M. Yvon COLLIN et Mme Fabienne KELLER, rapporteurs spéciaux

TROISIÈME PARTIE
LE COMPTE CONCOURS FINANCIER
« PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS »

Le compte spécial « Prêts à des États étrangers » retrace les opérations liées aux prêts pratiqués par l'État en faveur de l'aide au développement et, depuis mai 2010, dans le cadre du soutien financier européen décidé en faveur de la Grèce . Il comprend les opérations de versement et de remboursement relatives aux prêts consentis dans ce cadre.

Le solde du compte « Prêts à des États étrangers » est prévu pour être négatif à l'issue de l'exercice 2014. Le déficit est évalué à plus de 793 millions d'euros.

Le solde de ce compte a beaucoup varié au cours des dernières années : un déficit était déjà prévu en 2013 (357 millions d'euros), tandis que l'exécution 2012 était légèrement positive (22,4 millions d'euros). À l'inverse, le prêt accordé à la Grèce a eu pour conséquence que les exercices 2010 et 2011 soient fortement déficitaires (respectivement 4,15 milliards et 6,79 milliards d'euros). L'exercice 2009 avait donné lieu à un déficit de 108 millions d'euros. Il faut remonter à 2008 pour retrouver un excédent significatif (661 millions d'euros).

Ainsi, ce compte n'a pas vocation à être structurellement déficitaire , dans la mesure où, à terme, les remboursements des États partenaires doivent venir couvrir les décaissements. Mais son solde dépend du rythme auquel les prêts sont accordés et celui auquel ils sont remboursés, qui peuvent être très différents 6 ( * ) .

Équilibre du compte « Prêts à des États étrangers » prévu pour 2013

(en millions d'euros)

Sections

Recettes

Dépenses (CP)

Solde

Section n° 1

Prêts de la RPE

356,7

420,0

- 63,3

Section n° 2

Prêts pour consolidation de dettes

181,3

703,7

- 522,4

Section n° 3

Prêts à l'AFD

162,5

370,0

- 207,5

Section n° 4

Prêts aux États de la zone euro

0,0

0,0

-

Total

700,5

1 493,7

- 793,2

Source : PAP de la mission « Prêts à des États étrangers » annexé au PLF pour 2014

La mission correspondante est dotée par le présent projet de loi de finances de 1,511 milliard d'euros en AE et de 1,494 milliards d'euros en CP (crédits évaluatifs). Par rapport aux prévisions inscrites dans la LFI pour 2013, ces crédits sont en forte hausse (+ 40 % en AE et + 45 % en CP).

Crédits de la mission « Prêts à des États étrangers »

(en millions d'euros)

Programmes

AE

CP

LFI 2013

PLF 2014

Évolution 2013/2014

LFI 2013

PLF 2014

Évolution 2013/2014

851 « Prêts à des États étrangers, de la Réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructure »

380,0

360,0

- 5 %

447,0

420,0

- 6 %

852 « Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France »

250,2

703,7

+ 181 %

250,2

703,7

+ 181 %

853 « Prêts à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers »

447,0

447,0

-

330,0

370,0

+ 12 %

854 « Prêts aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro »

0,0

0,0

-

0,0

0,0

-

Total

1 077,2

1 510,7

+ 40 %

1027,2

1 493,7

+ 45 %

Source : PAP de la mission «Prêts à des États étrangers » annexé au PLF pour 2014

Le compte est organisé en quatre sections, selon le type de prêt.

A. LES PRÊTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS DE LA RPE

La première section retrace, respectivement en dépenses et en recettes, le versement et le remboursement des prêts consentis à des États émergents en vue de faciliter la réalisation de projets d'infrastructure. En pratique, ces prêts sont mis en place dans le cadre d'accords bilatéraux, au titre de la « Réserve pays émergents » (RPE), et la réalisation des infrastructures doit faire appel à des biens et services d'origine française.

Ces financements contribuent ainsi à soutenir l'expansion internationale des entreprises françaises .

La mise en place d'une aide au titre de la RPE se traduit par la signature d'un protocole intergouvernemental avec les autorités du pays bénéficiaire, pour un projet précis. Les accords sont mis en oeuvre, dans le cadre d'une convention avec l'emprunteur, par la société Natixis, agissant pour le compte de l'État français. Les pays éligibles sont choisis par le ministre chargé de l'économie, sur la base des règles définies par l'OCDE.

