déséquilibres démographiques une baisse régulière du taux de couverture des prestations versées par les cotisations sociales collectées, ce qui rend impossible l'autofinancement de ces régimes et conduit donc à un appel à la solidarité nationale.

a) L'évolution des dépenses des principaux régimes en 2012

A l'exception du régime des mines qui devrait enregistrer en 2012, comme les années précédentes, une diminution des prestations versées en raison de la disparition progressive de ses bénéficiaires, les principaux autres régimes spéciaux de la mission présenteraient une augmentation, plus ou moins forte, du montant global des prestations versées l'an prochain .

Evolution des prestations nettes servies par les principaux régimes spéciaux de la mission

(en millions d'euros)

2009

2010

%

2011

%

2012

%

SNCF

5 030,9

5 063,7

+0,7 %

5 148,6

+1,7 %

5 227,3

+1,5 %

RATP

869,0

895,4

+3,0 %

928,8

+3,7 %

956,9

+3,0 %

Marins

1 082,8

1 078,7

-0,4%

1 087,4

+ 0,8%

1 094,1

+ 0,6%

Mines

1 800,6

1 770,4

-1,7 %

1 746,2

-1,4 %

1 739,8

-0,4 %

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - rapport de septembre 2011

Les prestations versées par le régime de la RATP resteraient, en particulier, assez dynamiques en 2012 en raison d'un pic anticipé de départs à la retraites compte tenu de la fin programmée, au 30 juin 2012, de la période transitoire mise en place pour appliquer la réforme de 2008 ( cf. infra ).

La progression des prestations vieillesse versées par la SNCF demeurerait, quant à elle, relativement modérée (+ 1,5 %) comme en 2011.

S'agissant, enfin, des prestations servies par le régime des marins, elles seraient, de nouveau, en hausse en 2012 en raison notamment de la revalorisation moyenne des pensions.

b) Des « recettes » peu dynamiques

En revanche, les régimes spéciaux de la présente mission devront faire face en 2012 à un tarissement de leurs ressources en raison, d'une part, du faible dynamisme de leurs cotisations et, d'autre part, de l'extinction l'an prochain du dispositif de surcompensation dont certains régimes étaient jusqu'alors bénéficiaires.

Le tableau suivant retrace l'évolution des cotisations, impôts et produits affectés aux différents régimes de la présente mission (hors mécanismes de compensation et subventions d'équilibre).

Evolution des cotisations, impôts et produits affectés
aux principaux régimes spéciaux de la mission

(en millions d'euros)

2009

2010

%

2011

%

2012

%

SNCF

1 959,1

1 961,8

+0,1%

1 925,3

-1,9%

1 961,0

+1,9%

RATP

425,3

429,5

+1,0%

434,2

+1,1%

435,2

+0,2%

Marins

164,3

153,5

-6,5%

155,4

+1,2%

156,6

+0,8%

Mines

40,0

34,3

-14,2%

30,4

-11,3%

26,4

-13,1%

Source : commission des comptes de la sécurité sociale - rapport de septembre 2011

A l'exception du régime des mines qui enregistrera, une nouvelle fois, en 2012 une baisse de ses cotisations, baisse qui suit le rythme de la diminution de ses actifs, les autres régimes devraient voir le montant de leurs cotisations et impôts affectés augmenter l'an prochain, mais dans de faibles proportions.

Les cotisations sociales versées par les agents de la SNCF repartiraient ainsi légèrement à la hausse en raison d'une baisse moins prononcée que les années précédentes du nombre de cotisants et d'une évolution des salaires plus favorable.

En revanche, celles alimentant le régime de la RATP ne progresseront que de 0,2 % en raison de la poursuite de la baisse du nombre de cotisants du régime.

Quant au régime des marins, après un recul de 6,5 % en 2010, ses cotisations sociales seraient orientées à la hausse en 2012, comme en 2011, compte tenu d'une baisse moins marquée du nombre de cotisants.

c) La fin du dispositif de surcompensation en 2012

Surtout, outre le faible dynamisme des « ressources naturelles » de ces régimes, que constituent les cotisations sociales, ces derniers doivent faire face en 2012 à la disparition totale du dispositif de surcompensation.

En effet, afin de compenser des disparités démographiques entre les régimes spéciaux et de résorber les inégalités de capacité contributive entre les assurés de ces régimes, la loi de finances n° 85-1403 du 30 décembre 1985 avait instauré un mécanisme de compensation spécifique aux régimes spéciaux de retraite (fonctionnaires de l'Etat, caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales - CNRACL -, mines, marins, SNCF, RATP, banque de France, SEITA, etc .), appelée surcompensation.

Celle-ci mettait principalement à contribution la CNRACL et le régime des fonctionnaires civils. Elle bénéficiait a contrario essentiellement aux régimes de la SNCF et des mines .

Compte tenu des transferts devenus trop importants entre régimes, la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu la disparition progressive de la surcompensation qui doit prendre définitivement fin au 1 er janvier 2012 .

3. Des subventions d'équilibre en forte augmentation
a) Une hausse de près de 10 %

Les deux éléments qui viennent d'être exposés, soit la baisse régulière du taux de couverture des prestations par les cotisations ainsi que la disparition du produit de la surcompensation , expliquent globalement la forte hausse des subventions d'équilibre versées par l'Etat aux régimes de la présente mission.

En 2012, le montant global de crédits retracés dans la mission, soit 6,6 milliards d'euros en AE et en CP, est, en effet, en hausse de plus 9 % par rapport à 2011 .

La subvention d'équilibre versée à la caisse autonome de la SNCF représentera, à elle seule, la moitié de ces crédits.

En termes de progression, c'est la subvention versée au régime minier qui connaîtra, comme les années passées, la plus forte hausse (+ 13,4 %).

Répartition des crédits par programme et action

(en euros)

Intitulé du programme et de l'action

Autorisations d'engagement - Crédits de paiement

Exécution 2010

Ouvertes en LFI pour 2011

Demandées pour 2012

Variation 2011/2012

Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

3 697 151 549

3 877 046 488

4 080 200 000

+5,2 %

Régime de retraite du personnel de la SNCF

3 032 187 000

3 189 560 296

3 359 100 000

+5,3 %

Régime de retraite du personnel de la RATP

505 500 000

526 286 192

552 000 000

+4,9 %

Autres régimes 2 ( * )

159 464 549

161 200 000

169 100 000

+4,9 %

Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

767 418 247

797 278 279

856 456 092

+7,4 %

Pensions de retraite des marins

767 418 247

789 328 279

849 278 092

+7,6 %

Action sanitaire et sociale des marins

0

7 950 000

7 178 000

-9,7 %

Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers

1 151 226 087

1 353 490 000

1 682 050 000

+24,3 %

Versements au Fonds spécial de retraite de la caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines

1 017 900 000

1 209 000 000

1 371 580 000

+13,4 %

Régime de retraite de la SEITA

128 262 000

139 420 000

55 500 000

-6,0 %

Caisse des retraites de l'imprimerie nationale

60 533

70 000

70 000

0,0 %

Caisse des retraites des régies ferroviaires d'outre-mer

4 391 454

4 400 000

4 300 000

-2,3 %

Versements liés à la liquidation de l'ORTF

612 100

600 000

600 000

0,0 %

Contributions exceptionnelles au compte d'affectation spéciale « Pensions »

-

-

250 000 000

100 %

Total

5 615 795 883

6 027 814 767

6 618 706 092

+9,8 %

Source : d'après le rapport annuel de performances pour 2010 et le projet annuel de performances pour 2012

La forte progression des crédits de la mission en 2012 tient également à l'inscription d'une contribution exceptionnelle au CAS « Pensions » de 250 millions d'euros . Selon les données du projet annuel de performances, il s'agirait ainsi de « constituer une dotation centralisée de crédits destinés à alimenter le CAS Pensions, facilement mobilisable afin de se prémunir contre une moindre recette au titre de la contribution employeur et qu'il n'est pas possible de répartir finement dans les contributions des ministères employeurs au stade du PLF ».

Votre rapporteur spécial s'interroge sur cette mesure exceptionnelle et souhaite que l'examen en séance publique de la présente mission soit l'occasion pour le Gouvernement d'apporter des éléments complémentaires d'explication à ce sujet.

b) Un poids croissant dans les recettes des régimes spéciaux

Compte tenu de leur forte augmentation, les subventions d'équilibre versées par l'Etat représentent désormais une part importante des ressources des différents régimes : la moitié du budget de la caisse autonome de la RATP, plus de 60 % de celui de la caisse autonome de la SNCF et plus des trois-quarts des produits des régimes des marins et des mines.

En 2012, la subvention versée au régime de la SEITA ne représentera qu'un tiers des ressources du régime, contre 87 % en 2011. Cette évolution s'explique par l'inscription d'importants produits exceptionnels (à hauteur de 103,4 millions d'euros) dans les comptes prévisionnels 2012 du régime qui correspondent à la cession, en une seule fois, du portefeuille d'actifs du régime 3 ( * ) . Cette mobilisation de ressources ne sera donc que ponctuelle et minore d'autant la subvention d'équilibre qui doit être versée par l'Etat au régime de la SEITA en 2012.