Pour 2014, 360 millions d'euros en AE sont demandés, au regard des nouveaux engagements, principalement dans les secteurs du transport (ferroviaire, métro, aérien), de l'environnement (secteur de l'eau) et de l'énergie. Ce montant est en légère baisse par rapport à l'an dernier (- 20 millions d'euros).

Vos rapporteurs spéciaux regrettent la diminution des crédits sur cet outil aussi fondamental pour la présence industrielle française dans les pays émergents .

B. LES PRÈTS À DES ÉTATS ÉTRANGERS POUR CONSOLIDATION DE DETTES

La deuxième section retrace, respectivement en dépenses et en recettes, le versement et le remboursement des prêts accordés à des États étrangers pour la consolidation de leur dette envers la France . Ces opérations de refinancement participent des traitements de dettes consentis par notre pays dans le cadre du Club de Paris ou sur une base bilatérale. Il retrace les crédits requis pour le refinancement de dettes.

L'opération consiste à rembourser des prêts anciens au moyen de prêts nouveaux, accordés aux conditions négociées dans le cadre du Club de Paris : ces nouveaux prêts constituent les dépenses du programme. Il convient de préciser que leur remboursement, en principal ou en intérêts, vient abonder le budget de l'État (imputé en recettes sur le compte « Prêts à des États étrangers ») sauf annulation de la créance consolidée par un accord ultérieur.

Les crédits inscrits par le présent PLF s'élèvent à 704 millions d'euros en AE comme en CP, contre 250 millions d'euros l'an passé.

Ce montant correspond, pour l'essentiel :

- au traitement de la dette du Zimbabwe , qui pourrait intervenir en 2014, dans le cadre du dialogue entre les autorités zimbabwéennes et les institutions financières internationales, sous l'égide de la banque africaine de développement ;

- au traitement de la dette du Soudan - dans le cadre de l'initiative PPTE n'ayant pas encore atteint le point de décision - qui pourrait intervenir au second semestre 2014 ;

- au traitement de la dette de la Somalie - dans le cadre de l'initiative PPTE -, peut-être au cours de l'année 2014, selon le contexte politique local.

C. LES PRÊTS À L'AFD

La troisième section retrace, respectivement en dépenses et en recettes, le versement et le remboursement des prêts octroyés à l'Agence française de développement (AFD).

Il s'agit de mettre à la disposition de l'AFD une « ressource très concessionnelle » (RCS) , sous forme de prêt d'une durée de 30 ans, dont dix ans de différé, assorti d'un taux de 0,25 %.

L'Agence utilise cette ressource pour adosser les prêts, très concessionnels, qu'elle accorde aux pays bénéficiaires de l'Initiative PPTE et, à titre subsidiaire, afin de constituer des provisions pour le risque commercial lié aux prêts concessionnels qu'elle consent au secteur extra-étatique.

D. LES PRÊTS AUX ÉTATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNE DONT LA MONNAIE EST L'EURO

La quatrième section retrace, respectivement en dépenses et en recettes, le versement et le remboursement des prêts consentis aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro (pour le moment l'État grec seulement).

Ce programme, a été créé par la loi de finances rectificative du 7 mai 2010 afin de permettre à la France de contribuer au plan de soutien décidé en faveur de la Grèce, en vue de préserver la stabilité financière au sein de la zone euro. Les AE correspondantes, 16,8 milliards d'euros, ont été engagées en totalité au moment de l'activation du plan.

Le deuxième plan d'assistance, décidé en juillet 2011, a confié au Fonds européen de stabilité financière (FESF) les déboursements futurs, y compris le reste à débourser des prêts bilatéraux. Ainsi, sur les 16,8 milliards d'euros, seuls 11,4 milliards ont été versés et les 5,4 milliards restants seront annulés.

La dernière tranche de prêt bilatéral à la Grèce a donc été versée en décembre 2011 et ce programme va « être mis en sommeil » , aucune dépense n'ayant eu lieu en 2012, ni aucun mouvement n'étant prévu avant le premier remboursement, qui devrait intervenir en 2020. Seule une régularisation a eu lieu en 2013, à hauteur de 17 millions d'euros , afin de tenir compte de la non-participation de la Slovaquie et au retrait de l'Irlande et du Portugal du mécanisme d'aide.


* 6 Les prêts accordés peuvent avoir des durées de maturité de 25 à 40 ans.