Part de la subvention de l'Etat dans le budget des principales caisses de retraite relevant de la mission « Régimes sociaux et de retraites »

(en millions d'euros)

Subvention de l'Etat

Total des produits

Part de la subvention de l'Etat dans le régime

Caisse autonome de la SNCF

3 359,1

5 375,6

62,5 %

Caisse autonome de la RATP

552,0

994,2

55,5 %

Régime de retraite des marins

854,5

1 117,2

76,5 %

Fonds de retraite des mines

1 371,6

1 786,7

76,8 %

Retraités de la SEITA

55,5

164,6

33,7 %

Source : d'après les données du PAP 2012 de la présente mission

c) Un dépassement de 130 millions d'euros des plafonds fixés par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014

L'écart constaté entre les crédits inscrits pour 2012 dans le cadre de la présente mission (hors contribution au CAS Pensions) et la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 s'élève à 130 millions d'euros .

Ecart entre les crédits inscrits dans le cadre du PLF 2012 et la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014


(en millions d'euros)

LPFP 2012

(hors CAS Pensions)

PLF 2012 au format LPFP

(hors CAS Pensions)

PLF 2012

Plafond AE

6 239

6 369

6 619

Plafond CP

6 239

6 369

6 619

Source : PAP 2012 de la présente mission

Votre rapporteur spécial rappelle que les projets de loi de finances pour 2010 et 2011 avaient déjà dû revoir à la hausse les plafonds de crédits de la mission , fixés par la précédente loi de programmation des finances publiques.

S'il prend acte des difficultés liées à la prévision des montants des subventions d'équilibre retracées dans la présente mission, en raison, en particulier, du caractère encore non stabilisé des comportements de départ à la retraite après les réformes intervenues en 2008 et 2010 , il souhaite à terme une évaluation plus fine des crédits demandés.

B. L'EFFET DES RÉFORMES DE 2008 ET DE 2010 SUR L'ÉVOLUTION À VENIR DES SUBVENTIONS D'ÉQUILIBRE

Les régimes spéciaux de retraite ont connu récemment deux importantes réformes : la première en 2008 était spécifique aux régimes spéciaux ; la seconde, débattue à l'automne dernier, concernait l'ensemble des régimes de retraites du secteur privé et du secteur public. Ces deux réformes n'auront qu'un effet très progressif sur le montant des subventions d'équilibre versées dans le cadre de la présente mission .

a) Rappel des principes de la réforme de 2008

De manière générale, l'âge d'ouverture des droits, dans les régimes spéciaux, est variable - de 40 à 60 ans - et diffère selon le métier exercé et l'ancienneté.

Les modifications entrées en vigueur le 1 er avril 2007 dans le régime de la Banque de France et le 1 er juillet 2008 dans six autres régimes spéciaux - SNCF, RATP, Opéra de Paris, Comédie française, Industries électriques et gazières, Clercs et employés de notaires - ont conduit à un rapprochement partiel des droits et à un alignement progressif, avec un décalage dans le temps, des barèmes de décote et de surcote sur ceux applicables dans la fonction publique et le régime général.

Toutefois, la réforme retenue en 2007 et 2008 pour les régimes spéciaux a maintenu le principe d'une spécificité des droits .

Les principaux paramètres de convergence de ces régimes avec ceux de la Fonction publique 4 ( * ) sont les suivants :

- passage de 37,5 à 40 ans (en 2012) puis à 41 ans (en 2016) de la durée d'assurance pour bénéficier d'une retraite à taux plein ;

- indexation des pensions sur les prix (et non plus sur les salaires) à compter de 2009 ;

- introduction d'une décote et d'une surcote ;

- suppression des bonifications (validations gratuites de trimestres) pour les nouveaux recrutements ;

- suppression des « clauses-couperets », c'est-à-dire de la mise à la retraite automatique des agents atteignant leur âge d'ouverture des droits à la retraite.

b) Une application à compter de 2017 de la réforme des retraites de 2010

La réforme des retraites de 2010 a également été transposée réglementairement aux régimes spéciaux . Mais celle-ci ne prendra effet qu'à partir de 2017 afin de respecter le rythme de montée en charge prévue par la réforme de 2008.

Cet étalement dans le temps a ainsi pour objet principal de ne pas remettre en cause les « accords » conclus en 2008 : ceux-ci prévoient que les mesures de rapprochement des régimes spéciaux vers le régime de la fonction publique, lui-même réformé en 2003, ne seront pleinement effectives qu'en 2016.

c) L'effet de ces deux réformes sur le montant des subventions d'équilibre : le cas de la Caisse autonome de retraites de la SNCF

Selon les données transmises à votre rapporteur spécial, ces deux réformes n'entraîneront qu'une diminution très progressive de la contribution de l'Etat aux régimes spéciaux dans les années à venir.

Ainsi, s'agissant de la SNCF - soit le plus important régime spécial de la mission -, la subvention d'équilibre versée par l'Etat demeurera supérieur à 2 milliards d'euros à l'horizon 2030 .

Les prévisions 2015-2030 de la caisse de retraite de la SNCF

(en millions d'euros courants)

2015

2017

2019

2021

2023

2025

2027

2030

Montant des pensions versées

5 084,0

5 060,0

4 933,0

4 803,0

4 650,0

4 525,0

4 473,0

4 385,0

Frais de gestion et divers

47,0

47,0

46,0

45,0

43,0

42,0

42,0

41,0

Total des charges

5 131,0

5 107,0

4 979,0

4 848,0

4 693,0

4 567,0

4 515,0

4 426,0

Produit des cotisations

1 929,0

1 907,0

1 948,0

1 994,0

2 049,0

2 101,0

2 138,0

2 201,0

Produits divers

0,8

0,8

0,8

0,8

0,8

0,8

0,8

0,8

Contribution de l'Etat

3 201,0

3 199,0

3 030,0

2 853,0

2 643,0

2 465,0

2 377,0

2 224,0

Source : d'après les réponses au questionnaire de votre rapporteur spécial

C. LE PILOTAGE DÉLICAT DE LA MISSION

Comme l'a, à de nombreuses reprises, souligné notre collègue Bertrand Auban, alors rapporteur spécial, le pilotage de la présente mission apparaît assez délicat :

1) celle-ci retrace des dépenses obligatoires et, à cet égard, aucune fongibilité n'est envisageable entre les programmes ;

2) elle ne regroupe pas tous les crédits destinés à financer des dispositifs de préretraite ou des subventions versées à des régimes de retraites ;

3) les marges de manoeuvre du responsable du programme 198 - le directeur général des infrastructures, des transports et de la mer - semblent réduites depuis la modification des décrets constitutifs des deux caisses de retraites RATP et SNCF . En effet, à la suite de la décision prise par le comité de modernisation des politiques publiques en 2008, la tutelle de ces deux caisses est dorénavant exercée exclusivement par les ministres du budget et de la sécurité sociale ;

4) même si le dispositif d'évaluation de la performance de la présente mission a fait l'objet en 2010 d'un effort d'harmonisation entre programmes, la comparaison entre les différents régimes demeure difficile , compte tenu des spécificités de gestion de chacune de ces caisses ou régimes de retraites.

Tableau comparatif des coûts de gestion des régimes de retraite

(en euros)

Régimes de retraite

Dépenses de gestion pour 1 euro de prestations servies

Coût unitaire d'une primo liquidation de pension de retraite

Taux de récupération des « indus »
(en %)

2010

(réalisé)

2012

(cible)

2010

(réalisé)

2012 (cible)

2010

(réalisé)

2012 (cible)

Marins

0,84

0,83

839,00

850,00

90,00

93,00

RATP

0,74

0,75

341,00

372,00

92,68

95,00

SNCF

0,38

0,41

340,00

313,00

94,70

97,00

Mines

1,31

1,29

198,23

195,00

98,00

97,00

SEITA

0,23

0,24

311,63

323,90

93,50

95,00

Source : d'après les données du PAP 2012 de la présente mission

Le projet annuel de performances pour 2012 introduit un nouvel indicateur de mission consistant en une moyenne pondérée du coût des primo-liquidations pour les quatre principaux régimes de la mission. Sa lecture se heurte aux mêmes difficultés que celles constatées pour le dispositif de performance de l'ensemble de la mission.


* 1 Les pensions de retraite de ces régimes sont toujours servies mais sans nouvel adhérent.

* 2 Il s'agit des congés de fin d'activité et des compléments de retraite dans le secteur du transport routier ainsi que des pensions des anciens agents des chemins de fer d'Afrique du Nord et d'Outre-mer.

* 3 Comme le rappelle le projet annuel de performances de la mission, « lors du processus de privatisation de la SEITA, l'entreprise a versé au régime une soulte de 62 millions d'euros. L'échéancier de mobilisation de ces ressources prévoyait une montée en charge progressive des prélèvements. De facto, les sommes prévues chaque année pour contribuer au financement du régime étaient inférieures aux gains issus de la gestion de ces actifs. Ce mécanisme a permis la croissance de la valeur de ce portefeuille qui devrait s'élever à 103,4 millions d'euros fin 2011. Il a été décidé, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012, de mobiliser en une seule fois la valeur du portefeuille ».

* 4 L'objet de la réforme de 2008 des régimes spéciaux était d'introduire des dispositions analogues à celles adoptées pour les régimes de la fonction publique en 2003 avec, sauf exception, un décalage de calendrier de 4 ans et demi (la réforme est entrée en vigueur au 1 er juillet 2008, alors que celle de la fonction publique était entrée en vigueur le 1 er janvier 2004).